République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 29 novembre 2013 à 17h
1re législature - 1re année - 2e session - 8e séance
M 2176
Débat
Le président. Nous poursuivons nos urgences avec le point 57 de notre ordre du jour, soit la motion 2176. Madame Meissner, vous avez la parole.
Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Comme nous l'avions dit, l'objectif est surtout de pouvoir renvoyer cette motion à la commission judiciaire, car elle demande un examen de cette pratique. Vous savez que c'est un concordat des cantons latins qui gère l'exécution des peines. Il nous a donc paru urgent, au vu des récents événements d'une part, et du fait qu'il fallait prendre ces décisions en commun d'autre part, de pouvoir expliquer en commission qu'il est inutile de s'imaginer trouver des solutions à l'échelle cantonale uniquement. C'est la raison pour laquelle, lors des extraits, je vous ai aussi mentionné le rapport de la commission interparlementaire chargée du contrôle de l'exécution du concordat latin sur la détention pénale. Ce rapport se réfère à la dernière conférence latine qui date du mois de mars 2013. Bien qu'antérieur aux événements malheureux, ce rapport disait quand même qu'il fallait retrouver de la cohérence au niveau de la chaîne pénale. Pour ces raisons, le groupe UDC vous demande de renvoyer cette motion à la commission judiciaire, afin qu'il y ait véritable harmonisation et coordination des pratiques en vigueur en matière d'exécution des peines. Peut-être n'êtes-vous pas d'accord avec certaines invites, c'est possible. Mais je crois qu'il est surtout urgent de se poser les bonnes questions, d'autant que le centre de détention Curabilis ouvrira ses portes ici en avril 2014. Nous avons un certain nombre d'établissements qui verront le jour à Genève, et je crois qu'il est urgent qu'on puisse vraiment avoir une discussion ouverte là-dessus. Merci.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, l'harmonisation demandée par la motion que vous avez sous les yeux a déjà commencé, puisque dans tous les cantons romands - à l'exception de celui de Neuchâtel - de mêmes types de textes ont été déposés devant les parlements. Ça s'est fait sous forme de motions dans les cantons du Jura et de Vaud le 8 et le 2 octobre, de requête à Fribourg le 10 octobre, et de postulat urgent en Valais en date du 12 novembre. Il n'y a rien eu dans les cantons de Neuchâtel et du Tessin. Cette motion - vous avez lu les invites - demande une harmonisation sur le plan romand. Sur le plan romand, la conférence des chefs de départements de justice et police procède régulièrement à des initiatives permettant cette harmonisation et cette uniformisation. C'est ce qui a été fait dernièrement, ce qui rend pratiquement vides de sens les différentes invites qui vous sont faites. En revanche, l'avant-dernière invite - qui est de mettre une fin définitive aux sorties éducatives pour les criminels violents, sexuels ou dangereux pour la société - ne peut pas être mise en oeuvre dans la mesure où il existe des dispositions de droit fédéral qui ne peuvent pas être modifiées par des décisions du concordat latin. Le groupe PDC vous recommande de renvoyer cet objet à la commission judiciaire. Je vous remercie.
Mme Sarah Klopmann (Ve). Les Verts sont formellement opposés à certaines invites de cette motion, notamment la fin définitive des sorties éducatives pour les criminels. Il est vrai qu'on doit avoir une réflexion assez approfondie sur le service de l'application des peines et mesures (SAPEM). Il est vrai aussi que les événements récents nous ont montré qu'il y avait des problèmes. Ce qui est arrivé est absolument abominable et ne doit plus jamais se reproduire. Mais ce que nous devons revoir, ce sont les procédures, non pas le concept de réinsertion, qu'il faut absolument maintenir par ailleurs. De plus, les détenus dits dangereux vont forcément finir leur peine une fois ou l'autre et sortir de prison. Et si on n'a pas pu préparer cette sortie, qu'est-ce qui va se passer ? Ce sera encore pire après. La préparation à la sortie, c'est notamment une resociabilisation des détenus, des thérapies et une réadaptation. C'est vrai que cet accompagnement est un bienfait pour le détenu, mais il ne faut pas oublier que c'est également un bienfait pour toute la société. Si nous voulons que la personne puisse réussir son retour à l'extérieur et éviter les récidives, nous devons absolument maintenir ces sorties. En outre, les criminels dangereux ont souvent été jugés soit selon l'article 59, soit selon l'article 64 du code pénal, qui concernent les personnes présentant de graves troubles du comportement, des troubles mentaux ou des maladies psychiques, telle par exemple la schizophrénie. A ces articles, le code pénal prévoit justement une peine, un traitement institutionnel et un contrôle régulier. Les thérapies et sorties accompagnées font ainsi partie intégrante de ce processus de traitement institutionnel. C'est donc une mauvaise idée que de vouloir les supprimer, puisqu'elles sont simplement prévues par les dispositions fédérales. Je le redis, c'est la procédure que nous devons revoir, pas le concept de réinsertion. Notre réflexion doit maintenant se tourner plutôt vers la sortie des détenus que vers l'enfermement. Voilà, merci. (Quelques applaudissements.)
M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le Mouvement Citoyens Genevois va évidemment soutenir le renvoi de cette motion à la commission judiciaire. Comme il a été expliqué, plusieurs parlements romands ont déjà pris des mesures et sont en train d'étudier cette problématique. Nous pensons que c'est une bonne opportunité de nous pencher aujourd'hui sur cette problématique, qui a malheureusement défrayé la chronique il y a quelque temps. Quand j'entends Mme Klopmann - et vous transmettrez, Monsieur le président - qui s'oppose simplement au fait de mettre une fin définitive aux sorties éducatives pour les criminels, j'aurais aimé qu'elle lise le restant de la phrase, à savoir «pour les criminels violents, sexuels ou dangereux pour la société». On ne parle pas juste des criminels en général, mais bien d'une spécificité de criminels réellement dangereux. Preuve en est le drame qui a défrayé la chronique il y a quelque temps. Je ne peux donc que vous enjoindre - même si vous n'êtes pas d'accord avec l'ensemble de cette motion - à la renvoyer en commission, afin qu'on puisse au moins l'étudier, déterminer quelles sont les mesures proposées aujourd'hui par le département et enfin avancer dans ce dossier. Je vous remercie, Messieurs-dames.
Mme Nathalie Fontanet (PLR). Le groupe PLR n'entend pas faire le débat ici et maintenant, ni déterminer quels sont les points positifs et négatifs de ce texte. En revanche, nous estimons que c'est effectivement un travail qui devrait être fait en commission, et sommes de plus certains que cela rejoindra les préoccupations du magistrat et une partie des mesures déjà prises au vu du récent événement. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la députée. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission judiciaire, que je soumets au vote de l'assemblée.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2176 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 53 oui contre 20 non et 8 abstentions.