Séance du
jeudi 8 juin 2006 à
20h30
56e
législature -
1re
année -
9e
session -
41e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.
Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, Robert Cramer, David Hiler, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, et Charles Beer, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Luc Barthassat, Maurice Clairet, Pierre Ducrest, Michèle Künzler, Patricia Läser, Claude Marcet, Yves Nidegger, Jean-Marc Odier, Pierre-Louis Portier, André Reymond, Pierre Schifferli et Louis Serex, députés.
Annonces et dépôts
Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions.
Pétition : La Boillat 2006 (P-1579)
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je demande lecture de cette pétition.
Le président. Etes-vous soutenue ? De justesse. Madame la secrétaire, si vous voulez bien procéder à cette lecture.
Mme Loly Bolay (S). Je n'ai pas mes lunettes.
Le président. Ne vous inquiétez pas, Mesdames et Messieurs les députés, Mme la secrétaire est en état de dissociation: son coeur est avec nous, mais ses yeux étaient ailleurs. (Lecture de la pétition.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.
Le rapport du Conseil d'Etat IN 136-A est renvoyé à la commission législative.
L'IN 136 est renvoyée à la commission législative.
Premier débat
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de minorité. Je ne vais pas entrer ici dans les savants mécanismes proposés dans le PL 9679 parce que personne n'y comprend rien, à moins d'être versé dans la science du fonds d'équipement communal. Je vais rappeler certains points centraux. Premièrement, dans sa déclaration du 30 mars 2006, le Conseil d'Etat a déclaré à propos du budget 2006 - je me permets de citer: «Pour la première fois depuis longtemps, ce budget n'intègre pas de mesures aléatoires quant à leur réalisation». Or, le PL 9679 constitue un magnifique exemple de mesure aléatoire. En d'autres termes, il s'agit d'un expédient peu glorieux. Il y a donc une contradiction manifeste entre les déclarations du Conseil d'Etat et ses actes, tels que retranscrits dans ce projet de loi.
Deuxièmement, en proposant le PL 9679, le Conseil d'Etat ne respecte pas la volonté populaire, qui a été clairement exprimée lors d'un vote en avril 2005. A cette occasion, le souverain genevois a indiqué, sans aucune marge d'interprétation, qu'il ne voulait pas que l'Etat transfère des charges aux communes sans transfert de compétences correspondant. Or, le PL 9679 transfère pour plus 30 millions de charges aux communes sans leur octroyer la moindre compétence supplémentaire.
Troisièmement, avec le PL 9679, le Conseil d'Etat s'assied lourdement sur le préavis de l'Association des communes genevoises qui s'est prononcée à l'unanimité contre ce projet. Dans le débat qui a entouré ce projet, le Conseil d'Etat a adopté l'adage: «Diviser pour mieux régner». Il a cherché à diviser les communes dites riches et les communes dites pauvres en soulignant que seules les mieux loties d'entre elles seraient touchées par le projet. Ce faisant, le Conseil d'Etat fait fi de l'unanimité de l'ACG, association considérée comme représentative de toutes les communes du canton.
Pour finir, le Conseil d'Etat n'a pas hésité - et c'est un comble - à critiquer la gestion des communes pour leur soutirer les trente millions en question. En matière de gestion, il semble que le Conseil d'Etat soit à l'heure actuelle particulièrement mal placé pour faire la morale aux communes si l'on considère les nombreux dysfonctionnements dénoncés semaine après semaine par l'inspection cantonale des finances, qui font la une des journaux.
Je m'étonne donc que nos deux cousins de l'Entente soutiennent ce projet, eux qui ont de nombreux représentants dans les communes. Je considère leur position comme un acte de défiance à l'encontre de leurs magistrats communaux, ce qui me déçoit profondément. Pour tous ces motifs, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à ne pas entrer en matière sur le PL 9679 et, si l'entrée en matière devait être votée, à le rejeter fermement.
M. Pierre Kunz (R), rapporteur de majorité. Je vous prie d'excuser mon retard pour prendre la parole en qualité de rapporteur de majorité. Les finances publiques genevoises sont dans un état calamiteux, mais elles existent. Ce projet de loi, c'est vrai qu'il est calamiteux, mais il a le mérite d'exister. (Rires.)
Une voix. Ah ! Pour un rapporteur de majorité, c'est brillant ! (Exclamations. Brouhaha.)
M. Pierre Kunz. Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de majorité a commencé, dans son rapport, par souligner que c'est avec réticence, voire avec une bonne dose de méfiance que la commission des finances a accueilli ce projet de loi. Plusieurs commissaires ont relevé que ce projet de loi semblait s'inscrire dans la liste des expédients plus ou moins réalistes et plus ou moins honnêtes auxquels le Conseil d'Etat avait pris l'habitude de recourir par le passé. (Brouhaha.) C'est vrai, il faut le reconnaître ! Mais ce qui est nouveau, c'est que cette fois, la majorité de la commission a pu admettre qu'elle devait faire confiance au Conseil d'Etat lorsque ce dernier nous dit - premier point: «Ce n'est pas la politique du fait accompli, nous avons informé les communes»...
Une voix. Elles sont contre ! (Rires.)
M. Pierre Kunz. ... et, surtout... (Brouhaha.) Et surtout, deuxième point: «Nous nous sommes engagés à leur égard à négocier avec elles un plan pour l'avenir tenant compte à la fois de leurs difficultés et de celles de l'Etat. Donc, la commission des finances dans sa majorité a estimé qu'il était possible de croire le Conseil d'Etat lorsqu'il disait que, comme dans le cas des SIG, il s'agit d'ultimes exceptions à une règle que désormais le Conseil d'Etat se fixe et qui consistera à ne plus utiliser ce genre de méthode.
C'est pourquoi la majorité de la commission entend vous convaincre, Mesdames et Messieurs les députés, d'entrer en matière et d'accepter ce projet de loi.
M. Patrice Plojoux (L). Effectivement, après les calamiteuses explications de Pierre Kunz, il faut maintenant mettre les choses au point. Lorsque l'on dit que les communes ont été informées, c'est vrai que M. le conseiller d'Etat a informé les communes. Il n'a pas négocié avec elles. Il n'a pas fait de proposition aux communes, il ne leur a pas demandé leur avis, il les a informées. D'autres négociations ont ensuite eu lieu pour le futur, mais, pour l'instant, les communes ont été informées. Seulement, les communes se sont toutes prononcées contre ce projet de loi. Voilà le résultat de l'information que les communes ont reçue.
Je crois qu'une petite explication de texte est nécessaire, parce que ce projet de loi peut paraître touffu quant aux conséquences qu'il aurait sur les communes. Tout d'abord, il faut savoir que la première des choses que l'on fait est de ne plus doter le fonds d'équipement communal du tiers des droits d'enregistrement, comme les communes y auraient droit. C'est à dire que 45 millions passent à l'as pour les communes pour entrer dans les caisses de l'Etat. Ce n'est pas écrit noir sur blanc: c'est entre les lignes, mais en supprimant un article, on en arrive à cela.
Ensuite, comme le fonds d'équipement doit quand même être doté, eh bien, on va piquer aux communes de quoi doter ce fonds d'équipement. Alors, on augmente les frais de perception des impôts de 1,5%, sans avoir un service supplémentaire à donner aux communes. On prend sur la part des frontaliers qui revient aux communes, on prend également sur les impôts sur les bénéfices immobiliers. Tout cela, on le prend aux communes pour le redonner aux communes et le mettre dans le fonds d'équipement. Alors on arrive à leur reprendre 30 millions pour mettre dans ce fonds d'équipement puisqu'il faut bien le doter. Cela fait en tout 75 millions que l'on prend aux communes pour les mettre dans ce fonds d'équipements. Sur ces 75 millions, d'ailleurs, on se réserve la possibilité d'en reprendre 17 pour des travaux que l'Etat aurait envie d'effectuer. Voilà la situation. Elle n'est peut-être pas très explicite dans ce projet de loi, mais c'est la réalité.
J'aimerais vous dire également que, quand on dit que les communes sont riches et bien portantes, c'est vrai - notre ami Cuendet s'est exprimé là-dessus - elles sont bien portantes, mais pourquoi ? Parce que les communes n'ont pas le droit de faire des budgets déficitaires. Ce serait peut-être une bonne chose que l'Etat doive faire de même. Et puis, les communes ont pu juguler leurs dépenses plutôt que de dépenser d'une manière un peu plus négligée, comme d'autres collectivités peuvent le faire.
Les communes ne sont pas du tout opposées aux transferts de charges, elles aimeraient simplement que ces transferts de charge soient négociés, ce qui se fait actuellement avec le Conseil d'Etat, et qu'ils soient compensés par des compétences supplémentaires pour les communes. C'est aussi par respect de la volonté populaire exprimée l'année passée - pour respecter simplement ce que le peuple a demandé - que les libéraux, dans la ligne de M. Cuendet et de son rapport de minorité, refuseront ce projet de loi.
Le président. La parole est à M. Gabriel Barrillier. Sont encore inscrits: MM. Christian Bavarel, Christian Brunier, Alberto Velasco, Eric Bertinat et M. le conseiller d'Etat Robert Cramer.
M. Gabriel Barrillier (R). Le groupe radical a l'habitude de se réunir une semaine avant les séances de notre Grand Conseil dans une interface avec les magistrats communaux de notre parti. Je dois dire que ces réunions sont très bien suivies. La dernière fois, il y a une semaine, vous pensez bien que le chef de groupe a souhaité s'entretenir longuement du PL 9679-A, puisqu'il touche à l'autonomie cantonale, à la question de la péréquation cantonale, à la répartition des charges. A fortiori suite à la votation qui a eu lieu l'année passée. J'aimerais vous dire, parce que j'ai entendu des remarques sur l'autonomie communale, que nous n'avons pas peur de l'autonomie communale; nous avons une concertation avec nos magistrats. A la séance de jeudi dernier, il y avait des conseillers administratifs de communes telles que Meyrin, mais aussi Bellevue ou Thônex, donc des communes riches ou moins riches, pour utiliser ce qualificatif. Eh bien, Mesdames et Messieurs, je dois vous dire que ces magistrats ont estimé à l'unanimité qu'ils pouvaient faire un effort. Pour deux ans.
On nous dit qu'il n'y a pas de négociations. Moi j'ai compris qu'il y en avait quand même eu avec l'Association des communes. Mais j'ai aussi compris, et là je n'engage que moi... Ce n'est pas la première fois, et dans d'autres secteurs - je n'entrerai pas dans les détails - notamment en matière de soumissions et d'adjudications, que l'on discute avec l'Association des communes genevoises ou avec son comité; alors les gens vous écoutent, mais, je suis désolé de vous dire, je me demande si cette association a vraiment du pouvoir...
Lors de la séance de jeudi dernier, il y avait le vice-président de l'Association des communes genevoises - je pense qu'il participe aux séances de bureau. Dans un esprit constructif, nos magistrats nous ont dit qu'ils soutiendraient les deux députés radicaux à la commission. Mais là, je m'adresse au président Cramer et je dois dire que je suis obligé de durcir un peu le propos. On nous a dit qu'il y avait deux groupes de travail: un sur la péréquation et un sur le transfert des charges. D'après ce que j'ai compris des explications de ces magistrats, les travaux de ces deux groupes avancent cahin-caha. Ce n'est pas le grand amour, ce n'est pas l'efficacité non plus. Ils ont l'impression d'être un peu joués, je dois le dire. C'est vrai que le département ou, en tout cas, les représentants du département ont les outils en main. Donc, pour le moment, il y a une négociation, elle se passe comme elle se passe. J'en ai déduit des propos des magistrats qu'ils veulent jouer l'exercice 2006-2007. Le montage est compliqué, je suis d'accord, mais ils ont ce sens de la responsabilité et de la solidarité puisque des communes riches et moins riches étaient représentées. J'ai dit à M. Cramer: «Vous avez une année et demie pour parvenir à un résultat en ce qui concerne la péréquation et la répartition des charges.» Moi, il n'y a que cinq ans que je suis au Grand Conseil, j'ai eu fait des rapports de la commission des affaires régionales sur les rapports communaux; chaque fois on dit: «Ah, mais ça c'est un sujet !» et je me rappelle que mon collègue Plojoux, assis à côté de moi, me disait qu'il ne fallait pas aborder cela, parce que l'on était en train d'étudier la question avec l'association et le département. Je constate que depuis cinq ans - mais c'est plus ancien - il ne s'est pas passé grand-chose.
Je pense qu'il faut saisir maintenant cette opportunité, ce signe de confiance, et puis, dans l'année qui vient, arriver à des résultats en matière de péréquation et de répartition des charges, sans quoi les magistrats ne seront pas aussi magnanimes dans deux ans.
M. Christian Bavarel (Ve). Je pense que notre collègue Cuendet manque d'ambition. Je vais vous expliquer le mécanisme... Non, rassurez-vous, je plaisante ! On a sept minutes seulement de parole, je vais donc éviter de passer trop de temps là-dessus.
La difficulté qu'on a aujourd'hui, c'est le budget de l'Etat de Genève, qui est effectivement, tout le monde le reconnaît, dans une situation difficile. Il se trouve que les communes - pas toutes, mais la majorité d'entre elles - ont plus de moyens. Il est vrai, comme l'a relevé M. Kunz - mais je le dirai dans d'autres termes, car il est toujours difficile d'être allié avec M. Kunz, même si c'est avec un certain plaisir qu'on peut l'être - que la situation de certaines communes est plus confortable que celle de l'Etat. Quand on voit l'équilibre des charges entre les différentes collectivités publiques, on se rend compte qu'il va falloir trouver une solution.
Je rejoins Gabriel Barrillier en disant qu'effectivement le Conseil d'Etat doit négocier et trouver une solution pérenne, qui ne soit pas à moitié satisfaisante, comme celle que nous avons aujourd'hui. La solution actuelle a cependant le mérite d'exister, de permettre un meilleur équilibre de notre budget, d'être supportable pour les communes et d'offrir ce temps de négociation. C'est donc sans enthousiasme, mais avec un certain sens des responsabilités que les Verts vous demandent d'accepter ce projet de loi.
M. Christian Brunier (S). En lisant les rapports et en entendant certains députés, je pense qu'il faudrait faire attention lorsqu'on évoque la problématique des finances publiques genevoises. Les finances publiques sont compliquées et il faut les analyser avec lucidité. La santé financière de Genève n'est pas excellente, c'est clair, et je pense que nous sommes unanimes pour le dire. Néanmoins, qualifier Genève de canton au bord de la faillite, vous savez très bien que ce n'est pas vrai. Et quand vous dites cela, vous faites du populisme, et c'est très grave parce que vous discréditez Genève, notamment sur les marchés financiers. (Rires. Commentaires.) Les libéraux rient, mais M. Walpen, qui a dirigé les finances genevoises et qui est libéral aussi, rit un peu moins ! Parce que ce n'est pas rigolo, comme histoire.
Des voix. Oh !
M. Christian Brunier. Prenons l'exemple d'une entreprise, avec une santé financière qui présente des dangers mais aussi des atouts - ce qui est le cas de Genève. Vous savez que, quand on parle d'entreprises, il y a des côtés très psychologiques, de communication, et que lorsqu'une entreprise ne croit plus en elle, eh bien, elle est discréditée sur les marchés financiers ! Et ces derniers temps, lorsque vous parlez du Canton, de la République de Genève, vous criez tellement au loup, vous êtes tellement alarmistes, que premièrement vous n'êtes pas dans une analyse pragmatique de la situation et que, deuxièmement, vous faites du tort au Canton. Il faut vous en rendre compte !
Essayons, dans ce parlement, de capitaliser sur les atouts de Genève. Je crois que nous sommes un canton, une République, qui a plein d'atouts au niveau économique, au niveau social et au niveau environnemental, et nous avons tout intérêt à développer cette politique pour être crédibles auprès des instituts financiers, auprès des autres cantons, auprès de notre population.
Cependant, il faut que nous abordions l'assainissement. Il y a diverses manières: les slogans politiques - je pense que c'est la plus mauvaise manière, que nous avons pourtant tous utilisée, aussi bien à droite qu'à gauche, ce qui n'a pas donné beaucoup de résultats, et il y a ceux qui veulent faire du sprint à coups d'annonces de presse en disant qu'ils vont redresser les finances en moins de deux. Ce sont de belles promesses électorales qui n'apportent pas grand-chose. Puis il y en a d'autres, mais pour le moment il faut donner un certain crédit au nouveau gouvernement qui analyse avec une certaine lucidité la santé financière du canton et qui considère qu'on n'est pas dans un sprint, mais dans un vrai marathon. Cela va être dur, cela va être long, mais il faut vraiment prendre des mesures en profondeur, des mesures de vrai changement au niveau de la République. Ce ne sera pas facile, mais on peut y arriver, et on ne va pas brusquer les choses, on va éviter tous les à-coups, toutes les fractures qui provoquent plutôt des manifestations dans la rue que l'assainissement des finances publiques.
La mesure qui nous est proposée aujourd'hui, et par l'ancien gouvernement, il ne faut pas l'oublier, ne colle pas vraiment à ceci. Ce n'est pas une mesure dans la durée, ce n'est pas une mesure profonde qui va redresser les finances publiques. Par contre, c'est une mesure momentanée. Une mesure pas géniale, il faut l'avouer, et en commission nous étions nombreux, députés de droite comme de gauche, à douter de l'efficacité de cette mesure. Néanmoins, on peut se dire qu'avant que la politique en profondeur et que le marathon apportent un certain progrès il faut quelques mesures d'urgence ! Ce projet de loi fait partie de ces mesures d'urgence qui permettent de colmater momentanément la situation, avant que les mesures prises actuellement par le gouvernement puissent porter leurs fruits. Vous savez très bien que les réorganisations de l'Etat prennent du temps, il n'y aura pas d'effet dans les trois jours, ceux qui annoncent cela sont des menteurs, des gens qui font du populisme. Ces mesures prendront du temps pour être assimilées et apporter un certain retour sur investissement. Alors, il faut adopter un certain nombre de mesures d'urgence pour garantir la santé économique de ce canton et on pense que, même si elle n'est pas géniale, cette mesure-ci est possible.
Sur tous les bancs, des gens qui ont reconnu qu'il y a, au niveau des finances communales, une meilleure santé économique; il y a des communes même très privilégiées ! Disons-le clairement: à Genève, sur un petit territoire, il y a des communes qui ne savent plus quoi faire de leur argent ! Il y a quelques communes pauvres, c'est vrai, mais il y a des communes qui ne savent pas comment dépenser leur argent: alors qu'elles ont une infrastructure qui dépasse largement les besoins de leur population, elles proposent des diminutions d'impôts ! Quand juste à côté, le Canton crie un peu famine... Il faut donc redresser cela, demander un peu de solidarité aux communes. Sur une période de deux ans, on pense que c'est possible, d'autant plus - et cela a été dit - que la répartition entre les charges et les coûts à assumer n'est pas en relation: 18% des charges publiques sont assumées par les communes alors qu'elles empochent environ 25% des ressources financières. On voit donc qu'elles sont très à l'aise et qu'on peut leur demander un peu plus de solidarité.
Cependant, il y a un défaut dans cette loi, c'est qu'elle demande autant de solidarité aux communes défavorisées qu'aux communes très riches. Alors, on aurait pu être meilleurs à ce niveau-là ! Il y avait une majorité qui ne le voulait pas à la commission des affaires communales. Finalement, on va demander à tout le monde la même solidarité, c'est peut être l'aspect qui nous gêne le plus. Toutefois, on compte sur le gouvernement pour que la redistribution de ce qu'il va encaisser soit plutôt dirigée vers les vrais besoins des plus défavorisés de ce canton, et des familles et des personnes avec des revenus moyens, pour répondre aux besoins prépondérants de la population.
Pour conclure, nous allons soutenir ce projet de loi. Je rappelle quand même que lorsque les libéraux, suivis ensuite par les autres partis de droite puis par une majorité de la population, ont voté la diminution d'impôts de 12%, les communes n'ont pas été touchées. Le projet de loi épargnait totalement les finances communales. Par contre, il touchait les finances cantonales. Je rappelle encore - je pense que c'est utile parce que certains ont la mémoire courte - que ceci a produit des diminutions d'impôts relativement faibles pour les petits et les moyens revenus, c'est-à-dire la majorité de la population. Aujourd'hui, la plus grande partie de la population ne sent pas vraiment le rabais de 12% ! En revanche, une certaine minorité, avec de gros revenus, a apprécié le cadeau fiscal. Mais l'addition est lourde ! Je rappelle que l'addition, c'est 1,5 milliard de perdu par le canton.
Des voix. Faux ! C'est faux !
M. Christian Brunier. Oui, 1,5 milliard perdu par le canton ! Et cela n'a produit aucun redémarrage économique ! (Brouhaha.) Aujourd'hui, on doit corriger la politique que vous avez menée pendant des décennies: eh bien, on est prêts à voter ce projet de loi pour corriger vos erreurs ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Mon collègue a parlé suffisamment et je veux juste ajouter un élément: je vois que certains élus sont à la fois députés au Grand Conseil et élus municipaux. Parfois, on ne sait pas où leur siège se trouve. J'aimerais rappeler que nous sommes une république et que quand on siège dans cette salle ce sont les intérêts de la République qu'on doit défendre par rapport aux 43 - disons - petits Etats. J'aimerais rappeler une chose, c'est qu'en ce qui concerne les fameux 17 millions, il faut le dire, il y a 13 millions qui ne sont pas touchés, ils vont aux communes, et 17 autres millions qui - Mme Brunschwig Graf l'a dit - participeront au financement d'autres projets de nature intercommunale et cantonale, comme dans le domaine des transports publics et régionaux ! Ces 17 millions, en réalité, vont financer des infrastructures qui profitent aussi aux communes ! Alors, ne dites pas que les communes seront prétéritées par la perte de ces 17 millions, s'il vous plaît ! Ce n'est pas vrai. Les 17 millions qui seront soutirés iront dans un fonds, on l'a justement introduit dans le projet de loi, il y a un alinéa qui rectifie cela.
Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas vrai que les communes seront vraiment prétéritées par ces 17 millions, puisqu'en réalité il y a des infrastructures qui leurs reviennent. Donc, comme mon collègue Brunier vous l'a dit, nous voterons ce projet de loi.
M. Eric Bertinat (UDC). L'UDC soutiendra le rapport de minorité parce qu'elle est, d'une manière générale, opposée aux reports de charges sur les communes. Cela dit, nous trouvons la manière utilisée un peu brutale. De plus, elle est à critiquer quant à la période dans laquelle elle est proposée. Nous avons bouclé hier le budget, qui est à nouveau déficitaire, comme lors des années précédentes. Le Conseil d'Etat n'a trouvé pour essayer de diminuer ce déficit que de proposer des transferts d'actifs qui, comme chacun d'entre vous le sait, ne pourront être opérés qu'une seule fois. Le Conseil d'Etat a également proposé une série de mesures dont on attend les effets et qui ne permettront pas d'apporter beaucoup d'argent au budget. Cela me fait dire que demander 30 millions aux communes, à coup de petites demandes, ce qui, pour certaines communes, risque d'être très lourd, montre les limites du ninisme que le Conseil d'Etat défend et qui sera un jour mis devant le fait accompli. Notre groupe, dans tous les cas, ne voit pas comment on pourrait échapper à cette remise en question.
Voilà toutes les raisons qui font que nous soutiendrons le rapport de minorité.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Lorsque mon collègue Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, a présenté les amendements que nous avons opérés sur le budget pour l'année 2006, il a eu ce mot que je me permets de reprendre à mon compte s'agissant de ce projet qui, dans le fond, s'inscrit dans le processus budgétaire. Il a dit que le budget qu'il présentait était mauvais, mais qu'il était vertueux et transparent. Je vais essayer de vous dire en quoi ce texte n'est pas très bon et pourquoi, en même temps, il y a eu de la transparence dans la démarche et pourquoi il va dans le bon sens.
Qu'il ne soit pas satisfaisant, je crois que c'est une évidence aux yeux même de ceux qui le soutiennent. On a entendu dans la bouche de M. Brunier, dans celle de M. Bavarel et tout d'abord dans celle du rapporteur de majorité, qu'au fond il s'agit d'expédients. Vous avez raison, Monsieur le rapporteur de majorité, il s'agit bien ici d'un expédient, mais d'un expédient qui est limité dans le temps, à deux ans. Idéalement, on aimerait bien faire des budgets qui ne reposent pas sur des expédients. Donc, assurément, nous faisons quelque chose que nous n'avons pas très envie de répéter. Mais nous essayons de le faire proprement et de façon transparente. Proprement, cela veut dire par exemple que le Conseil d'Etat a demandé l'urgence aujourd'hui pour que vous puissiez examiner cet objet.
Pourquoi avons-nous demandé l'urgence ? Parce que nous ne voulons plus rééditer ce à quoi nous avons eu recours dans le passé, c'est-à-dire, d'arriver à un vote budgétaire qui soit fondé sur un certain nombre de rentrées dont on n'est pas certains. C'est pour cela que nous avons demandé l'urgence, pour qu'au moment où vous allez voter le budget pour l'année 2006, ce montant d'une trentaine de millions de ressources de l'Etat, vous sachiez qu'il repose sur une loi qui a été adoptée par le Grand Conseil et non pas sur une loi qui devrait être adoptée par le Grand Conseil dans le cadre du débat budgétaire et qui serait ensuite sujette à référendum, contrairement à la loi budgétaire.
Dans le même temps que nous nous imposons cette discipline de faire en sorte, ce qui est vertueux, que le budget que vous allez voter repose sur des ressources fiscales les plus certaines possible, je vous dis que, même si le mécanisme qui est mis en place est un peu difficile à comprendre - quoique le rapporteur de minorité est trop modeste, j'en ai trouvé une description remarquablement claire en un alinéa dans la deuxième page de son rapport de minorité et je l'en félicite; j'ai été beaucoup plus long en commission des finances pour décrire ce mécanisme - quand bien même ce mécanisme est un peu compliqué, la démarche est transparente.
Tout d'abord parce que ce n'est pas une fois, ce n'est pas deux fois, mais c'est trois ou quatre fois que seul ou accompagné de Mme Martine Brunschwig Graf, je suis allé présenter cet objet au comité de l'Association des communes genevoises. Personne n'a été pris par surprise. Ce document a été connu. Je ne dis pas qu'il a été approuvé, je dis qu'il a été connu. Il a été suffisamment connu pour que, même sur le plan technique, et j'insiste bien sur ce terme, nous ayons pu bénéficier d'un certain nombre de conseils avisés de la part de l'Association des communes genevoises pour faire un texte qui, même s'il n'était pas souhaité par cette association, était au moins le plus praticable possible.
A cela s'ajoute que le Grand Conseil, pour sa part, a également été très largement associé à la rédaction de ce texte et que, du reste, la commission des affaires communales, régionales et internationales a proposé des amendements, qui ont tous été adoptés et qui allaient tous dans le sens de donner aux communes un meilleur contrôle du mécanisme mis en place. Finalement, il y a, pas suffisamment, je vous le concède, Monsieur Brunier, mais un peu tout de même, un aspect péréquatif dans la loi qui vous est proposée, dans la mesure où l'une de ses dispositions traite de l'impôt sur les produits des ventes immobilières. Sur ce point, on sait qu'il n'est pas également réparti selon les communes. Cela donne à ce projet de loi un certain aspect péréquatif.
Je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à retenir ces chiffres: aujourd'hui, les ressources fiscales de ce canton sont partagées à hauteur de 75% pour l'Etat et de 25% pour les communes. Les charges supportées par les collectivités publiques le sont à hauteur de 82% pour l'Etat et de 18% pour les communes. Il y a d'évidence quelque chose qui cloche. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie d'une part que les communes doivent probablement assumer plus de charges et, d'autre part, que des transferts de ressources doivent se faire au profit de l'Etat. Cela, nous le savons ! Et cela, c'est le grand chantier, Monsieur Barrillier, je vous ai entendu avec attention, vous avez mille fois raison: cela, c'est le grand chantier que nous sommes actuellement en train de mener dans le cadre d'un groupe de travail qui s'appelle Ville-Etat-Communes. Ce groupe a retenu quinze pistes qui ont dû être validées par nos instances respectives. Ces dernières en ont validé une grosse dizaine et, maintenant, nous allons nous attacher à faire en sorte que, dès le premier semestre de l'année prochaine, le Grand Conseil soit saisi de projets de lois qui actualisent ces pistes.
Si nous vous demandons cette mesure, dont nous savons qu'elle est trop mécanique, donc mauvaise, pour une durée de deux ans, c'est parce que nous avons effectivement l'ambition que, dans le temps que nous nous donnons, nous aurons la capacité d'aboutir à un certain nombre d'accords qui nous permettront de revenir avec de vraies propositions. Ces propositions, je m'empresse de le dire, porteront forcément sur des transferts financiers qui seront bien plus importants que la trentaine de millions dont on parle ici, mais qui seront aussi bien plus satisfaisants. En effet, des responsabilités seront transférées dans le même temps, ce qui est le point le moins satisfaisant dans le projet de loi qui vous est soumis. Même s'il y a un lieu de concertation au sein du fonds d'équipement communal sur la façon dont nous allons utiliser ces ressources, cela est totalement insatisfaisant, nous le savons: il faut que l'on parle de plus d'argent et de plus de responsabilités pour les communes.
Ce chantier, nous sommes en train de le mener, et notre responsabilité, effectivement, c'est de le faire aboutir non pas d'ici à la fin de l'année prochaine, mais à temps pour qu'il puisse produire ses effets dans le budget de l'année 2008. C'est dans cet esprit et avec cette ferme volonté du Conseil d'Etat que je vous demande de bien vouloir accepter ce projet de loi.
Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 50 oui contre 26 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement par M. Weiss qui demande la parole, et à qui je la donne. La demande d'amendement est probablement en cours de distribution, elle vient de parvenir au Bureau. Cette proposition se borne à ceci: «Article 1 (souligné): biffé». C'est inhabituel, puisque cela revient pratiquement à faire disparaître tout le texte de la loi. J'attends les explications de l'auteur de cette proposition d'amendement.
M. Pierre Weiss (L). Bien volontiers, Monsieur le président. Au fond, quel est l'objectif global de ce projet de loi ? Quel que soit l'endroit d'où viennent les millions récupérés par le Conseil d'Etat, il s'agit tout simplement de couvrir les dépenses supplémentaires qu'occasionne le dépôt, par ce même Conseil d'Etat, d'un projet de loi sur le redémarrage partiel des mécanismes salariaux en faveur de la fonction publique. Ce qui est donné aux uns est pris aux autres. Comme disait notre ancien collègue Mouhanna, il ne faut pas déshabiller Marc pour habiller Pierre. C'est exactement ce que fait le Conseil d'Etat en la matière... (Commentaires.)
Raison pour laquelle, Monsieur le président, nous proposons en fait le refus de ce projet de loi par la suppression de l'article 1 (souligné). Au surplus, s'il fallait une autre motivation, il s'agit pour nous de respecter la volonté populaire telle qu'elle s'est exprimée l'an passé. Je rappelle au passage que, unanime, l'Association des communes genevoises est opposée à ce projet de loi. Nous entendons aujourd'hui manifester notre soutien aux communes, dans le respect de la volonté populaire, et ne pas être favorables à la manoeuvre à laquelle s'est livré le Conseil d'Etat sur le dos des communes dont il essaie ainsi de tondre la laine.
Le président. Je trouve que cette proposition d'amendement ressemble exactement à la conclusion du rapport de minorité qui demande le refus de ce projet de loi, mais je ne veux pas que l'on perde de temps sur des questions théoriques.
Mme Carole-Anne Kast (S). Fondamentalement je vais faire très court, puisque mon intervention revient à peu près à ce que vous venez de dire. S'il suffit d'être opposé sur le fond à un projet de loi pour proposer un amendement visant à biffer l'article 1 (souligné), c'est ce que l'on appelle dans le domaine judiciaire une manoeuvre dilatoire. Donc, je ne comprends pas. Et si vous désirez que cette pratique se généralise, nous pouvons aussi préparer des amendements sur tous les projets de lois auxquels, finalement, nous sommes opposés. Cela va nous faire gagner beaucoup de temps et d'efficacité dans ce parlement ! Nous proposons donc de refuser cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 25 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
La loi 9679 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9679 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 53 oui contre 28 non et 1 abstention.
Le président. Je salue la présence à la tribune de notre ancienne collègue Mme Marie-Paule Blanchard-Quéloz. (Applaudissements. Exclamations.)
Débat
Le président. Je donne la parole à Mme Schenk-Gottret. (Brouhaha.)
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). J'attends que cela se calme un peu... (Brouhaha.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, les palabres se font en dehors de cette salle ! Nous sommes, nous, totalement concentrés sur ce que Mme Françoise Schenk-Gottret doit nous dire. Madame la députée, vous avez la parole, et vous seule.
Mme Françoise Schenk-Gottret. La LDTR est là comme un garde-fou, elle vise à éviter le dépeuplement du centre ville au profit de bureaux ou de commerces... (Brouhaha.) Elle vise aussi à réglementer les travaux sur les immeubles existants, de manière à en minimiser l'impact sur les loyers. Elle comprend des dispositions sur les congés-vente, les changements d'affectation, l'expropriation et les démolitions. Si le Conseil d'Etat se félicite de ce que la LDTR atteigne ses objectifs, à savoir le maintien de logements abordables en ville, nous en sommes heureux.
En effet, les attaques contre cette loi, heureusement rejetées en votation populaire, sont significatives d'un combat perdu d'avance. Le précédent Conseil d'Etat l'a bien compris. L'analyse des autorisations délivrées permet de constater qu'il y a autant de projets de rénovation globale que d'interventions ponctuelles. Elle montre que la LDTR, contrairement à ce que dit sa légende, n'est pas un frein à la rénovation. En effet, d'après les statistiques fédérales sur les dépenses effectuées par les propriétaires en travaux de rénovation, le canton de Genève apparaît en troisième place des plus fortes dépenses par habitant.
Nous sommes heureux que le précédent Conseil d'Etat se distancie des recommandations de la CEPP. Il déclare qu'il ne saurait entrer en matière sur la recommandation de la commission visant à inscrire les loyers plafond correspondant aux besoins prépondérants de la population dans un règlement.
Sur le plan des infractions commises en matière LDTR, nous regrettons, tout comme la commission, leur nombre, mais nous ne pouvons évidemment pas suivre les recommandations de la commission sur ce sujet et sommes rassurés que le Conseil d'Etat n'envisage pas non plus de le faire. Il serait plus judicieux de donner plus de moyens aux services concernés afin de mieux veiller à l'application de la LDTR, mais ceci est un problème de budget, et l'actuelle majorité se moque des répercussions de ses restrictions budgétaires sur les petits et moyens revenus et sur les 80% de la population que sont les locataires genevois concernés.
Ce rapport conforte la LDTR et nous en prenons acte. Maintenant, dans une perspective d'avenir, nous demandons au nouveau Conseil d'Etat, et plus particulièrement au nouveau conseiller d'Etat en charge du logement, de garder la même sagesse à l'égard de la LDTR. En effet, pendant quatre ans, alors qu'il était député, M. Muller a amené des projets de lois qui visaient à démanteler la LDTR et la loi générale sur le logement et la protection des locataires. Ces projets ont fort heureusement été rejetés en votation populaire. Nous supposons que seules feront foi les propositions de M. Muller, concrètes, sur le terrain.
Une voix. Bravo !
M. Olivier Jornot (L). Ce rapport de la commission d'évaluation des politiques publiques est déjà un petit peu ancien. Il remonte en effet à 2003, ce rapport sur l'impact de la LDTR. A l'époque, les libéraux en avaient pris connaissance avec intérêt. C'était un rapport pondéré, un rapport mesuré. Parfois même un peu timoré, il faut le dire, mais ses auteurs avaient au moins le courage d'ouvrir le débat sur un certain nombre de questions... (Brouhaha.) ... que pose la LDTR, sur plusieurs insuffisances, sur divers effets pervers. Ce rapport avait le mérite de faire des propositions concrètes.
Puis il y a eu le rapport du Conseil d'Etat, celui dont nous sommes saisis ce soir. Là, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons au contraire été extrêmement déçus de voir le conservatisme de ce Conseil d'Etat qui prend la peine, pour chacune des huit propositions concrètes formulées par la commission d'évaluation des politiques publiques, d'expliquer combien chacune d'entre elles est absolument idiote et combien il n'est surtout pas nécessaire de réfléchir sur la LDTR. Cela, Mesdames et Messieurs, c'est inadmissible. Même la remarque que la commission a faite sur la lenteur des procédures d'autorisations de construire a été balayée par le Conseil d'Etat: non, tout va bien dans ce canton.
Or, Mesdames et Messieurs, arriver à la conclusion, comme le Conseil d'Etat et Mme Françoise Schenk-Gottret l'ont fait tout à l'heure, de dire que ce rapport faisait la démonstration que la LDTR n'avait finalement aucune incidence sur l'état des rénovations dans ce canton, c'est une conclusion qui est absolument inadmissible. La commission d'évaluation des politiques publiques pose la question, elle n'arrive pas à un résultat tranché, mais elle ouvre le débat, et ce débat, le Conseil d'Etat le referme.
Alors que le rapport de la commission date de 2003, je l'ai dit tout à l'heure, il y a quelques semaines, un établissement bancaire vient de sortir un rapport sur l'état des rénovations dans notre canton. Il arrive, s'agissant de Genève en comparaison avec les autres cantons suisses, à la conclusion suivante: le manque de rénovations est le plus marqué en ville de Genève. Ici, seuls 10% des appartements construits entre 1961 et 1980 ont été rénovés durant les trente-cinq années passées. Eh bien, ce seul constat, Mesdames et Messieurs, doit nous inciter impérativement à étudier cette question ! Nous ne pouvons pas simplement nous dire que le lien de causalité entre la LDTR et les rénovations n'est pas établi. Nous avons le devoir de réfléchir à cette question de façon approfondie et c'est la raison pour laquelle le groupe libéral vous propose de ne pas prendre simplement acte ce soir de ce rapport, mais de le renvoyer en commission du logement pour qu'il fasse l'objet d'une étude approfondie.
M. Mario Cavaleri (PDC). C'est peu dire qu'affirmer que le rapport du Conseil d'Etat est plus qu'insatisfaisant, c'est peu dire. Puisque l'on doit se prononcer sur le renvoi en commission, cela me permettra de dire, au nom du groupe démocrate chrétien, par exemple au sujet du point 1, qu'on se demande ce que l'on attend pour faire en sorte que cette fameuse fourchette soit adaptée et qu'on applique enfin l'indexation qui est, elle, bien ancrée dans la loi.
Et puisque c'est aussi la conclusion au point 8 du rapport du Conseil d'Etat sur ce même sujet, on peut se demander aujourd'hui, le rapport datant de 2004, quelles sont les raisons pour lesquelles il n'y a pas été apporté de complément. On nous disait que les modifications importantes des lois fiscales de ces dernières années n'ont pas permis au Conseil d'Etat de procéder à cette réévaluation à l'heure actuelle, alors on espère que le nouveau Conseil d'Etat fera en sorte d'examiner ces chiffres et de revoir cette fameuse fourchette des loyers, puisque les données sont disponibles maintenant, on n'en doute pas un seul instant.
Sur le point 3, puisqu'on est justement dans le sujet de la réadaptation de cette fourchette, on se demande également quelle sera la position du Conseil d'Etat sur la question du loyer en fonction de la surface. Il y a une contradiction par rapport à l'issue du vote sur la modification de la LDTR, qui a été refusée le 26 septembre 2004. Il y a aussi une incohérence en ce sens que, lorsque l'Etat autorise des rénovations financées ou soutenues dans le cadre de l'application de la LGL, à ce moment-là, comme par hasard, l'état locatif est effectivement réparti en fonction de la surface des logements. Alors, cette incohérence doit être levée et il sera tout à fait utile que l'on puisse revenir sur ces éléments en commission du logement.
Enfin, je ne voudrais pas accaparer trop longtemps la parole, mais j'ai relevé une question. Il sera intéressant d'entendre à la commission du logement, car nous espérons que ce rapport sera bien renvoyé à la commission du logement, M. le conseiller d'Etat Mark Muller sur la manière dont le DCTI harmonise les lois - on nous dit, ou plus précisément on essaie de nous faire croire que le Conseil d'Etat est soucieux d'harmoniser l'application des lois, donc la LDTR et la LGL. On aimerait bien savoir comment. Parce que si l'on nous dit que c'est le cas, on aimerait bien que ce soit dans la totale transparence et que l'on réponde très clairement à ces questions, et pas seulement avec quelques phrases à l'emporte-pièce.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, chers collègues, le groupe démocrate chrétien vous demande d'appuyer le renvoi à la commission du logement.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
M. Olivier Wasmer (UDC). L'UDC s'est toujours battue contre cette LDTR, puisque cette loi est une véritable entrave à la liberté de commerce et à l'industrie, de même qu'à la liberté tout court. L'UDC a tenté et va, bien entendu, retenter de modifier cette loi, n'en déplaise à certains milieux. En effet, aujourd'hui, de grands promoteurs, de grands institutionnels propriétaires dans l'immobilier n'investissent plus un sou à Genève, et pour cause: chaque fois qu'ils ont des grands projets, ils attendent des mois avant d'obtenir du DCTI et de l'ancien DAEL des autorisations pour transformer, et après huit mois, parfois une année et demie, quand ils les ont obtenues, quand ils commencent les travaux, ils sont dénoncés par les locataires qui prétendent qu'il ne s'agit pas de travaux de plus-value mais de travaux d'entretien réguliers. Ils vont à l'ASLOCA, qui dénonce ces institutionnels en particulier, comme tout autre propriétaire grand ou petit, pour dire que la plupart de ces travaux ont été faits sans autorisation, ce qui aboutit très souvent à des amendes.
Donc, quand le Conseil d'Etat vient nous dire aujourd'hui que tout est beau, tout est parfait, c'est absolument contraire à la réalité économique actuelle, à la réalité des faits d'une manière générale. Il faut préciser à ce sujet qu'en ce qui concerne les procédures cela ne va pas beaucoup mieux. Tout le monde sait que, quand le département a pris une décision, bien entendu, les propriétaires, qui doivent entretenir de nombreux appartements, saisissent les tribunaux. Et l'on voit parfois que ces procédures durent un, deux ou trois ans, quand il n'y a pas de recours au Tribunal fédéral.
Donc, ce rapport est totalement insatisfaisant en l'état, il ne résout en rien du tout les problèmes de construction et de rénovation puisque, comme je viens de le souligner, les propriétaires sont pieds et poings liés pour effectuer des travaux de rénovation ou des nouvelles constructions à cause de cette loi qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, est une véritable entrave à la rénovation.
Pour ces motifs, l'UDC propose purement et simplement le renvoi au Conseil d'Etat.
M. Gabriel Barrillier (R). Paradoxalement, ce rapport, qui a figuré vingt fois à l'ordre du jour de notre Grand Conseil (j'ai compté) est le fruit d'un Conseil d'Etat de droite. Il repose sur une enquête de la commission d'évaluation des politiques publiques qui était vraiment une enquête très bien faite, courageuse. On aura peut-être l'occasion de revenir sur le rapport du Conseil d'Etat et sur les rapports de la CEPP. Et aujourd'hui, on se trouve à discuter de ce rapport alors que le Conseil d'Etat n'est plus à droite, mais à gauche, enfin au centre gauche. Mais en matière de logement, en matière de procédure, on a pu apprendre aujourd'hui que l'on allait prendre des mesures pour accélérer les procédures d'autorisation de construire ou d'exploiter; on a un gouvernement qui donne l'impression de vouloir s'attaquer sans préjugés à un certain nombre de vaches sacrées de la République. Et la LDTR, vous le savez bien, c'est une vache sacrée. Pour finir, même un gouvernement de droite n'osait pas s'y attaquer, parce que c'est vrai que nous étions chaque fois battus devant le peuple. Pourtant, des campagnes, on en a mené ! Votre serviteur en a mené. Et puis, à force de se faire «baffer» sans arrêt, on arrive à la conclusion que la concertation est peut-être une meilleure solution...
Une voix. Ah !
M. Gabriel Barrillier. C'est la raison pour laquelle je suis fort déçu, Madame Schenk-Gottret - je m'adresse à vous, Monsieur le président, mais aussi au groupe socialiste. Donc, je suis fort déçu ! Je ne veux pas être méchant, chère collègue, mais j'ai trouvé que vous avez lu votre texte. C'est-à-dire que vous l'avez préparé et lu comme une espèce de profession de foi qui ne bouge pas depuis vingt-cinq ans, quels que soient l'atmosphère, l'environnement, la volonté, le changement des circonstances... enfin peu importe. Vous avez lu votre position: rigide. La LDTR, c'est de la réussite, tout va bien... (Commentaires.) Mais que Genève rénove deux fois moins vite que le reste de la Suisse, cela fait trente ans qu'on le sait ! Tout cela, ce sont des faits: vous passez dessus. Pourquoi ? Parce que vous avez-là votre lit électoral.
Moi je pense qu'avec la nouvelle équipe, avec des magistrats qui ont un oeil nouveau, on peut revoir le logement. Je sais qu'il y a des concertations - je ne suis plus à la commission du logements, mais je sais qu'il y a des concertations. Pourquoi ne pas renvoyer la LDTR et cette problématique à la commission du logement - on a le temps, de toute façon - pour voir si l'on ne pourrait pas améliorer la situation... J'ai noté qu'avec les socialistes il n'y a rien à faire; quant aux Verts, je ne sais pas, ils ne se sont pas exprimés sur cette problématique. Mais j'aimerais bien, Mesdames et Messieurs les députés du parti écologiste, que vous puissiez avoir l'ouverture d'esprit nécessaire pour appuyer le renvoi en commission du logement. Vous prouveriez par là que vous êtes ouverts à la discussion et que vous êtes un parti moderne, libéral... enfin, dynamique.
Une voix. Radical ! (Exclamations.)
M. Gabriel Barrillier. Donc, renvoi à la commission du logement !
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat, il y a un an et demi environ, a rendu ce rapport sur le rapport de la commission externe d'évaluation des politiques publiques concernant la LDTR. Le rapport du Conseil d'Etat contredit effectivement sur un grand nombre de points les conclusions de cette commission et parvient à la conclusion que la LDTR ne pose pas de problème particulier, que la LDTR a atteint ses objectifs et que, en gros, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes dans ce domaine-là.
C'est effectivement assez troublant de constater une telle différence de perception entre la CEPP et le Conseil d'Etat. Et les différentes réactions que l'on a pu entendre ce soir dans le cadre de ce débat montrent qu'il y a probablement un juste milieu entre les deux et qu'il n'est pas inutile que ce rapport du Conseil d'Etat soit renvoyé en commission. En effet, il n'est pas inutile que l'on puisse de façon sereine, je dirai en dehors de toute pression liée à un projet de loi, à des propositions très concrètes et très ciblées, généralement sujettes à la polémique, examiner ce qu'il en est réellement, que l'on puisse entendre la commission externe d'évaluation des politiques publiques, que le Conseil d'Etat puisse expliciter sa position et que l'on essaie de voir s'il y aurait moyen, pour autant que l'on s'entende sur un certain nombre de constats, d'améliorer, sur la base d'un consensus, les quelques points qui pourraient éventuellement le mériter.
C'est dans cet esprit que le Conseil d'Etat ne s'oppose pas au renvoi en commission de son rapport et se tient à disposition des membres de la commission du logement pour répondre à ses questions.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 544 à la commission du logement est adopté par 43 oui contre 17 non.
Débat
Le président. Le rapport de Mme Blanchard-Quéloz n'est pas repris, elle le surveille silencieusement du haut de la tribune. Il n'y a pas de rapport de minorité. Monsieur Kunz, vous reprenez le rapport de Mme Blanchard-Quéloz ?
M. Pierre Kunz (R), rapporteur ad interim. Effectivement, Monsieur le président. Il se trouve tout simplement qu'à l'époque où se rapport a été rédigé par Mme Blanchard-Quéloz et son coauteur M. Pierre Froidevaux j'étais membre de la commission de contrôle de gestion. Ma position étant consensuelle, il a été décidé que je représenterais cette commission et le rapport. Alors, voilà, si personne n'est opposé à cela, je continue.
Le président. Je vous félicite de cette très improbable élévation. (Rires.) Nous vous aurons vu aujourd'hui, Monsieur le député, dans des situations inhabituelles, notamment faire une déclaration d'acte de foi et, maintenant, prolonger celui de Mme Blanchard-Quéloz.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). C'est vrai que ce rapport est le résultat d'un travail approfondi de la commission de contrôle de gestion et surtout, effectivement, de Mme Blanchard-Quéloz, de son coéquipier et, si ma mémoire est bonne, de M. Kunz. Ils avaient énormément travaillé et je dois dire que c'est un événement qui appartient plus ou moins au passé, puisqu'il y a un nouveau conseiller d'Etat à la tête du département et que des mesures ont été prises. On doit néanmoins dire que ce rapport met bien en évidence l'opportunité, mais aussi les limites méthodologiques inhérentes aux audits comme outils de gestion. C'est vrai que souvent on utilise ces audits de façon inadéquate, c'est vrai que souvent ils sont onéreux et c'est vrai que souvent la mise en oeuvre, comme on l'a vu dans le point précédent par rapport à la CEPP, est délicate. Il est fréquent que ces audits, réalisés par des mandataires externes, ne soient pas pris en compte par le Conseil d'Etat comme ils le devraient.
Si le problème local a été plus ou moins réglé, le problème général demeure dans le maniement, dans la publicité et la mise en oeuvre des audits. Quand on regarde les annexes de ce rapport, on voit qu'il y a déjà beaucoup d'outils à disposition pour l'évaluation et qu'il suffirait peut-être de les appliquer de façon plus précise et adéquate. Il faut aussi rappeler qu'il parle de relations humaines et qu'en termes de relations humaines on n'est pas toujours rationnel ni logique. Malgré toutes les réglementations ou lois qu'on peut mettre en place, les conflits demeureront.
La commission de contrôle de gestion a déposé une motion qui invite le Conseil d'Etat à fournir maintenant de façon systématique les rapports d'audit et à être plus rigoureux et plus prudent dans sa politique d'audits externes. C'est un outil qui doit effectivement être manié avec précaution. Surtout, la motion invite le Conseil d'Etat à appliquer et faire appliquer de manière adéquate les outils d'évaluation du personnel et, aussi, à se rappeler ses responsabilités hiérarchiques en matière de gestion des ressources humaines au sein des département de l'administration publique.
Je viens de vous répéter en fait les invites de cette motion. Nous espérons qu'elle bénéficiera d'une écoute attentive de la part du Conseil d'Etat et vous demandons de prendre acte du rapport et d'accepter cette motion.
Mme Véronique Pürro (S). L'intervention de Mme Leuenberger me semble parfaite, je partage tout à fait son avis quant aux conclusions générales auxquelles nous sommes arrivés au travers du dossier de l'office cantonal du logement.
Sans vouloir remuer le passé et revenir sur une histoire qui a déjà plusieurs mois, j'aimerais tout de même encourager le Conseil d'Etat - c'est dommage, celui qui est en charge du dossier vient de partir - à nous faire rapport assez rapidement sur l'ensemble des mesures qui ont été prises à l'office cantonal du logement. En effet - et à nouveau sans vouloir remuer le passé - des choses douloureuses ont été vécues par certains collaborateurs. Certaines carrières ont été si ce n'est pas brisées en tout cas ralenties, et je crois que, par respect pour les personnes concernées, on doit s'assurer que l'office cantonal du logement fonctionne désormais correctement et que tout ce qui avait été relevé par l'audit soit pris en compte. Malgré les limites méthodologiques qu'a soulignées tout à l'heure Mme Leuenberger, je crois que toutes les remarques qui ont été formulées dans le cadre de cet audit méritent des réponses.
Nous souhaiterions rapidement savoir - M. Muller est de retour - ce qu'est advenu l'office cantonal du logement, comment il a été réorganisé, et obtenir la garantie que tout fonctionne désormais correctement.
M. Ivan Slatkine (L). Je vais être très bref et ne pas reprendre ce qui a été dit par mes collègues de la commission de contrôle de gestion, si ce n'est pour vous dire que le groupe libéral recommande de prendre acte de ce rapport et de renvoyer la motion au Conseil d'Etat.
J'en profite simplement pour rappeler que, dans cette motion, nous demandons que les rapports d'audit soient systématiquement donnés à la commission de contrôle de gestion. J'ose espérer que cette motion pourra servir à quelque chose. Je suis d'avis qu'il faudra un jour élaborer un projet de loi pour que les rapports d'audit puissent réellement être communiqués et au Conseil d'Etat - on a vu récemment que ce n'est apparemment pas toujours le cas - et à la commission de contrôle de gestion, pour que nous puissions faire correctement notre travail, sans avoir constamment à demander de l'information, à la réclamer une, deux, trois ou quatre fois, sans jamais rien obtenir.
J'ose espérer que, grâce à cette motion, le Conseil d'Etat prendra conscience que les rapports d'audit doivent être communiqués, comme la loi l'indique, aux commissions concernées.
M. Pierre Kunz (R), rapporteur ad interim. J'aimerais apporter mon commentaire sur la base de ce rapport parce qu'en fait les personnes qui se sont exprimées jusqu'à présent ont été, comment dire, extrêmement souples dans leurs propos, et je crois qu'il faut préciser certaines choses.
Le rapport 576, qui a été rédigé par la commission, concerne vraiment une affaire. Il faut bien comprendre que c'est une affaire: celle de l'office cantonal du logement, qui constitue un exemple quasiment caricatural de l'accumulation de presque toutes les faiblesses, toutes les dérives et toutes les incohérences politiques et administratives actuellement possibles dans les services publics du canton.
Je commence par la mise en place, par feu le DAEL avec l'assentiment du Conseil d'Etat, de structures de direction aussi coûteuses et pléthoriques qu'inefficaces, avec une direction générale de l'OCL pourtant insuffisamment compétente et sans leadership, avec une absence de volonté managériale au niveau du Conseil d'Etat. Je pense au renoncement de celui-ci à assumer ses responsabilités de patron qui normalement devrait trancher, à son recours à des pseudo-experts insuffisamment qualifiés en matière de gestion, de ressources humaines en tout cas. Puis il y a eu l'audit alibi - parce qu'il faut bien l'appeler comme cela - type mur des lamentations, commandé inutilement par le Conseil d'Etat et de manière, comme cela a été rappelé, illégale. De plus, il était trop coûteux par rapport au résultat. Enfin, le Grand Conseil n'a pas été informé. Au bout de compte, le personnel était démotivé, perturbé et absent. Tout cela s'est terminé par des placards dorés pour certains et des ruptures de carrière douloureuses pour certains autres.
Toute cette affaire constitue d'abord un gâchis humain monumental, c'est son aspect le plus inacceptable. Il révèle l'une des faiblesses majeures des gouvernements genevois de ces dernières législatures, à savoir le recours alibi trop fréquent à des experts ou des pseudo-experts, qui masque l'insuffisance de volontarisme et de courage politique. Et puis, cette affaire met aussi en lumière les conséquences que je qualifie personnellement de désastreuses dans certains cas de l'actuel statut des employés de l'Etat. Elle met en lumière l'absence de toute politique sérieuse en matière de gestion des ressources humaines et les insuffisances du système de promotion des cadres de l'administration publique.
Cette affaire, Mesdames et Messieurs, illustre enfin la légèreté avec laquelle le Conseil d'Etat traite, disons traitait, parfois le Grand Conseil et les lois. Je veux parler ici autant de l'audit commandé sans appel d'offres par feu le DAEL que de son refus de transmettre, comme l'ont dit M. Slatkine et d'autres, le rapport d'audit à la commission de contrôle.
C'est sur la base de tous ces tristes constats que la commission de contrôle de gestion a rédigé la motion 1628 qui est destinée à rappeler au gouvernement ses devoirs et ses responsabilités en la matière. La commission de contrôle de gestion vous recommande de l'envoyer au Conseil d'Etat qui a bien du travail sur la planche s'agissant de la gestion de ses ressources humaines dans l'administration publique.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Il se trouve que, pour différentes raisons, j'ai eu l'occasion de constater d'assez près comment les choses se sont passées dans le cadre de cette affaire de l'OCL. Tout d'abord parce qu'à un moment donné j'ai fait partie de la sous-commission qui est à l'origine de ce rapport, avec Mme Blanchard-Quéloz, avec qui j'ai eu d'ailleurs beaucoup de plaisir à travailler. Ensuite, il se trouve que je suis maintenant en charge de cette direction qui s'appelle la direction du logement et non plus l'office cantonal du logement. Je ne voudrais pas m'exprimer ici sur les différents manquements dans la gestion du personnel ou le pilotage au niveau des ressources humaines que la commission a pu constater dans ce dossier-là. Je crois que tout cela appartient au passé. Le rapport est là pour nous permettre de nous rappeler ce qui s'est déroulé. Je crois que ce qui est important, c'est de se projeter dans l'avenir et de faire un bilan de la situation actuelle.
Il y a, je pense, deux éléments importants qu'il est intéressant de mentionner pour le Grand Conseil. Tout d'abord, la direction du logement a été complètement réorganisée. Une nouvelle équipe de cadres a été mise en place. Cette équipe donne satisfaction. Contrairement à l'ancienne équipe, elle s'entend bien, les personnes travaillent ensemble, et il n'y a plus les problèmes que l'on a pu rencontrer à l'époque. Il y a eu une réorganisation complète de la direction du logement, il y a eu la suppression d'un certain nombre de services, il y a eu une simplification des structures, et vous verrez d'ailleurs paraître tout prochainement dans la FAO une modification du règlement sur l'organisation de l'administration qui vous montrera quelle est la nouvelle organisation. Je ne vais pas me lancer ici dans une description, ce serait quelque peu fastidieux.
Deuxième élément intéressant - Monsieur le rapporteur, vous parliez tout à l'heure de placards dorés qui auraient été créés pour régler la situation - j'aimerais vous informer que l'un des cadres, qui, effectivement, a pu à un moment donné occuper ce que l'on appelle un placard doré, est sorti de son placard sur ma proposition. Nous avons trouvé un accord. Cette personne a accepté une réduction de son salaire et est retournée dans l'organisation tout à fait ordinaire du département et accomplit un travail effectif tout à fait précieux et utile au développement d'un certain nombre de projets, de logement notamment. Je crois que dans ce cas-là tout du moins, on ne peut plus parler de placard doré.
Par souci de transparence, j'aimerais quand même dire que tout n'est pas rose à l'office cantonal du logement, ou plutôt à la direction du logement. Il y a encore des choses à améliorer. S'agit-il des restes de l'affaire qui nous occupe aujourd'hui et qui a fait l'objet de l'examen de la commission de contrôle de gestion, c'est difficile à dire. Toujours est-il que le nouveau directeur de la direction du logement a encore du travail pour assainir complètement la situation et faire en sorte que la direction du logement puisse travailler dans les meilleures conditions. Mais il y a un travail en cours, suivi par le chef du département en l'occurrence, pour que tout rentre dans l'ordre et j'espère que ce sera le cas très prochainement.
Le Grand Conseil prend acte du rapport divers 576.
Mise aux voix, la motion 1628 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 60 oui (unanimité des votants).
Le président. Je félicite Mme l'ex-rapporteur qui, muette de joie à la tribune, a pu assister à ce triomphe, tardif mais néanmoins incontestable. (Applaudissements.)
Premier débat
Le président. Le rapporteur de majorité est M. Pierre Weiss. Le rapport de minorité de Mme Jocelyne Haller n'est apparemment pas repris.
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, il se trouve que je n'ai que le rapport de majorité. Il n'y a qu'un rapport. Je ne sache pas qu'il y ait un rapport de minorité dans le document qui nous est distribué.
Le président. A la page neuf, Monsieur le rapporteur.
M. Pierre Weiss. Je n'ai que la page huit.
Le président. Il serait bon que l'on vous donne un document complet.
M. Pierre Weiss. La propreté de la ville laisse à désirer. Un plan propreté avait été mis sur pied en juin 2003. Il a eu entre autres comme effet de rendre nécessaire le présent projet, élaboré par le département du territoire, qui concerne l'affichage sauvage, que le département entend, à juste titre, selon la commission, réglementer. Les propositions du département se déclinent en quatre points: d'abord, renforcer l'incitation des communes à créer des emplacements d'affichage selon leurs possibilités, cela a été le seul point d'accrochage durant les travaux de la commission; ensuite, sanctionner qui ferait appel à un tiers, qu'il s'agisse d'une personne physique ou morale, pour apposer des affiches de façon sauvage; puis, donner aux communes la possibilité de supprimer sur le champ une affiche non autorisée, de façon simplifiée en termes de procédure, en d'autres termes de donner aux communes une compétence supplémentaire dont elles ont besoin; et enfin, de modifier les dispositions concernant les sanctions prises en violation de la loi sur les procédés de réclame, permettant en particulier à la police cantonale de sanctionner les contrevenants de nuit aux heures où les polices municipales dorment, compte tenu de leurs horaires qui ne connaissent pas le système d'heures supplémentaires du canton.
Lors des débats, nous avons eu l'occasion d'entendre l'Association des communes genevoises qui nous a rappelé les contraintes auxquelles les communes sont soumises en termes de surface des panneaux d'affichage, la Ville de Genève, qui soutient le projet de loi tout en émettant certains doutes sur la capacité physique ainsi mise à disposition, légalisant en quelque sorte par sa présence, ce qui est illégal, un représentant d'une société d'affichage sauvage, toléré dans notre état multiculturel quant à sa conception du respect de la légalité, venu nous expliquer qu'à Zurich un projet de loi, au fond d'inspiration analogue, avait permis la disparition de l'affichage sauvage, et je crois que la commission a été convaincue par les arguments développés avec son éloquence habituelle par le conseiller d'Etat adepte de la propreté et de l'ordre...
Une voix. Et des bonnes moeurs !
M. Pierre Weiss. Et des bonnes moeurs, en matière d'affichage uniquement, ce dont il était l'objet lors de cette audition. Nous ne saurions déborder par ce rappel des faits les termes de l'audition du Conseil d'Etat.
Au final, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi en question a été largement accepté en ce qui concerne son entrée en matière et adopté par une majorité de l'Entente en ce qui concerne ses dispositions finales. Je vous ai dit la réserve émise par les représentants de l'Alternative. Voilà, Monsieur le président, un rappel du contexte, qui permettra peut-être à une discussion de s'ébaucher.
Mme Fabienne Gautier (L). Ce projet de loi s'inscrit tout particulièrement dans le souci qu'a le Conseil d'Etat d'améliorer autant que faire se peut l'image de propreté de notre canton, propreté qui va se détériorant année après année. A cet égard et conscient de cette dégradation, le Conseil d'Etat a mis en place plusieurs mesures en matière de propreté et de salubrité, notamment la campagne d'affichage des serial jeteuses et des serial jeteurs, l'effacement systématique des tags sur les bâtiments publics, la distribution à plusieurs reprises d'un tout-ménage indiquant les moyens et endroits de récupération des déchets ménagers et des déchets électroniques, pour ne citer que ceux-là.
Certainement qu'aux yeux de la population notre canton mérite encore d'être plus propre, mais cette même population doit également prendre conscience des moyens qui sont mis à sa disposition et se responsabiliser. Parlons de l'affichage sauvage, cette forme de squatteur des biens d'autrui, de vandale du paysage, de salisseur de nos rues. Comme le souligne si justement dans son rapport le député Weiss, cet affichage sauvage doit être canalisé, responsabilisé, voire sanctionné. Mais oui, Mesdames et Messieurs les députés, cet affichage sauvage reflète particulièrement la mauvaise image de propreté et de salubrité de notre canton. Lorsque je me permets de comparer cet affichage sauvage à un squatteur, c'est bien parce qu'on le voit tout particulièrement sur les murs d'immeubles, d'abribus, de vitrines d'espaces commerciaux momentanément vides et j'en passe. En résumé, il se colle sur tout ce qui ne lui appartient pas, et ce n'est pas faute d'avoir des emplacements gratuits prévus à cet effet. Certains d'entre vous appelleront cela de la liberté d'expression et d'information, mais, Mesdames et Messieurs les députés, faut-il vraiment en arriver à de la déprédation pour mettre en évidence une vie culturelle et sociale intense ?
En fait, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi répond parfaitement aux associations qui souhaitent s'exprimer ou se faire connaître par voie d'affichage et répond également aux voeux de la population qui ne cesse de proclamer que nous vivons dans une Genève toujours plus sale. En effet, le Conseil d'Etat a désiré inciter avec ce projet de loi les communes à créer, dans la mesure du possible, des espaces gratuits réservés à l'apposition d'affiches pour tous types d'associations ou institutions à but non lucratif et à endiguer ainsi l'affichage sauvage.
Ce projet de loi a également ceci d'intéressant: il offre aux communes la possibilité de garder de l'affichage commercial dans les emplacements qui lui sont réservés et ne sont, eux, pas gratuits et apportent de ce fait des ressources non négligeables aux communes pour l'utilisation du domaine public. C'est pour toutes ces raisons que le groupe libéral votera oui à ce projet de loi.
M. Michel Ducret (R). Il est vrai que l'affichage sauvage participe à une impression de manque de propreté qui se traduit par une sensation d'insécurité - je dis bien «sensation» d'insécurité - qui retombe finalement sur l'ambiance de notre cité. Ce n'est pas une image extrêmement agréable pour les Genevois et leurs hôtes. C'est pourquoi, bien entendu, le groupe radical ne peut que soutenir, et avec satisfaction, un tel projet de loi.
J'ajouterai encore un élément, qui concerne les cas d'infraction. En cas d'infraction, c'est bien d'aller chercher à la fois les bénéficiaires de l'affichage et les gens qui posent les affiches. Mais on a oublié dans notre projet de loi ceux qui soutiennent plus ou moins directement ce type d'affichage, très souvent dans un but commercial ou de notoriété, au travers de la mise à disposition de fonds d'affiches qui portent notamment le slogan de marques de limonade extrêmement connues ou d'autres produits commerciaux. Ces papiers sont très gentiment mis à disposition des sociétés de pompiers ou des associations en faveur de nombre de choses, parfois de bienfaisance. On donc peut aller chercher la société de pompiers, l'association de bienfaisance, l'afficheur, mais on a oublié la société du grand limonadier qui assoit sa notoriété au travers de sa participation à cet affichage qui est répréhensible.
C'est pour cela, Mesdames et Messieurs, que vous avez sur vos tables une demande d'amendement qui ajoute un article 23B, qui introduit la coresponsabilité des soutiens publicitaires financiers et ou prestations en nature. L'article est le suivant: «Les entreprises ou entités qui, par l'apposition de textes ou d'images, soutiennent financièrement ou par prestations en nature les réclames ne respectant pas les dispositions de la présente loi peuvent être poursuivies solidairement avec les annonceurs commanditaires.»
Mesdames et Messieurs, je vous propose d'accepter également cet amendement qui permet d'englober l'ensemble des bénéficiaires dans les éventuelles punitions pour des abus qui peuvent être commis dans l'affichage.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Je souhaitais faire une remarque sur les raisons qui poussent aujourd'hui les démocrates chrétiens à accepter ce projet de loi. La première raison est bien évidemment que l'affichage sauvage enlaidit nos immeubles, le patrimoine financier et administratif de l'Etat, de la Ville, ainsi que les bâtiments des propriétaires privés à qui on n'a pas demandé l'autorisation d'apposer des affiches sur leur immeuble. Pourquoi faut-il aujourd'hui moins qu'avant tolérer l'affichage sauvage ? Eh bien, Mesdames et Messieurs, parce que, les moyens de communication ayant évolué, je crois que nous pouvons demander à tous les comités d'associations de diffuser leurs messages et d'annoncer leurs soirées culturelles ou dansantes par un moyen de communication moderne: l'Internet. Cela se fait de plus en plus. On peut imaginer encore d'autres moyens de communication: des prospectus. On peut imaginer que ces associations à but non lucratif demandent l'autorisation à des cafés-restaurants d'apposer les affiches au sein même des établissements, de façon à faire de la publicité. Il y a donc toute une palette de raisons qui font qu'aujourd'hui nous devons être moins tolérants envers ceux qui se fichent éperdument des lieux qu'ils salissent et des déprédations qu'ils commettent. (Brouhaha.)
Pourquoi ce projet de loi nous semble-t-il important en deuxième lieu ? Parce qu'il donne la possibilité aux différentes communes...
Le président. Mesdames et Messieurs, puis-je prier celles et ceux que le débat n'intéresse pas de se retirer ?! Monsieur le député, vous avez la parole.
M. Guillaume Barazzone. Merci, Monsieur le président. En ce qui concerne les associations culturelles, je tiens à faire remarquer à ce Grand Conseil qu'un certain nombre de communes, dont la plus grande est la Ville de Genève, ont signé des conventions avec des sociétés d'affichage, en l'occurrence la Ville de Genève a signé avec la Société générale d'affichage une convention tripartite qui lie l'Etat, la Ville et la SGA, et qui prévoit précisément des prestations en nature pour toute association subventionnée, par exemple par la Ville de Genève. Un peu plus d'un tiers des affiches apposées aujourd'hui sur le domaine public de la Ville concernent des associations culturelles sans but lucratif. C'est le premier point et c'est encore une raison qui nous fait dire qu'il faut de moins en moins défendre le procédé d'affichage sauvage.
En ce qui concerne les associations qui ont moins d'argent et qui, comme le disait très justement le rapporteur de majorité, n'ont pas les moyens de diffuser leur message, il se justifie aujourd'hui de mettre à disposition des espaces pour que ces associations puissent s'exprimer, puissent transmettre le message qu'elles souhaitent donner à la population.
En ce qui concerne les sanctions, elles nous semblent utiles, mais malheureusement difficiles à mettre en pratique. Néanmoins, en termes de prévention générale, elles peuvent tout à fait servir à dissuader les colleurs d'affiches sur le domaine public, où ils n'ont pas le droit d'apposer des affiches. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, et pour les arguments qui précèdent, je vous prie d'accepter ce projet de loi.
Le président. La parole est à M. Alain Etienne. Sont encore inscrits: M. Christian Brunier, M. Roger Deneys, puis le conseiller d'Etat Cramer. La liste est close.
M. Alain Etienne (S). En commission, les socialistes se sont abstenus sur ce projet de loi, car nous ne sommes pas convaincus par le «propre en ordre». Il y a certes des préoccupations à prendre en compte et c'est vrai qu'il faut prendre certaines mesures, mais, par rapport à l'affichage culturel, permettre aux associations de faire connaître leurs activités et leurs manifestations nous semble important. Ce projet de loi pose un autre problème: il prévoit que, «dans la mesure du possible, les communes créent en nombre approprié des emplacements réservés à l'apposition d'affiches». Bien sûr, dans la mesure du possible. Dans certains coins du canton, il n'y aura tout simplement pas de panneaux. Dans d'autres, il y en aura peut-être un ou deux...
Une voix. Ils seront recouverts tout de suite.
M. Alain Etienne. L'autre problème, c'est qu'il faut peut-être distinguer ce qui est de l'affichage culturel et de l'affichage commercial. Nous connaissons tous ces affiches culturelles pour annoncer des manifestations qui sont tout de suite recouvertes par celles concernant des manifestations plus commerciales, à but lucratif. Il y a là un problème, et je ne suis pas sûr que le projet de loi le résolve.
On sait aussi que la Ville de Genève a passé des conventions - M. Barazzone parle d'une convention avec la SGA, mais d'autres conventions sont passées - avec Affichage Vert, par exemple, pour dire comment l'affichage doit se faire, proprement, avec du scotch, afin que l'enlèvement des affiches puisse se faire plus facilement. Nous sommes pour le droit à l'expression des milieux associatifs et pour le maintien, dans une certaine mesure, de cet affichage dit sauvage.
Enfin, l'Etat aura-t-il vraiment les moyens de sa politique ? Pour ce projet de loi, faudra-t-il un gendarme derrière chaque colleur d'affiche ?
M. Christian Brunier (S). En commission, les socialistes avaient beaucoup de doutes et se sont d'ailleurs abstenus lors du vote. Il est vrai que lorsque des affiches sont collées sur des arbres ou contre des vitrines de magasins, c'est inacceptable. Mais quand j'entends ce que j'entends ce soir dans ce parlement... Je trouve qu'il faut raison garder ! Tout à l'heure, en matière de finances publiques, je disais: «un peu de pragmatisme et de réalisme» ! Quand on parle de sentiment d'insécurité, parce qu'une affiche est mal collée: stop ! Il faut quand même dire les choses d'une manière sérieuse. Vous ne pouvez pas dire cela... Dire que Genève est sale à cause de l'affichage sauvage: stop aussi ! Si vous commencez à tout bloquer, vous allez tuer tout le monde associatif, la plupart des manifestations sportives, la plupart des manifestations culturelles. Vos copains qui font des lotos dans plein d'associations - et c'est très bien - c'est essentiellement de l'affichage sauvage ! (Brouhaha.) Donc, différenciez bien ceux qui font de l'affichage n'importe où, de n'importe quelle manière, et arrêtez d'entrer dans des caricatures qui faussent complètement les débats !
Quant à l'amendement du parti radical, si vous faites cela, il faudra prévoir un financement par l'Etat ! Vous êtes en train de tuer ce que l'on appelle le sponsoring et le mécénat. Vous présentez un amendement qui prévoit que dès qu'une entreprise décide de soutenir un événement et qu'elle appose son logo sur l'affiche, si cette affiche est mal collée, elle en fera les frais. On sait que dans les associations, même dans nos associations, il y a toujours des personnes qui collent les affiches d'une manière un peu limite. Cela veut dire que l'entreprise qui aurait mis son logo serait amendable. Je peux vous dire qu'il n'y aura plus de sponsoring. Plus de sponsoring pour le sport, plus de sponsoring pour la culture, et qui devra payer ? L'Etat ! Ou alors, on abandonne complètement le monde culturel et le monde sportif à Genève. J'espère que ce n'est pas la volonté de ceux qui ont présenté cet amendement.
Je demande donc au parti radical de faire preuve d'un peu de sagesse. Je sais que le parti radical n'arrête pas de dire qu'il est très impliqué, notamment dans le sport... Retirez cet amendement, vous êtes en train de tuer le monde sportif ! Ou alors, allez jusqu'au bout de la démarche et décidez de supprimer le sponsoring pour étatiser le sport - je ne pensais pas que c'était la position du parti radical, mais pourquoi pas - et demandez des subventions massives ! Ce n'est pas la politique du parti socialiste, en tout cas.
Je demande qu'on retire cet amendement qui est irréaliste et qui va tuer le monde sportif et culturel. Et ça, je crois que c'est mauvais. Si vous voulez condamner quelque chose qui est vraiment inacceptable, alors condamnez le monopole de l'affichage officiel ! Vous défendez le libéralisme économique... (Brouhaha.) ... vous défendez le libéralisme économique... (Remarques.) Vous avez confié un monopole, en plus avec des rentes de situation, à une entreprise privée qui a tout le monopole de l'affichage officiel à Genève.
M. Christian Luscher. Comme les S.I. !
M. Christian Brunier. Ceci n'est pas acceptable. (L'orateur est interpellé.) Excusez-moi, Monsieur Weiss, mais comparer la distribution de l'énergie et de l'eau à l'affichage... (Commentaires. L'orateur est interpellé.) ... et dire qu'une activité peut avoir un monopole... Monsieur Weiss, vous ne pouvez pas comparer la distribution de l'eau, qui est un monopole naturel, avec l'affichage, qui peut être en concurrence ! Moi je suis pour la concurrence de l'affichage officiel. Vous avez donné une rente de situation à des gens qui affichent de manière illicite, et je rappellerai quand même au gouvernement que les socialistes... (Brouhaha.) ... par la voix de M. Velasco, ont déposé une motion qui condamnait un affichage massif officiel - je ne parle pas de l'affichage sauvage. Aujourd'hui, il y a des trottoirs où l'on ne peut plus faire passer une poussette à cause des panneaux de la SGA; pas à cause d'affiches qui donnent prétendument un sentiment d'insécurité. L'affichage officiel aujourd'hui est trop massif dans ce canton... (Brouhaha intense.) Il est affiché n'importe comment ! Une motion avait été votée massivement par ce parlement, qui demandait de condamner cette attitude, le gouvernement ne l'a toujours pas fait, et vous êtes en train de soutenir aujourd'hui cet affichage officiel abusif ! (Brouhaha.)
Pour toutes ces raisons, en tout cas personnellement, je voterai contre ce projet de loi.
Une voix. Très bien ! (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Pour compléter les propos de mon collègue Brunier et de M. Etienne, j'aimerais insister sur le fait que ce projet de loi institue une inégalité de traitement claire et nette entre ceux qui ont les moyens de se payer de la publicité officielle SGA et les autres. Parce que c'est très clair: les panneaux d'affichage mis à disposition dans la mesure du possible par les communes, on ne sait déjà pas s'ils vont exister, mais, en plus, comme cela a été relevé, les affiches seront recouvertes sans laps de temps minimum, contrairement à ce qui se passe avec les panneaux de la SGA.
Il est important de savoir que, par exemple en ville de Genève, de nombreux panneaux sont déjà mis à disposition aujourd'hui, mais la politique actuelle, c'est plutôt de les réduire, pour une raison très simple: la publicité officielle, comme la publicité sauvage, c'est de la pollution visuelle ! Il n'y a pas de différence de ce côté-là ! Alors, pourquoi aujourd'hui, avec ce projet de loi, vouloir pénaliser l'affichage sauvage tout en maintenant l'affichage payant qui est à disposition des entreprises qui en ont les moyens ?
Cela n'est pas acceptable pour les socialistes et nous vous demandons donc de refuser ce projet de loi. S'il était accepté, on devrait au moins demander à ceux qui affichent par la SGA de payer les fameux panneaux mis à disposition gratuitement pour les associations. A ce stade, nous vous demandons de refuser ce projet de loi.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. L'inconvénient des débats sur les textes de lois qui reviennent de commission, surtout lorsque les travaux du parlement prennent un certain temps, c'est que l'on finit par en oublier totalement le contexte. Permettez-moi de vous le rappeler. Je pense qu'il sera de nature à relativiser fortement un certain nombre de propos qui ont pu être tenus ici ou là. Le contexte dans lequel se situe ce projet de loi, et il a été rappelé d'ailleurs tout à l'heure par Mme Gautier, c'est celui du plan propreté canton-communes du 11 juin 2004, lui-même issu d'un travail qui a duré plusieurs mois, pour ne pas dire plusieurs années, entre l'Etat et les communes.
Pour revenir à un débat qu'on a eu plus tôt dans la soirée, l'Etat et les communes travaillent ensemble et travaillent beaucoup. Quel était l'enjeu de ce débat ? C'était de traquer certaines incivilités à partir d'une problématique de gestion des déchets. Dans ce plan propreté Etat-communes, on trouve un programme d'actions qui portent notamment sur les déjections canines, sur les tags et les affichages sauvages, sur les détritus et sur les déchets encombrants. Sur chacun de ces points, un plan de mesures a été mis en place. Dans certains cas, il a fallu changer des règlements, c'était de la compétence du Conseil d'Etat; dans d'autres, il a fallu changer des législations, et c'est la raison pour laquelle ce projet de loi vous est soumis. Parce que, de ce grand panel de mesures prises, il en est une, celle relative à l'affichage sauvage, qui est réglée par la loi, de sorte que le Grand Conseil a eu à la connaître.
Ce que je vous demande simplement de retenir ici, c'est qu'il ne s'agit pas d'un projet isolé, il s'agit d'un projet qui s'inscrit dans un contexte et ce dernier est encore plus général, puisque, dans le cadre de ce plan, il y a non seulement la volonté de lutter contre un certain nombre d'incivilités, mais également celle de s'en donner les moyens, et notamment de mettre en place, ce qui a été fait, un système de monitoring qui vise à savoir, mois après mois, année après année, si les efforts fournis produisent effectivement des résultats, si, commune après commune, il y a moins de tags, moins de déchets encombrants, moins de détritus, moins d'affichage sauvage.
Quand j'entends que l'on place ce débat sur le thème de la liberté d'expression, je me dis que l'on se trompe, que c'est consternant et que c'est affligeant, cela à un double égard: pour qui se bat-on ? Pour ma part, je me bats pour les plus démunis, pour les plus faibles et pour ceux qui ont à subir jour après jour les conséquences de ces incivilités. Et ceux-là ne partent pas en week-end en Valais, à Megève ou je ne sais où: ils vivent ici, et ce sont eux qui subissent au quotidien ces agressions qui, petit à petit, pourrissent l'existence ! Voilà. (Applaudissements.)
La volonté qu'il y a à travers cet ensemble de projets de lois, c'est de reconnaître la responsabilité de la collectivité, c'est d'organiser le mieux-vivre ensemble, c'est d'organiser un peu plus de solidarité, c'est aussi de donner un peu plus de sentiment de confiance, et cela passe aussi par la lutte contre ces incivilités. Non pas par des mesures exagérément répressives - on ne demande pas de sanctions exemplaires contre ceux qui commettent ces incivilités - mais plutôt par toute une série de mesures qui sont d'ordre préventif.
Pour en revenir à l'affichage sauvage, je trouve touchant que l'on veuille placer cette question sur le terrain de la liberté d'expression, mais nous savons bien tous que ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Les affiches que l'on trouve aujourd'hui sur les murs ne sont pas des proclamations politiques, ce ne sont pas des affiches faites dans le cadre de campagnes électorales: ces affiches, ce sont des affiches publicitaires, qui sont faites par des gens qui veulent s'enrichir à travers cela, à tel titre que l'on parle maintenant des sponsors. C'est dire que le projet de loi, dans son esprit évidemment, le Conseil d'Etat vous demande de le soutenir, parce qu'il vient à l'appui d'un effort de toutes les collectivités de ce canton, de l'Etat et des communes.
J'en viens maintenant à l'amendement de M. Ducret. Monsieur Ducret, votre amendement est tout simplement irréaliste. Du point de vue de l'opportunité, pour les raisons évoquées par M. Brunier. Qui, dorénavant, soutiendra une manifestation quelconque s'il sait qu'il s'expose à être amendé pour cela ? Evidemment, plus personne. Au-delà de cela, votre amendement est juridiquement irréaliste: comment voulez-vous punir celui qui est victime d'un afficheur peu consciencieux ? Vous ne pouvez pas le faire ! Celui qui met sa publicité sur une affiche et retrouve ensuite cette affiche placardée par quelqu'un de malhonnête ne saurait être puni. Nous avons été, Monsieur Ducret, aux limites de ce que nous pouvions faire pour aller dans votre sens, en précisant dans l'article 23A que celui qui fait appel à autrui pour installer ou apposer un procédé de réclame doit veiller à ce qu'il respecte les dispositions de la présente loi. Pourquoi ? Parce que nous savons très bien qu'il y a des afficheurs qui en font une spécialité et qui proposent à leur clientèle des affichages sauvages. On ne peut cependant pas aller jusqu'à dire que celui qui décide de soutenir un tournoi de football en mettant le nom «Coca Cola» ou je ne sais quoi d'autre sur l'affiche s'expose dorénavant à être puni pour avoir voulu soutenir cette cause sportive. Voilà la raison pour laquelle je pense que votre amendement ne va pas dans le bon sens. Non seulement, il est inapplicable mais, surtout, il va affaiblir cette loi qui tient juridiquement la route. Si l'on y ajoute cet amendement, cette loi que l'on veut pour lutter contre les incivilités sera fragilisée.
Voilà la raison pour laquelle, tout en reconnaissant les bons motifs qui vous animent, j'invite cette assemblée à rejeter l'amendement que vous proposez, et tous les autres qui le sont dans la foulée, et à adopter cette loi telle qu'elle vous a été proposée par le Conseil d'Etat, et surtout telle que nous en avons négocié le contenu avec les communes, contenu réaliste et qui sera appliqué. (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Ducret, la parole ne se prend plus, sauf si c'est pour retirer l'amendement, éventuellement. C'est le cas ?
M. Michel Ducret (R). Sur la base des explications reçues de M. le conseiller d'Etat Cramer, je me permets de retirer l'amendement, cela nous fera gagner du temps. (Applaudissements.)
Mis aux voix, le projet de loi 9528 est adopté en premier débat par 39 oui contre 20 non et 8 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Concernant l'article 23, alinéa 2, nous avons dans le rapport de minorité - qui n'a pas été soutenu de manière effective aujourd'hui - une proposition d'amendement qui est reprise maintenant par Mme Sylvia Leuenberger et par M. Christian Brunier. Le texte a été distribué aux chefs de groupe.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). C'est vrai qu'il y a affiches et affiches. Je me souviens de ce qu'il y a vingt ans, les Verts, lors des campagnes électorales, mettaient des affiches à des endroits non autorisés...
Des voix. Ah ! (Chahut.)
Mme Sylvia Leuenberger. Mais je me souviens... (Remarque.) Oui, il y a vingt ans, on n'avait pas les moyens ! Donc, je me souviens d'avoir vu tout récemment de petites affichettes libérales collées sur les poteaux électriques... (Exclamations.)
Une voix. C'est pas possible !
Mme Sylvia Leuenberger. Alors, je pense que ces pratiques vont dorénavant disparaître ! Mais vous en aviez le droit puisqu'il n'y avait pas de loi.
Si je propose cet amendement, c'est parce qu'à l'article 23, alinéa 2, on voit, si on le lit bien: «Dans la mesure du possible, les communes créent en nombre approprié... », ce qui est déjà une notion relative. Cela veut dire que les communes pourront calculer le nombre qu'elles veulent mettre à disposition. Donc, si l'on ajoute «Dans la mesure du possible», on diminue énormément les places pour les affichages alternatifs. C'est pourquoi je pense que supprimer «Dans la mesure du possible» rend ce projet possible, parce que, justement, il est réalisable s'il y a suffisamment de places pour l'affichage alternatif.
Je vous invite donc à accepter la suppression de «Dans la mesure du possible», parce que la suite du texte permet déjà aux communes d'avoir une liberté d'action. Si cet amendement est accepté, effectivement je m'abstiendrai sur la loi... (Exclamations. Brouhaha.) Parce que j'avais refusé l'entrée en matière !
M. René Desbaillets (L). Le parti libéral a été - gentiment, je dois le dire - mis en cause sur les affiches libérales publiées sur les poteaux des S.I. Alors, je vais vous faire un petit peu d'histoire. C'est que le parti libéral, l'Association du Mandement, a créé il y a déjà plus de vingt-cinq ans la première affiche écologique politique: nous avons fait, en grand, planter des jonquilles au mois de novembre sur un talus, écrit «Votez libéral». Ces magnifiques jonquilles ont fleuri quinze jours avant les élections, c'était la première affiche écologique mondiale. Elle est issue du parti libéral du Mandement !
Des voix. Bravo !
M. René Desbaillets. Dont j'étais le président. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Lors des débats de commission, cet amendement a été abondamment discuté, et refusé. Il a été refusé précisément parce que - vous le savez, Madame Leuenberger - les communes ne sont pas toutes égales: il y a celles qui ont de grands moyens, celles qui ont un ample territoire urbain, et puis, il y a les petites communes, qui sont en plus grand nombre, une bonne trentaine dans ce canton. J'en connais une en particulier. Eh bien, dans ces petites communes, nous avons bien entendu la capacité de calculer le nombre d'affiches qu'il faudrait pouvoir exposer aux yeux de la population. Nous ne sommes pas nécessairement en mesure de procéder à tous ces affichages, compte tenu de la place disponible et d'un respect pour le patrimoine, pour la beauté des bâtiments ruraux, et, de ce point de vue-là, je crois que vous devriez convenir avec moi, Madame Leuenberger, que vous ne voulez pas contribuer à une dégradation de la qualité esthétique de nos communes rurales. (Exclamations.)
Une voix. Là, tu as gagné des points !
Mme Véronique Schmied (PDC). J'aimerais, à l'instar de M. Weiss, soutenir la mention «Dans la mesure du possible», qui laisse une certaine souplesse aux communes pour installer les panneaux d'affichage là où cela convient, en fonction des possibilités. Vous savez qu'il y a certaines contraintes, dues notamment à la circulation. Les panneaux d'affichage ne doivent pas être placés là où ils peuvent distraire l'automobiliste, par exemple; il ne convient de mettre des panneaux d'affichage dans la zone agricole, il ne convient pas de mettre des panneaux d'affichage là où il y a des monuments classés, etc.
De nombreuses communes ont déjà fait des plans directeurs d'affichage, de façon à pouvoir indiquer aux personnes, aux associations et aux utilisateurs où ils peuvent effectivement afficher. Je dirai, peut-être pour rassurer, les élections communales ayant lieu au printemps prochain, que, généralement, les communes sont assez souples en cette période-là et acceptent de l'affichage, avec même de très grandes affiches sur des supports éphémères qui sont là juste pendant la période de campagne. Je crois que c'est dans l'intérêt de tout le monde, et c'est très bien compris par l'ensemble des communes.
Je demande donc que l'on n'accepte pas cet amendement.
Le président. M. Roger Deneys et M. Alberto Velasco ont encore demandé la parole. La liste est close.
M. Roger Deneys (S). Moi, je vous invite quand même à voter cet amendement. Il est frappé au coin du bon sens, puisqu'il y a une égalité de traitement: d'une part, il y a des sanctions immédiates pour ceux qui ne respectent pas la présente loi et, d'autre part, en principe on met des panneaux d'affichage gratuits pour les associations. Fondamentalement, ce n'est pas correct. J'ai beau partager les préoccupations de M. Cramer concernant la qualité de vie en ville, notamment en ce qui concerne les agressions visuelles, je vous rappelle que les publicités officielles sont aussi des agressions visuelles. (L'orateur est interpellé.) Monsieur Weiss, dans votre petite commune, il serait aussi possible de supprimer des panneaux d'affichage publicitaires officiels pour en mettre un certain nombre à disposition des associations ! Cela permettrait de réinstaurer... (L'orateur est interpellé.) ... un certain équilibre !
C'est pourquoi l'amendement qui demande que l'on mette des panneaux d'affichage à disposition semble être un minimum par rapport aux sanctions prévues dans cette loi.
M. Alberto Velasco (S). Je préfère prendre la parole lors du troisième débat. (Commentaires.)
Une voix. Et les amendements ?
M. Alberto Velasco. Ce n'est pas sérieux de voir des citoyens de faire poursuivre pour incivilités de la part du Conseil d'Etat. Et puis, j'ai entendu que notre collègue Weiss nous a parlé de respect... (Bruit de larsen.) ... des bâtiments et de la qualité esthétique. Alors soyons clairs, Monsieur le conseiller d'Etat ! Il y a trois ans environ, j'ai déposé une motion qui a été votée à l'unanimité par le Grand Conseil. Dans ladite motion était spécifiée, précisément, l'incivilité de la part de la SGA, dans sa manière de déposer ses panneaux d'affichage, qui contrevient à la loi fédérale de la circulation. J'attends toujours la réponse du Conseil d'Etat, elle n'est toujours pas venue.
Dans un certain nombre de lieux à Genève, notamment dans les îlots d'arrêts de tram, ces panneaux sont disposés de telle façon qu'il est quasiment impossible de circuler. Cela aussi, c'est de l'incivilité, mais on ne dit rien. Il y a donc une différence de traitement. Maintenant, Monsieur Weiss, concernant l'esthétique, nous, citoyens de la ville, avons droit aussi à l'esthétique ?
Une voix. Mais bien sûr !
M. Alberto Velasco. Alors voilà, si vous prenez le boulevard Saint-Georges, vous verrez que ces panneaux ont défiguré cette rue, et personne ne dit rien ! Il y a d'autres endroits à Genève où c'est le cas, et personne ne dit rien... On a même posé des panneaux sur la Rade de Genève, qu'il a fallu enlever suite à notre initiative.... Et vous n'avez rien dit là-dessus ! (Protestations de M. Pierre Weiss. Exclamations.) Ce qui est de l'incivilité ou inesthétique pour certains panneaux l'est aussi pour d'autres ! Et la SGA, Mesdames et Messieurs les députés, bénéficie d'un monopole et des largesses du Conseil d'Etat et de notre parlement qui ne disent absolument rien quand elle enfreint la loi. Voilà la vérité ! Vous vous attaquez à ceux qui n'ont pas de moyens, mais vous ne vous attaquez pas à ceux qui les ont et peuvent se permettre d'enfreindre la loi.
Le président. La parole n'est plus donnée - ni demandée d'ailleurs. Le président Cramer ayant, à mon plus vif regret, retiré sa demande de parole, je vous soumets cet amendement, soit la suppression des termes: «Dans la mesure du possible».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 36 non contre 34 oui et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).
Troisième débat
La loi 9528 est adoptée article par article en troisième débat.
Le président. Le vote nominal est demandé. Vous êtes soutenu ? De justesse.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 9528 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 45 oui contre 27 non et 3 abstentions.
Le président. Je salue la présence à la tribune de notre ancien collègue, M. Jean-Claude Dessuet. (Applaudissements. Exclamations.) Votre arrivée particulièrement opportune, cher ancien collègue, a permis à cette assemblée de se défouler, ce qui fait qu'elle va pouvoir aborder la suite des travaux à un rythme un peu plus soutenu et avec plus de concentration.
Premier débat
Le président. La parole n'étant pas demandée, je mets aux voix la prise en considération du projet de loi.
Le projet de loi 9731 est adopté en premier débat par 60 oui contre 1 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 4.
Le président. Il y a une proposition d'amendement... (Brouhaha.) Messieurs Luscher, Bavarel et Cramer, vous me dérangez ! Merci... (Rires.) Donc, il y a une proposition d'amendement de M. David Amsler sur l'article 5. Il s'agit d'ajouter à l'article 5 un alinéa 2: «Le versement de cette subvention est conditionné à la présentation de factures justificatives correspondant à la demande de subvention 2006».
M. David Amsler (L). Le but de mon amendement était de rallier tout le monde à ce projet de loi. Je vois que cela va être le cas. Le but de l'amendement était d'avoir un certain contrôle sur la dépense de la subvention parce qu'il semblerait que, dans les années précédentes, la subvention n'ait pas toujours été affectée aux travaux prévus. Cet amendement vise à instaurer un contrôle supplémentaire lors de l'octroi de cette subvention 2006 pour le téléphérique du Salève, que tout le monde va, semble-t-il, soutenir.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. En dépit de votre conduite de la séance, Monsieur le président, je n'ai pas très bien compris les derniers mots de l'intervention de M. Amsler, de sorte que je ne sais pas s'il entend maintenir ou retirer son amendement.
Quoi qu'il en soit, je ne peux que l'inviter à le retirer, et si d'aventure il devait tout de même le maintenir, je vous invite à le refuser, parce que - comme j'ai essayé de le lui dire, mais malheureusement, semble-t-il, de façon insuffisamment claire - son amendement est tout simplement impraticable. Il nous demande de subordonner le versement de la subvention à la présentation de factures justificatives concernant la façon dont on aura dépensé la subvention. Or, c'est tout à fait impossible de présenter les factures avant même que la dépense ne soit engagée. C'est donc impossible. Je l'ai dit à M. Amsler trois fois: si son problème, c'est qu'il se méfie des animateurs de la Société du téléphérique du Salève, dont je rappelle qu'elle est du reste présidée par M. Claude Haegi, enfin bref, s'il estime que cette société n'est pas digne de confiance, il devrait nous demander de ne pas verser l'argent à moins d'avoir fait des contrôles sur l'année 2005. Mais il ne peut pas nous demander de ne pas verser l'argent avant d'avoir fait des contrôles sur l'année 2006. J'ajoute que cette Société du téléphérique du Salève n'est pas une association composée de trois ou quatre copains qui ont des comptes folkloriques: c'est une société anonyme, qui est donc soumise à toutes les rigueurs du code des obligations.
Je termine simplement en disant que cette affaire a maintenant suffisamment duré. Ou bien on a envie que ce téléphérique puisse encore continuer son activité cette année-ci, ce qui, je crois, est la conviction de la plupart d'entre nous, de sorte que dès l'année prochaine on puisse aller de l'avant avec la nouvelle structure qui est en train de se mettre en oeuvre, ou bien on entend multiplier les embûches pour cette société. Je crois que l'avis de la plupart, c'est que maintenant cette société, qui est vraisemblablement dans les derniers mois de son existence, doit encore avoir les moyens de son action.
J'ajoute concernant le GLCT que, pour des raisons expliquées par le rapporteur, les choses ont un peu plus duré que prévu, mais on est actuellement en bonne voie. Ces derniers jours, j'ai signé des courriers à différentes personnes pour leur demander si elles étaient prêtes à faire partie du comité qui devra animer le GLCT. Donc, c'est en cours. Ne me demandez pas ici un engagement formel sur le fait qu'on aura réussi à liquider la société, à en recréer une autre, etc., dans les six mois qui viennent, mais ce qui est certain, c'est que d'ici à septembre ou octobre on pourra vous dire des choses très précises et que, après que les événements ont un peu marqué le pas, les réunions se multiplient maintenant et nous sommes véritablement en voie de constituer cette structure qui est attendue depuis deux ans.
Donnons encore à cette société les moyens de sa vie pour cette année, et l'année prochaine, je l'espère très vivement, comme vous, on sera dans une toute autre configuration.
M. David Amsler (L). Dans le rapport, on a vu que la demande de subvention avait été motivée deux fois par les mêmes types de travaux. Si l'on a aujourd'hui la garantie du Conseil d'Etat que les subventions seront affectées aux travaux pour lesquels elles sont demandées, je retire mon amendement.
Le président. Nous n'avons donc plus d'amendement. Je vous remercie, Monsieur le député.
Mis aux voix, l'article 5 est adopté, de même que les articles 6 et 7.
Troisième débat
La loi 9731 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9731 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 4 non et 5 abstentions.
Débat
Le président. Le débat commence par l'intervention de M. Stauffer. Je vous rappelle que nous interromprons nos travaux dans dix-sept minutes.
M. Eric Stauffer (MCG). Il ne fait guère de doute que, vu les pratiques récentes, cette motion subira le sort de celles qui l'ont précédée. Pourtant, elle permettrait à celui auquel on doit tout, c'est-à-dire, le souverain, de mieux comprendre les arcanes du système pervers qui a conduit un des joyaux de la République, la BCGe, au bord du gouffre.
Tout le sens de cette motion est de permettre à ce Grand Conseil de s'assurer que la perversité du système mis en place à la BCGe n'a pas perduré dans sa nouvelle version de la Banque cantonale de Genève et que la Fondation de valorisation de ses actifs ne soit pas l'office de blanchiment et d'absolution des escrocs qui coûtent aussi cher à la République.
Et pourtant, certaines prémisses porteraient les plus naïfs à être suspicieux. L'exemple du cadre indélicat montre à lui seul que nous devrions tous nous rassembler pour faire la lumière sur une affaire qui, rappelons-le, coûtera au bas mot 2,5 milliards de francs aux contribuables. Cette motion se trouve au-delà des clivages politiciens et se trouve au niveau de l'éthique ! Ou, pour les cartésiens, sur leurs bordereaux d'impôts.
Si je suis sans illusions sur le sort que vous réserverez à cette motion, je prends les Genevois à témoin de ce qu'il n'y a pas au sein de la politique de cette république une volonté claire et affichée de faire toute la lumière sur cette débandade. Certes, il m'arrive parfois d'être rude dans mes propos, mais il faut y voir bien plus l'écoeurement du citoyen lamda que la volonté de vous être désagréable. Si je suis peu roué aux us et coutumes du monde politicien, je crois néanmoins traduire la préoccupation sourde de nos concitoyens.
C'est à la lumière de ces explications que je vous demande instamment de savoir aller au-delà de nos différences de positionnement politique, pour tendre tous ensemble à faire éclater la vérité, vérité que nous devons à nos concitoyens. Ce n'est là que faire justice et honneur aux citoyens qui nous ont portés dans cet hémicycle.
En conclusion, Monsieur le président, je dirai que les conneries, c'est comme les impôts, on finit toujours par les payer.
Le président. La liste est close. Figurent sur cette liste: M. Olivier Jornot, Mme Loly Bolay, Mme Véronique Pürro, M. Guillaume Barazzone, Mme Morgane Gauthier, M. Frédéric Hohl, M. Roger Deneys, M. Olivier Wasmer et le conseiller d'Etat. Il faut que ce temps soit divisé de manière que nous finissions à nos heures habituelles.
M. Olivier Jornot (L). C'était, à vrai dire, assez mal parti dès les premiers mots, puisque ce parlement a été accusé d'emblée d'avoir des pratiques, autrement dit de systématiquement rejeter les propositions qui viennent de certains bancs. Eh bien non, ce n'est pas vrai ! Ce n'est pas vrai, Monsieur Stauffer. Il est vrai qu'un certain nombre de propositions sont rejetées - parce qu'elles sont inappropriées, comme disait en son temps M. Bill Clinton.
Des buts que vous poursuivez avec cette proposition, il n'y en a absolument aucun - aucun ! - qui peut être atteint par le moyen que vous suggérez. Vous proposez que le montant des pertes soit établi: pour cela, il suffit d'attendre que la Fondation de valorisation ait terminé son travail, qu'elle ait fini de procéder aux ventes auxquelles elle doit. Mais pour cela, il faut qu'elle puisse vendre ! Et je ne fais à ce sujet aucune allusion que vous ne compreniez parfaitement.
Le deuxième objectif, c'est que des poursuites civiles soient ouvertes. Eh bien, j'aimerais vous rappeler, Messieurs les auteurs de cette proposition - vous l'avez vu dans les journaux - que des poursuites ont été initiées, que des commandements de payer ont été notifiés à des conseillers d'Etat en place ou plus en place, que des procédures civiles ont été entamées, qu'un nombre invraisemblable de gens s'est retrouvé devant le tribunal civil. Cela a été fait. J'aimerais vous rappeler, puisque vous demandez que des poursuites pénales soient initiées contre toutes sortes de gens, qu'un pool de juges d'instruction - j'ai l'impression qu'on le rappelle à peu près à chaque séance de ce parlement - enquête depuis cinq ans sur l'aspect pénal de ce dossier.
Vous réclamez enfin, et c'est d'ailleurs peut-être l'élément original, celui auquel vous tenez le plus dans votre proposition, que l'on enquête sur les opérateurs de la débâcle, les lampistes, que vous abhorrez, les professionnels de l'immobilier, que vous détestez. Bref, ce que vous rêvez de faire, c'est de livrer en pâture à l'opinion publique une liste de proscription de toutes ces personnes, alors même que cela viserait des gens qui, jusqu'ici, n'ont précisément pas été poursuivis, ni civilement ni pénalement, et qui ne le seront pas, parce que soit l'Etat, soit les autorités de poursuite pénale ont décidé de ne pas s'acharner sur les lampistes ni sur les professionnels qui ont eu par le passé à travailler avec la Banque cantonale. Vous voulez, Messieurs les auteurs de cette proposition, nous faire voter une commission d'enquête parlementaire, cet instrument inusuel, adopté il y a quelques années et jamais mis en branle depuis lors.
Vous voulez donc qu'il y ait quinze députés de cette salle qui se réunissent et qui fassent, j'imagine, en quelques auditions - puisque c'est la seule tâche qu'une commission d'enquête parlementaire peut avoir - ce que quatre juges font depuis cinq ans, accumulant des dizaines et des dizaines de classeurs de procès-verbaux d'auditions, accumulant un nombre d'heures de travail absolument invraisemblable. Et vous voudriez que ce parlement se distraie des tâches qui sont les siennes pour se livrer à ce travail de titan qu'il n'arriverait de toute évidence pas à accomplir, parce qu'il y a dans la répartition des pouvoirs que vise notre Constitution d'autres pouvoirs qui sont là pour le faire. C'est notamment le cas du pouvoir judiciaire...
Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député.
M. Olivier Jornot. ... civil ou pénal et il convient donc que ces autorités-là, qui sont mandatées pour cela, puissent faire leur travail. Ce n'est pas celui de notre parlement. Je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à rejeter ce projet de motion. (Applaudissements.)
Le président. Je rappelle que la liste a été close après M. Wasmer. Les personnes qui se sont inscrites ensuite n'auront donc pas la parole.
Mme Loly Bolay (S). Cette motion demande la création d'une commission d'enquête sur la Banque cantonale. Une telle commission d'enquête avait déjà été créée en 1998 et deux collègues ici, qui en faisaient partie comme moi, peuvent en témoigner: Mme Hagmann et Mme de Tassigny. Cette commission d'enquête avait le pouvoir d'investiguer. Ce pouvoir se limitait uniquement à vérifier l'application du droit cantonal dans le but assigné à la Banque cantonale de Genève. C'était cela le but de la commission d'enquête. Elle a travaillé pendant deux ans. Elle est allée jusqu'à Berne, elle a auditionné la commission fédérale des banques; elle a aussi auditionné les responsables de la commission d'enquête sur la Banque cantonale valaisanne. Contrairement à celle de Genève, la commission d'enquête en Valais avait des pouvoirs d'investigation très grands, tout simplement parce que la loi valaisanne le permettait.
Mesdames et Messieurs les députés MCG, si vous voulez que cette commission d'enquête ait ces pouvoirs, il faut tout simplement changer la loi. Ce qui veut dire que, comme le relevait tout à l'heure M. Jornot, vous voulez donner à ces quinze députés de milice les compétences des juges d'instruction... Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle quand qu'il existe la séparation des pouvoirs !
Le parti socialiste tient à vous le dire: nous partageons avec vous un seul souci, nous voulons la transparence, toute la transparence. Nous voulons que toutes les personnes qui sont à l'origine de la débâcle de la Banque cantonale, qui coûte à l'Etat de Genève 245 millions par an, paient. Mais pour cela, Messieurs les députés, Madame la députée MCG, il y a les juges d'instruction. Quatre juges d'instruction, qui travaillent depuis cinq ans. Nous voulons appeler cette justice de nos voeux. Nous voulons que justice se fasse, mais nous devons aussi faire confiance à la justice. Les juges devront donner leurs conclusions lors du procès qui, sauf erreur, débutera en 2007. C'est pourquoi le parti socialiste refusera cette motion.
Mme Véronique Pürro (S). Je crois qu'entre l'intervention de M. Jornot et celle de Mme Bolay, tout a été dit mais je crois aussi qu'il est très important, notamment pour les personnes qui nous écoutent ce soir, qu'on répète pour quelle raison nous allons probablement tous, sauf le MCG qui en est l'auteur, refuser cette motion.
Une fois de plus, nous sommes d'accord sur plusieurs points. Oui, Monsieur Stauffer, les montants de la perte de la Banque cantonale sont vertigineux. Oui, Monsieur Stauffer, les comptes de l'Etat sont plombés depuis plusieurs années par ces pertes. Oui, Monsieur Stauffer, les contribuables, dont nous sommes, paient ces pertes. Et vous aimez à en rappeler le montant - une fois de plus: vertigineux. Oui, comme l'a rappelé Mme Bolay, nous souhaitons la transparence, nous voulons que les responsables soient désignés, que ceux qui ont commis des délits et des malversations soient punis. Oui, nous trouverions intolérable que la justice ne parvienne pas à traiter cette affaire et arrive au terme des délais sans avoir pu mener l'enquête jusqu'au bout. Jusque là, nous sommes totalement d'accord, Monsieur Stauffer.
Mais là où nous divergeons totalement, c'est sur les recettes que vous nous proposez. Et je partage parfaitement l'avis de M. Jornot: je crois qu'il est totalement irréaliste de laisser entendre que des parlementaires tels que nous le sommes puissent devenir des justiciers - vous avez vous-même employé ce terme. Vous voulez nous attribuer le rôle de justiciers. Je crois qu'il n'est pas de notre devoir, ni de notre mission ou de notre compétence. De plus, nous n'en avons pas le temps et ce n'est pas notre rôle. Donc, faisons confiance à la justice, mais soyons très attentifs: une fois de plus, il serait intolérable, inacceptable, que nous arrivions au terme des délais impartis pour le traitement judiciaire et que la justice n'arrive pas à rendre ses conclusions au terme de ces délais.
Le président. La parole est au député Guillaume Barazzone.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Je renonce.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sentons que c'est un silence qualifié et nous vous en avons de la reconnaissance.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Vu la complétude de tout ce qui a été dit auparavant, les Verts partagent les avis de Mme Pürro, de M. Jornot et de Mme Bolay et refuseront cette motion.
Le président. Merci de votre esprit de synthèse, Madame la députée !
M. Frédéric Hohl (R). Il est onze heures moins cinq; nous partageons les avis de chacun... Le groupe radical va bien évidemment refuser cette motion.
Le président. Cette concision vous fait honneur à vous aussi, Monsieur Hohl.
M. Roger Deneys (S). Monsieur Stauffer, vous avez fait un amalgame avec la Banque cantonale et la Fondation de valorisation. De nouveau, vous mettez un peu tout dans le même paquet, ce qui n'est pas très correct. Le problème reste entier: si la justice genevoise n'arrive pas à traiter le dossier Banque cantonale avant la prescription, il est très clair qu'une commission d'enquête devra sans doute voir le jour pour comprendre pourquoi la justice genevoise n'a pas été capable de traiter cette affaire. (Brouhaha.) Mais, dans l'état actuel, nous refuserons cette motion.
M. Olivier Wasmer (UDC). J'essaierai d'être très bref aussi. Mesdames et Messieurs, l'UDC a toujours été la première à dénoncer le scandale de la BCGe. Les préopinants ont indiqué beaucoup de choses intéressantes à ce sujet, qu'on avait déjà dites aux motionnaires lors de la dernière et de l'avant dernière session. Je crois qu'on se répète un peu aujourd'hui...
M. Pierre Weiss. Trouble obsessionnel !
M. Véronique Pürro. Compulsif !
M. Olivier Wasmer. Je crois que le problème est effectivement là: à lire les invites, on s'aperçoit que ce sont les mêmes que celles des motions précédentes. On se répète. Comme l'ont dit mes préopinants, il n'appartient pas aujourd'hui au parlement, mais bien à la justice - comme l'a dit M. le député Jornot - de trancher, de retrouver les coupables, de voir quel est le déficit. Et l'UDC appelle de ses voeux que M. Stauffer n'entrave plus les travaux de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation, parce que l'on connaîtra beaucoup plus vite le montant des dégâts suite à la débâcle de la BCGe. (Applaudissements.)
Le président. Merci à vous aussi, Monsieur le député, de votre esprit de concision. Monsieur Barazzone a eu de tels regrets de son silence qualifié qu'il a transmis sa parole à M. Mettan qui n'a qu'une phrase à nous dire, ce qu'il va faire brièvement.
M. Guy Mettan (PDC). J'ai déjà été extrêmement bref comme rapporteur sur le précédent objet, vous me permettrez donc de dire deux - ou trois - phrases. Tout d'abord, pour relever que notre parti est extrêmement attaché à la séparation des pouvoirs et que, donc, comme cela vous a été dit, il s'opposera à cette motion pour cette raison-là.
Ensuite, je pense qu'il faut laisser à la justice le soin de faire son travail. Cette dernière ayant été saisie du dossier, avec un volume d'activité considérable et des kilomètres de rapports sur ses rayons, il faut laisser lui le temps de faire son travail. Enfin, ce n'est pas à M. Stauffer que je rappellerai que la présomption d'innocence est valable pour toutes les personnes inculpées, y compris celles de la Banque cantonale...
M. Pierre Weiss. Y compris pour lui-même !
M. Guy Mettan. C'est pourquoi, chers collègues, je vous invite à rejeter cette motion. Ai-je été bref, Monsieur le président ?
Le président. Très raisonnable, Monsieur le député. Je suis content d'avoir réussi à adoucir la frustration éprouvée par votre groupe.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je serai moins disert que M. Jornot, mais peut-être un peu plus complet que certains de ceux qui se sont exprimés. Ce que j'aimerais dire, pour l'essentiel, Monsieur Stauffer, c'est que cette motion est extrêmement contre-productive pour la cause dont vous vous faites le porte-parole.
J'aimerais que l'on sache clairement dans ce parlement qu'adopter cette motion c'est concrètement ouvrir une voie royale vers toute une série d'échappatoires pour ceux que vous entendez mettre en cause. Je vous le dis en reprenant simplement les termes de votre motion. Que dit-elle ? Qu'il faut créer une commission d'enquête parlementaire, que cette commission doit faire toute une série d'investigations, qui sont détaillées, et que, si au terme de ces investigations il s'avérait que cette commission a trouvé un certain nombre de choses intéressantes, il faudrait qu'elle prenne toutes les dispositions possibles afin que les coupables identifiés soient poursuivis civilement par l'Etat et, s'il y a lieu, également dénoncés pénalement. Mais vous enfoncez des portes totalement ouvertes, comme l'a rappelé M. Jornot. Le Procureur général a ouvert le 9 juin 2000 une information pénale. Dans le cadre de cette information pénale, le président du conseil d'administration, le directeur général et le directeur général adjoint de la BCGe à l'époque des faits ont été inculpés, ainsi que deux réviseurs. Ultérieurement, une sixième inculpation a été prononcée, et pour des infractions graves puisqu'il s'agit de faux renseignements sur les entreprises commerciales, de gestion déloyale, subsidiairement de gestion déloyale des intérêts publics et de faux dans les titres.
Vous nous parlez de procédure civile... La procédure civile, Monsieur Stauffer, a été ouverte, et par celui qui vous parle, c'est-à-dire, le Conseil d'Etat. Et au sein du Conseil d'Etat, je suis chargé de suivre cette procédure. Le Conseil d'Etat a tout d'abord fait procéder à une expertise, qui a été confiée à la société Pricewaterhouse Coopers pour savoir ce qui s'était passé dans cette banque entre 1994 et 2000. On a eu un rapport d'experts le 16 décembre 2002. Sur cette base, le 28 février 2003, c'est-à-dire immédiatement - du reste, la presse s'en était largement fait l'écho - le Conseil d'Etat a ouvert une procédure demandant à Ernst & Young environ 3 milliards de francs. Que s'est-il passé dans cette procédure ? Pour brouiller les cartes, Ernst & Young a essayé d'appeler en cause des dizaines de personnes. Nous avons contesté cet appel en cause. Cela a été plaidé en première instance, cela a été plaidé devant la Cour de justice et devant le Tribunal fédéral, et nous avons gagné !
Le Conseil d'Etat ayant gagné cette première procédure, on se retrouve maintenant devant le tribunal pour continuer le procès. Ce procès, dont vous dites que peut-être la commission d'enquête pourrait le souhaiter, est d'ores et déjà intenté. Au-delà de cela, non pas la commission d'enquête mais le Grand Conseil a pris d'autres mesures, qui ne figurent d'ailleurs pas dans votre motion, relatives à la gouvernance de la Banque. Et tout cela arrivera à son terme prochainement, lors de l'assemblée générale des actionnaires qui a lieu le 15 juin 2006.
A partir de là, ce que vous nous demandez, concrètement, c'est de brouiller les cartes ! En ouvrant dans un autre lieu, qui n'est pas un lieu judiciaire, un débat qui est déjà mené par l'instance judiciaire, on donnerait la possibilité à toutes sortes de gens de se justifier alors qu'ils sont déjà inculpés, alors qu'ils font déjà l'objet de procédures civiles, alors qu'on leur réclame non pas des millions, mais des milliards. Là, vous leur ouvrez la voie royale en leur disant: «Ecoute, on va encore t'entendre une fois, peut-être que le parlement - qui sait ? - trouvera que tel ou tel de tes arguments n'est pas si mauvais que cela et que, finalement, tu pourras aller devant le juge pénal pour lui demander d'arrêter la procédure pénale en attendant que tu sois entendu par le parlement qui pourrait dire au juge d'instruction de faire quelque chose d'autre.» Et ces personnes pourront dire: «Comment osez-vous me faire comparaître, alors même que le Grand Conseil est encore en train d'étudier le dossier ?!» Non. Je vous dis, Monsieur Stauffer: ici, vous faites une mauvaise action, parce que vous donnez la possibilité à des gens qui sont poursuivis par la justice cantonale, que ce soit sur le plan pénal ou sur le plan civil, de trouver des échappatoires.
Si nous voulons véritablement que la lumière soit totalement faite sur la Banque cantonale et, surtout, que l'Etat soit dédommagé de son préjudice et que les responsables soient punis, eh bien, il faut s'empresser de refuser cette proposition de motion ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat, et merci à tous les intervenants d'avoir fait preuve d'un tel sens de la discipline.
Mise aux voix, la proposition de motion 1666 est rejetée par 61 non contre 6 oui et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs, il est passé 23h, je vous souhaite une bonne nuit. Je vous donne rendez-vous demain à 15h30.
La séance est levée à 23h05.