Séance du
vendredi 22 février 2008 à
20h45
56e
législature -
3e
année -
5e
session -
27e
séance
La séance est ouverte à 20h45, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, David Hiler, Robert Cramer et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Beatriz de Candolle, Pablo Garcia, Michel Halpérin, Eric Ischi, Virginie Keller Lopez, Georges Letellier, Claude Marcet, Véronique Pürro et Ariane Reverdin, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je demande l'urgence pour la proposition de motion 1805 qui se trouve au point 68 de l'ordre du jour. L'urgence devrait être acceptée, puisqu'on m'a reproché cet après-midi d'avoir tort dans mon discours. Si c'est le cas, je demande simplement, pour éviter de longues discussions, que cet objet soit renvoyé sans débat au Conseil d'Etat. Je fais donc gagner du temps !
La présidente. Nous allons nous prononcer sur le traitement en urgence du point 68: «Proposition de motion 1805 de Mme Sandra Borgeaud sur les abus sexuels contre des enfants commis par des adolescents mineurs». La majorité des deux tiers est requise pour accéder à cette demande.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1805 est rejeté par 32 non contre 10 oui et 13 abstentions.
Annonces et dépôts
Néant.
La présidente. Nous sommes au point 37 de notre ordre du jour. (Brouhaha. La présidente s'interrompt.) Vous pouvez continuer à discuter... J'attendrai que vous fassiez silence pour pouvoir continuer nos travaux !
Débat
La présidente. Cette proposition de résolution émane du Groupement des citoyens genevois. La parole est à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). C'est: «Mouvement citoyen genevois», pas «Groupement des citoyens...» ! Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution que nous avions déposée en date du 5 juillet 2007 pour demander un rapport d'audit de l'Inspection cantonale des finances sur l'Aéroport international de Genève à propos de l'apéritif pharaonique qu'avait donné son directeur général - qui depuis est parti à la retraite - n'a plus d'objet, puisque la Cour des comptes a rendu son rapport. Nous retirons donc la proposition de résolution 534 ! (Brouhaha. Quelques applaudissements.)
La présidente. La parole est demandée par M. Alberto Velasco. (Commentaires.)
M. Alberto Velasco (hors micro). Je retire ma demande ! (Brouhaha.)
Une voix. La résolution est retirée !
La présidente. Au temps pour moi, je n'avais pas entendu la fin ! Cet objet est donc retiré.
La proposition de résolution 534 est retirée par ses auteurs.
La présidente. Nous passons aux points 38 et 39: propositions de résolutions 549 et 550. D'entente avec leurs auteurs, le Bureau vous propose de les traiter ensemble.
Débat
La présidente. Vous avez constaté que ces propositions de résolutions sont en catégorie II... (Remarque. Brouhaha.) Monsieur le député Stauffer, s'il vous plaît ! Le temps de parole est donc de cinq minutes par groupe pour les deux résolutions. Je cède la parole à M. Guillaume Barazzone, qui est à l'origine de ces dernières.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Je vous remercie de me donner l'occasion de développer ces deux résolutions qui ont été soutenues par à peu près l'ensemble des forces politiques représentées dans ce parlement. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Ces deux résolutions content une histoire d'étudiants, des étudiants d'origines étrangères, comme vous et moi, Madame la présidente, et comme la grande majorité d'entre nous, j'imagine. Ils n'ont pas la chance ni d'être Suisses ni d'être Européens: ils sont 8000 étudiants étrangers en Suisse aujourd'hui et, dans la majorité des cas, doivent quitter le territoire helvétique, parce qu'ils en sont expulsés dès l'obtention de leur diplôme !
Ces étudiants que nous avons accueillis se sont formés dans nos universités, dans nos écoles polytechniques fédérales ou autres Hautes écoles, et la Confédération a fait des efforts considérables puisqu'elle a financé leurs études avec l'argent du contribuable - les cantons sont d'ailleurs aussi des grands financeurs en la matière - eh bien, ces gens-là sont expulsés au terme de leurs études ! Les deux résolutions qui vous sont présentées ce soir visent donc à remédier à cette situation regrettable.
Comment voulons-nous procéder ? Eh bien, Madame la présidente, en exerçant, une fois n'est pas coutume, le droit d'initiative du canton de Genève, qui est une prérogative à la fois du Conseil d'Etat et du Grand Conseil. Nous vous proposons d'adresser, par voie de résolution, un message à l'Assemblée fédérale, qui devra alors légiférer en la matière.
Légiférer pour faire quoi, dans le fond ? Nous proposons deux choses: la première, c'est que l'Assemblée fédérale abroge l'article 27, al. 1, let. d, de la loi fédérale sur les étrangers, selon lequel tout étudiant étranger non ressortissant de l'Union européenne qui veut venir faire des études en Suisse doit promettre qu'il quittera notre territoire dès l'obtention de son diplôme. De notre point de vue - et aussi de celui des milieux économiques et universitaires de tous bords - ceci est une aberration totale !
En plus de l'abrogation proposée, nous demandons que l'Assemblée fédérale se penche sur la question de manière beaucoup plus précise et présente une nouvelle disposition de la loi fédérale sur les étrangers qui vient d'entrer en vigueur - la LEtr - en introduisant un nouveau permis qui donnerait aux diplômés étrangers non ressortissants de l'Union européenne le droit de rester en Suisse, de pouvoir rechercher un emploi et de travailler, de participer à un programme de recherche ou encore de créer une entreprise.
Parce qu'aujourd'hui, Madame la présidente, quand un étudiant termine ses études, le problème est le suivant: il est diplômé, il n'a plus le statut d'étudiant qui lui permettait de rester en Suisse jusque là et il n'a pas encore obtenu le permis B via le contingentement. Il y a donc une sorte de lacune juridique entre les deux situations. Cette lacune fait que les personnes qui se trouvent dans cette situation sont expulsées, alors même qu'elles ont parfois obtenu un contrat de travail ! On trouvera forcément des cas particuliers, des exceptions, des personnes qui parviendront tout de même à obtenir un contrat de travail, mais, malheureusement, dans la grande majorité des cas, ces gens doivent quitter le territoire.
Alors, dans le fond, soutenir cette résolution, c'est relayer politiquement la position des recteurs des universités suisses et des présidents des écoles polytechniques fédérales; c'est donner un contenu politique à leur revendication; c'est également prendre en compte que la compétition pour la recherche de talents ne se joue plus au niveau national ou européen seulement, mais bien au niveau mondial. Et il en va ainsi tant pour la compétitivité économique qu'académique.
Ainsi, on reconnaîtrait également l'apport culturel que représente la venue de gens de divers continents. Cela permettrait aussi de mettre fin à une inégalité de traitement entre les cadres qualifiés qui viennent de différents continents et qui sont donc hors de l'Union européenne, cadres que la loi que nous avons votée au niveau fédéral permet de faire venir en Suisse depuis l'autre bout du monde, alors même que la loi empêche que des diplômés formés en Suisse, qui parlent notre langue et sont bien intégrés, puissent rester, même dans les cas où ils ont obtenu un contrat de travail ! C'est aberrant !
Avant de céder la parole aux différents intervenants, je souhaiterais revenir sur un argument qui, à mon avis, se fonde sur une crainte justifiée, mais qui doit être dissipée. En créant des conditions-cadres pour retenir ces talents, on se dit que le dommage collatéral qui en résulte est le pillage des cerveaux d'Afrique ou des pays du Sud. Cette crainte est légitime, mais elle n'est pas fondée, et pour les raisons suivantes: quand une personne formée en Suisse a décidé de ne pas rentrer dans son pays d'origine, cette personne restera en Occident; elle ira dans un autre pays d'Europe ou aux Etats-Unis, dans un pays qui lui offrira des conditions-cadres plus favorables. On ne peut pas forcer quelqu'un à rentrer chez lui et on ne pas l'empêcher de ne pas retourner chez lui ! Nous pensons qu'il s'agit d'ailleurs d'instaurer de véritables politiques de développement, pour créer des conditions-cadres favorables dans les pays d'origine des migrants plutôt que d'essayer de régler les questions par une politique plus ou moins restrictive en matière d'immigration. Je rappellerai encore que la plupart des personnes qui travaillent ici participent au développement des pays du Sud, puisque la diaspora qui travaille en Occident finance très souvent, en grande partie, la vie des familles restées au pays.
Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'une quarantaine de députés ont signé ces deux résolutions. J'espère que nous serons davantage à l'approuver ce soir et je préciserai enfin qu'il ne s'agit pas ici de pinailler pour savoir si les invites correspondent exactement à ce que tous les députés souhaiteraient, mais bien de donner un signal politique fort, provenant d'un canton universitaire.
J'ajouterai encore qu'une telle démarche est en cours actuellement dans le canton de Vaud et qu'une motion signée par l'ensemble, ou presque, des conseillers nationaux de tous les partis genevois représentés à Berne a été déposée par le conseiller national Luc Barthassat. Elle sera traitée en mars et elle demande exactement la même chose que ces deux résolutions qui viennent donc un peu en retard par rapport à l'ordre du jour du Conseil national. Toutefois, il est important qu'en tant que canton universitaire nous donnions un signal clair au Conseil fédéral qui, pour l'instant, n'a pas entendu les desiderata des diverses instances académiques et économiques de ce pays.
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical est relativement favorable à cette résolution ainsi qu'à la suivante. Néanmoins, il reste lucide sur les réalités dans lesquelles s'inscrivent ces deux résolutions.
Alors, quelles sont ces réalités ? La première réalité, c'est celle de nations occidentales qui ont un système universitaire très performant, très compétitif et, comme l'a rappelé justement mon estimé collègue Guillaume Barazzone, qui sont en compétition pour accueillir les étudiants étrangers les plus performants qui ne proviennent pas de l'Espace économique européen ou des nations favorisées. Ça, c'est la première réalité !
La deuxième, c'est celle de nations vieillissantes, avec une démographie déclinante et qui, dans beaucoup de secteurs économiques, techniques et sociaux manquent de jeunes cerveaux pour faire tourner leurs sociétés. Alors, il ne faut pas jouer aux tartuffes, les statistiques sont accablantes... Considérez les statistiques de l'OIM, Organisation internationale pour les migrations: l'Afrique avait besoin en 2004 d'un million de scientifiques; elle n'en disposait que de 20 000 ! Il y a plus de médecins ghanéens dans la banlieue de Liverpool qu'au Ghana ! Il y a plus de médecins béninois en Ile-de-France qu'au Bénin ! Et si vous prenez le cas de la Suisse, un article dans «Le Temps» d'il y a deux jours relevait le manque d'informaticiens... Par ailleurs, vous n'avez qu'à vous promener dans les hôpitaux de ce pays et vous constaterez que 40% des internes et des chefs de clinique sont d'origine étrangère.
Nous sommes d'accord avec le paragraphe 5 de l'exposé des motifs. Il est vrai que ce n'est pas une politique d'immigration sélective qui va régler ce problème et qui va empêcher les jeunes cerveaux des pays du Sud de rester dans les pays occidentaux où ils étudient, c'est plutôt une politique de partenariat. Et je profite de mon temps de parole pour rendre hommage à la Faculté de médecine de Genève: vous êtes peu nombreux à le savoir, mais cela fait trente ans qu'un partenariat existe avec l'Université de Yaoundé au Cameroun; il s'agit d'un partenariat sérieux, encadré, et qui se traduit par un taux de retour au pays des médecins camerounais qui est supérieur à 95%.
Une voix. Bravo !
M. Patrick Saudan. Il faut quand même être clair - je ne dis pas qu'il faut être cynique - mais ces résolutions s'inscrivent dans une perspective d'immigration sélective qui se fait au détriment des pays du Sud qui vont y perdre leurs élites. Il est vrai que la Suisse n'a pas le choix, si elle veut lutter à armes égales avec les autres pays occidentaux pour maintenir un système universitaire performant qui a besoin de ces jeunes élites. C'est vrai qu'un système qui leur permettrait de travailler rendrait notre système universitaire plus compétitif. Toutefois, ces résolutions nécessitent une étude plus approfondie pour savoir vraiment quelles en sont les implications. C'est pour cela que le groupe radical vous propose le renvoi de ces résolutions à la commission de l'enseignement supérieur.
M. Christophe Berdat (L). Mesdames et Messieurs les députés, disons-le d'emblée, et peut-être même osons de grands mots: la résolution qui nous est proposée ce soir est importante, parce qu'elle l'est pour le marché du travail et qu'elle l'est pour le développement de notre économie. Et plusieurs points militent en définitive pour son soutien.
Vous savez que, actuellement, plusieurs étudiants - et même très nombreux - qui sont inscrits dans nos universités et dans nos HES proviennent non pas des pays de l'Union européenne, non pas des pays de l'Association européenne de libre-échange, mais des autres pays du monde. Ces étudiants sont donc très nombreux et, après l'obtention de leurs diplômes, ils ne peuvent obtenir de permis de travail, même si la Suisse - et Genève en particulier - a financé tout ou partie de leurs études. Notre pays se prive ainsi de compétences et, donc, de cerveaux, même s'il a énormément investi pour leurs formations ! Vous le savez, le canton de Genève se trouve fréquemment confronté à ce genre de situations, puisqu'il possède sur son sol une université et des Hautes écoles spécialisées qui sont parmi les meilleures du monde.
A ce constat, Mesdames et Messieurs les députés, il faut ajouter un fait important: l'économie suisse et l'économie genevoise en particulier pâtissent actuellement d'un manque de personnel qualifié dans certains secteurs d'activité qui sont pourtant en expansion. Cela, du fait de l'évolution technologique, de la tertiarisation de l'économie et, évidemment, du vieillissement de notre population. C'est le cas de certains métiers des technologies de l'information, par exemple - de l'informatique en particulier - mais aussi de la finance, de l'assurance, de l'ingénierie industrielle ou même de la santé.
L'adaptation de notre système de formation est sans doute la solution pour répondre de manière efficace et sans doute pérenne à ces besoins, mais cette adaptation demande évidemment du temps, pendant lequel il faut faire autre chose. Et dans certains secteurs de pointe, comme l'informatique, comme la biotechnologie, des campagnes de recrutement ont été autorisées dans des pays étrangers, vous le savez ! On cherche des spécimens rares en Europe, mais également dans les pays émergents: en Chine, voire en Inde.
Toutefois, vous en conviendrez avec moi, l'information ne fait pas tout ! Il faut constater, Mesdames et Messieurs les députés, que le statut des étudiants qui sont formés par notre université et par nos HES est souvent tel qu'il empêche une véritable intégration des étudiants durant leurs études et qu'il entraîne le départ de ces spécialistes dès qu'ils sont diplômés. Seuls ceux qui ont comme perspective d'avoir une activité lucrative qui pourrait être d'un intérêt scientifique prépondérant, seuls ceux-ci peuvent aujourd'hui résider plus de six mois en Suisse après l'obtention de leur diplôme. Et six mois, Mesdames et Messieurs les députés, c'est beaucoup trop peu !
La situation est particulièrement illogique aujourd'hui, en ce qui concerne les étudiants doctorants ou en master. Ceux-ci séjournent trois ou quatre années, voire davantage, dans notre université, en étant parfois même rémunérés comme assistants. Ils bénéficient de revenus qui leur permettent même parfois de fonder une famille. Ils ont même l'âge pour pouvoir l'envisager, néanmoins, ils ne sont généralement pas au bénéfice d'une autorisation de séjour de type B, qui admettrait évidemment le regroupement familial.
N'oublions pas non plus, Mesdames et Messieurs les députés, que la formation d'un jeune chercheur en Suisse et à Genève coûte au budget près de 500 000 francs à 1 million de francs, selon que le candidat a effectué tout ou partie de sa formation dans notre canton. La Suisse consent donc un effort financier considérable pour former des universitaires, des scientifiques, mais elle les soumet à un statut qui ne vise malheureusement ni à les intégrer, ni à les retenir ! Il faut que cela change !
Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution qui nous est soumise aujourd'hui est essentielle, pour notre économie et pour notre canton, je l'ai dit. Elle est loin, évidemment, d'être un acte parlementaire isolé, M. Barazzone l'a rappelé tout à l'heure. Ma collègue, Mme Hagmann, a rappelé que le parlement vaudois était particulièrement rapide, qu'il avait épuisé son ordre du jour rapidement. Il est vrai aussi que certains députés vaudois, dont des membres du groupe libéral, ont à plusieurs reprises saisis les instances de Mme Anne-Catherine Lyon, conseillère d'Etat, pour changer cela. Ils ont également proposé que le canton de Vaud saisisse son droit d'initiative auprès de la Berne fédérale pour faire changer cela. Et comme l'a dit également M. Barazzone, les membres des chambres fédérales sont conscients de ce problème...
La présidente. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Christophe Berdat. Je vais conclure, Madame la présidente ! Le groupe libéral estime que s'il est réjouissant de constater que nos Hautes écoles contribuent à la formation de jeunes qui retourneront sans doute dans leurs pays avec un bagage académique, il est important de constater que ces mêmes diplômés devraient aussi pouvoir compléter leur formation au sein d'entreprises suisses afin d'acquérir des compétences en dehors du milieu académique. Ils n'en seront que plus performants de retour dans leur pays ! C'est la raison pour laquelle le groupe libéral vous demande de soutenir pleinement ces deux propositions de résolutions. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous rappelle que nous traitons ensemble les points 38 et 39 et que vous disposez de cinq minutes de temps de parole par groupe. Je passe la parole à Mme Catherine Baud, pour le groupe des Verts.
Mme Catherine Baud (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous savez que les Verts ont toujours lutté contre la loi fédérale sur les étrangers et ses dispositions discriminatoires. Malheureusement, les craintes ont prévalu. La méfiance a prévalu et l'a emporté: les étrangers non ressortissants de l'Union européenne sont toujours personae non gratae en Suisse, et cela quel que soit leur niveau de formation.
Alors, ces propositions de résolutions visent à instaurer un petit peu plus de souplesse et à permettre à ces jeunes de rester en Suisse s'ils le souhaitent, et ça c'est une bonne chose. Mais il est vrai que, lorsque ce texte nous a été proposé, nous ne l'avons pas signé, parce que nous avons trouvé qu'en fait ces propositions s'appliquaient exclusivement à des diplômés universitaires de haut niveau et qu'il y avait aussi d'autres personnes qui pouvaient avoir effectué leur formation en Suisse et pouvaient mériter d'y rester. C'est cela qui justifie notre petit mouvement d'humeur, dirai-je, sur ce projet de résolution.
Cela dit, il s'agit quand même de revenir à du bon sens et de considérer que cette proposition doit être rediscutée au niveau fédéral; elle doit faire l'objet d'un examen attentif parce qu'il faut absolument revenir sur ces dispositions qui ne sont pas acceptables dans un pays comme la Suisse, qui a une tradition universitaire importante.
Donc, les Verts vont soutenir ces propositions, bien sûr, mais par un petit oui, parce que nous aimerions que les autres étrangers puissent aussi être acceptés en Suisse avec les mêmes possibilités de réussite. Cela dit, ce petit oui, nous allons le formuler, mais nous ne soutiendrons en tout cas pas un renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Il n'aurait pas de sens puisqu'il s'agit ici d'une proposition pour une discussion au niveau fédéral, et ça ne concerne pas le canton de Genève qui n'a pas à s'immiscer dans la discussion sur la Loi sur les étrangers. Il s'agit d'une décision qui doit être discutée au niveau des Chambres fédérales !
M. Gilbert Catelain (UDC). Comme vous le savez, la Suisse et Genève en particulier consentent à des efforts très importants pour former des étudiants suisses qui, finalement, émigrent et travaillent aux Etats-Unis. Il serait de bon ton de prévoir une résolution qui permette finalement à ces étudiants et chercheurs suisses d'exercer dans leur pays !
Quand je vois que cette motion provient du PDC, alors que le PDC à Berne a plébiscité la loi sur les étrangers, je me pose une ou deux questions ! Je m'en pose davantage encore quand ce même PDC milite pour l'aide au développement, d'une main, et, de l'autre main, vise à piller et à détruire tout ce qui est fait via l'aide au développement ! Pour étayer ce discours, je vais vous lire quelques citations. Le 9 janvier 2004, dans un article publié dans le journal «Le Monde», le président d'un pays africain disait ceci: «De nombreuses déclarations ont été prononcées sur le transfert de cerveaux des pays en voie de développement vers les pays développés. Mais à vrai dire, rien n'a été fait en dehors de pures incantations, pour ne pas dire de conjurations, sans aucune efficacité. Les pays en voie de développement, soit par des dépenses directes, soit par l'aide internationale, forment depuis des décennies des cadres qui, malheureusement, à la fin de leurs études et de leur formation, sont absorbés par l'économie des pays développés. Ce détournement des cerveaux n'a pas seulement un coût financier, mais il crée un vide dans le plan d'utilisation des ressources humaines des pays en voie de développement.»
En somme, la proposition qui nous est faite ce soir est celle d'un pillage généralisé de la première richesse des pays pauvres, leur matière grise, sous l'impulsion des Etats-Unis ! Pillage auquel participe aujourd'hui l'Europe, et la Suisse en particulier ! Les pays du Maghreb sont particulièrement touchés par cette problématique et le ministre de la justice du Maroc disait ceci: «L'émigration des compétences se traduit par une perte préjudiciable au développement économique et social du Maroc à court et à moyen terme. En effet, le nombre d'informaticiens et de cadres de haut niveau qui quittent le pays devient inquiétant.» Je rappellerai encore le plan de santé de l'OMS, Organisation mondiale de la santé, qui a fixé comme objectif d'arriver à faire en sorte qu'il y ait un médecin pour 5000 habitants au moins, alors que dans les pays les plus touchés par l'épidémie de sida on en est à un médecin pour 25 000 habitants !
L'UDC ne rejette pas en bloc cette résolution...
Une voix. Non, puisqu'elle l'a signée !
M. Gilbert Catelain. ...Pas forcément parce que l'un ou l'autre de ses membres l'a signée...
Une autre voix. Non, non ! (Rires.)
M. Gilbert Catelain. ...mais parce qu'elle introduit un droit absolu ! A savoir que, par le simple fait que vous avez eu la possibilité en tant que ressortissant étranger - sans payer de taxe universitaire, mais grâce aux subventions de l'Etat de Genève - de bénéficier d'une formation universitaire, vous pouvez accéder automatiquement à un marché de l'emploi, même si ce dernier n'affiche aucun besoin et qu'il introduit de facto un droit à rechercher un emploi.
Nous avons parlé pendant des heures du chômage, du chômage des jeunes dans notre canton... Aujourd'hui, dans nos sociétés, toute une catégorie de la population n'a pas accès aux études universitaires, du simple fait qu'elle n'a pas les ressources financières pour y accéder.
La proposition de résolution que vous nous soumettez favorisera une catégorie de personnes venant de l'étranger, leur permettant d'accéder à un marché de l'emploi automatiquement, du simple fait que vous aurez financé leurs études ! C'est inacceptable ! Nous pouvons soutenir une résolution qui vise à accorder, selon les besoins de notre économie, au cas par cas, un accès au marché du travail, mais en tout cas pas un accès généralisé à une recherche d'emploi !
Finalement, je vous donnerai encore un exemple: la France a fait exactement la même démarche, il y a quelques années; en l'espace de trois ans, le nombre d'étudiants étrangers dans les universités françaises a quadruplé !
Pour tous ces motifs, nous ne renverrons pas ces propositions de résolutions au Conseil d'Etat, mais nous soutiendrons leur renvoi en commission pour les amender.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Mesdames et Messieurs les députés, plusieurs députés socialistes ont signé ces deux résolutions; d'autres étaient plus réticents, pour certaines raisons qui ont déjà été évoquées et que je vous expliquerai.
J'aimerais simplement préciser que si nous soutenons ces résolutions, le but des signataires n'est en tout cas pas d'aboutir à un système d'immigration sélective, comme cela a été évoqué tout à l'heure, puisque, vous le savez, les socialistes soutiennent également les sans-papiers qui ont un travail en Suisse et qui méritent aussi de pouvoir y rester. Pour nous, c'est un autre problème. (Bruit. Eclats de voix à proximité de la salle du Grand Conseil.) Finalement, c'est une autre partie d'un tout et nous estimons qu'il ne s'agit pas seulement de soutenir l'élite, mais nous avons besoin de forces vives à tous les échelons de la société. (Nouveaux éclats de voix.)
La présidente. Il faut qu'on demande...
Mme Laurence Fehlmann Rielle. Pour en revenir à cette résolution, ce qui chiffonne effectivement certains socialistes, mais qui ne nous empêchera pas quand même de soutenir cette résolution et de la renvoyer au Conseil d'Etat, c'est justement cette question du risque de piller de leurs cerveaux les pays du Sud. Je relève le chapitre V de l'exposé des motifs de la résolution 549 où il est écrit: «A notre sens, la problématique de la fuite des cerveaux des pays du Sud ne peut pas se régler par le biais de la politique d'immigration [...]»... (Eclats de voix et cris près de la tribune du public. L'oratrice s'interrompt. Plaintes. Bruit.)
Une voix. Au secours ! Au secours ! Au secours !
Mme Laurence Fehlmann Rielle. Que se passe-t-il ? (La présidente agite la cloche. Quelques instants s'écoulent. Le bruit s'estompe.)
La présidente. Vous pouvez continuer, Madame la députée !
Mme Laurence Fehlmann Rielle. Bien, je vais poursuivre: «[...] mais par des programmes d'aide au développement dignes de ce nom, prenant véritablement en compte les besoins des pays du Sud.» C'est bien là, à mon avis, que souvent le bât blesse et nous espérons que les députés signataires de cette motion, notamment les promoteurs, les PDC, se rappelleront cela et s'engageront aussi de manière déterminée quand il s'agira de continuer à soutenir les programmes de coopération avec les pays du Sud.
Je vous rappelle que le canton de Genève a voté une loi qui établit que nous devons investir 0,7% de notre budget dans des programmes de coopération. Je vous signale qu'actuellement nous en sommes à peine à 0,2% ! Cette loi n'est donc absolument pas appliquée ! Il y a une motion socialiste qui en parle - et qui est toujours renvoyée aux calendes grecques - et nous souhaiterions vraiment qu'elle soit aussi soutenue, de façon à avoir une certaine cohérence avec ce que nous allons voter ce soir ! A ce sujet-là, ça me fait doucement sourire, quand j'entends l'UDC qui commence à nous parler du pillage des cerveaux des pays du Sud... Parce que les UDC sont aussi les premiers à vouloir diminuer les budgets de la coopération internationale et des services qui s'en occupent ! Alors, un tout petit de cohérence !
Nous renverrons donc ces résolutions au Conseil d'Etat, mais nous souhaitons aussi que vous soyez plus cohérents en d'autres occasions et que vous vous souveniez aussi de ce qu'il y a moyen et nécessité de s'engager concrètement, et au-delà de simples paroles ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Pierre Kunz, pour le groupe radical - il vous reste deux minutes trente.
M. Pierre Kunz (R). En complément de ce qu'a dit mon collègue Patrick Saudan, je crois qu'il est bon de rappeler ici que ce sont les contribuables genevois qui paient intégralement les études des étudiants étrangers qui suivent leur formation à Genève, à l'Université de Genève en particulier. Il s'agit, Mesdames et Messieurs, d'une dépense de 15 000 à 45 000 francs par année et par étudiant, selon le type de faculté. Ce qui correspond à un montant entre 50 et 80 millions de francs annuellement !
Pour bien montrer l'absurdité de la situation dans laquelle nous vivons actuellement, je souligne que pour les étudiants provenant des autres cantons suisses, le canton de Genève est indemnisé à raison des montants que je viens de vous indiquer: 15 à 50 000 F par étudiant et par année ! Par qui ?! Tout simplement par les cantons d'origine de ces étudiants !
Eh bien, Mesdames et Messieurs, au lieu - au moins ! - de pouvoir conserver au profit de notre collectivité les compétences acquises par ces étudiants, à nos frais, dans notre université - parce que c'est de cela qu'il s'agit, Monsieur Catelain - que sommes-nous forcés de faire ?! Eh bien, à cause d'une loi fédérale d'un autre âge, nous sommes obligés de les faire, pour la plupart d'entre eux, quitter le pays !
Certains remarqueront qu'il serait contraire aux intérêts des pays en voie de développement que de faciliter la domiciliation en Suisse de ces étudiants et nouveaux diplômés... Mais, Mesdames et Messieurs, c'est le problème de ces pays, ce n'est pas le nôtre ! C'est le problème des pays d'origine de ces étudiants, pays qui, je le dis avec clarté, au lieu d'acheter des canons avec l'argent dont ils disposent, feraient mieux de contribuer financièrement à la formation de leurs ressortissants dans notre université et d'exiger en contrepartie que ces gens-là, contractuellement, retournent dans leur pays une fois leur formation achevée.
M. Claude Jeanneret (MCG). Voilà un projet qui est quand même ambigu ! D'une part, il apparaît comme souhaitable d'offrir une formation adéquate à des jeunes compétents ou intelligents qui viennent de pays n'ayant pas les moyens de les former pour qu'ils puissent ensuite, éventuellement, aussi aider leur pays à leur retour, et puis, paradoxalement, on se dit qu'on investit beaucoup pour former ces jeunes, que ce serait quand même dommage de perdre l'investissement et qu'il faut donc les garder ici... Entre ces deux arguments, il me semble qu'il y a peut-être une réflexion à mener.
C'est pour cela que, en l'état un peu brut de cette proposition, il est difficile de choisir. Avant d'aller plus loin, je crois qu'il serait souhaitable - et c'est l'avis du MCG - qu'on renvoie cette proposition à la commission de l'enseignement supérieur, de manière qu'elle soit étudiée plus sereinement et qu'on envisage tous les domaines, y compris celui de logement. On ne loge plus personne à Genève, on n'a pas assez de logements à fournir à ceux qui veulent venir travailler chez nous et on doit les loger en France voisine... Et on voudrait maintenant laisser les étudiants s'installer à Genève, alors qu'on n'a pas les moyens de leur offrir l'hospitalité !
Il y a donc quelque chose de paradoxal dans cette proposition et il me semble qu'on devrait l'étudier d'une manière plus globale, disons moins limitée, pour avoir une vue d'ensemble. Ce pourrait être quelque chose de nouveau chez nous, mais ce serait quand même intéressant.
C'est pourquoi, Madame la présidente, nous allons demander le renvoi de ce projet à la commission de l'enseignement supérieur.
La présidente. Très bien, Monsieur le député, mais je vous rappelle qu'il est question de deux résolutions. Demandez-vous le renvoi des deux propositions de résolutions 549 et 550 à la commission de l'enseignement supérieur, comme cela a déjà été proposé tout à l'heure ? (M. Claude Jeanneret acquiesce.) On est bien d'accord. Nous procéderons au vote tout à l'heure. Je passe la parole à M. Guillaume Barazzone, à qui il reste deux minutes quarante-cinq.
M. Guillaume Barazzone (PDC). S'agissant de la proposition de renvoi en commission, je crois qu'il faut s'y opposer, dans la mesure où l'instrument utilisé est une initiative cantonale qui s'adresse à l'Assemblée fédérale. Par définition, on demande à l'Assemblée fédérale de travailler et ce n'est donc pas au parlement d'effectuer cette gâche. C'est un geste politique: on donne une intention et c'est à l'Assemblée fédérale de la transformer en motion ou en proposition concrète, voire au Conseil fédéral de proposer un projet de loi, si les Chambres fédérales devaient acquiescer à nos demandes.
S'agissant de la question qui est soulevée par les partis de gauche, ceux-ci disent dans le fond qu'il y a un petit bémol et qu'il faudrait que cette proposition concerne d'autres étrangers que ceux qui sont visés par la résolution, à tort ou à raison. Moi j'étais de ceux qui étaient contre la loi sur les étrangers, mais je dois vous dire que, malheureusement, la marge de manoeuvre est mince, dans la mesure où le peuple a adopté la nouvelle loi sur les étrangers, dont l'esprit est clairement de dire qu'on veut une immigration qualifiée en premier lieu, intégrée, plutôt qu'une immigration «totale». C'est pour cela que la marge de manoeuvre reste mince. Mais elle permet tout de même de trouver une solution, s'agissant de cette catégorie-là d'immigrés.
Maintenant, en ce qui concerne la question soulevée par certains députés sur la loi existante, la loi sur les étrangers mentionne, à l'article 30, l'octroi d'un permis lorsqu'il y a un intérêt scientifique prépondérant. Les milieux universitaires ont dénoncé la formulation de cet article, dans la mesure où elle est très restrictive. Elle reste très ambiguë et, comme l'a rappelé mon collègue Berdat, ces dispositions ne permettent que l'octroi d'un permis pour une période beaucoup trop courte, c'est-à-dire pour une période de six mois.
Enfin, l'UDC accuse tout d'un coup le PDC de vouloir créer des chômeurs à Genève et de piller les pays du Sud de leurs cerveaux... Allons, soyons sérieux ! Cette préoccupation est légitime, nous vous l'avons dit, et la question du pillage des pays du Sud se pose ! Toutefois, ce n'est en tout cas pas en refusant la résolution que nous allons régler ce problème. Comme l'a rappelé Mme Fehlmann Rielle, c'est en mettant en place des politiques de développement novatrices et importantes, telles que celles qui sont préconisées par la Direction du développement et de la coopération, et que le PDC soutient, contrairement à l'UDC au niveau fédéral ! C'est en faisant des efforts particuliers dans les cantons, c'est en soutenant le professeur à la retraite qui s'occupe, en médecine, de conclure des accords entre l'Université de Genève et l'Université de Yaoundé, au Cameroun. C'est par toutes ces actions que nous parviendrons à faire en sorte qu'il y ait moins de médecins burundais dans la banlieue de Liverpool qu'au Burundi !
S'agissant de la proposition de M. Catelain, je l'invite à aller boire un café avec son collègue André Reymond, conseiller national UDC, qui a soutenu la motion de M. Luc Barthassat, qui reprend exactement les termes de la proposition présentée ce soir ! Il faut que vous vous mettiez d'accord entre vous, à l'UDC, parce que je crois qu'il y a déjà à ce niveau des avis contradictoires: ça va dans tous les sens !
En tout cas, nous, nous sommes clairs ! Nous défendons une politique de développement au niveau fédéral et ce n'est pas pour autant que nous voulons nous priver des gens qu'on a formés ici. C'est clair, c'est limpide, tandis que vous, vous êtes embrouillés ! Franchement, pour un sujet aussi complexe et aussi délicat...
La présidente. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Guillaume Barazzone. ...je pense que vous auriez pu vous abstenir de lancer des accusations un peu faciles et qui ne mènent à aucune solution concrète !
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a eu l'occasion d'examiner ces résolutions. Il vous demande de bien vouloir les renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur. Visiblement, un certain nombre d'informations gagneraient à être diffusées. Elles concernent des pratiques dans le cadre des lois existantes et qui seront également permises avec l'adoption de l'article 47 de l'ordonnance fédérale.
J'aimerais aussi attirer votre attention sur certaines situations, toutes récentes, qui ont fait l'objet de demandes et pour lesquelles les réponses méritent quelques nuances. Lors de sa dernière séance, la commission tripartite qui accorde, comme vous le savez, des permis aux personnes ressortissantes de pays non membres de l'Union européenne, a été amenée à examiner trois cas d'étudiants ayant achevé leurs études en Suisse et titulaires de diplômes de l'Université de Genève, pour lesquels un certain nombre d'autorisations de travail ont été accordées.
D'autres demandes ont toutefois été rejetées pour des raisons qui me paraissent devoir être étudiées en commission. Lorsqu'un ressortissant marocain au bénéfice d'une bourse de son pays, diplômé de la faculté de sciences de l'Université de Genève en biologie demande un permis de travail en qualité de serveur pour un salaire de 3400 F par mois, cela pose un certain nombre de problèmes que la commission tripartite se doit d'examiner ! Lors de son avant-dernière séance, le Conseil d'Etat a dû se prononcer sur un recours concernant une titulaire bulgare d'une maîtrise en études européennes auprès de l'Institut européen de l'Université de Genève. Ayant achevé ses études, elle avait accepté un poste de secrétaire-réceptionniste-archiviste à 2300 F par mois pour un poste à mi-temps. De tels cas posent d'autres problèmes qu'il faut parfois pouvoir nuancer.
J'aimerais enfin que les services de l'OCIRT puissent vous indiquer quelle est la procédure utilisée. Lors de ces mêmes séances, d'autres diplômés obtiennent des permis, comme par exemple cette ressortissante croate titulaire d'un diplôme de l'Université de Zurich qui a été engagée, en qualité de scientifique cette fois, par une grosse entreprise de pharmacie genevoise pour un salaire parfaitement conforme aux usages de la branche, puisque son salaire d'entrée était de 7500 F par mois.
Je crois qu'il faut pouvoir être capable de nuancer, sur la base de ces trois exemples traités lors des dernières séances de commissions. Les problématiques sont plus complexes que des préjugés peuvent le laisser penser. Le Conseil d'Etat souhaite que vous puissiez examiner l'entier de la situation en commission de l'enseignement supérieur, auprès de laquelle il vous demande de renvoyer ces deux résolutions.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 549 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 37 oui contre 29 non.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 550 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 32 oui contre 29 non.
Débat
La présidente. Madame la rapporteure de majorité, je vous passe la parole... (Brouhaha.) Auparavant, il me faut vous demander quelques instants, afin que les députés puissent faire silence. J'en remercie MM. Mettan, Barrillier, Jornot et Jeannerat. Voilà, Madame la rapporteure, nous vous écoutons.
Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de majorité. Ça ne fonctionne pas...
Une voix. Le micro ne marche pas !
Mme Fabienne Gautier. Ça ne «fonctionne» pas - le micro n'a pas de pieds... Voilà, ça fonctionne. La première chose que j'aimerais faire, c'est une correction. Je m'aperçois que l'indication de la date de dépôt de ce rapport est fausse ! J'ai dû me tromper: c'est la date du 8 janvier 2007 qui est juste et pas celle du 8 janvier 2006, puisque la pétition elle-même a été déposée le 10 octobre 2006. Comme l'a fait remarquer si justement Mme Schneider Hausser, c'est déjà bien long; voilà déjà plus d'une année que nous aurions dû traiter cette pétition dans cet hémicycle !
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il est utile de souligner qu'à aucun moment la commission des pétitions n'a porté de jugements sur l'homosexualité et le transsexualisme qui font partie à part entière de notre monde humain. Mme Schneider Hausser le précise très justement dans son rapport de minorité.
L'Association 360 a vu le jour en 1998 dans le but d'offrir à ses membres et sympathisants des activités festives, des rencontres et des manifestations diverses. Elle voulait aussi assumer un rôle médiatique et, ainsi, éditer un journal. Je pense que beaucoup d'entre vous le reçoivent: en tout cas, moi je le reçois depuis que j'ai fait ce rapport. Ce journal s'appelle «360°» et il est tiré à 20 000 exemplaires, peut-être même plus maintenant, puisque je vous donne des chiffres datant d'un an. Ce magazine est également vendu en kiosques. Actuellement, l'Association 360 compte 550 membres, je parle toujours des chiffres donnés pour l'an passé, et ses activités attirent des personnes dans un rayon allant de Berne à Lyon.
En 2003, l'Association 360 a décidé spontanément d'ajouter un troisième volet à ses activités, à savoir un espace social offrant des appuis juridiques et psychologiques. Actuellement, trois personnes effectuent ce travail qui correspond à un poste à 100%. En 2003, l'Association 360 a reçu de l'Etat une subvention exceptionnelle de 95 000 F pour l'aider à démarrer cette nouvelle activité. Cette subvention lui avait été octroyée par ce qui était le DASS à l'époque, et cela nous a été confirmé par le président du DASS d'alors, M. Unger.
L'Association 360 reçoit encore des subventions, fortement diminuées, en 2004 et en 2005, à titre exceptionnel également, l'Etat avertissant clairement l'association qu'il ne pourra pas continuer à la soutenir.
Mme Schneider Hausser prétend à tort dans son rapport qu'il y a eu un revirement des autorités cantonales. A chaque subvention versée, l'Etat en a précisé le caractère exceptionnel, Madame Schneider Hausser, tout en priant l'Association 360 de se trouver d'autres recettes !
La majorité de la commission pense que l'Association 360 peut trouver d'autres sources de financement, notamment en augmentant le montant de la cotisation des membres, qui était très bas à l'origine. Je sais que, depuis, les cotisations ont été augmentées. C'est le lieu de rappeler ici que les membres et sympathisants ne proviennent pas tous du canton de Genève, mais d'un rayon allant de Berne à Lyon. Il est aussi envisageable d'augmenter le prix des prestations fournies.
La majorité de la commission constate que le pôle social de l'Association 360 est identique à celui de l'association Dialogai et qu'il constitue donc un cas flagrant de doublon. On rappellera par ailleurs ici que l'activité sociale de «360» est le fruit d'une scission d'avec Dialogai. L'an passé, lors de la soirée anniversaire des 20 ans du Groupe Sida Genève, j'ai eu le plaisir de discuter avec l'une des trois personnes en charge de l'activité sociale de «360». A cette occasion, cette dernière m'a indiqué que ce service ne donnait environ que 120 consultations annuelles, ce qui est réellement très peu pour justifier du personnel à plein temps. Il paraît donc exagéré de consacrer un poste à 100% pour répondre à une seule consultation tous les trois jours. Il est par conséquent indispensable que cette activité de «360» soit intégrée à Dialogai. L'Etat de Genève n'a pas pour vocation de favoriser la multiplication des structures qui remplissent les mêmes fonctions.
La majorité de la commission a pris en compte les explications convaincantes de M. le conseiller d'Etat François Longchamp et demandera le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
En fait, tout ce que je viens de vous dire concerne la subvention 2007: l'Etat a donné une subvention de 7500 F pour 2007; je pense que le conseiller d'Etat, M. Longchamp, pourra nous le confirmer. Nous n'avons pas revu les représentants de l'association depuis, donc, à mon avis, les activités festives très dynamiques de «360» couvrent largement ses besoins.
C'est pour cela que nous vous remercions de suivre l'avis de la majorité de la commission, c'est-à-dire le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Je ne vais pas répéter ce que la rapporteuse de majorité a dit sur les buts de l'Association 360, mais je veux quand même relever que le domaine d'activité de cette association est relativement étendu, même s'il est particulier. Il englobe tout le public dit «LGBT», c'est-à-dire lesbien, gay, bisexuel et transsexuel.
C'est vrai que ce qui est ressorti des auditions, outre les soucis de financement, c'est que les prestations fournies par cette association étaient reconnues par tout le monde comme étant de qualité et ayant leur place dans le panorama genevois. Il est vrai aussi que, même si l'Hospice général est mandaté par l'Etat pour offrir des suivis sociaux et des aides financières à toute la population, ce que nous savons tous, il n'empêche qu'un travail en amont de l'octroi d'aides financières est recommandable, pour éviter justement une trop grande précarisation de certains pans de la population et tout particulièrement de ce milieu qui est composé, il faut le reconnaître, d'une population socio-économiquement modeste.
On ne va pas commencer à faire du détail, par rapport à la différence entre l'Association 360 et l'Association Dialogai, mais il est vrai que cette population LGBT est quand même différente de la population homosexuelle à proprement parler. C'est vrai aussi que la spécificité de «360», ce sont ses deux ou trois pôles distincts. Effectivement, c'est tout le côté festif qui fait que des gens - qu'ils soient LGBT, qu'ils soient comme vous et moi - sont susceptibles de se rencontrer, de connaître un moment de convivialité lors de moments festifs et de donner ainsi à l'association des revenus qui lui sont propres. Cette dernière réalise donc vraiment un effort pour subvenir à ses besoins. Pourtant, du moment où l'on s'engage à proposer des prestations sociales ou des permanences juridiques à des prix raisonnables, ça ne suffit pas, même si les permanences juridiques de «360» sont payantes !
Je vous rappelle que ce qui était demandé au canton, soit 50 000 F, c'est pour trois postes de travail à temps partiel et non pas à plein temps ! Trois personnes vivaient de cela; actuellement, cela n'existe plus. La permanence juridique existe encore, mais deux personnes ont été mises au chômage par manque de financement !
Actuellement et pour 2007, la Ville a sensiblement augmenté sa subvention pour permettre quand même à «360» de subsister et de se réorganiser, mais il est important que, ce soir, nous prenions acte des efforts d'une association, de même que, le social, ça n'est pas rentable, que l'on peut faire du social en amont de l'Hospice général et qu'il faut que ce travail ait une reconnaissance.
C'est pour cela que je persiste - et nous persistons - à demander le renvoi de cet objet au Conseil d'Etat pour clarifier ce qu'il en est de ces financements Ville-Etat qui n'étaient pas clairs à l'époque et ne le semblent pas actuellement. Vu la nouvelle loi sur le chômage, peut-être pourrait-on aider l'Association 360 par des emplois de solidarité et en facilitant son accès à ces derniers, de manière à soutenir le bénévolat, important, qu'elle effectue.
M. René Stalder (L). Je vais être un peu plus vindicatif. Lors de l'audition des pétitionnaires, notre première question avait pour but de comprendre la raison de cette diminution de subvention. Ces derniers nous ont expliqué que l'Etat avait pris cette décision du fait que l'association ne précisait pas le genre de personnes à qui elle s'adressait. Après explications de M. le conseiller d'Etat François Longchamp, les arguments étaient tout autres. En effet, nous avons trouvé dommage que cette association ne nous ait pas fait part qu'elle était - on peut dire ce qu'on veut - issue d'une scission d'avec une autre association, Dialogai, qui est déjà subventionnée. Lorsqu'on prend une décision de séparation, il faut également en assumer les responsabilités !
Nous pensons que les subventions accordées au départ à l'Association 360 - 95 000 F en 2003; 50 000 F en 2004; subvention reconduite en 2005 à titre d'ultime aide et, finalement encore, une aide de 7500 F - auraient dû lui permettre de partir d'un bon pied. Malheureusement, ces aides financières n'ont pas permis à cette association d'être crédible par rapport à la gestion de ces aides. Malgré certaines divergences avec l'ancienne association, nous pensons que l'Association 360 n'a pas mesuré les risques qu'elle pouvait courir lors d'une scission. Il vaut mieux rester uni et avoir quelques divergences que de courir le risque d'une dissolution.
C'est la raison pour laquelle je vous propose, tout comme l'avis de la majorité de la commission des pétitions, le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
M. Pierre Kunz (R). Mme Gautier a expliqué tout à l'heure que la commission n'a porté aucun jugement sur l'Association 360. Permettez-moi, à titre véritablement personnel, d'en porter un, sévère, fondé sur la consultation d'une revue que «360» me fait ou me faisait parvenir régulièrement, semble-t-il, sans que j'en ai fait la demande, comme à beaucoup d'autres personnes, probablement.
Une voix. A moi aussi !
M. Pierre Kunz. Alors, mon jugement est le suivant. Le contenu d'une revue de cette nature se veut médiatique et populaire; eh bien, elle devient, cette revue, d'une vulgarité absolument insoutenable ! Ce fut le cas du dernier numéro qui m'a été adressé par l'Association 360 !
Je vous le dis, je trouve que subventionner une association qui se livre à ce genre de publications, c'est financer et subventionner la vulgarité la plus basse ! (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Béatrice Hirsch-Aellen (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de minorité nous a demandé de prendre acte des efforts de l'Association 360. Nous prenons acte de ces efforts: l'Association 360 fait un travail que tout le monde - ou presque - reconnaît. Malgré cela, le groupe démocrate-chrétien soutiendra le dépôt.
Comme la rapporteure de majorité l'a souligné, l'Association 360 - et plus particulièrement, en l'occurrence, son pôle social - avait demandé une aide ponctuelle et spéciale. Elle a reçu cette aide ! Elle a même reçu par la suite, pendant deux à trois années, une aide exceptionnelle !
Aujourd'hui, pérenniser cette subvention mettrait certainement à mal d'autres associations qui ont besoin d'une subvention pour démarrer.
«360» avait demandé une aide pour démarrer: elle a reçu cette aide. Si elle ne peut pas, à l'heure actuelle, subvenir à ses propres besoins, on ne peut pas pérenniser cette subvention. Nous soutiendrons donc le dépôt.
M. Didier Bonny (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi, en tant que très ancien membre de cette association, de donner quand même deux trois éléments qui pourront, je pense, intéresser les personnes qui siègent dans cette salle.
Tout simplement, je voudrais déjà dire que l'Association 360 ne s'adresse pas au même public que celui de l'Association Dialogai. Si ce sont des personnes qui faisaient partie de Dialogai qui l'ont créée, ce n'est pas suite à une scission, mais simplement pour avoir une ouverture plus large au niveau du monde LGBT. Il faudrait que les choses soient claires sur cet aspect.
Ensuite, par rapport à ce qu'a dit M. Kunz sur le journal, il n'a jamais été question que l'Etat de Genève subventionne le journal ! Le journal s'autofinance avec la publicité, il n'a donc pas besoin de subventions publiques. Les subventions publiques étaient demandées pour les activités sociales, et rien que pour ça !
Depuis que cette pétition a été déposée, un élément nouveau très important est survenu, c'est la répartition des subventions entre la Ville et l'Etat. Or, l'Association 360 est passée à la Ville ! Rien que pour cette raison, nous n'avons plus, ici, à l'Etat, à subventionner cette association, suite à la nouvelle répartition des charges. D'ailleurs, la Ville de Genève et ses conseillères et conseillers municipaux l'ont très bien compris, puisque, lors du vote du budget 2008, ils ont augmenté la subvention de 35 000 F pour, justement, venir en aide à l'association, pour qu'elle puisse continuer à faire son travail social.
A partir de là, effectivement, cette pétition peut être déposée sur le bureau du Grand Conseil, puisque c'est maintenant la Ville de Genève qui assume - et assume fort bien - ses responsabilités.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à Mme Fabienne Gautier... Non, c'est M. Pierre Weiss qui la demande. Est-ce une erreur ?
M. Pierre Weiss (L). Non, Madame la présidente, ce n'est pas une erreur ! Compte tenu de l'élément d'information important que vient de nous communiquer notre collègue Bonny, maintenant il s'agit tout simplement de classer cette pétition qui est désormais sans objet ! (Commentaires.) Mais oui, puisque, précisément, il vient de nous expliquer que, en raison de la répartition des compétences entre la Ville et le canton, ce n'est plus au canton de s'occuper de ce subventionnement ! Nous ne pouvons plus entrer en matière, si j'ose dire ! (Commentaires.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous passerons au vote... (Brouhaha.) S'il vous plaît ! Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes toujours dans le débat et je passe la parole à Mme la rapporteure de majorité.
Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de majorité. D'abord, j'aimerais revenir, comme M. Bonny l'a fait, sur le journal de l'Association 360. M. Kunz n'a pas tout à fait écouté ce que j'ai dit ! J'ai dit que ce journal était vendu en kiosque; il est vendu pour cinq francs et se finance déjà par ce biais. D'autre part, il contient énormément de publicité et il faut savoir que c'est le journal qui fait actuellement vivre l'association. La subvention ne sert donc pas à financer le journal ! M. Kunz n'écoute pas, mais cela ne fait rien... (Brouhaha. La présidente sonne la cloche.) ...je tiens à reprendre ce qu'il a dit !
Par ailleurs, si la majorité de la commission a souhaité le dépôt, c'est qu'elle reconnaît le travail effectué par l'association. Toutefois, nous reconnaissons aussi que, pour une question d'efficience et une meilleure gestion du pôle social de l'association, celle-ci peut tout à fait fusionner avec Dialogai, parce que les mêmes activités sont menées de chaque côté. C'est la raison pour laquelle nous souhaitions le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil, et je continue à dire que le dépôt est une bonne chose.
La présidente. Je vous remercie, Madame -Gautier, et je passe la parole à Mme Lydia Schneider Hausser, rapporteure de minorité.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Deux remarques - les dernières - rapidement ! Il est vrai que, quand des associations commencent à faire un travail d'intérêt public, elles demandent un soutien ou une reconnaissance de la commune ou de l'Etat. Quand une activité démarre, on obtient pendant un certain nombre d'année une subvention extraordinaire qui n'est pas permanente, c'est une aide ponctuelle. Et il est vrai que dans le courant habituel des choses, jusqu'il y a peut-être deux ou trois ans, à un moment donné se posait la question de savoir si l'aide ponctuelle ou extraordinaire devait continuer ou pas. Est-ce que, d'après les prestations fournies, on estime qu'elle doit continuer ? Là, j'aimerais qu'on ne fasse pas un procès d'intention à l'Association 360, en disant qu'elle savait qu'il s'agissait d'une aide ponctuelle, qu'elle devrait arrêter de la demander et que nous devrions retirer notre rapport de minorité. C'était aussi le fonctionnement de ce pays, il y a très peu de temps encore, avant que des économies doivent être réalisées au niveau des dépenses de l'Etat. En effet, les associations devaient faire leurs preuves pour pouvoir, suite à des négociations avec le département, éventuellement présenter un projet de loi de financement plus courant.
La deuxième chose que j'aimerais relever, c'est que je regrette qu'on parle de la scission de l'Association 360 et de Dialogai. Cela date de 1998, c'est de l'histoire ancienne, et l'on ne peut pas baser la pertinence d'une subvention sur l'histoire et sur une scission ! L'octroi d'une subvention doit se baser sur les prestations fournies, sur le travail qui est effectué ou pas par l'association, comme c'est le cas pour toute entité subventionnée.
La présidente. Je vous remercie. Je donne maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat François Longchamp.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous confirme ici deux choses. La première, c'est qu'en 2005, par la voix de mon prédécesseur en charge des affaires de solidarité, le Conseil d'Etat avait accordé une subvention unique, non automatique, liée au démarrage des activités de cette structure.
Les conditions auxquelles cette subvention avait été accordée étaient extrêmement claires, comme le montrent les courriers qui avaient alors été échangés. Par la suite, dans le cadre d'un certain nombre de demandes, des subventions moindres ont été accordées: ainsi, 7500 F pour l'année 2006.
Toutefois, dans le cadre de la nouvelle répartition des subventionnements entre la Ville et l'Etat, nous avons convenu que l'Association 360 devrait être subventionnée par la Ville de Genève, ce que la Ville de Genève a fait et qui assure désormais l'autorité de tutelle de ladite association. Elle a d'ailleurs accordé, dans le cadre de son budget, une subvention complémentaire à la subvention d'origine qu'elle accordait à l'Association 360 pour un montant de 30 000 F.
Il n'y a dès lors pas lieu que l'Etat de Genève finance les activités de l'Association 360 au-delà des promesses extrêmement claires qui ont été faites à l'origine. Ces promesses ont été tenues et il n'était pas question qu'elles aillent au-delà de cette période de démarrage.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1594 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 45 oui contre 19 non et 5 abstentions.
Débat
Mme Béatrice Hirsch-Aellen (PDC), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, juste un peu d'histoire. Une première pétition, ou plutôt deux premières pétitions - la P 1307 et la P 1326 - avaient été déposées en octobre 2002. A l'époque déjà, ces deux pétitions s'opposaient à la fermeture saisonnière des maisons de vacances Florimont et la Nouvelle-Roseraie. Ces pétitions avaient été renvoyées au Conseil d'Etat en 2002. Le Conseil d'Etat nous a rendu son rapport le 14 novembre 2007, dans lequel il signale déjà qu'en aucune manière on ne remet en cause la qualité des prestations prodiguées par ces établissements. De même, dans cette commission, et lors de l'étude de ces deux pétitions, jamais nous n'avons remis en question la valeur de ces établissements, ni le besoin auquel ceux-ci répondaient pour la population. Il s'agit donc de maisons de vacances qui accueillent des personnes retraitées et au bénéfice de l'assurance-invalidité. Là-dessus, toute la commission était d'accord de dire qu'il était nécessaire de garder ces maisons.
Par conséquent, les divergences entre la majorité et la minorité de la commission portent principalement sur la confiance que nous avons en le Conseil d'Etat et, principalement, en la direction du département de la solidarité et de l'emploi et sur les garanties qu'on a pu nous donner concernant le maintien de ces maisons de vacances. La majorité de la commission a estimé que ces garanties étaient suffisantes, qu'il n'était nullement question de fermer, qu'il était simplement question de remettre la gestion de ces maisons à d'autres instances, afin de recentrer la mission de l'Hospice général.
Par conséquent, ne craignant absolument pas une quelconque fermeture de ces maisons de vacances, la majorité de la commission a estimé qu'il était judicieux de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous recommande d'en faire de même.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Je vais tout d'abord me référer au rapport de majorité, dans lequel on lit à la page 3 que M. Longchamp explique que le Conseil d'Etat a demandé à l'Hospice général d'élaborer une stratégie afin de se concentrer sur ses missions principales et de se départir de certains secteurs. L'Hospice général a donc pour tâche de trouver des repreneurs en ce qui concerne la Nouvelle-Roseraie et le chalet Florimont. Il précise que la subvention concernant ces institutions sera retranchée de l'enveloppe de l'Hospice général et confiée à la nouvelle structure.» (Remarque.)
La présidente. Madame la rapporteure de minorité, je vous prie de vous rapprocher un peu du micro, on vous entend à peine ! (Mme Françoise Schenk-Gottret est interpellée. Rires.)
Mme Françoise Schenk-Gottret. La semaine dernière, si mes souvenirs sont exacts, nous avons eu droit à une déclaration du Conseil d'Etat qui disait renoncer à la vente de ces deux institutions hospitalières et semi-hospitalières accueillant des personnes âgées: est-ce l'effet produit par cette pétition qui a recueilli plus de 6300 signatures ? On ose espérer que c'est le cas, cette pétition aura ainsi prouvé son efficacité !
Il faut reconnaître qu'il n'est pas simple de gérer des structures comme celles de la Nouvelle-Roseraie et de Florimont. C'est pour cela que le groupe socialiste estime que c'est le rôle de l'Etat et de l'Hospice général de prendre en charge cette gestion. Aussi, nous vous prions de renvoyer tout de même cette pétition au Conseil d'Etat. (Quelques instants s'écoulent.)
La présidente. Vous avez terminé, Madame la rapporteure ? (Rires.)
Mme Françoise Schenk-Gottret. Oui, Madame la présidente !
La présidente. Excusez-moi, je n'avais pas compris que vous aviez terminé ! (Rires.)
Une voix. Moi non plus !
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le Mouvement Citoyen Genevois soutient les 6380 signataires de la pétition contre le projet de fermeture des maisons de vacances pour aînés «Florimont» et «Nouvelle-Roseraie».
Même si l'on a obtenu certaines garanties, pourquoi cette légitime inquiétude de la part des pétitionnaires à propos du projet de fermeture de ces deux maisons de vacances pour personnes âgées ? Parce que le conseil d'administration de l'Hospice général avait prévu dans son rapport intitulé «Réflexions stratégiques pour 2007-2010» de recentrer sa mission essentiellement sur l'aide sociale et l'aide aux requérants d'asile.
En effet, l'Hospice général s'était prononcé pour une gestion rigoureuse et une consolidation de ses missions et de leur efficience; pour parvenir à cet objectif, il proposait dans leur vision stratégique de transférer certaines de ses activités historiques, notamment l'encadrement socio-médical de nos retraités, en se débarrassant de deux maisons de vacances pour aînés situées à Gryon et à Saint-Légier. En clair, cette proposition de liquider ces bâtiments - alors que ces derniers sont considérés par le Service des assurances sociales et l'hébergement du département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud comme étant des établissements de convalescence et de cure de repos réservés prioritairement à la population âgée de Genève - était purement économique !
Malgré le fait que nos anciens paient entre 95 F et 110 F par jour pour l'hébergement au chalet de Florimont - dont le taux d'occupation, je vous le rappelle, est de 83% - et entre 100 F et 110 F à la Nouvelle-Roseraie - dont le taux d'occupation se situe vers 93% - l'Hospice général est déficitaire de quelques centaines de milliers de francs. L'Hospice général souhaitait donc sacrifier sur l'autel des finances ces maisons de vacances pour personnes âgées, établissements qui s'insèrent dans une perspective d'amélioration de l'état de santé de ces dernières et qui permettent d'offrir un soutien temporaire leur entourage familial.
D'autre part, pour une grande majorité de ces aînés, les séjours dans ces maisons prennent la forme de vacances qu'ils peuvent encore réaliser, alors qu'ils n'osent plus partir à l'étranger et séjourner dans des lieux n'offrant pas d'encadrement. N'oublions pas que l'âge moyen des pensionnaires de ces établissements socio-médicaux est de 82 ans et que le nombre de nuitées se situe aux environs de 12 000 sur une année.
Même si l'Hospice général n'a pas pris de décision ferme sur le transfert d'activité à une autre entité - on ne sait pas qui - nous ne pouvons pas imaginer qu'une entreprise privée puisse reprendre ces établissements en proposant les mêmes prestations socio-médicales qu'une collectivité publique.
En effet, d'un coût raisonnable pour la collectivité, ces maisons rendent un service inestimable dans le réseau de prévention: elles sont non seulement appréciées par les résidents, mais aussi et surtout par leurs familles, offrant à celles-ci un répit dans l'accompagnement de leurs parents dont elles assurent la charge tout au long de l'année. Il faut relever que ces établissements offrent des prestations de qualité et des soins de base, et qu'ils assurent une sécurité à leurs hôtes 24 heures sur 24. Leur clientèle, domiciliée en priorité dans le canton de Genève, est composée de personnes âgées ne pouvant plus participer à des voyages organisés et nécessitant un encadrement médico-social approprié. Environ 3000 retraités fréquentent annuellement ces maisons de vacances. La Fédération genevoise des clubs d'aînés et l'AVIVO s'opposent à toute éventualité de fermeture, ce sont les raisons de ces pétitions, qui faisaient part de leur préoccupation.
Le Mouvement Citoyen Genevois demande que l'encadrement de nos personnes âgées dans ces structures d'accueil figure régulièrement dans le contrat de prestation de l'Hospice général. C'est pourquoi le MCG soutient pleinement les pétitionnaires et les personnes âgées et qu'il demande le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.
Mme Gabrielle Falquet (S). Concernant ce rapport et cette pétition, je souhaiterais relever plusieurs choses. Je crois que ce qui a été dit dans le cadre de la fermeture ou de la non-fermeture de ces maisons est essentiel. Actuellement, nous savons que ces dernières vont rester ouvertes. C'est vrai qu'il y a une grande inquiétude de la part des personnes qui ont signé cette pétition, dont les personnes âgées, mais aussi, on l'oublie, de la part du personnel qui travaille dans ces maisons. Ce personnel a, bien évidemment, eu l'occasion d'entendre de multiples choses, aussi bien vraies que fausses, comme cela se passe parfois dans cette république.
Une chose me paraît essentielle, et on a pu le voir dans le cadre du traitement du mandat de prestation de l'Hospice général: nous avons pu remarquer que ces maisons faisaient quand même partie des priorités du département, malgré la volonté de les transmettre et le fait qu'elles ne cadraient pas avec la mission prioritaire de l'Hospice général. Vous l'avez rappelé, l'Hospice général a deux missions prioritaires que nous, socialistes, considérons comme essentielles. Il faut que le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat puisse maintenir la garantie que ces maisons pourront rester dans le giron de l'Etat, même si leur gestion est reprise par d'autres personnes. Je me rappelle, en tant que magistrate de Vernier, que cette discussion sur la reprise de ces maisons avait déjà largement eu lieu au niveau de l'Association des communes genevoises, de l'Etat et de la Ville de Genève pour savoir qui allait s'en occuper. Personne n'a réussi à se mettre d'accord par rapport au financement !
Je souhaiterais encore ajouter qu'aux yeux du parti socialiste ces deux maisons sont importantes pour nos aînés. Je vous rappelle que nous avons déposé le projet de loi 9921 - actuellement étudié en commission de la santé - sur les actions en faveur des personnes âgées. C'est dans ce cadre-là que l'on devrait aussi traiter de la vie future de ces maisons, afin que nos aînés puissent bénéficier de conditions agréables de vacances et, également, comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de mon audition, qu'ils ne soient pas, encore une fois et à nouveau, des exclus de notre société. Je vous recommande donc le renvoi au Conseil d'Etat.
Mme Janine Hagmann (L). A nouveau, je vais jouer les trouble-fête ! Pourquoi renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, alors qu'un communiqué de presse de l'Hospice général a annoncé le 11 décembre 2007 que ce dernier garderait la gestion de ses activités pour aînés et pour personnes dépendantes ? L'Hospice général justifiait sa décision en expliquant qu'après discussion avec des repreneurs potentiels le conseil d'administration avait décidé de conserver la gestion de la Maison de l'Ancre et des activités pour aînés.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, c'est un peu comme l'Arlésienne: Dieu sait si, depuis que je suis là, j'ai entendu parler de la fermeture de ces maisons ! Il faut quand même savoir quelles questions soulever, et je crois que le conseil d'administration s'est posé les bonnes questions: 1) Est-ce utile ? 2) Est-ce nécessaire ? 3) Est-ce indispensable ? 4) Finalement, est-ce qu'on a les moyens de garder ces maisons ? Parce qu'il faut aussi se poser cette question-ci: quelle est la mission principale de l'Hospice général ? Alors, l'Hospice général a discuté. C'est-à-dire que son conseil d'administration a décidé de garder ces maisons, premièrement parce que je crois qu'il faudrait un énorme courage politique pour les fermer - il n'y avait qu'à entendre mes préopinants ! Et qui oserait se priver d'autant de voix que celles des signataires ? Deuxièmement, le conseil d'administration a aussi pensé au personnel employé dans ces maisons, et je suppose que c'était aussi pour garder des emplois qu'il ne les a pas fermées.
Ce soir, notre débat est vain ! C'est un peu comme la grêle après la vendange ! Je vous propose de soutenir le rapport de majorité, évidemment, puisqu'on sait qu'au printemps 2007 le conseil d'administration de l'Hospice général avait mandaté sa direction afin de trouver des repreneurs pour certaines activités dont il assume la gestion pour des raisons historiques et que soit les maisons pour personnes âgées, soit le CAD - Centre d'animation pour retraités - continueront à être ouverts. Ceux qui suivent les séances du conseil municipal sur Léman Bleu ont entendu, d'ailleurs, la lecture de la lettre envoyée par M. Martin-Achard, président de l'Hospice général, à M. Tornare. Ils se félicitaient réciproquement de leur bonne collaboration sur ce sujet et prenaient l'engagement que ces maisons resteraient maintenant ouvertes.
Alors, il n'y a plus qu'à soutenir le rapport de majorité, Mesdames et Messieurs les députés !
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Mesdames et Messieurs les députés, je vais employer une phrase d'un écrivain: «Les vieillards ont droit au respect, ils n'ont pas droit au commandement.» Cela veut bien dire ce que cela veut dire... Et aussi: «Ce n'est pas parce que je suis un vieux pommier que je donne de vieilles pommes.» Les aînés ont droit au respect, ils ont travaillé toute leur vie et éduqué leurs enfants ! Tout le monde a le droit d'être heureux et bien traité dans ce bas monde ! J'ai l'impression que l'on considère les aînés comme des voitures: une fois qu'ils sont vieux, on les met à la casse ! (Commentaires.) Oui, ça choque, mais je constate certaines attitudes. Désolée, mais moi j'ai la franchise de dire ce que je pense tout haut !
M. Pierre Kunz. Et ça roule ! Et ça roule !
Mme Sandra Borgeaud. Je soutiens le renvoi de cet objet au Conseil d'Etat et j'espère que les pétitionnaires seront satisfaits de l'issue de leur demande. Ceux qui vivent sont ceux qui luttent ! Nous nous devons de respecter nos aînés. Si nous sommes là, c'est grâce à eux ! Si nous voulons assurer l'avenir, c'est avec la sagesse des anciens. Ils sont là pour enseigner de nombreuses choses, car beaucoup d'entre nous sont encore bien ignorants de certaines réalités de la vie. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, cela vous fait passablement rire, mais je pense que certaines personnes âgées aimeraient être respectées et qu'on leur laisse le droit de vivre pleinement leur retraite, ainsi que celui de pouvoir finir leurs derniers jours d'une très bonne manière.
M. Frédéric Hohl (R). Je crois qu'il ne faut pas tout mélanger ! On a tous beaucoup de respect et beaucoup d'amour pour les aînés ! Alors, je tiens, en tout cas au nom du parti radical, à rassurer tous les aînés de ce canton: il n'a jamais été question de fermer ces deux maisons de vacances ! Absolument pas !
Je siège dans cette commission, j'ai même eu le plaisir de la présider lors des auditions, et je peux vous dire que nous faisons pleinement confiance à la Ville de Genève, au canton de Genève et à l'Hospice général: il n'est absolument pas à l'ordre du jour de fermer ces maisons ! Mesdames et Messieurs, vous pouvez rassurer vos aînés, ce n'est pas à l'ordre du jour !
Je vous remercie de bien vouloir suivre le rapport de majorité ainsi que le groupe radical en déposant ce rapport sur le bureau du Grand Conseil.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Roger Golay.
M. Roger Golay (MCG). Merci, Madame la présidente !
Une voix. T'es pas rassuré ?
M. Roger Golay. Donnons un signal clair à nos aînés ! L'ensemble de la commission était en effet sensible au maintien de ces maisons de vacances dans le giron de la collectivité. Toutefois, déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil reviendrait seulement à en prendre acte.
Donnons un signal clair à l'égard de nos personnes âgées ! Démontrons que nous sommes sensibles à leurs préoccupations ! Défendons leur dignité et donnons au Conseil d'Etat le signal que le parlement qui siège aujourd'hui veut maintenir - ceci pour les décennies à venir, voire plus - ces maisons de vacances qui sont dédiées aux aînés par l'ensemble des citoyens encore en activité.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Je crois qu'il est significatif que ces deux pétitions aient existé. Nous avons entendu M. Mouhanna, président de l'AVIVO, expliquer que ce sont les informations contenues dans le rapport de l'Hospice général qui ont déclenché les deux pétitions, celle concernant la Nouvelle-Roseraie et Florimont et celle concernant le CAD, qui va suivre. Je rappelle les déclarations de M. Longchamp dans le rapport de majorité. On peut y lire: «M. Longchamp explique que le Conseil d'Etat a demandé à l'Hospice général d'élaborer une stratégie afin de se concentrer sur ses missions principales et de se départir de certains secteurs. L'Hospice général a donc pour tâche de trouver des repreneurs en ce qui concerne la Nouvelle-Roseraie et le chalet Florimont.» C'est particulièrement significatif ! Et cela explique pourquoi nous, socialistes, nous sommes sentis obligés de faire un rapport de minorité !
Tout ceci explique les craintes des pétitionnaires et les craintes de la minorité ! C'est pour ça que nous vous demandons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Nous aurons alors tout le loisir de lire des explications claires et précises qui pourront - à ce moment-là seulement - nous rassurer.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, j'entends ici le besoin d'explications claires. Je crois que ce doit bien être la sixième fois que je vais répéter la même chose devant cette assemblée, à savoir qu'il n'est pas question pour l'Etat de Genève ou le Conseil d'Etat d'autoriser ou de permettre la fermeture de ces maisons de retraite. Voilà ! Je crois que cela ne pourrait pas être mieux dit que cela !
Il me semblait, Madame Schenk-Gottret, que vous m'aviez posé la question il y a trois mois et que je vous avais donné la même réponse. Et je puis vous assurer que si dans trois mois vous me posez la même question, je vous donnerai la même réponse !
Je vous confirme par ailleurs également que l'Hospice général, dans le cadre du recentrage de ses activités, a souhaité essayer de trouver un repreneur qui assurât la pérennité des installations en question. Nous n'avons pas trouvé de repreneur; nous avons même proposé à l'AVIVO d'exploiter elle-même cette maison, en touchant bien sûr une subvention. Elle n'a pas souhaité le faire. Faute d'avoir trouvé un repreneur, nous avons décidé de maintenir les maisons dans le giron de l'Hospice général, même si cela est un peu curieux en termes de gouvernance puisque c'est l'Etat de Genève qui octroie une subvention à l'Hospice général pour qu'il exploite une maison propriété de la Ville de Genève et elle-même subventionnée par la Ville de Genève. En termes de clarté, vous conviendrez que cela ne semble pas très opportun !
Nous n'avons pas d'autre solution à vous proposer pour l'instant, mais je vous confirme une énième fois que, quoi qu'il arrive, quel que soit le destin administratif et institutionnel de ces maisons pour ce qui est de leur rattachement, il n'est pas question pour le Conseil d'Etat - en aucune manière - de fermer ces deux institutions ainsi que le CAD, dont il sera fait état dans la prochaine pétition. J'entends ici rassurer toutes les aînées et tous les aînés. (Applaudissements.)
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1621 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 39 oui contre 18 non et 5 abstentions.
Débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.) Vous êtes sans doute extrêmement fatigués - les membres du Bureau le sont tout autant, voire plus - mais je vous demande un peu de silence afin que nous puissions examiner le point 42 de l'ordre du jour.
Mme Béatrice Hirsch-Aellen (PDC), rapporteuse de majorité. L'objet change un peu: ici, il s'agit d'une pétition opposée au démantèlement du Centre d'animation pour retraités, le CAD, pourtant, le principe est plus ou moins le même que pour la pétition précédente. A nouveau, la commission a reconnu à l'unanimité l'immense travail qui est fait par le CAD et elle ne désire donc nullement fermer ou démanteler quoique ce soit !
Le directeur de l'Hospice général nous a expliqué que, dans les faits, la réduction des postes n'était pas du tout due à une volonté de démanteler et de diminuer drastiquement les ressources; elle s'explique plutôt par deux départs à la retraite avec le PLEND. Cela a eu pour conséquence que deux postes sont restés vacants pendant six mois. Pour le reste, la réduction était due au 0,5% d'économies demandées par le Conseil d'Etat, le reste des postes étant conservé tel qu'auparavant.
Par conséquent, comme pour la pétition précédente, la commission des pétitions a estimé dans sa majorité qu'elle faisait confiance au Conseil d'Etat et au département de tutelle. On maintient l'animation telle quelle au CAD et on ne va aucunement démanteler celui-ci. Pour cette raison, la majorité de la commission a estimé qu'on pouvait également déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Il est important de rappeler que ce sont près de 15 000 personnes qui ont recours au CAD, et les projets de suppressions d'emplois ne tiennent pas compte des besoins du centre. Les charges induites par ces suppressions seront plus importantes que les coûts de ces prestations.
Les pétitionnaires nous ont rappelé que le CAD a été ouvert il y a quarante ans et qu'il accueille les clubs d'aînés, notamment de la Ville de Genève, ainsi que les personnes qui s'y rendent spontanément. L'activité de ce centre est donc assez intense.
Par ailleurs, le centre répond à un besoin de la population des aînés. Les animateurs y sont en petit nombre et ils donnent également des coups de main aux clubs d'aînés. C'est pourquoi les commissaires socialistes se sont posé de nombreuses questions, dont la plus importante était de savoir qui avait décidé que l'Hospice général se dessaisirait de toutes ses missions, à part celle d'assistance. Pour ces mêmes commissaires, l'évocation de ce recentrage de l'Hospice général sur la seule mission d'assistance est une manière déguisée de démanteler une partie de la mission sociale de l'Hospice général en fragilisant des structures comme le CAD, les maisons de vacances pour personnes âgées, Infor Jeunes, ou la maison de l'Ancre.
Je suis désolée de devoir répéter ce que j'ai indiqué dans le rapport de minorité, mais je pense qu'il s'agit là quelque chose d'important. Ce qui se passe à l'Hospice général est symbolique de la nouvelle gestion publique: objectiver, simplifier, rationaliser, déshumaniser, enfin, brader l'histoire !
Ce n'est pas parce que personne ne voulait de ces structures qu'elles étaient à l'Hospice général ! C'est parce qu'elles apportent des réponses aux risques sociaux qui menacent les personnes aidées par l'Hospice général et ces structures permettent de réduire ces risques: exclusion des jeunes et des personnes âgées, problématiques de l'alcoolisme, entre autres risques.
De nombreuses fortunes et maisons ont été léguées à l'Hospice général de manière intentionnelle, dans l'idée d'aider les citoyens pauvres. Pourquoi donc cette déshumanisation dans la pratique de l'Hospice général, alors que nous assistons à une montée de la précarité ? C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. (Quelques instants s'écoulent.)
La présidente. Est-ce que vous avez terminé ? (Rires.) Excusez-moi, c'est le conseiller d'Etat M. Pierre-François Unger qui me perturbe. (Rires. Commentaires.) La parole est à M. Roger Golay.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas me répéter par rapport à tout à l'heure, je serai très bref. Simplement, comme je l'ai dit, il faut que ce parlement donne au Conseil d'Etat un signal clair de sa volonté de soutenir les infrastructures pour personnes âgées. Donc, nous demandons aussi que cette pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1622 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 32 oui contre 23 non et 2 abstentions.
Débat
Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, 130 millions de femmes sont touchées dans le monde par les mutilations sexuelles féminines. Chaque année, trois millions de petites filles de 4 à 12 ans sont mutilées. En raison de la migration des Africains, la mutilation des petites filles se pratique désormais aussi en Europe. Certains pays ont déjà légiféré contre ces actes de maltraitance; on peut citer ici la Belgique, la France, le Danemark, la Grande-Bretagne, la Norvège, l'Autriche, la Suède et l'Espagne.
L'UNICEF estime que 7000 petites filles et femmes sont concernées en Suisse. Et selon le fonds des Nations-Unies pour l'enfance, le droit suisse protège insuffisamment les victimes, avérées ou potentielles. Ces mutilations sont pratiquées dans la clandestinité: les petites filles sont soit emmenées à l'étranger, soit opérées par des exciseuses venues exprès en Suisse.
En décembre dernier, la commission judiciaire du Conseil national a décidé de donner suite à une initiative parlementaire en faveur d'une interdiction de toute mutilation génitale des femmes. Ce texte demande notamment des poursuites pénales contre toute personne qui pratique ou incite à la mutilation en Suisse, mais aussi contre toute personne qui favorise des excisions pratiquées à l'étranger. L'introduction d'une telle norme pénale est absolument indispensable pour lutter contre ce fléau, car cette interdiction explicite aura un effet dissuasif mais aussi pédagogique.
Parallèlement à ces changements législatifs importants, il est également essentiel de développer des actions de prévention et une prise en charge adéquate des femmes et des petites filles concernées en Suisse.
Par le biais de ce texte, les motionnaires souhaitent que Genève devienne le canton pionnier en la matière. En effet, il y a encore un immense travail d'information à faire auprès des professionnels de la santé, de l'enseignement, du social, mais également auprès des communautés concernées vivant à Genève.
Si nous nous réjouissons, certes, de la création d'un projet de prévention cantonal et d'une collaboration pluridisciplinaire autour de cette problématique, nous regrettons que ce rapport soit plus le reflet d'une prise de conscience et d'une déclaration d'intention plutôt que l'annonce d'actions volontaristes.
Cependant, éternels optimistes, nous espérons que cette collaboration et, surtout, que la motivation des différentes personnes déjà fortement impliquées contre les mutilations sexuelles féminines soit renforcée et que celles-ci se sentent suffisamment soutenues politiquement et financièrement pour aller de l'avant, et nous espérons aussi que leur engagement débouchera rapidement sur des actions de terrain concrètes !
Ce soir, les Verts prendront acte de ce rapport, mais ils resteront attentifs, pour que les intentions annoncées se concrétisent !
M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, à Genève, cité des droits de l'Homme, on parle souvent de torture. Là, on parle de 130 millions de femmes dans le monde qui ont subi un acte de torture ! On ne peut pas appeler cela autrement: l'excision est un acte de torture ! Aucune tradition, aucune religion ne peut justifier un tel acte qui frappe d'abord le corps des jeunes femmes, mais aussi, bien sûr, leur esprit. Cet acte peut avoir des conséquences dramatiques au niveau psychologique !
Heureusement, aujourd'hui, on a l'impression qu'il y a une sorte de prise de conscience mondiale et des gens de tous bords, y compris des dignitaires religieux, se mobilisent pour lutter contre ce drame horrible. Je suis quelqu'un de profondément laïc qui n'a beaucoup de croyances religieuses; il est néanmoins important que les religieux se mobilisent, notamment musulmans. Dernièrement, il y a eu une prise de position très claire de plusieurs dignitaires musulmans, dont le Grand Mufti d'Egypte qui a expliqué que le prophète n'avait pas excisé ses filles et qu'il ne fallait pas procéder ainsi dans la religion musulmane.
On a parfois l'impression que c'est un mal qui touche plutôt des pays éloignés de la Suisse, néanmoins les chiffres sont désormais là: il y a 10 000 femmes ou jeunes filles potentiellement «à risque» en Suisse. Vraisemblablement, à Genève, cité internationale et multiculturelle, il y a aussi des jeunes filles qui subissent l'excision, soit dans leur pays d'origine, pendant des vacances, ou dans des régions limitrophes. Nous ne pouvons donc pas rester sans rien faire.
Nous avons déposé une motion, qui a reçu un large soutien dont on peut se réjouir. Cette motion insiste sur la solidarité internationale: il faut que Genève, ville internationale, se mobilise pour agir dans les pays qui pratiquent l'excision, mais aussi au niveau local: en faisant de la prévention auprès des jeunes filles qui peuvent subir ce drame; auprès de leurs familles qui, par croyance ou tradition erronée, peuvent être amenées à commettre cet acte. Il faut une information et une formation des professionnels, de la santé et du social, qui, aujourd'hui, reçoivent dans leurs cabinets des jeunes filles qui ont subi des mutilations. Et ici, on n'a pas forcément l'habitude de traiter de tels cas.
Il faut aussi des dispositifs de répression: il faut que les parents qui font subir à leurs filles un tel acte comprennent qu'en Suisse ils risquent d'être jugés car ils violent les lois les plus élémentaires des droits de la Femme.
Suite à cette motion et à un soutien fort, manifesté en commission, le gouvernement a fait un rapport tout à fait complet. Je trouvais qu'il manquait un peu de détermination au niveau de l'écrit, toutefois, dans la pratique, il faut avouer qu'aujourd'hui l'administration se mobilise. Il y a eu encore dernièrement des assises consacrées à l'excision; je crois que des hautes fonctionnaires ont pris ce sujet à bras-le-corps pour essayer de faire travailler les gens en réseau, parce que c'est seulement ainsi qu'on arrivera à résoudre le problème.
Je félicite le gouvernement et j'espère qu'il continuera de s'occuper de ce problème avec tout le sérieux requis, pour qu'un jour cesse l'excision à Genève et en Suisse, bien entendu, mais aussi dans le monde entier !
M. Claude Aubert (L). Madame la présidente, Mesdames les députées, Messieurs les députés, Mme Beatriz de Candolle aurait voulu s'exprimer à ce sujet, malheureusement, elle est absente. Donc, je me permets de résumer très brièvement son propos.
Nous pensons que le thème abordé est d'importance majeure et nous avons pris acte du rapport du Conseil d'Etat avec beaucoup d'intérêt, en admettant que cette situation ne devait pas perdurer dans notre pays. En effet, il y a un énorme afflux de personnes qui vont et viennent, et nous devons être extrêmement attentifs au sujet grave qu'est l'excision. Nous prenons donc acte du rapport du Conseil d'Etat.
Mme Gabrielle Falquet (S). Sur un sujet aussi grave et important, je souhaiterais simplement intervenir à propos du terrain. Je pense qu'il est du devoir du Conseil d'Etat d'agir au niveau de la prévention, dans nos écoles. Le Service de santé de la jeunesse réalise à l'école primaire un énorme travail de prévention, que ce soit par rapport aux agressions sexuelles ou par rapport à la pédophilie, et je pense que le département de l'instruction publique devrait se pencher sur la possibilité d'intégrer, aussi au niveau de l'enseignement, la lutte contre l'excision.
Nous avons dans nos classes une multitude d'enfants, représentant une multitude de nations et une multitude de coutumes: nous respectons cela et nous intégrons ces enfants. Toutefois, il y a des choses que l'on ne peut pas accepter... Nous avons des soupçons, nous sommes confrontés à des enfants qui, à demi-mots, à mots cachés, nous expliquent certaines choses; malheureusement, nous n'avons pas, pour l'instant, une structure à laquelle nous référer. C'est pourquoi je pense que ce problème devrait être pris en compte par l'instruction, à l'école publique, à l'école laïque.
J'espère qu'ensemble nous y arriverons et que le département de l'instruction publique, par l'entremise du Service de santé de la jeunesse, pourra faire quelque chose pour que l'on puisse détecter ces atteintes extrêmement graves, afin que la dignité de nos élèves soit respectée.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Le groupe démocrate-chrétien prend bien évidemment acte de cette motion et remercie le Conseil d'Etat de s'être mobilisé. Bien sûr que nous avons tous reçu la Feuille d'avis officielle qui montrait à quel point l'Etat de Genève confirmait son engagement dans la lutte contre les mutilations génitales féminines: c'est primordial. Ont été relevées également l'importance de la prévention dans les écoles et l'importance de faire appliquer la loi, puisque c'est du ressort du droit pénal. En effet, il s'agit d'agressions corporelles graves et c'est quelque chose qu'il ne faut jamais tolérer ! Nous avons des outils pour cela, nous devons absolument les employer pour punir, là où nous pouvons intervenir, ceux qui osent instaurer et perpétuer des actes pareils.
Merci, Messieurs du Conseil d'Etat, et je dis bien «Messieurs», parce que vous avez pris conscience que cet acte, qui touche les bébés, les petites filles, les jeunes filles et les femmes, c'est aussi une affaire d'hommes ! Et plus il y aura d'hommes - avec les femmes - à dénoncer que ces pratiques sont intolérables, plus vite pourrons-nous peut-être développer cette conscience à un niveau qui dépasse nos frontières !
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que votre motion a été pour le gouvernement un stimulus supplémentaire face à cette vague de fond qui surgit depuis quelques mois, quelques années peut-être, et qui concerne ce drame terrible des mutilations génitales féminines. Et quand je parle d'un drame terrible, si c'est évidemment un drame terrible pour celles qui subissent ces mutilations, ceux qui les commettent se font les auteurs d'un crime terrible !
Il s'agit au fond de déconstruire le mythe qui a prévalu trop longtemps que cet acte pouvait être un symbole religieux ou un symbole culturel. Non, Mesdames et Messieurs, aucune religion n'impose la mutilation génitale féminine ! Aucune culture n'impose la mutilation génitale féminine ! Seules des pulsions criminelles - et purement criminelles - sont à l'origine de ce geste effroyable.
Cela nous a donné l'occasion, aidés, il est vrai, par des femmes de l'administration - comme le député Brunier l'a dit - mais aussi par des femmes des milieux concernés, de nous réunir à plusieurs reprises depuis l'envoi de votre motion. Un premier séminaire a eu lieu aux Hôpitaux universitaires de Genève au mois d'octobre. Puis, plus récemment, dans le cadre du département des institutions, on n'a pas simplement refait le point, mais bien engagé un processus. Et vous avez raison de dire qu'il faut que la vigilance reste permanente en pareille matière !
Ensuite, puisque les choses ne sont pas si faciles dans la déconstruction des mythes, permettez-moi de dire que la justice a pris, elle aussi, la mesure de ce que tout cela représentait. A Zurich, un couple sera vraisemblablement condamné à une peine allant jusqu'à dix ans de prison pour avoir fait subir à ses filles des mutilations génitales. A Genève, le Procureur général a eu un geste extrêmement courageux parce que particulièrement difficile: celui de déclasser une plainte qui avait été classée par son propre parquet, au motif que, non, il n'y a pas de fondements de quelque nature que ce soit qui permettent un geste de cette gravité ! Alors, nous n'avons pas encore eu connaissance des suites de ce déclassement mais, tout de même, c'est courageux de revenir spontanément sur un jugement prononcé en son propre parquet par un procureur général ! Nous devons ici souligner le courage qu'il a eu de le faire, face à ce drame qui mutile chaque année des dizaines et des dizaines de jeunes filles et de jeunes enfants à travers le monde ! Je vous remercie.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1694.
Débat
La présidente. Je vous rappelle que cet objet est inscrit en catégorie II, qui prévoit trois minutes de prise de parole par groupe. La motion est du Mouvement Citoyen Genevois; je passe la parole à M. Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, vous avez lu cette motion: il y a eu une petite évolution depuis le 19 février 2007, date de son dépôt. C'est dire qu'il a fallu un an à cette motion pour arriver aujourd'hui en séance plénière. Ce sera certainement confirmé par M. le conseiller d'Etat, Pierre-François Unger, mais le Groupement des frontaliers avait fait recours devant les instances autorisées au sujet des tarifs appliqués. Pour que vous compreniez bien, il faut savoir que vous avez trois types de tarifs applicables en ce qui concerne les Hôpitaux universitaires de Genève. Vous avez les tarifs «Résidents»: les résidents genevois ont un tarif établi par rapport aux assurances-maladies; vous avez les tarifs «Confédérés», s'appliquant aux résidents d'autres cantons suisses; enfin, vous avez les tarifs «Etrangers», pour tous ceux qui habitent en dehors de la Suisse.
Le Groupement des frontaliers avait en son temps fait recours. Les frontaliers bénéficiaient déjà du tarif «Confédérés», ce qui constituait déjà une exception puisqu'ils résident à l'étranger - jusqu'à preuve du contraire, les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie ne font pas partie des cantons suisses ! (Brouhaha.) Eh bien, ils voulaient, en plus, obtenir le tarif appliqué aux résidents genevois ! Alors voilà, tout ça pour vous dire que le Groupement des frontaliers a fait beaucoup de dégâts par rapport aux assurances, parce qu'ils ne sont pas astreints... (Commentaires. La présidente agite la cloche.) Madame la présidente, vous voudrez bien m'arrêter à trois minutes, ce serait gentil. Je vous remercie.
La présidente. Je ne vais pas m'en priver, pour une fois que vous me le demandez vous-même ! (Commentaires.)
M. Eric Stauffer. Comme quoi tout arrive, vous voyez ! C'est simplement pour que mes collègues puissent aussi s'exprimer et qu'on ne se fasse pas prendre par le temps ! Bref, tout ça pour vous dire que le Groupement des frontaliers a réussi l'exploit d'obtenir que les résidents français travaillant à Genève ne soient pas soumis à la sécurité sociale française, qui devrait ponctionner 12% sur leurs salaires au titre de primes. Ils ont réussi l'exploit d'obtenir de ne pas avoir à participer à la solidarité nationale en n'étant pas astreints de cotiser à la LAMal. Ils ont donc pu aller s'assurer auprès d'assureurs privés, qui font évidemment une sélection par rapport à la qualité des assurés et peuvent de ce fait proposer des primes d'assurances-maladie privées, avec assurance de base et en privé, à des prix défiant toute concurrence ! Ces prix font évidemment pâlir d'envie les Genevois.
J'en veux aussi pour preuve qu'avec M. le conseiller d'Etat nous nous sommes battus contre les réserves indécentes qu'ont réalisées les assurances-maladie sur le dos des assurés genevois, ce qui ne touche évidemment pas les frontaliers, puisqu'eux parviennent à payer quasiment 50% de moins de prime !
La présidente. Monsieur le député...
M. Eric Stauffer. Trois minutes ! Voilà, j'ai terminé pour l'instant !
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical va refuser de soutenir cette motion pour une raison très simple.
Un juste rappel s'impose: il y a 60 000 frontaliers à Genève, ceux-ci paient l'impôt à la source et une très petite partie de cet impôt est restituée aux départements français limitrophes. Vu leurs classes d'âges, ces frontaliers contribuent grandement à financer notre système de santé et en bénéficient peu. Simplement pour cette raison, nous n'entrerons pas en matière sur cette motion.
M. Pierre Weiss (L). Il y a toujours dans ce type de projets rédigés par ce groupe une raison apparente et une raison sous-jacente. La raison apparente, dans cette motion, c'est de s'occuper des coûts de la santé; la raison sous-jacente, pour le dire crûment, c'est qu'il s'agit de taper sur un groupe de personnes qui vit avec nous, avec qui nous vivons, qui fait notre prospérité et dont nous faisons la prospérité ! J'y trouve donc de l'indécence ! Et puis, il y a deux points que j'aimerais commenter, dans l'exposé des motifs. Le premier, c'est - et le conseiller d'Etat le relèvera évidemment aussi avec plus de précision - ce qui est dit de l'explosion des dépenses de l'assurance-maladie concernant Genève. Sur ce point, on se rend compte que la motion a vieilli.
Le deuxième point, c'est qu'il est prétendu que les frontaliers sont les responsables de l'explosion des coûts de la santé ou, même s'il n'y a pas explosion, de l'essentiel des dépenses de la santé. C'est le deuxième paragraphe de la page 5. C'est une telle exagération que je crois que cela suffit à fonder la raison pour laquelle le groupe libéral proposera de refuser, comme le groupe radical et comme d'autres groupes, j'imagine, cette proposition de motion. Je vous remercie, Madame la présidente. Cela suffit !
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, pour les Verts, la position est très simple. Nous vivons dans la région genevoise, il y a une frontière au milieu mais nos destins sont communs. Ce texte suinte la haine pour des gens qui vivent avec nous et qui partagent notre destin, un destin commun. Nous ne pourrons accepter cette proposition de motion et nous vous invitons simplement à rejeter fermement ce genre de torchon. Merci ! (Applaudissements.)
M. Michel Forni (PDC). Nous avions cru que les discussions sur l'assurance et ses différents problèmes à Genève, allant des cotisants à la spirale des prix due à l'inflation des services, se termineraient. Un nouveau chapitre a débuté ce soir, alors que nous pensions qu'une stratégie anticrise provoquerait une accalmie et permettrait de naviguer sur la mer des assurances, toujours très agitée. Malheureusement, dans ce scénario, il s'agit d'une déferlante, qui part de l'hospitalisation, rebondit sur les tarifs pour aboutir à crier à l'injustice, à la discrimination ! Finalement, c'est du clientélisme et cette pincée de patriotisme économique est mal placée !
Le groupe PDC vous incite et vous invite également, très sincèrement, à rejeter cette motion.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Roger Golay, à qui il reste trois minutes de parole.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je serai très bref. Il faut savoir que le but des associations de frontaliers n'est pas uniquement d'essayer de jouer une carte spécifique ou de refuser de jouer la carte de la solidarité. Ce qu'ils souhaitent, c'est obtenir une réduction, ou plutôt pouvoir bénéficier du tarif des résidents genevois au niveau des HUG, uniquement pour, ensuite, aller discuter des primes privées avec leurs assurances, afin d'obtenir des diminutions de ces primes, puisqu'ils bénéficieraient alors d'un tarif réduit au niveau de l'hospitalisation.
Cette réduction serait à la charge de la collectivité genevoise et lui coûterait 17 millions de francs. Si nous voulons réduire leurs frais, cela nous coûtera 17 millions, montant à inscrire dans le budget ! A nous de prendre conscience de cet état de fait ! C'est pour cette raison que nous avons déposé cette motion.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Rappaz, vous avez la parole: il vous reste une minute cinquante.
M. Henry Rappaz (MCG). Je n'arriverai pas à terminer, merci Madame la présidente ! Il est vrai qu'il ne faut pas toujours croire que la charité bien organisée commence par soi-même. Toutefois, concernant la motion 1743 déposée par le MCG, il y a une limite à la générosité excessive des partis qui pratiquent le tout aux autres et bien peu pour les nôtres. Non, il n'est pas tolérable de voir la disparité de traitement à laquelle les travailleurs de notre canton sont soumis, face à leur confrères français travaillant chez nous et qui bénéficient d'avantages disproportionnés en matière d'assurance-maladie obligatoire.
On s'aperçoit ainsi qu'ils sont au bénéfice de rabais sur leurs primes d'assurance-maladie qui frisent les 50%, obtenus grâce aux multiples procédures entreprises. En France, ils prétextent ne pas devoir être astreints à cotiser à la lourde sécurité sociale du fait que l'on prélève 12% de leurs revenus en Suisse. Côté suisse, les frontaliers prétextent ne rien avoir à devoir aux assurances suisses au motif qu'ils habitent en France ! Résultat: ils ne contribuent en rien à l'entraide nationale suisse et au financement de la LAMal puisque la majorité des frontaliers prennent des assurances en Hollande ou ailleurs, chez des assureurs privés, dont les primes ne tiennent justement pas compte de la solidarité française ou suisse. Il faut savoir qu'en France voisine les frais dentaires sont remboursés dans l'intégralité et les frais hospitaliers aux HUG le sont à 80%, avec une quote-part - minime - de 5%. Pendant ce temps, notre bon Genevois, dont je suis, se voit flanqué d'une lourde franchise, souvent supérieure à 500 F, voire supérieure à 1000 F, sans oublier les 10% de quote-part sur les frais médicaux qui s'ajoutent encore à la note ! Non, trop c'est trop !
Le MCG s'opposera avec l'énergie qu'on lui connaît à toute discrimination qui frappe injustement les citoyens de notre canton ! Le MCG vous remercie de bien vouloir soutenir la présente motion.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je suis un peu étonné de la tournure que prend un débat qui concerne l'ensemble de la population, puisqu'il est vrai qu'il y a des inégalités importantes au niveau de l'assurance-maladie. Ces inégalités s'expliquent toutefois puisque nous avons là deux systèmes d'assurances totalement différents. Et c'est sur ce point qu'à mon avis la motion du MCG est mal argumentée, bien que sur le fond j'en partage les soucis.
Je préciserai tout de suite à l'intention du MCG et de M. Stauffer que je suis assuré auprès de la LAMal, que ma femme est assurée auprès de la LAMal, de même que mes trois enfants. De ce fait, je participe comme tout le monde à l'effort de solidarité !
Pour n'importe quel ressortissant frontalier qui souhaite s'assurer dans un système privé, il faut savoir qu'un tel système n'est pas forcément aussi bon marché qu'on veut bien le dire. Les primes les plus avantageuses se trouvent effectivement auprès de compagnies hollandaises ou de compagnies spécifiquement destinées aux expatriés, mais cela s'explique de la manière suivante. Vous pouvez être assuré auprès d'une compagnie d'assurances privée quelle qu'elle soit pour autant que vous travaillez en Suisse, mais cela signifie que vous n'êtes assuré que jusqu'à l'âge de la retraite pour votre activité et que vous ne bénéficiez plus du tout de cette solidarité - ou de ce manque de solidarité - à partir du moment où vous arrêtez de travailler ! Cela signifie qu'une fois que le travailleur frontalier de l'entreprise Tartempion quitte son activité, il retombe dans le système de la sécurité sociale. Par conséquent, il y a une prise de risque à contracter ce type d'assurance. Il vaut mieux s'assurer dans un système comme celui de la LAMal pour éliminer ces risques.
Cela étant dit, les primes des travailleurs frontaliers ont fortement augmenté ces dernières années pour deux motifs: d'une part, elles sont beaucoup moins attractives qu'il y a quelques années en arrière, même si elles restent malgré tout encore avantageuses; d'autre part, la montée en valeur de l'Euro et l'inflation ont grignoté, année après année, l'avantage concurrentiel de ces primes.
Il n'empêche que les arguments et les invites formulés par le MCG méritent, de mon point de vue, d'être étudiés. Ce soir, ce que nous avons fait, c'est que nous avons tout simplement refusé le débat ! On a refusé un débat sur le fond qui aurait sa raison d'être ! Pour une famille de quatre ou cinq personnes, il y a vraiment un différentiel de revenu disponible extrêmement important. Ce différentiel de revenu disponible, s'il est fondé sur une négociation tarifaire avec, entre autres, l'Hôpital cantonal, est indécent et mérite d'être examiné sur le plan du droit. Alors, soit la pratique du syndicat des frontaliers est correcte...
La présidente. Il vous faut conclure !
M. Gilbert Catelain. ...et les débat en commission permettront d'établir que cette pratique est tout à fait légale et conforme, et qu'il n'y a pas d'injustice - nous serons alors fixés - soit ce n'est pas le cas, et nous corrigerons le tir !
Mais ne donnons pas l'opportunité au MCG de dire qu'il s'est battu seul et qu'on a voulu s'enfouir la tête dans le sable: ouvrons le débat en commission et nous en reparlerons plus tard si nécessaire !
Pour ces motifs, le groupe UDC soutiendra le renvoi de cette motion en commission.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, afin d'éviter un détour en commission et afin de pouvoir régler le sort de cette motion ce soir - par son rejet, j'espère - je vais répondre aux trois invites telles qu'elles sont formulées, Monsieur le député.
La première invite demande d'«interrompre toute discussion»: c'est fait ! Le Groupement des frontaliers avait fait recours auprès du Conseil fédéral qui a tranché et donné raison aux cantons sur le maintien de tarifs plus élevés pour les frontaliers. Nous avions donc d'abord interrompu les discussions pendant le processus judiciaire, puis appliqué la décision judiciaire.
Quant à la deuxième invite, «refuser toute entrée en matière dans ce domaine avec l'Etat français», c'est également fait ! Pour des motifs extrêmement simples: la Constitution fédérale ne confère aucune compétence de négociation internationale aux cantons. Je dis bien: «aucune compétence en matière internationale» ! C'est la raison pour laquelle, si par impossible quelqu'un était tenté de reprendre ces négociations, ce ne serait évidemment pas le Conseil d'Etat ! Cela pourrait se faire lors d'un nouveau round de discussions bilatérales entre deux entités: la Confédération d'une part et l'Union européenne de l'autre.
La troisième invite demande: «subsidiairement, à saisir le Conseil fédéral afin qu'il étudie la base légale [...]». Eh bien, vous ne m'en voudrez pas de vous le rappeler, le Conseil fédéral l'a étudiée, cette base légale ! Elle est comprise intégralement dans l'annexe 2B des accords bilatéraux signés par l'Union européenne et la Suisse et validés par le peuple.
En conséquence de quoi, cette motion, sans nécessiter un détour en commission, a obtenu une réponse, et ce pour ses trois invites !
On pourrait conclure ici, mais j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est donnée pour dire d'abord que l'exposé des motifs de cette motion contient un certain nombre de petites erreurs, qui n'ont toutefois pas grande importance: au fond, qu'il s'agisse de 13 ou de 17 millions de francs, il y aurait bien un surcoût, de tel ou tel montant, dans tel ou tel cadre, mais je ne veux pas en discuter à l'infini, ce n'est pas là où je voulais en venir ! Toutefois, à la lecture de l'exposé des motifs, j'ai été choqué par les exemples d'acteurs fictifs proposés, à cause de leurs situations et de leurs noms. L'un est étranger et riche: il est reçu de manière bienveillante ! L'autre est autochtone et pauvre: il est reçu de manière malveillante ! Ce type de discours et d'images, Mesdames et Messieurs, ont fait la fortune des politiques les plus atroces que l'on ait vues dans le courant des années 1930. Il suffirait de donner à M. Robert Bonnechance le nom d'un Bernstein, par exemple, et de donner à M. Alain Thérieur le nom de Schmidt pour que l'on comprenne comment le peuple allemand a dévié peu à peu, sur la base d'exemples comme ça, en parlant de choses comme ça, vers la plus atroce des guerres et des... (L'orateur est interpellé.) Ça n'est pas gratuit, Monsieur ! Lisez les textes de l'époque, relisez les vôtres: ce sont des copies conformes !
Très honnêtement, vous pouviez poser les mêmes questions, sans suivre insidieusement le chemin que vous avez toujours refusé de suivre, et qu'à l'avenir j'espère vous refuserez de suivre, peut-être même ce soir en retirant votre motion ! Ce chemin est celui du fascisme rampant ou de la sottise galopante ! (Applaudissements.)
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1743 à la commission de la santé est rejeté par 57 non contre 6 oui.
Mise aux voix, la proposition de motion 1743 est rejetée par 58 non contre 7 oui.
La présidente. Nous arrêtons là nos travaux. Je vous souhaite une bonne nuit.
La séance est levée à 23h.