Séance du
jeudi 24 janvier 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
4e
session -
18e
séance
PL 9688-B
Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je voudrais juste dire qu'il s'agit d'une subvention à Solidarités Femmes. Le nouveau projet a été déposé le 17 avril 2007 et nous sommes aujourd'hui en janvier 2008, soit presque un an après. Le Grand Conseil avait renvoyé le projet de loi une première fois à la commission des finances et il l'a renvoyé une deuxième fois dans la même commission parce que celle-ci avait sabré 100 000 F dans la subvention destinée à l'association Solidarités Femmes. En effet, le Grand Conseil s'est ravisé en plénière - ce qu'il faut saluer, du reste - et il a renvoyé ce rapport à la commission des finances une deuxième fois pour qu'elle revoie sa copie. La commission des finances a rétabli la subvention à raison de 600 000 F et voté ce projet de loi à la majorité: trois socialistes, deux Verts, deux radicaux et deux PDC, contre cinq non: trois libéraux, un UDC et un MCG. C'est justifié pour cette association qui effectue un excellent travail depuis plus de vingt ans dans le canton.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de suivre le vote de la majorité de la commission des finances.
Mme Christiane Favre (L). L'an dernier, le groupe libéral avait accepté de subventionner l'association Solidarités Femmes à raison de 500 000 F annuellement, pour les années 2006 et 2007. Il n'a pas changé d'avis, et refusera donc ce projet de loi. Il n'a pas changé d'avis, parce que les arguments qui ont été présentés par nos commissaires lors du premier débat de la commission restent en partie d'actualité... Pour mémoire: l'augmentation des charges de personnel, l'importance des réserves, l'application de la loi-cadre sur les violences domestiques, qui devaient permettre de rationaliser le fonctionnement des associations et dont on apprend étonnamment qu'elles créent des besoins supplémentaires. Ces questions n'ont pas trouvé de réponse vraiment satisfaisante dans le deuxième débat de la commission.
Dans ce débat, une proposition m'a frappée: arriver à une subvention de 600 000 F en retirant 100 000 F d'un autre budget, en l'occurrence un budget d'achat d'uniformes par le département militaire... Pourquoi pas ? Mais cette proposition donne l'idée qu'il est possible de trouver dans le budget de l'Etat des dépenses dont personne n'aurait eu l'idée d'analyser l'utilité et qui peuvent venir boucher des trous, ici ou là, par la magie d'un vase communicant à disposition de la commission des finances ! Cela ne correspond pas à l'idée que je me fais du travail de cette commission, qui doit veiller, quel que soit le sujet, à ce que les montants inscrits au budget correspondent à une obligation ou à un réel besoin et qu'ils sont bien utilisés pour ce à quoi ils sont destinés. Mais peut-être ai-je cette vision un peu angélique du travail budgétaire, parce que je suis un ancien maire d'une de ces petites communes contraintes par la loi de présenter des budgets et des comptes équilibrés et que vous jugez, dès lors, trop prospères !
Et il est vrai que pour parvenir à l'équilibre - de manière pérenne, s'entend - il faut avoir le courage politique d'analyser la pertinence de chaque dépense, sans tabou, qu'elle soit au profit de l'armée ou des associations féminines. Ces associations qui sont nombreuses, et je m'en félicite, bénéficient d'une subvention totale qui avoisine 3,6 millions. Les 500 000 F que les libéraux sont prêts à accorder à Solidarités Femmes représentent, à 15 000 F près, la somme la plus élevée de toutes celles qui figurent dans ce volet. Ce qui démontre bien que si nous restons extrêmement attentifs aux montants engagés, nous ne remettons absolument pas en cause l'utilité, l'importance et la qualité du travail qu'elle fournit.
M. Eric Bertinat (UDC). L'association Solidarités Femmes nous demande une subvention annuelle et substantielle: 600 000 F pour les années 2006 et 2007. Cette association subventionnée à 100% présente un déficit de 50 000 F et les comptes 2005 qui ont été présentés à la commission des finances n'ont pas été révisés. De plus, nous avons appris qu'une réserve de fonction de 125 000 F a pu être constituée par le simple excédent de subventions cumulées d'année en année.
Le retour en commission de ce projet de loi pour entendre l'association a eu pour résultat de revenir à la subvention initiale de 600 000 F. Pourtant, la masse salariale a laissé plus d'un commissaire perplexe: elle est trop importante et l'adaptation automatique des salaires entre 2003 et 2006 n'est pas acceptable pour une association. Contrairement à ses dires, une association intégralement subventionnée par des fonds publics n'a pas à exiger les mêmes prestations que l'administration publique.
D'autre part, l'ensemble du travail de Solidarités Femmes n'est pas totalement satisfaisant par rapport aux sommes engagées. Qu'il faille huit postes à plein temps pour s'occuper de six cent cinquante femmes qui prennent, pour la plupart, simplement contact avec cette équipe nous laisse perplexes, car cela représente moins de trois contacts par jour ouvrable ! Quinze femmes auraient été prises en charge durant l'année 2004. La proposition de réduire la subvention de 600 000 F à 500 000 F s'expliquait, personne ne contestant l'action de Solidarités Femmes. L'UDC avait alors soutenu cette proposition.
La commission des finances a choisi de revenir à la somme de 600 000 F. L'UDC, par conséquent, ne votera pas ce projet de loi.
M. Jean-Marc Odier (R). Les subventions ont déjà augmenté en 2007. Elles augmentent encore en 2008. C'est d'ailleurs le poste général qui augmente le plus, et c'est bien ce qui n'est pas maîtrisé par le Conseil d'Etat.
Pourquoi, ce soir, accorder, 100 000 F de plus à Solidarités Femmes alors que l'année passée nous avions décidé le contraire. Pourquoi à Solidarités Femmes ? Pourquoi devrait-on prendre une décision différente pour ELISA, pour le Centre Intercantonal d'Information sur les Croyances, la Maison des Associations de Genève ou Le Trialogue, toutes ces associations qui sont examinées à la commission des finances ? Plus globalement, je ne pense pas que la commission des finances et ce parlement puissent se pencher de manière tout à fait rationnelle sur chacune de ces associations et puissent octroyer une subvention à l'une et pas à une autre. Pourquoi accorder une subvention à Solidarités Femmes aujourd'hui, alors que, l'année dernière, nous disions que certaines de ses activités étaient redondantes avec d'autres associations oeuvrant dans le même domaine ? Il me semble qu'il est nous difficile de procéder à un examen sérieux et objectif.
Nous pensons qu'il vaudrait mieux regrouper ces associations par domaines d'activité et que nous décidions d'accorder une enveloppe à chacun de ces domaines d'activités dans le cadre du budget par le biais du Conseil d'Etat. Et les débats devraient également porter sur les domaines d'activité. Cela serait, à mon avis, beaucoup plus normal et beaucoup plus simple, et puis le Conseil d'Etat possède certainement des outils que nous n'avons pas pour examiner les activités de ces associations, les unes après les autres, de manière la plus détaillée possible et la plus rationnelle.
C'est pourquoi, nous prenons ce soir la parole sur ce projet de loi Solidarités Femmes, mais nous n'interviendrons pas lors des débats suivants et nous suivrons les votes effectués en commission. De l'avis général, nos débats devraient porter sur les domaines d'activité et nous devrions accorder une enveloppe financière globale pour chacun de ces domaines.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Pourquoi soutiendrons-nous cette subvention annuelle à Solidarités Femmes ? La première raison, c'est que cette association poursuit un but d'utilité publique, qu'elle fournit des prestations que l'Etat pourrait et devrait fournir. Elle pallie un manque de prestations de l'Etat, dans la mesure où il s'agit bien d'une problématique de santé publique. Cette association a fait ses preuves: elle est l'une des premières à avoir signé un contrat de prestations, à travailler en réseau, et ses comptes sont transparents. Du reste, il y a eu tout un débat sur l'orthodoxie financière de cette association, débat qui a donné lieu à un vote positif en commission des finances. Et puis, tous les éléments techniques ont été vus et revus en commission, donc je ne reviendrai pas sur ce point.
Il est vraiment extrêmement important de donner un signal fort à cette association qui, je le répète, pallie un manque de l'Etat, qui travaille en réseau, qui relève des fonds propres - par exemple, pour le Foyer d'accueil pour femmes.
Monsieur Bertinat, je suis assez surprise de votre lecture des statistiques... En réalité, les huit personnes à plein temps qui travaillent pour cette association reçoivent beaucoup plus de trois coups de fil ou assument plus de trois contacts par jour ! Si vous lisiez attentivement le détail des prestations fournies et du suivi des personnes qui fréquentent cette association, vous verriez qu'il ne s'agit pas seulement de femmes, mais aussi d'enfants vivant dans des familles où il y a de la violence !
Pour nous, il faut donner un signal fort, que le Grand Conseil se prononce enfin sur cette demande de subvention et la vote, car cette association, comme je l'ai déjà dit, pallie un manque de l'Etat.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). En ce qui concerne les violences domestiques, votre parlement avait, en son temps, salué les projets de lois, considérant bien évidemment les violences domestiques comme étant inacceptables.
Or, Mesdames et Messieurs les députés, cette association représente un élément de secours dans le cadre des violences domestiques, dont sont victimes plus particulièrement les femmes, et elle constitue - comme cela a été dit tout à l'heure - un réseau dans le cadre de la prise en charge des familles, des enfants et des femmes, de manière à pouvoir les placer en lieu sûr, et son activité me semble par conséquent importante.
Derrière les chiffres - quand bien même ils peuvent paraître insignifiants pour certaines ou certains d'entre vous, on a parlé de 650 interventions - cela représente également autant de suivis. En effet, il ne s'agit pas seulement d'enregistrer, mais aussi d'assurer un suivi.
En ce qui concerne la subvention de 600 000 F, le Grand Conseil - cela a été dit - n'a évidemment pas les moyens de contrôler si cette somme est bien gérée et si elle est utilisée de la manière la plus pointue possible. A ce sujet, je rejoins le groupe radical lorsqu'il suggère qu'il serait peut-être préférable d'accorder une enveloppe au Conseil d'Etat, et ce dernier détiendrait le pouvoir, notamment au travers de l'Inspection cantonale des finances, d'analyser la manière dont sont utilisés les fonds. Il me paraît en effet important, lorsque nous votons une somme quelle qu'elle soit, pour quelque association que ce soit, que le Conseil d'Etat en fasse un bon usage et puisse contrôler les fonds qui sont mis à disposition des différentes associations. Mais il ne nous appartient pas de décider si telle ou telle association a droit à plus ou à moins d'argent: c'est le travail du Conseil d'Etat.
En fonction de ces éléments, le groupe PDC vous encourage donc à voter ce projet de loi.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à notre ancienne présidente, Mme Anne Mahrer.
Mme Anne Mahrer (Ve). Madame la présidente, je vous remercie, mais je renonce, car ma collègue a dit l'essentiel.
La présidente. Voilà qui est très bien ! Merci beaucoup, Madame la députée. M. Charbonnier, je vous donne la parole.
M. Alain Charbonnier (S). Merci, Madame la présidente. L'essentiel a été dit, mais je voudrais tout de même corriger la déclaration de notre collègue Bertinat, qui fait décidément une drôle de lecture des rapports d'activités. Cela a déjà été le cas au mois de décembre, lors du budget à propos du Centre Intercantonal d'Information sur les croyances: il continue aujourd'hui ! Il vise à gros boulets sur certaines cibles, mais son procédé est un peu grossier. Vous lui transmettrez, Madame la présidente !
En effet, le rapport d'activité, qui figure dans le rapport sur ce projet de loi, montre qu'en 2004 - puisque la subvention devrait s'étendre de 2005 à 2008 - il y a eu plus de 500 usagères, plus de 1400 entretiens ont été réalisés, sans parler des très nombreux téléphones - plus de 2500 - et nuitées - plus de 2300 nuitées - etc.
Par conséquent, Monsieur Bertinat, avant de semer le trouble - pour ne pas dire plus - lisez attentivement les rapports d'activité et faites, s'il vous plaît, en un rapport objectif devant le Grand Conseil ! (Applaudissements.)
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Moi non plus, je n'ajouterai pas grand-chose à ce qui a été dit notamment par M. Ducros, qui a été très complet.
Deux petites choses quand même. Le rapporteur a dit que ce projet de loi datait... Il est vrai que les habitudes des années passées en matière de subventions et de réserves que l'on faisait pour des projets à venir étaient d'une autre logique. Elles ont changé: les associations sont dynamiques. Il est clair que l'on peut encore trouver des réminiscences de ces habitudes ancestrales - ou, plutôt, anciennes - dans des projets qui datent de trois ans.
Par contre, il n'est pas admissible de mettre en doute l'utilité de Solidarités Femmes par rapport aux besoins, d'autant que, en matière de violences conjugales, l'on cherche à créer des lieux pour les hommes, parce que l'on se rend compte qu'il n'y en a pas assez pour répondre à ces situations tragiques. Certes, il y a la police, l'UMUS, des structures, mais cela ne suffit pas: on ne sait pas où loger les femmes vivant dans les situations de crise.
Solidarité Femmes est l'un des maillons de notre réseau social indispensable à Genève, et je vous recommande de suivre le vote et d'accepter ce projet de loi.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Pour la même raison indiquée tout à l'heure, j'attire votre attention sur le fait que les retards dans le traitement des projets de lois par votre parlement a des conséquences fâcheuses... Tout d'abord, s'interroger en janvier 2008 pour savoir quel va être le montant d'une subvention pour 2005 est déjà étonnant !
J'aimerais aussi attirer votre attention sur le fait que Solidarités Femmes faisait également partie des associations concernées par la loi 9902, qui supprimait les doublons entre la Ville et l'Etat. Cette fois, contrairement au Trialogue dont nous avons parlé tout à l'heure, il s'agit d'une association reprise par l'Etat de Genève. Non seulement celui-ci va maintenir sa subvention, mais il va ajouter le montant de la subvention antérieure versée par la Ville de Genève qui était de 126 000 F. C'est pour cette raison que le budget que vous avez voté en décembre dernier fait mention d'une somme de 726 000 F pour l'année 2008.
Sous réserve de comprendre ce projet de loi de 2004 voté en 2008 et parlant d'une part de l'Etat de 600 000 F, à laquelle, conformément à la loi 9902 nous ajouterons 126 000 F, je vous invite à voter le projet de loi qui vous ici proposé. J'attire votre attention sur le fait que la période quadriennale sur laquelle porte ce projet de loi va se terminer. Conformément aux engagements pris par le Conseil d'Etat devant la commission des finances, le prochain crédit quadriennal de Solidarités Femmes devrait vous être proposé d'ici à fin février 2008, c'est-à-dire dans un mois. J'ai l'espoir que le débat sur cette subvention puisse intervenir avant l'année 2012, pour que le projet de loi qui vous sera proposé ait du sens !
Dans l'intervalle, je vous invite à voter ce projet de loi tout en soulignant que les activités de l'association Solidarités Femmes doivent être soutenues, et le Conseil d'Etat estime qu'elles doivent l'être à hauteur de 600 000 F, plus la reprise de la subvention de la Ville conformément à la loi 9902.
Mme Virginie Keller Lopez (S). Je tiens juste à indiquer une dernière fois que le groupe socialiste était opposé au projet de loi qui visait à répartir les subventions entre la Ville et le canton... Nous, nous étions tout à fait favorables à une organisation complémentaire, au partage du contrôle et des évaluations des associations et, éventuellement même, à la mise sur pied de conventions.
La discussion d'aujourd'hui montre à quel point cette nouvelle loi va engendrer de la confusion et de l'insécurité pour les personnes travaillant dans les milieux associatifs, qui, comme l'a dit très justement Morgane Gauthier tout à l'heure, ne font que remplir les tâches qui devraient être effectuées par l'Etat. Nous devons respecter le travail qu'elles réalisent pour toute la population, et j'espère que l'Etat se conduira, ces prochaines années, en partenaire respectueux des besoins des associations et non pas en Etat policier ! Je souhaite également que les associations qui émargent à l'Etat seront aussi bien traitées que celles qui ont plus de chance en émargeant à la Ville.
Mis aux voix, le projet de loi 9688 est adopté en premier débat par 44 oui contre 30 non.
La loi 9688 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9688 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 44 oui contre 30 non.