Séance du vendredi 10 juin 2005 à 20h30
55e législature - 4e année - 9e session - 52e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mme et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot, Robert Cramer et Micheline Spoerri, conseillers d'Etat, ainsi que MM. Thomas Büchi, Gilles Desplanches, Pierre Ducrest, Yvan Galeotto, Renaud Gautier, Georges Letellier, Christian Luscher, Claude Marcet et Alain-Dominique Mauris, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

PL 9163-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Gabriel Barrillier, Marie-Françoise De Tassigny, Jean-Marc Odier, Jacques Follonier, Pierre Froidevaux, Hugues Hiltpold, Thomas Büchi, Bernard Lescaze, Pierre Kunz concernant l'établissement des budgets administratifs 2005 et 2006 de l'Etat de Genève (réduction de l'endettement et frein à l'accroissement des dépenses)
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de première minorité de M. Alberto Velasco (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)
Rapport de troisième minorité de M. Christian Bavarel (Ve)
PL 9267-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (LGAF) (D 1 05)
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de première minorité de M. Alberto Velasco (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)
Rapport de troisième minorité de M. Christian Bavarel (Ve)
PL 9319-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de MM. Guy Mettan, Patrick Schmied, Pierre-Louis Portier, Jean-Claude Egger, Philippe Glatz modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (D 1 05)
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de première minorité de M. Alberto Velasco (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)
Rapport de troisième minorité de M. Christian Bavarel (Ve)

Deuxième débat (PL 9267-A)

La présidente. Je rappelle que le PL 9392-A a déjà été voté. Je vous rappelle également que nous sommes en deuxième débat. Nous sommes en train d'aborder le PL 9267-A. L'entrée en matière a été votée. Etaient inscrits pour prendre la parole: MM. Catelain, Hiler, Kanaan et Pagani.

Nous étions à l'article 7. Nous avons deux amendements pour l'article 7. Monsieur Pagani, expliquez-nous l'alinéa 3, et je passerai la parole à M. Catelain pour expliquer l'amendement UDC.

M. Rémy Pagani (AdG). L'amendement est tout à fait explicite, je vous propose de le mettre au vote.

M. Gilbert Catelain (UDC). Nous sommes saisis d'un projet de loi ambitieux qui vise à permettre à l'Etat de mieux gérer ses finances publiques, grâce au nouvel outil qu'est le frein à l'endettement, puisque, dans ce canton, ni le Conseil d'Etat ni le parlement ne sont en mesure de respecter des principes de base de gestion.

L'article 7, tel que libellé par le Conseil d'Etat, prévoit quelque chose de tout à fait basique mais fondamental, à savoir que les comptes de fonctionnement de l'Etat soient équilibrés. Par contre, le Conseil d'Etat propose - à l'alinéa 2 - de permettre à l'Etat de présenter un excédent de charges estimé grosso modo entre 270 et 300 millions de francs par année. Et, lorsque le budget de fonctionnement des charges courantes prévoit un excédent de charges, on nous demande - à l'alinéa 3 - de prévoir un plan financier quadriennal qui doit - qui doit et non pas qui peut - prévoir un excédent de charges en diminution régulière chaque année. Cela veut dire que, dans la loi, le Conseil d'Etat oblige - ou s'oblige - à prévoir sur quatre ans un excédent de charges, alors qu'on aurait pu prévoir une diminution de charges.

Ensuite, à l'alinéa 5, on nous propose des modifications d'ordre législatif soumises au vote du Conseil général. Et on ne sait même pas si c'est le Conseil d'Etat ou le parlement qui propose ces modifications législatives; ce sont peut-être les deux.

Pour que le frein à l'endettement mérite son nom, l'amendement que nous proposons est beaucoup plus simple. L'alinéa a) reste tel quel. Les résultats dégagés doivent «permettre le renouvellement des investissements de fonctionnement, sans augmentation de la dette». On a ajouté que les résultats doivent «permettre le remboursement régulier, économiquement correct dans sa quotité et sa durée, des dettes de l'Etat et autres engagements assimilés, contractés dans le cadre de l'exercice courant des activités de l'Etat». Par contre, on a reformulé les alinéas 2 et 3. On demande que, si le budget de fonctionnement de l'Etat n'est pas équilibré au sens de l'alinéa a), il devra retrouver l'équilibre dans un délai de deux ans.

Le Conseil d'Etat - respectivement la commission - nous propose dans ce projet de loi un équilibre qui pourrait être atteint dans un délai de cinq ans minimum, voire six. Ce n'est malheureusement pas suffisant quand on sait que les recettes de ce canton sont très volatiles. Et, de toute manière, cet objectif est inatteignable, puisque les garanties de l'Etat - notamment pour l'Hospice général - peuvent faire capoter n'importe quel plan quadriennal.

Je vous propose donc de voter cet amendement pour être cohérents, sinon je ne vois pas l'intérêt de voter ce projet de loi.

La présidente. Monsieur Hiler, vous étiez inscrit hier soir...

M. David Hiler. C'est passé ! C'est trop tard !

La présidente. Je passe la parole à Mme Brunschwig Graf. (Important brouhaha.)

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je prendrai la parole quand la salle se sera calmée, je n'arrive pas à parler quand il y a un bruit de cette importance. (Un instant.)Merci.

Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi qui vous est soumis prévoit deux choses que j'ai déjà rappelées hier soir. La première est qu'il s'agit d'avoir un premier cadre qui restreint les déficits acceptables. Le déficit acceptable ne peut pas - sauf exceptions qui viennent uniquement à l'alinéa 5 - dépasser le montant équivalent aux amortissements du patrimoine administratif, auquel on additionne le différentiel des provisions. J'ai eu l'occasion de vous répéter que le montant qui en découlait ne pouvait normalement pas être supérieur à 290 voire 300 millions. Cela signifie - je le dis notamment à l'attention du groupe UDC qui a déposé ces amendements - que les dispositions normales de la loi mettent un cadre précis et limitatif qui prévoit le rétablissement de l'équilibre dans un délai fixé à quatre ans au maximum.

Les mesures dont on discute aujourd'hui, et notamment les dispositions précisées dans la loi, vont au-delà. Ce sont les mesures que l'on prend lorsque le déficit est hors cadre. Et c'est justement là où je ne suis pas d'accord - au nom du Conseil d'Etat - avec les dispositions proposées par l'UDC. Hier, vous avez proposé un premier amendement général. Il prévoyait la suppression de la possibilité de tout déficit. La nuit portant conseil, vous avez décidé de reprendre le dispositif et de regarder dans quelle mesure vous pouviez le resserrer. Maintenant vous proposez d'avoir, en matière de budget de fonctionnement - je n'ai pas encore compris tout à fait ce que vous appeliez les renouvellements des investissements de fonctionnement...

Madame la présidente, est-ce que je peux vous demander... (La présidente agite la cloche.)Mesdames et Messieurs les députés, nous avons un projet de loi à terminer et à certains moments je ne peux entendre autre chose qu'un énorme bruit...

Les députés UDC proposent le renouvellement des investissements de fonctionnement sans augmentation de la dette. Je ne sais pas de quoi vous parlez exactement car je ne comprends pas la portée de cet alinéa a). Je vous rappelle qu'à l'heure actuelle, quoi que vous fassiez, la dette augmente pour la simple et bonne raison qu'il s'agit d'honorer les engagements pris pour la Fondation de valorisation; nous devons chaque année débourser entre 250 et 300 millions qui sont le règlement des pertes de ladite fondation.

Deuxièmement. Vous demandez de pouvoir dégager des boni pour permettre «le remboursement régulier, économiquement correct dans sa quotité et sa durée, des dettes de l'Etat et autres engagements assimilés, contractés dans le cadre de l'exercice courant». Si ce que vous dites est bien ce que je crois, cela veut dire que vous posez non seulement un principe de budget équilibré, mais en plus un principe de budget équilibré avec un boni obligatoire de minimum 300 millions, sinon je n'ai pas bien compris ce que signifiait la lettre b) de votre amendement.

Ensuite, en supposant que le principe lui-même doive être appliqué - et c'est là le principal défaut de votre amendement - dans le projet de loi actuel, les quatre premiers alinéas peuvent être appliqués. Ils entrent dans la normalité, ils prévoient un budget contenant un déficit ne devant pas dépasser 300 millions et pouvant être résorbé en quatre ans. Ce sont des dispositions raisonnables.

A l'alinéa 1, vous entrez dans un principe premier qui rend vos exigences inapplicables dès le début. Un principe de budget qui doit au moins dégager un boni de 300 millions, dans la situation où nous sommes à l'heure actuelle, est un principe qui ne peut pas être appliqué dans la normalité.

Puis nous arrivons à votre alinéa 2 et aux mesures que vous prévoyez. Dans ce cadre, vous demandez des délais de deux ans qui, là aussi, sont inacceptables. Le sens d'un projet de loi tel que celui du frein à l'endettement est de faire en sorte qu'il y ait des normes applicables dans la régularité. Il faut éviter de poser dès le début des dispositions ayant comme principale conséquence de violer la loi. Si l'on tient compte de la situation des finances de l'Etat, cette loi ne sera jamais appliquée dans les prochaines années. Je ne crois pas qu'il soit de bonne politique de mettre la barre à un niveau qui ne soit pas atteignable dès le début.

C'est d'ailleurs l'objet du débat. Certains sentent que l'objectif est atteignable, mais ils ne le souhaitent pas dans les délais prévus. Là où vous mettez la barre, vous la rendez inaccessible dès le début ! Et, finalement, vous enjoignez l'Etat à ne pas appliquer vos propres dispositions. C'est simplement impossible et on le sait. Cela n'a pas de sens ! A partir de là, vous allez porter l'application de la loi aux calendes grecques. La raison voudrait que vous renonciez à votre amendement et que vous soyez plus attentifs à l'application des dispositions qui seront votées. Elles représentent déjà un effort important et constant. Faisons cet effort ! Donnons-nous un cadre à respecter ! Mais de grâce, ne rendons pas la cible inaccessible. Car autrement, nous retomberons dans les vieux travers d'avoir une loi sur la gestion administrative et financière qui n'est pas respectée dans ses détails. Mieux vaut une loi qui soit peut-être moins ambitieuse que ce que vous prétendez atteindre, mais qui soit respectée, appliquée, et qui représente une contrainte raisonnable accompagnant l'effort. Aujourd'hui, ce n'est simplement pas possible de demander ce que vous demandez. C'est la raison pour laquelle - je regrette de le dire - cet amendement n'est pas raisonnable; celui d'hier ne l'était pas non plus.

Il y a d'autres amendements sur cette table, notamment celui déposé par M. Pagani. Il ne s'y trompe pas, il demande que la loi accompagnant la loi constitutionnelle ne soit applicable que lorsque l'article constitutionnel est adopté, ce qui signifie que toutes les contraintes des premiers alinéas de facto n'entrent pas en vigueur. Et pourquoi demande-t-il cela ? Car il a bien compris que les alinéas 1 à 4 exigent une application immédiate et que ceci demande un effort.

Il faut faire une pesée des intérêts qui ne consiste pas à atteindre le maximum, mais qui permette que l'optimum soit respecté. Je vous demande de résister à cet amendement et de le refuser.

La présidente. Avant de passer la parole, je rappelle que nous sommes en deuxième débat, à l'article 7 du projet de loi 9267-A. Nous sommes saisis de deux amendements que vous avez sur votre table, celui de M. Pagani pour l'alinéa 3 et celui du groupe UDC sur les alinéas 1, 2 et 3. Je passe la parole à M. Glatz.

M. Philippe Glatz (PDC). J'ai une motion d'ordre. Vous avez décidé de clore la liste alors que nous venons de recevoir un amendement où il est marqué «annule et remplace le précédent» et dont nous ne pouvons pas discuter. Je refuse, dans ces conditions, de participer à un vote pour lequel il n'y aurait pas eu de débat préalable.

La présidente. Monsieur le député, je vous ai simplement cité les personnes qui étaient inscrites. Nous n'avons pas dit que la liste était close. Nous avons toute une série de députés inscrits. Si vous voulez vous exprimer sur les deux amendements, je vous passe la parole.

M. Philippe Glatz. Je vous remercie. J'ai plusieurs choses à dire sur ces deux amendements. Le premier, celui de l'Alliance de gauche, demande que le délai soit porté à dix ans. Que cela signifie-t-il ? Celui-ci signifie que l'Alliance de gauche souhaite que l'on ne fasse rien. Si elle porte le délai à dix ans, c'est vraiment pour repousser aux calendes grecques toute décision. Cela voudrait dire qu'en l'espace de dix ans le déficit budgétaire pourrait continuer à s'accumuler sans que personne se sente responsable de rien - comme je l'ai déjà signifié hier.

Mme la présidente du département des finances vient de le dire, un délai de quatre ans est déjà très long pour réagir. Cela signifie - M. Catelain l'a ajouté - pratiquement un délai final de six ans, en admettant qu'aucune décision ne soit prise durant le délai initial. Cela voudrait dire qu'au terme de ce nouveau délai il faudrait aller devant le peuple avec des propositions concrètes. Et, une fois soumises au vote, il faudrait encore compter un délai d'environ six mois à une année, avant que les décisions ne puissent prendre effet, soit une année supplémentaire. Nous en serions donc à six ans. C'est un délai qui me semble parfaitement raisonnable pour infléchir une politique.

Néanmoins, le délai de quatre ans donné pour infléchir la courbe - ou la politique - doit être mis à profit par les uns et les autres - y compris par les éminents membres de ce parlement - pour produire une réflexion consistant à demander des économies ou à demander des impôts supplémentaires en toute intelligence. Voilà à quoi devrait servir ce délai. Je ne doute pas - contrairement à ce qui a été affirmé hier - qu'un certain nombre de personnes dans cette assemblée ont de larges idées. C'est pour cela que nous sommes absolument certains que nous n'aurons pas besoin de faire des propositions devant le peuple, car ce parlement et le Conseil d'Etat sauront prendre leurs responsabilités face à l'ampleur des déficits accumulés et sauront infléchir les mauvaises décisions qui nous ont conduits à avoir ce déficit. En conséquence, Mesdames et Messieurs, je propose que nous rejetions l'amendement de l'Alliance de gauche.

Quant à l'amendement de l'UDC, il faut dire un certain nombre de choses à son propos. Il faudrait que je demande à M. Catelain de nous expliquer plus précisément pour quelles raisons il souhaite demander que les résultats soient calculés de manière cumulative. Je ne comprends pas cette raison. D'après la loi actuelle, s'il y a un déficit important dans une année, le Conseil d'Etat est déjà obligé de prendre des mesures ou de faire des propositions de mesures. Et le parlement est aussi dans l'obligation de faire des propositions. Pourquoi ajoutez-vous «cumulativement» ? Serait-ce, Monsieur Catelain, que vous seriez enclin à autoriser un déficit cumulatif dans ce délai de deux ans ? Avec votre projet de loi, vous êtes en train d'aggraver le projet de loi actuel.

Autre question. J'aimerais avoir une explication sur votre alinéa 2, quand vous dites que si, «pour quelque raison que cela soit, le budget de fonctionnement de l'Etat n'est pas équilibré au sens des dispositions de l'alinéa 1, des modifications de nature législative, visant à assainir dans un délai de deux ans le déséquilibre constaté, sont soumises au vote du Conseil général, impérativement avant l'adoption du prochain budget.» Pourquoi impérativement avant l'adoption du prochain budget ? Comment allez-vous entrer en concordance avec les exigences qui doivent nous permettre d'élaborer un budget et les exigences qui doivent nous permettre de soumettre un objet au peuple dans les délais réglementaires ou légaux ? Ne craignez-vous pas qu'il y ait ici une possibilité de heurts entre ces deux délais ? Soit celui qui nous impose d'avoir et de proposer chaque année un budget, soit l'autre qui nous impose de faire des propositions devant le peuple selon un plan et un calendrier définis par la chancellerie et en fonction de l'ensemble des votations. Là aussi, il y a un risque, et c'est pour cela que votre amendement ne me semble pas construit. Je serais très heureux de vous entendre à ce propos, mais, pour l'instant, Mesdames et Messieurs, je vous propose de rejeter l'amendement de l'UDC et d'en rester au projet de loi. Il est abouti dans sa rédaction et empreint de bon sens populaire. Il démontre très clairement que si nous n'avons pas un équilibre, nous nous donnons le temps de prendre des mesures, mais dans un temps raisonnable. Et qui pourrait dire que quatre ans n'est pas un temps raisonnable, qui oserait dire qu'il faut plus de quatre ans ?

La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste sur cet article 7. Ont demandé la parole: MM. Mettan, Catelain, Weiss, Grobet, Mouhanna, Spielmann, Hiler, Kanaan et Velasco. Je passe la parole à M. Catelain.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je vais clarifier rapidement les deux points soulevés par le parti démocrate-chrétien. «Cumulativement» signifie simplement que l'on veut que le budget soit équilibré, tant au niveau du fonctionnement que des investissements, tant au niveau du remboursement de la dette que dans sa globalité. Il me semble que c'est simple à comprendre.

L'alinéa 2 réclame que des mesures législatives permettant l'équilibre au bout de deux ans soient adoptées, sinon on sait très bien que cela prendra une troisième année. On vote sur les mesures législatives qui vont permettre d'assainir le budget dans un délai de deux ans, sinon on reportera d'autant l'assainissement des comptes de l'Etat.

Je m'exprime par rapport à ce qu'a dit Mme Brunschwig Graf. Ce canton est dans la situation financière la pire de Suisse. Monsieur Spielmann, qui avez lu «le malaise genevois», vous en avez été convaincu. Je m'étonne que l'on fasse une sorte de «réformette» qui ne déploie pas ses effets avant six ou sept ans, avec des mesures urgentes à prendre pour éviter de refiler le bébé à la prochaine législature, voire au prochain gouvernement. Je m'étonne que l'on n'oblige même pas à avoir - dans le cadre du plan quadriennal - un éventuel bénéfice et que cet article 7 ne tienne pas compte de la conjoncture. Vous savez qu'elle évolue beaucoup plus rapidement à Genève que dans d'autres cantons. Il en est de même pour les recettes de l'Etat: chaque année le département nous dit qu'il est très difficile d'estimer les recettes.

Je dois ajouter que le peuple prendra ses responsabilités, en tout cas une partie de la population, puisque Genève a aussi la caractéristique particulière d'avoir une rotation de population relativement rapide et qu'une forte proportion de cette population ne paie pas d'impôts - et n'aurait pas non plus, à mes yeux, la nécessité de devoir voter des hausses d'impôts, car elle les voterait très facilement dans la mesure où elle n'en paie pas.

Pour l'efficacité de ce frein à l'endettement, nous devons donc prendre en compte le fait que la conjoncture et les recettes évoluent très rapidement, que la population est très volatile et que le principe de base est qu'un budget doit être établi sur la primauté des recettes et non sur la primauté des dépenses. C'est ce que nous voulons obliger le Conseil d'Etat à réaliser en vous proposant cet amendement.

M. Pierre Weiss (L). Dans cette question, nous nous trouvons avec une proposition médiane qui est celle du projet de loi qui vous est soumis, et deux propositions qui en divergent, une par prudence, l'autre par laxisme. Je commencerai par la deuxième. Pour ceux dans ce parlement et dans la population qui n'auraient pas compris, la proposition de M. Pagani d'un retour à l'équilibre dans un délai de dix ans est un renvoi aux calendes grecques de toute amélioration des finances publiques.

Je m'étonne d'ailleurs au passage que M. Pagani n'ait pas eu l'idée de proposer un zéro de plus à son amendement. Pourquoi pas cent ans ? Voire un déficit de mille ans ? C'est une formule qu'il aurait pu affectionner, et je m'étonne qu'il n'y ait pas recouru. On ne sait jamais, il aurait peut-être voulu l'imposer aux fils de nos fils. Son amendement ne mérite pas d'autre considération.

Ce soir nous avons pu nous entendre sur un projet sérieux et important comme celui de la Cour des comptes, mais quand nous voyons pareille proposition, nous devons bien nous rendre compte que ce sont là des majorités de circonstance. Chassez le naturel, il revient au galop. Chez M. Pagani, le naturel, c'est l'outrance, c'est le laxisme, c'est l'absence de rigueur. Et je m'étonne... (Exclamations.)Et il est évident que je suis prêt à en rajouter si M. Bavarel le souhaite. Vous savez fort bien que j'en suis capable, mais je n'arriverai qu'à la cheville des outrances de M. Pagani. (La présidente agite la cloche.)

Parfois, c'est hors du parlement qu'il se comporte de façon inadmissible, et il est condamné par la justice. C'est d'ailleurs le seul député de notre parlement qui a été inculpé, condamné. Nous connaissons sa mauvaise foi, nous connaissons la façon dont il essaie de déstabiliser le pouvoir judiciaire. Et voilà qu'aujourd'hui il essaierait de déstabiliser la République ! Voilà comment M. Pagani s'y prend ! C'est une preuve supplémentaire, et j'aimerais que les citoyens de ce canton se souviennent qu'à l'heure où ce canton affiche 12 milliards de déficit - selon ses propres chiffres - 17 selon la Confédération... Eh bien, grâce à vous, grâce à vos... (Exclamations.)Inutile de dire que je conclurai sereinement sur son amendement en disant qu'il ne peut être que refusé.

Je passe maintenant à l'amendement déposé par nos collègues de l'UDC. J'ai dit tout à l'heure que c'était un amendement qui méritait d'être considéré. Evidemment. La différence entre M. Pagani et M. Iselin, c'est que M. Iselin jouit d'un sérieux à toute épreuve et d'une réputation sans taches. Si vous le permettez, je lirai deux alinéas de l'amendement de M. Iselin et de ses collègues de l'UDC.

Au premier alinéa, lettre a), j'ai de la peine à comprendre une expression et j'aimerais que M. Iselin me donne des explications complémentaires sur ce point. J'ai de la peine à comprendre le concept... (Exclamations.)Je crois que chacun doit avouer ses difficultés de compréhension, même moi. Même moi j'en éprouve. Il faut faire preuve d'humilité, vous avez raison, Monsieur Velasco.

Je cite: «Permettre le renouvellement des investissements de fonctionnement». J'aimerais comprendre ce que signifient les investissements de fonctionnement. M. Iselin nous donnera certainement des explications qui nous permettront d'entrer en matière sur ce nouveau concept financier.

En revanche, le deuxième alinéa est d'une clarté totale. Il propose un retour à l'équilibre dans un délai de deux ans. On pourrait être d'accord avec le groupe UDC sur l'intention, sur la direction. Mais nous avons un plan financier quadriennal. Nous l'avons voulu, nous avons soutenu le gouvernement pour le plan financier quadriennal. Et, dans la mesure où nous n'avons pas de plan financier biennal, il nous semblerait difficile, voire illogique, d'entrer en matière sur cette proposition d'amendement. Ainsi, je vous propose de réfléchir à la rapidité du retour à l'équilibre.

La présidente. Monsieur le député, vous êtes à la fin de votre temps de parole.

M. Pierre Weiss. Je parlerai quand il y aura le silence. Dans la minute qui me reste, je dirai simplement qu'il faut que nos collègues de l'UDC se rendent compte que le retour à l'équilibre ne peut se faire à marche forcée. Il convient d'observer un peu de raison et j'aimerais plaider auprès d'eux pour qu'ils acceptent le compromis. Certes, comme tout compromis, partiellement insatisfaisant...

La présidente. Je passe la parole à M. Grobet.

M. Christian Grobet (AdG). Au nom du groupe de l'Alliance de gauche et certainement au nom d'autres députés, j'aimerais tout d'abord déplorer très vivement l'intervention de M. Weiss - pour qui j'ai en général du respect. Diffamer un député comme vous venez de le faire est indigne du parlement... (Applaudissements.)Ne soyez pas trop présomptueux. Dans les procès en diffamation, il y a un premier round, un deuxième, un troisième et le quatrième round c'est Strasbourg. Ne préjugez pas des suites de la procédure qui concerne M. Pagani.

J'aimerais ajouter qu'un certain nombre de députés courageux ont mis fin aux procédés maffieux de l'office des poursuites qui avaient détérioré le climat de Genève d'une manière incroyable. On a appelé cela le plus grand scandale de notre République depuis des décennies. Je rends hommage à celles et ceux qui ont eu le courage de dénoncer toutes ces vicissitudes et qui ont permis à l'office des poursuites de retrouver sa dignité. (Applaudissements.)

Cela étant dit, je reviens à l'objet en cause. J'aimerais vous dire, Monsieur Weiss, que nous sommes tout aussi préoccupés que vous du déficit de l'Etat. Il y a quelques années, à l'époque où l'Alternative était majoritaire au sein de ce Grand Conseil, la situation des comptes de l'Etat s'était améliorée. On avait... Vous pouvez toujours rigoler, Monsieur Gros, mais j'aimerais vous rappeler les déficits catastrophiques des comptes de l'Etat sous l'égide du gouvernement monocolore de droite, c'est-à-dire au moment où vos partis de droite gouvernaient tout seuls. Ce sont des centaines de millions de déficit que vous avez accumulés. Et pendant la période où l'Alternative n'était pas majoritaire au Conseil d'Etat mais au Grand Conseil, les comptes - et on peut rendre hommage à Mme Calmy-Rey - sont sortis du rouge pour revenir dans le noir. Et maintenant ils sont retournés dans le rouge et vous savez très bien pourquoi. Vous avez gagné devant le peuple avec votre diminution de 12% des impôts, mais la grande majorité des citoyennes et des citoyens se sent flouée par cette baisse d'impôts. Ils se rendent compte qu'ils n'en ont pas bénéficié. Par contre, on sait qui a bénéficié de cette baisse d'impôts. Ce sont les multimillionnaires, les riches ! Ce sont les hauts revenus qui ont bénéficié de cette situation ! Vous avez créé la crise des recettes et vous le savez. Si cette diminution d'impôts au profit des nantis n'avait pas été mise en place, le budget serait équilibré aujourd'hui.

Quant à l'augmentation de l'endettement de l'Etat, j'aimerais rappeler - cela a été dit tout à l'heure - la situation catastrophique de la banque cantonale. La Banque cantonale a été mise dans une situation de banqueroute par celles et ceux de vos amis qui la géraient. Cela a causé un déficit extraordinaire que maintenant nous devons supporter à raison de 250 millions de francs par année.

Lorsque vous essayez de faire les comptes dans cette enceinte, vous perdez une belle occasion de vous taire. Car si on fait les comptes, on voit très bien comment l'argent a été dépensé et pour quoi il est dépensé aujourd'hui. Vous essayez de faire croire que ce sont les prestations sociales qui coûtent cher, mais ce qui coûte cher, c'est la banqueroute de la banque cantonale. Cela nous coûte cher ! (Applaudissements.)

A propos du texte proposé par l'UDC. Je n'adhère pas aux propositions de l'UDC. Mais je pense qu'elles méritent d'être examinées. Vous, Messieurs Weiss et Glatz, avez demandé aux députés UDC d'expliquer leur texte. Il n'y a pas tellement besoin de leur demander des explications, ce qu'ils ont rédigé est clair.

Je vais vous lire, pour vous rappeler - et c'est pas mal que celles et ceux qui regardent Léman bleu voient un des articles que l'on nous propose de voter - l'alinéa 4 de l'article 7 qui est soumis à nos débats. Ecoutez bien ce que l'on va voter: «Lorsque le compte de fonctionnement relatif aux opérations courantes de l'Etat de Genève affiche un excédent de charges supérieur à la limite prévue à l'alinéa 2, le prochain budget de fonctionnement en cours d'élaboration (année N+1) doit inclure l'amortissement du découvert du bilan correspondant à la différence entre l'excédent de charges observé lors des comptes de l'exercice N-1 et la limite prévue à l'alinéa 2». (Rires.)Alors, je me réjouis, Messieurs Weiss et Glatz, que vous nous expliquiez ce que signifie ce charabia que vous voulez nous faire voter... (Réaction.)Mais, Madame, je sais que vous êtes une excellente ex-enseignante - puisque vous avez quitté le DIP - vous pourrez nous expliquer également. On aura certainement trois versions très intéressantes, et c'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, au vu de la difficulté de compréhension de ces textes, je fais la proposition que l'amendement de l'UDC ainsi que le texte que l'on vient de nous soumettre soient renvoyés en commission.

La présidente. A présent, un député par groupe s'exprimera uniquement sur le renvoi en commission des finances.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de deuxième minorité. Il va de soi que je suis favorable au renvoi en commission. Mais je voudrais quand même, si vous le permettez, ne pas laisser passer l'attaque ignoble qu'a portée M. Weiss contre M. Pagani. Je dirai un mot à M. Weiss. Ce que vous avez dit me libère, car depuis un certain temps, vous ne cessez de parader comme un paon dans ce Grand Conseil et votre problème, c'est que vous ne savez pas que vos plumes sont celles d'un poulet. (Rires et applaudissements. La présidente sonne la cloche.)

M. David Hiler (Ve). C'est bien sur le renvoi et non sur les paons et les poulets que je m'exprimerai.

La proposition de M. Grobet vient à point pour deux raisons. La première - je pensais la développer un peu plus tard - est que l'on a voté hier un article constitutionnel qui sera soumis au peuple. Sans cette base constitutionnelle, le projet de loi que nous connaissons n'est qu'un catalogue de souhaits, car il ne comporte aucune sanction.

Dans la situation actuelle, cette loi prévoit toutes sortes de choses que certains ne respectent jamais, depuis un certain nombre d'années. Pour cette raison, le processus démocratique exigerait que nous attendions le résultat du vote populaire sur l'article constitutionnel pour trancher sur cette loi. Je ne suis pas du tout certain que le peuple ait l'intention de laisser réduire sa possibilité d'intervenir dans le débat politique, comme vous le proposez.

M. Grobet a raison sur un deuxième point. Ce qui est proposé par l'UDC est un peu moins compliqué que ce qu'il y a dans la loi actuelle, mais cela reste relativement trapu. On n'a pas vraiment eu le temps de mesurer les effets induits. On pourrait consacrer quelques heures à voir si quelque chose peut être retiré de cette proposition. Mais, sur le fond, nous ne pouvons pas - nous les Verts - comprendre comment on peut voter une loi sans avoir la base constitutionnelle, ou en espérant que la disposition constitutionnelle sera acceptée, et en prenant le risque d'avoir une loi qui n'a aucun sens. Car elle n'a aucun sens si elle n'a pas de sanctions.

Si, en cas d'échec de l'article constitutionnel, vous acceptiez de jouer le jeu, vous pourriez revenir sur une proposition «à la fribourgeoise». C'est un autre mécanisme que vous avez développé parfaitement hier, Madame la présidente. Vous nous avez bien expliqué qu'il y a un chemin, et que des sanctions sont prises si ce chemin n'est pas respecté. Aujourd'hui, en ne reportant pas au moins le troisième débat sur cette loi, vous prenez le risque d'avoir une loi dont on biffera l'article qui précisément prévoit que l'on puisse aller devant le peuple avec deux objets qui s'opposent. Et vous ne vous trouverez avec rien de plus que la loi actuelle. Et le peuple n'est peut-être pas d'accord avec la solution rapidement copiée par certains, parce que l'innovation dans cette affaire... Et le peuple pourrait être d'accord avec le mécanisme fribourgeois. Ceux qui connaissent ces freins à l'endettement sont satisfaits du résultat, vous l'avez dit. Pour les Vaudois, on ne sait pas encore, puisque l'on est en procédure. Les freins traditionnels, tels que développés à Fribourg et défendus par le professeur Daflon, ont des résultats. Mais ce n'est pas la même loi.

Tranchons. Laissons le peuple s'exprimer sur des bizarreries constitutionnelles. S'il les accepte, vous ferez un vote sur cette loi qui entrera immédiatement en vigueur. Mais s'il ne l'accepte pas, chacun - puisque j'ai cru comprendre que le parti socialiste avait aussi une série de propositions - viendra rediscuter de la meilleure manière de venir à bout de notre déficit. Etant admis - nous le savons tous - que nous le mettions ou pas dans la loi, il faudra bien le faire une fois, et très vite probablement.

M. Sami Kanaan (S). Nous soutiendrons le renvoi en commission. J'aimerais quand même relever le contraste assez flagrant et finalement assez décevant entre ce débat et celui que nous avons eu avant la pause. Cela démontre une chose: en matière de finances publiques, si un travail sérieux se fait en commission, s'il y a une ouverture de part et d'autre, il est possible d'arriver à un large consensus; c'est à une majorité quasi unanime - à quelques abstentions près - que ce parlement a pu voter la Cour des comptes.

Certains ont dit que c'est la preuve que ce parlement prend au sérieux les enjeux des finances publiques et qu'il peut se mettre d'accord sur des choix fondamentaux. Faut-il mettre en doute cette volonté exprimée tout à l'heure lorsqu'on entend ce débat, où malheureusement c'est une autre approche qui prévaut, celle de la confrontation et des solutions de plus en plus trapues ? Et en plus, avec des conséquences à la fois politiques, financières et techniques dont on ne mesure pas la portée.

L'amendement de l'UDC a le mérite de la franchise et de la clarté, car il réclame le retour à l'équilibre immédiat. Je mets en doute sa faisabilité, mais il a le mérite de la franchise. Il nous rappelle une chose, c'est que le projet de loi constitutionnelle que vous avez si aisément voté hier est une arnaque démocratique. Il se contente de proposer au peuple une limitation de ses droits sans lui donner l'occasion de se prononcer sur le mécanisme d'assainissement.

Le projet de loi constitutionnelle d'origine proposait aussi au peuple de choisir son mécanisme d'assainissement, avec une votation automatique. La majorité l'a malheureusement supprimé en commission et, de ce point de vue, c'est une arnaque démocratique. Et après, on va faire des bricolages techniques dans la loi - une loi importante. Sans compter le problème soulevé par David Hiler si le peuple dit non. Et je peux vous dire que l'on va mettre toute notre énergie pour qu'il dise non au projet de loi constitutionnelle dans la forme votée hier, parce que c'est une arnaque démocratique. Le peuple genevois refusera cette suppression des droits démocratiques et la loi que vous discutez actuellement est vide de sens. C'est exactement la même chose qu'aujourd'hui, il n'y a pas de sanctions, il n'y a rien. Donnez une chance à un travail un peu plus sérieux en commission. Il y a peut-être moyen de s'entendre, ou en tout cas d'avoir des solutions un peu mieux pensées, un peu plus réfléchies que cette espèce de baudruche proposée aujourd'hui. Essayez de vous inspirer du débat sur la Cour des comptes et renvoyez cet objet en commission.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Dans cette enceinte, un certain nombre de partis ont assuré de leur volonté d'avoir un frein à l'endettement. Vous prétendez les uns et les autres qu'un renvoi en commission permettrait d'atteindre un consensus. J'ai décidé de demander le renvoi en commission et de vous mettre au défi de le faire.

Mais je vous dis très clairement les choses. Je n'épargnerai ni les uns ni les autres si d'ici la fin juin une solution n'est pas trouvée. Nous ne pouvons pas continuer dans cette situation. Nous avons besoin d'un cadre légal. Ce cadre légal ne permet pas que l'on s'écharpe de façon indistincte en commission. Je le dis aussi bien pour l'UDC que pour ceux qui ont proposé ces amendements. Je veux vous mettre à l'épreuve de la bonne volonté. La bonne volonté est qu'à un moment donné on prétende trouver une solution dans cette enceinte, un cadre correct qui soit négocié. (La présidente agite la cloche.)

Certains d'entre vous vont me faire regretter la proposition que je viens de faire. Mais il y a suffisamment de gens intelligents et de bonne volonté dans ce parlement pour comprendre ce que je suis en train de dire. L'heure est grave. Je viens de regarder un certain nombre d'éléments financiers, et je vous dis simplement que l'on vit sur notre bonne mine. Je vous l'ai dit à plusieurs reprises et je le redis. On a une dette de 12 milliards qui repose sur notre crédibilité en termes de conditions dans lesquelles nous négocions nos emprunts. (La présidente agite la cloche.)

Est-ce que je peux demander, Madame la présidente, que dans ces groupes, pendant simplement cinq minutes, on accepte de ne pas poursuivre sans arrêt des conversations, alors que l'on parle de quelque chose qui nous intéresse tous. Je ne prétends pas mériter de l'attention, mais je prétends que cette situation financière mérite que l'on se taise pendant cinq minutes. Arrêtez les horions dans cette salle et écoutez ce qui se dit. Je viens de faire une proposition de compromis, est-ce qu'on peut l'accepter comme elle est, accepter que l'on y travaille et accepter les délais que l'on se fixe ? Il est impératif que d'ici la fin septembre vous ayez adopté un tel principe. Non pas à cause des élections, mais parce que nous avons besoin d'un cadre, parce que nous avons besoin de donner quelques gages de notre bonne volonté et qu'il ne suffit pas d'avoir des débats où nous nous étripons pour que les bailleurs de fonds acceptent encore longtemps les conditions exceptionnelles dans lesquelles nous négocions nos emprunts.

Je ne serai plus là l'année prochaine, Mesdames et Messieurs. Il n'y a aucun intérêt personnel à ce que je vous dis. Cela a un intérêt par rapport à l'Etat de Genève et cela vaut la peine que nous nous taisions cinq minutes, que nous acceptions de travailler encore une fois en commission et que nous acceptions de trouver une solution pour qu'au mois de septembre, dans cette salle, malgré les élections, nous trouvions un projet de loi qui emporte une large majorité (Applaudissements.)

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je donnerai le point de vue du PDC sur le renvoi en commission.

Je partage le souci de la présidente. Jusqu'à maintenant, on avait la fièvre du samedi soir, maintenant on a la fièvre du vendredi soir. L'état du débat de ce soir est assez déplorable. Mme la présidente l'a dit. Je n'ai pas cité de noms ce soirs - on peut indiquer qui vous voulez - mais je n'ai pas dit que c'était la gauche.

J'ignore ce que mon parti décidera à propos du renvoi en commission, mais personnellement je m'y opposerai, pour une raison toute simple. C'est que je trouve - au vu des amendements proposés ce soir par l'UDC et M. Pagani - que le projet que nous avons ce soir était bien le bon. C'est-à-dire que c'est un projet de bon compromis, c'est un projet qui tient la route et qui est utile pour Genève.

Ce que je veux dire ce soir - pour montrer mon opposition au type de débat que nous avons eu - c'est que je trouve déplorable l'attitude de beaucoup de partis de l'Entente comme de la gauche. Je m'opposerai au renvoi en commission parce que cela ne fait que délayer, que reporter. C'est un déni de responsabilité que nous faisons ce soir.

M. Gilbert Catelain (UDC). J'ai bien écouté Mme la présidente du département. Je rejoins une bonne partie de son argumentation et je salue sa proposition de renvoi en commission.

Nous devons nous engager à trouver un compromis d'ici la fin du mois et c'est possible avec de la bonne volonté. Le compromis que vous avez trouvé en commission était certainement un compromis qui plaisait au PDC, car il n'était pas trop contraignant - j'imagine. Par contre, il ne nous convient pas.

On doit certainement trouver un nouveau compromis, peut-être un peu plus orienté sur le projet de loi libéral. Le parti libéral avait déposé un projet de loi puis avait accepté de le retirer - peut-être à son corps défendant - au profit de ce compromis peu contraignant.

Néanmoins, il ne s'agit pas de refaire le débat. Nous allons voter le renvoi en commission et nous engager à oeuvrer pour que ce projet de loi soit perçu par la population comme réaliste, applicable et pouvant avoir des effets dans un délai plus court que celui des six ou sept ans proposés.

M. Pierre Weiss (L). Au parti libéral, nous annonçons que nous avons entendu les explications de Mme la présidente du département et nous prendrons nos responsabilités. Nous regrettons toutefois le délai posé ce soir à l'adoption de ce projet de loi. A notre corps défendant nous accepterons le renvoi en commission, pour les raisons qui ont été évoquées.

M. Hugues Hiltpold (R). Le groupe radical a également entendu les propos de Mme la présidente du département des finances et soutiendra le renvoi en commission, pour la simple et bonne raison que nous estimons nécessaire de trouver une solution qui soit acceptable par une majorité de ce parlement, dans des délais raisonnables, pour mettre rapidement en place une politique de réduction de l'endettement.

La présidente. Je mets aux voix le renvoi de ce projet de loi à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 9267-A à la commission des finances est adopté par 70 oui contre 12 non.

La présidente. Nous suspendons le PL-9163-A et le PL-9319-A dans l'attente des travaux de la commission des finances. (Commentaires.)Vous préférez que ces projets de lois soient tous renvoyés à la commission des finances ? Il en sera donc fait ainsi.

Le PL 9163-A et le PL 9319-A sont donc renvoyés à la commission des finances.

La présidente. Monsieur Pagani, que voulez-vous nous dire ?

M. Rémy Pagani (AdG). Madame la présidente, pour faire un travail efficace en commission, tout doit être renvoyé en commission. J'ai l'impression que ce n'est pas clair. Je vous demande de préciser à nouveau.

La présidente. Le PL 9392-A a été voté en trois débats hier. Et les trois autres projets sont renvoyés à la commission des finances.

R 496
Proposition de résolution de M. Gilbert Catelain : Halte aux bouchons de la route de Meyrin

Débat

M. Gilbert Catelain (UDC). Vous savez que de nombreuses communes frontalières ont signé l'année dernière une pétition contre les engorgements de trafic sur les routes de Chancy, Soral, Sézegnin, Veyrier, Troinex, etc. L'ensemble des maires de ces communes transfrontalières a signé une pétition qui a été renvoyée au Conseil d'Etat. La situation sur la rive droite n'est pas meilleure, et les solutions sont extrêmement difficiles à trouver.

Dans le même temps, d'importants travaux sont prévus sur les axes du Grand-Saconnex et de la route de Meyrin, notamment la construction du tram et les travaux de réfection du tunnel de Ferney-Voltaire. Ce qui veut dire que les communes du Grand-Saconnex, de Vernier et de Collex-Bossy sont confrontées à d'importantes nuisances. Ces nuisances seront encore plus importantes dans les trois prochaines années puisque les travaux d'infrastructure sont prévus entre le mois d'août...

La présidente. Monsieur le député, je vais simplement demander aux députés qui ont des commentaires à faire sur le précédent projet de s'éloigner et d'aller discuter dans la salle des Pas-Perdus ou dans la salle Nicolas Bogueret, afin que l'on puisse travailler sereinement. Je vous remercie.

M. Gilbert Catelain. Je poursuis. Ces communes vont être victimes d'importantes nuisances à cause de ces travaux, notamment la construction du tunnel sous Meyrin, la construction de la ligne de tram depuis la Servette et la réfection pendant dix-huit mois du tunnel de Ferney-Voltaire. Différentes solutions devront être négociées ou élaborées avec les communes et les communes frontalières françaises, ainsi que la préfecture.

Dans le même temps, on s'aperçoit que la France a consenti un investissement important pour permettre aux personnes domiciliées en France voisine et qui travaillent sur le site du CERN d'y accéder directement depuis la France. Grosso modo, cela représente 6000 véhicules à l'entrée et à la sortie qui se rendent sur le site de Meyrin, dont la grande majorité emprunte les passages de Ferney-Voltaire, Mategnin et Meyrin. En raison, d'une part, de restrictions imposées par le Département fédéral des affaires étrangères et par le gouvernement français et, d'autre part, de la situation qui prévalait avant l'extension des accords bilatéraux - notamment la deuxième phase des accords bilatéraux I - ces restrictions de circulation ne permettent qu'à 500 véhicules par jour d'emprunter la porte inaugurée l'année passée par le président de la Confédération et le président de la République française.

En vue des travaux qui vont être réalisés, il est clair que l'on pourrait facilement quadrupler le nombre de véhicules et décharger d'autant les axes de Meyrin et de Mategnin, et permettre ainsi à ces véhicules d'accéder directement sur le site du CERN.

Ces restrictions sont anachroniques, d'autant que les points de passage ne sont même pas gardés aux heures de trafic. Il est donc totalement absurde de vouloir faire passer par la route de Meyrin des véhicules qui pourraient très bien passer par la porte E, la porte Charles-de-Gaulle du CERN. L'organisation internationale du CERN est totalement favorable à cette solution; elle a d'ailleurs investi des frais conséquents et engagé du personnel de sécurité pour faire respecter les conditions établies. Les bénéficiaires de cette porte sont tous enregistrés et connus du CERN. Ce sont tous des personnels d'entreprises qui bénéficieraient de l'élargissement de ces possibilités d'accès.

Je vous propose donc de renvoyer directement cette résolution au Conseil d'Etat. Elle vise à intervenir auprès du Conseil fédéral pour qu'il renégocie l'accord avec la France, afin de permettre à 2500 fonctionnaires de cette organisation d'accéder directement depuis la France sur le site du CERN. Cela aurait pour conséquence d'alléger les charges de trafic, qui sont l'un des soucis constants du département de l'intérieur et des affaires extérieures.

Mme Loly Bolay (S). Le parti socialiste préférerait renvoyer cette résolution à la commission des transports. On n'est pas forcément d'accord avec tous les considérants de M. Catelain qui, d'un côté est contre les accords bilatéraux et l'Union européenne et, de l'autre, il demande des accords avec la France; c'est un peu paradoxal.

Cela dit, il est vrai que cette résolution soulève le problème de la région de Meyrin, voire de l'autre côté du Grand-Saconnex, dans la mesure où il est exact qu'une minorité de personnes peut passer par cette porte, c'est-à-dire qu'il y a une discrimination.

De plus, des travaux vont démarrer le 20 juin sur le pont de Ferney; cela veut dire que la frontière sera totalement saturée et qu'il y aura un transfert du trafic sur Meyrin ou Collex et Pregny-Chambésy. Avec les travaux du tram sur la route de Meyrin, cela va occasionner énormément de perturbations.

Etant donné la complexité du problème, je pense qu'il vaut mieux renvoyer cette résolution à la commission des transports.

La présidente. Dans un premier temps, je mets aux voix le renvoi de la résolution à la commission des transports.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 496 à la commission des transports est adopté par 45 oui contre 18 non.

PL 9516-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat déclarant d'utilité publique la réalisation du plan localisé de quartier n° 28670B-264, situé le long de l'Arve et de l'avenue de la Roseraie, sur le territoire de la Ville de Genève, section Plainpalais et des bâtiments prévus par ce plan
Rapport de majorité de M. René Koechlin (L)
Rapport de minorité de M. Rémy Pagani (AdG)

Premier débat

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Je souhaiterais informer ce Grand Conseil de ce dont il est question et du débat qui s'est déroulé en commission.

Il s'agit d'exproprier des servitudes qui empêchent la construction de logements sur trois parcelles, à l'avenue de la Roseraie. Ces constructions font l'objet d'un plan localisé de quartier qui englobe un périmètre largement plus vaste que les trois parcelles concernées, lesquelles sont inconstructibles à cause de ces servitudes.

Le débat qui s'est déroulé en commission portait sur l'application de la loi Geromini. Elle autorise ce Grand Conseil à voter l'utilité publique et donc la possibilité d'exproprier ces servitudes - car il s'agit de logements dont la construction est entravée par les servitudes en cause - à condition qu'au moins 60% de ces logements aient un caractère social, c'est-à-dire qu'ils répondent aux catégories LGL.

Deux solutions sont ressorties du débat. La première est de prendre la totalité du périmètre du plan localisé de quartier - dont une partie est déjà réalisée - avec un immeuble entièrement HBM construit par une fondation de droit public. Dans ce cas de figure, la majorité des surfaces de plancher réalisables représente environ les trois quarts de la totalité.

La seconde solution, celle du rapporteur de minorité, est d'exclure le bâtiment déjà construit - bien qu'il fasse partie du périmètre du plan localisé de quartier - et de ne prendre en compte que les bâtiments à construire. Il est vrai que si l'on se limitait à cette considération, le nombre de mètres carrés de plancher affectés à des logements sociaux serait inférieur aux 60% requis par la loi.

En somme, ou bien l'on prend la totalité du périmètre et la totalité des logements en cause - c'est ce que finalement la commission a retenu comme hypothèse de travail - et dès lors, il y aura plus de 70% de logements sociaux dans le périmètre. Ou bien on s'en tient - si l'on veut restreindre - strictement aux parcelles en question, qui sont grevées par les servitudes.

La possibilité de construire des logements est limitée sur ces trois parcelles, mais la proportion reste totalement respectée, puisqu'elle atteint 73% de logements à caractère social relativement à l'ensemble de ceux qui sont grevés par les servitudes. Dans les deux cas de figure, nous considérons que la loi Geromini est applicable. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, je vous invite à soutenir et voter le rapport de majorité.

Présidence de M. Michel Halpérin, premier vice-président

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Deux remarques en préambule. Je m'étonne que M. Koechlin, tout comme M. Weiss tout à l'heure, me prête des intentions avant que j'aie pu m'exprimer. En l'occurrence, M. Koechlin, comme M. Weiss, dit que j'affirme des choses alors que s'il lit bien le rapport de minorité, et s'il avait été un peu plus attentif à la commission à laquelle il a participé, c'est la Ville de Genève qui prétend qu'il n'y pas 60% de logements sociaux dans ce plan localisé de quartier, ce n'est pas moi. Je ne fais que rapporter ici - et c'est inscrit dans mon rapport de minorité - les propos et les calculs établis par la Ville de Genève, cette dernière étant partie prenante dans cette affaire.

Deuxième remarque. Nous sommes face à une situation un peu paradoxale, puisque la commission n'avait pas toutes les informations alors que le département les possédait. M. Moutinot n'étant pas là, je me réjouis de l'entendre pour infirmer ce que je vais dire. Toujours est-il que notre commission aurait dû être au courant de la levée des servitudes pour la construction d'un logement HBM, mais elle n'a pas été mise au courant et nous avons voté cette levée de servitude. Et aujourd'hui, concrètement et objectivement, si nous levons cette servitude, nous ne la lèverons que pour permettre la construction de douze logements de luxe, en PPE, Mesdames et Messieurs les députés.

Je trouve qu'il y a un manque d'information évident pour la commission. C'est pourquoi, ultérieurement, si les débats se prolongent, je proposerai le renvoi en commission. Car il me paraît évident que du point de vue de la sûreté du droit, nous ne pouvons pas lever les servitudes et déclarer l'intérêt public sur un périmètre de construction qui vise à permettre la construction de logements de luxe. D'autant plus que toutes les autres constructions sont réalisables et font partie de ce que la Ville de Genève appelle les 47% de logements sociaux.

Sur le fond de cette affaire. Chacun sait que dans notre ville, quand un projet est mal ficelé, quand un plan localisé de quartier ne recueille pas l'adhésion des acteurs de notre République, il ne se fait pas. Ce projet est un mauvais projet, toute la commission l'a reconnu.

Ce projet a été constitué dans les années 90, même avant. Le prédécesseur de M. Moutinot l'a remodelé et densifié à tel point qu'aujourd'hui un remembrement foncier serait nécessaire pour qu'une chatte y retrouve ses petits. On nous demande de lever des servitudes croisées avec un tableau dont je vous passe les détails, car cela serait assez fastidieux. Une collègue qui avait suivi ce dossier au Conseil municipal a affirmé que cette urbanisation de la Roseraie était un mauvais projet, et personne ne l'a contredite en prétendant que c'était un très bon projet remportant l'adhésion de l'ensemble des acteurs urbains. On ne peut malheureusement - et peut-être heureusement - faire le bonheur des gens contre leur gré.

Il y a le problème des servitudes, celui des constructions qui se superposent sur les propriétés des uns et des autres, des PLQ modifiés et une densification qui n'est pas outrancière, mais un peu trop élevée. Nous avons intérêt à réétudier ce problème de manière exhaustive, car un problème juridique se posera dès l'adoption de cette levée de servitudes et la décision de notre Grand Conseil, puisque les opposants - ils sont nombreux - vont se saisir de cette affaire et faire valoir devant le Tribunal fédéral le fait que notre parlement utiliserait la clause d'utilité publique contrairement à l'idée fondamentale de la loi Geromini. Contrairement au principe de cette loi, on est en train d'ouvrir la porte à la construction de logements de luxe, douze appartements qui prendront place sur un petit bout de ce plan localisé de quartier.

Mme Michèle Künzler (Ve). C'est une histoire typiquement genevoise. Il est vrai que ce PLQ - ou les divers plans qui se sont succédé - est en route depuis une trentaine d'années. Finalement, on n'a encore rien construit. On a réussi à détruire une villa.

En fait, il y a un plan de site, une protection du patrimoine, et le vrai problème est qu'on a fait voter un PLQ par la Ville et qu'entre-temps - à l'époque de M. Joye - on a modifié de manière extrêmement importante le PLQ, après le passage au Municipal. On a construit des immeubles beaucoup plus grands qui débordaient sur les autres parcelles, d'où le problème qui surgit maintenant.

Avant, chaque immeuble était sur sa parcelle. Maintenant, les immeubles se chevauchent au milieu des parcelles. Le problème actuel est qu'on demande la levée des servitudes mais c'est un mauvais projet et il le restera. Ces servitudes ne protègent rien, elles ne protègent pas la vue, elles servent seulement à enquiquiner les voisins.

Que l'on construise des logements de luxe ou non, il faudra bien lever ces servitudes car on pourra bientôt construire là-bas. Et s'il y a quelques logements de luxe, ma foi, ce n'est pas grave. Vous dénoncez 12 logements de luxe, mais 67 logements HBM sont à proximité. Et si des personnes veulent faire recours, tant mieux, cela ajoutera un épisode de plus à cette saga qui pourra servir à l'histoire de la construction et de l'architecture à Genève. Sur trente ans, on aura eu tous les épisodes possibles...

Mme Loly Bolay (S). Le parti socialiste votera ce projet de loi. Mais tout d'abord, j'aimerais dire trois choses à M. Pagani. Vous faites une lecture de ce projet de loi qui n'est pas du tout la nôtre. Dire qu'on était tous d'accord avec vous en commission, c'est faux. La deuxième chose est que ce ne sont pas du tout des servitudes croisées. Troisièmement, la loi Geromini n'est pas du tout violée, elle est parfaitement respectée.

Le parti socialiste soutient ce projet de loi pour trois raisons. La première est que ce projet de loi permettra de lever des servitudes. La deuxième est que ce projet de loi permettra la construction de 60% de logements sociaux - on connaît la crise actuelle et il faut trouver des solutions. La dernière est qu'il vrai que l'on doit construire des logements en PPE; à la commission du logement, nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut de la mixité afin d'éviter les ghettos. Voilà un projet dans lequel on respecte une loi - qui demande 60% de logements sociaux - avec la PPE.

Ce projet de loi est toute une histoire de servitudes et de plan localisé de quartier. Petit historique. La Ville de Genève est d'accord de lever les servitudes concernant la parcelle de la fondation Camille-Martin qui veut construire 60% de logements sociaux. Par contre, elle n'est pas d'accord de lever les servitudes concernant les propriétés privées, qui à leur tour ne sont pas d'accord de lever les servitudes de la fondation Camille-Martin. Mesdames et Messieurs, nous sommes dans une crise du logement sans précédent, cela fait depuis 1998 que cela dure. Arrêtons ce cirque, prenons nos responsabilités et votons ce projet de loi, je vous y encourage.

M. Jacques Baud (UDC). Servitudes croisées... cela fait quinze ans que cela dure, cela fait quinze ans que pour deux personnes, deux propriétaires qui refusent de s'acheter et de se vendre ces servitudes croisées, on bloque la construction de trois immeubles ! Quand on sait le manque de logements ! C'est inadmissible ! Je ne vous donnerai pas le nom des propriétaires car je n'en ai pas le droit. Mais tout de même, je les connais et je n'en pense pas moins.

Levons ces servitudes, allons de l'avant, surtout qu'au moins un des ces immeubles comportera des logements sociaux. Votez oui. Nous, on y va !

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente

M. Michel Ducret (R). J'aimerais rappeler que ce PLQ est le même depuis des années, ce sont des broutilles qui différencient les variantes qui nous été présentées et on se bat pour des peccadilles. C'est finalement au nom d'une fierté de matamores à la petite semaine que l'on a encore ce débat ce soir, et c'est à peine acceptable étant donné les problèmes de logement actuels.

L'essentiel des projets de constructions de logements prévues dans ce plan localisé de quartier de la Roseraie provient de fondations qui veulent faire des logements sociaux. Et il y a effectivement quelques logements privés. J'aimerais demander à tous ceux que le fait qu'il y ait quelques logements à vendre peut offusquer, si l'on ne fait pas ces logements en ville de Genève, quelles en seront les conséquences ? Il y a certain nombre de gens dans notre canton qui - qu'on le veuille ou non - souhaitent acquérir un logement plutôt que de gaspiller leur argent en payant un loyer chaque mois à fonds perdu. Cela peut se comprendre parfaitement.

Ce qui se passe est que si on ne leur offre pas la possibilité d'acheter des logements en ville, ils vont acheter des villas qui mitent le territoire genevois, comme le territoire vaudois ou le territoire français voisin. Ces villas mitent notre territoire régional. Et à tout cela s'ajoute le cortège inévitable des problèmes des déplacements pendulaires qui ne font qu'enfler.

Ce n'est pas ainsi, Mesdames et Messieurs, que l'on fait un bon aménagement du territoire. De plus, il faut admettre - Mme Bolay l'a relevé - que la mixité est une garantie d'éviter de créer des ghettos sociaux sur notre territoire. Croyez-moi, c'est important. A Genève, on a réussi à éviter le plus possible ce genre de problèmes, et il faut continuer dans cette direction.

Toutes ces considérations pour dire qu'il faut cesser de se battre pour des broutilles et qu'il faut aller de l'avant avec ce genre de projet. Il n'y a que trop longtemps que cela dure et je vous prie, Mesdames et Messieurs, de faire comme le groupe radical et d'accepter le rapport de majorité.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je trouve assez étonnant à quel point on peut détourner la réalité pour expliquer ce que l'on a envie de dire sans forcément argumenter. S'il en est un qui, aujourd'hui et dans le passé, défend la construction de logements sociaux et l'urbanisation de notre ville, dans la mesure où cela correspond à un intérêt légitime de la population dans sa majorité, c'est bien votre serviteur.

Cela étant, nous avons affaire à une sorte de retournement de situation. Sous couvert de construire des logements sociaux, chacun agite l'épouvantail de la pénurie, crie qu'il y a urgence à construire ces logements sociaux et se dit empêché de construire... Mais la réalité, Mesdames et Messieurs, est toute autre.

Aujourd'hui, la fondation Camille-Martin est une fondation qui veut construire en HBM et elle peut le faire sans problème. C'est la réalité. Sauf qu'il existe un propriétaire - je ne veux pas le nommer, mais il fait partie de vos milieux de droite - qui a acquis cette parcelle. Il veut absolument construire ces douze logements en PPE, et j'imagine qu'il les vendra plus d'un million par appartement. Et il s'oppose aux autorisations de construire des logements HBM. Vous êtes en train de défendre ce propriétaire et ses intérêts contre les intérêts de la majorité qui pourrait voir des logements construits très rapidement. Ce propriétaire privé veut préserver ses intérêts et empêche les autres de construire en faisant - notamment - des recours contre les autorisations de construire. Oui, Monsieur Koechlin, vous avez beau opiner du chef, comme l'on dit dans ce parlement, toujours est-il que c'est la réalité. Mesdames et Messieurs, la Ville de Genève a démontré à la commission de l'aménagement que la proportion de logements sociaux sur cette parcelle était de 54,7% et non pas de 60%. C'est la réalité, c'est objectif.

Donc, si vous voulez encourager ce propriétaire dans ses perpétuelles oppositions - comme les gens de vos milieux le font - continuez sur ce terrain. Vous ne faites qu'empirer les choses, car en lui donnant du grain à moudre, vous en donnez aussi à tous les opposants qui avanceront que la loi Geromini n'est pas respectée et que la clause d'utilité publique ne peut pas être mise en oeuvre. Ils iront jusqu'au Tribunal fédéral pour faire valoir ces droits et aucune construction de logements sociaux ne sera possible durant cette procédure.

Voilà, Mesdames et Messieurs, vous ouvrez une nouvelle voie juridique dans ce conflit qui permettra à la SPG - pour ne pas la nommer - de poursuivre son combat juridique pour imposer en ville de Genève des appartements qui valent plus de 1 million. Et je suis encore bon prince avec ce chiffre; ces appartements seront vraisemblablement vendus à 1,5 million et plus encore. Vous dites que c'est très bien, M. Ducret dit qu'il faut que notre population puisse acheter des appartements en ville, mais quelle population peut aujourd'hui s'acheter de tels appartements ? Je suis favorable à ce que la majorité de la population décide librement, mais la liberté ce n'est pas cela, Monsieur Ducret. La liberté est de pouvoir acheter des objets au niveau de son revenu, mais acheter un appartement en ville de Genève coûte aujourd'hui 1,5 million, et vous le savez. Et quels citoyens ont le revenu pour acheter des appartements en ville à 1,5 million ? Pas beaucoup, cela ne correspond même pas au revenu de la classe moyenne.

M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Une fois de plus, notre excellent collègue M. Pagani, rapporteur de minorité, démontre qu'il confond polémique et politique. Il se complaît dans la polémique; alors je le laisse à ses déclarations. Il dit n'avoir jamais prétendu qu'il y avait une proportion inférieure à 60% de logements sociaux - c'est le titre de son rapport de minorité - et il commence son intervention en niant avoir prétendu cela.

Ensuite, j'invite cette assemblée à bien regarder la page 13 du rapport. Vous verrez exactement les parcelles qui sont grevées de servitudes de non-bâtir et sur lesquelles il est impossible de construire actuellement. Or, la construction de 36 logements sociaux par la fondation HBM Camille-Martin est prévue sur ces parcelles. La parcelle qui se trouve en haut de la page - qui est aussi grevée - appartient à l'Etat de Genève et il est question d'y construire 10 logements à caractère social. Si vous additionnez, cela donne 46 logements sociaux dont la construction est entravée par l'existence de ces servitudes.

Et entre ces constructions, il y a un immeuble appartenant aux Barbier-Mueller qui permet la construction de 12 logements. En additionnant la parcelle des Massey qui se trouve tout en haut de la page, cela fait 5 logements supplémentaires prévus en PPE.

Si on fait le compte, il y a 46 logements à caractère social contre 17 en PPE. Ce n'est pas du tout la proportion affirmée par le rapporteur de minorité. Si vous établissez la proportion, ces 46 logements sur 63 représentent 73%; c'est largement au-dessus de ce que requiert la loi Geromini. Voilà pourquoi je vous demande de voter le rapport de majorité et de cesser de polémiquer.

La présidente. Nous allons procéder au vote d'entrée en matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 60 oui contre 7 non et 2 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement à l'alinéa 1, vous le trouverez à la dernière page du rapport. Je le mets aux voix.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 6 oui.

La présidente. Monsieur le rapporteur de minorité, voulez-vous expliquer votre deuxième amendement à l'alinéa 2 ?

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Mon amendement consiste à respecter à la lettre la loi Geromini. Par conséquent, le Conseil d'Etat peut déclarer l'expropriation des servitudes qui empêchent la réalisation des bâtiments à caractère social prévus sur le plan.

C'est une évidence - comme dirait M. Koechlin - mais c'est mieux de le mettre, car, à mon avis, nous dénaturons la loi Geromini. Nous ne la respectons pas en permettant à un propriétaire privé d'utiliser cette loi Geromini pour ses propres intérêts privés qui n'ont rien à voir avec le bien commun.

La présidente. Je mets aux voix l'amendement de l'alinéa 2 de l'article unique.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 8 oui.

Mis aux voix, l'article unique est adopté.

Troisième débat

La loi 9516 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9516 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 7 non et 1 abstention.

RD 585
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la formation initiale des enseignants primaires et secondaires

Débat

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Si j'ai demandé l'urgence sur ce point, c'est parce que nous traitons d'un projet de loi à la commission de l'enseignement supérieur portant sur le même sujet. Nous avons donc besoin de ce rapport pour fonder et étayer nos travaux. Je demande simplement le renvoi du RD 585 à la commission de l'enseignement supérieur.

M. François Thion (S). J'aimerais dire deux ou trois mots sur ce rapport, car ce n'est pas dans nos habitudes de renvoyer un rapport du Conseil d'Etat en commission, mais il s'agit de la formation des enseignants du primaire et du secondaire. Il y a une modification due à la mise en oeuvre de la déclaration de Bologne, et ce rapport arrive à point nommé, car la commission de l'enseignement supérieur traite d'un projet de formation des enseignants du primaire qui a été déposé par l'Entente et qui est un mauvais projet.

Si ce projet était mis en application, il altérerait la qualité de la formation des enseignants du primaire, car on passerait de quatre ans d'études à l'université à un système de Bachelor d'une durée de trois ans.

Le parti socialiste soutient la qualité de formation des enseignants et soutient la qualité de l'école à Genève, il s'oppose donc au projet de l'Entente sur la formation des enseignants du primaire. C'est pour cela que nous avons besoin de ce rapport du Conseil d'Etat sur la formation des enseignants et que nous demandons qu'il soit renvoyé à la commission.

Mme Janine Hagmann (L). C'est un débat important qui doit avoir lieu en commission. Les commissaires de la commission de l'enseignement supérieur ont décidé d'un commun accord de ne pas faire de débat ce soir et de simplement renvoyer ce projet. Cela suffit. Il faut respecter ce que l'on a décidé et que tout le monde joue le jeu. Nous acceptons que ce rapport soit étudié à la commission de l'enseignement supérieur. Ce n'est ni l'endroit ni le moment - surtout ce soir - de débattre de ce sujet.

La présidente. Je mets aux voix le renvoi de ce rapport à la commission de l'enseignement supérieur.

Mis aux voix, le renvoi du rapport divers 585 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 60 oui et 1 abstention.

PL 9041-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant l'aliénation d'un immeuble propriété de l'Etat de Genève, sis sur la commune de Veyrier (ajourné le 28 avril 2005)
Rapport de M. Bernard Lescaze (R)

Premier débat

La présidente. Monsieur Hugues Hiltpold, vous remplacez M. le rapporteur, Bernard Lescaze... Monsieur Rémy Pagani, vous avez la parole !

M. Rémy Pagani (AdG). Je me suis exprimé ici à plusieurs reprises - comme d'autres députés de l'Alliance de gauche ou d'autres groupes - contre la politique d'aliénation de biens de l'Etat. Non pas parce que je pense que l'Etat doit accumuler des biens, mais parce qu'il me semble qu'ils pourraient être utilisés à meilleur escient, par exemple pour permettre de procéder à des échanges parcellaires - et non contre des espèces sonnantes et trébuchantes.

En effet, bien souvent des propriétaires qui «bloquent», entre guillemets, certaines constructions, notamment des logements sociaux, seraient tout à fait d'accord de déménager et d'aller habiter ailleurs, dans le canton ou même en Suisse, si on leur trouvait des logements adéquats, spécialement des villas. Il est par exemple question, à la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, de vendre des terrains et des immeubles au Tessin.

Je trouve - nous trouvons - assez stupéfiant que l'Etat se défasse de biens, comme souvent l'ont fait des responsables de département pour remplir les caisses, alors que ces biens permettraient de procéder à des échanges. Ces biens - terrains ou immeubles - seraient bien évidemment mieux utilisés s'ils servaient à des échanges, par exemple en mettant un logement à la disposition d'un propriétaire de terrain. Cela nous permettrait de débloquer de nombreux - et j'insiste sur le terme «nombreux» - projets immobiliers, qu'il s'agisse de fondations HBM ou d'autres promotions. Mais malheureusement, une fois de plus, toute une série de biens de l'Etat vont être dilapidés - si j'ose dire - mis en vente et bien souvent rachetés par des promoteurs qui les réhabiliteront de manière sommaire et qui feront des bénéfices d'autant plus importants.

Je vous encourage, Mesdames et Messieurs, à mettre un terme à cette politique qui n'apporte rien de bon - si ce n'est de l'argent immédiatement - et qui ne résout aucunement la crise du logement très importante qui sévit dans notre canton.

M. Jean Spielmann (AdG). Je ne reviendrai pas sur le fond du problème des aliénations et sur la difficulté pour l'Etat de faire la liste exhaustive des villas qui pourraient servir de monnaie d'échange. Ni sur la réalisation de biens d'utilité publique: je pense aux écoles, mais aussi aux constructions nécessaires à une collectivité. Je trouve dommage que l'Etat vende ses parcelles. C'est ma première observation.

Deuxième observation. C'est la légèreté avec laquelle ces projets sont présentés à la commission... Dans le cas particulier, une deuxième expertise a été demandée; à ma connaissance, elle a été faite, mais la commission n'en connaît pas le résultat. Il y avait un certain flou dans ce dossier par rapport à des promesses de vendre faites à la personne liée au propriétaire et qui l'avait aidé à reconstruire et à aménager cette parcelle.

Partant de là, ce dossier n'est, à mon avis, pas complet. La deuxième expertise mériterait d'être connue par le Grand Conseil, avant de prendre une décision d'aliénation.

De plus, ces dossiers d'aliénation, au nombre de six, ont été proposés en même temps à la commission, et on ne sait pas très bien pourquoi celui-ci devient tout d'un coup urgent... Mais peut-être veut-on cacher des problèmes soulevés par la deuxième expertise. Pour ma part, je trouve dommage de nous précipiter et de voter cette loi ce soir, sans que les uns et les autres soient au courant des tenants et aboutissants de ce projet et sans la présence du conseiller d'Etat responsable de ces dossiers.

En outre, je dois dire ici que, dans le cadre des dossiers d'aliénation présentés à la commission, on a pu constater une très grande disparité tant entre les loyers que concernant la gestion et l'entretien des différents bâtiments propriétés de l'Etat. On a ainsi remarqué que certains payaient des loyers très élevés pour de toutes petites parcelles et que d'autres bénéficiaient carrément de rentes de situation - une situation tout à fait privilégiée - et que ces terrains allaient être bradés, sans qu'ils soient soumis au plus offrant, en donnant la priorité à la personne qui avait déjà bénéficié, pendant des années, d'un loyer pour le moins bon marché. Pour justifier ces ventes, on nous a dit que ces biens - bâtiment, villa ou terrain - (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)...étaient délabrés et dans une situation lamentable. Mais on peut se demander comment il est possible qu'un immeuble propriété de l'Etat soit délabré, puisqu'on sait que c'est le même département qui gère le patrimoine bâti de l'Etat... Il est par conséquent assez difficile d'admettre que le département concerné laisse les biens immobiliers de l'Etat se délabrer et qu'il nous dise ensuite qu'il faut les brader parce qu'ils ne valent plus rien !

Il faut savoir quelle politique on veut mener. Il me semble qu'il faut entretenir correctement les bâtiments et avoir une gestion de location cohérente sur l'ensemble des biens de l'Etat. Et, si on décide de les aliéner, qu'on nous présente des arguments acceptables en commission ! En l'occurrence, ce n'est pas le projet le plus mauvais parmi tous ceux qui ont été présentés dans la même après-midi à la commission des finances, mais je trouve personnellement que cette proposition en particulier et la gestion en général méritent un débat. Les choses ne peuvent pas continuer à fonctionner de cette manière ! Nous aurons l'occasion d'y revenir à propos de trois autres projets pour lesquels j'ai fait un rapport de minorité. Je le répète, je ne comprends vraiment pas pourquoi tout d'un coup ce projet serait urgent et pas les autres...

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits: Mme Michèle Künzler, M. Christian Grobet, M. le rapporteur et Mme Martine Brunschwig Graf. Madame Michèle Künzler, vous avez la parole.

Mme Michèle Künzler (Ve). Nous serons favorables à cette vente bien que ce que M. Spielmann a dit soit tout à fait exact... Il faut absolument avoir une meilleure gestion des biens immobiliers !

C'est vrai, les loyers de certains de ces bâtiments sont tout à fait dérisoires. Des villas à 800 F avec 4000 m2 de terrain, c'est franchement indécent ! Surtout que ces biens ne sont pas destinés au logement social: entendons-nous ! Ils sont destinés à des personnes qui ont largement les moyens de payer un loyer. C'est inadmissible !

Deuxième chose. Je pense que les procédures de vente devraient être revues. Il est clair que l'on peut favoriser le locataire en place, mais il faudrait - comme c'est le cas pour la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe - mettre la vente sur le marché et l'octroyer au plus offrant. Contrairement à votre habitude, je vois que vous ne vous battez pas pour obtenir les meilleures ventes s'agissant des biens immobiliers de l'Etat ! Ce n'est pas normal que les choses se passent de cette manière. Finalement, certaines personnes, qui ont déjà été largement avantagées par une location - ce qui leur a permis de mettre de l'argent de côté - peuvent ensuite racheter le bien qu'elles louaient à une valeur en dessous du marché, tout cela parce que ce bien a été mal évalué sous prétexte qu'il a été mal entretenu, qu'il ne vaut plus rien et qu'il faut le vendre. Il y a un réel problème à ce niveau-là.

Pour ma part, j'aimerais bien que la commission de contrôle de gestion se saisisse de ce problème des locations, parce que, effectivement, par le biais de la commission des finances, les loyers pratiqués ont pu être mis à jour à l'occasion d'une dizaine de ventes... Personnellement, j'en connais d'autres, et je pense qu'il y a véritablement un problème à ce niveau dont nous devons nous saisir.

M. Christian Grobet (AdG). Je voulais intervenir dans le même sens que Mme Künzler. Je dois dire que je suis assez effaré de la manière dont cet objet immobilier est mis en vente.

En effet, notre Grand Conseil est saisi régulièrement de projets de lois portant sur la vente d'objets immobiliers dépendant de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe. La fondation estime la valeur de l'objet. Le Conseil d'Etat saisit le Grand Conseil d'un projet de loi, et c'est seulement au moment où il y a un acquéreur que, finalement, le Grand Conseil vote le montant du prix de vente...

Dans le cas qui nous occupe, on propose tout simplement de fixer un prix minimum et de laisser le soin à l'administration de procéder à la vente ! J'ai le regret de dire que, jusqu'à présent, un certain nombre de ces projets de lois ont fait l'objet d'un manque de professionnalisme assez inquiétant de la part des services de l'Etat qui se sont occupés de ces ventes immobilières, tout particulièrement - tout particulièrement ! - le premier projet de loi portant sur la vente de cet objet. Je rappellerai - je n'ai plus le chiffre exact en tête - que le prix mentionné dans le premier projet de loi était ridicule ! Et l'expertise totalement erronée ! Il s'agit d'une expertise de complaisance, mais, à l'inverse de celles faites à l'époque de la Banque cantonale de Genève qui faisait des expertises beaucoup trop élevées, celle-ci, curieusement, proposait un prix dérisoire.

Je suis personnellement le premier à souhaiter que le prix des terrains soit plus bas, mais, la réalité, c'est qu'aujourd'hui le marché du terrain en zone villas s'est envolé. Il n'y a pas si longtemps le prix était de 500 F le m2... Eh bien, je peux vous dire qu'aujourd'hui, à Veyrier, vous ne trouvez pas de terrain en zone villas en dessous de 600 F le m2 et probablement plus ! Faites le calcul, Mesdames et Messieurs les députés: 1552 m2 de terrain à 600 F le m2, cela fait plus de 900 000 F ! Presque un million rien que pour le terrain ! Et je précise qu'il est certainement possible de réaliser trois villas contiguës sur cette parcelle. Il y a quelque chose qui ne va pas du tout ! Lorsque j'étais intervenu - vous devez vous en souvenir, Madame Brunschwig Graf, ou était-ce M. Moutinot, je ne me souviens plus ? - tout le monde avait reconnu que l'expertise était totalement fausse. Et ce n'est pas par hasard... (Mme Brunschwig Graf rit.)Vous rigolez, mais...

Mme Martine Brunschwig Graf. Ce n'est pas pour cela que je rigole ! (Rires.)

M. Christian Grobet. Je dis simplement que le projet de loi a été renvoyé au Conseil d'Etat, parce que tout le monde dans cette salle s'accordait à dire que l'expertise était totalement fausse. J'avais demandé, au moment du renvoi, qu'il soit procédé à une deuxième expertise. Je ne sais pas si elle a eu lieu ou pas, mais s'il y en a eu une deuxième, elle aurait dû être annexée - excusez-moi de le dire ! - à ce rapport, comme cela a été le cas pour la première expertise ! Car, en voyant la première expertise, on s'est rendu compte que quelque chose n'allait pas. S'il y a eu une deuxième expertise, je ne vois pas comment on peut arriver au chiffre de 700 000 F ! Ce n'est pas possible ! Entre parenthèses, j'aimerais bien qu'une parcelle de ce genre avec une villa ne vaille que 700 000 F, mais ce n'est pas possible aujourd'hui !

Alors de deux choses l'une: ou l'Etat annonce qu'il brade ses biens, qu'il fait de la philanthropie - mais pour quel acquéreur ? Ou bien, tout simplement, on vend les terrains au prix du marché ! Mais, en l'occurrence, ce n'est pas le prix du marché ! J'ai eu l'occasion d'en parler à un ou deux membres de la commission des finances. Madame la présidente du Conseil d'Etat et du département des finances, vous qui êtes une personne très rigoureuse et très méthodique... (Réactions.)Ecoutez, je ne suis pas toujours d'accord avec vous, mais il faut au moins reconnaître vos qualités de gestionnaire ! (Commentaires.)Et vous savez comme moi - ce n'est, du reste, pas votre département qui s'occupe de cela - qu'il n'y a pas de procédure concernant la vente de ces objets ! Vous savez, par contre - ce n'est pas parce que je fais partie du Conseil de fondation que je le dis - que, pour la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, nous avons mis sur pied une procédure d'estimation, de mise sur le marché. N'importe qui peut faire une proposition, et l'offre reste trois semaines sur le site pour être sûrs d'avoir le meilleur prix. Et, en cas de propositions équivalentes, on procède à une vente aux enchères.

J'ose espérer qu'il en sera de même ! Comment cette parcelle sera-t-elle mise en vente ? Publiquement, pour être sûrs d'obtenir le meilleur prix ? Ou de gré à gré avec une personne qu'on ne connaît pas et sans que le Grand Conseil puisse exercer le moindre contrôle ?

Quand on a introduit l'article 80A dans la constitution, c'était bien pour que le Grand Conseil contrôle que la vente se fasse régulièrement. C'est ainsi que cela s'est passé pour tous les projets de lois du Conseil de fondation. Or, avec ce projet, on donne carte blanche au Conseil d'Etat pour vendre ce bien au minimum 700 000 F. Le Conseil d'Etat pourrait donc le vendre à ce prix...

La présidente. Monsieur le député, cela fait six minutes que vous parlez !

M. Christian Grobet. ...à quelqu'un que l'on ne connaît pas ! Cela ne va pas !

La présidente. Monsieur le député: six minutes !

M. Christian Grobet. J'en ai pour trente secondes, Madame la présidente !

Pour ne rien vous cacher, nous en avons discuté au Conseil de fondation, parce que certains de mes collègues étaient étonnés de la manière dont ce bien était mis en vente, par rapport à ce que fait la fondation. Du reste, un éminent membre de ce Conseil a dit que si le Conseil d'Etat n'était pas en mesure de s'occuper de la procédure de vente, on pourrait peut-être lui rendre ce petit service... Ce n'est pas qu'on cherche du travail... (Commentaires.)Je dis simplement qu'il n'est pas possible de vendre des objets immobiliers de cette manière !

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur ad interim. Je vais tout d'abord resituer ce projet de loi dans son contexte. Il s'agit de régler une succession en déshérence.

Il est vrai, Monsieur Grobet, que, lors du débat de préconsultation sur ce projet en février 2004 - j'ai sorti le Mémorial - vous aviez tenu les mêmes propos que ce soir, qui sont tout à fait avérés pour ce qui est de l'expertise qui datait de 1998 et qui était parfaitement incomplète. Beaucoup de monde dans cette enceinte s'était accordé à dire que cette expertise avait des valeurs qui n'étaient pas correctes par rapport au marché actuel. C'est la raison pour laquelle, lorsque le projet de loi a été renvoyé à la commission des finances, une nouvelle expertise a été faite, comme le mentionne le rapport, en mai 2004, laquelle conclut à une valeur de ce bien de 710 000 F. Cela pour le point concernant l'expertise.

J'en viens à l'ajournement. Ce projet de loi a été ajourné suite au courrier d'un acquéreur potentiel qui avait formulé un certain nombre de doléances, doléances que la commission des finances n'a pas prises en considération, parce qu'elles étaient parfaitement inacceptables.

C'est pourquoi nous conservons ce projet de loi tel qu'il est libellé et qui stipule - je vous lis l'article en question, Monsieur Grobet: «L'aliénation par l'Etat de Genève de la parcelle no 3342, feuille 47, de la commune de Veyrier, inscrite au patrimoine financier de l'Etat, est autorisée au prix minimum de 700 000 F.» Mais cela n'empêche pas de le vendre plus cher !

Pour ce qui est de la mise en vente, le Conseil d'Etat va vous donner des explications.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. J'entends bien les différentes interventions qui ont été faites...

On peut se retrouver sur un point: si un immeuble doit être vendu, il doit l'être au meilleur prix. C'est le contenu de vos interventions, y compris par rapport aux procédures à suivre.

En l'occurrence, je note deux choses. Tout d'abord, ce rapport date du 5 octobre 2004 et nous sommes en juin 2005. Une demande d'autorisation d'aliénation de cet immeuble, ou plutôt du bien-fonds, est faite.

Je dois le dire à nouveau: en lisant ce rapport, j'avoue que j'ai un peu de peine à me retrouver dans ce que serait le «juste prix», compte tenu de la volonté du défunt, du fait qu'il s'agit d'un bien en déshérence et qu'il y a apparemment un voisin impliqué dans toute cette histoire... En définitive, la commission a donc pris la précaution de fixer un prix minimum.

Si vous êtes d'accord de voter ce projet de loi - ce que je vous invite à faire, compte tenu du délai qui s'est écoulé et du fait que le bien-fonds dont il est question ne me semble pas être un lieu tout à fait stratégique pour l'Etat de Genève - je m'engage à répondre à votre double préoccupation. Tout d'abord avoir des procédures efficaces, transparentes. Et je transmettrai cet élément au Conseil d'Etat de manière que le débat à ce sujet soit meilleur. Comme l'a évoqué Mme Künzler tout à l'heure - et c'est un sujet que beaucoup de députés ont déjà abordé à la commission des finances ou dans ce Grand Conseil - votre deuxième souci concerne la pratique en matière de location et de prix, même si cela ne concerne pas directement ce projet. Ces deux éléments sont légitimes: aussi bien l'efficacité des procédures que la politique de l'Etat sur les loyers pratiqués sur les biens-fonds qu'il possède.

Je vous proposerai donc de prendre en compte ces deux éléments, de les traiter - y compris dans le cadre du budget - le cas échéant de voir avec la commission des finances quels types de dispositifs on peut appliquer et de voter ce projet de loi, parce que, franchement, depuis le mois d'octobre, je doute que le prix puisse augmenter indéfiniment. Je formule le voeu que cette affaire soit liquidée assez rapidement, tout en tirant les leçons de cette affaire. Et je le dis ici clairement: si la deuxième expertise estime ce bien à plus de 700 000 F, il va de soi que c'est la deuxième expertise qui doit être prise en considération.

C'est dans ce sens que je me porte garante de transmettre ces éléments au département concerné et de veiller à ce que ce soit respecté. Je vous rappelle tout de même que nous sommes ici dans le cadre d'une demande d'autorisation d'aliénation d'un bien et que nous ne sommes pas en train d'entériner son prix de vente. Je prends donc volontiers, pour le compte du Conseil d'Etat, toutes les remarques qui ont été faites.

La présidente. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 47 oui contre 13 non.

La loi 9041 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9041 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 40 oui contre 23 non.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, comme nous avons travaillé assez tard hier soir, je vous libère avec une demi-heure d'avance. (Exclamations. Applaudissements.)

Bonne soirée, et au 23 juin. Au 17 juin pour ceux qui participent à la soirée avec les représentants de la communauté internationale.

La séance est levée à 22h35.