Séance du
jeudi 11 mars 2004 à
20h45
55e
législature -
3e
année -
6e
session -
27e
séance
La séance est ouverte à 20h45, sous la présidence de M. Pascal Pétroz, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et M. Alexandra Gobet Winiger, André Hediger, René Koechlin, Alain-Dominique Mauris et Patrick Schmied, députés.
Le président. Je prie Mme le sautier de faire entrer Mme Milena Guglielmetti et l'assistance de bien vouloir se lever. (A son entrée dans la salle, les députés applaudissent.) (Le président lit la formule du serment)
Mme Milena Guglielmetti est assermentée. (Chaleureux applaudissements.)
Le président. Mme Valérie Laemmel-Juillard, Mme Christine Junod et M. David Mungall sont assermentés. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Néant.
Interpellations urgentes écrites
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Georges Letellier : motion 1526 : pourquoi l'incorporation des permis "C" dans la police ? : la gauche et le DJPS veulent une "police de proximité docile et non violente" ( IUE 73)
Interpellation urgente écrite de M. Georges Letellier : Immeuble pour les requérants et les pérégrinations de la BCGe ( IUE 74)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Guérini : Tremblements de terre et autres catastrophes: sommes-nous prêts à faire face ? ( IUE 75)
Interpellation urgente écrite de M. Christian Brunier : Transparence sur le résultat des comptes 2003 de l'Etat ( IUE 76)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Guérini : Veut-on la "mort" du Carnaval d'Onex ? ( IUE 77)
Interpellation urgente écrite de Mme Salika Wenger : Y a-t-il quelqu'un qui sache lire au Département de l'instruction publique ? ( IUE 78)
Interpellation urgente écrite de M. Jacques Baud concernant la vérification des comptes de la Compagnie générale de navigation ( IUE 79)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Détournement des buts de la Fondation des Terrains Industriels (FTI) ? ( IUE 80)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Places de parking accessibles au personnel de l'hôpital ( IUE 81)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : En décidant de laisser la Ville fermer à la circulation une partie du boulevard de la Cluse, le Conseil d'Etat garantit-il la sécurité des personnes transportées à l'hôpital ? Respecte-t-il la lettre et l'esprit de la législation en vigueur ? ( IUE 82)
Interpellation urgente écrite de M. Sami Kanaan : Abattage des Bois de la Bagasse à Ferney : Genève respecte-telle ses voisins français ? ( IUE 83)
Interpellation urgente écrite de M. Sami Kanaan : Hausse du nombre de morts sur les routes genevoises : quelle action du Conseil d'Etat ? ( IUE 84)
IUE 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84
Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle d'avril.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.
Premier débat
Mme Anne Mahrer (Ve). L'initiative votée en 2001 proposait qu'un périmètre plus large soit restitué à la zone villas - il aurait constitué un poumon de verdure dans un quartier déjà fortement urbanisé - contraire au plan directeur cantonal... On accorde finalement aux Lancéennes et aux Lancéens la portion congrue, soit le pied du fameux champignon.
On ne peut pas dire que la commune de Lancy soit égoïste en matière de construction de logements. Le projet du PAC, La Chapelle - Les Sciers en est un exemple... Il faut tenir compte, dans ce cas, de la votation populaire et accepter ce projet de loi.
M. Gabriel Barrillier (R). Nous avons affaire - et c'est très rare - à un projet de loi qui propose de «dédensifier» un périmètre... En effet, d'habitude, nos discussions portent sur la densification d'un périmètre. Dans ce cas particulier, la commission de l'aménagement a été très sensible aux souhaits exprimés tant par les autorités de cette commune que par ses habitants.
Nous - députés du parti radical - sommes très sensibles à ce désir de «dédensifier» cette zone, notamment parce qu'elle compte déjà beaucoup de logements et subit de fortes nuisances.
Il faut savoir aussi que, sur le territoire de cette commune, d'autres périmètres pourraient être densifiés, notamment le quartier de Surville qui est juste en dessous de ce périmètre. Nous sommes donc prêts à accepter de «dédensifier» ce périmètre, d'aller ainsi à la rencontre des autorités de la commune et de ses habitants, mais, en revanche, nous souhaiterions que le plan localisé de quartier du secteur de Surville progresse rapidement pour permettre la construction de logements tout près de la ville.
Le parti radical accepte les conclusions de la commission d'aménagement du canton.
M. Christian Grobet (AdG). On sait que dans ce canton les propriétaires de villa, qui ont une situation particulièrement privilégiée - je le dis d'autant plus volontiers que j'ai la chance de vivre dans une zone villas - considèrent que ce privilège n'est pas suffisant et qu'il faut empêcher la construction de logements répondant aux besoins de la population... Je ne peux m'empêcher de trouver cette position particulièrement choquante en cette période de crise du logement, où il est très difficile de trouver des possibilités de construire des logements selon un taux d'occupation du sol raisonnable !
La droite s'oppose constamment à la construction de logements et ce projet - M. Barrillier a bien fait de l'indiquer - va à l'encontre de toute la politique d'urbanisation ou, plutôt, de mise à disposition de terrains pour la construction de logements poursuivie depuis des décennies dans ce canton.
Toutefois, il est vrai - et je le reconnais - qu'il n'est pas aisé de construire dans des secteurs fortement occupés par des villas, et tel est le cas du périmètre pour lequel il est proposé d'abroger la zone de développement pour le rendre à la zone villas initiale.
Mais je rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que le Conseil d'Etat a le pouvoir de décider s'il applique ou non les normes de la zone de développement. C'est le fait du prince, et rien n'oblige le Conseil d'Etat à appliquer les normes de la zone de développement. Et, à ma connaissance, le Conseil d'Etat - c'est peut-être une preuve de sagesse - n'a pas voulu, jusqu'à présent, procéder à un développement dans ce périmètre. Mais de là à supprimer la zone de développement, il y a un pas ! Cela me semble être une profonde erreur !
J'ai entendu avec intérêt les propos de M. Barrillier... Il dit - et c'est vrai - que lorsque des terrains en zone villas sont déclassés, au profit de la construction de logements, des opérations compensatoires sont prévues... Alors si la commune de Lancy venait offrir une opération compensatoire intéressante en contrepartie de l'abrogation de cette zone de développement, nous pourrions entrer en matière ! Je dirai toutefois que le quartier de Surville n'est pas évident à urbaniser...
Dans un premier temps, nous estimons qu'il faut refuser ce projet de loi, mais, si le point de vue de M. Barrillier est partagé par d'autres députés, il faudrait nous arrêter au deuxième débat et que le Conseil d'Etat prenne contact avec la commune de Lancy pour savoir si une opération compensatoire est possible. Car il est évident - et je regrette que M. Barrillier ne soit plus là... - que ce n'est pas parce que nous aurons supprimé la zone de développement dans le secteur qui nous occupe maintenant, qu'il faut vous attendre à ce que le projet du périmètre de Surville passe comme une lettre à la poste ! Je ne sais pas si M. Barrillier est naïf... Je ne le crois pas, parce qu'il connaît bien ce genre de problèmes... Ou tenons-nous un discours totalement vide de sens ?
Pour être cohérents, il faudrait suspendre le troisième débat au terme du deuxième débat et que le Conseil d'Etat, ou M. Barrillier et d'autres personnes, prennent contact avec la commune de Lancy pour tenter d'obtenir une contrepartie au retour en zone villas de cette importante zone de Lancy.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. A Lancy, une initiative proposait de renoncer à la zone de développement dans trois secteurs de villas. Puis un contreprojet a été élaboré par la mairie de Lancy, qui se limitait au seul secteur qui vous est aujourd'hui proposé. Les électeurs Lancéens ont pris une décision assez curieuse, parce qu'ils ont donné plus de voix au contre-projet qu'à l'initiative, mais, dans la question subsidiaire départageant les deux, ils ont accordé la priorité à l'initiative...
Il m'apparaît nécessaire de prendre en considération, dans tout ce qu'elle peut avoir de raisonnable... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)...la position de la commune de Lancy, en acceptant le retour en zone villas du secteur dit «le pied du champignon». Je précise que les deux autres secteurs restent en zone de développement.
Sur le plan des solutions à apporter à la pénurie de logements, compte tenu, Monsieur Grobet, du parcellaire, des propriétés foncières qui s'y trouvent et de la qualité des villas, il est illusoire d'imaginer la moindre possibilité de densification à bref délai dans ce secteur. De sorte que je n'ai pas l'impression de trahir la mission qui est la mienne: de tout faire pour résoudre la pénurie de logements.
En ce qui concerne l'attitude générale de la commune de Lancy, je crois qu'il faut mettre en exergue le fait que c'est une commune qui a fait beaucoup dans le passé et qui continue à faire beaucoup. Il est très important d'obtenir de la commune de Lancy qu'elle persiste - comme le fait actuellement son conseil administratif - à soutenir le projet de développement de La Chapelle - Les Sciers, qui est un développement majeur en limite de la commune. Et je dis très clairement que, si la commune devait changer d'avis à ce sujet en refusant la densification de ce secteur, je serais moins bien disposé à son égard, je ne serais pas aussi enclin à l'entendre qu'aujourd'hui, je n'aurais pas la même écoute que celle que j'ai eue en ce qui concerne le pied du champignon.
Mesdames et Messieurs les députés, tenant compte du fait que le retour en zone villas de ce périmètre ne change en définitive pas grand-chose sur le plan du logement, prenant acte des efforts passés et des engagements actuels de la commune de Lancy en faveur du logement, il m'apparaît raisonnable que vous votiez ce projet de loi.
M. Rémy Pagani (AdG). Quand nous avons traité de ce problème en commission, nous étions plus ou moins «gênés aux entournures», car le canton a cruellement besoin de terrains constructibles. Et nous nous retrouvons dans une situation paradoxale dans laquelle il faut déclasser - reclasser, si j'ose dire - un terrain en zone de développement en terrain en zone villas. Situation d'autant plus paradoxale qu'en certaines occasions on nous fait croire que des terrains vont être déclassés, alors qu'il s'agit en fait de confettis... En l'occurrence, il s'agit d'un périmètre d'une grande surface qui permettrait de construire du logement offrant une certaine qualité de vie aux habitants et, de plus, ce périmètre est proche de la ville.
Je le répète, nous avons été «gênés aux entournures» parce que, en effet, nous avons tenu compte du débat qui a eu lieu au sein de la municipalité. Je dois le dire, nous n'avons pas envisagé la solution que propose Christian Grobet ce soir, de trouver une compensation à ce déclassement... Car, comme vous l'avez relevé, Monsieur le président, il se peut très bien que, forte de ce succès, la municipalité, ou certains propriétaires privés, en viennent à dire qu'il n'y a pas de raison que le pied du champignon - comme il est désigné populairement - soit reclassé et que d'autres zones villas, notamment La Chapelle - Les Sciers, ne puissent pas être protégées.
Par conséquent, je réitère la proposition de Christian Grobet qui vise simplement à s'assurer qu'une compensation sera donnée rapidement par la municipalité - si j'en crois les déclarations du Conseil d'Etat - en mettant un terrain à disposition pour du logement. Nous ne voyons pas pourquoi nous nous opposerions à une telle proposition.
J'en viens maintenant au fait qu'il faut tordre le cou à la notion selon laquelle il faut déclasser des terrains pour construire immédiatement... Non ! Je crois que le Grand Conseil a ceci de particulier sur la vie des communes qu'il doit avoir une vision à long terme en matière d'aménagement. Toute une série de terrains déclassés ne sont malheureusement pas utilisables rapidement pour toutes sortes de motifs, autorisations de construire, etc. Toujours est-il que le Grand Conseil - et c'est de cela dont il s'agit - doit être déterminé quant à la logique à poursuivre vis-à-vis de ces terrains. Vous ne pouvez pas dire, parce que des terrains en zone de développement ne sont pas constructibles rapidement, qu'il faudrait les remettre en zone villas ! Si on suit le raisonnement consistant à dire qu'on ne pourra rien construire à l'avenir étant donné qu'on n'a rien construit jusqu'à présent, on n'a effectivement pas fini ! En terme de construction, l'avenir c'est en tout cas dix ou vingt ans !
Mesdames et Messieurs les députés, je soutiens la proposition de Christian Grobet de voter ce projet de loi en deux débats, pour montrer que nous sommes tout de même soucieux de respecter la volonté qui s'est exprimée lors du référendum, tout en nous assurant de recevoir un terrain en compensation, car il est vital pour notre canton de se doter de logements collectifs sur les terrains en zone de développement.
M. Christian Grobet (AdG). J'approuve les propos de M. Pagani.
Tout d'abord, je souligne, Monsieur Moutinot, que les communes n'ont pas pouvoir de décision en ce qui concerne l'adoption ou l'abrogation de zones existantes. Si l'initiative lancée a effectivement permis à la population de se prononcer, je considère quant à moi que ce droit d'initiative a été utilisé d'une manière un peu perverse sur une question où la commune n'a pas de compétence. Je souhaite que ce précédent ne soit pas utilisé par d'autres communes, parce que les conséquences pourraient être particulièrement graves pour le Conseil d'Etat.
Tout à l'heure, M. Barrillier a proposé une opération compensatoire dans le secteur de Surville. J'ai fait état, personnellement, de mon scepticisme, parce que ce secteur compte beaucoup de beaux arbres et que son urbanisation risque de ne pas être facile. Et que, surtout, un plan localisé de quartier a déjà fait l'objet d'une votation référendaire négative. Revenir sur le secteur de Surville me paraît donc assez aléatoire...
J'avoue que je n'avais pas pensé au projet du Conseil d'Etat de déclasser les terrains de La Chapelle. Il s'agit effectivement d'un projet ambitieux - je tiens, du reste, à relever votre courage, Monsieur Moutinot, parce qu'il ne sera pas aisé non plus de l'urbaniser. C'est vrai, il y a quinze ans, ce secteur avait été mis en évidence en raison de son potentiel à bâtir. Mais, comme il y avait eu de nombreuses difficultés avec la construction du dépôt des TPG, il avait paru préférable de ne pas vouloir tout faire en même temps...
Je me permets d'insister, Monsieur Moutinot, sur le fait de ne pas voter le troisième débat ce soir ! Vous venez d'indiquer que le projet de La Chapelle serait une bonne compensation, et je crois avoir compris - je ne me rappelle pas exactement les mots que vous avez employés - que vous seriez très déçu si ce projet n'était finalement pas voté par la commune, une fois voté le reclassement du secteur dont nous débattons ce soir.
A mon avis, il serait parfaitement normal d'indiquer à la commune que le Grand Conseil attend sa prise de position concernant le périmètre de La Chapelle, puisqu'il fait un geste dans le sens de la commune en votant ce projet de loi. Et nous pourrions procéder au troisième débat au moment où le déclassement de La Chapelle sera voté. Sinon - vous me permettrez de le dire - je trouve un peu trop facile que le droit d'initiative soit utilisé d'une manière aussi discutable, pour répondre à une demande de certains milieux, dans l'espoir que la commune se montrera en contrepartie compréhensive pour un autre secteur, et que, finalement, celui-ci fasse l'objet d'une décision négative...
En politique, il est parfaitement normal d'aborder les problèmes en proposant des solutions compensatoires, cela se fait de plus en plus ! Nous pouvons donner à la commune le message suivant: nous sommes prêts à donner suite à son souhait - et non à sa décision - mais nous voulons en échange qu'elle fasse preuve de compréhension par rapport à notre besoin de construire des logements.
La crise que nous traversons est très importante et, en tant que représentant du Conseil d'Etat, vous savez très bien que les terrains constructibles sont extrêmement rares ! Il n'est donc pas possible aujourd'hui de ne pas donner un message clair, car nous ne pouvons pas nous permettre de réduire les zones de développement sans trouver des compensations!
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
M. Gabriel Barrillier (R). Ce projet de loi - c'est vrai - met le doigt sur un problème délicat. Cela a été dit plusieurs fois dans cette enceinte, les paramètres en matière d'aménagement du territoire et de logement sont terribles... Je dis bien «terribles» ! Certes, il y a pénurie de logements, mais je tiens à souligner - je voulais le faire tout à l'heure - le degré de cette pénurie... Il faut en effet rappeler que le taux de vacance est de 0,17%... 0,17% ! En 2002, nous avons construit 1313 logements pour un solde démographique positif de 5540 personnes... Et l'année dernière, nous avons construit 3120 logements pour 6768 personnes de plus... Je vous donne ces chiffres juste pour illustrer ce problème. l
Messieurs Grobet et Pagani - Dieu sait que je l'ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte ! - quand on a affaire à des enjeux pareils, c'est vrai que l'autonomie communale peut paraître quelque peu illusoire et secondaire... Au début, j'étais tenté de dire que nous devions mener une certaine politique d'aménagement, rechercher des solutions. Il y a quarante-six communes petites et grandes...
M. Claude Blanc. Quarante-cinq !
M. Gabriel Barrillier. Quarante-cinq ! Merci, Monsieur Blanc ! On peut donc se demander à quoi sert cette autonomie communale, car les enjeux en matière d'aménagement sont autrement plus importants que les petits particularismes des communes !
Dans le cas présent, nous avons affaire à une commune qui a certes entrepris beaucoup. Quand on nous a présenté ce projet de loi consistant à «dédensifier» ce périmètre - appelé le champignon - c'est-à-dire le faire passer d'une zone de développement 3 en une zone villas - on va en arrière ! - je me suis dit de prime abord qu'il n'était pas possible que l'Etat central baisse pavillon et l'accepte ! Mais - je l'ai dit tout à l'heure - cette commune compte d'autres endroits possibles. J'ai évoqué Surville, parce que c'est un endroit que je connais... Il y a un plan localisé de quartier en gestation, qui «pétouille», d'ailleurs...
Monsieur Pagani, vous nous reprochez souvent de ne pas tenir compte de l'avis des communes... Je me permets de vous signaler en passant que, dans certains cas, vous dites qu'il faut privilégier la démocratie de quartier, la volonté des habitants, mais, là, vous dites le contraire.. Excusez-moi, mais, votre conception de l'expression populaire est à géométrie variable !
Je pense que le canton doit davantage prendre les choses en main, mais, en l'occurrence, si nous voulons arriver à convaincre la commune de Lancy d'avancer avec nous dans le projet de La Chapelle - Les Sciers, ou d'autres projets, nous devons tenir compte de l'intention manifestée par les habitants et les autorités de cette commune lors d'une initiative, de votations, d'avoir un certain aménagement. Alors, coupons la poire en deux et acceptons ce projet de loi !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Je crois que tous les avis ont été exprimés... C'est la raison pour laquelle le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits Messieurs les députés Olivier Vaucher, Pierre-Louis Portier, Rémy Pagani. Je donnerai ensuite la parole à M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, puis je vous ferai voter sur la prise en considération de ce projet de loi.
M. Olivier Vaucher (L). Merci, Monsieur le président. Je serai relativement bref...
J'interviens surtout par rapport à la proposition de M. Grobet de compenser ce reclassement de terrain. S'il a raison en ce qui concerne d'autres communes, je pense que ce n'est pas judicieux dans le cas de la commune de Lancy; elle a déjà passablement joué le jeu dans ce domaine, d'autant plus qu'elle va être encore très sollicitée dans des projets à venir, particulièrement au niveau des logements.
En ce qui concerne le projet de La Chapelle-Les Sciers, je pense que la commune de Lancy ne s'opposera aucunement à la réalisation de ce périmètre. C'est vrai - M. Grobet a raison - il s'agit d'un cas particulier. Et, comme l'a dit M. Barrillier, cette démarche n'est pas forcément conforme aux habitudes en la matière, mais elle est utile pour pouvoir répondre à la crise majeure que nous connaissons dans le domaine du logement. Et s'il en est un qui évoque souvent la pénurie de logements, Monsieur le président, c'est bien moi !
Or il me semble que nous ne pouvons - et que nous ne devons pas - aujourd'hui, demander une compensation à la commune de Lancy. Je vous demande donc de ne pas poser de condition au vote de ce projet de loi et je vous invite à l'accepter tel quel, pour tenir compte de l'initiative communale, par respect à l'égard des conseillers municipaux et en vue des futurs importants projets de construction de logements sur la commune de Lancy.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Le groupe démocrate-chrétien tient aussi à s'exprimer à l'occasion de la proposition de M. Grobet...
Il convient de relever que les autorités de Lancy ont toujours eu une position extrêmement responsable par rapport au problème de l'aménagement du territoire. Je relève la difficulté rencontrée par les autorités locales, qui ont dû jongler entre la décision d'un scrutin populaire démocratique et leur envie de participer à l'effort, que nous souhaitons tous, d'aménagement du canton pour y construire du logement. L'attitude des autorités de Lancy a été absolument exemplaire à cet égard, et j'ai pu le constater personnellement à l'occasion de discussions avec des élus locaux. Il serait d'ailleurs souhaitable que d'autres communes de ce canton, qui ont certainement une vision plus égoïste et plus étroite des problèmes de notre République et canton, accordent la même attention à ce problème.
Monsieur Grobet, vous avez certainement raison sur le fond, mais, sur la forme, nous ne pouvons pas vous suivre, parce qu'il serait vraiment navrant de ne pas encourager l'attitude de cette commune en procédant, d'une certaine manière, à une sorte de chantage: en lui disant que, si elle ne fait pas ceci, nous ne ferons pas cela... Nous devons, au contraire, faire confiance aux autorités de la commune, et les encourager ! J'ai la même position que M. Vaucher et d'autres préopinants: je leur fais confiance ! Si des difficultés se présentent pour le projet de La Chappelle - Les Sciers, il ne me semble pas qu'elles viendront du côté de la commune de Lancy, quand bien même ce périmètre représente des enjeux considérables pour elle.
M. Rémy Pagani (AdG). Je rassure tout de suite M. Barrillier, qui me reproche d'avoir un double langage... Ce n'est certainement pas le cas, car le sujet ne prête pas à ce genre de confusion ! En fait, en commission, nous nous sommes abstenus de nous prononcer sur ce projet, nous ne nous y sommes pas opposés.
Il se trouve simplement que le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui a été déposé en janvier 2003, c'est-à-dire il y a plus d'une année, et nous l'avons traité en avril de la même année. (L'orateur est interpellé.)Oui, c'est le dépôt du rapport, mais le projet a été déposé une année avant ! Comme l'a relevé M. Barrillier, nous sommes dans une situation encore plus dramatique au niveau de la crise du logement, et c'est bien cela qui doit nous faire réfléchir sur la situation actuelle. Nous avons certes affaire à une municipalité qui fournit des efforts certains pour l'aménagement, mais, Monsieur Portier, quel message allons-nous donner aux propriétaires de villas de ce canton ? Je ne pense pas que la municipalité prendrait ombrage que nous décidions ce soir - on l'a d'ailleurs fait dans d'autres débats - d'attendre qu'il y ait des compensations pour voter ce projet de loi en troisième débat. Par contre, si on le vote, les propriétaires y verront un signal évident et se diront qu'il n'y a pas de raison de ne pas défendre leur pré carré, puisque certains propriétaires situés en zone de développement ont pu obtenir de revenir en arrière en faisant passer celle-ci en zone villas. Et c'est ce qui nous dérange profondément ! Quel signal allons-nous donner à long terme, s'agissant de la gestion de la zone villas ? Je vous rappelle que des projets urgentissimes dans la zone villas sont en attente... Et nous allons renforcer des tendances qui sont, bien évidemment, reliées à une certaine vision de la propriété privée. Toujours est-il que c'est le signal que nous allons donner !
C'est pour cette seule et unique raison - cela n'a rien à voir avec un prétendu double langage, Monsieur Barrillier ! - que nous vous proposons soit de renvoyer ce projet de loi en commission - parce qu'«il est urgent d'attendre» - soit de reporter le troisième débat et le vote.
Je demande donc formellement le renvoi en commission et, le cas échéant, le report du troisième débat.
Le président. Merci, Monsieur le député. Il en sera fait ainsi.
Je donne la parole à M. le conseiller d'Etat M. Laurent Moutinot. Ensuite, vous vous exprimerez sur la demande de renvoi en commission. Si le renvoi est refusé, je vous ferai voter sur la prise en considération du projet de loi.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, quand je tiens compte de l'avis des communes, vous m'accusez d'être faible... Quand je n'en tiens pas compte, vous m'accusez d'autoritarisme... Dans tous les cas, j'ai tort ! (Rires.)C'est normal...
Dans le cas précis, Monsieur Pagani, vous allez donner un message négatif alors que la situation est la suivante: le peuple de Lancy a demandé le retour en zone villas de trois périmètres, je refuse d'entrer en matière pour deux d'entre eux, mais, par contre, je trouve normal de le faire pour l'un d'entre eux, car c'est explicable et compréhensible. Je le répète, ce n'est franchement pas dans ce périmètre que nous allons pouvoir construire, même à long terme.
C'est vrai - il faut le rappeler - les relations que le canton entretient avec la commune de Lancy sont bonnes. Et si les relations du canton avec toutes les autres communes étaient de cette nature, nous aurions probablement moins de problèmes.
A partir de là se pose une question de méthode. Celle que vous suggérez, Monsieur Grobet, est sur le mode du «Tenons-nous par la barbichette...». Moi, je fais le pari inverse ! Soit que, si votre Grand Conseil ne vote pas ce projet de loi, les autorités et la population de Lancy vont se crisper, le comprendre comme un très mauvais message, et risquent bien de faire de l'opposition systématique. Je propose que nous votions ce projet de loi, une façon pour le Grand Conseil et le Conseil d'Etat de dire aux autorités de Lancy que nous faisons tout ce que nous pouvons pour répondre favorablement, à chaque fois que c'est possible, à leurs souhaits, dans le respect des intérêts cantonaux qui sont les nôtres - ce qui, parfois, nous oblige à ne pas suivre certaines de leurs propositions.
C'est, me semble-t-il, le message logique que l'Etat doit faire passer aux communes. Le risque que vous prenez, en adoptant cette méthode d'ouverture, n'est pas très grand. Il faudra simplement avoir le courage, cas échéant, sur d'autres projets - celui de La Chapelle - Les Sciers, en particulier - d'écarter le préavis de Lancy s'il s'avérait négatif, ce que je ne veux pas croire, compte tenu du geste d'ouverture que je vous demande aujourd'hui.
Le retour en commission est, à mon avis, inutile, dans la mesure où il n'y a rien à étudier de plus. Quoi qu'il en soit, je demanderai le troisième débat si le premier et le deuxième débat confirment le texte sorti des travaux de votre commission. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets deux propositions: tout d'abord le renvoi en commission et, ensuite, la prise en considération du projet de loi.
Voici la première proposition, formulée par M. Pagani: renvoyer ce projet de loi en commission de l'aménagement. Le vote électonique est lancé.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 8913-A à la commission de l'aménagement est rejeté par 71 non contre 9 oui et 2 abstentions.
Le président. Je vous soumets maintenant la prise en considération de ce projet de loi, toujours au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 71 oui et 12 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3.
Le président. J'imagine, Monsieur le conseiller d'Etat - comme vous l'avez annoncé - que le troisième débat est demandé... Il l'est ! Nous allons donc voter... Mais, je vois une main qui s'agite, c'est celle de M. le député Pagani. Je lui donne d'abord la parole.
M. Rémy Pagani (AdG). Je vous rappelle simplement que notre règlement prévoit de faire voter pour le troisième débat, formellement, et, ensuite, le Conseil d'Etat peut demander le troisième débat... (Exclamations.)La demande de troisième débat doit être votée au préalable avant la proposition du Conseil d'Etat... (L'orateur est interpellé.)
Si ! On a procédé comme cela en certaines occasions, vous pouvez vérifier ! D'ailleurs, M. Spielmann le faisait tout le temps...
Le président. Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention, Monsieur le député. Mais je vous demande de bien vouloir répéter, parce que ce n'était pas d'une clarté absolue ! Je vous redonne la parole... (Brouhaha.)
M. Rémy Pagani. Monsieur le président, il faut d'abord soumettre au Grand Conseil la proposition de passer au troisième débat avant le vote final. (Exclamations.)Si ! Tout à fait !
Une voix. C'est l'article 134, alinéa 3 !
Le président. Bien ! Monsieur le député, je vais vous répondre, mais je passe tout d'abord brièvement la parole à M. Claude Blanc.
M. Claude Blanc (PDC). Monsieur le président, je crois que, formellement, M. Pagani a raison... (Exclamations.)Le Conseil d'Etat demande le troisième débat, mais le Grand Conseil doit lui répondre pour lui dire s'il est d'accord de passer au troisième débat... Cela fera deux votes au lieu d'un, et cela fera perdre un peu de temps ! Mais, je le répète, formellement, il a raison ! Alors, procédez de cette manière, Monsieur le président ! (Exclamations.)
M. Christian Grobet. 134 !
Le président. Oui, j'y suis, Monsieur Grobet ! Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous lire les articles concernés, cela permettra de clarifier la situation. Vous me dispenserez, j'imagine, de lire celui qui concerne le premier débat, puisque celui-ci est terminé...
L'article 133, concernant le deuxième débat, est le suivant. Alinéa 1: «Le deuxième débat consiste à examiner le projet article par article.» Cela a été fait... Alinéa 2: «Chaque article est mis aux voix. Le président peut le déclarer adopté si aucune opposition n'a été formulée.» Tel a été le cas... L'alinéa 3 de l'article 133 ne nous intéresse pas.
L'article 134 concernant le troisième débat est le suivant. Alinéa 1: «Le troisième débat porte sur le texte résultant du deuxième débat.» Alinéa 2: «Il est porté à l'ordre du jour d'une séance ultérieure.» A l'alinéa 3, il est dit que l'assemblée peut, sur proposition du Conseil d'Etat, notamment, décider par vote d'ouvrir immédiatement le troisième débat... (Le président est interpellé parM. Christian Grobet.)
Oui ! Mais, comme cela, tout le monde sait que vous avez raison, Monsieur le député ! (Rires et exclamations.)Oui, M. Pagani aussi ! Mais laissez-moi le temps de dire que tout le monde a raison, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ! On s'aime tous, c'est merveilleux ! Tous les députés qui viennent de s'exprimer ont raison: c'est formidable !
Nous allons maintenant procéder au vote prévu par l'alinéa 3 de l'article 134 pour voir si nous sommes d'accord sur la proposition du Conseil d'Etat d'ouvrir le troisième débat. Voilà ! Nous procédons au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mise aux voix, la proposition du Conseil d'Etat d'ouvrir le troisième débat est adoptée par 69 oui contre 9 non et 1 abstention.
Le président. Vu le résultat, voilà un vote qui était éminemment utile... (Exclamations.)
Troisième débat
Le président. Nous sommes donc en troisième débat. M. Pierre-Louis Portier a la parole... Qui a dû appuyer par mégarde sur le bouton... Mesdames et Messieurs les députés, pour les futur projets de lois, je vous propose de procéder comme nous le faisons toujours, sinon nous allons prendre encore plus de retard, ce que j'aimerais bien éviter !
Une voix. Pour trente secondes !
Le président. Cela prend tout de même plus de trente secondes ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur le projet de loi dans son ensemble, toujours au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
La loi 8913 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 8913 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 70 oui contre 10 non et 4 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, les choses vont devenir un peu plus compliquées... Nous passons au point 40 de notre ordre du jour. Le Bureau et les chefs de groupe ont décidé de traiter ce point, soit le projet de loi 8920-A, conjointement avec les points 128 et 127 de notre ordre du jour, soit le projet de loi 8389-B et le projet de loi 7597-A, que nous traiterons ensemble dans le cadre du même débat.
Premier débat
Le président. Je remarque, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a trois rapporteurs différents pour trois projets de lois... C'est plutôt bien... Je vous précise que ces projets de lois feront l'objet de votes séparés. (Le président est interpellé par M. Muller.)Oui, c'est ce que j'ai dit, Monsieur Muller, nous allons tenter de faire un débat global, en essayant - autant que faire se peut - de regrouper les sujets. Mais je vous ferai voter ces projets de lois les uns après les autres, sinon nous n'allons - en effet - pas nous en sortir.
Nous commençons par le point 40, soit le projet de loi 8920-A. Monsieur Mark Muller, rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, je me permets, dans un premier temps, d'intervenir sur la procédure de traitement de ces projets...
En effet, je pense qu'il est très important pour la clarté des débats - comme cela se fait d'habitude - d'ouvrir le débat sur le projet de loi 8920, le point 40, de mener le débat sur cet objet et de le voter et, ensuite, d'ouvrir le débat sur le projet de loi 8389. En effet, si les lois modifiées par ces deux projets sont en partie les mêmes et les problématiques liées à l'aménagement du territoire, les questions qui se posent sont, elles, tout à fait différentes. Je crains donc, si nous traitons ces deux projets de lois ensemble, que nous ne comprenions plus rien du tout, et l'on ne saura plus où on en est dans le débat, Monsieur le président.
Je vous prie donc de bien vouloir modifier l'ordonnancement des débats que vous avez annoncé, si cela vous convient.
Le président. Effectivement, Monsieur le rapporteur de majorité. Quand on est aussi convaincant que vous venez de l'être, on ne peut qu'accéder à votre demande ! Monsieur le conseiller d'Etat, vous souhaitez vous exprimer à ce sujet ? Bien, je vous donne la parole.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. C'est exact, il y a deux matières différentes pour les deux premiers projets de lois... Quant au troisième projet, il restera là où il est...
Ce qui m'ennuie, c'est que les deux projets en question touchent en partie les mêmes dispositions et qu'ils modifient la disposition actuellement en vigueur de deux manières différentes. Cela devrait vous obliger - me semble-t-il - à refondre ladite disposition en une seule, car je vous vois mal voter, à 21h30, la version du premier projet et, à 22h30, la version de l'autre ! Je ne pense pas, du reste, que la plénière soit un endroit tout à fait idéal pour effectuer ce difficile exercice de rédaction, dont je crains qu'il nous conduise, en définitive, à un texte incohérent.
Je suis navré de le dire maintenant seulement. Nous avons eu l'occasion de nous en apercevoir au moment du dépôt des rapports et de l'examen détaillé des textes qui ont été proposés. Je ne veux pas interférer dans l'organisation de vos travaux, mais je ne pense pas que vous puissiez résoudre cette contradiction en plénière.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Le problème soulevé par le président du département nous a été signalé il y a quelques semaines déjà, et j'en ai tenu compte dans le rapport que j'ai rédigé sur le projet de loi 8389. Nous modifions effectivement dans les deux projets de lois le même article de loi, et de façon différente. C'est pour cette raison que nous avons prévu de voter le projet de loi 8920, tel quel - sous réserve des amendements qui pourraient être acceptés - et, dans le cadre du projet de loi suivant, le 8389, de voter un amendement à l'article 2, alinéa 2, de la loi sur les zones de développement, qui fusionne les modifications apportées à cette disposition légale dans les deux projets de lois. Cet amendement figure dans mon rapport. Il tient compte des deux modifications apportées à cette disposition.
A l'issue de nos débats sur l'ensemble des deux projets de lois, nous voterons cet article 2, alinéa 2, LGZD, qui correspondra à la volonté exprimée dans le cadre des deux projets de lois. Il n'y a donc à mon sens aucun problème. Un retour en commission ne pourrait aboutir qu'à la rédaction d'un amendement, ce que j'ai déjà fait.
Monsieur le président, je vous propose donc que nous allions de l'avant avec ce projet.
Le président. Monsieur le rapporteur de majorité, vous faites effectivement allusion à l'amendement qui figure en page 6 de votre rapport. Cela étant, nous devrons toutefois être très prudents, parce que d'autres problèmes formels se posent dans le cadre du deuxième projet, notamment des problèmes de numérotation auxquels nous devrons faire attention.
M. Mark Muller. Tout à fait !
Le président. Je vous rappelle que nous avons rencontré, par le passé, quelques petits désagréments à ce sujet dans le cadre d'autres projets de lois. J'espère que nous arriverons à les éviter.
Monsieur le député Pagani, souhaitez-vous exprimer sur l'ordonnancement de nos travaux ? Bien, je vous donne la parole.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. C'est en effet une procédure assez originale, mais le fait est que l'ordre du jour et l'avancement de nos travaux ont permis cet entrechoquement - malheureusement...
Ce qui est encore plus nouveau, c'est qu'un rapporteur de majorité présente un amendement... Enfin ! Nous sortons des travaux de commission, le rapporteur de majorité doit rapporter ce qu'a décidé la majorité, et, là, il présente, lui, un amendement ! Je dois dire que cela me paraît exceptionnel ! D'habitude, c'est le rapporteur de minorité qui propose des amendements en plénière... Là, c'est vraiment le pompon !
Par gain de temps, je vous propose donc de renvoyer ces projets en commission. En effet, nous ne pourrons pas résoudre ces problèmes ce soir. Je le sais - des spécialistes juristes du département nous l'ont dit - car des cas semblables se sont déjà présentés - nous avions alors commis des erreurs de numérotation et autres - qui ont posé des problèmes juridique assez pointus. Ce renvoi en commission permettrait de présenter un rapport de majorité, ou de minorité, ou/et de minorité, peut-être, et les choses seraient plus claires en plénière pour les personnes non initiées, tant du point de vue de la logique urbanistique de notre canton que du point de vue juridique.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Un député par groupe peut s'exprimer à ce sujet.
Monsieur Muller, je récapitule pour clore le débat sur l'ordonnancement de nos travaux... Une demande de renvoi en commission vient d'être formulée, je donnerai donc la parole aux députés qui la demandent pour qu'ils s'expriment à ce sujet. Ensuite, je ferai voter sur cette proposition.
Par rapport à l'ordonnancement de nos travaux, je ferai voter successivement les projets les uns après les autres. Je pense que vous avez raison, il vaut mieux procéder ainsi pour la clarté des débats.
Madame la députée, Michèle Künzler, vous avez la parole.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je voudrais tout d'abord signaler une coquille que j'ai vue en page 4 du rapport... Il est écrit que douze Verts ont voté contre le projet 8920 et qu'un s'est abstenu... Il est vrai qu'après douze verres on ne sait pas très bien ce qu'on vote ! (Rires.)
L'insoutenable légèreté de ce projet, qui propose de «modifier légèrement la loi», nous fait penser qu'il serait peut-être préférable de le renvoyer en commission. Dans le cas d'un autre projet - je l'ai signalé, lors de la dernière séance de commission de l'aménagement - nous rencontrons exactement le même problème. J'aurais très bien pu me taire et accepter qu'il soit renvoyé en plénière une troisième fois, mais je pense, pour le bien de cette République, que nous ne devons plus accepter de traiter des projets qui font trois fois la navette entre la plénière et la commission ! On modifie un projet de loi et, la semaine d'après, on supprime déjà la modification... Ce n'est tout simplement plus soutenable ! Cessons d'être aussi «légers» ! (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (R). Tout à l'heure, au début de cette session, notre collègue Salika Wenger - qui n'est pas là pour le moment - se plaignait que, dans les domaines comme l'économie, l'aménagement, les déput... é-e-sne tenaient pas le coup plus d'une heure... Vous venez d'avoir l'exemple de Michèle Künzler, qui, elle, est capable de tenir une demi-journée sur les problèmes d'aménagement... Je peux vous le dire ! (Rires et exclamations.)
Plaisanterie mise à part, depuis trois ans, la minorité s'oppose par tous les moyens aux propositions de la majorité en vue d'améliorer la législation... (Exclamations.)... en matière d'aménagement et les procédures ! (Exclamations.)Vous trouvez toutes les arguties, en commission, en plénière ! Vous faites la mauvaise tête, vous ne voulez rien faire ! (Rires et exclamations.)Alors, bien sûr, c'est un domaine compliqué ! Du reste, ce matin, j'ai dû tout reprendre pour comprendre... (Exclamations.)Mais, oui, c'est difficile ! Vous avez toujours au coin du bois un Pagani, un Grobet, une Künzler, qui vous trouvent des virgules ou d'autres choses qui ne vont pas !
Moi, je vous dis la chose suivante: ce soir, en plénière, nous avons trois projets de lois à traiter, avec une proposition du rapporteur de majorité, qui a fait l'effort de remettre tout cela en forme - comme des poupées russes qui s'emboîtent avec précision. Alors, je suis favorable à la poursuite du débat; nous voterons, malgré votre mauvaise volonté évidente, car nous devons absolument alléger ces procédures.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Décidément, M. Barrillier va arriver à nous faire pleurer... Ses propos nous émeuvent beaucoup... (Exclamations.)Je crois que ce n'était pas une attaque bien méchante !
Depuis trois ans, vous - les partis de l'Entente - utilisez la technique du saucissonnage. Vous déposez un projet pour proposer une légère modification - sur un bout de phrase - et la semaine suivante - ou presque - vous présentez un autre projet pour proposer une autre modification de la même loi... Ce n'est vraiment plus soutenable !
Pour l'harmonisation de la législation et, aussi, pour la compréhension des citoyens et des citoyennes qui ont encore le courage de suivre nos débats - on sait que l'aménagement est un sujet assez compliqué - le groupe socialiste est d'avis qu'il faut arrêter de compliquer encore les choses. Alors, je vous en prie, renvoyons ces projets en commission et essayons de travailler sereinement à ce moment-là !
M. Christian Grobet (AdG). Lorsque j'ai examiné l'ordre du jour de ce soir, je suis tombé sur le projet de loi 8920, qui fait l'objet d'un rapport de majorité de M. Muller, et il m'a semblé judicieux de proposer un amendement à l'article 2, alinéa 2. M. Muller est venu gentiment vers moi pour me dire que cet amendement était susceptible d'accueillir la faveur d'autres députés... Je serais heureux si tel était le cas... J'aurais l'occasion, peut-être, de développer le contenu de cette proposition d'amendement lors du deuxième débat, au moment de la discussion article par article.
M. Muller a alors attiré mon attention sur le fait que nous allions débattre d'un second projet de loi, le projet de loi 8389, et qu'au fond l'amendement que je voulais soumettre aux voix pour le projet de loi 8920 devrait plutôt être intégré au projet de loi 8389, parce que - si j'ai bien compris - cette deuxième loi allait modifier celle que nous allions voter deux minutes auparavant...
Monsieur Barrillier, je ne veux pas faire de la procédure ni du filibusterpour retarder les choses... Je suis tout à fait prêt à suivre le conseil de M. Muller, et je vous demande d'ores et déjà, Monsieur le président, de prendre note que l'amendement qui a été distribué aux députés concerne le projet de loi 8389 et non le projet de loi 8920, comme indiqué sur la feuille d'amendement.
Cela étant dit, c'est vrai que je trouve quand même un peu malencontreux que l'on vote simultanément deux projets de lois, qui vont être publiés le même jour dans la «Feuille d'avis officielle»... Les citoyens et les citoyennes risquent bien de se demander de quoi il retourne... Nous sommes en train de voter simultanément deux articles, il me semble que cela rend la compréhension difficile pour le citoyen, excusez-moi de vous le dire !
Monsieur Barrillier, vous souhaitez accélérez les procédures... Bien, mais comme cela a d'ailleurs été dit - à mon avis, à juste titre - il faudrait aussi accélérer les procédures parlementaires ! Vous ne l'avez peut-être pas entendu, Monsieur Barrillier, mais moi je l'ai entendu ! Lorsque vous avez dit qu'il fallait accélérer les procédures, quelqu'un a ajouté qu'il faudrait aussi accélérer les procédures parlementaires ! (L'orateur est interpellé par M. Blanc.)Mais, mon cher Monsieur Blanc, en ce qui me concerne, je souhaiterais que cela soit plus bref ! Ce n'est pas ma faute si, tout d'un coup, nous devons traiter deux projets de lois qui sont contradictoires ! D'autant plus que leur publication dans la «Feuille d'avis officielle» risque de susciter l'étonnement de certains citoyens.
Je relève, du reste - et je ne m'en souvenais plus - que le projet de loi... (L'orateur est interpellé par M. Blanc.)Pardon, Monsieur Blanc ? J'ai cru que vous aviez voté tout à l'heure un code selon lequel il ne fallait pas interrompre les députés qui ont la parole... (Exclamations.)Votre interruption m'a perturbé... Monsieur le président, je demande d'avoir trente secondes de plus, parce que M. Blanc m'a fait perdre le fil de mon intervention ! (Rires et exclamations.)Oui, vous rigolez, Monsieur Pagan, mais cela vous arrive aussi, figurez-vous ! (L'orateur est interpellé.)Voilà ! Merci de me le dire !
Le président. Monsieur le député, poursuivez, ne vous laissez pas distraire ! S'il vous plaît, exprimez-vous sur le renvoi en commission !
M. Christian Grobet. Je voudrais simplement souligner que, lorsqu'on avait débattu du projet de loi 8389 - je ne m'en souvenais plus - je m'étais permis, très modestement, d'attirer l'attention sur le fait que quelques renvois ne concordaient pas. Je n'ai pas voulu rédiger des articles, mais les problèmes rédactionnels que j'ai soulevés ont, semble-t-il, été admis par tout le monde, ce qui a provoqué le renvoi en commission.
Pour ma part, je ne propose pas - pour ne pas avoir l'air, Monsieur Barrillier, de vouloir reculer les échéances - le renvoi en commission.. Je fais une autre proposition, la voici: c'est que le département nous présente un texte unique à partir de ces deux projets de lois, pour qu'on puisse voter sur une loi et pas sur deux lois, avec tous les débats que cela implique. Je crois qu'on gagnerait beaucoup de temps en remettant ce vote à plus tard. On peut le fixer à la prochaine session, le jeudi soir à 20h30, pour que vous soyez sûrs que cet objet soit traité. Il me semblerait judicieux que l'on puisse voter sur un texte complet qui nous permette de nous y retrouver. Sinon, j'ai bien peur que nous partions - ce n'est pas dans votre intérêt - dans un débat d'une heure... Alors que, si les services de M. Moutinot nous «mettent cela en musique», le débat sera certainement beaucoup plus court.
Le président. Merci, Monsieur le député. Dois-je conclure de vos propos que vous faites formellement une proposition d'ajournement à terme ?
M. Christian Grobet répond hors micro. Exactement !
Le président. Je comprends vite lorsqu'on m'explique longtemps, Monsieur le député !
Monsieur Mark Muller, rapporteur de majorité, je vous donne la parole.
M. Mark Muller. Je n'ai pas demandé la parole, Monsieur le président !
Le président. Pourtant, vous étiez inscrit ! Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter... (M. Christian Grobet s'adresse au président hors micro.)Monsieur le conseiller d'Etat Moutinot va vous répondre s'il le souhaite.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Si tel est le souhait de votre Grand Conseil, nous préparerons un texte pour le mois prochain, il sera une synthèse des projets qui nous sont soumis aujourd'hui. Nous vous ferons une proposition.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat ! M. Muller a renoncé...
Une voix. Il est à nouveau inscrit !
Le président. Monsieur Muller, êtes-vous à nouveau inscrit ? (Le président est interpellé par M. Barrillier.)Monsieur Barrillier, vous vous êtes déjà exprimé sur la demande de renvoi en commission, je crois...
M. Gabriel Barrillier. Oui, mais on me donne la parole, alors je la prends ! (Exclamations.)Enfin !
Le président. Non ! C'est une erreur si votre micro est enclenché ! Je ne vous donne pas la parole, Monsieur Barrillier... Un député par groupe, seulement ! Monsieur Mark Muller, vous avez la parole...
M. Gabriel Barrillier. Si dans un mois le département nous présente un projet de loi conjoint... (Exclamations.)
Le président. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît, Monsieur Barrillier ! Je donne la parole à M. le député Muller. (Exclamations.)
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je suis navré, Monsieur Barrillier, c'est la deuxième fois de la soirée qu'un libéral prend la place d'un radical dans le tour de parole... J'en suis absolument désolé ! (Exclamations.)
Je crois avoir compris le sens dans lequel vous souhaitiez intervenir, Monsieur Barrillier... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Je suis assez d'accord avec vous sur le fait que nous pouvons nous rallier à la proposition de M. Grobet, pour autant que cet objet soit effectivement mis à l'ordre du jour et traité lors de la prochaine session, et que cela ne soit pas remis en question.
Ainsi, nous pourrons nous prononcer sur un texte unique, qui fusionne les différentes modifications légales proposées dans les deux projets de lois. C'est en effet une façon de gagner un peu de temps et de déboucher sur une modification législative publiée en une fois dans la «Feuille d'avis officielle», ce qui évitera d'avoir des doutes par la suite.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Un accord semble... (Le président est interpellé par M. Grobet.)
Mais vous vous êtes déjà exprimé, Monsieur le député ! Une personne par groupe peut s'exprimer, et vous l'avez déjà fait pour l'Alliance de gauche. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas donné la parole à M. Barrillier. Egalité de traitement oblige, je ne vous donnerai pas la parole !
Par ailleurs, Monsieur Pagani, un accord semble se dessiner sur l'ajournement à terme, puis-je partir du principe que vous renoncez... (Le président est interpellé.)Attendez ! Une chose à la fois ! Puis-je partir du principe que vous renoncez à votre demande de renvoi en commission ? (M. Rémy Pagani répond hors micro.)
Bien ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets d'abord la demande d'ajournement à terme. Je précise que si l'ajournement est accepté, le projet restera dans le cours normal de l'ordre du jour. Aucune préséance particulière ne sera accordée à ces projets de lois... (M. Christian Grobet demande la parole.)
Alors, veuillez vous exprimer très brièvement, Monsieur le député ! Mais vraiment très brièvement !
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, excusez-moi, si j'interviens, c'est pour que nos débats soient plus sereins !
J'aimerais d'abord dire que je vous connais, Monsieur Moutinot, de très longue date, et que je sais que vous êtes un homme de parole. Je vous demande simplement de bien vouloir faire préparer ce texte relativement rapidement, pour que les députés de la commission puissent le relire avant les débats - sans renvoi en commission - afin, précisément, que ces débats se déroulent le mieux possible dans un mois. Je voudrais juste éviter qu'on ait ce texte sur la table le jour du débat. C'est tout ! Ce serait bien pour les rapporteurs... Je ne propose pas un délai fixe. Mais, s'il était prêt dans les dix ou quinze jours, ce serait une bonne chose. Je le répète, cela permettrait à la commission d'examiner le texte, sans qu'il soit nécessaire de le renvoyer en commission, ce qui faciliterait les débats...
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Muller, vous avez redemandé la parole ? Je vous la donne. Ensuite, je ferai voter...
Une petite précision, avant que vous ne preniez la parole: si l'ajournement à terme est voté, dans la mesure où n'allons pas terminer de traiter les objets de ce département durant cette session-ci, ce département sera prioritaire lors de la prochaine session; puisque ce projet de loi n'aura pas été voté, il figurera donc en tête du département. Cela répond-il à votre attente, Monsieur Grobet ?
M. Christian Grobet. Je proposais qu'il soit traité le jeudi soir à 20h30, lors de la prochaine session !
Le président. Oui, mais cela n'est pas possible ! On ne peut pas faire cette proposition avant le dépôt de la prochaine session, même si elle semble effectivement très judicieuse. Le Bureau l'examinera en temps et lieu, lorsque nous préparerons la prochaine session.
Monsieur le député Muller, vous avez la parole.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut respecter l'esprit dans lequel M. Grobet a fait sa proposition d'ajournement. C'est effectivement dans l'optique de reprendre ce projet de loi lors de la prochaine session, en point fixe. Je rappelle que cette méthode existe et qu'elle est notamment utilisée pour les rapports sur des initiatives populaires, c'est-à-dire dans les cas où l'on doit respecter des délais. En l'occurrence, la proposition de M. Grobet consiste à ajourner ces projets à la prochaine session, le jeudi à 20h30. Et c'est bien dans cet esprit-là que nous allons voter.
Je souhaite que l'esprit de cette proposition soit respecté, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie de votre suggestion, Monsieur le rapporteur de majorité. Cela étant, je ne vois pas tellement pour quelle raison il faudrait mettre en point fixe un projet de loi qui sera le premier objet à être traité dans le cadre de notre ordre du jour. Nous sommes sûrs qu'il sera traité, puisqu'il sera le premier ! Il est donc inutile de compliquer les choses et de le mettre en point fixe, alors qu'il ne peut qu'être traité ! Votre demande est garantie. Je crois que le débat peut s'arrêter à ce stade.
Je vais vous proposer de voter sur l'ajournement à terme, et nous pourrons passer à autre chose ! Cela fait quand même trois quarts d'heure que nous parlons de procédure, et il serait bon que nous avancions un peu dans nos débats !
Monsieur Pagani, vous voulez la parole ? Bien, je vous la donne, mais soyez bref.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président ! Je veux juste m'assurer que cet ajournement porte sur les trois projets de lois qui nous sont soumis ce soir... (Exclamations.) ...qui seront réunis en un seul...
Le président. Vous faites bien de poser la question, Monsieur le député. Je ferai voter simultanément l'ajournement sur les trois projets de lois, puisque que tout le monde semble être d'accord.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la proposition d'ajournement à terme présentée par M. Christian Grobet pour les points 40, 127 et 128, soit les projets de lois 8920-A, 7597-A et 8389-B. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, l'ajournement à terme des projets de lois 8920-A, 7597-A et 8389-B est adopté par 77 oui et 1 abstention.
Le président. Ces trois projets de lois seront donc traités lors de notre prochaine session. Ils figureront avant les objets du département examiné en premier. Je crois que les choses sont claires.
Nous passons maintenant au point 41 de notre ordre du jour.
Premier débat
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de majorité. Je rappelle que ce projet de loi émane des députés de l'Entente. Il vise à remettre en question les compétences des commissions d'urbanisme et d'architecture.
Deux arguments ont été avancés à l'appui de ce projet. Le premier est que chacune des commissions devrait se prononcer dans des domaines bien définis, afin d'éviter des avis contradictoires. Le deuxième concerne spécifiquement la commission d'architecture, qui ne devrait donner de préavis que sur demande du département, cela afin d'alléger les procédures.
Nous avons donc procédé à l'audition des deux commissions concernées, auditions qui ont été très instructives et nous ont permis de mieux comprendre leur rôle et le travail important qu'elles fournissent avec beaucoup de sérieux.
Contrairement à ce que craignent les auteurs du projet, il est rare - on a pu le remarquer - que ces commissions donnent des avis contradictoires. En revanche, il semble que les lenteurs de la commission d'architecture proviennent souvent du fait que les projets soumis par les mandataires ne répondent, la plupart, du temps pas aux critères objectifs fixés par la commission. C'est la raison principale qui explique les lenteurs reprochées à cette commission.
Limiter, comme le voudraient les auteurs de ce projet de loi, les compétences de ces deux commissions, c'est, d'une part, appauvrir le débat sur l'aménagement ou l'architecture dans ce canton, et, d'autre part, courir le risque que des procédures de recours ne soient lancées a posteriori, ce qui serait beaucoup plus long et pourrait effectivement entraîner des blocages.
Je vous engage donc à suivre la majorité de circonstance et à rejeter ce projet de loi.
M. Mark Muller (L), rapporteur de minorité. Une fois n'est pas coutume, je me retrouve du côté de la minorité... J'espère qu'elle se transformera en majorité, ce soir.
Vous l'aurez compris, nous vous invitons à entrer en matière sur ce projet de loi et à l'adopter.
Tout d'abord, je regrette le vote de commission, qui a permis à la majorité de circonstance de gauche de refuser l'entrée en matière de ce projet de loi. Nous étions pleins de bonnes dispositions... (Rires et exclamations.)Nous étions prêts à faire un certain nombre - je ne dirai pas de concessions - de compromis, pour répondre positivement aux propositions d'amendement de M. Moutinot... La gauche en a voulu autrement; elle a préféré refuser l'entrée en matière. Alors, il est bien évident que ce soir, en plénière, nous ne sommes plus forcément dans d'aussi bonnes dispositions, et puis ce n'est pas le lieu de faire un débat de commission. Nous ne souhaitons donc pas voter d'amendements sur ce projet de loi.
Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à voter ce projet de loi sans modification, sous une réserve: indépendamment de ce que l'Alternative a proposé ou n'a pas proposé en commission, nous avons nous-mêmes estimé, notamment à la suite de l'audition des membres de la commission d'architecture, qu'il n'y avait pas lieu de modifier l'article 15, alinéa 2 de la LCI. En effet, confier aux seules communes la compétence de trancher les questions d'esthétique ne nous paraissait pas forcément opportun. Les architectes que nous avons auditionnés à ce sujet nous ont convaincus. Nous renoncerons donc, de nous-mêmes, à cette disposition.
Pour le surplus, il me paraît extrêmement important de débroussailler un petit peu les compétences des commissions consultatives du DAEL, dans la mesure où l'on a pu se rendre compte que, bien souvent, des préavis contradictoires sont rendus par ces différentes commissions et que le département éprouve parfois de la peine à trancher entre ces préavis. Les requérants et leurs architectes sont renvoyés, plusieurs fois s'il le faut, à répondre à des préavis contradictoires, ce qui, évidemment, ne facilite pas la tâche des requérants.
Nous souhaitons donc clarifier les compétences respectives des commissions consultatives du DAEL. A chacun son travail, à chacun sa spécialité. Nous pensons que cela permettra de faire avancer plus rapidement un certain nombre de dossiers.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). A la fin de nos longs débats en commission, nous aurions été prêts à nous rallier à l'amendement proposé par M. Moutinot à l'article 4, alinéa 1, qui permettait la suppression du double passage des dossiers à la CMNS et à la commission d'architecture. Cela nous aurait semblé acceptable, puisque le département nous affirmait qu'il était extrêmement rare que la commission d'architecture, la CMNS et la commission d'urbanisme fournissent des préavis contradictoires. Mais les députés de l'Entente ont voulu maintenir une position intransigeante sur l'article 1, alinéa 1. Accepter un compromis aurait été possible... Mais accepter la teneur de l'article 1, alinéa 1, aurait été de la compromission !
C'est pourquoi ce projet de loi n'a pas été accepté en commission: cela est dû au hasard d'une majorité de circonstance. Sinon, nous aurions refusé le texte proposé et fait, sans hésiter, un rapport de minorité.
Mme Michèle Künzler (Ve). Si vous avez pris le temps de lire le rapport de minorité, vous aurez pu constater que les débats de commission n'ont pas été tristes... Bonjour l'ambiance ! Il faut dire que les choses se passent toujours un peu bizarrement à la commission de l'aménagement.
Finalement, ce projet de loi a une importance toute relative, mais il est quand même significatif pour nous, parce qu'il est symbolique. Il est l'illustration, de la part de la droite, d'une vision simplificatrice du monde, qui, au fond, devient vite simpliste...
Le monde est en fait un peu plus subtil... Et nous, les Verts, nous nous battons contre un monde univoque, où les décisions seraient automatiques. Nous pensons qu'il faut sortir d'une réflexion binaire. Mais, attention, nous ne sommes pas en train de vous vanter un système arbitraire ! Nous prônons un système qui peut supporter la diversité, une diversité des points de vue, qui permet d'avoir plusieurs préavis de commissions. Parce que, finalement, le problème ne porte pas sur la diversité des points de vue, mais sur la décision qui est prise. En l'occurrence, il vaudrait mieux fixer des échéances pour rendre les préavis et la décision. Et pour cela, il faudrait plutôt mettre en cause le DAEL. Ce n'est certainement pas avec ce projet de loi que vous allez changer quoi que ce soit !
Nous sommes favorables à une vision pluraliste, mais aussi à des décisions qui soient prises en temps voulu.
M. André Reymond (UDC). Dans le cadre des auditions de la commission, M. Moutinot - il faut le relever - a indiqué que les différents services sont consultés simultanément pour que les décisions soient prises plus rapidement.
Je ne vais pas reprendre le débat de commission... Comme cela a été dit, la gauche a obtenu une majorité de circonstance.
Tout va trop lentement en matière de construction à Genève, et je crois que tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut faire quelque chose pour que cela aille plus vite. Pour gagner du temps, il serait judicieux de supprimer le passage des dossiers dans plusieurs commissions, qui souvent se contredisent, et d'alléger les procédures.
L'UDC vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir le rapport de minorité.
M. Gabriel Barrillier (R). L'UDC, pour des raisons indépendantes de sa volonté, n'était pas représentée, lors des séances de commission. Enfin, bref, je note avec plaisir qu'elle s'est rachetée ce soir en rejoignant la majorité, et je l'en remercie.
Madame Künzler... Je peux m'adresser à vous ? C'est permis?
La présidente. Monsieur le député, vous devez...
M. Gabriel Barrillier. Madame la présidente, je m'adresse à vous et à Mme Künzler en même temps... (Commentaires.)La représentante des Verts nous dit qu'elle est favorable à une vision pluraliste, mais que les décisions doivent être prises en temps voulu... Mais ce n'est pas possible ! Une vision pluraliste... En commission de l'aménagement, ce sont les femmes qui mènent le bal ! Je le reconnais, c'est vrai ! (Exclamations.)
Une voix. Vous dansez, Madame !
M. Gabriel Barrillier. Soit Mme Schenk-Gottret, à qui je rends hommage ici, qui est une fine juriste... Soit Mme Michèle Künzler, sa collègue... Donc, il est très difficile de se mettre d'accord et de prendre des décisions, parce qu'elles accrochent et qu'elles campent fermement sur leur position. Je ne crois pas du tout à une vision pluraliste et à des décisions qui se prennent rapidement. Et c'est ce qui se passe avec la commission de l'urbanisme et la commission de l'architecture, dont les préavis sont quelquefois contradictoires ! Soyons sérieux, Mesdames et Messieurs les députés: nous ne voulons pas soulever une guerre de tranchées ! Nous ne voulons pas sexualiser ces deux commissions !
Ce projet de loi vise simplement à clarifier les champs d'activité de ces deux commissions qui sont appelées très logiquement à prendre position, à donner des préavis en matière d'urbanisme et de construction, étant précisé que c'est le département qui tranche. Et s'il est possible de supprimer des doublons et de travailler de façon plus rationnelle, cela permettra d'obtenir des décisions plus rapidement, et nous pourrons répondre aux besoins de la population.
J'ai donné des chiffres tout à l'heure, je les rappelle encore une fois: taux de vacance: 0,17%; logements construits en 2003: 1209 pour 6700 habitants de plus. Voilà les faits ! Nous ne voulons pas faire une guerre de tranchées ni de religion, nous voulons simplement améliorer les choses, en toute logique !
Le parti radical votera cette loi comme un seul homme !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Christian Grobet (AdG). Je déplore vivement ce projet de loi...
J'aimerais quand même rappeler que lorsqu'on construit, ce n'est pas pour un ou deux ans... Les constructions doivent durer des décennies !
Même si je comprends et partage le point de vue selon lequel il faut traiter les requêtes en autorisation de construire le plus rapidement possible, il n'empêche qu'il faut aussi les examiner avec beaucoup d'attention pour éviter des solutions malencontreuses. Et à ce sujet, j'entends constamment des citoyennes et des citoyens se plaindre de telle ou telle construction, qui est totalement en rupture de gabarit, ou des constructions qui ont été réalisées sans tenir compte de la planification d'un quartier, de démolitions reconstructions particulièrement malencontreuses... On pourrait en citer encore... Les exemples sont innombrables: l'ancien Hôtel de Russie qui a été reconstruit à l'angle du quai du Mont-Blanc et de la rue du Mont-Blanc, l'ancien Café du Siècle, avec le bâtiment de l'UBS sur la place Cornavin, et j'en passe... Sans parler des bâtiments qui ne s'intègrent pas encore aujourd'hui ! D'ailleurs, des gens se plaignent du bâtiment - c'était celui de la Caisse d'Epargne - en bas de la Corraterie, qui ne s'intègre pas du tout, et de celui qui est en haut du boulevard des Deux-Ponts.
Il est donc, à mon sens, important d'avoir plusieurs avis, et, selon mon expérience, en tant que responsable du département des travaux publics durant douze ans, il est complètement faux de dire que de consulter plusieurs commissions a pour effet de ralentir les procédures, puisqu'elles ont la même date d'échéance pour rendre leur préavis. Et le chef du département, si les préavis ne sont pas rendus à la date fixée... (L'orateur est interpellé.)Oui, Monsieur Ducret ! ... peut s'en passer, y compris du préavis d'une commune.
Quelle est la raison invoquée, pour justifier ce projet de loi ? Qu'il puisse y avoir deux avis contradictoires... C'est ce que dit M. Staehelin, qui a quitté le département entre-temps, il lui semble plus plus judicieux que les communes ne se prononcent pas sur les questions d'esthétique... Je regrette de le dire, parce que j'ai beaucoup d'estime pour lui, mais il semble évident pour des fonctionnaires - et je ne veux pas le dire d'une manière péjorative - de préférer traiter des dossiers dont les préavis ne sont pas contradictoires, c'est l'idéal ! C'est évident, cela leur évite d'avoir à prendre des décisions ! Excusez-moi, Mesdames et Messieurs, mais notre rôle, dans cette République, n'est pas de ne pas prendre de décision ! On ne doit pas se satisfaire de préavis qui iraient tous dans le même sens !
En ce qui me concerne, j'étais très attentif aux préavis des communes. On dit aujourd'hui - c'est malencontreusement encore une vieille habitude de la police des constructions - que les communes ne devraient pas se prononcer sur l'aspect esthétique, notamment sur les toits à deux pans, etc. Pour ma part, je trouve qu'il est parfaitement normal que les communes, qui s'inquiètent de maintenir unité architecturale, formulent un préavis ! Et il m'est arrivé, quand j'étais au département, de dire oui au préavis de la commune et non au préavis de la commission d'architecture ! J'aime bien l'architecture contemporaine, mais c'est vrai qu'on peut être étonné de certaines réalisations situées dans des sites très exposés comme le coteau de Cologny. J'ai entendu beaucoup de citoyennes et de citoyens se plaindre de constructions assez agressives, qui avaient pourtant reçu des préavis négatifs de la commune, lesquels n'ont pas été pris en considération.
Le fait qu'il y ait deux préavis contradictoires ne pose pas problème. Comme l'expliquait M. Vernet, le préavis n'est qu'un préavis: on n'est pas obligé de le suivre, puisque c'est au chef du département de trancher, après examen. Je vous dirai que j'étais beaucoup plus intéressé lorsque les préavis étaient négatifs que lorsqu'ils étaient positifs; en effet, quand un dossier ne comporte que des préavis positifs, on peut se demander si l'on n'est pas en train de faire une erreur. Par contre, si on a un ou deux avis négatifs, cela nous interpelle, alors on examine le dossier avec plus d'attention. Cela ne veut toutefois pas dire que celui qui a donné un préavis négatif a forcément raison...
Je peux le dire sans me vanter: j'ai eu très peu de contestations - et tout le monde le sait - pendant les douze années durant lesquelles j'étais au département. Et je vais vous en donner la raison, Monsieur Barrillier: c'est que, moi, j'écoutais les gens, et quand quelqu'un me disait qu'un dossier posait problème, je l'examinais, et je corrigeais le projet s'il y avait lieu ! Et si le préavis négatif était abusif, je l'écartais. Mais, vous, vous voulez éviter ce débat ! Vous pouvez le faire, puisque vous avez la majorité, mais, je vous le dis: c'est une profonde erreur ! Cela conduira à la médiocrité. Et laisser passer des dossiers sans qu'un avertissement ne soit donné au chef du département conduira - vous le verrez - à refaire des erreurs architecturales, comme cela a souvent été le cas dans la période d'après-guerre. (Applaudissements.)
Le président. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits: MM. Rémy Pagani, Jean Spielmann, Alain Etienne, Claude Aubert, Olivier Vaucher, Michel Ducret. Je donnerai ensuite la parole aux rapporteurs, puis au Conseil d'Etat, et je vous ferai voter.
M. Rémy Pagani (AdG). Je relève tout d'abord qu'il y a un petit problème sur la forme...
On nous dit que, comme nous n'avons pas voulu entrer en matière sur les propositions d'amendement du département, nous allons être punis par la minorité qui va adopter le projet de loi tel quel, sans tenir compte de l'amendement en question... C'est ce que vient de dire M. Mark Muller ! En fait, cela revient à nous faire payer - à nous, la minorité - l'absence d'un député de la majorité à la commission ! Je trouve ce mode de faire assez pernicieux... En somme, parce que vous n'arrivez pas à faire bloc sur vos positions, Monsieur Muller, vous faites payer à la minorité de jouer le rôle qui est le sien: en l'occurrence, de s'opposer à ce projet et d'expliquer pourquoi elle le fait. Ce procédé est extrêmement désagréable, mais cela fait partie de votre manière d'agir habituelle...
Cela étant, M. Grobet vient d'expliquer qu'il fallait tenir compte de l'ensemble des avis donnés par les uns et les autres... Une boutade circule selon laquelle il y aurait 400'000 architectes dans notre République... Cela signifie simplement que les gens sont très préoccupés de leur cadre de vie bâti, et ils ont bien raison, parce que le cadre de vie n'est pas sans influence sur chacun de nous.
Nous allons nous retrouver dans la situation d'il y a trente ans, à l'époque de M. Vernet - avant M. Grobet... Il avait fallu que des citoyens recourent au Tribunal fédéral pour déplacer de 200 mètres l'entrée d'un parking, d'une rue à l'autre... Cela s'est passé dans mon quartier, à la Jonction. Alors, vous induisez ce type de procédure, car, dès lors que les erreurs urbanistiques importantes ne seront pas vues - que ce soit par les citoyens, voire par la commission d'urbanisme - les citoyens se verront dans l'obligation de remédier à la situation et ils déposeront des recours - à raison - jusque devant le Tribunal fédéral pour faire valoir leur droit à un bon urbanisme.
S'agissant du fond, Monsieur Muller, j'ai dernièrement lu l'article d'un journaliste qui se demandait pourquoi M. Luis Borges, un grand écrivain latino-américain, était venu se faire enterrer au cimetière des Rois... Après une étude approfondie, ce journaliste s'est rendu compte que c'était un des lieux, entre l'Arve et le Rhône, que Luis Borges avait apprécié au cours de sa vie et qu'il avait gravé dans sa mémoire. Il voulait donc se faire enterrer à cet endroit. Moi qui suis né à la Jonction et qui y habite, je me suis demandé pourquoi un tel homme était venu se faire enterrer à cet endroit... C'est qu'il devait y avoir des choses très importantes. En fait, en me promenant dans ce quartier, que je connais pourtant parfaitement bien, j'ai découvert des effets urbanistiques très intéressants.
Or il me semble que c'est cela que vous remettez en cause aujourd'hui, la considération pour l'urbain qu'avaient nos grands-parents, nos arrière-grands-parents, notamment en construisant la rade de Genève. Vous remettez en cause cette logique en matière d'aménagement. Nous ne pouvons que nous y opposer avec tous les moyens à notre disposition.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de majorité. Les partis de l'Entente et l'UDC se trompent de cible avec ce projet de loi. Peut-on affirmer sérieusement que le fait de modifier légèrement les compétences de ces deux commissions va aboutir à juguler la crise du logement ? Il faut rester sérieux et pragmatique: personne ne peut croire à ces pseudo-allègements de procédures !
M. Grobet l'a bien dit tout à l'heure, de telles mesures - comme celle de vouloir brider ces deux commissions, voire d'autres - contribuent à appauvrir le débat et empêche d'agir en amont pour élaborer des projets qui tiennent la route.
Contrairement à ce qu'a dit M. Muller - on l'a relevé notamment lors des auditions - il y a peu d'avis contradictoires. Certains peuvent éventuellement le regretter, mais on ne peut en tout cas pas invoquer cet argument pour dire que les blocages sont dus aux débats qui ont lieu dans les commissions, d'autant moins que le DAEL demande que les préavis soient rendus à une date fixe, la même pour tous. Au cours des auditions, notamment celle des représentants de la commission d'architecture, nous avons effectivement eu l'impression que ceux-ci étaient blessés par la suspicion jetée sur le sérieux de leur travail. Ces auditions ont donc été utiles à cet égard, car elles nous ont montré les compétences de ces personnes et l'objectivité avec laquelle elles s'efforcent de travailler. Il me semblerait vraiment plus sage, comme vous l'avez proposé au début, d'abandonner le préavis exclusif des communes et de renoncer à ce projet de loi qui, franchement, n'apporte rien.
M. Alain Etienne (S). J'aimerais revenir sur les propos de M. Barrillier... Comme il est sorti, soit vous lui transmettrez, soit il lira le Mémorial... (Remarques.)
Tout à l'heure, M. Barrillier a fait état de la représentativité des femmes à la commission d'aménagement du canton, dans les rangs de la gauche... C'est vrai, et je m'en réjouis, de nombreuses femmes représentent la gauche dans cette commission: Mme Mahrer, Mme Künzler, Mme Schenk-Gottret, Mme Fehlmann Rielle... Et il y avait encore Mme Blanchard-Queloz tout récemment.
Par contre, du côté de la droite, nous n'avions effectivement, jusqu'à maintenant, que des hommes en face de nous; or heureusement, et même si nous regrettons son absence, M. Dethurens a été remplacé récemment par Mme Guichard qui a rejoint notre commission. Alors, je m'en réjouis, mais j'invite la droite - l'Entente - à laisser place aux femmes dans ses rangs, cela également en matière d'aménagement du territoire. Nous pourrions ainsi éviter les blocages auxquels nous assistons actuellement dans nos travaux.
Cela dit, j'aimerais revenir sur l'objet qui nous concerne: supprimer les préavis, c'est effectivement empêcher que ne soient détectés les défauts que peuvent présenter certains projets, et c'est donc empêcher la possibilité de les améliorer. Cela risque d'engendrer des recours et, ce que vous dénoncez déjà, d'allonger encore les procédures. Il vaut donc mieux tout entreprendre pour éviter des procédures juridiques inutiles.
M. Mark Muller (L), rapporteur de minorité. J'aimerais revenir sur certaines interventions, notamment sur la vôtre, Monsieur Pagani...
Vous nous faites en effet un procès d'intention... Vous vous placez presque sur un plan moral dans le domaine de l'urbanisme, en nous accusant de vouloir bafouer l'héritage de nos ancêtres... C'est tout juste, Monsieur Pagani, si vous ne nous accusez pas d'attenter à la paix des morts !
Loin de nous l'idée de vouloir prêter moins d'attention à l'urbanisme dans notre ville de Genève ou dans notre canton: au contraire, nous y sommes très attachés, et tout autant que vous ! On a pu dire à certaines époques que vous n'aviez pas le monopole du coeur... On peut dire également que vous n'avez pas le monopole du bon goût architectural ni de l'urbanisme parfait !
Nous souhaitons simplement éviter que deux voire trois commissions du département donnent leur avis sur la même question... A notre sens, une commission composée de spécialistes suffit amplement à cette tâche. Lorsque deux commissions se prononcent sur le même sujet, il y a de forts risques pour que leurs avis soient contradictoires, ce qui provoque le blocage des dossiers.
S'agissant de l'esthétique, je voudrais vous rendre attentifs au fait que, dans la mesure où nous renonçons à modifier l'article 15 de la LCI, nous ne modifions absolument en rien la manière dont on traite ces questions dans le domaine de la construction. Les choses restent en l'état à ce niveau-là: plusieurs préavis peuvent être recueillis et nous ne touchons pas celui de la commune. Quelques députés ont laissé entendre que nous réduisions les compétences communales ou l'attention apportée aux questions esthétiques... Sur ce point, ils sont complètement à côté du sujet, puisque, je le répète, la réglementation actuelle sur ce point n'est pas du tout touchée par ce projet de loi.
M. Claude Aubert (L). Cette discussion me ramène au Xe ou au XIe siècles... En effet, à cette époque, un médecin arabe avait dit ceci: «Lorsqu'un patient consulte plusieurs médecins, il additionne les erreurs de chacun»... Il additionne les erreurs de chacun !
Il est assez intéressant de savoir si le nombre de commissions et le nombre de préavis ne tombent pas, par analogie, dans même cas... C'est donc que plus il y a de commissions sollicitées, plus les erreurs potentielles augmentent. Dans ce sens-là, la garantie d'un travail de qualité n'est pas du tout forcément fonction du nombre de préavis donnés. (Applaudissements.)
M. Olivier Vaucher (L). Les différents membres des deux commissions concernées, que nous avons auditionnés, ont relevé une chose fort juste: les projets qui leur sont présentés manquent souvent de précision ou sont incomplets, ce qui leur donne du travail supplémentaire. Malheureusement, trop de mandataires, pas suffisamment qualifiés, ne font pas le travail qu'ils devraient.
D'ailleurs - c'est peut-être un scoop... - notre groupe va très prochainement déposer un projet de loi dans ce sens-là, dans le but de soulager le département en mandatant ce que nous appelons des MPQ, c'est-à-dire des mandataires professionnellement qualifiés. Lorsque ces personnes seront agréées et figureront sur une liste du département, elles pourront, je pense, effectuer le travail de ces commissions. Ces dernières réalisent un excellent travail, bien sûr, mais, malheureusement, certaines d'entre elles font doublon, dans la mesure où leur composition est la même. Il n'est donc pas forcément utile que les projets fassent le tour de toutes ces commissions.
Nous déposons ce projet de loi dans le but de modifier et de simplifier les procédures... Peut-être qu'à l'avenir d'autres projets de lois, comme je l'ai évoqué, permettront d'accélérer encore les procédures pour pouvoir aller de l'avant en matière de construction de logements à Genève.
Mme la députée Fehlmann - si je ne m'abuse - pense que ce projet de loi jette une suspicion sur le sérieux du travail des personnes composant ces commission... Non, ce n'est pas du tout le cas ! La qualité du travail de ces personnes n'est absolument pas mise en cause, pas plus que celle du travail des collaborateurs du département de M. Moutinot ! Le but final est tout simplement de diminuer le nombre d'intervenants de manière - comme M. Barrillier l'a rappelé tout à l'heure - à pouvoir agir avant que nous ne nous retrouvions dans une situation inextricable en matière de construction de logements et d'aménagement du territoire à Genève.
C'est pour cela que nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi tel que nous l'avons déposé.
M. Michel Ducret (R). M. Grobet se trompe quelque peu... Ou, plutôt, il pèche par angélisme...
Je souhaiterais qu'il ait raison, mais la pratique montre que les requérants sont souvent «baladés» avec des demandes complémentaires, qui présentent quelquefois des exigences contradictoires. Et je tiens à préciser, d'ailleurs, que ces exigences n'émanent pas forcément des commissions. Elles émanent aussi des services du département qui ne sont pas toujours sur la même longueur d'onde.
Et je peux prouver ce que je dis ! Une fois, j'ai obtenu un préavis selon lequel il s'avérait que mon projet était trop dense et, sur la même page A4, Mesdames et Messieurs - tenez-vous bien ! - qu'il n'était pas assez dense... ! Et, très récemment, dans un village genevois, un service de l'Etat a demandé à un autre requérant de densifier son projet: de faire deux étages et combles habitables, alors qu'un autre service du département - dans ce cas, les commissions ne sont pas en cause - lui a demandé de faire un étage avec combles habitables... Comment voulez-vous que l'on puisse avancer dans ces conditions !
Et puis, quand vous téléphonez ensuite à la police des constructions, on vous répond très gentiment qu'on est navré, qu'il faut nous débrouiller, qu'on ne sait plus quoi nous dire... Ça, c'est la réalité, Mesdames et Messieurs ! Ce n'est pas une invention ! Je peux vous prouver tout ce que je viens de vous dire à propos de ces deux exemples.
Pour contester une décision, encore faut-il en avoir une ! Et tant que la décision n'est pas rendue, il n'est pas possible de faire avancer le dossier. Il n'est pas acceptable de ne pas rendre une décision.
Les situations courtelinesques sont finalement légion... Je ne sais pas si ce projet de loi va résoudre tous les problèmes qui se posent, mais, au moins, il va y contribuer et éviter en partie que de tels cas de figure ne se reproduisent.
Mme Fehlmann Rielle a raison, cela ne changera pas grand-chose à la production de logements dans l'immédiat: ça, c'est quasiment sûr ! Mais cela évitera que les requérants ne se découragent, que quelques-uns de mes confrères n'aient une crise cardiaque ou fassent une dépression nerveuse. Car on traite leur travail par-dessous la jambe, en ne donnant pas de véritable décision.
Rien que pour cela, Mesdames et Messieurs, il faut accepter cette petite modification, qui n'est pas de nature à diminuer la qualité de la production architecturale à Genève ni, encore moins, celle de la protection de notre patrimoine, puisqu'elle ne concerne pas la commission des monuments, de la nature et des sites - qui, elle, continue à faire un excellent travail de protection... Je ne crois pas qu'il soit possible de protéger davantage le patrimoine bâti qu'on ne le fait aujourd'hui à Genève ! Et il suffit, pour s'en rendre compte, d'aller ailleurs en Suisse.
Notre système évite sans doute les grosses erreurs architecturales, mais, Mesdames et Messieurs, il faut aussi savoir qu'il coupe les ailes à toute inventivité. Et, plus vous demandez d'avis, plus ce phénomène s'accentue... En effet, chaque organisme chargé de donner son avis prend ses petits ciseaux et coupe un petit morceau du projet... Ainsi, les trois quarts du temps, les projets ne sont plus que l'expression de la seule neutralité fonctionnelle...
Voilà, Mesdames et Messieurs, quelle est la situation. Voilà, sans doute, ce qui rend nécessaire la petite modification souhaitée à travers ce projet de loi.
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'avais formulé quelques propositions d'amendements... Lors du traitement de ce projet de loi en commission, l'Alternative n'en a pas voulu. Aujourd'hui, c'est l'Entente qui n'en veut pas... Par conséquent, il me paraît totalement inutile que je tente de les proposer à nouveau, puisque personne n'en veut...
Je vous rends simplement attentifs à ce que vous êtes en train de faire... S'agissant de la commission d'urbanisme, vous êtes en train de soustraire à sa compétence les préavis en matière de constructions d'une certaine importance, ce qui peut tout de même poser un certain nombre de problèmes, dès lors qu'un tel édifice - un stade ou un centre de congrès, par exemple - peut avoir un impact urbanistique.
En deuxième lieu, vous allez soustraire à la commission d'architecture les cas sur lesquels la CMNS aura déjà statué... J'ai dit que j'étais d'accord sur ce point, parce qu'il me semble que, s'il y en a une, la question patrimoniale doit primer. Et, dès lors, il me paraît juste de ne donner cette compétence qu'à la CMNS.
Par ailleurs, vous souhaitiez accorder une importance excessive aux préavis communaux en matière d'esthétisme... Vous êtes revenus au système actuel, qui prévoit le double préavis: de la commission d'architecture et de la commune, à charge pour le département de trancher... C'est une sagesse, dont je me réjouis.
Tels sont les principaux changements introduits par celle loi. Vous codifiez une pratique, qui est que le passage devant la commission d'architecture n'est pas automatique et systématique pour tous les dossiers... Encore faut-il qu'il y ait une matière architecturale à lui soumettre, sinon cela n'aurait pas de sens !
Mesdames et Messieurs les députés, voilà ce que je tenais à vous dire, pour que vous sachiez ce que vous allez accepter ou refuser, et dont, évidemment - si vous l'acceptez - nous tirerons les conclusions et les conséquences, vous et moi, au bout d'un certain temps. Pour voir si, comme certains l'imaginent, nous allons faciliter le travail ou si, comme d'autres le redoutent, nous allons prendre le risque d'un certain nombre de décisions malencontreuses...
J'ai en effet le plus grand respect pour les médecins, mais, il est vrai que des diagnostics contradictoires sont catastrophiques pour déterminer un traitement qui doit aller dans une seule voie. L'urbanisme étant la résultante démocratique de l'avis et des intérêts divergents de l'ensemble des acteurs, la multiplicité des opinions ne peut donc qu'améliorer un projet, alors qu'à l'inverse la multiplicité des médecins ne peut que tuer le patient...
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur la prise en considération de ce projet de loi, au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 44 oui contre 35 non.
Deuxième débat
M. Rémy Pagani (AdG). J'ai déposé un projet d'amendement en ce qui concerne une des problématiques soulevées par M. Moutinot...
Le président. Monsieur Pagani, laissez-moi arriver à l'article...
M. Rémy Pagani. Non, non ! J'aimerais d'abord que M. Moutinot nous précise la notion visant à soustraire les projets d'urbanisme de la commission d'architecture... Cela semble en effet encore plus grave que je ne le pensais, et j'aurais bien aimé avoir de plus amples renseignements à ce sujet. Le cas échéant, je déposerai un deuxième amendement pour essayer d'éviter une catastrophe à ce parlement... (Exclamations.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le conseiller d'Etat, souhaitez-vous répondre à M. Pagani ? Je vous donne la parole.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Si je comprends bien, la question porte sur l'amendement que vous n'avez pas encore déposé, alors que celui-ci porte sur l'article suivant... (Rires et exclamations.)
Par contre, je n'ai pas vraiment compris votre question... (Rires.)
Le président. Si cela peut vous rassurer, Monsieur le conseiller d'Etat, moi non plus ! (M. Rémy Pagani demande la parole.)Oui, vous avez la parole, Monsieur Pagani.
M. Rémy Pagani (AdG). Je précise ma pensée... M. Moutinot a fait référence au fait qu'on allait supprimer, du texte de l'article 1 actuel, les mots: «les projets de construction importants»... Cela revient à vider de sa substance la commission d'urbanisme ! J'aimerais qu'il nous précise sa position à ce sujet, parce que je trouve que c'est encore plus grave que ce que je croyais, et c'est pourquoi je proposais un amendement à l'article 4, alinéa 1.
Le président. Monsieur le conseiller d'Etat Moutinot, vous avez la parole. Je la donnerai ensuite à M. Mark Muller, rapporteur de minorité.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je vais vous expliquer le texte de cet article, dont je ne suis pas l'auteur...
Il se trouve que la loi actuelle est identique à celle qu'il vous est proposé de voter, à une réserve près. Il est simplement proposé de supprimer les mots «et de projets de construction» qui se trouvaient après «projets routiers» dans la phrase «... sur les projets de modification de zones, de plans directeurs, des plans localisés de quartier et sur les projets routiers d'une certaine d'importance». C'est la seule chose qui est supprimée, dans l'alinéa 1 de l'article 1 qui vous est soumis en deuxième débat.
Dans la pratique, vous ai-je dit, on ne va en effet pas demander à la commission d'urbanisme ce qu'elle pense de la surélévation d'un immeuble, ni même de la construction de trois villas ou d'un immeuble de logements conforme à un plan localisé de quartier. Or on sollicite son avis dans des projets de construction d'une certaine importance. Et voilà ce qu'on nous demande de ne plus faire, ce qui sera le cas si vous acceptez cet article 1, alinéa 1, tel qu'il ressort de vos débats de commission ! A mon avis, c'est une perte dans le processus décisionnel.
M. Mark Muller (L), rapporteur de minorité. Je vais vous donner deux raisons pour ne pas amender l'article 1, alinéa 1, tel que nous le proposons. Il n'est en effet pas nécessaire que les projets de construction d'une certaine importance soient soumis à la commission d'urbanisme. Premièrement, parce que tout projet important - M. Moutinot a évoqué un stade, tout à l'heure - comme un stade, fait l'objet d'étapes antérieures au dépôt d'autorisation de construire, notamment l'étape du plan de quartier qui est obligatoire pour des projets de ce type - de par le droit fédéral. Le plan de quartier devra donc être adopté avant le dépôt d'une demande d'autorisation de construire un ouvrage important, et, à cette occasion, la commission d'urbanisme pourra examiner le projet et rendre un préavis. Il n'est donc pas nécessaire que le projet lui soit soumis une seconde fois.
Deuxièmement, parce que ce projet sera soumis à une autre commission - la commission d'architecture - qui est également composée de spécialistes de la construction et qui pourra parfaitement déceler d'éventuels problèmes.
Pour ces deux raisons, je pense que l'on peut tout à fait supprimer cette compétence actuelle de la commission d'urbanisme.
M. Christian Grobet (AdG). J'approuve les propos de M. Moutinot...
Et j'ai le regret de vous dire, Monsieur Muller, que vous venez d'exprimer des choses inexactes, parce qu'on peut donner un certain nombre d'exemples de constructions importantes qui n'ont pas fait l'objet de plans d'affectation du sol... Je pense au Palais des expositions... L'extension du Palais des expositions par-dessus l'autoroute est un projet extrêmement important, qui n'a pas fait l'objet de plan localisé de quartier ! La halle 7 avec le bâtiment de l'Arena n'a pas fait l'objet d'un plan d'affectation du sol - j'aurais aussi dû le préciser pour le Palais des expositions. Il n'y a eu ni plan de zone ni de plan de quartier ! Tous les bâtiments de l'Aéroport... (L'orateur est interpellé.)Non, mais je le sais quand même, Monsieur, parce que j'étais au département des travaux publics quand ces projets ont été réalisés, et j'ai une assez bonne mémoire ! Et je peux vous garantir qu'il n'y a pas eu de plan d'affectation du sol pour la halle 7 et l'Arena, pas plus qu'il n'y en a eu pour les bâtiments de l'aérogare ! Pour donner un autre exemple, des bâtiments sportifs importants, qui peuvent attirer beaucoup de visiteurs et de public, n'ont pas non plus fait l'objet de plans d'affectation du sol. Pas plus que le très grand quartier d'Uni-Mail et tout les logements qui y ont été construits, mais, heureusement, ils ont été examinés de près par la commission d'urbanisme.
Vous savez que dans les zones urbaines l'adoption d'un plan localisé de quartier est facultative pour les première, deuxième et troisième zones. Il fut un temps où l'urbanisme suscitait beaucoup d'intérêt de la part du parti radical, mais il semble qu'aujourd'hui cela ne l'intéresse pas plus que le PDC ne s'intéresse au logement social, qui était son...
M. Claude Blanc. Menteur !
M. Christian Grobet. Pardon, Monsieur Blanc ! Pouvez-vous répéter, je n'ai pas bien entendu ?
M. Claude Blanc. Menteur !
M. Christian Grobet. Menteur ! Mais enfin, vous nous proposez d'abroger les lois de vos prédécesseurs - les lois Dupont et autres ! Vous dites que je mens, parce que je révèle, ici, publiquement, que vous voulez abroger les lois qui ont été imaginées par votre propre parti ! Bref, je voulais simplement souligner que, dans les années 50, beaucoup de quartiers ont été construits dans des zones ordinaires, que ce soit Vermont, Vidollet, le quartier de l'avenue Krieg, Contamines, sur la base de plans localisés de quartier. Ce ne sont pas des zones de développement, mais il faut bien reconnaître que, depuis trente ans, les plans d'affectation du sol ou les plans de quartier, comme les appelle... Tiens, il a disparu, le rapporteur de majorité ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Je ne sais pas où il est... Il passe son temps à faire le tour des députés...
Le président. Poursuivez, s'il vous plaît, Monsieur le député !
M. Christian Grobet. ... pour être bien sûr que tout le monde vote comme il le souhaite... La moindre des courtoisies, Monsieur Muller, c'est d'écouter quand on vous répond ! Mais il est vrai que vous n'avez pas besoin d'écouter !
Quand vous prétendez que toutes les grandes constructions font l'objet de plans localisés de quartier, c'est tout simplement faux !
Alors, à partir de là, je pense, comme l'a fort justement dit, M. le conseiller d'Etat Moutinot, qu'il est important que la commission d'urbanisme statue sur ces projets. J'ai le sentiment qu'il y a une importante méconnaissance - me semble-t-il, même de la part du rapporteur de minorité, ou de majorité, puisqu'il va tout d'un coup passer de rapporteur de minorité à rapporteur de majorité... Donc, une importante méconnaissance du rôle des commissions. La commission d'architecture, comme son nom l'indique, doit se prononcer sur l'architecture des constructions: c'est son rôle principal. Et, c'est vrai, la commission passe beaucoup de temps sur cet aspect des choses; elle ne se préoccupe pas de l'insertion des projets de construction et de tous les problèmes qu'ils peuvent entraîner dans un quartier: cela, c'est le rôle de la commission d'urbanisme. Ces deux commissions sont donc parfaitement complémentaires.
Certes, comme l'a dit M. Ducret tout à l'heure, la gestion des préavis laisse parfois à désirer. Peut-être a-t-on eu tort, à un moment donné, de brocarder l'idée d'avoir un architecte cantonal, quoique l'esprit dans lequel il était conçu était des plus discutables... C'est vrai qu'il serait peut-être judicieux qu'une personne soit chargée de gérer les préavis, parce que - vous l'avez bien souligné - il y a aussi des conflits entre les services, qui sont dus au fait que les problèmes de construction sont traités par des directions différentes dont les directeurs sont au même niveau hiérarchique. Ainsi, Mme Bietenhader, qui est une femme très compétente et efficace, a quand même de la peine à passer par-dessus l'avis d'un autre directeur qui est au même niveau qu'elle !
Je trouve, pour ma part, qu'il serait plus efficace - peut-être que M. Moutinot a des idées à ce sujet; le temps passant, on peut imaginer que les idées viennent - de trouver une solution pour... (L'orateur est interpellé.)Ecoutez, j'attends de voir ceux qui donnent des leçons ici assumer la responsabilité de ce département, qui est probablement le plus difficile à diriger ! Il est toujours aisé de critiquer, et j'en profite pour indiquer que je plains M. Moutinot.
Cela étant dit, je voulais simplement souligner le fait que ces commissions sont complémentaires et que l'une ne devrait pas empiéter sur les prérogatives de l'autre. Il serait donc judicieux de trouver une solution pour qu'une personne, qui se trouverait au-dessus des directeurs, puisse analyser les préavis pour prendre position. Parce que, c'est vrai, il est difficile pour la directrice de la police des constructions d'écarter des préavis sans autre forme de procès. Et c'est peut-être là que le bât blesse...
Je pense que vous êtes en train de prendre les problèmes par le petit bout de la lorgnette... Vous vous imaginez que vous allez les résoudre, mais je ne le crois pas, et je crains bien que votre projet de loi ne tape à côté du véritable problème !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, je constate que le débat porte sur l'article 1, alinéa 1. Pour la forme, je vais vous faire voter le titre et le préambule.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous en sommes donc maintenant à l'article sur lequel nous débattons depuis un petit moment. Monsieur le député Pierre-Louis Portier, vous avez la parole.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Au risque de vous décevoir, je ne vais pas intervenir précisément sur l'article que vous venez d'évoquer...
J'aimerais quand même très revenir brièvement sur votre intervention, Monsieur Grobet, car il y a des propos que mon groupe ne peut pas laisser passer sans réagir. Quand vous dites que les démocrates-chrétiens se moquent du logement social, c'est un mensonge ! Je pense que vous faites allusion au projet de loi novateur que le parti démocrate-chrétien vient de déposer, qui prévoit une aide personnalisée au logement. Et c'est vrai - nous pouvons le rappeler - le parti démocrate-chrétien est certainement à la base d'une des lois très importantes sur le logement à Genève: la loi HLM.
Mais, au contraire de vous, Monsieur Grobet, et de vos coéquipiers, qui vous arc-boutez sur des règles, des dogmes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)... et des lois archaïques, qui ne suivent pas l'évolution de la démographie et de la sociologie dans ce canton et qui aboutissent à une crise du logement sans précédent - nous venons de l'évoquer - les démocrates-chrétiens prouvent qu'ils sont capables, eux, d'évoluer, ce dont vous ne pouvez pas vous prévaloir ! (Applaudissements.)
M. Jacques Baud (UDC). Ça fait une heure que j'entends des âneries ! (Exclamations.)Je commence à en avoir un peu ras le bol !
La gauche adore mettre la société sous tutelle... Eh bien, non, Mesdames et Messieurs ! Je ne suis pas du tout d'accord ! La commission d'architecture existe... C'est à croire que nos architectes sont des imbéciles ou des enfants de choeur... Ils ont eu leurs diplômes que je sache ! Ils connaissent leur métier ! Alors, pourquoi devrait-on les mettre sous la tutelle d'une association, d'un truc - d'un «machin», devrais-je dire - qui ne sert à rien du tout ? Vous en êtes où ? A quel degré ?
Je pense que ce projet de loi est bon; il va dans la direction opportune. Il y a trop d'intervenants, et quand il y en a trop - excusez-moi du terme - c'est le foutoir !
Nos constructeurs en ont ras le bol ! Nous devons mettre de l'ordre sans tarder ! (Exclamations.)Que ceux qui sont capables de faire les choses le fassent et que les autres restent à la maison !
Nous voterons donc ce projet de loi.
Des voix. Bravo !
M. Rémy Pagani (AdG). Je vous répondrai, Monsieur baud, que le problème n'est pas là. Nous voulons maintenir les urbanistes compétents - ils sont réputés tels - qui composent ces commissions, afin qu'ils puissent avoir leur mot à dire pour définir une politique urbaine qui corresponde à une certaine forme de consensus.
Cela étant, Monsieur Portier, je pense qu'il faudrait un jour débattre sérieusement de ce que signifie votre politique de subvention aux personnes, alors que, jusqu'à maintenant, les subventions allaient à la construction, ce qui permettait vraiment de construire des logements... Car, vous le savez très bien, l'argent que vous donnez ne fait rien construire du tout, il ne fait que grossir le porte-monnaie des régisseurs, des propriétaires et de promoteurs ! (Exclamations.)C'est cela la véritable question ! Le parti démocrate-chrétien a effectivement changé de politique ! Vous êtes en train de passer du subventionnement à la pierre - qui, selon les lois Dupont, permettait au moins de construire des immeubles dans ce canton - à un subventionnement à la personne. Et on ne peut que constater que le subventionnement à la personne n'a fait construire aucun logement, aucun appartement, dans ce canton depuis dix ans ! Nous sommes, pour notre part, favorables à l'aide à la pierre, car, au moins, elle se concrétise en logements. (Exclamations.)
Par ailleurs, pour revenir au débat qui nous occupe, nous proposons de ne pas vider de sa substance la commission d'urbanisme, et nous proposons un amendement, qui va, du reste, tout à fait dans le sens du département, puisqu'il vise à faire en sorte que la commission d'urbanisme se préoccupe également des projets de construction, ce qui donne: «...sur les projets routiers et des projets de construction d'une certaine importance.» Cela me paraît aller de soi, c'est l'évidence ! Sinon je ne sais pas à quoi sert cette commission d'urbanisme.
C'est pour cela que je vous invite à soutenir cet amendement, dans la mesure où il est proportionné: il tient compte de la réalité tout en évitant les principales embûches. Du reste, un député - je crois que c'est M. Barrillier - a reconnu qu'il y a toujours des problèmes par rapport au dépôt des projets de construction. Le rôle du département n'est pas seulement de censurer les projets mais de les améliorer. Alors, évidemment, si vous souhaitez passer d'un système de service public à des mandataires privés, Monsieur Vaucher - je vous vois arriver - c'est parce qu'il y a effectivement de l'argent à se faire ! Si c'est l'objectif de ce projet de loi, nous le dénonçons !
Une voix. Des économies !
M. Rémy Pagani. Des économies ! En l'occurrence, qui va payer les mandataires qualifiés qui devront se prononcer avant tout dépôt de projet de construction de logement ? Je pose la question, mais poser la question, c'est y répondre !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Monsieur Pagani, votre amendement - je dois le dire - est amusant, dans la mesure où il propose d'ajouter: «et des projets de construction» après «des projets routiers», alors que le texte actuel mentionne: «et sur les projets de construction et les projets routiers d'une certaine importance». C'est une simple inversion. Je pars donc du principe que vous voulez en rester au texte actuel... (M. Pagani s'exprime hors micro.)
En réalité, votre amendement fait qu'on en revient au texte actuel; il y a juste une inversion entre «projets routiers» et «projets de construction». Si vous êtes d'accord, je vais faire voter sur l'article tel qu'il est proposé dans le projet de loi. S'il est adopté, cela voudra dire que votre amendement est rejeté... (Exclamations.)Mais l'amendement est identique... (M. Pagani continue à s'exprimer hors micro.)Non, je ne vous donne pas la parole, Monsieur Pagani ! Je n'ai pas envie que vous repartiez pour un tour ! Je préfère faire voter un amendement qui n'a pas de sens plutôt que de vous redonner la parole ! (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'amendement proposé par M. le député Pagani. Je vous rappelle que nous sommes en procédure de vote et que je ne donnerai plus la parole.
Il s'agit d'ajouter à l'article 1, alinéa 1... (Exclamations.)Il s'agit d'ajouter à cet article: «et des projets de construction» après «les projets routiers», ce qui donne: «...sur les projets routiers et des projets de construction d'une certaine importance.»
Nous procédons au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 45 non contre 38 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 1, alinéa 1 (nouvelle teneur) est adopté.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'article 1, alinéa 1, est donc adopté, tel qu'il figure dans votre rapport.
Nous sommes saisis d'un autre amendement à l'article 4, alinéa 1, présenté par M. le député Pagani, à qui je donne la parole.
M. Rémy Pagani (AdG). Je trouve le procédé un peu spécieux, parce que... (Exclamations.)Non, non, je vais m'exprimer sur l'amendement !
Je vous signale simplement que mon amendement avait tout son sens par rapport à l'article du projet qui nous est soumis ce soir. Qu'il revienne à la loi actuelle est une autre chose ! Aujourd'hui, c'est l'article du projet qui nous est soumis qui nous occupe et non le texte de la loi actuelle ! J'avais donc tout à fait le droit de proposer cet amendement, qui était tout à fait légitime par rapport au texte de l'article en question. Mais je ne vais pas épiloguer à ce propos...
J'en viens au deuxième amendement que je vous propose... Comme vous l'aurez compris, cet article est un merveilleux autogoal, car les personnes qui voulaient prétendument alléger la procédure vont donner l'ensemble des pouvoirs à l'administration ! Celles et ceux, parmi les députés des bancs d'en face - de l'Entente et de l'UDC - qui voulaient retirer «des mains de cette administration perverse... (Exclamations.)... le processus de construction» n'ont qu'à voter cela ! Cet article va, en fait, lui donner tous les pouvoirs ! En effet, dorénavant, c'est l'administration qui aura la compétence de remettre ou de ne pas remettre les projets de construction entre les mains d'une commission consultative, c'est-à-dire qu'elle pourra les garder par-devers elle et en faire ce qu'elle en veut...
Si vous étiez un peu raisonnables - mais, malheureusement, vous ne l'êtes pas ! - je vous inviterais à soutenir mon amendement, car c'est le seul qui donne la garantie à la commission d'architecture de faire un tant soit peu son travail. Sinon, vous videz également cette commission de son sens...
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, depuis que vous avez été élu président du Grand Conseil, je considère que vous avez bien présidé les débats, mais il n'est pas acceptable qu'au moment où vous deviez mettre aux voix un amendement, vous déclariez que celui-ci n'a pas de sens ! Vous n'avez manifestement pas compris ce qui a été proposé, et je vous prie, à l'avenir, de faire preuve d'indépendance au moment du vote.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je ne vais pas épiloguer, mais vous avez pu voir que j'ai fait preuve d'indépendance jusqu'à présent - ce qui est le propre du président. Je l'ai encore prouvé ce soir.
Mon but est d'essayer de faire en sorte que nos travaux se déroulent dans la sérénité et que nous ne votions pas des choses qui n'ont pas de sens. Cela étant, je considère l'incident clos. J'ai fait voter l'amendement tel qu'il m'était présenté.
Je vais vous faire voter sur le deuxième amendement proposé par M. Pagani à l'article 4, alinéa 1. Il est tard, et si nous pouvions aller nous coucher, cela serait assez sympathique...
Cet amendement propose de supprimer à l'article 4, alinéa 1, les termes «...lorsqu'elle en est requise par ce dernier...», ce qui donne: «... en matière architecturale au département sur les projets faisant l'objet d'une requête en autorisation de construire.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 43 non contre 39 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'article 4, alinéa 1 (nouvelle teneur) est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il est proposé d'abroger l'article 15, alinéa 2. Je mets aux voix cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement (suppression de l'article 15, alinéa 2) est adopté.
L'article 2 (souligné) est donc abrogé.
L'article 1 (souligné) devient l'article unique (souligné).
Troisième débat
Le président. Madame Schenk-Gottret, vous avez la parole.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Monsieur le président, je demande le vote nominal. (Appuyé.)
Le président. Bien, nous procédons à l'appel nominal. Le vote est lancé.
La loi 8955 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 8955 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 38 non.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de lever la séance et de nous quitter, je tiens à souhaiter un excellent anniversaire à Mmes Marie-Paule Blanchard-Queloz et Jeannine de Haller. (Applaudissements.)Tous nos voeux ! (L'assemblée chante« Joyeux anniversaire».)
Je lève la séance. A demain !
La séance est levée à 23h10.