Séance du jeudi 29 août 2013 à 14h
57e législature - 4e année - 10e session - 64e séance

M 2092
Proposition de motion de Mmes et MM. Jacqueline Roiz, Miguel Limpo, Vincent Maitre, Irène Buche, Marc Falquet, Mathilde Captyn, Sophie Forster Carbonnier, François Gillet, Esther Hartmann, Anne Marie von Arx-Vernon, Elisabeth Chatelain, Bertrand Buchs, Christina Meissner, François Lefort, Mauro Poggia, Anne Mahrer, François Haldemann, Brigitte Schneider-Bidaux, Serge Dal Busco, Catherine Baud, Beatriz de Candolle Homophobie : la lutte contre les discriminations doit s'institutionnaliser !

Débat

Le président. Nous traitons maintenant le point 20 de l'ordre du jour, la motion 2092. Catégorie II, trois minutes par groupe. La parole est à la première motionnaire, Mme Jacqueline Roiz.

Présidence de M. Antoine Droin, premier vice-président

Mme Jacqueline Roiz (Ve). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha.) En 2009, dans son rapport sur la motion 1823, le Conseil d'Etat affirmait que l'orientation sexuelle ne devait aucunement être un élément discriminatoire ou victimisant. Depuis, des progrès ont été constatés, que ce soit au niveau fédéral ou cantonal: au niveau fédéral, évidemment, il y a eu le partenariat, l'adoption possible par le partenaire du parent reconnu, et puis au niveau cantonal nous avons quand même observé avec beaucoup de plaisir le soutien du Conseil d'Etat à différentes conférences, à des concours, également à la création d'un site web, etc. Il y a eu énormément d'actions ponctuelles, et pourtant des préjugés existent, nous le savons, et insidieusement font des dégâts au niveau social, humain et sociétal. L'homosexualité est devenue moins taboue, on peut le voir parmi nos amis qui viennent maintenant accompagnés de leur compagnon ou de leur compagne, mais ils le font toujours avec une certaine gêne, et cela constitue encore un moment particulier. Peut-être le fantôme de l'exclusion subsiste-t-il et rend ces personnes craintives. Avec toutes ces avancées, on se demande alors pourquoi ! Pourquoi tant de crispation, pourquoi un vocabulaire homophobe utilisé sans limite... (Brouhaha.) ...pourquoi les jeunes homosexuels ont-ils trois à cinq fois plus de risques de tenter le suicide que des jeunes hétérosexuels ? Les chiffres sur les transgenres, en plus, sont flous, mais on peut imaginer que les cas avérés sont autant ou même peut-être plus nombreux. Cette population homosexuelle, bi et transgenre a aussi plus tendance à la dépression, avec des conséquences catastrophiques pouvant mener à l'échec scolaire, au détachement du cursus professionnel, avec un impact sur l'ensemble de la société et de son économie. Il s'agit d'un type de violence qui commence déjà par des injures répétées à l'école, avec des enfants qui n'ont pas conscience de véhiculer des préjugés. Cette violence se perpétue ensuite dans la rue et quelques fois, malheureusement, aboutit aussi à des agressions physiques, ce qui renforce le sentiment d'exclusion chez les personnes concernées.

Cette motion propose dès lors des mesures au niveau cantonal et cible la population dans son ensemble, tous âges confondus: à l'école mais aussi dans les clubs sportifs, dans les services de l'Etat, y compris dans les organes judiciaires et de police. Elle vise à promouvoir, au sein des institutions, une charte éthique qui permette d'aborder systématiquement la question du respect des diversités sexuelles et de genre. Ainsi, par exemple, les contrats de prestation qui lient les clubs sportifs à l'Etat pourraient très bien donner une attention particulière au thème des diversités sexuelles, au même titre que le respect et le fair-play. La loi future sur le sport devrait aller dans ce sens.

La motion demande aussi de former les enseignants. Pas seulement les enseignants volontaires mais l'ensemble des enseignants, afin de leur donner les moyens de répondre aux questions que se posent les écoliers de tous les âges, et de réagir face à des situations d'agression verbale.

Enfin, elle permet aussi une construction de l'auto-estime en évitant l'exclusion. C'est un socle psychologique indispensable pour avancer dans la vie, pour écouter, apprendre, avoir le courage d'entreprendre les défis de devenir autonome et adulte. Un travail a été effectué au sein du service de santé de la jeunesse à l'attention des personnes chargées de l'éducation sexuelle. Cependant, ce terme «sexuel» est réducteur ! Il s'agit de bien plus ! Il s'agit d'une orientation amoureuse, du lien émotionnel qui rapproche deux individus. Il faut donc pouvoir expliquer aux enfants comme aux adultes que l'on peut, au cours de sa vie, rencontrer des personnes du même genre qui s'aiment et vivent ensemble...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Jacqueline Roiz. ... mais il faut un langage adapté à l'âge. En conclusion, en acceptant cette motion et en la renvoyant au Conseil d'Etat, nous exprimons notre soutien aux actions existantes et nous donnons un message clair pour que l'Etat poursuive ses efforts.

Rien de plus, rien de moins, hors des clivages idéologiques, j'ose le dire et je risque de vous choquer ou de vous troubler: l'amour est la priorité absolue pour qu'une société avance, chacun y a droit et mérite de l'exprimer. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Beatriz de Candolle (L). Mesdames et Messieurs les députés, les préjugés collent à la peau par méconnaissance, par manque d'information. La différence fait peur, pas seulement quand elle concerne l'orientation sexuelle, c'est clair. La liste pourrait être encore très très longue. Il est évident que nous devons lutter contre toutes les discriminations, afin de sensibiliser non seulement la nouvelle génération mais aussi les anciens. Cette motion demande entre autres - et je crois que c'est extrêmement important - de former tous les enseignants sur la façon de réagir et d'aborder les questions d'homophobie et de transphobie dans les milieux scolaires. Mais, Mesdames et Messieurs, il faut que l'on puisse donner les outils aux enseignants afin de pouvoir aller au-delà des préjugés qui sont transmis dans les familles; il faut que l'on puisse donner les outils aux personnes qui travaillent avec les enfants dans les milieux sportifs. Raison pour laquelle le groupe libéral vous demande de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Didier Bonny pour deux minutes.

M. Didier Bonny (HP). Merci, Monsieur le président. Lors de sa session du vendredi 22 février, notre Grand Conseil a affiché sa volonté quasi-unanime que les actes homophobes soient pénalisés en adoptant la résolution 563, et en faisant ainsi usage de son droit d'initiative cantonale auprès de l'Assemblée fédérale. Grâce aux nombreuses auditions faites en commission lors de l'examen de la résolution 563 et à l'excellent rapport de notre collègue Mme Roiz, vous avez pu vous rendre compte, Mesdames et Messieurs les députés, des ravages que peuvent causer les actes homophobes, notamment sur les jeunes homosexuels qui font deux à cinq fois plus de tentatives de suicide que la population hétérosexuelle. Nous avons tous pu constater, lors du débat sur le mariage pour tous en France, ou à l'occasion du dérapage récent d'un conseiller municipal de la Ville de Genève, que les préjugés avaient la vie dure et qu'il s'agissait de les combattre jour après jour. C'est ce que fait le DIP en prenant cette question de la lutte contre l'homophobie très au sérieux, puisqu'il a engagé une chargée de mission à 40% pour traiter de ce sujet et soutenu de nombreuses actions de sensibilisation que l'on trouve énumérées dans les considérants de la motion 2092. Cette politique volontariste de lutte contre l'homophobie mise en place par le DIP ces dernières années ne doit pas dépendre de la volonté de tel homme ou de telle femme politique; elle doit donc être institutionnalisée, d'où le sens de cette motion. Mesdames et Messieurs les députés, je vous en prie, ne renvoyez pas cette motion en commission, où elle va s'éterniser pour revenir ici peut-être dans trois ans. Lors de l'examen de la résolution 563 les travaux ont été faits à fond, le rapport de Mme Roiz comporte tous les éléments nécessaires pour aller de l'avant...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Didier Bonny. ...donc renvoyez directement cette motion au Conseil d'Etat.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, bien sûr, pour le parti démocrate-chrétien, la lutte contre les discriminations, notamment contre l'homophobie, doit s'institutionnaliser. Il est de la responsabilité de l'Etat, Mesdames et Messieurs, de veiller à la dignité de chacun et de chacune, et au respect de cette dignité. En plus des nombreuses raisons qui ont déjà été très bien expliquées, nous allons en évoquer une autre qui nous touche tout particulièrement: c'est le risque, dans le cas du suicide des jeunes, qu'une majorité d'entre eux passent à l'acte à cause de l'exclusion, à cause de la discrimination, à cause de ces raisons-là. Ce suicide des jeunes nous le regrettons tous, c'est un drame absolu. Vous avez tous été invités, d'ailleurs, à participer à Stop suicide, qui sera encore mieux placé pour vous sensibiliser à cette réalité. La raison de ce passage à l'acte définitif qu'est le suicide est provoquée par le sentiment d'être refusé, d'être rejeté, et il est du devoir de l'Etat, dès l'école et je dirai même dès la crèche, de pouvoir permettre à chacun d'être reconnu dans son orientation, quelle qu'elle soit. Chacun et chacune doit être en paix avec elle, et le parti démocrate-chrétien remercie déjà le Conseil d'Etat de faire le mieux possible mais l'encourage, en lui renvoyant cette motion, à continuer cette lutte pour qu'un jour existe ce droit à l'indifférence, que nous pouvons tous souhaiter. (Applaudissements.)

M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, je partage les dernières paroles de Mme Roiz qui dit qu'effectivement l'amour est la principale valeur qui devrait être prônée. Je pense que chacun est d'accord avec cela, simplement nous avons des peurs, des blocages et des préjugés, notamment le préjugé homophobe, qui nous empêchent d'atteindre cet amour. J'ai une certaine sensibilité sur ce sujet puisque j'ai participé aux travaux contre la discrimination à la commission des Droits de l'Homme, et je suis tout à fait favorable à ce que dans les écoles nous puissions parler de la discrimination homophobe et des autres discriminations. J'y suis tout à fait favorable parce que j'ai pu constater les souffrances de tous ces jeunes qui non seulement sont discriminés par les autres élèves, mais sont aussi discriminés très souvent par leurs parents qui ne comprennent pas la situation. Et donner la possibilité aux élèves de s'ouvrir l'esprit nous démontre que jeunes adultes ils deviennent beaucoup plus compréhensifs, ils ne discriminent plus, ils sont beaucoup plus ouverts et tolérants envers les autres, et ils ne deviendront certainement pas des parents qui auront le même comportement avec leurs propres enfants si l'un d'entre eux est différent. Je suis donc d'accord de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. D'ailleurs nous avons visionné ce film, «It's still elementary», qui se passe aux USA, dans lequel la démonstration est faite que d'informer les jeunes est très très positif, et j'invite vraiment le département à faire visionner ce film dans les écoles car c'est un plus. Mais je comprends aussi la peur des parents qui pensent, entre guillemets, que le lobby homosexuel veut pénétrer dans les écoles... (Commentaires. Protestations.) ...pour essayer de pervertir les enfants; c'est une des peurs des parents et je pense, quand on connaît la situation, qu'elle n'est pas justifiée et qu'elle cause énormément de souffrances dans le milieu homosexuel ou dans d'autres. Un mort c'est un mort de trop, il ne devrait y avoir aucun jeune qui se suicide parce qu'il souffre à cause de ces discriminations. Merci beaucoup.

Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord évoquer l'important travail qui a été effectué par la commission des Droits de l'Homme au moment où nous avions traité la pétition et la résolution, qui ont d'ailleurs été adoptées à l'unanimité par notre assemblée il y a quelques mois. En fait, cette motion qui vous est proposée aujourd'hui est l'aboutissement de ces travaux; c'est une motion qui a été signée par des représentants de tous les partis, ce qui montre bien notre accord sur ces questions. Nous avons pu constater en commission ce que nous savions déjà, soit que l'homophobie restait un problème d'actualité grave, et que cela pouvait avoir des conséquences absolument dramatiques, surtout sur les jeunes. Comme cela a été mentionné tout à l'heure, les jeunes homosexuels ont un taux de risque de suicide cinq fois plus élevé que les jeunes hétérosexuels, et il y a bien sûr beaucoup d'autres problèmes qui se posent: l'exclusion, par exemple, les problèmes de scolarité, etc. Heureusement, le DIP, sous l'impulsion de M. le conseiller d'Etat Charles Beer... (Brouhaha.) ...a mis en place un programme de prévention de l'homophobie dans les écoles. Ce dernier est en cours, il doit être développé, mais nous saluons déjà ce projet qu'il faut absolument maintenir, soutenir et étendre. Il faut également que l'Etat puisse engager des projets et mettre en place des programmes de prévention dans les autres services de l'Etat, et je pense que cette motion est essentielle pour encourager le Conseil d'Etat à continuer dans la voie qu'il a initiée. Je crois qu'il n'est vraiment pas nécessaire de renvoyer cette motion en commission, car le travail a déjà été effectué à la commission des Droits de l'Homme et on peut se référer, sur ce sujet, au rapport fait par Mme Roiz. Je vous prie donc de bien vouloir renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, brièvement, le MCG soutiendra évidemment cette motion. Jamais autant qu'à notre époque on a parlé de respect, de libre détermination sexuelle et d'égalité de traitement entre couples homosexuels et hétérosexuels. Pourtant, paradoxalement, jamais autant qu'à notre époque l'intolérance ne s'est exprimée avec pareille virulence. La paix, la tolérance, l'intégration, toutes ces valeurs qui doivent faire de notre société ce qu'elle est, ou ce qu'elle devrait être, s'enseignent à l'école. Dès l'école. A la sortie de celle-ci, il est presque déjà trop tard. On le sait, des livres d'histoire qui n'enseignent que la gloire des vainqueurs dans les conflits guerriers font de petits enfants guerriers dans l'âme, alors qu'au contraire, sans ignorer ce que fut notre histoire, le fait de mettre en valeur la paix et ce qu'elle peut apporter à l'humanité fait de nos enfants les forgerons d'un avenir de paix. Il est donc important que ces valeurs soient enseignées dès l'école... (Brouhaha.) ...et il est important aussi que cette motion insiste sur ce facteur. C'est précisément le département de l'instruction publique qui a cette tâche principale d'enseigner à nos jeunes la tolérance à l'égard de la différence, quelle qu'elle soit - cela peut être une différence sexuelle, cela peut être un handicap - parce que la différence fait notre force et notre ciment.

M. François Haldemann (R). La politique, c'est peut-être d'abord mettre en place les moyens de vivre ensemble, et plus particulièrement ensemble avec des différences. Les crimes homophobes sont parmi les plus immondes, et ils sont souvent le fait de la peur de l'autre. Les sociétés les plus évoluées sont celles qui permettent à leurs minorités de jouir des mêmes droits que ceux qui sont octroyés à la majorité. Et dans ce cas, comme l'a dit ma collègue von Arx, il s'agit du droit à l'indifférence et de celui de vivre tranquille. Nous avons appris très récemment que le DIP déployait des efforts considérables, ce fut même la une d'une «Feuille d'avis officielle» récente. Nous, le groupe radical, sommes prêts à renvoyer cet objet en commission si le département souhaite qu'on en débatte, mais si le département souhaite qu'on renvoie cette motion directement au Conseil d'Etat nous suivrons son mot d'ordre.

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Christina Meissner pour une minute trente.

Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le vice-président. Ce que demande cette motion est raisonnable. (Brouhaha.) Il ne s'agit pas de pénalisation mais de formation et d'information au niveau de l'enseignement, et également de demander un rapport pour savoir si le but, soit la lutte contre l'homophobie, est atteint. Comme vous l'avez dit, Madame Roiz, chacun a droit à l'amour, et cette motion mérite d'être renvoyée au Conseil d'Etat. C'est ce que nous soutiendrons.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme la députée Beatriz de Candolle pour une minute trente.

Mme Beatriz de Candolle (L). Monsieur le vice-président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral se rallie à la volonté exprimée et retire sa demande de renvoi à la commission de l'enseignement. Nous souhaitons vivement que le DIP puisse offrir aux enseignants tous les moyens nécessaires pour que l'on puisse lutter contre l'intolérance, contre l'homophobie et contre toutes les discriminations dans ce canton. Merci beaucoup, on vous fait confiance.

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Renaud Gautier, à qui il reste une minute.

M. Renaud Gautier (L). Monsieur le vice-président, l'avantage des périodes électorales c'est que sur certains sujets, une touchante unanimité règne dans ce parlement. (Rires.) Ainsi donc, je constate que parmi celles et ceux qui se sont exprimés tout à l'heure pour lutter contre l'intolérance, contre l'homophobie, contre tout ce qui n'est pas bien en vertu du bonheur et de la paix dans le monde, se trouvent un certain nombre de personnes qui, il n'y a de cela pas si longtemps, étaient tout à fait à l'aise pour tenir publiquement des propos homophobes contre celui-ci ou celui-là de ce parlement. J'en déduis donc que les bonnes résolutions qui sont prises maintenant dureront vraisemblablement, voire certainement, jusqu'au premier décembre. Après, je pense que nous devrons reprendre le débat. (Rires. Applaudissements.)

M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Ce sera probablement, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, un excès d'optimisme de ma part, mais j'ai l'impression qu'avec une telle discussion - tous les avis convergent - eh bien nous pourrions vivre cette situation bien au-delà du mois de décembre ! C'est en tout cas un élément qui me paraît aussi important que la détermination du Conseil d'Etat à vous inviter à lui renvoyer directement cette motion.

J'aimerais me saisir de cette occasion pour vous dire que l'importance, aujourd'hui, de la lutte contre l'homophobie est telle - et nous le voyons à la lumière, ou plutôt en fonction des ténèbres qui obscurcissent tel ou tel débat - qu'elle devient sans cesse un sujet d'actualité, qui se prolonge non seulement dans l'espace public mais également dans la sphère privée. J'aimerais vous dire que je suis conscient de l'importance de l'engagement du département de l'instruction publique, de la culture et du sport, en faveur de la lutte contre l'homophobie; nous avons ainsi formé spécialement des éducatrices et éducateurs à la santé; nous avons, avec le canton de Vaud, engagé effectivement une responsable du dispositif scolaire, de manière à pouvoir faire en sorte que celui-ci soit actif par rapport aux dangers et aux ravages de l'homophobie. Nous avons aussi partagé, au sein de la conférence intercantonale de l'instruction publique, la nécessité de nous coordonner en la matière. Nous allons bientôt - et nous sommes en route sur ce point - développer partout ce que l'on appelle un réseau d'alliés, c'est-à-dire des personnes, dans chaque établissement scolaire, aptes à répondre à un certain nombre d'interrogations, de tourments et de souffrances, le cas échéant. C'est dire que le département, respectivement le Conseil d'Etat, attache l'importance qu'il se doit à ce combat. Il a également prolongé ce dernier à l'occasion de diverses assises mais également de concours, de manière à faire en sorte que le travail ne concerne pas seulement l'instruction publique, mais aussi le sport.

Je crois que la plupart des invites concernent l'éducation et le sport, ce qui est une excellente chose. Ces avis sont entendus sur le plan éducatif, ils devront se prolonger, se pérenniser, et ils devront également, dans le projet de loi sur le sport, être traités avec la priorité nécessaire. Mais j'aimerais vous dire également que la vie active, la vie professionnelle, la vie y compris dans l'administration publique, doit être traversée des mêmes soucis. Et c'est ce que nous devons impérativement nous employer à faire, quitte à encourager aussi, dans le secteur privé, que l'ensemble des dispositifs - fussent-ils conventionnels au niveau du travail - prennent effectivement l'importance qu'il se doit, autant en ce qui concerne les dangers de harcèlement qu'en ce qui concerne la lutte contre l'homophobie.

Je terminerai en vous disant, Mesdames et Messieurs les députés, que si j'accorde une importance toute particulière à la lutte contre les préjugés et contre l'homophobie, c'est parce que lorsqu'un enfant est discriminé pour sa religion, pour sa nationalité ou pour son handicap, il trouve naturellement, dans sa famille, le réconfort nécessaire. Tel n'est souvent pas le cas lorsqu'un enfant découvre son homosexualité. Et c'est bien là où le service public respectivement la collectivité et les établissements scolaires ont une responsabilité que nul ne peut concurrencer. Et puis j'aimerais enfin dire, pour terminer, et pour souligner l'importance qu'il y a à prolonger cet élan bien au-delà de cette législature, que si nous avons eu l'occasion de commémorer par une plaque sur le pont de l'Ile l'exécution de Bartholomé Tecia au cours du XVIe siècle - qui a été la dernière personne exécutée pour crime de sodomie, puisque tel était le terme retenu à l'époque - et que si l'Etat ne condamne plus à mort à cause de l'homosexualité, il n'en demeure pas moins qu'on en meurt encore. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix la prise en considération de cette motion 2092.

Mise aux voix, la motion 2092 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 67 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 2092