Séance du jeudi 28 avril 2005 à 14h
55e législature - 4e année - 7e session - 41e séance

M 1586
Proposition de motion de Mme et MM. Gilbert Catelain, Jacques Pagan, Jacques Baud, Yvan Galeotto, Robert Iselin, Georges Letellier, Claude Marcet, André Reymond, Caroline Bartl demandant la réalisation de la 2e étape de l'Hôtel de Police à la Queue d'Arve

Débat

M. Gilbert Catelain (UDC). Lors des débats, d'une part, sur la loi sur la police et, d'autre part, sur le G8, ainsi que dans le cadre des visites que la commission a effectuées dans les différents locaux, notamment l'Hôtel de police au boulevard Carl-Vogt, nous nous sommes rendu compte que les conditions de travail du personnel de la police judiciaire étaient très mauvaises et que les conditions minimales de sécurité n'étaient, de loin, pas remplies. Le projet de loi, voté en 1985, qui prévoyait de construire l'Hôtel de police en deux étapes n'a jamais abouti. Seule la première étape de l'Hôtel de police a été construite à la rue de la Gravière. La deuxième étape n'a jamais vu le jour, pour différents motifs que nous ne connaissons pas avec exactitude.

Il y avait eu, à l'époque, un crédit de 72 millions de francs pour la première partie de ce projet. La ligne budgétaire pour la deuxième étape, à savoir un crédit de 60 millions de francs, a toujours été inscrite dans le budget du département de justice et police et sécurité, mais ce projet de budget n'a jamais été transformé ou utilisé pour la construction de cette deuxième étape.

On a vu ces dernières années, et notamment encore au début de l'an dernier, les problèmes que pose la vétusté de l'Hôtel de police situé au boulevard Carl-Vogt, dans des locaux totalement désuets et inadaptés. Plusieurs accidents se sont produits, notamment lorsque des personnes interpellées ont pris la fuite et se sont jetées par la fenêtre avec les conséquences que l'on connaît. L'Etat paie un loyer élevé, à Carl-Vogt. Par ailleurs, depuis vingt ans, on aurait probablement pu amortir un montant non négligeable de cette nouvelle étape.

Il semblerait qu'il ne soit pas possible, pour un groupe, de déposer un projet de loi. Nous l'avions fait et nous l'avons retiré. A la demande du département, nous avons donc rédigé cette motion qui demande de présenter au Grand Conseil un projet de loi pour permettre la réalisation de cette deuxième étape, puisque les terrains sont à disposition, rue de la Gravière; de renouveler, dans le cadre de ce projet de loi, les crédits qui étaient adoptés par le Grand Conseil il y a vingt ans; de déclarer ces travaux d'intérêt public; de prévoir l'achèvement de ces travaux en 2007 au plus tard.

Vu le retard que ce dossier à pris, depuis le moment où nous avons présenté le projet de loi et la motion, il ne sera plus possible de réaliser ce projet d'ici à 2007. En outre, le problème de l'Eurofoot va s'y greffer. Il ne sera donc pas possible d'avoir un Hôtel de police prêt pour 2008 non plus, ce qui est peut-être regrettable pour une Genève internationale dont l'économie est directement liée au niveau de sa sécurité - la fréquentation de Genève, au niveau touristique, n'est pas seulement due à l'aura de Genève mais aussi à un niveau de sécurité qu'apporte le canton. Au-delà de 2008, cependant, il sera à notre avis indispensable, notamment par rapport aux effectifs qui ont été votés dans le cadre de la loi sur la police, de prévoir de nouveaux locaux. Du seul point de vue des inspecteurs de police, Carl-Vogt ne permettra plus d'absorber l'ensemble des collaborateurs prévus dans la loi si d'aventure le département parvenait à les recruter.

Je vous propose donc de soutenir cette motion, ce qui ne sera que justice pour cette institution qui, depuis vingt ans maintenant, attend de bénéficier d'une infrastructure digne de ce nom. Je pense que, dans le cadre du budget de l'Etat, au niveau des investissements, nous pouvons accorder un crédit de 60 ou 70 millions de francs pour achever enfin cet Hôtel de police. Nous proposons que cette motion soit renvoyée en commission, afin que le débat puisse avoir lieu.

M. Hugues Hiltpold (R). Je remercie le groupe UDC d'avoir déposé cette motion parce qu'à l'époque elle avait déposé un projet de loi qui posait un certain nombre de problèmes dans le libellé. Cette motion est bien plus pertinente, à ce niveau.

Sur le fond, la réalisation de la deuxième étape de l'Hôtel de police est nécessaire, parce qu'il faut savoir que le nouvel Hôtel de police, tel qu'il existe maintenant, devait être agrandi, à terme, et qu'une partie des effectifs de police travaillent actuellement dans l'ancien Hôtel de police, dans des conditions de travail déplorables. Nous l'avons relevé dans le cadre de nos travaux parlementaires en commission des visiteurs officiels, nous l'avons rappelé à maintes reprises, en disant qu'il fallait rapidement réaliser l'extension du nouvel Hôtel de police.

S'agissant de la forme de cette motion, on ne peut pas souscrire au libellé tel qu'il est indiqué. D'abord parce que nous ne connaissons pas encore les montants. Ces montants ressortent des débats ayant eu lieu en 1998. Le libellé mériterait donc des adaptations à cet égard. Nous ne pouvons pas, dans une invite, proposer un projet de loi qui regroupe tant des investissements que du fonctionnement. Nous devons donc, il me semble, passer par la procédure habituelle: d'abord un crédit d'études, ensuite un crédit d'investissement. Il faudra donc modifier l'invite en commission.

Ensuite, l'avant-dernière invite me semble poser des problèmes: il s'agit de la date de la fin des travaux, qui est prévue pour 2007. Je crois que, même avec la meilleure volonté, on n'arrivera vraisemblablement pas à terminer les travaux à la fin de 2007.

Le groupe radical appuie bien évidemment le renvoi de cette motion à la commission des travaux de façon que l'on puisse débattre sereinement de son fond.

La présidente. Je rappelle que, mais vous l'avez très bien fait, Monsieur de député, seul un député par parti peut s'exprimer sur le renvoi à la commission des travaux de cette motion.

M. Rémy Pagani (AdG). L'essentiel a été dit sauf une chose: nous aurions largement eu le temps de payer quasiment deux fois l'immeuble si, il y a 45 ans, l'Etat avait construit l'Hôtel de police à David-Dufour. Cela est parfaitement scandaleux. Il faut mettre un terme à cette dilapidation des deniers de la République.

Nous avons été parmi les premiers à dire qu'il fallait une extension de cet Hôtel de police. Grâce à M. Grobet, la première étape de cette extension a été rapidement exécutée, pour suppléer à cette politique qui continue d'être exercée: à la rue de l'Arquebuse, à la rue du Grand-Pré et au boulevard Georges-Favon, l'Etat loue des immeubles qui lui coûtent... un saladier. Nous sommes donc tout à fait acquis à cette proposition.

Pour la forme, je relève que M. Catelain et le groupe UDC avaient déposé un projet de loi, ce qu'ils n'avaient pas le droit de faire. Ils l'ont donc retiré au profit de cette motion.

Je m'oppose au renvoi de cette motion en commission car, à mon avis, ce serait une perte de temps. Nous pourrions tout à fait renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Je vous proposerai simplement un amendement consistant à supprimer le crédit d'étude de 3,8 millions; le crédit de 60 000 000 de francs; le crédit d'équipement de 5 millions; le fait de déclarer les travaux d'intérêt public; celui de prévoir l'achèvement des travaux en 2007 au plus tard; et celui de faire rapport au Grand Conseil sur les raisons qui ont conduit le Conseil d'Etat à retarder les travaux, parce que, selon la nouvelle procédure, du moment que le Grand Conseil mandate le Conseil d'Etat par une motion, le Conseil d'Etat doit revenir avec un projet d'étude concret. A ce moment-là, la commission des travaux pourra, comme il se doit, se prononcer sur un crédit d'étude.

Il ne faut donc pas perdre six mois ou une année en renvoyant cette motion en commission, pour se déterminer sur le premier libellé et, ensuite, donner mandat au Conseil d'Etat de mettre sur pied un crédit d'étude.

Je vous propose donc, par un amendement formel que je ferai, Madame la présidente, de supprimer l'ensemble des points et de laisser le premier alinéa.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je ne vais pas revenir sur la nécessité d'agir dans le domaine des installations concernant la police judiciaire, je crois que tout a été dit. Le groupe démocrate-chrétien est parfaitement d'accord avec l'avis quasi-unanime qu'on ne peut plus laisser les policiers continuer à travailler dans les conditions qui sont les leurs et que nous connaissons.

Avant que M. Hiltpold ne prenne la parole et que nous devions nous exprimer sur le renvoi de cette motion en commission, j'étais en train de rédiger, avec ma collègue, un amendement qui allait exactement dans le sens de l'intervention de M. Pagani. Nous allons donc nous arrêter là et je vous dirai, une fois n'est pas coutume, que nous sommes d'accord avec l'avis de M. Pagani. En effet, il nous semble que nous pourrions gagner du temps, plutôt que de faire aller et revenir cette motion en commission.

Tout le monde semble d'accord pour dire que le Conseil d'Etat doit nous faire des propositions dans ce domaine. Evidemment, tous les chiffres figurant dans la motion présentée par le groupe UDC ne sont plus d'actualité, ils datent de 1998. Le crédit d'étude n'est certainement plus suffisant, le montant d'investissement est peut-être suffisant mais de toute manière les besoins de la police judiciaire ont certainement évolué entre-temps. Il faut donc réactualiser tout cela et, à l'occasion d'un projet de loi concernant le crédit d'étude, le Conseil d'Etat pourrait nous faire part de ce qu'il faudra changer et construire.

C'est pourquoi, sous réserve de sa lecture définitive, nous appuierons l'amendement de M. Pagani, car nous souhaitons éviter le renvoi en commission.

M. Roger Deneys (S). Les socialistes soutiendront l'amendement de M. Pagani. L'essentiel a été dit mais je relèverai simplement le fait que, quand même, il est paradoxal que ce soit le Grand Conseil qui doive se saisir de cet objet de cette façon, alors que nous sommes censés avoir une conseillère d'Etat qui s'occupe du DJPS et qui a tout ce qu'il faut pour déposer ce fameux crédit parce que ses services en ont besoin. C'est quand même là qu'il y a un problème: la police est-elle gouvernée ? On a une fois de plus l'impression que ce n'est pas le cas.

Nous soutiendrons le renvoi en commission mais... (L'orateur est interpellé.)Si, cela a un rapport, Monsieur le député, parce que si la police a de nouveaux locaux, on peut estimer que la cheffe du département de justice et police et sécurité se préoccupe de ses collaborateurs et vienne présenter et défendre un crédit d'étude.

Je trouve que c'est son rôle, et pas forcément celui du Grand Conseil de faire ce travail, parce que le but de cette motion est de dire, au Conseil d'Etat: «Renvoyez-nous un crédit d'étude », ce qu'il aurait pu faire tout de suite puisque c'est même voté depuis longtemps.

D'une certaine manière, la situation n'est pas admissible sur le fond mais nous soutiendrons cette demande de renvoi au Conseil d'Etat avec l'amendement de M. Pagani.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Nous sommes tous au courant du fait que les conditions de travail de la police judiciaire sont difficiles et nous sommes tous d'accord pour dire que les invites de la motion ne correspondent plus à la réalité. Nous suivrons l'amendement proposé par M. Pagani et ensuite proposé par M. Portier.

Cependant, je crois que cela ne nous dédouane pas d'une discussion sur l'opportunité de la réalisation de ces travaux maintenant. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons la demande de renvoi en commission. En outre, en regardant dans les comptes d'Etat et en observant la situation des grands travaux par centres de responsabilités, nous retrouvons les 3,8 millions. Je crois qu'il faut que nous discutions, en commission et avant le dépôt d'un projet de loi, afin de savoir quand nous voudrons réaliser cette extension. Cette motion nous donne donc l'opportunité de discuter de cela.

Nous soutiendrons donc le renvoi en commission proposé par M. Hiltpold.

M. Renaud Gautier (L). Sur le fond, je crois que tout le monde est d'accord. Je voudrais juste faire deux parallèles.

Je vois que, ici, nous parlementons sur le problème du renvoi en commission ou pas, alors que nous avons eu l'occasion de renvoyer, sans un mot, un crédit de 60 millions pour construire un nouveau cycle qui semblait enchanter tout le monde.

Dans le cas qui nous occupe ici, et contrairement à ce que disait mon vis-à-vis, il y a quand même un petit problème parce que ce crédit d'étude figure depuis fort longtemps dans le plan des investissements. C'est l'illustration d'un concept souvent évoqué par M. le conseiller d'Etat, qui est le principe du chasse-neige: quand on ne fait pas les choses, on les repousse et, à la fin, elles s'accumulent.

Ici, très objectivement, il y a plus qu'une urgence. Je mets au défi n'importe quel corps de l'Etat autre que la police de travailler dans les conditions dans lesquelles travaille la police à Carl-Vogt et d'y passer plus de 24 heures. Je connais certains départements, dont le représentant est actuellement absent, qui ne tiendraient même pas 24 heures dans ce département, si on leur demandait d'y travailler.

Il y a donc objectivement une urgence à traiter ce dossier. Il ne faut pas toujours le différer. S'il est bon que nos chères têtes blondes aient les locaux qu'il faut pour leur éducation, il est aussi juste et correct que ceux qui sont les détenteurs de la force publique puissent le faire dans des conditions correctes. C'est la raison pour laquelle je soutiendrai, avec le groupe libéral, le renvoi en commission et les amendements qui sont proposés.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je suis également favorable à l'amendement, proposé par le collègue Pagani, consistant à se contenter de la première invite et à renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat, puisque tout est clair et que la justification se trouve dans le Mémorial.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il est exact que les conditions de travail de la police dans l'immeuble de Carl-Vogt ne sont pas acceptables. La construction de la deuxième étape de l'Hôtel de police est donc un projet qui doit être suivi et cela commence forcément par un crédit d'étude.

Je prends donc connaissance maintenant de l'amendement, tel qu'il est proposé par M. Pagani qui, cette fois-ci, est juste puisqu'on y parle bien d'un crédit d'étude. Une motion qui nous demande le dépôt d'un projet de loi portant crédit d'étude n'oblige pas le Conseil d'Etat à déposer ledit projet, comme cela est le cas en matière d'aménagement. Mais, dans le cas d'espèce, il va de soi que le Conseil d'Etat donnera suite à cette motion.

Pour qu'il n'y ait pas de malentendus entre nous, un crédit d'étude ne se fait pas sur un coin de table si l'on veut qu'il soit fiable et que tout soit étudié à satisfaction pour permettre de prendre une décision. Ne nous trompons donc pas sur le sens de l'expression «sans délais». J'aimerais ajouter deux remarques à ce propos.

Dans l'exposé des motifs de la motion, il est dit que le département de justice et police est le parent pauvre; je ne suis absolument pas d'accord avec cela. En ce qui concerne les investissements, je n'ai jamais été en litige, ni avec M. Ramseyer, ni avec Mme Spoerri, en ce qui concerne leurs demandes.

Aujourd'hui, avec tout ce que vous m'avez déclaré comme étant urgent et important au département de justice et police - il y a l'agrandissement de Champ-Dollon, les «articles 43», le nouvel Hôtel de police - je vous dis tout de suite que cela ne rentre pas dans le plan financier quadriennal des investissements. A un moment donné, il faudra faire des choix. Je ne parle même pas de choix comme ceux que mentionnait M. Gautier, entre école et police. Je parle de choix au sein du même département.

Je vous le dis pour qu'il n'y ait pas de malentendus, j'estime effectivement que tous ces investissements sont nécessaires, mais que l'enveloppe d'investissement va nous poser un très sérieux problème de «timing», de planning, parce que nous ne pourrons pas tout faire en même temps.

Je me réjouis de revenir devant vous, non pas sans délais mais le plus rapidement possible, avec le projet de loi valant crédit d'étude de la deuxième étape de l'Hôtel de police.

M. Rémy Pagani (AdG). Le projet de motion qui a été déposé par l'UDC se basait sur un crédit d'étude qui avait déjà été fait auparavant. Cela étant, les projets évoluent et c'est pour cela que mon amendement porte non pas sur un projet de loi mais sur un crédit d'étude, comme l'a relevé M. Portier. En effet, il me semble essentiel non seulement de réadapter le programme mais notre parlement doit aussi donner un signe fort, ce qui a été relevé par le chef du département concerné. C'est pour cela qu'il faut donner un signe fort en construisant cette deuxième étape de l'Hôtel de police. Je vous encourage donc à voter l'amendement qui vous est distribué parce qu'il préfigure d'une volonté du gouvernement de construire cette deuxième étape.

Cela étant, nous sommes nous aussi assez attentifs au fait que ces 300 millions d'investissement soient un carcan trop étroit et qu'il nous faudra en rediscuter dans les budgets à venir.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons d'abord voter l'amendement présenté par M. Pagani, M. Portier et Mme Nelly Guichard.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 60 oui et 1 abstention.

La présidente. Nous allons donc procéder à une première requête qui consistait à demander le renvoi de cette motion à la commission des travaux. Monsieur Hiltpold, vous demandez la parole.

M. Hugues Hiltpold (R). Compte tenu de l'amendement voté, je retire ma proposition de renvoi en commission.

La présidente. Vous me simplifiez la tâche. Nous allons donc voter le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, la motion 1586 ainsi amendée est adoptée par 55 oui et 8 abstentions.