Séance du jeudi 28 avril 2005 à 14h
55e législature - 4e année - 7e session - 41e séance

M 1592
Proposition de motion de Mme et MM. Georges Letellier, Caroline Bartl, Claude Marcet, Robert Iselin, Jacques Pagan, Yvan Galeotto, Gilbert Catelain invitant le Conseil d'Etat à présenter un plan d'action contre les tags et autres salissures "La propreté ça change la vie"

Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je pensais m'exprimer après les motionnaires mais je dis volontiers ce que le groupe socialiste pense de cette proposition de motion.

Cette motion est parfaitement inutile. Nous avons voté, l'année dernière, au Conseil d'Etat, une somme de cinq millions pour effacer les tags sur les murs de l'agglomération. Cela a été accompagné de mesures éducatives et de mesures de prévention, afin que cette somme de cinq millions ait tout son sens et toute son efficacité.

Aussi nous ne voterons pas cette proposition qui arrive trop tard et qui a un caractère démagogique.

M. Georges Letellier (HP). J'aurais pu baptiser cette motion «Les yeux de la Ville». J'espère que chaque député, soucieux de son environnement, aura pris le temps de lire, de s'interroger et de méditer sur cette proposition de motion invitant le Conseil d'Etat, à l'instar de nos voisins français, à présenter un plan d'action contre les tags, les graffitis et leurs auteurs, qui stigmatisent et dégradent l'image internationale de notre cité.

Genève est devenue une ville sale qui n'inspire plus le respect de nos visiteurs. Pour confirmer mes propos, je vous montre un article du «GHI» intitulé «Genève: la honte». Cela fait d'ailleurs suite à un article, paru juste après les Fêtes de Genève, intitulé «Genève, ta propreté fout le camp». Il faut, encore une fois, avoir le courage de s'exprimer et de dire la vérité. Je vous cite le contenu de l'article: «Des touristes étrangers sont choqués par la saleté de notre ville. Nos habitants s'en inquiètent. Notre environnement quotidien s'est dégradé ces dernières années avec des graffitis, crottes de chiens et déchets divers qui ont envahi nos rues. Qu'est devenue la légendaire propreté helvétique ?».

La légendaire propreté helvétique est passée aux oubliettes, et je vais vous dire pourquoi. Cette propreté légendaire vient de disparaître des tabelles de la dernière édition du «Petit Robert». Elle y trônait depuis des lustres. Le fait que l'on citait la propreté suisse en référence était une fierté helvétique. Ce n'était pas par hasard. La disparition de ce symbole patrimonial est une honte pour la réputation de la Genève internationale qui aspire au titre de capitale environnementale. Pour le défendeur de l'environnement que je suis - je suis patron d'entreprise et je suis aux normes ISO 14001 - Messieurs, j'ai honte pour la Ville de Genève. Ceux qui s'en plaignent ont parfaitement raison. A force de s'obstiner à vouloir niveler les valeurs humaines nous finissons par les perdre et vous ne disconviendrez pas de cela.

Mesdames et Messieurs les députés, la propreté doit être à la hauteur de nos ambitions environnementales. Sur le plan international, Genève a perdu de sa superbe. Tout le monde en est conscient, sauf peut-être vous, la gauche. Par respect pour nos citoyens, pour nos visiteurs, et pour ceux qui, au fil du temps, ont réussi à construire notre réputation ancestrale de ville propre, nous devons tout faire pour redevenir un symbole de propreté, afin d'être la capitale que nous voulons être. Nous voulons être la capitale de l'environnement, faisons un effort: «La propreté est le symbole vivant du respect d'autrui.»

Messieurs, si on ne commence pas par être propre soi-même, comment voulez-vous respecter autrui ? C'est tout simple, mais enfin, il faut le comprendre, encore une fois. Retroussez-vous les manches et redonnez-nous la réputation que vous avez, idéologiquement, laissé filer, en nous débarrassant des symboles de chienlit que sont les tags et les graffitis ! La Genève environnementale, oui; à condition d'en avoir la volonté politique, problème récurrent, encore une fois.

Mesdames et Messieurs les députés, je fais appel à votre sens civique et vous invite à soutenir cette motion.

Une voix. Bravo !

La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Autant la motion précédente était quelque peu censée, autant celle-ci est plus que loufoque. Je vous laisse lire les invites figurant à la page deux, elles sont vraiment très, très spéciales.

Monsieur Letellier, il y a quelques mois, un crédit de plus de cinq millions de francs a été voté par ce parlement, pour effacer les tags. Comme vous avez pu le lire, hier, dans le point de presse du Conseil d'Etat, la propreté dans les rues préoccupe le Conseil d'Etat. D'entente avec la Ville de Genève et l'Association des communes genevoises, il a adopté pour ce faire un plan de mesures. Je suppose que vous avez également lu ces papiers que nous avons tous reçus. (L'oratrice est interpellée.)Je vous parle de la diffusion d'informations officielles, Monsieur Letellier.

La présidente. Monsieur Letellier, vous avez parlé suffisamment, maintenant c'est au tour de Mme Gauthier.

Mme Morgane Gauthier. Merci, Madame la présidente. Je continue.

Vous avez donc vu le plan d'action qui a été présenté hier par le Conseil d'Etat et le crédit d'investissement qui a été déposé il y a quelques mois. Lors de l'étude de ce crédit d'investissement en commission des travaux, nous avons par exemple discuté avec les établissements scolaires pour savoir quelle était la meilleure chose à faire afin de maintenir l'ordre et la propreté des bâtiments. Une étude pilote a été menée et les résultats se sont fait sentir, c'est ce que nous ont dit les responsables du DIP.

Lorsque vous demandez d'enrichir le droit pénal cantonal d'une disposition spécifique consacrée aux tags et autres graffitis, ainsi que dans le reste de vos propositions, vous êtes toujours du côté de la sanction, de la pénalisation. Vous avez demandé au Conseil d'Etat qu'il augmente les sanctions de manière pénale: ce que vous demandez est quand même très grave.

Vous demandez aussi que les propriétaires puissent bénéficier d'allégements fiscaux; il faudrait peut-être que vous nous expliquiez un peu mieux ce que vous entendez par là.

Par conséquent, en l'état, il est pour nous impossible de voter cette motion, de par la nature des invites qu'elle comporte et, en plus, parce que l'Etat a déjà répondu à vos préoccupations.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le parlement est censé discuter de choses graves et de choses un peu moins graves, quoique la situation en matière d'image que présente la Ville de Genève est triste vis-à-vis de toute cette population qui, année après année, vient visiter notre cité. Parmi les visiteurs qui viennent à Genève, nous avons beaucoup de ressortissants d'Asie du Sud-Est pour qui la propreté, l'ordre et la sécurité sont des valeurs importantes. Par respect pour ces populations qui participent à la prospérité économique de ce canton, je pense qu'il nous appartient d'agir.

C'est vrai, le Conseil d'Etat, cette semaine, a proposé un certain nombre de mesures, notamment des mesures répressives par le biais de l'amende pour les propriétaires de chiens. Mais cela n'est certainement pas suffisant. Une réflexion s'est engagée. Je rappelle que le groupe UDC, il y a plus de deux ans, avait déposé une interpellation urgente pour dénoncer cette situation.

On pourrait même imaginer que cette motion s'inscrive dans le cadre de la campagne «le respect, ça change la vie». En effet, ne pas «taguer» un bâtiment privé ou public, c'est aussi une question de respect. On peut prévoir des emplacements pour la culture du tag, si vous voulez; mais cela doit être cadré et je ne pense pas qu'il soit normal qu'on puisse lire, sur des bâtiments, des menaces de mort à l'intention d'élus ou qu'un lieu de culte soit victime de déprédations, comme cela a été le cas, la semaine passée à la Synagogue. Cela est intolérable. On a dépassé une limite qu'il n'est pas concevable de cautionner.

Certaines des invites de la motion sont peut-être discutables - je ne demande pas que l'on vote cette motion aujourd'hui - mais cette République vit sur trois piliers: les organisations internationales, les industries de la chimie et de l'horlogerie ainsi que sur le tourisme. Alors, continuons comme ça et nous verrons qu'il ne suffira pas simplement de faire partie de l'espace de Schengen pour libérer les gens de l'obligation de visa pour qu'ils viennent visiter Genève, et nous nous rendrons vite compte que, lorsque l'on s'est fait piquer son sac à main dans l'enceinte d'un hôtel et que l'on se rend compte que cette personne a déjà été interpellée trois fois, cela donne une mauvaise image de ce canton à l'extérieur.

C'est la même chose en ce qui concerne les tags qui empoisonnent la vie des gens, instaurent un sentiment d'insécurité par rapport à la population et à nos hôtes étrangers et qui, en plus, engendrent un coût élevé pour la collectivité. Il n'est pas concevable que ce coût se répercute toujours sur les mêmes personnes. Il faut instaurer d'une part une incitation financière - pourquoi pas sous forme d'allégements fiscaux pour les propriétaires d'immeubles qui sont victimes de ces nuisances - et, d'autre part, une pénalisation plus importante, comme cela se fait dans d'autres pays.

Je vous suggère donc d'accueillir favorablement cette proposition de motion, éventuellement de la renvoyer en commission, si vous voulez en modifier les invites. Mais si vous souhaitez la renvoyer directement au Conseil d'Etat, tant mieux. Je pense qu'il est nécessaire d'agir, dans l'intérêt de la République, de ce canton, de son économie touristique et du sentiment de sécurité que nous sommes en droit d'attendre d'une République digne de ce nom.

M. Alberto Velasco (S). Nous partageons tous le souci qui vous anime, chers collègues. Nous voulons tous une ville propre et agréable, où l'on puisse se promener sans mettre nos pieds dans des excréments de chiens. Je suis d'accord avec cela. En revanche, le problème, avec cette motion, c'est que l'on dérape tout de suite vers un domaine populiste et cela est grave. Je m'explique.

Monsieur Catelain, vous avez fait référence à ce qui s'est passé la semaine dernière à la Synagogue. Ce qui s'est passé à la Synagogue est très grave et va bien au-delà de ce dont nous discutons ici. Cela ressort du domaine de l'éthique, de la morale, du sens de notre histoire et de beaucoup de choses, telles que la Shoa, un élément extrêmement respectable.

Dans votre intervention vous confondez les «tagueurs» de cycles d'orientation ou le «tagueur» en dessous de chez moi avec des gens qui n'ont rien à voir avec les «tagueurs». Les inscriptions sur les murs de la Synagogue ne sont pas des tags. Il s'agit de la manifestation de quelque chose de beaucoup plus grave que cela, Monsieur. Votre confusion est donc très grave. Je ne ferai pas cet amalgame parce, vous savez très bien que c'est un état d'esprit tout à fait différent qui anime ces jeunes «tagueurs». Ils sont tout à fait individualistes et leur message est malheureusement parfois indéchiffrable, contrairement au message inscrit sur les murs de la Synagogue.

Je suis tout à fait d'accord avec ma collègue Morgane Gauthier qui vous a dit que le Conseil d'Etat avait déjà pris les mesures nécessaires. En revanche, concernant les invites de cette proposition de motion, je trouve que certaines sont pratiquement impossibles. Vous demandez au Conseil d'Etat d'enrichir le droit pénal cantonal d'une disposition spécifique. Le droit cantonal possède aujourd'hui toutes les dispositions permettant de réprimer ces personnes de manière proportionnelle.

Vous faites appel à la responsabilité parentale lorsque celle-ci est défaillante mais, dans le cadre de la commission des travaux, les responsables du cycle d'orientation sont venus, à l'invite du département. Lors de cette entrevue, les responsables nous ont expliqué que toute une politique de sensibilisation des jeunes aux tags avait été mise en place; cela a par ailleurs été fait concernant l'effacement des tags, la prise de responsabilité du cycle d'orientation et il en a été de même avec les parents. Le département des travaux, en partenariat avec le département de l'instruction publique et avec le département de justice et police et sécurité font donc déjà quelque chose à cet égard.

Une voix. Quels en sont les résultats ?

M. Alberto Velasco. Nous sommes en train de constater les résultats, Monsieur le député: au cycle de la Gradelle, les tags n'existent plus.

Une voix. Et ailleurs ?

M. Alberto Velasco. Ailleurs, il faut des moyens. Par conséquent, lorsque le Conseil d'Etat vous demande, à travers le budget 2005 ou lorsqu'il vous demandera, à travers le budget 2006, les moyens pour le faire, j'espère que vous les voterez. J'espère que le PDC sera avec nous pour voter les moyens pour mettre ces mesures en oeuvre. Je rappelle aussi cela à l'UDC. Il ne s'agit pas seulement de faire des motions comme celle-là, il faut encore donner les moyens aux départements concernés. Au DAEL notamment, on a «sucré» une dizaine de millions lors du dernier budget. Il faut donc aussi leur donner les moyens pour qu'ils puissent répondre à ce type de motions. Or vous êtes les premiers à couper dans les moyens du DAEL. C'est tout de même incroyable ! Je fais référence aux débats que nous avons eus ici lors de l'établissement du dernier budget: il y a eu des coupes. Et pour faire respecter votre motion, pour l'appliquer, pour la mettre en oeuvre, il faut des moyens, Messieurs. Il faut donc être cohérents. Voilà donc ce que j'appelle être populiste: être populiste, c'est faire des amalgames sans donner les véritables moyens et les véritables directives.

Par conséquent, tout en partageant votre souci pour la République et les villes de notre canton, le groupe socialiste ne pourra pas vous suivre, ce à l'égard de la manière dont vous avez rédigé votre motion.

M. Michel Ducret (R). Le groupe radical demandera le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat, sous réserve de la suppression de la première invite. Nous déposons à cet effet un amendement la concernant.

Pour revenir sur ce que M. Velasco vient de dire, il n'y a pas de bon ou de mauvais tags ou «tagueurs» en fonction de ce qu'ils expriment, que leur contenu nous plaise ou ne nous plaise pas. En effet, si l'on tolère les uns, cela stimule les autres et, inéluctablement, le phénomène ne peut que persister voire aller en s'amplifiant.

On parle de la responsabilité parentale. Depuis des années, des mesures ont été prises; dans certains collèges, cela a peut-être porté ses fruits. Je peux vous dire aussi que dans d'autres collèges, lorsque les doyens ont voulu prendre des mesures de manière à, notamment, obliger les élèves à nettoyer ce qu'ils avaient fait, ils se sont fait taper sur les doigts par les parents d'élèves. Il y a eu des réclamations, des protestations et des menaces de plaintes en justice. Voilà où nous en sommes dans ce monde, aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés. Il faut donc effectivement prendre des mesures réelles parce que cela fait des années que l'on informe, que l'on dit que ce n'est pas bien. Mais dire que ce n'est pas bien n'est pas suffisant.

Il s'agit d'un problème général qui a trait d'une part à l'insécurité, toute relative, je vous l'accorde bien volontiers. Il s'agit d'une sensation d'insécurité... Mais ce problème participe de cette sensation d'insécurité qui fait que les gens ont des réactions de plus en plus catastrophiques par rapport à l'évolution de notre société. C'est aussi, d'autre part, un problème de réelle pollution, non seulement une pollution visuelle mais aussi de pollution chimique réelle. Au moment de la peinture et, bien sûr, encore plus au moment de l'inéluctable nettoyage.

Enfin, M. Catelain l'a également relevé et je pense qu'il a raison sur ce point, il nous faut retrouver le respect envers les uns et les autres. Cela passe aussi par le respect du bien d'autrui mais aussi du bien des oeuvres ou d'objets qui sont notre patrimoine, lorsqu'il s'agit de biens historiques, qui représentent des biens, pour certains, et qui représentent parfois des choses beaucoup plus fortement symboliques, lorsqu'il s'agit des murs de la Synagogue ou de la stèle en mémoire de la Shoa.

Il y a donc lieu de faire quelque chose. Il y a des années que l'on nous bassine avec des phrases du genre: «il faut informer, il faut éduquer». Cela est parfaitement juste, c'est nécessaire, et des efforts ont été faits dans ce sens. Cependant il faut aller plus loin, parce que ces efforts ne mèneront à rien sans un minimum de répression. C'est finalement le sens de ce qui nous est proposé ici.

Si nous demandons le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, c'est également dans l'idée que cela va renforcer l'effort que le Conseil d'Etat a l'intention de faire dans cette direction, avec les communes. Le Conseil d'Etat a parfaitement raison, nous n'avons que trop tardé pour faire un effort afin que Genève redevienne si ce n'est une ville propre du moins à la hauteur de la réputation internationale dont elle jouit encore mais qui ne durera pas très longtemps si nous continuons sur cette voie du laisser-aller.

Mme Janine Hagmann (L). C'est tellement évident que l'image d'une ville c'est sa carte de visite qu'il ne me semblait pas devoir intervenir par rapport à cette motion qui est l'évidence même. Seulement d'avoir entendu l'adjectif «loufoque» pour qualifier cette motion m'a fait bondir. Il est tout de même incroyable qu'on ose dire qu'il est loufoque de vouloir que notre ville soit présentable et propre ! D'accord, nous avons voté 5 millions pour nous occuper du problème en amont, et heureusement que nous l'avons fait.

Mais il y a vingt ans que nous parlons de prévention, dans ce domaine. A-t-on vu les résultats réels de cette prévention ? Non. C'est pour cela qu'il faut prendre le taureau par les cornes et agir.

Lorsque j'étais maire de Vandoeuvres et que l'école a été «taguée», j'ai demandé aux enseignants de me donner le nom des élèves qui étaient les auteurs de ces tags et, parents qui rouspétaient ou pas, avec une brosse à risette, je leur ai fait nettoyer le mur de l'école. Résultat: ça n'a jamais recommencé. Je regrette mais nous vivons dans une période dans laquelle nous demandons de revenir à plus de rigueur.

C'est pour cela que le groupe libéral renverra cette motion au Conseil d'Etat, même si, je le reconnais et je l'en félicite, le Conseil d'Etat a anticipé ce problème. Bravo, Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, d'avoir adopté cette position ferme dont vous avez fait état hier, dans votre communiqué de presse.

Nous accepterons évidemment l'amendement du groupe radical puisque cet amendement va de soi.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Il est évident que le groupe démocrate-chrétien appuiera le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. En effet, chaque fois que nous avons eu à débattre de cette problématique des salissures et en particuliers des tags, qui nous exaspèrent, nous avons pris la défense de la majorité de la population qui souhaite que nous y mettions un terme. En ce sens, tout comme la préopinante, nous félicitons d'ores et déjà le Conseil d'Etat d'avoir pris cette affaire en main.

Mme Hagmann s'est scandalisée de l'emploi du mot «loufoque»; moi aussi. Un autre mot m'a exaspéré: celui prononcé par M. Velasco, lorsqu'il parle de populisme. Que veut-on dire par là ? Lorsqu'un parlement prend en compte l'avis d'une majorité de la population qui en a ras-le-bol de ces salissures, est-ce faire preuve de populisme ? Les gens en ont assez de voir le patrimoine public abîmé par tous ces «graffitis», de ne plus pouvoir se promener dans un endroit historique sans voir des déprédations. Si c'est cela, faire du populisme, moi, je fais du populisme.

Nous ferons également nôtre l'amendement proposé par notre collègue Ducret - car l'actuelle première invite n'est pas de bon aloi - et nous considérons que le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat est un appui du parlement à sa politique.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je pense que lorsque ma collègue a prononcé le mot «loufoque», elle ne parlait pas du fond de la motion mais de ses invites et des moyens qu'elle propose. En effet, on peut tout à fait concevoir que les tags peuvent agacer ou agresser; en ce qui me concerne, la publicité omniprésente m'agace et m'agresse tout autant.

Aucune question sur le fond n'est posée, dans cette motion, quant à savoir pourquoi ces jeunes ont autant besoin de s'exprimer par le dessin, parfois talentueux, je dois le souligner et parfois non respectueux, il faut aussi le dire. Ces jeunes ont donc aussi besoin d'expression et il faudrait se poser des questions de fond à cet égard.

Je pense que la seule invite que l'on pourrait considérer comme intéressante est celle qui préconise d'agir par le biais d'une campagne de sensibilisation. Cependant, comme l'a déjà dit Mme Hagmann, je crois, le DIP s'est certainement déjà posé la question et a agi à ce niveau.

Je sais que des écoles qui ont justement fait des magnifiques tags...

Une voix. Des grafs !

Mme Sylvia Leuenberger. ...des «grafs» sur un de leurs murs et ces grafs n'ont jamais été modifiés par d'autres. On devrait donc aussi leur trouver des lieux d'expression.

Repeindre coûte très cher et nettoyer les murs pour leur redonner l'aspect d'espaces vierges, comme des pages blanches, donne l'envie de continuer à dessiner dessus. Nous pourrions donc profiter des rénovations sans forcément tout repeindre pour enlever les tags. Un autre moyen de ne pas voir de tags consiste à planter des plantes grimpantes empêchant ce genre d'actions.

J'aimerais soulever quelque chose qui n'a jamais été dit: qui fournit les sprays ? Les adultes. Je ne pense pas que les adolescents produisent ces bombes qui leur permettent de réaliser ces tags. Qui interdit ce commerce aux adolescents ? Personne. Qui fait de l'argent grâce à cela ? Les adultes.

Qui nous fait baigner dans une société qui nous matraque de publicités qui ne nous intéressent pas ? Ce sont les adultes aussi. Ces jeunes sont le reflet de notre société.

Posons-nous des questions de fond avant de faire des lois pour tous les mettre à la prison de Champ-Dollon qui est déjà suroccupée.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je suis très heureux de voir que votre Grand Conseil a largement évolué sur cette question. En effet, il y a quelques années, lorsque le Conseil d'Etat vous a présenté un crédit pour nettoyer les tags et entreprendre des actions préventives et répressives, le Conseil d'Etat a été reçu extrêmement fraîchement, au point qu'on nous a dit... (L'orateur est interpellé.)Oh non, non, tous partis confondus, Monsieur Froidevaux. On nous a dit: «Votre projet n'est pas très sérieux, on ne peut pas régler ces questions, il faut que vous fassiez un test.» Nous avons donc fait ce test. Nous avons choisi un cycle d'orientation, nous avons mis au point une prévention, des explications, une surveillance. Nous avons nettoyé. Nous sommes venus vous faire rapport et vous avez dit: «Ah, ça marche.» Vous avez alors voté le projet de loi du Conseil d'Etat.

Vous n'étiez pas encore député dans ce parlement, sauf erreur, Monsieur Letellier, c'est pour cela que je fais ce petit cours d'histoire. C'est nous qui sommes à l'origine de cela. Nous avons eu de la peine à vous le faire accepter mais aujourd'hui vous nous soutenez, ce dont je vous remercie, évidemment.

Ce crédit n'est pas épuisé. Il vient par tranche et il est calculé sur les bâtiments publics dans la couronne de l'agglomération urbaine. Il peut s'avérer un jour nécessaire qu'il soit complété.

Pour en revenir à la motion, si c'est un soutien indéfectible du parlement au gouvernement, je l'accepte. Si c'est pour nous demander ce qui figure ici en matière répressive, ça ne joue pas parce que la loi pénale, c'est la loi fédérale qui punit assez sévèrement le dommage à la propriété, il n'y a rien à y changer.

Vouloir intervenir sur la responsabilité parentale est une question qui relève du Code civil, soit la loi fédérale sur laquelle on ne peut pas faire grand-chose non plus. Le reste est à peu près équivalent à ce que nous sommes en train de faire.

Par conséquent, avec les plus extrêmes réserves sur les invites qui nous sont adressées mais en vous remerciant de soutenir nos efforts contre les tags et, de manière générale, contre tout ce qui salit la Ville, nous pouvons accepter le principe de cette motion.

La présidente. Je vais donc mettre aux voix l'amendement de M. Gabriel Barrillier pour le groupe radical qui supprime la première invite.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui (unanimité des votants).

Mise aux voix, la motion 1592 ainsi amendée est adoptée par 35 oui contre 27 non.