Séance du
jeudi 22 octobre 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
12e
session -
41e
séance
No 41/VI
Jeudi 22 octobre 1998,
nuit
Présidence :
M. René Koechlin,président
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Guy-Olivier Segond, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
Le président. Je salue à la tribune la présence de M. Hervé Burdet, ancien président de notre Grand Conseil. (Applaudissements.)
Je salue également la présence à la tribune de Mme Monin, procès-verbaliste de la commission des finances. (Applaudissements.)
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mmes Fabienne Bugnon, Anita Cuénod et M. Jean-Claude Vaudroz, députés.
3. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
M. Chaïm Nissim(Ve). Je voudrais retirer deux objets - la motion 820 et la résolution 296 - qui sont depuis longtemps à la commission de l'énergie et qui n'ont plus de raison d'être puisque cette commission a voté un projet de loi entre-temps.
Le président. La proposition de motion suivante est donc retirée :
Il est pris acte de ce retrait.
c) de propositions de résolutions;
Le président. De même, la proposition de résolution suivante est retirée par M. Chaïm Nissim :
Il est pris acte de ce retrait.
Mme Jeannine de Haller(AdG). J'annonce le dépôt de la proposition de résolution suivante :
Je demande que cette proposition de résolution soit traitée demain à 17 h.
M. Luc Gilly(AdG). J'aimerais annoncer le dépôt d'une motion urgente à propos du Kosovo. Elle sera sur les bancs des députés demain soir à 17 h. Je souhaite qu'elle soit aussi traitée demain si possible.
Le président. Nous en déciderons demain, lorsqu'elle aura été distribuée.
La proposition de résolution suivante est également parvenue à la présidence :
Il en est pris acte.
Je mets aux voix la demande de Mme de Haller que nous traitions la proposition de résolution 386 demain, à la séance de 17 h.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
d) de demandes d'interpellations;
Le président. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :
Cosignataires : Rémy Pagani, Pierre Vanek, Alexandra Gobet, Caroline Dallèves-Romaneschi, Christian Brunier.
Il en est pris acte.
e) de questions écrites.
Néant.
M. B. R. S. , 1967, Tunisie, coffreur, recourt contre la peine d'expulsion judiciaire.
Le président. Il m'appartenait de prendre une décision concernant ce recours. Compte tenu de la proximité de la France où il réside, j'en ai conclu au rejet de ce recours.
La proposition d'accorder la grâce est rejetée.
Le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Plan du rapport du majorité
I. Introduction et but du projet de loi constitutionnelle
II. Le contexte par rapport en particulier à la Table ronde et à la préparation du budget 1999
III. La discussion parlementaire
IV. Commentaire des principales dispositions avec les amendements de la Commission des finances
V. Conclusions
VI. Texte amendé du projet de loi constitutionnelle.
La Commission des finances a consacré une vingtaine d'heures, en six séances, à l'étude du projet de loi constitutionnelle 7894. Elle s'est réunie, à ce sujet, les 9, 16, 23 et 30 septembre, ainsi que les 2 et 7 octobre 1998, sous la présidence de M. David Hiler, Mme Eliane Monnin tenait les notes de séances.
I. Introduction et but du projet de loi constitutionnelle
L'Etat de Genève a connu une augmentation rapide de son niveau d'endettement, tant en terme absolu, qu'en terme relatif. En effet, le rapport entre la dette brute et le revenu cantonal genevois a passé de 20% au début des années 1990, à près de 50% en 1997. La dette brute a augmenté de 4,3 milliards de francs en 1990, à 9,6 milliards de francs en 1997. Ces chiffres ont conduit le Conseil d'Etat, pour l'élaboration du budget 1999, à prendre des mesures drastiques.
Le projet de loi constitutionnelle 7894 résulte en partie de la nouvelle méthode adoptée par le Conseil d'Etat. Il s'efforce de répondre au déficit persistant du compte de fonctionnement et à l'apparition de déséquilibres structurels conduisant à l'augmentation rapide de l'endettement de l'Etat par deux volets distincts, bien que liés, sur les plans conceptuel et matériel.
D'une part, le projet de loi constitutionnelle veut ancrer dans la Constitution, l'obligation de rétablir l'équilibre financier du compte de fonctionnement, dans une période de cinq ans à partir de son entrée en vigueur.
D'autre part, une fois cet assainissement obtenu, le projet de loi constitutionnelle veut stabiliser l'endettement public en établissant un principe d'équilibre financier pluriannuel du compte de fonctionnement à l'intérieur d'une période-cadre de six ans.
Le projet de loi constitutionnelle comporte donc un dispositif transitoire, répondant aux exigences d'assainissement des finances cantonales, et un dispositif permanent, transposant juridiquement le principe d'équilibre financier pluriannuel du compte de fonctionnement. Afin de rendre efficaces les mécanismes d'équilibre prévus, des contraintes qui s'imposent aux Autorités ont été introduites dans le projet de loi constitutionnelle.
Celui-ci consacre l'équilibre du compte de fonctionnement comme un principe générale de gestion financière, et détermine avec précision les conditions exceptionnelles dans lesquelles il peut y être délogé, comme le souligne le message à l'appui du Conseil d'Etat.
On distingue ainsi l'objectif de moyen terme orienté sur la stabilisation de l'endettement public, et la possibilité, dans le court terme, d'écarter de l'équilibre financier du compte de fonctionnement à l'intérieur d'une période cadre de six ans.
Ce projet de loi contient des mécanismes budgétaires complexes, mais les principes auxquels il obéit sont simples, il s'agit de contenir les déséquilibres publics en stabilisant l'endettement.
L'avantage qu'offre le projet de loi constitutionnelle est d'être automatiquement soumis à votation populaire.
En conséquence, il appartiendra aux citoyennes et aux citoyens du Canton de Genève, de se prononcer en dernier ressort sur l'ensemble des propositions faites par le Conseil d'Etat pour rétablir l'équilibre des finances cantonales.
Il convient ici de rappeler que le Conseil d'Etat a suivi, pour l'élaboration du projet de budget 1999, une méthode nouvelle que l'on peut décomposer en six étapes distinctes:
a) Une opération vérité (février/mars 1998), qui a conduit à l'analyse de la situation des finances publiques genevoises en avril 1998, par trois sages, soit Mme Gabrielle Antille, Professeur à la Faculté des Sciences Economiques et Sociales de l'Université de Genève, M. Marc Bétemps, expert-comptable et M. Marc Fues, Directeur général de la Banque Cantonale de Genève.
b) Un catalogue de propositions (mai/juin 1998), mis en discussion auprès des participants à la Table Ronde, durant l'été 1998.
c) Un accord entre le Conseil d'Etat et les partis politiques permettant d'éliminer le déficit structurel (septembre 1998).
d) Un projet d'article constitutionnel énumérant les dispositions transitoires et les dispositions durables prises pour éviter de se trouver à l'avenir, dans la même situation (septembre 1998).
e) La discussion parlementaire et le vote du Grand Conseil (septembre/décembre 1998).
f) La votation populaire du 20 décembre 1998.
II. Le contexte par rapport en particulier à la Table Ronde et à la préparation du budget 1999
Le projet de loi constitutionnelle est la résultante directe de l'élaboration, par le Conseil d'Etat, du budget 1999. Au printemps, celui-ci aboutissait à un déficit de 811 millions.
Selon le rapport des trois experts indépendants chargés d'examiner la situation des finances publiques genevoises, ce déficit de 811 millions se composait:
a) d'un déficit conjoncturel dépendant de la situation économique et sociale, d'environ 350 à 360 millions ;
b) d'un déficit structurel, indépendant de la situation économique et sociale, d'environ 450 à 460 millions.
Le Conseil d'Etat a donc décidé d'éliminer en 1999, le déficit structurel de 450 millions. A cet effet, il a élaboré un catalogue de propositions construit sur le principe de la symétrie des sacrifices prévoyant:
a) des économies nouvelles pour un montant de 220 à 250 millions ;
b) des recettes nouvelles pour un montant de 200 à 220 millions.
Durant l'été, le Conseil d'Etat a mis en discussion le catalogue de propositions au cours d'une procédure de concertation réunissant, dans une Table Ronde générale et des Tables Rondes sectorielles, les principaux acteurs de la vie politique, économique, sociale et associative. Dans le même temps, il a ouvert des négociations avec les différentes organisations représentant le personnel, afin de déterminer les conditions de rémunération future.
Durant les mois de juillet et août 1998, les Tables Rondes se sont réunies à diverses reprises. Elles ont surtout eu un effet pédagogique permettant aux partenaires de prendre mieux conscience de la gravité de la situation financière du Canton. Comme on a pu le dire, les chiffres, considérés parfois comme des ";chiffres de droite", sont devenus des chiffres tout court.
En revanche, il n'a pas été possible d'arriver à des accords au sein des Tables Rondes sectorielles. C'est pourquoi la Table Ronde générale, réunissant des représentants des partis politiques, constatant l'inefficacité des Tables Rondes sectorielles rassemblant des éléments de la société civile, s'est muée, à la fin du mois d'août, en une Table Ronde de négociations.
Celle-ci a abouti, le 4 septembre 1998, à un accord avec le Conseil d'Etat. Ce dernier avait procédé à diverses corrections budgétaires d'un montant total de 92,4 millions de francs, ramenant l'effort à accomplir pour éliminer le déficit structurel de 446,5 millions à 360 millions de francs.
C'est pourquoi les partis politiques (Socialiste, Vert, Radical, Démocrate Chrétien et Libéral) ont pu conclure à un accord reposant sur le principe de la symétrie des sacrifices prévoyant:
a) des économies d'un montant total de 181,7 millions, déterminées parmi le catalogue des propositions du Conseil d'Etat ;
b) des recettes d'un montant total équivalent.
Gouvernement et partis politiques tenaient à ce que le peuple puisse se prononcer. Le projet d'article constitutionnel facilitait cette démarche. Si les dispositions permanentes de la Constitution inscrivaient d'une manière durable le mécanisme de stabilisation de la dette publique, les dispositions transitoires permettaient de détailler les mesures prisent tant au niveau des économies qu'à celui des recettes, pour éliminer le déficit structurel en 1999.
En bref, la récapitulation des économies est la suivante:
a) Réforme de l'Etat ;
b) Communes ;
c) Prestations sociales ;
d) Fonction publique ;
e) Elus.
Alors que la récapitulation des recettes est la suivante:
a) Contribution spéciale affectée à l'amortissement de la dette pendant 4 ans ;
b) Augmentation de l'impôt auto.
La contribution spéciale concerne aussi bien les personnes physiques résidentes, que l'impôt à la source pour les frontaliers ou une contribution sur la fortune des personnes physiques. Les personnes morales sont également soumises à une contribution spéciale.
Le travail de la Commission des finances a été facilité par les discussions qui se sont tenues entre les partis gouvernementaux. En effet, le bref laps de temps disponible ne lui aurait pas permis d'entrer dans toutes les subtilités de mécanismes complexes si des discussions parallèles n'avaient pas eu lieu, débroussaillant utilement le terrain sur des points particulièrement délicats.
Il lui fallait faire vite, puisque le projet d'article constitutionnel devait être soumis au Grand Conseil lors de sa séance du 23 octobre 1998, afin de pouvoir respecter les délais légaux et de pouvoir le soumettre au peuple le 20 décembre 1998.
Le Conseil d'Etat tenait, en effet, à ce que le budget 1999 puisse, en cas d'acceptation par le peuple des dispositions susmentionnées, être voté avant la fin de l'année en troisième débat, soit le 22 décembre 1998.
III. La discussion parlementaire
9 septembre 1998
Lors de la séance du 9 septembre 1998, Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat chargée du Département des finances, commente le projet de loi constitutionnelle 7894.
Elle souligne les trois aspects de ce dernier. Les mesures d'urgence qui doivent s'appliquer au budget 1999 figurent à l'art. 183. On peut considérer que cet article est le reflet des discussions menées par la Table Ronde. Bien que cela puisse paraître surprenant, les barèmes d'imposition des véhicules à moteur figurent dans le projet, car il n'est pas possible de procéder autrement, puisqu'il s'agit d'un impôt.
L'art. 182, qui est aussi une disposition transitoire, détermine le montant du déficit du compte de fonctionnement pour 1999, soit 360 millions au maximum, et prévoit une période transitoire entre 1999 et 2003 au terme de laquelle le compte de fonctionnement doit être équilibré.
Quant à l'art. 97 A qui prévoit l'équilibre financier et la stabilisation de la dette publique, il s'agit d'une norme permanente qui s'applique à partir de 2003, à l'intérieur de périodes cadres de 6 ans. La conseillère d'Etat souligne qu'il est indispensable que le compte de fonctionnement soit rééquilibré pour que la norme permanente puisse entrer en vigueur. La période d'assainissement pourra être prolongée, avec l'approbation du Grand Conseil, si la situation économique l'exige. La raison de cette période relativement courte est liée au fait que l'endettement va croître de 1,5 milliards, même en réduisant chaque année le déficit de 90 millions.
Enfin, l'art. 184 prévoit expressément que le Conseil d'Etat met parallèlement en oeuvre la réforme de l'Etat. Il est évident que pour plusieurs partis politiques cet article, même rédigé d'une manière concise, est fondamental pour l'acceptation des autres articles.
A l'art. 97A, al. 2, il est prévu que les amortissements doivent représenter 80% au moins du montant des investissement financés par l'impôt. Cette disposition a été insérée pour éviter la situation présente, à savoir que les charges d'investissement pèsent lourdement sur le compte de fonctionnement. En effet, dans les années 1980, des investissements démesurés, insuffisamment couverts ont eu lieu et ils produisent, aujourd'hui encore, des effets à retardement sur le compte de fonctionnement. Les experts ont pu déterminer qu'une des causes de l'endettement de l'Etat réside précisément dans ces investissements trop considérables effectués dans les années 1980.
16 et 23 septembre 1998
Suite à la demande de plusieurs membres de la Commission des finances dans sa séance du 16 septembre 1998, celle-ci accueille, pour la suite de ses travaux, à titre d'experts, Me Bernard Ziegler, Avocat, et M. Marc Ferrillo, Directeur adjoint du budget.
Me Ziegler explique que l'art. 183 prévu a l'avantage de pouvoir être soumis en bloc aux citoyens et qu'il peut entrer en vigueur immédiatement. Le Conseil d'Etat devra édicter un certain nombre de dispositions d'exécution, mais l'application de ces mesures ne souffrira pas de retard. Il n'y aura pas besoin de modifier les lois actuelles, après approbation de la loi constitutionnelle. Cela rend la lecture de cet article quelque peu difficile, mais facilite grandement la suite des opérations pour le Gouvernement.
Me Ziegler souligne que les dispositions non permanentes de l'art. 183, tomberont d'elles-mêmes à l'expiration du temps déterminé. Quant aux dispositions durables, le projet de loi constitutionnelle prévoit expressément que certaines d'entre elles pourront rester en vigueur, mais il faudra qu'à l'expiration de la période transitoire, le Grand Conseil édicte formellement une loi pour la fin de certaines mesures.
M. Ferrillo explique les aspects financiers du projet de loi constitutionnelle. Il rappelle la volonté du Conseil d'Etat, d'une part, de respecter le principe selon lequel le Conseil d'Etat doit maîtriser ses dépenses courantes, mais d'autre part, de garder une marge de manoeuvre durant les périodes conjoncturelles difficiles.
La réconciliation de ces deux principes n'est pas évidente, et exige une planification précise. Cette pratique est peu courante. D'autres cantons préfèrent définir des pourcentages de déficit possible. Le Conseil d'Etat a opté pour un système plus sûr et plus intéressant, mais extrêmement contraignant. Sinon, il faudrait demander au peuple des efforts plus importants.
Il est rappelé, par ailleurs, que la fiscalité genevoise doit être réétudiée dans le cadre de l'harmonisation fédérale, et que toute une série de mesures doivent également être prises en ce sens. D'une certaine manière, la vie ne s'arrête pas en 2003, et le peuple garde tous ses droits pour la suite.
Mme Calmy-Rey, conseillère d'Etat, rappelle que l'Etat n'a actuellement plus aucun moyen d'action. Il ne peut plus mener de politique économique, ni de politique du personnel. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat souhaite une politique financière durable qui lui permette d'agir à tout moment, pour ne plus se retrouver devant des déficits de 400 millions par an.
La mécanique doit donc être incitative dans l'hypothèse d'un déficit considérable en début de période cadre, dès le moment où il s'agit de le rembourser dans les 6 ans, avec une prolongation possible de 3 ans suivant la situation économique. Il faudra ensuite soit rechercher de nouvelles recettes, soit de nouvelles économies.
Le mécanisme du nouveau projet de loi constitutionnelle vise ainsi à ne pas laisser les choses à un point tel que le déficit atteigne les montants connus ces dernières années.
Les représentants des partis gouvernementaux se félicitent du système contraignant qui oblige le Parlement et le Conseil d'Etat à prendre leurs responsabilités pour essayer d'atteindre ces objectifs. Il faut en effet parfois se méfier de la trop large générosité du Grand Conseil.
30 septembre 1998
Lors de sa séance du 30 septembre 1998, la Commission des finances est en possession du texte définitif proposé par le Conseil d'Etat, tel qu'il lui a été renvoyé le 24 septembre 1998 par le Grand Conseil.
La Commission des finances procède à trois auditions successives:
Audition de la CGAS (Communauté Genevoise d'Action Syndicale)
La CGAS est représentée par MM. Jacques Robert, Reymond, Matthey, Dind, Nicolini et Tissot.
Au nom de la CGAS, M. Robert signale que cette dernière n'a pas pris de position ferme et définitive sur les accords qui ont conclu les négociations des partis, après la concertation de cet été.
Elle se prononcera de façon définitive après les travaux du Grand Conseil, dans la mesure où elle considère que ces accords, transcrits dans le projet de loi constitutionnelle, devraient être modifiés sur quelques points comme la définition du travail de la fonction publique, le mode de perception des taxes et impôts nouveaux, et les articles constitutionnels eux-mêmes.
Pour la CGAS, les taxes nouvelles, notamment celles qui frappent les grandes fortunes, lui apparaissent ridicules. Elle aurait espéré que les plus favorisés consentent un effort plus important.
La CGAS s'inquiète aussi du lien fait entre les investissements et les charges. L'Etat pourrait être empêché de dominer ses charges qui pourraient augmenter pour d'autres motifs que les investissements.
Pour la CGAS, le dispositif est difficilement applicable, au risque de mener à une politique récessioniste au moment même où il faudrait soutenir l'économie.
Pour M. Tissot, les accords entre le Conseil d'Etat et la fonction publique devraient faire partie du budget et ne devraient pas être soumis au peuple, dans le projet d'article constitutionnel qu'on appelle ";le paquet ficelé". D'un point de vue syndical, les relations de travail entre employeur et employé, relève du Conseil d'Etat et non du peuple.
Par ailleurs, la CGAS aurait souhaité que la contribution spéciale ne consiste pas en une imposition linéaire de 1%, mais en une contribution progressive en 4 tranches de 0,5% pour les revenus de 20 000 et 50 000 francs, à 2% pour des revenus supérieurs à 1 million de francs.
Face aux propositions de la CGAS, quelques députés font remarquer que Genève est déjà, selon les statistiques de l'administration fédérale des contributions, le Canton le plus cher en terme de fiscalité intercantonale. Or, il est important que Genève conserve une certaine attractivité si l'on veut pouvoir garder un certain nombre de contribuables au revenu et à la fortune élevés.
Pour la CGAS, les coupes sur les dépenses ayant un caractère durable, elle demande que les recettes proposées aient elles aussi un caractère permanent. Il est fait remarquer que des recettes durables sont prévues, comme l'impôt auto par exemple.
En ce qui concerne les investissements, Mme Calmy-Rey souligne que pour le budget 1999, sur un montant total de 405 millions d'investissements, l'exigence de couverture porte sur 302 millions. A l'heure actuelle, le taux de couverture pour 1999 est de 72%. Si l'on voulait respecter la norme constitutionnelle prévue, il faudrait diminuer ce montant de quelques 20 millions, montant certes important, mais très éloigné des réductions drastiques que certains milieux de la construction prédisent.
Audition du Cartel de la fonction publique
Le Cartel est représenté par MM. Spagnoli, Mouhana, Deley et Vincent.
Au nom du Cartel, son Président, M. Spagnoli, relève qu'il est frappé par l'approche purement comptable du problème des finances publiques et de la politique en général d'une collectivité publique. Il rappelle que, selon lui, depuis 1991, les mesures d'économie touchant la République se chiffrent à 2,3 milliards de francs. Il déplore l'ensemble des mesures d'économie prévues. Il regrette que 360 millions de francs soient soustrait du pouvoir d'achat des salariés. Pour lui, cette somme va également affecter les capacités de redressement conjoncturel du Canton. Il constate que le dispositif constitutionnel prévu préfigure, selon lui, un démantèlement majeur des prestations à la population.
Pour M. Mouhana, le projet de loi constitutionnelle est un véritable ";carcan" qui prive le Grand Conseil de ses droits. Selon lui, il s'agit d'une régression des droits démocratiques.
Enfin, pour M. Mouhana, il y a une volonté délibérée d'épargner les grosses fortunes et les entreprises. Il estime que les mesures du Conseil d'Etat sont complètement antisociales et inacceptables.
Toutefois, lors de son audition, le Cartel se refuse à envisager véritablement la situation en cas de rejet du projet de loi. Il se contente de déclarer que la démocratie devrait alors reprendre ses droits, et les négociations se poursuivre entre le Conseil d'Etat et les organisations syndicales.
Pour le Cartel, la solution consiste dans l'augmentation massive de l'impôt sur les grandes fortunes. Mais, lorsqu'on les interroge sur leur analyse du refus écrasant par le peuple de l'augmentation de l'impôt immobilier, les représentants du Cartel se contentent de déclarer que le peuple avait été induit en erreur.
Face aux affirmations du Cartel, plusieurs députés rappellent que si la fonction publique est amenée à consentir un sacrifice de 90 millions, en corollaire, il y a rétablissement des mécanismes salariaux. En chiffres, en 4 ans, il y a 360 millions de sacrifice, mais le rétablissement des mécanismes salariaux coûtera, durant la même période, 500 millions de francs.
Contrairement à ce qu'imagine le Cartel, l'équilibre budgétaire n'est pas une aberration, d'autant moins que le canton de Genève ne dispose pas d'une ";planche à billets", et que s'il devait augmenter sa dette, il devrait, dans le même temps, consentir au paiement d'intérêts sensiblement supérieurs.
Audition de l'UAPG (Union des Associations Patronales Genevoises) et de la CCI (Chambre de Commerce et d'Industrie)
A la suite de l'audition du Cartel, la commission reçoit les représentants de l'UAPG et de la CCI.
Au nom de cette dernière, son Directeur, M. Patrick Coïdan, relève que la CCI serait prête à soutenir le paquet fiscal proposé, sous réserve que le principe de l'équilibre des sacrifices soit maintenu, ainsi que l'engagement du Conseil d'Etat à procéder à un véritable désengagement de l'Etat.
M. Mévaux, au nom des associations patronales, souscrit entièrement aux propos du Directeur de la CCI.
Pour lui, la garantie du versement des primes de fidélité et des annuités représente un montant important, soit 1,3% de la masse salariale, à savoir 39 millions sur un total de 3 milliards. Si l'on ajoute à ce montant l'indexation, on ajoute 15 millions de plus, soit au total 51 millions de dépenses supplémentaires qui ne figurent pas dans l'accord de la Table Ronde.
On va donc constater que, sur ce point, le projet de loi ne met pas forcément le personnel de la fonction publique dans une mauvaise posture, puisqu'il est pratiquement certain que sur 4 ans, les dépenses salariales augmenteront d'au moins 164 millions de francs. En fin d'audition, la CCI soumet sa proposition de nouvel impôt sur la fortune.
Au cours de l'entretien, les représentants de la Chambre de Commerce et de l'Industrie rappellent qu'ils souhaiteraient que certains actifs immobiliers soient privatisés. A leur avis, la meilleure solution serait peut-être de créer un groupe de travail qui se pencherait sur la question. Enfin, la CCI met forcément l'accent sur la nécessité d'entreprendre une véritable réforme de l'Etat.
En conclusion, M. Patrick Coïdan rappelle que l'on paie trop d'impôts à Genève. Le seul problème est lié au temps. On est en train d'acheter du temps avec ces impôts supplémentaires. Le fait qu'ils soient limités dans la durée, crée une obligation de rattraper et c'est, en quelque sorte, une autodiscipline.
Par ailleurs, l'équilibre des finances publiques n'est pas seulement une question budgétaire. Il faut aussi avoir une politique d'aménagement du territoire attractive, et qui empêche l'évasion physique que l'on constate actuellement vers des terres fiscalement plus agréables. En 25 ans, 20 000 contribuables ont quitté Genève pour le Canton de Vaud.
Il faut remarquer de plus, que la masse salariale de la fonction publique ne cesse d'augmenter, alors que celle du secteur privé diminue. Il est difficile, dans ces conditions, de faire croire à une véritable symétrie des sacrifices. Finalement, la seule garantie des mécanismes salariaux représente 164 millions pour les 4 années à venir.
Enfin, la CCI, qui s'était montrée favorable à l'introduction d'une contribution sociale généralisée mais qui souhaitait qu'elle soit perçue sur le revenu brut, regrette que celle-ci soit calculée exclusivement sur le net.
A l'issue de l'audition de l'UAPG et de la CCI, Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat, informe la commission que le Bureau genevois de l'égalité a remarqué trois mesures violant, selon lui, le principe de l'égalité entre hommes et femmes.
En se basant sur un salaire de base à plein temps, ces mesures touchent un nombre plus grand de femmes que d'hommes. Il faut se souvenir que 80% des personnes travaillant à temps partiel sont des femmes, dans l'administration cantonale, et 36,6% d'entre elles exercent une activité à temps partiel contre 4,5% des hommes. En revanche, le Professeur Claude Rouiller , également saisi du problème, aboutit à une solution totalement neutre.
Des députés s'inquiètent. Si des limites de revenus commencent à poser des problèmes d'égalité entre hommes et femmes, cela risque de remettre en question nombre de textes de la législation sociale. En outre, certain d'entre eux s'étonnent d'avoir été contacté par des journalistes, montrant ainsi que la communication du Bureau de l'égalité n'a pas été strictement réservée à la conseillère d'Etat.
2 octobre 1998
Le 2 octobre 1998, la Commission des finances entame la lecture des articles constitutionnelles, paragraphe par paragraphe. Elle commence son travail par les dispositions transitoires de la Constitution.
Art. 182 - Assainissement des finances cantonales
Si l'al. 1 ne suscite pas de commentaires, Mme Calmy-Rey propose un amendement à l'al. 2 portant le déficit du compte de fonctionnement à 367 millions.
Au cours de la discussion, il est rappelé que les partenaires de la Table Ronde se sont engagés pour un montant de 360 millions. Pour certain, il s'agit d'un chiffre maximum à ne pas dépasser, alors que pour d'autres, si un chiffre de 367 millions figure dans l'article constitutionnel, il sera toujours facile, après la discussion budgétaire proprement dite, de s'en tenir à 360 millions. Finalement, le Département des finances maintient son amendement.
A l'al. 3, une nouvelle formulation est proposée: ";Si la situation économique l'exige…"
Cette nouvelle formulation peut paraître moins précise que la précédente, mais a l'avantage de permettre au Grand Conseil de trancher, en cas de demande de prolongation, s'il estime que la situation économique est suffisamment grave pour le faire. Il pourra certes se rapporter à un indicateur tel que le taux de chômage, mais il est difficile de mentionner un tel taux dans la loi, d'autant que le taux de 8% prévu n'a jamais été atteint au cours des dix dernières années. Me Bernard Ziegler signale que la formule a été reprise d'un article constitutionnel fédéral fixant une disposition transitoire votée par le peuple en juin dernier.
Les al. 3 à 8 ne suscitent pas d'autres commentaires.
Art. 183 - Mesures affectant les charges et les revenus
Art 183 al. 1 a): La modification des montants suit les chiffres communiqués par le DASS.
Art. 183 al. 1 b): ";Obligation pour les membres du personnel de l'Etat" ";…de participer pour moitié…au coût de l'assurance perte de gains".
Le taux de 2% qui permet de calculer le montant demandé au personnel pour participer au coût de l'assurance perte de gains, est purement indicatif. Pour cette raison, il ne figure pas dans la loi. Certains députés rappellent que l'introduction de cette disposition pourrait représenter une mesure illégale, dans la mesure où elle est instituée par l'Etat lui-même. A cela, Me Ziegler rétorque que l'article constitutionnel crée une base légale de manière à fixer le principe.
Pour en arriver au taux de 2%, M. Pettmann, Directeur de l'Office du personnel, explique que l'Etat, en tant que propre assureur, s'est basé sur le taux actuel d'absentéisme pour maladie et maternité, qui se situe, selon les secteurs, entre 4 et 5% du temps de travail. Si le taux d'absentéisme venait à baisser, ce pourcentage pourrait être revu à la baisse. Il est également fait remarquer que ce qui coûte cher, en matière d'assurance perte de gains, est l'assurance du plein salaire dès le premier jour d'absence. Les offres des assurances privées se situent à un taux de 6, voire 7 % pour le 100% du salaire assuré dès le premier jour.
Il est reconnu que ce type d'assurance induit de lui-même une hausse d'absentéisme. En revanche, dès le moment où l'on admet que un à deux mois sont couverts et que l'on assure que dès le troisième mois, le taux d'assurance tombe très rapidement en dessous de 2%. Dans le cas d'espèce, il s'agit du plein salaire dès le premier jour. Un député constate finalement que le coût réel des remplacements n'est pas connu.
Pour un autre député, il s'agit d'imaginer le cas où un employé de l'Etat s'inquiéterait de savoir si la moitié de la prime qu'il paie correspond bien à la réalité des coûts. Me Ziegler répond que cette précaution a été prise dans la formulation de l'article constitutionnel où il est dit que: ";les membres du personnel participent au coût de l'assurance perte de gains". Il n'y a pas d'obligation de s'assurer.
Art. 183 al. 1 c): ";Suppression de la participation mensuelle de l'employeur à l'assurance maladie"
L'équité de cette mesure face au travail à temps partiel, suscite l'inquiétude du Bureau genevois de l'égalité. Il est décidé de demander un avis contradictoire au Bureau fédéral de l'égalité, de façon que celui-ci prenne aussi position sur une note du Professeur Claude Rouiller, ancien Juge fédéral, à ce sujet. Par ailleurs, la Commission des finances décide d'entendre le ";Collectif du 14 juin" qui souhaite également être auditionné à ce sujet.
A noter que l'avis de droit du Professeur Rouiller conclut au respect du principe de l'égalité en faisant référence à des mesures fédérales équivalentes à celles qui sont prises dans le cadre du projet de loi constitutionnelle.
Mme Calmy-Rey reconnaît que la question est délicate et que l'on pourrait peut-être envisager une solution de compromis entre le texte du projet de loi et la proposition du Bureau genevois de l'égalité, pour essayer de corriger l'éventuel effet de discrimination.
Me Ziegler pense également qu'il est utile de pouvoir disposer de deux prises de position écrites sur la question, d'autant plus qu'il ne s'agirait pas non plus de créer des distorsions par rapport à toute une série d'autres catégories.
La proposition du Bureau genevois de l'égalité risque en effet de créer d'autres inégalités. Il ne faut pas non plus de décourager le travail à plein temps.
Art. 183 al. 1 lit. 2 d): ";Limitation pour les années 1999 à 2002 de l'adaptation au coût de la vie des traitements des membres du personnel… seule indexée, la partie du traitement égale ou inférieure à 60 000 francs"
On constate que les termes ";occupé régulièrement" ne figurent plus aux al. c), d) et e), alors qu'ils sont maintenus à l'al. b).
Le Directeur de l'Office du personnel répond, s'agissant de l'al. b), que l'on ne va pas obliger des personnes travaillant dans des commissions et payées au cachet, à s'assurer contre la perte de gain. Par contre, toutes les autres mesures figurant aux al. c), d) et e) concernent l'ensemble de la fonction publique, qu'il s'agisse de personnel occupé régulièrement ou non.
Art. 183 al. 1 e) et f): Il n'y a pas d'observation sur ces alinéas.
Art. 183 al. 1 g): ";Réduction de 2% des traitements annuels des membres du Conseil d'Etat et du Chancelier"
A la question d'un député qui s'interroge sur les rentes des anciens Conseillers d'Etat, il lui est répondu qu'il est difficile de revenir sur des situations acquises. Ces rentes ne sont donc pas touchées.
Art. 183 al. 1 h): ";Réduction de 2% des jetons de présence des députés au Grand Conseil"
Alors qu'un député propose de réduire l'augmentation substantielle acquise au début de la législature de moitié, un autre propose de remplacer la réduction de 2% par 10%. Finalement, il est rappelé qu'une grande partie du jeton de présence sert à financer les groupes et partant le fonctionnement des Institutions démocratiques. Un amendement de 5% sera proposé lors du vote.
Art. 183 al. 1 i): ";Augmentation de 60 millions de francs du capital des TPG"
Un député s'interroge sur la répartition au niveau des communes. La conseillère d'Etat chargée des finances, répond que les communes sauront certainement s'arranger entre elles. Ce n'est pas un effort qui leur est demandé, mais une offre de placement.
Art. 183 al. 1 j): ";Modifications des lignes de campagne à la charge des communes"
Une autre formulation sera proposée au vote final des articles par Me Ziegler. Il a d'ailleurs été signalé que les communes ont fait remarquer qu'un certain nombre de lignes, n'étaient par rentables et qu'elles préféreraient presque payer le taxi aux rares utilisateurs. Ces communes vont constituer un groupe de travail pour discuter avec les TPG.
Art. 183 al. 2 a): Le Conseil d'Etat arrête les mesures suivantes affectant les revenus.
Le Conseil d'Etat propose quelques amendements d'ordre rédactionnels sur les trois premiers paragraphes. Désormais, on mentionne les personnes physiques assujetties au lieu des ";personnes domiciliées", ce qui permet de bien préciser qu'il s'agit de l'impôt genevois. Sur le fond, cette formulation permet d'inclure les travailleurs frontaliers qui sont déjà assujettis à l'impôt. Pour le reste, les modifications touchent à la forme, et sont plus lisibles pour la lecture. Le fond demeure inchangé.
Un député souhaitant savoir si la contribution spéciale s'applique également aux personnes taxées à forfait, il lui est répondu positivement. De même, lorsque l'on parle de revenu imposable, il s'agit de comprendre après la déduction des 10 000 francs.
Aux députés qui souhaitent un complément d'explication quant à l'application de la contribution spéciale pour les revenus dépassant 20 000 francs, il est répondu que pour un revenu de 20 001 francs, le 1% est calculé sur le 1 franc, plus la taxe de base de 100 francs.
Art. 183 al. 2 b): ";Abandon pour les années 1999 à 2002 par les communes au profit de leur part aux recettes fiscales"
Sans commentaire.
Art. 183 al. 2 c): ";Institution d'une contribution annuelle à la charge des propriétaires de piscine"
Il est remarqué que l'administration fiscale cantonale devra être en possession des surfaces de piscines, lesquelles ne sont pas toutes cadastrées. Il est en conséquence difficile de connaître les coûts de perception. Il est rappelé que l'idée de la taxe sur les piscine, vient de la Table Ronde, et qu'elle avait été proposée afin d'éviter l'augmentation de la taxe d'amarrage sur les bateaux.
Art. 183 al. 2 d): ";Augmentation au montant du barème d'imposition des véhicules à moteur"
Il avait été prévu de ne pas toucher les véhicules à usage professionnel, mais cette question n'est pas encore résolue. En effet, il en coûterait 4,7 millions à l'Etat.
Art. 183 al. 3 (nouveau): ";Le Conseil d'Etat est compétent pour adopter par voie réglementaire"
Cet alinéa ne suscite pas de remarque particulière.
Art. 184 - Réforme de l'Etat
En arrêtant les mesures d'assainissement des finances cantonales, le Conseil d'Etat met en oeuvre la réforme de l'Etat.
Il est rappelé que la rédaction de cette phrase a fait l'objet d'une large discussion de la Table Ronde et qu'il est nécessaire de souligner que de nombreux milieux participant à celle-ci estiment que les mesures d'économie ou de recettes complémentaires qui sont prises, doivent être liées à la réalisation de cette réforme.
Comme il l'a écrit dans son exposé des motifs à l'appui du projet de loi constitutionnelle (p. 30 ss), le Conseil d'Etat estime que sa réforme de l'Etat ";…ne doit devenir ni l'Arlésienne, ni la Belle au Bois dormant…". Il faut donc évoquer des mesures qui portent leurs effets à moyen et long terme, grâce à un fonctionnement de l'administration au service du citoyen. Ces mesures seront notamment conformes à certaines recommandations de l'audit Arthur Andersen.
Le Conseil d'Etat mettait en évidence, dans son exposé des motifs, certaines actions prioritaires qui touchent à la réforme administrative, telles que la transparence, la meilleure maîtrise et la connaissance des coûts (économies potentielles évaluées à 27 millions environ), la modernisation de l'administration, les mesures de réorganisation et de modernisation de l'administration fiscale cantonale, la gestion des subventions aux institutions (économies potentielles évaluées à 35 millions). De même, la gestion des projets de construction pourrait générer des économies potentielles évaluées entre 30 et 45 millions.
D'autres réformes devraient être réalisées dans la gestion des dépenses publiques entre canton et communes, ce qui pourrait générer également d'importantes économies, ainsi que dans le domaine de la sécurité.
Art. 185 al. 2:
Le Département des finances modifie la formulation des al. 2 et 3 afin de mieux préciser l'entrée en vigueur des dispositions transitoires, ainsi que la manière dont elles seront abrogées. L'al. 2 permet en particulier de suspendre désormais les barèmes qui entreraient en contradiction avec certaines dispositions, pendant la durée de validité des mesures transitoires.
L'impôt auto resterait ainsi dans son nouveau barème permanent, jusqu'à l'éventuelle prochaine augmentation décidée par le Grand Conseil. De même, le mécanisme de sortie du système est entre les mains du Grand Conseil, grâce à l'al. 3 qui, par la procédure législative ordinaire, pourra modifier certaines mesures transitoires.
Projet de loi constitutionnelle
Vote:
Art. 97A
Alinéa 1
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 2:
Le Département des finances propose un amendement:
";Il représente 80 % au moins des investissements nets d'infrastructure dont les charges financières sont supportées par l'Etat. Il s'agit d'une norme à appliquer année après année, et non dans la période"
Alinéa 2:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 3:
(amendement du Département)
12 OUI (12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 4:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 5:
(l'amendement du Département proposé est la suppression des mots ";et les revenus")
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 6:
(l'amendement du Département est: ";à défaut de l'adoption d'une telle loi ";suppression de" celui-ci adoptera en urgence…" Il s'agit donc de supprimer la clause d'urgence)
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 7:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 8:
(l'amendement du Département est: ";L'excédent sera affecté pour un tiers au moins au remboursement de la dette publique à concurrence du découvert du bilan…"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 9:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Art. 182 Assainissement des finances cantonales
Alinéa 1:
(Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat conduisent une politique…)
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 2:
(l'amendement du Département est: ";Le déficit du compte de fonctionnement ne dépassera pas 367 millions de francs..").
Il est rappelé que la Table Ronde a fixé un montant de 360 millions comme plafond du déficit du compte de fonctionnement.
De nombreux députés participant à la discussion estiment que l'Etat doit en rester à 360 millions, d'autant plus que certains partis ont déjà pris position, lors de leurs assemblées générales, sur ce chiffre. D'autres estiment que c'est le chiffre du projet de budget qui fait foi, et souhaitent en rester à la proposition de 367,4 millions de francs.
Il est remarqué que si la commission décide de maintenir dans le projet de loi constitutionnelle un montant de 360 millions de francs, elle se donne un mandat de trouver 7 millions d'économies pour le proposer ensuite au Grand Conseil. Toutefois, il faut bien reconnaître que l'accord a été signé à 360 millions, et que l'on ignorait à ce moment que le projet de budget prévoyait une augmentation de 200 postes de fonctionnaires. Plusieurs députés rappellent, en effet, que lorsque le chiffre de 360 millions a été arrêté, l'on ne connaissait pas encore les diverses implications du budget du Conseil d'Etat.
Il est probable que si la composition exacte de ce budget avait alors été connue, certain auraient demandé que le déficit du compte de fonctionnement soit inférieur à 360 millions. En effet, le budget proposé par le Conseil d'Etat comporte une progression extrêmement importante des dépenses sociales, outre l'augmentation de 200 postes de travail.
Finalement, la Présidente du Département des finances peut, ou pourrait, accepter que le montant inscrit dans l'article constitutionnel soit de 360 millions, mais il faudrait alors que la Commission des finances obtienne un quelconque résultat avant le vote du projet de loi constitutionnelle le 24 octobre 1998. Elle doit de toute façon en informer le Grand Conseil, afin que celui-ci puisse formellement décider, lors de l'adoption du projet de loi constitutionnelle, si le chiffre de 360 millions est maintenu ou s'il est porté à 367,4 millions.
Une vive discussion s'ensuit entre ceux qui pensent que lorsque l'on propose de faire des économies pour un montant de 360 millions de francs, on peut en faire pour 367, et ceux qui estiment que les chiffres calculés par le Conseil d'Etat l'ont été au plus juste.
Finalement, au vote:
Alinéa 2
(amendement du Département des finances ";Le déficit du compte de fonctionnement ne dépassera pas 367 millions de francs…")
3 OUI (3 S)
12 NON (3 L, 2 R, 2 DC, 3 AdG, 2 Ve)
Alinéa 2:
(amendement libéral: ";Le déficit du compte de fonctionnement ne dépassera pas 360 millions de francs pour le budget 1999")
11 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 1 Ve)
3 NON (3 AdG)
1 ABSENTION (1 S)
Alinéa 3:
(amendement du Département: ";Si la situation l'exige…")
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 4:
";Les mesures à prendre affecteront les charges et les revenus"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 5:
";Le Conseil d'Etat arrête en bloc les mesures énumérées à l'art. 183"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 6:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 7:
(amendement du Département: Modification du texte et suppression de… ";et les revenus")
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 8:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Art. 183 Mesures affectant les charges et les revenus
Alinéa 1, let a
(modification du Département: ";Les deux montants: 21'948 et 32'922". ";Ces deux montants seront indexés selon la législation fédérale")
Alinéa 1, let a
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let b:
(amendement du Département: ";Suppression de ";…occupés régulièrement…")
(amendement de la commission: ";Obligation pour les membres du personnel de l'Etat… ainsi que des membres des pouvoirs exécutif et judiciaire… de participer pour moitié au coût de l'assurance perte de gain"
Alinéa 1, let b:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let c:
(amendement du Département: ";Suppression de ";…occupés régulièrement…", sinon le texte maintenu tel quel)
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let d:
(amendement du Département: ";Suppression de ";occupés régulièrement…")
(amendement de la commission: ";Limitation pour les années 1999 à 2002, de l'adaptation au coût de la vie des traitements du personnel de l'Etat… ainsi que des membres ";des pouvoirs exécutif et judiciaire"… seule est indexée la partie de traitement annuelle ou égale à 60'000 francs de participer pour moitié au coût de l'assurance perte de gain"
Alinéa 1, let d:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let e:
";Réduction de 0,5% des traitements annuels des membres du personnel de l'Etat…"
(amendement du Département: ";Suppression de ";…occupés régulièrement…")
Alinéa 1, let e:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Le vote définitif des alinéas c), d) et e) est réservé, suite au résultat du complément d'information sur l'égalité de traitement face aux occupations à temps partiel.
Alinéa 1, let f:
";Garantie pour les années 1999 à 2002 du versement des annuités et de la progression de la prime de fidélité"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 ABSTENTIONS (3 AdG)
Alinéa 1, let g:
";Réduction de 2% des traitements annuels des membres du Conseil d'Etat et du Chancelier"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let h:
";Réduction de 2% des jetons de présence des députés du Grand Conseil"
Alinéa 1, let h:
";Réduction de 10%…"
5 OUI (3 L, 2 DC)
10 NON (3 S, 3 AdG, 2 R, 2 Ve)
";Réduction de 5%…"
10 OUI (3 L, 1 R, 2 DC, 2 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
2 ABSTENTIONS (1 R, 1S)
L'amendement de réduction de 5% des jetons de présence des députés au Grand Conseil est accepté.
Alinéa 1, let i:
";Augmentation de 60 millions de francs du capital de dotation des transports publics"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 1, let j:
(amendement du Département: ";Modification de l'exploitation des lignes de campagne des transports publics genevois à la charge des communes pour un montant de 5 millions par année, au plus"
Comme il n'est pas certain que le montant de 5 millions de francs puisse être atteint par année, ou dans les 4 ans, suite à l'accord signé avec les communes, il est proposé que ce texte fasse l'objet d'une nouvelle rédaction d'ici à la séance prochaine.
Alinéa 2, let a:
Introduction d'une contribution spéciale
Ici se pose un problème d'ordre constitutionnel. En effet, en droit suisse, l'égalité devant la loi en matière d'impôt signifie qu'il n'est pas possible de percevoir un impôt linéaire, et que l'on doit tenir compte de la capacité contributive de chaque contribuable. Le taux d'imposition devrait être progressif par tranche, mais la norme peut éventuellement se défendre dans la mesure où elle est limitée dans le temps.
Le problème est jugé suffisamment important pour que le vote soit reporté au moment du vote final par la commission de l'article.
Alinéa 2, let b:
";Abandon pour les années 1992 à 2002, par les communes, au profit de l'Etat, de leur part de recettes fiscales…"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 2, let c:
";Institution d'une contribution annuelle… pour les piscines"
7 OUI (3 S, 1 R, 2 V, 1 L)
4 NON (3 AdG, 1 L)
4 ABSTENTIONS (1 R, 2 DC, 1 L)
Alinéa 2, let d:
(amendement de M. Bernard Annen: ";Suppression du point 12: ";Remorques attelées à un motocycle"
2 OUI (1 L, 1 Ve)
8 NON (3 S, 2 R, 1 V, 2 DC)
5 ABSTENTIONS (3 AdG, 2 L)
(amendement de M. Chaïm Nissim: ";Les petites motos polluant moins que les grandes voitures, suppression de la taxe pour les premières, et légère augmentation de la taxe pour les secondes"
1 OUI (1 Ve)
9 NON (3 L, 2 R, 2 DC, 2 S)
5 ABSTENTIONS (3 AdG, 1 V, 1 S)
Alinéa 2, let d:
";Taxe automobile dans son ensemble"
8 OUI (1 L, 2 R, 2 DC, 2 S)
3 NON (3 AdG)
4 ABSTENTIONS (1 V, 2 L, 1 S)
Alinéa 3:
";Le Conseil d'Etat est compétent pour adopter par voie réglementaire…"
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Art. 184 Réforme de l'Etat
Alinéa unique:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
Un vote d'ensemble sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle est alors fait, sous réserve des votes reportés en dernière lecture.
Vote indicatif:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
7 octobre 1998
La Commission des finances s'est réunie une dernière fois le 7 octobre 1998 pour résoudre les problèmes en suspens, concernant notamment l'égalité entre hommes et femmes, et la progressivité de la contribution spéciale.
Mme Calmy-Rey, conseillère d'Etat, en a profité pour présenter quelques ultimes amendements. Il y a lieu, en effet, de relever que le projet de loi constitutionnelle issu en partie des négociations et de la concertation de la Table Ronde, a été ajusté dans ses moindres détails, jusqu'au dernier moment, afin de prendre en compte, d'une part, les demandes légitimes de certains partenaires politiques ou sociaux, et d'autre part, d'en vérifier la constitutionnalité.
C'est ainsi qu'à l'art. 97 A al. 2, il est proposé, par le Département des finances, d'ajouter les termes ";par période biennale" pour tenir compte d'une remarque de la CGAS en matière d'investissement, et accorder ainsi une souplesse supplémentaire au budget d'investissement.
L'exigence de couverture de 80% par les amortissements, est ainsi portée sur deux ans, la seconde année pouvant compenser la première.
Sur 12 commissaires présents au moment du vote, cet amendement est adopté par:
Art. 97 A, alinéa 2
10 OUI (2 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve)
2 NON (2 AdG)
En ce qui concerne l'art. 183 al. 1 let b, le texte en est entièrement modifié. Le Directeur de l'Office du personnel signale qu'il est apparu important de mettre dans le projet de loi lui-même certaines explications qui figuraient dans l'exposé des motifs, notamment le mode de fonctionnement de cette perte de gain qui consiste à payer jusqu'à deux années de salaire sur une période d'observation de trois ans.
Par ailleurs, le terme ";d'assurance" qui avait suscité pas mal de discussion, a été enlevé et remplacé par ";indemnisation de la perte de gain", ceci pour tenir compte du fait que l'Etat pratique une forme d'auto-assurance.
Sur le fond du mécanisme prévu, rien n'a été changé par rapport au texte précédent.
Vote de la commission:
Article 183 al. 1 let b:
(Nouvelle rédaction)
10 OUI (2 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve)
2 NON (2 AdG)
Alinéa 1, let c:
";Suppression de la participation mensuelle de l'employeur à l'assurance maladie"
Le Directeur de l'OFP signale que la participation de 10 millions de l'Etat aux membres du personnel occupé régulièrement, est indiquée dans l'exposé des motifs. Comme le Conseil d'Etat souhaite proposer aux Caisses de prévoyance (CIA, CEH, SIP) de reprendre à leur charge le versement de la participation à l'assurance maladie, il est proposé dans la loi d'indiquer ";actifs et retraités". On se demande dans quelle mesure il est possible de reporter sur les caisses de prévoyance, cette participation alors qu'elles n'en ont pas encore discuté avec l'Etat.
Plusieurs rédactions successives de cet alinéa sont proposées. Il est finalement décidé qu'une formulation définitive sera rédigée par M. Pettmann, directeur de l'OFP.
Alinéa 1, let g:
(Rectificatif de l'amendement pour les années 1999 à 2002, et lorsque l'application du présent article conduit ";pour le personnel occupé régulièrement" un solde net de revenus)
Mme Calmy-Rey, conseillère d'Etat, explique qu'il s'agit du problème soulevé par le Bureau de l'égalité, à savoir la discrimination indirecte des temps partiels majoritairement occupés par des femmes. Il est signalé que la rédaction de l'al. 1 let g s'inspire des conclusions de l'avis produit par le Bureau fédéral de l'égalité.
La proposition intermédiaire qui en résulte est financièrement supportable. En quelque sorte, il s'agit d'une prime au temps partiel délivrée sous la forme d'un montant fixe de 300 francs par année. Le coût de cette proposition est de 1,7 millions.
La commission rappelle que ce montant de 1,7 millions est à retrouver dans l'analyse qui sera faite du budget, puisque le déficit de 360 millions ne saurait être remis en cause.
La modification de l'amendement est votée. Commissaires présents au moment du vote: 13.
Alinéa 1, let g:
8 OUI (3 S, 2 R, 2 L, 1 Ve)
5 ABSTENTIONS (2 DC, 3 AdG)
Alinéa 1, let k:
(Nouvelle formulation: ";Modification par les transports publics de l'offre en matière de lignes de campagne (5 millions), celles-ci pouvant être reprises par les communes")
Mme Calmy-Rey souligne que, suite aux différentes réserves exprimées lors de la dernière séance, la nouvelle formulation contient la notion de ";l'offre" de lignes de campagne, et que les ";communes" sont mentionnées dans cette affaire. Au fond, la formulation actuelle de l'article présente la réalité de ce qui a été discuté avec les TPG.
L'Etat réduira son effort de 5 millions. Il en résultera soit des diminutions de prestations pour certaines lignes, soit des reprises par les communes, du financement de ces lignes.
Cet article ne dit pas quelle est la part de la suppression, et quelle est la part des reprises par les communes. De ce point de vue, il n'y a pas d'obligation pour les communes.
Au vote, la nouvelle formulation est adoptée, sur 12 commissaires présents:
Alinéa 1, let k:
7 OUI (2 L, 1 R, 2 DC, 1 S, 1 Ve)
3 NON (3 AdG)
2 ABSTENTIONS (2 S)
Alinéa 2, let a:
";Les personnes physiques assujetties à la contribution spéciale sur le revenu sont celles qui sont assujetties à l'impôt sur le revenu… ";le taux de la contribution est fixé à 1% lorsque ce revenu dépasse 20 000 francs""
Mme Calmy-Rey, conseillère d'Etat, signale que la formule a été rétablie telle qu'elle résulte de l'accord, à savoir que le taux de la contribution est de 1% lorsque le revenu dépasse 20 000 francs, ce qui permet de récupérer les recettes perdues dans la formulation des propositions d'amendements qui stipulaient: ";le taux de la contribution est fixé à 1% de la part de ce revenu qui dépasse 20 000 francs."
";Les personnes physiques s'acquittent d'une contribution forfaitaire sur la fortune de 500 francs lorsque la fortune nette imposable ne dépasse pas 1 million de francs, de 1 000 francs lorsqu'elle est comprise entre 1 000 001 francs et 2 millions de francs, et de 2 000 francs lorsqu'elle dépasse 2 millions de francs".
La conseillère d'Etat souligne que la nouvelle formulation fait apparaître un palier supplémentaire de 1 000 francs entre 1 million de francs et 2 millions francs de fortune, qui rapporte un montant de quelques 2 millions de francs. Il convient de préciser que cette formulation suit la demande faite par la Chambre de Commerce qui souhaitait l'introduction de paliers dans la contribution forfaitaire sur la fortune.
L'augmentation de revenus supplémentaires, évaluée à 2 millions de francs, permet de supprimer la taxe sur les piscines.
Deux problèmes sont ainsi résolus d'un seul coup.
Vote:
Alinéa 2, let a:
";Le taux de la contribution est fixé à 1% lorsque ce revenu dépasse 20 000 francs"
9 OUI (2 L, 1 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve)
3 NON (3 AdG)
Alinéa 2, let a:
";Les personnes physiques acquittent une contribution forfaitaire sur la fortune de 500 francs lorsque la fortune nette imposable ne dépasse pas 1 million de francs, de 1 000 francs lorsqu'elle est comprise entre 1 000 0001 francs et 2 millions de francs, et de 2 000 francs lorsqu'elle dépasse 2 000 000 de francs"
9 OUI (2 L, 1 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve)
3 NON (3 AdG)
Suppression de l'art. 2, let c:
Alinéa 2, let c:
";Institution d'une contribution à la charge des propriétaires de piscines privées"
9 OUI (2 L, 1 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve)
3 ABSTENTIONS (3 AdG)
Cet alinéa est supprimé.
Article 183
Alinéa 1, let c:
A la suite de la demande de la commission, M. Pettmann, directeur de l'OFP, propose la formulation suivante: ";Suppression de la participation mensuelle de l'employeur à l'assurance maladie des membres du personnel de l'Etat, des Etablissements publics cantonaux, du pouvoir judiciaire, dont le traitement dépasse 60 000 francs. Le montant déterminant est calculé au taux d'une occupation à plein temps. La participation de l'employeur à l'assurance maladie des retraités de la CIA, CEH, CP est supprimée."
Le texte proposé se heurte aux doutes de plusieurs députés. A l'heure actuelle, l'Etat verse 2,5 millions de francs aux retraités de la CIA, CEH, CP, et le texte proposé demande, en fait, aux caisses de prévoyance, de reprendre ce montant à leur charge.
Force est de constater que dans le document final issu de la Table Ronde, il n'était pas fait mention des retraités. Certains députés se demandent s'il est véritablement possible, dans un article constitutionnel, de pouvoir transférer de telles charges à des caisses de prévoyance qui sont autonomes.
Momentanément, il apparaît à plusieurs députés, qu'il vaudrait mieux enlever dans l'article, la mention relative tant aux actifs qu'aux retraités. Après une discussion nourrie, la commission décide de voter, sur la proposition suivante: ";D'adopter l'article tel qu'il l'a toujours été, sans l'adjonction d'actifs et de retraités, sous réserve d'une solution à trouver auprès des Caisses de prévoyance."
Article 183
Alinéa 1, let c:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 ABSTENTIONS (3 AdG)
L'al. 1 let c reste donc comme adopté précédemment.
Lors de cette séance du 7 octobre 1998, le ";Collectif du 14 juin" est auditionné. Il s'agit de Mme Nepomucena Marina-Decarro et de Mme Marie Budry qui exposent leur point de vue.
Elles espèrent que la Commission des finances saura lutter contre les discriminations indirectes que subissent les femmes qui travaillent à temps partiel. Elles estiment inéquitable que dans le cadre des mesures salariales prévues à l'encontre des catégories de salaire supérieur à 60 000 francs, celles-ci s'appliquent au personnel en fonction de la catégorie de salaire correspondant à une activité à plein temps.
Il leur est signalé que la commission n'a pas amendé la mesure, mais a instauré une disposition compensatoire (prime de 300 francs). Une des raisons de cette manière de procéder est le risque que l'ensemble du volet prévu soit annulé d'un seul coup, au cas où le Tribunal Fédéral ne retiendrait pas le point de vue du Bureau de l'égalité.
En effet, dans le cadre d'un recours, le Tribunal Fédéral pourra se prononcer sur cette indemnité de 300 francs en faveur du temps partiel, qui représente un montant global de 1,7 millions. Dans le pire des cas, si le Tribunal Fédéral estime que cette prime crée une nouvelle inégalité, il la supprimera. Les autres dispositions seront maintenues.
La mesure retenue par la Commission des finances est donc une mesure d'atténuation, qui limite les risques. Il est d'ailleurs probable qu'un recours soit déposé, ce qui permettra d'avoir une jurisprudence à ce sujet. Ceci n'est pas dépourvu d'intérêt dans la mesure où des problèmes de ce type peuvent se rencontrer dans de nombreuses autres législations sociales.
Le projet de loi constitutionnelle 7894, ayant été ainsi amendé à de nombreuses reprises, est soumis à un vote final:
Vote final:
12 OUI (3 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 2 Ve)
3 NON (3 AdG)
IV. Bref commentaire article par article
Article 97 A - Equilibre financier et stabilisation de la dette publique (Nouveau)
Les principales modifications apportées à la formulation de cet article par rapport au texte initial, se trouvent aux alinéas 2, 3 et 6.
A l'alinéa 2, une formulation plus claire concernant la part des amortissements dans les investissements nets d'infrastructures a été retenue. Afin de donner une certaine souplesse au système proposé, il a été précisé que celui-ci s'appliquait par deux ans.
A l'alinéa 3, il a été préféré de faire référence à la situation économique plutôt qu'à un taux de chômage précis, qui n'est d'ailleurs qu'un des indices d'une situation économique détériorée.
A l'alinéa 6, la formulation, à défaut de l'adoption d'une telle loi, recouvre à la fois le refus d'une telle loi par le Grand Conseil ou par le peuple.
Par ailleurs, la clause d'urgence a été supprimée, les mécanismes constitutionnels ordinaires continuant de s'appliquer.
Dans les dispositions transitoires:
Article 182 - Assainissement des finances cantonales (Nouveau)
La clause d'urgence a également été supprimée.
Article 183 - Mesures affectant les charges et les revenus (Nouveau)
Art. 183 al. 1, let a: Les montants ont été modifiés pour être actualisés.
Art. 183 al. 1, let b: L'article a été entièrement repris pour être à la fois plus précis, et plus conforme aux nécessités juridiques.
Art. 183 al. 1, let d: Les membres du pouvoir exécutif ont été intégrés dans cet article.
Dans cette lettre d, comme dans la lettre e suivante, la notion ";d'occupation régulière" a été supprimée.
Art. 183 al. 1, let g: L'indemnité annuelle unique de 300 francs a été introduite pour éviter toute discrimination indirecte des femmes occupées à temps partiel. C'est du moins la réponse que la Commission des finances fournit aux préoccupations émises par le Bureau genevois de l'égalité, tout en étant parfaitement consciente qu'elle donne une autre réponse à ce problème que celle souhaitée par ce Bureau.
Art. 183 al. 1, let k (anciennement j): Adaptation du texte à la situation exacte actuelle.
Art. 183 al. 2, let a: La nouvelle formulation du texte résulte des travaux de la commission. Elle précise les modalités de perception de cette contribution spéciale, tant sur le revenu, que sur la fortune, ainsi que les conditions d'assujettissement des personnes morales de droit privé.
Art. 183 al. 2, let b: Sans changement.
Art. 183 al. 2 (ancienne let c): Suppression de l'impôt sur les piscines.
Art. 183 al. 2, let c (nouvelle, anciennement let d): Sans changement.
Art. 183 al. 3 (Nouveau): Cet alinéa est introduit afin de donner la compétence au Conseil d'Etat de prendre les mesures nécessaires pour l'application de l'art. 183 al. 1 et 2.
Article 184 - Réforme de l'Etat
Malgré la simplicité apparente du libellé de cet article, il s'agit là d'une disposition essentielle de ce qu'on a coutume d'appeler ";Le paquet ficelé". En effet, les mesures énumérées aux art. 97 A, 182 et 183, ne se comprennent que si l'art. 184 est appliqué avec vigueur par le Conseil d'Etat. Cet engagement a mainte fois été répété par les différents partenaires politiques de la Table Ronde.
L'art. 184 est donc une disposition essentielle du dispositif constitutionnel présenté à la votation populaire.
Article 2 souligné
La formulation de l'alinéa 2 et de l'alinéa 3, permet de préciser les modalités d'entrée en vigueur, et de sortie de diverses mesures prévues par le dispositif constitutionnel.
Conclusion générale
La démarche suivie par le Conseil d'Etat dans l'élaboration du budget 1999, est inédite. Elle a conduit à l'adoption par la Commission des finances, d'un projet de loi constitutionnelle qui lui a été présenté par le Conseil d'Etat, sous le titre Assainissement des finances cantonales. Ce titre à lui seul, résume l'ensemble du projet. Il s'agit bien de mesures à la fois transitoires, urgentes, mais aussi de dispositions définitives (art. 97 A), afin que le canton de Genève ne se retrouve plus dans la situation qu'il a connu ces dernières années.
La non-adoption de ces articles constitutionnels entraînerait, en effet, une crise grave. Déjà à l'heure actuelle, le Conseil d'Etat n'a plus guère de marge de manoeuvre en raison d'engagements financiers toujours plus lourds.
Ceux qui s'imaginent que le rejet populaire signifierait qu'il y a trop d'économies et pas assez d'impôts dans le paquet ficelé, feraient, à l'évidence, une grossière erreur. L'adoption de ce projet de loi constitutionnelle, soutenu par l'ensemble des partis gouvernementaux, quel que soit leurs hésitations, voire leurs réticences, représente la dernière chance pour les collectivités publiques, d'augmenter les ressources de l'Etat, tout en appliquant un strict programme d'économie, afin d'assainir les finances cantonales.
Cet assainissement seul redonnera à la politique gouvernementale une certaine souplesse nécessaire pour qu'elle puisse moduler son action. En ce sens, quelles que soient les opinions politiques divergentes, de gauche, de droite ou du centre, chacun a intérêt à ce que le Gouvernement puisse retrouver une marge de manoeuvre afin d'infléchir, dans tel ou tel sens, sa politique, et de pouvoir conduire une action gouvernementale.
Le refus des articles constitutionnels, entraînerait à court terme, le recours aux douzièmes provisionnels. La fonction publique y serait perdante immédiatement, mais à moyen et à long terme, le refus de ces articles constitutionnels conduirait Genève à une perte de stabilité dommageable pour tous.
Dans la situation actuelle, il importe avant tout de redonner une nouvelle attractivité économique (partant fiscale) à Genève. Cette attractivité est déjà fortement menacée par la fiscalité genevoise, très discriminatoire pour les grandes fortunes.
On peut comprendre que certains regrettent que l'effort demandé aux grandes fortunes apparaisse modeste par rapport aux sacrifices demandés à d'autres catégories de la population.
C'est qu'en réalité, l'effort assumé dans la fiscalité genevoise par les fortunes, est déjà considérable, beaucoup plus que dans d'autres cantons. Et que rien ne met Genève à l'abri d'un certain tourisme fiscal. La chute des ressources financières qui s'ensuivrait, serait une véritable catastrophe pour le canton.
A dire vrai, Genève vit depuis de nombreuses années au-dessus de ses moyens. Tout le monde n'en a pas encore pris conscience. C'est le mérite de l'actuel Conseil d'Etat, d'avoir commencé par établir un inventaire clair et net, qui n'a plus permis de contester certains chiffres. Cet inventaire a notamment dévoilé la spirale infernale de l'endettement dans laquelle Genève menaçait de s'engouffrer.
Les mesures proposées par le Conseil d'Etat, et longuement discutées lors des négociations de la Table Ronde, confirmées lors de la discussion de la Commission des finances, sont peu agréables. Elles ne correspondent certainement pas aux programmes politiques propres des partis gouvernementaux. Elles résultent d'un compromis dans lequel chacun, pour le bien commun, a dû laisser une part de ses revendications.
Est-ce à dire que personne n'y trouve son compte? Certes non. Chacun, au contraire, a probablement sauvé l'essentiel. C'est pourquoi le projet de loi constitutionnelle mérite, Mesdames et Messieurs les Députés, d'être soutenu. Il faut qu'une large majorité se dessine autour de lui pour le défendre. Il faut que chacun oublie les désagréments personnels que ce projet peut lui apporter, afin de contribuer au rétablissement de l'équilibre financier de notre canton.
La stratégie dite de la symétrie des sacrifices, à savoir autant de recettes nouvelles que d'économies, est la seule qui puisse permettre, dans le long terme, la réussite du redressement des finances publiques. On dira, mais à tort, que certaines recettes ne sont pas permanentes, alors que les économies le sont.
Ceci est faux. D'une part, il y a des recettes permanentes comme celles de l'impôt sur les véhicules à moteur. Il y a, d'autre part, des sacrifices qui ne sont pas aussi importants qu'ils peuvent apparaître au premier abord.
Il ne faut pas oublier que ce projet de loi constitutionnelle maintient les mécanismes salariaux, alors même qu'il prévoit une ponction sur les revenus de la fonction publique. Cette ponction est inférieure, dans la période 1999-2002, voire très inférieure au surcroît de ressources procuré par l'application des mécanismes salariaux.
En conclusion, la fonction publique ne perd pas autant qu'elle le croit. Par ailleurs, la contribution spéciale qui ressemble de plus en plus, sans l'être véritablement, à un centime additionnel par son mécanisme, n'est certainement pas ce que l'on souhaitait au printemps dernier. Il s'agissait alors, de prévoir une sorte de contribution sociale généralisée, prélevée sur l'ensemble des revenus bruts, et non des revenus nets.
Pour des raisons propres au droit fiscal fédéral, et par surcroît de sécurité, il a été préféré un prélèvement sur les revenus nets. Cela ne contribue pas véritablement à l'élargissement de l'assiette fiscale qui était l'un des objectifs du Conseil d'Etat. Là encore, certains milieux défavorisés s'en trouveront réconfortés.
Le mécanisme des articles constitutionnels est complexe. Il prévoit, d'une part, des dispositions transitoires visant à rétablir l'équilibre du compte de fonctionnement dans un délai de 5 ans. Il vise, d'autre part, par des dispositions définitives, à consacrer le principe d'équilibre financier pluriannuel du compte de fonctionnement, ce qui permet de stabiliser la dette publique. Surtout, il inscrit également dans une disposition constitutionnelle, la nécessaire réforme de l'Etat.
De cette manière, l'audit général de l'Etat mené à la demande du souverain par une fiduciaire, comme les nombreuses propositions jamais abouties de suppressions, de doublons ou de chevauchements, devraient désormais trouver une écoute plus favorable.
Il convient ici de dire, quelles que soient les économies à faire, quelles que soient les recettes à trouver, que la situation du canton de Genève ne sera rétablie que si des réformes de structure importantes sont entreprises.
Cette conviction est désormais celle de l'ensemble des partis gouvernementaux associés au Conseil d'Etat. Il s'agit là d'une étape importante, pour l'avenir de Genève. Tous ceux qui souhaitent que la République et Canton de Genève sorte de la récession afin de retrouver une période de prospérité qui, seule, permet de mener une politique sociale active en faveur des moins favorisés, tous ceux-là ne peuvent que souhaiter, Mesdames et Messieurs les députés, l'acceptation du projet de loi constitutionnelle, d'abord par le Grand Conseil, puis par le peuple souverain.
C'est dans cet esprit que la Commission des finances vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter le présent projet de loi constitutionnelle ainsi amendé.
PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE(7894)
modifiant la constitution de la République et Canton de Genève (Assainissement des finances cantonales) (A 2 00)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 97A Equilibre financier et stabilisation de la dette publique (nouveau)
1 La politique financière de l'Etat tend à l'équilibre du compte de fonctionnement (équilibre financier) et à la stabilisation de la dette publique sur des périodes de six ans (périodes-cadre).
2 Le compte de fonctionnement comprend les revenus et les charges. Les amortissements font partie des charges; ils représentent, par période biennale, 80% au moins des investissements nets d'infrastructure dont les charges financières sont supportées par l'Etat.
3 Le Conseil d'Etat peut prolonger de trois ans au plus la période-cadre avec l'approbation du Grand Conseil, si la situation économique l'exige et à la condition que les déficits de fonctionnement cumulés soient résorbés au terme de la période-cadre ainsi prolongée.
4 Le Conseil d'Etat décide des mesures affectant les charges et les revenus, qui sont nécessaires pour stabiliser la dette publique pendant la période-cadre et qui entrent dans sa compétence.
5 Le Conseil d'Etat propose au Grand Conseilles autres mesures nécessaires affectant les charges et les revenus.
6 Si la dette publique n'est pas stabilisée à la fin de la période-cadre, le Grand Conseil arrêtera par une loi soumise au référendum facultatif, une augmentation des centimes additionnels perçus sur les impôts. A défaut de l'adoption d'une telle loi, le Conseil d'Etat proposera immédiatement au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges.
7 Le Conseil d'Etat peut soumettre au Grand Conseil, en cours d'exercice, des amendements à la loi budgétaire annuelle.
8 Si, à la fin de la période-cadre, la somme des bonis excède celle des déficits du compte de fonctionnement, l'excédent sera affecté pour un tiers au moins au remboursement de la dette publique à concurrence du découvert du bilan.
9 La stabilisation de la dette publique et l'amortissement du découvert du bilan doivent permettre de réduire le rapport entre l'endettement public et le revenu cantonal.
Art. 182 Assainissement des finances cantonales (nouveau)
1 Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat conduisent une politique financière qui doit aboutir à l'équilibre du compte de fonctionnement de l'Etat à la fin d'une période de cinq ans qui s'ouvre à la date de l'entrée en vigueur de la présente disposition (période d'assainissement).
2 Le déficit du compte de fonctionnement ne dépassera pas 360 000 000 F, pour le budget 1999. Le Conseil d'Etat fixera chaque année, dans le délai prévu par la loi pour la transmission du budget au Grand Conseil, la limite du déficit du compte de fonctionnement pour l'exercice suivant. Chaque année, le déficit sera inférieur à celui de l'exercice précédent. Le compte de fonctionnement sera équilibré au terme de l'exercice 2003.
3 Le Conseil d'Etat peut prolonger d'une année la période d'assainissement avec l'approbation du Grand Conseil, si la situation économique l'exige. Dans ce cas le Conseil d'Etat fixera, dans le délai prévu par la loi, la limite du déficit pour l'exercice 2003.
4 Les mesures à prendre pour atteindreles objectifs ainsi fixés affecteront les charges et les revenus.
5 Le Conseil d'Etat arrête en bloc, dès l'entrée en vigueur de la présente disposition, les mesures énumérées à l'article 183.
6 S'il s'avère que les objectifs fixés au deuxième alinéa ne seront pas atteints, le Conseil d'Etat proposera au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges et les revenus.
7 Si l'équilibre du compte de fonctionnement n'est pas réalisé à la fin de la période d'assainissement, le Grand Conseil arrêtera par une loi soumise au référendum facultatif, une augmentation des centimes additionnels perçus sur les impôts. A défaut de l'adoption d'une telle loi, le Conseil d'Etat proposera immédiatement au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges.
8 Le Conseil d'Etat peut soumettre au Grand Conseil, en cours d'exercice, des amendements à la loi budgétaire annuelle.
Art. 183 Mesures affectant les charges et les revenus (nouveau)
1 Le Conseil d'Etat arrête les mesures suivantes affectant les charges :
Ces montants seront indexés selon la législation fédérale.
Le Conseil d'Etat règle la situation des personnes qui vivent dans un home ou dans un établissement médico-social, et celle des orphelins et des enfants à charge.
2 Le Conseil d'Etat arrête les mesures suivantes affectant les revenus :
Ces montants ne peuvent être augmentés avant le premier janvier 2003, au plus tôt.
3 Le Conseil d'Etat est compétent pour adopter par voie réglementaire toutes les mesures utiles à l'application immédiate, dès leur entrée en vigueur, des mesures énumérées aux al. 1 et 2 ci-dessus.
Art. 184 Réforme de l'Etat (nouveau)
En arrêtant les mesures d'assainissement des finances cantonales, le Conseil d'Etat met en oeuvre la réforme de l'Etat.
Article 2
1 Le Conseil d'Etat fixe la date de l'entrée en vigueur de l'article 97 A.
2 Les articles 182, 183 et 184 entrent en vigueur le 1er janvier 1999; les règles de droit antérieures qui seraient contraires à ces dispositions sont suspendues pendant la durée de validité de celles-ci.
3 Les art. 182, 183 et 184 seront abrogés par l'entrée en vigueur de l'article 97A; les mesures énumérées à l'art. 183, hormis celles dont la durée est fixée dans le texte, demeurent toutefois en vigueur jusqu'à leur abrogation ou à leur modification par une loi.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Le projet de loi constitutionnelle qui est soumis à l'approbation du Grand Conseil est probablement le plus important de cette législature. Tout d'abord, il convient de relever les circonstances dans lesquelles ce projet a été élaboré. Les partis représentés au Conseil d'Etat se sont mis d'accord sur les voies et moyens censés conduire au rétablissement des finances publiques en dehors de l'enceinte prévue constitutionnellement pour débattre des projets législatifs, à savoir le Grand Conseil. Des représentants de la bande des cinq partis s'étant entendus sur les principales orientations politiques de ce projet il ne faisait guère de doute que les débats en commission ne déboucheraient pas sur des changements significatifs et que l'Alliance de gauche serait seule à défendre une vision différente du rôle de l'Etat et des moyens pour réduire les déficits.
Cela n'a pas empêché des débats en commission parfois cocasses. En effet, si l'orientation générale du projet est politiquement claire, sa rédaction l'était beaucoup moins et a mis en évidence des contradictions et des erreurs de calcul sur les conséquences financières des mesures prévues. Nous ne nous attarderons pas dans le présent rapport sur cet aspect des débats pour privilégier le fond de la question.
Des dispositions permanentes dangereuses
Les médias se sont focalisés sur les mesures à court terme en vue de réduire le déficit à 360 millions pour l'année 1999. Or ces mesures, bien que significatives, sont secondaires au regard de celles qu'entraîneront inévitablement les dispositions prévues par l'article 97A nouveau. En effet celles-ci inscrivent dans la Constitution le principe même de l'équilibre budgétaire. Le dogme de l'équilibre financier d'une collectivité publique, cher aux économistes néolibéraux, est ainsi retenu, non pas dans une période transitoire mais comme un principe permanent. La droite qui aime tant parler de flexibilité s'agissant des conditions de travail des salariés, ne craint pas ici de manifester une rigidité à toute épreuve. Les conséquences d'une telle disposition ne sont pas anodines, indépendamment des modalités d'application. Ceux qui aujourd'hui nous proposent l'équilibre permanent sur des périodes de six ans semblent avoir oublié les fameux plans quadriennaux de ces dernières années susceptibles d'aboutir aux mêmes résultats et qui ont lamentablement échoués. Et s'ils ont échoué ce n'est pas parce qu'ils n'étaient pas inscrits dans la Constitution mais parce qu'ils étaient basés sur une conception économique classique selon laquelle à une période de récession courte succéderait une période de croissance suffisamment longue pour rattraper les déficits accumulés. Or la réalité est venue contredire ce type d'analyse. Aujourd'hui, on nous propose de reprendre le même vieux schéma et de l'inscrire dans la Constitution !
Nombreux sont ceux qui nous expliquent à longueur d'année que nous vivons à l'ère de la mondialisation et de la libéralisation de tous les échanges. Que cela serait inévitable et qu'on ne pourrait rien y changer. Ce sont les mêmes qui ne tirent pas les conclusions de ces évolutions et qui ne voient pas que nous sommes entrés dans une crise structurelle permanente. A peine un redémarrage de la croissance dans notre pays vient-il d'être enregistré que déjà les nuages s'accumulent. Après avoir frappé les pays de l'Asie du Sud-Est, touché successivement la Russie et l'Amérique latine, la crise risque fort de s'étendre à l'ensemble de l'économie mondiale. Et dans ce contexte une alliance socialo-libérale prétend équilibrer les comptes de notre petit canton sur des périodes de six ans.
Les partisans de l'équilibre budgétaire à tout prix ne font pas que se tromper sur l'évolution économique de cette fin du vingtième siècle, ils sont aussi et surtout convaincus qu'un Etat prétendument moderne se doit d'être soumis aux impératifs de l'économie libéralisée. Cela signifie que la part des dépenses de l'Etat doit être réduite même si la hausse de ces dépenses est essentiellement la résultante des reports de coûts effectués par l'économie capitaliste pour accroître ses taux de profits.
Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, on nous propose d'inscrire ce principe immuable dans notre Constitution : nous aurons des cycles budgétaires de six ans - neuf ans si cela va très mal - mais au bout du compte il y aura un équilibre. Comment cet équilibre sera-t-il obtenu ? En agissant sur les dépenses et sur les recettes mais aussi en limitant les investissements qui devront au moins être couverts à hauteur de 80% par les amortissements. Avec cette méthode, les investissements ne seront plus déterminés par les besoins et les choix effectués en matière d'emploi ou d'infrastructures mais par les montants des investissements réalisés dans les années précédentes. Ainsi, les importants amortissements que nous connaissons aujourd'hui sont le résultat des surinvestissements effectués dans les années de croissance. Ils déterminent donc les investissements de ces prochaines années. Mais comme depuis 1993 les investissements sont globalement à la baisse, les amortissements vont tendre à diminuer progressivement et limiter à nouveau le volume d'investissement. Ce lien mécanique - basé en outre sur des valeurs en francs courants - peut conduire à une réduction constante des investissements à moins que l'on décide de ne pas respecter la Constitution. Se rendant partiellement compte des dangers d'une telle politique, la nouvelle majorité de la Commission des finances a amendé le projet de loi en précisant que la couverture par les amortissements s'applique aux investissements nets d'infrastructure et que le taux de 80% doit être respecté sur deux ans. Cela ne change rien au principe du mécanisme mais cela permet d'alléger quelque peu la contrainte. Cependant si l'on examine les propositions du budget 1999, on s'aperçoit que les investissements nets d'infrastructure financés par l'impôt sont budgétisés à hauteur de 302 millions de francs. Les amortissements étant de 219 millions la couverture est donc de 72%. Si le Conseil d'Etat voulait respecter la norme constitutionnelle, le montant des investissements nets d'infrastructure ne devrait pas dépasser 274 millions. Quand à l'application de la norme sur deux ans elle impliquerait que le budget de l'an 2000 réduise les investissements nets d'infrastructure à 246 millions, si le montant de 302 millions inscrit au budget 1999 est maintenu. On le voit la contrainte est très forte.
Venons-en maintenant aux mécanismes relatifs aux charges et aux revenus. Pendant la période-cadre, tant le Conseil d'Etat que le Grand Conseil doivent prendre les mesures nécessaires affectant les unes et les autres. L'exemple donné pour la première période-cadre jusqu'à 2003 montre bien dans quelle direction l'on se dirige : pour les charges, des diminutions qui pour l'essentiel sont permanentes, pour les revenus, des mesures qui sont principalement temporaires. Ensuite, si la dette publique n'est pas stabilisée à la fin de la période-cadre, le Grand Conseil est tenu de décider d'une hausse des centimes additionnels qui est obligatoirement soumise au référendum facultatif ce que prévoit de toute manière l'article 95 de la Constitution. Si les centimes additionnels font l'objet d'un référendum et sont rejetés par le peuple, alors on adopte de nouvelles mesures affectant les charges assorties, dans le projet initial, d'une clause d'urgence qui empêche tout référendum. Comme on le voit, les charges et les revenus sont mis sur pied d'égalité ! La majorité de la Commission des finances a cru bon de supprimer la référence à la clause d'urgence dans le projet qui nous est soumis car évidemment elle aurait attiré l'attention des électrices et des électeurs sur ce déséquilibre. Mais cela ne change rien au fond puisque la clause d'urgence est prévue par la Constitution à l'article 55 et qu'elle ne peut s'appliquer qu'aux dépenses.
Enfin, le mécanisme prévoit qu'il est possible d'enregistrer des déficits dans la période-cadre de six ans. Mais comme la dette publique doit impérativement être stabilisée au terme de la période, ceux-ci devront non seulement être effacés mais rattrapés. Dans une telle configuration, l'existence de déficits ne peut porter que sur des montants très faibles. A la limite, la contrainte constitutionnelle est telle que le Grand Conseil pourrait voter un budget global pour 6 ans ! Dans le projet initial du Conseil d'Etat, le prolongement de la période-cadre pouvait intervenir au cas où le taux de chômage, en moyenne annuelle, dépasse 8% de la population active. Outre le fait que le taux de chômage ne reflète que partiellement la détérioration du marché du travail, il convient de rappeler ici que ce taux n'a jamais été atteint depuis 1991 et que son niveau le plus élevé - 7,8% - était celui de l'année 1997. Se rendant compte, là aussi, de l'absurdité d'une norme aussi rigide, la majorité de la Commission des finances a annulé cette disposition pour la remplacer par une autre. La prolongation de la période d'assainissement peut intervenir "; si la situation économique l'exige ". Lorsque nous avons demandé ce que cela signifiait, personne n'a été en mesure de nous répondre et pour cause. Mais là encore il n'y a pas de changement sur le fond puisque, au terme de la période-cadre prolongée, le compte de fonctionnement devra être équilibré et la dette stabilisée en regard du revenu cantonal. On remarquera que l'amendement proposé par le Conseil d'Etat ne fait aucune référence à la situation sociale du canton, seule la situation économique peut déterminer la prolongation de la période-cadre.
En conclusion, l'article 97A nouveau introduit un cadre budgétaire rigide sur des périodes de 6 ans ne tenant aucun compte des profondes transformations de l'économie et il privilégie les coupes dans les dépenses au détriment des recettes nouvelles.
Des dispositions transitoires trompeuses
L'article 182 nouveau reprend les mêmes mécanismes que ceux de l'article 97A en fixant la première période-cadre pour cinq ans soit jusqu'à 2003. Le déficit de l'année 1999 étant fixé à 360 millions on comprend aisément qu'il faudra trouver 360 millions supplémentaires d'économies en quatre ans, c'est-à-dire 90 millions par an pour aboutir à l'équilibre du compte de fonctionnement. A ce montant il convient d'ajouter 140 millions provenant de la disparition de la contribution spéciale au terme des cinq ans. Ce sont donc 500 millions d'économies supplémentaires qu'il faudra trouver en quatre ans. Le Conseil d'Etat qui s'est voulu transparent dans la mise sur pied de son budget 1999 se garde bien, comme la nouvelle majorité de ce Grand Conseil, de nous dire quels seront les postes des dépenses qui seront touchés par ces nouvelles mesures d'économie. Les salaires de la fonction publique ? Les subventions ? Les prestations aux personnes âgées ? L'aide aux chômeurs ? Les postes de travail ? Ou, comme cela est probable les cinq domaines à la fois ? Sur ce point c'est le grand silence. Ainsi les électrices et les électeurs seront amenés à se prononcer sur un texte constitutionnel dont ils ne verront qu'une facette : les économies et les recettes annoncées pour 360 millions mais pas les diminutions de dépenses de 500 millions imposées par la suite ! Cette manière de procéder n'est pas admissible sur le plan du fonctionnement démocratique.
Le mécanisme que nous venons d'évoquer est le scénario minimum. En effet les auteurs de la modification constitutionnelle semblent ignorer qu'une initiative populaire du parti libéral demande une réduction des impôts qui, si elle est adoptée par le peuple, entraînera une diminution de recettes de 88 millions pour la première année et jusqu'à 923 millions cumulés au terme de la mise en oeuvre complète de l'initiative. Que la droite de ce Grand Conseil préfère taire cette éventualité n'est pas pour nous surprendre. Que les Socialistes et les Verts n'en touchent mot et n'aient pas au moins demandé le retrait de cette initiative en échange de leur accord, voilà qui est consternant.
Des mesures immédiates injustes
Tous les partenaires à l'accord issu des discussions de la table ronde considèrent qu'il y a parité dans les sacrifices demandés à la population. La majorité des médias ont fait de même parlant de sens des responsabilités et d'efforts partagés. Jugeons sur pièces !
1. Les bénéficiaires des prestations complémentaires cantonales AVS/AI.
L'exposé des motifs du projet de loi souligne que les invalides genevois reçoivent un revenu minimum supérieur à ce qui se pratique dans les autres cantons et que les personnes âgées sont mieux loties qu'ailleurs en Suisse. Cette différence qui devrait faire la fierté de notre République est présentée ici comme une tare. Rendez-vous compte en 1997 les invalides disposent pour vivre de 2 082 F par mois, loyer et assurance-maladie payée et les personnes âgées de 1 811 F ! Dès lors il est normal d'enlever aux invalides 271 F par mois, cela ne constitue "; qu'une " diminution de revenu de 13% ! Faut-il rappeler que les invalides sont des personnes dans la force de l'âge et que leurs besoins, sans compter ceux spécifiques à leur handicap, sont proches de n'importe quelle personne des tranches d'âge correspondantes. J'ai même entendu un député de l'Alternative, dont je tairais le nom car j'ai honte pour lui, dire qu'une personne invalide pouvait se passer de télévision. Mesdames et Messieurs les députés, posséder un poste de télévision est, pour certains d'entre vous un luxe que des personnes contraintes de recourir aux prestations complémentaires ne devraient plus se permettre. Parmi celles et ceux qui aujourd'hui veulent réduire les prestations aux invalides il y en a qui organisent des galas de charité pour venir en aide aux institutions s'occupant de handicapés. Assurément certains préfèrent la charité à la justice.
Quant aux personnes âgées qui disposent de quelques économies, souvent accumulées péniblement pendant toute une vie, elles devront renoncer à cette sécurité - souvent d'ailleurs plus psychologique et morale que matérielle - sous peine de ne plus bénéficier des prestations complémentaires. Prenons l'exemple d'une personne âgée disposant de 50 000 F d'économies, de sa seule AVS, d'un loyer de 700 F et de 300 F d'assurance-maladie. Elle touche actuellement 400 F par mois de complément à son AVS de 1 990 F en tenant compte que le 20% de sa fortune est considérée comme un revenu. Avec la prise en compte de la fortune à hauteur de 50%, c'est une somme de 400 F par mois qui lui sera supprimée pendant deux ans. Mais il faut surtout relever que ces personnes âgées qui doivent faire appel aux prestations complémentaires pour vivre décemment se trouvent dans cette situation parce que l'AVS n'assure pas un niveau de vie acceptable à des générations de salariés qui ont connu des petits salaires. Nous avons demandé en commission le nombre d'invalides et de personnes âgées qui seront touchés par ces deux mesures. Nous attendons toujours la réponse...
Il faut aussi relever que les personnes frappées par ces dispositions seront également concernées par les mesures fiscales : selon leur situation, elles devront payer un forfait supplémentaire de 25 F , 50 F , 100 F voire davantage. Prenons le cas concret d'une personne invalide au bénéfice des prestations complémentaires. Son revenu imposable était en 1997 de 15 151 F et elle a du s'acquitter de 2 461 F d'impôt. Avec la diminution de son revenu, consécutive à l'alignement sur le minimum pour les personnes âgées, son revenu imposable sera de 11 891 F Elle devra donc payer en sus 100 F de contribution spéciale. Sa contribution au redressement des finances sera au total de 3 360 F alors qu'un contribuable disposant d'un revenu imposable de 200 000 F payera au titre de la contribution spéciale 2 000 F Deuxième exemple relatif à des catégories de la population les plus démunies et dont on prétend qu'elles ont été épargnées par le plan de mesures: une femme seule avec un enfant bénéficiaire du RMCAS. Son revenu imposable est de 14 635 F Elle doit s'acquitter de 2 420 F d'impôt. Avec la contribution spéciale c'est un supplément de 100 F qu'elle devra payer et qui sera forcément pris sur l'essentiel.
Ces exemples concrets montrent que ceux qui soutiennent de telles propositions n'ont pas de pudeur. Ils insinuent au travers de ces mesures qu'il y a des "; privilégiés " parmi les moins bien lotis de nos concitoyens. Pire encore, ils entrent dans une logique régressive qui n'a pas de raison de s'arrêter. Les personnes âgées touchant des prestations complémentaires disposent d'un revenu supérieur à celui des personnes bénéficiaires du RMCAS ou de l'assistance publique. Quand va-t-on les considérer à leur tour comme des "; privilégiées " par rapport à ces dernières ? Cette logique néolibérale consistant à ne voir des prétendus privilégiés qu'au sein des couches populaires coexiste avec le fameux slogan : "; donner à ceux qui en ont véritablement besoin ". Nous savons ce que cela veut dire : diminuer globalement l'effort fait en faveur des plus faibles de la société. En Grande-Bretagne, Tony Blair adhère à cette logique. Nous constatons aujourd'hui que ses cousins genevois lui emboîtent le pas.
2. Les mesures touchant les salariés de la fonction publique
Tout d'abord pour montrer sa générosité, le projet de loi constitutionnelle garanti le versement des annuités et de la progression de la prime de fidélité jusqu'à 2002. On inscrit donc dans la Constitution que la loi sur les traitements doit être respectée... pendant quatre ans. Il faut rappeler ici que l'application des mécanismes salariaux n'est que justice par rapport au mode de rémunération dans le secteur public. Certains présentent cette application comme une hausse des salaires alors qu'il s'agit de l'entrée en force progressive, étalée sur vingt-cinq ans, du salaire correspondant à la classe de fonction. En d'autres termes le mécanisme salarial prévoit que les employés du secteur public sont moins payés en début de carrière pour l'être davantage à la fin. Cela détermine donc un salaire moyen sur l'ensemble d'une vie professionnelle. La non application des mécanismes salariaux équivaut donc à une baisse de ce salaire moyen qui a également des implications négatives au niveau de la retraite. La mise en oeuvre des mécanismes salariaux signifie une adaptation annuelle des traitements de 1,3%.
Après l'affirmation de cette prétendue générosité limitée dans le temps venons-en aux retenues salariales qui elles sont permanentes. La première concerne une participation des salariés de 2% pour couvrir le versement du salaire en cas de maladie. La deuxième consiste à supprimer purement et simplement la participation de 30 F par mois à l'assurance-maladie. La troisième prévoit une indexation limitée. Et la dernière introduit une baisse de salaire de 0,5%. Mais rassurez-vous, les partis qui se sont mis d'accord sur ce projet vont épargner partiellement les plus bas salaires de l'Etat. Ainsi la suppression de la participation à l'assurance-maladie et la baisse de salaire de 0,5% ne s'appliqueront qu'aux salaires supérieurs à 60 000 F Quant à l'indexation, elle ne s'appliquera que jusqu'à 60 000 F et touchera aussi des retraités de la fonction publique. Nous retrouvons ici le principe libéral énoncé plus haut "; donner à ceux qui en ont véritablement besoin " c'est-à-dire, dans le cas qui nous préoccupe, prendre à la majorité des salariés de l'Etat et aux pensionnés.
Le seuil fixé défavorise les personnes travaillant à temps partiel puisqu'elles seront la plupart du temps au-dessus des 60 000 F pour le calcul des retenues et en dessous de ce chiffre pour le salaire réel. Pour les partis, notamment les Verts, qui se targuent de vouloir favoriser le partage du travail par le biais du temps partiel c'est une réussite. Enfin, en dépit d'avis de droit contradictoires, nous continuons à penser que ce système est une discrimination indirecte vis-à-vis des femmes puisque celles-ci occupent la toute grande majorité des emplois à temps partiel et que ce phénomène est très directement lié à la division sexuelle des tâches dans notre société. Devant les réactions du Bureau de l'égalité et du Collectif du 14 juin, le Conseil d'Etat a proposé un amendement pour tenter de mieux faire passer cette discrimination au moment du vote populaire. Ainsi les personnes travaillant à temps partiel et dont le salaire réel est inférieur à 60'000 F toucheront une prime de 300 F jusqu'à 2002. Quelle générosité! Ce montant ne correspond même pas à celui de la participation à l'assurance-maladie de 360 F La réduction de traitement de 0,5% et la limitation de l'indexation quant à elles passent aux oubliettes.
3. Mesures touchant les communes
Les dispositions touchant les communes ont été négociées avec l'Association des communes genevoises et nous n'avons pas a priori d'opposition à ce projet. Cependant nous nous interrogeons sur la manière dont seront répercutés les coûts sur les communes. Sera-t-il tenu compte de leur capacité financière ? Par ailleurs le renoncement des communes aux centimes additionnels sur certaines rentrées fiscales nous paraît curieux. C'est le cas notamment d'une amélioration des produits provenant des arriérés d'impôt. Alors que l'administration fiscale est responsable de retards dans l'encaissement des impôts, de par ses dysfonctionnements, voilà qu'on enlève aux communes la part qui leur revient de droit pour les quatre ans à venir.
4. La contribution spéciale
Elle constitue la part la plus importante des recettes nouvelles puisqu'elle rapporterait 141 millions sur les 184 millions de recettes prévues. Elle est limitée dans le temps contrairement à la plupart des économies. Mais c'est surtout son caractère linéaire qui est foncièrement injuste: si vous disposez de 30 000 F de revenu net vous payez le même pourcentage de 1% que si vous disposez de 1 million. Le principe de la capacité contributive, base de notre système fiscal, est ainsi remis en cause. Il est d'autant plus remis en cause que les hauts revenus ne seront évidemment pas touchés par les réductions de dépenses de l'Etat comme le seront les invalides, certaines personnes âgées et les salariés de la fonction publique lesquels passeront donc deux fois à la caisse. Ce ne sont pas les forfaits prévus pour les personnes non taxables ou dont le revenu net est inférieur à 20 000 F qui changent quelque chose à cet état de fait. Bien au contraire, ces dernières devront réduire leur consommation de biens essentiels alors que les plus riches ne toucheront que de manière très limitée à leur superflu. La contribution spéciale sur la fortune nette est encore plus caricaturale: le forfait prévu fait qu'une personne disposant de 50 000 F imposable payera 500 F soit 1% alors que le multimillionnaire avec 540 millions payera 2 000 F soit 0,00037% ! Pour faire plus "; social " la majorité a introduit une nouvelle tranche pour l'imposition de la fortune: entre 1 million et 2 millions les miséreux concernés s'acquitteront d'un forfait de 1 000 F Vous l'aurez compris cette nouvelle taxe est un impôt dégressif. La même observation peut être faite concernant les personnes morales. La petite entreprise réalisant un bénéfice net de 45 000 F payera un forfait de 500 F soit 1,12%, la banque qui annonce un bénéfice de 200 millions payera 2 000 F soit 0,001%. On le constate, la parité des sacrifices est respectée...
Pour tenter de faire croire qu'on touche les gros revenus, le projet initial prévoyait une ridicule et démagogique taxe sur les piscines de 12 F le m2 dont le coût d'encaissement n'était même pas calculé. Comme la majorité a introduit une tranche supplémentaire pour les fortunes entre 1 et 2 millions elle a parallèlement renoncé à la taxe sur les piscines. N'exagérons rien. Quant aux mesures relatives aux traitements des conseillers d'Etat ou aux indemnités des députés c'est évidemment de la poudre aux yeux pour tenter de faire croire au peuple que tout le monde participe aux sacrifices et rendre ainsi le projet de loi plus présentable.
5. L'impôt sur les véhicules à moteur
Cette hausse d'impôt est la seule qui subsistera à partir de 2003. Globalement, l'augmentation est de 73%. Si nous pouvons admettre une hausse de cet impôt qui est largement en dessous de la moyenne suisse et qui surtout ne couvre pas les frais engendrés par la voiture, nous ne pouvons accepter une augmentation de cette ampleur. Là encore, la hausse est inégalitaire. Ainsi pour une petite cylindrée, le propriétaire devra s'acquitter d'une augmentation de 74%, pour une voiture de classe moyenne la hausse sera de 63% et pour une grosse limousine elle atteindra 30% ! Décidément ce projet de loi constitutionnelle est marqué du sceau de l'inégalité à chaque alinéa.
Des mesures alternatives existent
Comme le dit l'exposé des motifs: "; le projet de loi qui vous est soumis contient, il est vrai des mécanismes budgétaires complexes, mais les principes auxquels il obéit sont simples ". Ils sont simples en effet. Ils visent ni plus ni moins qu'à faire payer aux petits et moyens revenus l'essentiel de l'effort de redressement des finances publiques. La Chambre de commerce et d'industrie de Genève ne s'y est pas trompée puisque dans le document qu'elle a remis à la Commission des finances elle écrit: "; Mais de nouveau, nous comprenons que politiquement, le Conseil d'Etat ait pensé bon que tout le monde semble mettre la main à la poche. " L'Alliance de gauche ne peut accepter une telle orientation en contradiction avec certaines promesses faites avant le scrutin de l'automne 1997 qui a vu l'élection d'une majorité de l'Alternative.
Pour l'Alliance de gauche, la cause de l'endettement de notre canton réside dans la conjugaison de deux facteurs. Tout d'abord la stagnation des recettes à partir de 1989 causée par la suppression de la progression à froid sans compensation de la perte fiscale sur les hauts revenus, par la diminution des rentrées fiscales sur les gains immobiliers dès le début de la crise et enfin par la stagnation et la baisse des revenus de nombreux salariés touchés par la précarité de l'emploi et le chômage. Parallèlement les dépenses sociales augmentent, non pas en raison d'une amélioration des prestations mais à cause de l'augmentation du nombre de personnes qui doivent faire appel à l'aide de l'Etat. Ainsi, les entreprises font supporter à la collectivité les coûts de leurs restructurations en vue d'accroître leur taux de profit. Cela n'a pas empêché la droite de ce Grand Conseil de voter des diminutions de rentrées fiscales (sur les gains immobiliers et par le biais de l'accession à la propriété) et de proposer des baisses d'impôts par l'entremise de l'initiative libérale. Ce double mouvement sur les recettes et sur les dépenses est la cause des déficits d'aujourd'hui.
Pour l'Alliance de gauche la résolution du problème des déficits passe en priorité par des recettes nouvelles. Celles-ci ne peuvent provenir que des milieux qui s'enrichissent au travers de la domination qu'ils exercent dans la sphère économique. C'est pourquoi nous proposons un impôt supplémentaire sur les grandes fortunes supérieures à 1,5 millions et un taux fixe de l'impôt sur les bénéfices des personnes morales de 12% et non pas un taux neutre fiscalement, avec baisse de l'impôt sur le capital, comme vient de le voter la commission fiscale. Ces deux seules mesures permettraient des recettes nouvelles de l'ordre de 260 millions par rapport à l'année 1997. D'autres propositions, comme un relèvement modéré de l'impôt sur les véhicules, ou encore certaines économies de l'ordre de 60 millions permettraient d'obtenir une réduction du déficit à 360 millions, c'est-à-dire dans la cible fixée par le Conseil d'Etat pour l'exercice 1999.
Conclusion
L'Alliance de gauche s'est opposée dès le départ aux mesures proposées par le Conseil d'Etat et qui sont aujourd'hui concrétisées dans le projet de loi constitutionnelle. Les modulations apportées par les discussions de la table ronde et les amendements nombreux, mais mineurs, apportés par la majorité de la Commission des finances ne modifient en rien l'orientation générale. Ce projet de loi a cependant un mérite. Il montre à la population de notre canton que la nouvelle majorité entend redresser les finances publiques principalement sur le dos des petits et moyens revenus. La possibilité lui est donc offerte de dire non à cette politique et en conséquence de choisir un autre voie qu'elle a jusqu'à présent refusé: mettre à contribution ceux qui s'enrichissent au travers de la domination qu'ils exercent dans l'économie. C'est ce que nous proposons.
Premier débat
Le président. Avez-vous quelque chose à ajouter, Monsieur le rapporteur de majorité ?
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Oui, Monsieur le président. Un proverbe russe dit : «Dieu voit la vérité mais il n'est pas pressé de la dire.» (Rires.) Le Conseil d'Etat non plus! Mais finalement, les chiffres étant ce qu'ils sont, le Conseil d'Etat s'est décidé à dire la vérité à la population genevoise sur l'état réel des finances de la République. Il a donc proposé un ensemble de mesures que vous avez sous les yeux, sous la forme de ce qu'on a appelé, d'un terme peu élégant, «le paquet ficelé». Ce paquet se présente sous la forme du projet de loi constitutionnel qui est l'un des volets; le second volet, que nous examinons en ce moment à la commission des finances et qui sera voté également en décembre, étant le projet de budget.
Pour faire court, je ne vais pas ici rappeler les étapes de la négociation après le mois d'août 1998, c'est-à-dire dès le moment où la table ronde réunissant les partis politiques a décidé de se muer en une instance de négociation avec l'ensemble du Conseil d'Etat. Nous avons regretté et nous regrettons encore aujourd'hui - mais faut-il vraiment le regretter vu les prises de position adoptées ? - que l'Alliance de gauche, qui était aussi invitée à cette concertation, ait dès l'abord refusé d'y participer.
Mesdames et Messieurs les députés, vous avez devant vous le résultat de nombreuses séances de travail tant avec le Conseil d'Etat, qu'entre les partis gouvernementaux ou à la commission des finances. Je tiens ici à remercier toutes celles et tous ceux qui ont consacré, souvent totalement bénévolement, leur temps à cette discussion. Toutefois, le résultat a encore été affiné le 21 octobre et il m'appartient aujourd'hui, d'une part, de vous présenter un amendement purement technique, tout simple et, d'autre part, de vous préciser trois interprétations pour que chacun sache exactement ce que recouvre ce texte constitutionnel.
L'amendement porte sur l'article 183, chiffre 1, lettre g), fin de l'alinéa : «(...) L'indemnité ne concerne que les membres du personnel occupés à temps partiel, n'est pas intégrée dans l'échelle des traitements et ne s'applique qu'aux classes 4 à 13.» Cet amendement précise donc que l'indemnité ne s'applique qu'à ces classes, qui recouvrent 57% des temps partiels, et permet d'éviter une autre discrimination indirecte qui ferait qu'une personne ayant un salaire élevé mais employée à temps très partiel puisse elle aussi toucher cette indemnité.
Quant aux interprétations, il convient d'abord de préciser que lorsqu'on parle d'établissements publics dans le texte de loi, il s'agit des établissements publics soumis à la loi sur les traitements de l'Etat, qui appliquent par exemple la loi B 5 05. L'aéroport, par exemple, ou les TPG ne sont donc pas compris dans ces établissements publics au sens de la loi. Ceux-ci n'auront pas à subir la retenue au-delà de 60 000 F qui est prévue. C'est une première interprétation que la commission des finances a clairement établie et que le Conseil d'Etat pourra sans nul doute confirmer.
La seconde interprétation concerne plus précisément la participation de l'Etat aux primes d'assurance-maladie. La volonté de ne prétériter ni les actifs ni les retraités a été très clairement déclarée. Les retraités recevront donc également cette prime - il s'agit de l'article 183, alinéa 1, lettre c) - mais ils ne la recevront que s'ils ont un revenu inférieur à 20 800 F et si cette prime n'est pas déjà payée par l'OCPA. Il serait évidemment absurde qu'ils reçoivent la prime maladie deux fois, de deux sources différentes. Il convient de signaler que cela implique pour l'Etat un montant de 870 000 F.
Enfin, en ce qui concerne l'article qui demande aux communes de reprendre à leur charge pour un montant de 5 millions certains coûts des lignes TPG, il a également été déclaré que pour l'instant le Conseil d'Etat avait écrit aux communes et qu'il attendait les réponses de l'Association des communes. Il s'agissait là de précisions importantes pour que chacun sache de quoi on parle.
Quant à l'aspect politique du projet de loi constitutionnelle, j'aimerais dire très brièvement que celui-ci a été âprement et durement négocié entre les partis gouvernementaux mais qu'il ne s'agit bien entendu que d'un instrument. Il ne s'agit en effet que d'un instrument pour permettre le rétablissement des finances publiques et la réforme de l'Etat. C'est cela le chantier et le paquet ficelé n'est donc qu'un instrument.
J'ai souligné dans le rapport de majorité que si, par malheur, le projet de loi constitutionnelle était refusé le 20 décembre, toutes les catégories de personnes, à terme en tout cas et pour certaines immédiatement, s'en porteraient beaucoup plus mal contrairement à ce que d'aucuns essaient de nous faire accroire. Qui pourra imaginer suivant le résultat populaire, qui croira réellement que si le paquet est ficelé le 20 décembre, c'est parce qu'il contenait trop d'économies et pas assez d'impôts ? Il y a là d'ailleurs un curieux paradoxe dans l'argumentation du seul parti qui dans cette enceinte ne soutient pas ce projet de loi constitutionnelle, qui se plaint que certaines économies sont permanentes alors que certaines recettes, mais pas toutes, ne seraient pas permanentes, ce qui est du reste parfaitement exact, mais qui en même temps et d'un même mouvement attaque la recette permanente qui est prévue, à savoir l'augmentation légère et admissible de l'impôt auto, alors même que ce parti s'efforce de réglementer et de réguler la circulation en ville. Il y a là véritablement une certaine irresponsabilité, je ne veux pas parler de démagogie !
Sans donner d'exemple car je pense qu'on y reviendra au cours du débat, j'aimerais dire qu'il faut tout de même être conscient qu'à Genève, où, c'est vrai, nous payons tout plus cher qu'ailleurs en Suisse, nous avons aussi d'excellentes conditions générales. Songeons simplement à la qualité de notre enseignement. L'exemple nous est venu récemment du pays voisin où les jeunes lycéens manifestaient parce qu'ils étaient 38 à 39 en classe et où le gouvernement a prévu de limiter les effectifs à 35 par classe d'ici à 2000. Vous voyez bien que notre situation est considérablement meilleure à Genève mais, évidemment, cela a aussi un coût.
J'aimerais enfin dire que nul n'est amoureux d'un équilibre budgétaire. Nous savons très bien que l'assainissement des finances publiques est simplement l'instrument qui permettra à notre Etat de poursuivre et de développer son action.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Bernard Lescaze, rapporteur de majorité. Nous avons malgré tout un certain nombre de soucis quant au prochain budget car nous constatons que toutes les dépenses augmentent et que, malgré cette volonté d'assainir les finances, la dette croîtra de 700 millions.
En conclusion, je déclare ouvertement que les conséquences d'un refus seraient catastrophiques tant pour la fonction publique que pour les bénéficiaires de prestations, tant pour les contribuables que pour l'attractivité de Genève. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à accepter le présent projet d'article constitutionnel.
Le président. Je vous prie, Monsieur le rapporteur, de bien vouloir déposer le texte de votre amendement sur le bureau.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. A entendre M. Lescaze, ce projet de loi est un petit projet de loi comme un autre, un petit instrument destiné à nous mener vers des lendemains qui chantent. Or, il y a quelques petites interprétations supplémentaires à faire après toutes celles que nous avons eues depuis un mois.
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est fondamentalement dangereux économiquement et injuste socialement. Inscrire dans la constitution le principe même de l'équilibre financier, et ce de manière permanente, est une aberration dans une période où l'évolution de l'économie est par définition imprévisible et où un certain nombre de nuages s'accumulent de nouveau à l'horizon.
Il y a d'ailleurs un contraste étonnant entre l'idéologie libérale qui inspire ce projet de loi, qui veut la flexibilité à tous les niveaux et, en l'occurrence, une rigidité invraisemblable lorsqu'il s'agit des finances publiques. On veut obtenir un équilibre sur six ans, neuf ans si tout va mal, mais cela signifie très concrètement que la marge de manoeuvre est extrêmement faible parce qu'en effet, comme la dette doit impérativement être stabilisée au terme de la période, les déficits qui pourraient être enregistrés en début de période devront non seulement être effacés mais rattrapés d'ici la fin de la période cadre.
Le mécanisme qui lie les investissements aux amortissements est encore plus absurde. En effet, les investissements ne seront plus déterminés principalement par les besoins et les choix effectués en matière d'emploi et d'infrastructures, mais ils seront principalement déterminés par le montant des amortissements. Cela signifie que, dans la durée, nous allons vers une baisse tendancielle et constante des investissements. Telle est la réalité économique !
Il n'échappera à personne que, pour parvenir à l'équilibre, on privilégie les coupes dans les dépenses au détriment des recettes pour la simple et bonne raison que toute recette nouvelle est, par principe, soumise au référendum facultatif alors que les dépenses pourront être coupées avec la clause d'urgence qui existe déjà maintenant dans la constitution. Le texte de ce projet de loi constitutionnelle prévoyait d'ailleurs initialement de mettre la clause d'urgence sur les dépenses. Cela a été enlevé mais n'exclut pas la possibilité d'y recourir. Il faut, Mesdames et Messieurs, que vous en soyez conscients puisque cette clause d'urgence existe à l'article 55 et c'est inévitablement la méthode qui sera employée.
En résumé, s'agissant des dispositions permanentes, les mécanismes qui sont mis en place conduisent le budget de l'Etat à une soumission totale à l'économie en dépit - je l'ai dit - du risque du redémarrage d'une crise profonde qui se pointe à l'horizon.
J'aimerais dire quelques mots sur les dispositions transitoires, puisque pour 1999 on prétend arriver à une parité des sacrifices entre les recettes et les dépenses. Or, si l'on examine de près les mesures d'économie, on s'aperçoit que huit d'entre elles sont permanentes et qu'une seule ne l'est pas, en l'occurrence celle relative à la limitation de l'indexation des salaires dans le secteur public. Par contre, sur trois recettes nouvelles, une seule est permanente, c'est l'impôt auto qui représente 22% seulement des recettes.
Le rapporteur de majorité nous dit qu'il y a un équilibre et affirme noir sur blanc dans son rapport : «On dira, mais à tort, que certaines recettes ne sont pas permanentes alors que les économies le sont.» Je suis vraiment très étonné de voir M. Lescaze écrire cela alors que c'est à l'évidence contraire à la réalité.
Mesdames et Messieurs les députés, il faudra arriver, surtout à partir de 2003, au déficit zéro et cela signifie 360 millions d'économies supplémentaires plus 140 millions de la contribution spéciale qui cessera à partir de 2003, c'est-à-dire 500 millions à trouver. Je ne prends pas ici en compte les annuités et l'évolution de la prime de fidélité qui représentent 50 millions par an et qui, cumulées, font qu'il y aura 300 millions supplémentaires à trouver. Nous arrivons à un calcul relativement simple : 500 millions plus 300 millions, soit 800 millions à trouver d'ici 2003.
La large majorité qui se dégage aujourd'hui autour de ce projet de loi ne nous dit pas un mot sur où seront prises ces économies nouvelles. Sur les salaires, sur les prestations sociales, sur les postes, rien, pas un mot ! Ce n'est pas la déclaration du Conseil d'Etat tout à l'heure - qui est, excusez le terme, du bouillon pour les morts - qui va nous faire croire qu'on va trouver des économies sérieuses dans la réforme de l'Etat. Seuls les libéraux peuvent éventuellement croire encore à ce subterfuge. (Brouhaha.) J'estime que c'est tromper les électeurs que de les faire voter un projet de loi portant sur 360 millions d'économies et de recettes nouvelles et ne rien leur dire sur ce qui se passera après pour les 800 millions.
Lorsqu'on dit qu'on veut faire preuve de transparence, je trouve le procédé un peu curieux. On ne nous dit pas non plus ce qui se passera si l'initiative libérale de réduction des impôts est acceptée ou encore si l'initiative relative au droit des pauvres est acceptée. Ce sera des millions supplémentaires à trouver.
J'en viens maintenant aux mesures relatives aux dépenses. Vous l'aurez compris, elles sont, de notre point de vue, inacceptables. Baisser le revenu des invalides de 13%, les traiter de privilégiés par rapport aux personnes âgées, traiter certaines personnes âgées ayant quelques économies de privilégiées par rapport aux autres, je trouve ce procédé absolument dégoûtant ! Vous connaissez les mesures concernant la fonction publique. Le rapporteur de majorité nous dit que la ponction «est inférieure, voire très inférieure au surcroît de ressources procuré par l'application des mécanismes salariaux» : encore un mensonge puisque les mesures concernant la fonction publique produiront 88 millions d'économies et que les mécanismes salariaux représentent 50 millions. (Commentaires.)
Les mesures relatives aux recettes sont encore plus significatives puisque l'on va vers un système d'impôt dégressif en appliquant à une personne qui a 20 000 F de revenu imposable un pourcentage identique à celle qui a un million de revenu imposable. Pour la fortune, les mécanismes sont les mêmes. Je vous rappelle les chiffres : pour 50 000 F, c'est 1%, pour 10 millions, c'est 0,02%, pour 540 millions, c'est 0,00037% et on nous parle d'équité dans les sacrifices ! Pour les entreprises, c'est le même mécanisme : une entreprise qui fait un bénéfice de 30 000 F payera 1,66%...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Bernard Clerc, rapporteur de minorité ...une entreprise qui fait 200 millions paiera 0,001%. Monsieur le président, puisque le temps qui m'est imparti arrive à son terme, je reprendrai la parole ultérieurement pour revenir sur un certain nombre d'arguments concernant ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Je prie les personnes à la tribune de ne pas manifester.
M. Pierre-François Unger (PDC). Le processus même d'une table ronde qui rallie les partis gouvernementaux dans le but d'obtenir leur consensus nécessite de la part de chacun à la fois des convictions très fortes et des concessions qui, a priori, paraissaient impensables. Notre culture sociale et politique nous impose de réussir ensemble là où nous sommes sûrs d'échouer si nous cultivons l'affrontement.
Le commun dénominateur des convictions des partis gouvernementaux est simple. L'endettement progressif de l'Etat nuit gravement à sa capacité future de servir des prestations de qualité. En effet, chaque budget voit augmenter les sommes destinées à servir les intérêts de la dette et à couvrir son remboursement. Nous payons chaque heure, Mesdames et Messieurs les députés, plus d'un million pour servir la dette de la Confédération. Chaque jour, plus d'un million pour couvrir la dette du canton et chaque semaine, plus d'un million pour couvrir la dette de la Ville. Cela est insupportable et contraire à l'éthique même de la fiscalité puisque c'est de l'argent qui est détourné du but fondamental de cette fiscalité qui est, à l'heure actuelle, un but redistributif au seul profit des banques. Nous versons désormais aux banques, chaque année, une somme supérieure à celle du déficit cantonal. Ce n'est plus de la vie à crédit, c'est une ruine programmée !
Ce fait étant acquis par l'ensemble des gens de bon sens, quelles que puissent être leurs convictions politiques, il faut trouver des remèdes. Ces remèdes, la table ronde les propose. Aucun d'entre eux et vous avez raison Monsieur Clerc, aucun d'entre eux ne contente tout le monde. C'est leur vision d'ensemble qui doit convaincre. Ils sont le fruit de concessions de chaque partenaire dans le but d'éviter à Genève une déconfiture semblable à celle que nous avons connue dans les années 30. Une hausse d'impôt, mauvaise en elle-même pour la compétitivité de nos entreprises et pour l'attractivité de Genève, peut être acceptée temporairement dans le but de diminuer le poids de la dette. Mais des économies sont évidemment aussi nécessaires. L'état des finances publiques n'autorise en aucun cas Genève à poursuivre sa politique de dépenses.
Le gouvernement a fait son boulot en réunissant une table ronde. Les partis politiques ont également fait le leur en arrêtant des choix qui relèvent non pas du souhaitable mais du possible. Le parlement a travaillé d'arrache-pied à une loi destinée à améliorer le contrôle de la gestion de l'Etat. Cette réforme est encore embryonnaire. Elle doit pourtant être entreprise impérativement et immédiatement; elle est d'ailleurs attendue par la grande majorité des citoyens. Votre discours, Madame la présidente Calmy-Rey, nous a rassurés tout à l'heure. Nous serons plus rassurés encore lors du passage à l'acte !
Une voix. Ça va loin, hein ! (Rires.)
M. Pierre-François Unger. On peut rêver...
Le président. Poursuivez, Monsieur l'orateur !
M. Pierre-François Unger. Malgré cela, les réflexes poujadistes se sont rapidement fait entendre. Pour ceux qui vivent pour une bonne part des investissements de l'Etat, ceux-ci sont trop peu élevés. Pour ceux qui vivent des salaires de l'Etat, ceux-ci sont trop entamés. Pour ceux qui vivent des prestations de l'Etat, celles-ci sont trop rognées. Pour ceux qui vivent de ne pas trop donner à l'Etat, les impôts sont trop élevés. Où se situe l'intérêt général et où se situe l'équilibre dans tout cela ? La symétrie des sacrifices revêt aussi le caractère d'un équilibre distributif. L'équilibre de notre canton peut être restauré et ce ne sera qu'au prix de sacrifices consentis par tous.
Les potions magiques ont fait long feu. La gauche de la gauche veut taxer les riches. Ignore-t-elle que six mille contribuables, sur les quatre cent mille habitants que compte le canton, payent 50% des impôts ? Ignore-t-elle que ces contribuables sont mobiles ? Si les magiciens de l'impôt facile ont des doutes à cet égard, qu'ils constatent combien le gouvernement de M. Jospin nous a gâtés en faisant fuir de France les gros contribuables qui désormais payent leurs impôts à Genève.
Quant à la droite de la droite, elle entend faire capoter le tout pour affaiblir définitivement l'Etat alors même que son rôle régulateur est plus important que jamais pour le maintien de la paix sociale, et cette paix sociale représente pour l'économie infiniment plus que n'importe quel autre paramètre.
La gauche de la gauche comme la droite de la droite font pour Genève un pari stupide. Parier sur de nouvelles recettes capables de couvrir notre actuel train de vie sans accepter une cure de minceur est suicidaire. Parier sur un refus de tout impôt supplémentaire avec pour seul objectif de démanteler l'Etat est tout aussi suicidaire. Prises isolément les unes des autres, les propositions de la table ronde ne satisfont personne. En revanche, prises dans leur ensemble, elles satisfont au rétablissement du bien commun dont Genève a besoin. Mesdames et Messieurs les députés, Genève vaut plus qu'un pari stupide ! (Applaudissements.)
Mme Anne Briol (Ve). Partant du constat, si souvent évoqué ces dernières semaines, de la dette grandissante de notre canton, nous voulons tous freiner cette spirale infernale. Pour y remédier, certains souhaiteraient pouvoir uniquement fermer les robinets des dépenses, d'autres uniquement augmenter les recettes ou encore panacher savamment ces deux remèdes. Pour passer de la parole aux actes, les classes politiques ont dû travailler ensemble munies chacune de leur palette de propositions et de revendications. Cette démarche était indispensable puisque nous, parlementaires, sommes responsables de voter le budget de l'Etat; l'alternative étant de fermer égoïstement les yeux en attendant que cela passe et en laissant le cadeau empoisonné de l'endettement à nos enfants.
Le projet de loi constitutionnelle - je vous épargnerai la description de son contenu - est donc issu d'une discussion très strictement cadrée par les limites des uns et des autres qui ont participé à ces négociations. Que penser dès lors d'un tel projet ? Les Verts ont toujours accordé une grande importance à la nécessité de rétablir l'équilibre budgétaire par une maîtrise des dépenses et une augmentation des recettes. Pour maîtriser les dépenses, nous jugeons qu'il est admissible de demander un effort à la fonction publique alors que nous aurions jugé intolérable de tailler à la hache dans les prestations sociales.
Même avec ces mesures, notre Etat social restera le plus développé de Suisse. Du côté des recettes, nous ne sommes pas entièrement satisfaits puisque nous introduisons notamment un nouvel impôt sur le travail. Mais nous ferons avec car, dans ce genre de processus, les concessions sont nécessaires si l'on veut arriver à un résultat. Dans notre cas, je le rappelle, le résultat doit être un mécanisme à court et à moyen terme qui évite à l'Etat d'être rongé par la dette.
Les Verts confirment donc leur soutien au projet de loi constitutionnelle car ils estiment que les finances de notre canton et, par là même, les prestations sociales de l'Etat ne peuvent pas être laissées aux mains du hasard. Et refuser ce projet de loi, c'est bien laisser les finances de l'Etat aux mains du hasard. (Applaudissements.)
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Nous entrons avec ce projet de loi constitutionnelle dans une ère de vérité et de transparence. Enfin les chiffres sont donnés, enfin les postes sont réels dans le prochain budget, enfin les besoins et les contraintes véritables sont calculés.
Ceux qui ont participé hier à la commission des finances l'ont entendu dire par quelques hauts cadres de département : pour la première fois cette année, nous avons un budget vérité contrairement aux années passées. Or, ces fonctionnaires nous disaient savoir pertinemment les années précédentes qu'ils devraient en fin d'exercice venir plaider devant la commission des finances des demandes de crédits complémentaires. Première remarque positive.
La seconde, le Conseil d'Etat prend l'initiative, fait un certain nombre de propositions - bonnes ou mauvaises, c'est selon l'appréciation de chacun - et décide que c'est le peuple qui choisira en dernier ressort : un acte de démocratie qui initie un processus et un souhait clair, le choix du souverain.
Cette manière de faire offre deux avantages. Tout d'abord, celui de nous donner une chance d'avoir un budget en cette fin d'année et ensuite de ne pas être sur la défensive en subissant un éventuel référendum. La dynamique d'un vote populaire n'est pas la même selon que ce vote est une opportunité offerte par l'autorité ou qu'il est l'issue d'un référendum qui s'oppose à une décision prise. Sur ces deux points, nous aimerions donc remercier le Conseil d'Etat et en particulier, sa cheffe des finances.
Mesdames et Messieurs du gouvernement, permettez-nous de vous dire également que vous devrez vous mobiliser un peu plus si vous voulez récolter les fruits de vos propositions. Vous avez, par exemple, envoyé Mme Calmy-Rey négocier seule face à l'ultimatum, - appelons-le ainsi - des libéraux mardi soir. Et les exigences de précisions sur la réforme de l'Etat ne nous rassurent guère pour l'avenir.
Venons-en maintenant au contenu du projet. Ces dernières années, nous avons été de ceux qui disaient, et qui le diraient encore si nous nous trouvions dans la situation d'alors, que les chiffres rouges qui étaient brandis n'étaient pas graves au point de nécessiter des coupes drastiques et nous nous y opposions. Aujourd'hui la transparence et la vérité décidées par le Conseil d'Etat nous font voir la réalité en face : la dette et les charges de la dette ont pris des proportions vertigineuses. Nous ne sommes pas seulement dans les chiffres rouges. Nous sommes dans une situation extrêmement grave dans laquelle les intérêts de la dette - cela a été dit - engloutissent des millions qui pourraient être utilisés à d'autres causes autrement plus utiles et nécessaires que celle d'enrichir les banques.
Cette situation grave nous fait réaliser et affirmer que, si nous voulons que notre Etat reste suffisamment fort pour protéger les faibles et les délaissés de notre société, nous devons réagir. Que l'on nous entende bien ici ! Ce choix ne nous plaît guère, comme à tant d'autres. Mais il ne relève pas du simple fatalisme. Il est celui du réalisme, du possible, et laisse l'utopie pour d'autres temps moins graves.
Le parti socialiste estime qu'il n'y a pas d'autre choix ce soir. L'article constitutionnel pose un cadre, veut éviter les risques de dérapages futurs comme nous en avons connu ces dernières années et nous impose, il est vrai, des contraintes sévères mais pose surtout un principe. Dans l'immédiat, une répartition égale entre nouvelles recettes et économies.
Quoi qu'en disent certains, le parti socialiste, les idéaux qu'il défend, les valeurs qu'il veut faire respecter sont toujours là, intacts. Le parti socialiste tient à redire ici que sa priorité en faveur des plus faibles reste première, que son souci d'une fonction publique reconnue et motivée est essentiel et que la formation n'a pas le droit à l'erreur.
Pour que tout cela soit et reste réalité, il faut un Etat fort et disposant des moyens de mettre en oeuvre des mécanismes de protection et de formation. Et je pense que là nous sommes à peu près tous d'accord, y compris vous, Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, qui ne nous rejoignez pas ce soir; nous avons les mêmes soucis et les mêmes préoccupations. Mais c'est sur les moyens de parvenir à ces objectifs que nous divergeons. Il est évident - je le rappelle - que ce n'est pas satisfaisant pour le parti socialiste de couper dans certaines prestations, de diminuer les salaires d'une catégorie de fonctionnaires, mais le parti socialiste estime qu'aujourd'hui et surtout pour assurer demain nous ne pouvons pas faire autrement.
Bien évidemment, si l'on écoute les propositions de taxer les riches, cela ne peut que faire tinter agréablement nos oreilles mais nos oreilles ont aussi entendu la voix du peuple ces dernières années : pas d'augmentations d'impôts, et pas seulement des impôts qui toucheraient tout un chacun mais aussi ceux qui n'affectent que les privilégiés, ceux que l'on appelle les riches. Prenons le dernier exemple mais il n'est pas unique et il faut hélas avoir l'honnêteté de le reconnaître : les propriétaires de biens immobiliers, soit 10% de la population, qui auraient dû passer à la caisse. «Ces riches propriétaires n'ont qu'à être taxés», auraient dû penser les 90% restants. Eh bien non ! Et nous qui représentons l'Alternative et qui avions voté ce projet, nous avons - reconnaissons-le - pris une claque magistrale. Or, nous ne pouvons ni ignorer ce vote ni les autres votes qui l'ont précédé.
Le projet que nous sommes appelés à voter ce soir nous permet quelques garde-fous. Il propose des mesures qui nous déplaisent, nous l'avons dit. Mais il permet, grâce au paquet ficelé, d'assurer que l'effort sera aussi fait du côté des recettes nouvelles, seul moyen, nous en sommes convaincus, d'en obtenir. A partir de là, nous aurons préservé un minimum de possibilités pour l'Etat de jouer un rôle social. N'oublions pas que le budget 1999 propose une augmentation importante de la subvention à l'Hospice général, des postes supplémentaires dans la fonction publique, en particulier dans le primaire. La reprise des mécanismes salariaux épargne les revenus les plus bas et les chômeurs. Tout cela n'est possible que grâce au paquet ficelé.
A celles et ceux qui disent que d'ici quelques années l'effort ne se fera plus que sur les économies et les coupes, que l'équilibre des finances ne pourra être trouvé que dans des diminutions de dépenses, nous rétorquons qu'il n'est nulle part inscrit que nous avons l'interdiction de réfléchir, d'imaginer d'autres formules de recettes et de les proposer. C'est bien ce qu'entend faire le parti socialiste. A celles et ceux qui dénoncent l'impossibilité future des négociations entre la fonction publique et son employeur, nous disons aussi que le dialogue et la recherche de solutions - dans un cadre donné, il est vrai - restent néanmoins possibles. Nous insistons ici ce soir pour demander au gouvernement d'entreprendre tout ce qu'il lui est possible de faire pour renouer le dialogue.
Un dernier mot sur les vives critiques de l'Alliance de gauche dans le rapport de minorité par rapport aux néo-libéraux que nous serions devenus. Je l'ai dit, nous avons toujours et encore les mêmes idéaux, les mêmes valeurs à défendre. Que vous ne soyez pas d'accord avec ce que nous estimons nécessaire de faire aujourd'hui est une chose mais critiquer et se laver les mains de tout ce qui se décide, refuser de négocier et accuser de traîtres ceux qui sont allés faire le sale boulot et ont obtenu des améliorations - car nous en avons effectivement obtenu - est une attitude qui n'est guère à votre honneur.
En conclusion, le parti socialiste, bien que trouvant dans le paquet ficelé nombre de mesures qui ne correspondent pas aux idéaux qu'il souhaiterait défendre, estime que, prises toutes ensemble avec des augmentations de recettes, ces mesures permettront de passer un cap difficile et d'assurer un Etat social que nous appelons de nos voeux pour les années à venir. (Applaudissements.)
Mme Madeleine Bernasconi (R). Ayant participé l'été dernier aux diverses tables rondes, il est évident que je suis favorable aux conclusions du rapport de majorité. Lors de la proposition du Conseil d'Etat de faire participer la société civile à l'élaboration du budget 1999, je me suis dit : «Est-ce du courage, est-ce une stratégie ?». Stratégie, courage, je penche raisonnablement pour courage. De ce fait, la table ronde Etat-communes a été animée. Les communes, qui étaient elles aussi en pleine élaboration de leurs budgets, ont donc partagé ces soucis.
Malgré les difficultés, les communes depuis 1993, il faut le rappeler, ont déjà de façon substantielle contribué au redressement des finances de notre canton. Il faudrait rappeler quelques-unes des mesures prises telles que les limitations temporaires et successives de l'alimentation du fonds d'équipement : en une dizaine d'années, plus de 63 millions. Pour 1998, 17 millions. Le Conseil d'Etat a donc pris l'engagement de rétablir en partie du moins l'alimentation de ce fonds dès l'an 2000. Mais les communes craignent que ces promesses ne soient pas suivies d'effets, ce qui serait dramatique compte tenu du rôle de ce fonds qui permet d'aider les communes les plus pauvres à investir. Cela vaut aussi pour la participation au parascolaire qui à terme représentera 8 millions et que nous avons négociée dans les propositions du Conseil d'Etat. Nous avons tenté de limiter les charges supplémentaires pour les communes en essayant de voir - c'était une proposition de M. Cramer - comment on pouvait dépenser moins en ayant de meilleures idées. Ainsi, cela passait en partie, pour les TPG, par une participation à la capitalisation, avec une recette au bout.
D'autres propositions ont bien sûr été travaillées au sein des communes. Par exemple concernant la culture, puisqu'on a vu, lors des travaux sur le budget à la commission de l'enseignement, qu'il y avait une grande préoccupation concernant la culture à Genève. Autre mesure, l'abandon momentané par les communes de leur part des recettes supplémentaires résultant des poursuites en réalisation de gages et du renforcement des contrôles fiscaux. Cela représente environ 14 millions de pertes de recettes. L'effort des communes n'est donc pas négligeable.
Il est vrai toutefois que ces négociations entre gens raisonnables et responsables se sont déroulées dans un climat de respect mutuel. Alors, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, poursuivez dans la voie que nous a indiquée ce soir Mme la présidente du département des finances : rigueur et réforme avec au bout efficacité et reconnaissance ! Merci aux citoyens et citoyennes qui comprendront que malheureusement chacun sera touché, soit par une augmentation de la fiscalité, soit par certaines diminutions de prestations, prestations qui restent néanmoins toujours au-dessus de la moyenne suisse. Travaillons encore en démontrant que Genève a la force de surmonter cette trop longue période de difficultés. Même imparfait, il faut espérer que la population suivra le travail de l'été 1998.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. N'ayant pu terminer dans le temps qui m'était imparti les questions que je souhaitais aborder, je voudrais revenir sur cette fiction qui consiste à dire qu'il y a une parité dans les sacrifices.
Je rappellerai tout d'abord que celles et ceux qui seront touchés par les mesures d'économie le seront aussi par les mesures relatives aux recettes. Je pense par exemple aux bénéficiaires des prestations complémentaires AI, aux salariés de la fonction publique qui passeront d'une certaine manière deux fois à la caisse pour le rétablissement des finances cantonales. Il y a un contraste évident entre le fait qu'un invalide au bénéfice des prestations complémentaires verra son revenu baisser de 3 260 F, payera en sus 100 F de forfait pour la contribution spéciale, si bien que sa participation globale sera de 3 360 F, alors qu'un contribuable avec 200 000 F de revenu imposable payera en tout et pour tout 2 000 F et ne sera évidemment pas touché par les mesures relatives aux dépenses.
On nous a dit également dans les débats antérieurs que l'on voulait préserver le sort des plus faibles dans la société. Eh bien, s'il en est, et je pense particulièrement aux bénéficiaires du RMCAS, qui seront eux aussi soumis à la contribution spéciale, la plupart d'entre eux ayant un revenu imposable qui les met en devoir de payer 1%, l'essentiel de l'effort sera fourni par les petits et moyens revenus. A l'évidence, les hauts revenus des grandes fortunes seront touchés de manière symbolique et seulement au travers des recettes.
Ce n'est d'ailleurs pas un scoop, puisque la Chambre de commerce et d'industrie elle-même le reconnaît. Elle nous l'a écrit à la commission des finances. M. Patrick Coïdan nous a dit: «De nouveau, nous comprenons que politiquement le Conseil d'Etat ait pensé bon que tout le monde semble mettre la main à la poche.» Vous avez bien lu, Mesdames et Messieurs les députés : «semble» mettre la main à la poche. Eh bien, je crois que la Chambre de commerce et d'industrie fait une analyse beaucoup plus juste et réaliste de ce projet de loi que certains élus de gauche.
Même en ce qui concerne l'impôt auto, - je tiens à le préciser ici parce qu'on nous accuse de faire du populisme ou de la démagogie - l'Alliance de gauche est favorable à une hausse de l'impôt auto mais évidemment pas dans les proportions proposées aujourd'hui et surtout pas de cette manière totalement inégalitaire puisqu'une petite cylindrée connaîtra une hausse de l'impôt sur les véhicules de 74% alors qu'une grosse limousine aura une augmentation de 30%. Même là, Mesdames et Messieurs les députés, on n'a pas été fichu d'apporter des correctifs qui tiennent compte de la capacité contributive des individus, laquelle, pour autant que je le sache, est tout de même à la base de notre système fiscal.
On nous a dit tout à l'heure qu'il fallait éviter d'arriver à une situation où il faudrait tailler à la hache dans les prestations. Je vois bien poindre le discours que nous allons entendre pour les semaines à venir. Celui-ci sera dominant : si vous n'acceptez pas ce paquet ficelé, ce sera la catastrophe ! Pour ne pas tailler à la hache dans les prestations, pour protéger les plus faibles comme l'a dit tout à l'heure Mme Reusse-Decrey, on commence par les appauvrir un petit peu maintenant, n'est-ce pas ? Je trouve cela assez particulier et assez paradoxal.
Lorsqu'on nous dit que le peuple a refusé des hausses d'impôts concernant les grandes fortunes en 1996 ou plus récemment concernant les gains immobiliers, on prend ces exemples pour nous dire : c'est fini, le peuple ne veut plus de hausses d'impôts, on ne peut donc pas aller chercher l'argent du côté de ceux qui ont les moyens de participer au redressement des finances.
Aussi, je vous pose la question : comment ferez-vous pour faire passer cette hausse d'impôts à l'ensemble de la population en touchant principalement les petits et les moyens revenus ?
Le président. Monsieur le député Ducommun, vous avez la parole.
M. Daniel Ducommun (R). Vous me faites un grand honneur, Monsieur le président, de me passer la parole ce soir alors que je ne l'ai pas demandée... (Rires.) Mais comme vous avez tellement l'habitude de m'entendre dans ces moments-là, je me permets de l'exploiter pour vous dire que le projet de loi constitutionnelle qui nous occupe ce soir est le seul projet crédible et réaliste que nous pouvons offrir au peuple. Nous devons le défendre, Mesdames et Messieurs, et le vendre - j'ai écrit «vendre» entre guillemets dans mon texte - à l'ensemble de nos concitoyens d'ici le 20 décembre.
Le rapport de M. Bernard Lescaze est un argumentaire de qualité. J'aimerais tout de même m'arrêter un instant sur le rapport de minorité de M. Bernard Clerc. J'ai rarement fait cet exercice car les fois précédentes, que cela soit au moment du budget ou au moment des comptes, le texte et la doctrine étaient quasiment les mêmes, comme photocopiés d'année en année. Mais le rapport de minorité relatif au projet de loi constitutionnelle est - je dois vous l'avouer - cette année de meilleure qualité et je le dis sans ironie. Il dresse un état relativement objectif des lieux et propose des remèdes. Je suis cent pour cent d'accord avec M. Clerc lorsqu'il s'interroge sur la façon dont les 500 millions, voire les 800 millions de déficit restants seront assainis.
On ne peut effectivement pas aller devant le peuple sans répondre à cette interrogation. Cet élément fondamental ne figure qu'à l'aide d'une ligne et demie dans le projet de loi, l'article 184 en l'occurrence : «En arrêtant les mesures d'assainissement des finances cantonales, le Conseil d'Etat met en oeuvre la réforme de l'Etat.»
Nous avons bien entendu Mme Calmy-Rey. Sommes-nous rassurés ? Allons-nous mettre réellement en place ces mesures d'assainissement ? L'exposé des motifs ne nous le dit pas ou peu. Par quelles actions et selon quel calendrier ? Tout cela n'est pas précisé. Qu'en est-il de la réforme du statut de la fonction publique, ou du désengagement foncier de l'Etat, ou encore de l'élimination des doublons entre les départements ou entre l'Etat et les communes ? Quelles projections, Monsieur Moutinot, en matière de logement social ? J'en passe et des meilleures. Il reste peu de temps au gouvernement pour préparer un catalogue tangible.
En revanche, Monsieur Clerc, vous revenez avec votre remède dogmatique : pas d'économies, ne touchons pas aux salaires mais faisons payer les riches ! Vous savez très bien que votre utopie ne passera jamais devant le peuple. Et puis, en tant que président de la commission fiscale, vous devriez être un initié. Vous avez souvent entendu parler de cette célèbre loi des 20/80 !
En effet, Mesdames et Messieurs, 20% de l'ensemble des contribuables à Genève (personnes physiques et morales) payent 80% de l'ensemble des entrées fiscales. Et vous voulez aggraver cette participation au risque de chasser ceux qui participent déjà à un effort fiscal parmi les plus importants de Suisse. Alors, à M. Clerc, et à l'Alliance de gauche, oui pour votre diagnostic mais non pour votre remède. Le seul remède pour combattre la gangrène de notre caisse publique reste le projet de loi constitutionnelle que nous appuierons ce soir avec détermination.
Le président. Monsieur le député, je voudrais tout de même vous signaler que le deuxième vice-président est formel. Il vous a vu demander la parole, mais il a peut-être pris vos gesticulations pour une quête de parole...
Je donne la parole à Mme Reusse-Decrey... Etait-ce aussi une gesticulation ? Monsieur le député Halpérin, vous avez la parole.
M. Michel Halpérin (L). Nous savons tous ici dans cette salle que depuis longtemps le monde politique a perdu sa crédibilité. Nous nous sommes payés de mots, nous nous sommes un peu trop bien payés de mots et la vertu déclamatoire de nos remèdes innombrables a cessé de faire recette. Cela ne marche plus, la population n'y croit pas et c'est pourquoi, le plus souvent, elle nous renvoie à d'autres textes lorsque nous lui en soumettons quelques-uns. La meilleure preuve - s'il en fallait une - est le destin du plan quadriennal qui avait été adopté il y a quelques années et qui prévoyait l'assainissement des finances pour 1997; et puis nous sommes en 1997, et même en 1998, et nous n'en voyons pas le bout et pourtant le peuple l'a voté. C'est la différence entre une déclamation et un effort sérieux.
Le projet de loi qui nous est soumis ce soir et qui est défendu par M. Lescaze, rapporteur de majorité, introduit-il un paramètre nouveau par rapport à cette manie verbale ? C'est un point d'interrogation; la réponse que nous lui avons donnée il y a un mois déjà était affirmative. Nous pensions que ce projet, par son contenu et aussi par ses acteurs, c'est-à-dire par la coalition qui s'était faite autour de cette table ronde pour essayer de trouver enfin une solution à la maladie grave dont souffre notre République, nous pensions que cet effort était porteur d'espoir et qu'il était probablement même le seul qui soit capable de nous en donner. Mais nous avons demandé à ce que nos ambitions pour Genève soient prises en compte.
Nous avons demandé, par exemple, que ce programme soit articulé sur deux axes : l'axe horizontal que chacun connaît, et qui comporte en quelque sorte des plateaux sacrificiels égaux sur cette balance entre les recettes et les dépenses, mais nous avons aussi dû insister sur les bancs libéraux pour que l'axe vertical qui met en parallèle l'effort à court terme et l'effort à long terme soit enfin pris sérieusement en compte. En effet, nous ne croyons pas qu'il soit utile d'améliorer la situation pour demain et après-demain si nous ne prenons pas sérieusement en compte le destin de la République pour de plus nombreuses années.
C'est dans ce contexte que nous avons le mois dernier demandé solennellement au gouvernement de s'expliquer sur le contenu qu'il donnait à l'article 184 du projet et aux dispositions modestes par le volume mais présentes dans le texte, s'agissant de la réduction de notre endettement et des charges qu'il fait peser sur chacun d'entre nous. On nous a reproché, ici et là et même un peu plus que de raison, d'exercer des pressions sur le gouvernement pour obtenir satisfaction. Eh bien oui, Mesdames et Messieurs les députés, il a fallu que nous nous résignions à ces mauvaises méthodes que nous déplorons quand elles sont le fait des autres, mais qui se sont révélées les seules susceptibles de nous procurer enfin une réponse à des questions qu'il était légitime de poser puisque nous n'étions pas disposés à apposer quelque cautère sur une jambe de bois comme je viens de vous l'expliquer.
A certains égards, la déclaration que nous avons entendue du Conseil d'Etat tout à l'heure est un peu tardive. Dans l'esprit consensuel que nous avons essayé de contribuer à faire naître autour de cette table ronde, il aurait été possible de nous faire part de ces propositions, de ces visions, de ces objectifs il y a déjà quelques semaines et nous n'aurions pas été sous la pression, ni dans la précipitation. Mais le Conseil d'Etat est le gouvernement; il a le droit de choisir ses rythmes et nous nous y adaptons du mieux que nous pouvons.
Disons-le tout net, Madame le ministre des finances et vous autres, Madame et Messieurs les membres du gouvernement, à certains égards, la déclaration que nous avons entendue tout à l'heure était quelque peu décevante. Nous aurions pu espérer une amorce, le début d'une esquisse concernant le desserrement du corset réglementaire qui est une des maladies dont souffre Genève. Nous aurions pu espérer quelque idée sur une promotion économique active pour Genève; des efforts pour renforcer notre crédibilité sur le plan national. Nous savons que les investisseurs, fonds de prévoyance, banques et autres, fuient Genève et qu'il faut les rattraper. Enfin, nous espérions au moins que les conditions-cadres de l'économie seraient au coeur de vos préoccupations. Tout cela, nous ne l'avons pas trouvé. Mais il serait injuste de vous en tenir rigueur car ce que nous vous avons demandé avec tant d'insistance depuis un mois, nous l'avons trouvé tout de même. Nous avons trouvé dans l'ensemble de votre déclaration une réponse à notre exigence d'un effort sur le vertical comme sur l'horizontal, sur le court comme sur le long terme, et de cela nous vous savons finalement gré.
Vous nous avez dit clairement votre volonté de réduire l'endettement, vous nous avez dit clairement que vous envisagiez des mesures concrètes pour le réduire et vous avez dit que la révision du fonctionnement de l'Etat et sa réforme étaient à l'ordre du jour. Vous avez même pris le risque de proposer quelques dates pour des échéances concrètes s'agissant de l'un et de l'autre sujet. C'est donc une nouveauté remarquable que nous saluons ici et qui conduira le groupe libéral à voter ce soir le projet de loi constitutionnelle qui lui est soumis, parce que nous croyons que les actes dont vous vous réclamez aujourd'hui sont des promesses concrètes.
D'ailleurs, Mesdames et Messieurs du gouvernement, je tiens à vous dire que nous veillerons à ce que ces promesses soient suivies d'effets directement et indirectement. Indirectement parce qu'il nous apparaît que le programme que nous sommes en train d'amorcer n'est pas compatible avec un certain nombre de tendances anachroniques pour ne pas dire «catachroniques» qui sont encore de mise ici et là sur les bancs de ce parlement. Nous ne voyons pas par exemple comment vous rendrez compatible la diminution des déficits de l'Etat avec le projet de LDTR qui est en train de sortir des travaux de la commission du logement. Nous ne voyons pas comment ces économies seront compatibles avec certains projets relatifs aux établissements médico-sociaux ou par rapport à d'autres textes légaux - je n'en ferai pas la liste maintenant. Nous accueillons néanmoins avec satisfaction ce texte et non seulement nous le voterons, mais nous veillerons à son accomplissement rigoureux et nous suivrons les travaux qui vont découler de tout ça de manière effective et fervente.
Je le dis parce que c'est un engagement non seulement de voter ce soir ce projet mais aussi de le faire voter par nos propres milieux, qui ne sont pas très enthousiastes de voir même temporairement leurs charges fiscales s'alourdir. Nous leur demanderons de le voter parce que nous croyons qu'ici réside l'avenir de la République. Mais nous le ferons parce que nous sommes convaincus que les promesses faites ou les promesses articulées seront tenues, et au besoin nous veillerons à ce que vous les teniez car nous pensons qu'il est de notre devoir de parlement de contrôler l'activité du gouvernement.
Ainsi, par exemple, nous serons très attentifs à ce que les projets de lois qui nous seront soumis, conformément à la constitution, ne soient adoptés - quand ils comportent des dépenses - que si nous avons les recettes correspondantes, et nous insisterons pour que vous n'acceptiez pas de projet qui ne réponde pas à cette exigence constitutionnelle pendant si longtemps violée. En d'autres termes, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral se range fermement du côté de ce projet. Il l'appuiera avec énergie et avec ferveur auprès de ses propres électeurs, mais il veillera à son respect strict et à la recherche d'une véritable solution à long terme pour Genève sans laquelle nous n'aurions rien fait que nous payer de mots une fois de plus. (Applaudissements.)
Mme Véronique Pürro (S). J'aimerais apporter quelques bémols à l'enthousiasme général qui semble ce soir présider à cette séance... (Remarque.) Presque général ! (Rires.)
Ce projet n'est pas satisfaisant et place un certain nombre d'entre nous face à un dilemme insupportable. En effet, le choix que nous avons à faire ce soir n'en est pas un. Entre un projet difficilement acceptable et une alternative difficilement gérable, qui pourrait se prononcer sereinement ?
Il a beaucoup été question ces derniers mois de transparence et de vérité. Soyons donc transparents jusqu'au bout et tirons d'ores et déjà les enseignements nécessaires à la suite des travaux.
Pour faire bref et parce que de nombreuses critiques ont été formulées, les points les plus difficiles à accepter pour certains militants socialistes sont les suivants.
S'agissant du paquet de mesures à court terme, plusieurs éléments tiennent du bricolage et les amendements de dernière minute qui nous ont été présentés tout à l'heure par le rapporteur de majorité en sont une parfaite illustration. Voici mes principales critiques :
- Premièrement, le principe de parallélisme entre charges et recettes qui a été présenté et est encore présenté ce soir comme l'épine dorsale sur laquelle a reposé le consensus n'est pas respecté.
- Deuxièmement, les propositions concernant la fonction publique, en dehors de toute considération sur leur pertinence, déroge au principe que les socialistes ont toujours défendu et selon lequel il est de la compétence du Conseil d'Etat de négocier avec le personnel de la fonction publique. Le Conseil d'Etat se défait ainsi d'une de ses prérogatives les plus importantes; par ailleurs, nous laissons à la population le soin de se prononcer sur la politique à mener avec la fonction publique et créons ainsi un fâcheux précédent.
- Troisièmement, l'existence d'un prélèvement supplémentaire sur les personnes physiques et morales sans véritable proportionnalité ni élargissement de l'assiette fiscale pose incontestablement le problème de l'équité sociale de l'effort.
- Quatrièmement, et c'est peut-être le point le plus grave, pour atteindre l'objectif de l'équilibre, il reste encore plusieurs centaines de millions à trouver durant les prochaines années : à ce niveau, rien, hormis les déclarations du Conseil d'Etat tout à l'heure, rien de précis ne nous a été présenté jusqu'ici. Nous nous fixons des objectifs - et non pas des instruments, Monsieur le député rapporteur de majorité - sans savoir comment et avec quels moyens nous allons les atteindre.
Concernant maintenant les mesures à long terme, en premier lieu on peut s'interroger, comme socialiste, sur la validité et les conséquences du postulat de l'équilibre budgétaire que nous allons durablement introduire dans la constitution, même si nous fixons une période-cadre. Cette dernière, qui est fixée à six ans, voire à neuf ans, est supposée contraindre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil mais elle n'est pas satisfaisante. Dans la mesure où aucun mécanisme ne prévoit une planification des efforts durant cette période-cadre, rien ne permet d'empêcher le non-respect des efforts durant les premières années de cette période; le cas échéant, la conséquence serait l'obligation de concentrer les efforts sur les dernières années de la période-cadre. Il est ainsi envisageable de laisser en héritage politique une situation difficilement surmontable.
Par ailleurs, les mesures proposées au niveau des investissements ont pour conséquence de les limiter. Cette mesure rigide, même si en commission un amendement en a quelque peu atténué la rigidité, signifie tout de même que le volume des investissements connus par avance ne nous permettra ni de mener une véritable politique anti-cyclique le cas échéant, ni de faire face à un investissement d'urgence. De plus, les objectifs de stabilisation de la dette posent la question non résolue encore des indicateurs économiques. En effet, comme vous le savez, Genève doit attendre deux ans pour connaître son revenu cantonal. La précarité de cette situation a pour conséquence la non-fiabilité des prévisions, ce qui permet de douter de la manière d'évaluer l'objectif.
Enfin, tout comme pour la période à court terme, nous nous fixons des objectifs sans savoir comment nous allons réellement les atteindre. Malgré toutes ces remarques, Mesdames et Messieurs les députés, je voterai ce projet... (Brouhaha.) ...car je suis malheureusement convaincue que, comme l'a rappelé ma collègue Reusse-Decrey, nous n'avons pas, n'avons plus le choix. J'ajouterai encore que je partage totalement l'avis pragmatique du parti socialiste selon lequel nous devons affronter les obstacles plutôt que les contourner.
Mais comment en est-on arrivé là ? La lecture du rapport de majorité est particulièrement instructive et permet de comprendre pour quelles raisons ce projet est aussi insatisfaisant à mes yeux. Cela tient principalement à deux causes : la méthode de travail et l'attitude de l'Alliance de gauche... (Brouhaha.)
On nous a présenté la table ronde comme une négociation à laquelle a été associé un large spectre de partenaires. Le rapport est pourtant clair à ce sujet. En lisant que les tables rondes ont surtout eu pour objectif - et je me permets là de reprendre les propos du rapporteur à la page 4 de son rapport - d'avoir «un effet pédagogique permettant aux partenaires de prendre mieux conscience de la gravité de la situation financière du canton», nous devons reconnaître qu'il ne s'agit en aucun cas d'une concertation mais bien d'un processus de sensibilisation et d'information.
La suite de la procédure est encore plus parlante. Par souci d'efficacité, nous dit-on, les accords se sont conclus exclusivement entre les partis politiques gouvernementaux. Comment peut-on, alors que ce projet est probablement le plus important que nous ayons à voter et que ses conséquences porteront bien au-delà de cette législature, avoir agi dans une telle précipitation en excluant les partenaires sociaux de la négociation ? Même le Conseil fédéral n'a pas osé agir de la sorte.
La phase des travaux parlementaires est elle aussi fort discutable. La commission des finances, dit-on dans le rapport, a consacré six séances, soit une vingtaine d'heures à l'examen de ce projet. Lorsque l'on sait, Mesdames et Messieurs les députés, que pour une simple pétition nous sommes capables d'en consacrer le double, permettez-moi de trouver cela un peu léger et je crois que la population peut légitimement se poser quelques questions. Mais, me direz-vous, la commission n'était pas le lieu où s'est déroulée la discussion puisque les partis qui ont signé l'accord, à savoir les partis gouvernementaux, ont poursuivi leurs négociations en dehors des institutions prévues à cet effet. Ce fonctionnement est plus que contestable et ne peut en aucun cas devenir une pratique. Il en va de la crédibilité et de la survie de nos institutions démocratiques.
J'en viens maintenant à l'attitude de nos collègues de l'Alliance de gauche...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Véronique Pürro. Monsieur le président, je peux, comme le font mes collègues masculins, reprendre la parole d'ici un petit instant ! Concernant l'attitude de nos collègues de l'Alliance de gauche, si je peux tout à fait comprendre, notamment au vu de ce que j'ai précédemment fait remarquer, que l'Alliance de gauche n'ait pas souhaité donner sa caution à la procédure mise en place durant l'été, je souhaite en revanche dénoncer son attitude durant les travaux parlementaires.
En refusant dès le départ de soutenir les amendements visant à améliorer le projet et, pire, en évitant soigneusement d'en présenter, l'Alliance de gauche a démissionné et a abandonné sa responsabilité aux autres partis. L'Alliance de gauche s'est une fois encore contentée, comme elle le fait ce soir encore, de faire de beaux discours théoriques mais s'est montrée incapable de faire des propositions concrètes. (Commentaires.) Si sa stratégie est limpide, les conséquences sont graves...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée ! (Chahut. Le président agite la cloche.)
Mme Véronique Pürro. Plus le projet est mauvais, telle est la stratégie de l'Alliance de gauche, plus il est facile de le rejeter et plus il est aisé de dénoncer la haute trahison des autres partis de gauche. A ce jeu, chers collègues de l'Alliance de gauche, personne ne peut gagner, surtout pas celles et ceux que vous prétendez défendre dans vos discours.
Pour terminer, Monsieur le président, si vous me le permettez, je formulerai quelques souhaits pour la suite de nos travaux. Je demande personnellement au Conseil d'Etat qu'il se donne les moyens pour que nous puissions connaître les véritables raisons qui auront motivé le choix de la population lors de la votation du 20 décembre. Je regrette en effet que nous prenions l'habitude de faire nos projets en fonction des pseudo-sondages de certains quotidiens ou d'appréciations personnelles, en dehors de toute analyse précise. Contrairement à certains, je ne suis pas persuadée que la population ne soit pas prête à suivre une nouvelle augmentation d'impôts. Preuve en est la dernière votation fédérale relative aux redevances et taxes sur les poids lourds.
Le président. Madame, il vous faut conclure, sinon, je serai obligé de vous couper la parole ! (Commentaires.) Monsieur le député Vanek. (Brouhaha et applaudissements.)
M. Pierre Vanek (AdG). Quelques observations, Mesdames et Messieurs, et vous m'applaudirez quand j'aurai fini ! (Rires et applaudissements.).
Le président. Allez-y, Monsieur le député, votre temps de parole est compté !
M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président, mais vous déduirez les applaudissements de la droite !
J'ai entendu l'essentiel de l'intervention de ma préopinante avec beaucoup de plaisir. Si je n'avais pas été convaincu, elle m'aurait effectivement convaincu de ne pas voter ce soir ce projet de loi constitutionnelle. Je ne vais pas résumer les divers éléments de son réquisitoire. qui rejoint sur un certain nombre de points celui que Bernard Clerc a présenté, mais au début je me suis dit : quel plaisir, nous ne sommes pas contraints, nous, l'Alliance de gauche, à occuper l'ensemble de l'espace politique à gauche de M. Ducommun. Puis, concrètement, j'ai été très déçu quand Mme Pürro a indiqué qu'elle allait quand même voter ce paquet qu'elle a décrié tout au long de la quinzaine de minutes de son intervention.
Cela me rappelle un peu la discipline qui régnait du temps du gouvernement monocolore où l'on voyait le docteur Froidevaux se lever et déclarer tout le mal qu'il pensait de la fermeture de la clinique de Montana, puis remettre son veston et voter avec la majorité pour sa fermeture. (Brouhaha.) Vous vous souvenez de ce qu'il est advenu ensuite des positions de la minorité et de la majorité dans les urnes. Je crois effectivement que ce paquet aura le même sort.
Maintenant, Mme Pürro va jusqu'à comprendre l'Alliance de gauche qui n'a pas participé à cette mascarade de l'été... (Commentaires.) ...mais elle fustige notre position parlementaire, à savoir de n'avoir pas systématiquement présenté des amendements pour essayer d'améliorer ce paquet.
Je suis peut-être un mauvais lecteur des textes mais j'avais cru comprendre, Mesdames et Messieurs les chevaliers de la table ronde, que vous aviez effectivement signé un engagement contraignant qui consistait aussi à ne pas amender le paquet sans consulter tous les autres. Nous n'allions pas consulter tous les autres, par votre entremise peut-être, pour essayer d'obtenir quelques modifications.
Mesdames et Messieurs les députés, nous pensons que, sur le fond, cet article constitutionnel est mauvais et nous visons à le repousser. Je ne crois pas que nous aurions pu beaucoup l'améliorer en commission, mais mes collègues présenteront ce soir l'un ou l'autre amendement pour être clairs sur un certain nombre de choses qui devraient être faites si on voulait effectivement améliorer ce projet d'article constitutionnel, et je suis enchanté à l'idée que Mme Pürro les votera avec nous.
Pour en revenir à avant l'intervention de Mme Pürro, et c'est là que j'avais demandé la parole, mes préopinants, Me Halpérin sur le ton qui est le sien et M. Unger aussi, ont dit tout le bien qu'ils pensaient de la déclaration du Conseil d'Etat qui a précédé la pause de ce soir. Je n'analyserai pas cette déclaration en détail, je n'en ai pas le temps, mais il y a tout de même une chose un peu surréaliste. Nous avons aujourd'hui des fonctionnaires en grève, des travailleurs du secteur public en grève à l'hôpital et aux Cheneviers. Il y en avait des milliers dans la rue tout à l'heure, ils étaient dans la cour... (Commentaires et rires.). N'y en eût-il eu que des centaines, mon propos reste le même ! On entendait dans la cour des appels et des clameurs d'indignation que je partage... (L'orateur est interpellé.)
Ta gueule Dupraz ! S'il te plaît, laisse-moi finir ! Je m'excuse, John, mais tais-toi ! Pendant le même temps, Mme Calmy-Rey, imperturbable, disait qu'il fallait évidemment «une négociation avec les représentants de la fonction publique, négociation qui prendra du temps, mais le projet de loi constitutionnelle garantit les mécanismes salariaux pendant quatre ans et donc une période de paix dans les relations du travail qui permettra aux négociations de prendre place et de se conclure sereinement ».
C'était tout à fait surréaliste. Je ne veux pas faire un procès à Mme Calmy-Rey sur le fait qu'elle ait pu dire cela à ce moment-là, mais je crois tout de même que cela dénote, Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat et ceux d'entre vous qui suivez cette logique-là, que vous êtes vraiment sur une autre planète... (Brouhaha.) Oui, vraiment sur une autre planète !
Une voix. Là tu es dans la lune !
M. Pierre Vanek. J'aimerais encore dire quelques mots avec votre permission. J'avais noté l'intervention de Mme Elisabeth Reusse-Decrey, que j'apprécie et que je respecte en général, mais qui nous a fait le coup de Chaïm Nissim la dernière fois en parlant du sale boulot qu'avaient dû faire les socialistes.
Décidément, Nissim s'était sali les mains la dernière fois et cette fois-ci c'est du sale boulot. Oui, c'était du sale boulot et vous n'étiez pas obligés de vous y prêter. Vous avez, pour justifier votre...
Une voix. Trahison...
M. Pierre Vanek. Non, je n'ai jamais parlé de trahison dans cette enceinte, Monsieur Blanc, et vous ne me le soufflerez pas ! Pour justifier cette position en rupture avec tout ce que vous aviez dit jusque-là en matière de programme notamment, vous dites que la voix du peuple s'est prononcée contre des augmentations d'impôts; qu'on ne peut pas avoir d'augmentations d'impôts. Mesdames et Messieurs, la voix du peuple s'est certes prononcée, mais sur d'autres sujets on est revenu systématiquement à la charge, dans de nombreuses batailles.
En l'occurrence, ce n'est pas seulement la voix du peuple. C'est la voix du peuple influencée par une campagne ultralibérale, politique, systématique, courageuse, bien financée, menée avec talent, Mesdames et Messieurs les libéraux, et depuis longtemps ! C'est aussi cela qui parle dans les urnes. C'est à cela que servent les partis politiques et pas simplement à dire : le peuple a tranché. D'ailleurs, les libéraux continuent, ils maintiennent leur initiative et d'autres relais continuent sur cette ligne.
Il devient évidemment plus difficile d'avoir une voix du peuple différente si ceux qui devraient pousser dans l'autre sens, notamment le parti socialiste si j'en crois ses déclarations préélectorales, se contentent - et je m'excuse du terme - de pleurnicher dans cette enceinte et de dire : nous ne pouvons pas décrocher de nouvelles recettes fiscales.
A mon avis, ce paquet ouvre néanmoins un certain nombre de perspectives. En effet, vous proposez des hausses d'impôts et ce que les gens ressentent et comprennent, car c'est tellement clair, simple et limpide, c'est que ce sont des hausses qui frappent les petits et épargnent les gros. C'est ce que le peuple va refuser, Monsieur Lescaze. Vous nous avez dit : «Vous ne nous ferez pas croire que c'est à cause des économies...» Non, on vous fera croire que c'est aussi à cause des hausses d'impôts. Non pas des hausses d'impôts en général, car les impôts sont des choses concrètes; on peut imposer d'une manière ou d'une autre.
Eh bien, ce sera refusé, je le pense, je l'espère, j'y travaillerai parce que ce sont des hausses d'impôts qui frappent les petits et épargnent les gros, et nous pensons effectivement qu'il faut inverser cette formule. (Applaudissements.)
M. Jean Spielmann (AdG). Nos débats et discussions sur la situation financière et le fonctionnement de l'Etat prouvent que plusieurs problèmes de fond n'ont pas été résolus. On se contente d'y appliquer des emplâtres.
Je vais tenter de tracer quelques perspectives. Dans quel sens, nous députés, entendons-nous défendre, sur le terrain politique, d'autres valeurs que celles ayant présidé à la mise en place de ce projet de loi constitutionnelle ?
La mondialisation, au fur et à mesure qu'elle se développe et qu'elle abolit les frontières pour les entreprises et pour les déplacements des capitaux, pose une série de problèmes, notamment le problème de fond de l'assiette fiscale sur laquelle les gouvernements peuvent faire fonctionner la société. La mondialisation sape les possibilités fiscales.
Si nous examinons ce mécanisme dans le détail - ce que j'ai déjà fait au cours de nos nombreuses séances sur le budget pour tenter de modifier l'assiette fiscale de ce canton où la part d'impôts payée par les sociétés est toujours moins importante que celle prélevée directement sur les salaires - nous constatons qu'il découle de cette globalisation, de cette politique de libéralisation.
En 1980, au niveau européen, seulement 50% des recettes fiscales, d'après les rapports de la CEE, provenaient du revenu du capital des entreprises et des travailleurs indépendants. En 1994, cette part est passée à 35%. Ce transfert d'assiette fiscale, du fait de la libéralisation, pose une série de problèmes, et pas seulement à notre République. Parallèlement à cette réduction de la participation fiscale des entreprises, la part prélevée directement sur les salaires est passée de 35 à plus de 40%. Dans notre canton, la charge fiscale évolue dans les mêmes proportions, et ce pour des raisons que j'essaierai d'identifier tout à l'heure.
Les conséquences de cette mondialisation et de ce libéralisme font que la part fiscale actuelle des sociétés ne représente plus, aux Etats-Unis, que 17% de la totalité des revenus. Ainsi, cette part qui est passée en Europe de 50 à 35%, n'est plus que de 17% aux Etats-Unis, alors qu'elle était encore de 27% en 1965.
Une bonne partie des moyens des entreprises et des pouvoirs financiers échappent au fisc pour toutes sortes de raisons qui doivent être identifiées, parce qu'elles ont des conséquences directes sur nos sociétés. Cette volatilité ne nuit pas seulement à l'assiette fiscale à moyen terme des impôts directs, mais aussi à la TVA. Cet impôt, présenté comme la panacée pour remédier au manque des recettes, est lui-même menacé par ce que j'appellerai le «cyber espace» qui permet des échanges commerciaux échappant totalement au fisc puisqu'ils échappent au contrôle des gouvernements et des Etats. Ces échanges sont appelés à se développer grandement, faute de moyens de contrôle et d'intervention de la part des collectivités publiques.
Les mesures que vous proposez vont donc dans la mauvaise direction. Elles affaibliront la capacité des gouvernements et des collectivités publiques à résoudre leurs problèmes.
Quand nous décrivons cette situation de fait, qui est aussi celle du canton de Genève, il faut s'interroger sur les conséquences induites par ce mécanisme. Sans revenir sur la mondialisation, je rappellerai que ce n'est pas par hasard que Chrysler et Daimler-Benz ont fusionné, que les grandes sociétés de télécommunication fusionnent toutes, que les grandes banques et les milieux de la chimie font de même avec, à la clé, une multitude de licenciements, des problèmes sociaux très importants qui sont reportés sur les gouvernements qui, eux, n'ont plus les moyens nécessaires à l'établissement des programmes sociaux. Si l'on considère l'exemple le plus récent, à savoir celui de Swisscom, on s'aperçoit que, contrairement à toutes les promesses, cette privatisation, ce démantèlement provoque des licenciements de plus de deux mille employés remplacés par autant de personnes engagées à des conditions précaires.
C'est là une politique globale et déterminée que nous contestons et à propos de laquelle nous avons présenté une série de propositions qui ne datent pas d'hier.
Je rappellerai à mes préopinants que, lorsque nous avons parlé des grands projets fiscaux, l'initiative socialiste qui proposait d'apporter des correctifs à l'assiette fiscale n'a même pas été soutenue par les socialistes au moment de la votation, ce qui fait qu'elle a capoté.
Nos propres initiatives ont également été rejetées et ce sont les contre-projets libéraux qui ont passé la rampe. Il n'est donc pas étonnant qu'avec une telle politique nous nous trouvions devant des caisses vides. Elles le seront plus encore avec l'initiative des libéraux pour diminuer les impôts - initiative dont on ignore d'ailleurs ce qu'elle va devenir dans le cadre de ce paquet. Des propositions similaires ont été faites au niveau fédéral en vue de supprimer l'impôt fédéral direct.
Nous avons affaire à une offensive contre l'Etat social et ce n'est pas par hasard qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat, au lieu de trouver une solution politiquement crédible à cette situation, ouvre la chasse aux pauvres et propose une fiscalité frappant les plus démunis, attaquant les invalides et taxant les victimes de ce système mis en place par les libéraux.
Enfin, le bouquet final ! Les libéraux nous disent clairement que le principal défaut de ce projet de loi constitutionnelle est de stratifier la possibilité de l'Etat d'intervenir dans le domaine économique en y investissant. Ce projet fixe, en effet, un carcan empêchant l'afflux de nouvelles recettes et bloque fermement les dépenses, ce qui a été dénoncé avec beaucoup de clairvoyance par le rapporteur de minorité.
La déclaration du parti libéral devrait, pour le moins, susciter quelques questions de la majorité politique voulue par le peuple dans ce Grand Conseil, laquelle majorité aurait dû conduire une tout autre politique. C'est d'ailleurs en raison de cette nouvelle majorité politique que le Conseil d'Etat a trouvé malin de déplacer le débat politique à l'extérieur de notre parlement, afin de casser la dynamique qui aurait pu être celle d'une gauche écologiste, d'une gauche plurielle, pour corriger cette politique néfaste au développement des activités sociales dans ce canton.
Le diagnostic étant posé, nous pouvons évaluer les conséquences de ce projet de loi. L'examen détaillé de vos propositions nous amène à constater qu'elles s'inscrivent toujours dans la même voie. Nous avions parlé d'une fiscalité tenant davantage compte de la capacité contributive des citoyens. Ce projet de loi constitutionnelle propose exactement le contraire ! Il va à l'encontre de la loi fédérale en matière fiscale qui, elle, oblige les cantons à ne prélever des impôts que s'ils sont proportionnels aux revenus des citoyens. Or le prélèvement généralisé de 1% pénalisera davantage les plus démunis. Il est contraire à l'esprit de la loi fédérale. Il accentuera le glissement de l'assiette fiscale vers les plus pauvres.
Dès lors que l'on fait la chasse aux pauvres pour assurer les finances de l'Etat, il n'est pas étonnant que l'on se trouve dans une situation insoluble, faute d'avoir mis en place de véritables réformes, modifié l'axe fiscal et adapté l'Etat aux besoins actuels de la population.
Voilà les motifs de fond pour lesquels nous nous opposons à ce projet de loi. Nous n'avons pas participé à la table ronde qui était tout sauf une table de négociations. Elle a été mise en place pour détruire la majorité parlementaire de ce Grand Conseil élue par la population. Nous essaierons de la reconstituer lors de la votation du 20 décembre. Ensuite, nous verrons bien qui a eu raison et qui a eu tort.
Je suis persuadé que la population genevoise comprendra que votre chasse aux pauvres et votre assiette fiscale injuste sont inacceptables. Je ne comprends pas que certains aient pu participer à leur élaboration.
M. René Ecuyer (AdG). Ce que nous craignions est arrivé. En effet, qu'est-ce que cette table ronde ?
C'est la réduction des salaires des travailleuses et travailleurs de la fonction publique, la diminution des revenus des invalides, notamment des plus atteints qui reçoivent une rente de 100%.
C'est l'obligation, pour les retraités, de dilapider le reste de leur épargne, leur petite marge de sécurité, avant qu'ils ne reçoivent le moindre complément à une AVS toujours insuffisante - et vous le reconnaissez tous ! - pour vivre.
C'est l'augmentation de la taxe personnelle qui avait été balayée par le peuple. Qu'importe, on veut l'augmenter !
C'est l'augmentation de 50% de l'impôt auto.
C'est aussi l'imposition dérisoire des grosses fortunes et des gros bénéfices.
Je me félicite que nous n'ayons pas participé à cette table ronde, car je ne vois pas ma signature parapher un pareil résultat.
Nous espérions que les choses s'arrangeraient en commission. En l'occurrence, Madame Pürro, une séance au lieu de six aurait suffi, les dés étant pipés d'avance ! Vous vous êtes ralliés au premier projet, qui prévoyait 367 millions, sinon vous n'auriez pas eu l'accord des libéraux. Ce qui était signé était signé !
A cela s'ajoute une détestable campagne d'intoxication. Et qui trouve-t-on à sa source ? M. Segond, conseiller d'Etat ! Cette campagne tend à prouver que dans ce canton on est allé trop loin avec les prestations aux personnes âgées et aux invalides. Avec la complicité des médias, on publie dans la presse des tableaux qui laissent apparaître qu'une personne bénéficiant des prestations complémentaires cantonales dispose d'un revenu plus important qu'une personne salariée gagnant 3 000 F par mois. Le scandale n'est pas qu'une personne, au bénéfice des prestations cantonales, ait un revenu lui permettant de vivre au-dessus du niveau de pauvreté. Le scandale est que des patrons paient 3 000 F par mois des salariés, des pères et des mères de famille. Ces gens-là ne peuvent pas tourner, c'est évident !
Qu'attend M. Segond pour traquer ces patrons ? Qu'attendons-nous, ici même, pour définir un salaire minimum décent dans ce canton ?
M. Segond a des comparaisons grotesques. Dans ses tableaux, il va jusqu'à représenter une famille qui compte sept enfants et qui bénéficie des prestations complémentaires de l'OCPA, avec une famille aussi nombreuse, avec un père salarié. Combien y a-t-il de familles de sept enfants, au bénéfice des prestations complémentaires de l'OCPA, dans ce canton ? C'est absurde ! M. Segond ne ferait pas autrement s'il voulait détruire sa propre argumentation !
Il compare les revenus des allocataires de l'OCPA de Genève et ceux des retraités les plus pauvres de Zurich et de Bâle, pour démontrer que les premiers ont bien plus de chance que les derniers. Mais il faut comparer ce qui est comparable ! Ces retraités zurichois ou bâlois reçoivent-ils une aide communale ? M. Segond ne le dit pas. Pour comparer, il serait intéressant de le savoir.
En fait, cette détestable campagne d'intoxication tend à un nivellement intercantonal par le bas, ce qui permettrait de conforter les finances cantonales. Elle tend également - ce qui est particulièrement odieux - à confisquer ce qui a été conquis de haute lutte par les précédentes générations et qui était la fierté des travailleurs de ce canton. Genève a toujours été à la tête du progrès social de notre pays, et nous en sommes fiers, en matière d'allocations familiales, de vacances payées et d'aide aux personnes âgées. Souvenez-vous que la loi sur l'aide sociale à la vieillesse date d'avant-guerre, de 1939 exactement. Genève était donc bien à la pointe du progrès social.
Vous me direz que M. Segond a introduit le RMCAS. A Genève, c'est un droit et un travailleur au chômage doit le revendiquer pour sauvegarder sa dignité. Mais le RMCAS est soumis à l'impôt. Les bénéficiaires touchent le minimum vital, augmenté de 10% par rapport au minimum suisse, mais paient 2 400 F d'impôts, alors que les personnes se trouvant à l'assistance publique sont exemptées fiscalement. Par conséquent, cela signifie qu'à Genève les chômeurs de longue durée perçoivent un revenu inférieur aux normes d'assistance suisse. Alors, question progrès social, on a encore un bout de chemin à faire !
Monsieur Segond, vous avez déclaré en commission, hors procès-verbal, que si des économies devaient être faites dans les années à venir, elles le seraient sur le dos des retraités. C'est dans l'esprit de cette campagne d'intoxication qui veut faire croire que les vieux gagnent énormément dans le canton de Genève.
Quand vous vous rendez aux assemblées de retraités - hier, vous étiez chez les handicapés, je crois - leur dites-vous ce qui se passera pour les plus pauvres d'entre eux, à Genève ? Les avez-vous avertis de la façon dont vous les traiterez ? Je ne le pense pas.
Le président. Veuillez vous adresser à l'assemblée, Monsieur le député.
M. René Ecuyer. Merci de lui transmettre mon message, Monsieur le président ! Nous ne voulons pas porter atteinte à la dignité des retraités, la vieillesse n'est pas la fin de l'existence, mais le commencement d'une nouvelle. C'est le moment de faire quelque chose de plus. Pourquoi les plus pauvres ne pourraient-ils pas aller au restaurant de temps en temps, pourquoi ne partiraient-il pas en course avec l'AVIVO, pourquoi n'entreprendraient-ils pas quelque chose qu'ils n'ont pas pu réaliser lors de la pratique de leurs activités souvent pénibles ?
Il est vrai qu'en regardant cette assemblée on peut se poser des questions. Cela ne dérange personne ici de toucher de confortables salaires et d'envisager une prochaine retraite qui, pour la plupart, sera dorée. Mais, en ce moment, nous discutons des plus petits revenus qui risquent d'être touchés, ce qui est inadmissible.
Vous avez décidé de réduire le revenu des invalides de 13 ou de 15%. Cela fait 300 F par mois sur une rente de 2 000 F : voyez la symétrie des sacrifices par rapport à ce que l'on demande à d'autres !
Vous êtes-vous jamais demandé pourquoi le Conseil d'Etat, il y a plus de vingt ans, a réussi à persuader les députés de ce Grand Conseil de la nécessité de relever les prestations des personnes à l'AI ? C'était parce qu'un homme ou une femme en pleine vie active et qui, soudainement, perd sa capacité de travailler, doit faire face aux mêmes dépenses qu'auparavant. Ils ont des dépenses en rapport avec un revenu de salarié et non avec un revenu de retraité. Ils ont souvent des enfants et doivent veiller à leur donner une formation. Et c'est bien après une mûre réflexion que ce Grand Conseil avait suivi le Conseil d'Etat.
Pensez-vous que les conditions de vie d'un invalide ont changé aujourd'hui ? Pensez-vous que l'argumentation qui fut à la base du relèvement des allocations n'est plus la même ? Rien n'a changé, hormis votre attitude vis-à-vis des gens à petits revenus.
Vous imposez des conditions draconiennes aux anciennes générations, aux invalides, aux salariés de la fonction publique, simplement parce que vous courbez l'échine devant les banques; vous acceptez que Genève se plie à leurs diktats, comme un pays du tiers-monde soumis à une dictature...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. René Ecuyer. Vous serrez la vis à la grande majorité de la population pour payer le demi-milliard d'intérêts que nous versons chaque année aux grandes banques de ce pays, celles-là mêmes à qui l'on demandera un effort fiscal de 2 000 F. Je trouve lamentable de s'abaisser devant les banques, à qui l'on ne dit rien et qui se sucrent sur notre dos depuis des années.
Je proposerai un amendement que je juge absolument nécessaire à ce projet de loi, afin que les prestations sociales ne subissent aucune diminution. Et je demanderai l'appel nominal. Ce n'est pas dans l'intention de prolonger le débat, mais il me semble que les gens doivent savoir qui est qui et qui vote quoi. En effet, dans vos programmes électoraux, vous avez promis de faire le maximum pour les personnes âgées, les défavorisés, etc. Il importe, par conséquent, que vous vous prononciez clairement sur le revenu des invalides.
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député, sinon je serai obligé de vous couper la parole.
M. René Ecuyer. Très bien, Monsieur le président. Nous avons simplement l'intention de publier les noms de ceux qui voteront oui, de ceux qui voteront non et de ceux qui s'abstiendront. (Applaudissements.)
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. Je souhaite revenir sur les arguments précédemment développés.
Madame Reusse-Decrey, vous pouvez relire mon texte à l'aide d'une loupe. Vous n'y trouverez pas le mot «traître». De plus, je n'ai jamais prononcé ce mot. Si vous en tirez votre propre conclusion, c'est votre problème et pas le mien.
Maintenant, je passe à la proposition faite, tout à l'heure, de voir la vérité en face.
Je suis vraiment surpris que le parti socialiste et les Verts découvrent, soudainement, l'état des finances du canton. Je côtoie ces collègues à la commission des finances depuis un certain nombre d'années et, que je sache, la situation financière du canton leur est connue. Les dix milliards d'endettement, les montants des déficits leur sont connus. Certes, l'ancienne majorité monocolore a fait des arrangements, mais tout le monde savait - c'était officiel - que le montant des amortissements avait été réduit, passant de 10 à 6%. Nous avons été les premiers à dénoncer la mise au compte d'investissement d'une partie des dépenses pour les emplois temporaires en raison de sa non-conformité avec la comptabilité publique. Et aujourd'hui, on nous fait croire que l'on vient d'ouvrir les placards et que l'on y a découvert des cadavres. Mais tout le monde était au courant de l'existence de ces cadavres depuis pas mal de temps ! Je ne pense pas que l'on puisse utiliser cet argument pour justifier le paquet proposé.
De plus, on tente de faire croire que c'est la faute de l'Alliance de gauche si ce paquet ficelé est aussi lamentable. C'est absolument extraordinaire ! Si l'Alliance de gauche avait participé à ces négociations parallèles au débat parlementaire, soyez certains que le paquet aurait été tout autre. C'est l'évidence même : les libéraux auraient accepté une hausse majeure de l'impôt sur les grosses fortunes !
Bien que nous n'ayons pas participé à ces négociations, notre chef de groupe s'est rendu à la première convocation de la table ronde. C'est ainsi que nous avons pu prendre connaissance des propositions faites et surtout du cadre dans lequel elles étaient présentées. Ce cadre était évidemment inacceptable pour les raisons développées dans notre rapport de minorité. Dès lors, nous ne voyions pas, dans une option de gauche, comment modifier fondamentalement un mécanisme aussi rigide.
D'autres ont fait un choix différent. C'est leur droit. C'est le droit des socialistes et celui des écologistes de choisir une autre voie, mais qu'ils n'essaient pas d'en faire porter la responsabilité à l'Alliance de gauche. Vous avez préféré une nouvelle majorité qui va jusqu'au parti libéral. Assumez votre choix et n'essayez pas de dévier le tir !
Mme Véronique Pürro (S). Monsieur le président, veuillez transmettre à M. Clerc que je n'accorde pas l'importance qu'il s'accorde à lui-même et à l'Alliance de gauche. S'il avait participé à nos discussions, je ne pense pas que le projet aurait été aussi bon qu'il l'aurait souhaité, mais il aurait certainement été plus satisfaisant, pour ne pas dire moins mauvais.
J'ai lu attentivement le rapport de minorité qui illustre la stratégie que vous avez adoptée. J'ai eu l'occasion de remplacer ma collègue Reusse-Decrey à deux séances de la commission des finances. J'ai assisté au cirque que vous avez mené dès le départ, Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, en refusant systématiquement tous les amendements.
M. Ecuyer parle de la défense des petits revenus. Considère-t-il que les conseillers d'Etat ont de petits revenus ? Je crois que c'est le cas ! En effet, l'Alliance de gauche a refusé l'amendement proposant de réduire de 2% le traitement annuel des conseillers d'Etat. Cela apparaît à la page 23.
Je sais bien que votre présence n'aurait pas embelli le projet, mais, grâce à elle, nous aurions pu corriger quelques déséquilibres, voire des injustices, qui posent problème à certains d'entre nous.
Je souhaite terminer mon intervention de tout à l'heure. J'en étais à ce qui me tenait à coeur pour la suite des travaux, car je demeure convaincue, comme mon camarade qui a publié aujourd'hui une lettre dans le «Courrier», que nous devons nous projeter au-delà du 20 décembre quel que soit le résultat de la votation.
Dans cette perspective, les enseignements que nous pouvons tirer de nos discussions au sujet de ce projet de loi sont essentiellement liés à la méthode de travail. Nous ne pouvons pas oeuvrer de cette manière. Si nous voulons réformer l'administration, suivre les chantiers que Mme Calmy-Rey et le Conseil d'Etat souhaitent entamer, il est indispensable que nous sachions faire participer la population, d'une part, et la fonction publique, d'autre part. Sans elles, tout réforme restera une vue de l'esprit.
En d'autres circonstances, nous nous plaisons à dénoncer celles et ceux, notamment certains des partis extrêmes, qui usent de la peur pour faire avancer leurs projets. Ne faisons pas de même, Mesdames et Messieurs les députés ! Ne jouons pas sur les craintes, le catastrophisme, et battons-nous pour que ce projet soit accepté en votation populaire. Je répète à l'intention de M. Vanek, qui n'est plus là pour m'entendre, qu'il n'y a pas de choix, que l'Alliance de gauche ne présente pas d'alternative et qu'un refus populaire serait pire que tout.
Le président. Je salue à la tribune la présence de Mme Maulini-Dreyfus, notre ancienne collègue députée. (Applaudissements.)
M. Pierre Froidevaux (R). M. Vanek a rappelé dans sa diatribe mon indépendance d'esprit. Je l'en remercie.
Oui, Monsieur Vanek, j'avais émis de grandes réserves, en son temps, lorsque nous devions proposer au souverain la fermeture de la clinique genevoise d'altitude de Montana. Cela me paraissait s'opposer à la volonté populaire. Le vote des citoyens m'a donné raison.
Les débats de ce soir, sur le processus appelé «table ronde», ne m'ont pas convaincu. Elu du peuple avant d'être un élu radical, j'exprime ici les doutes du citoyen qui ne perçoit là aucun projet de société. Les impôts sont une certitude, comme d'habitude, et la volonté de réforme, une intention. Comme citoyen, j'aurais été d'accord de me prononcer sur des réformes du statut de la fonction publique ou sur l'adaptation de la fiscalité. Les deux à la fois, cela ne marche pas. Il ne peut y avoir que le cumul des non. Ainsi, le résultat du 20 décembre est déjà connu de tous : c'est non ! Le Conseil d'Etat ne peut être dupe. Dès lors, est-il utile de faire voter le peuple lorsque le résultat est si prévisible ?
Ce 20 décembre, les grands pourfendeurs du oui seront déjugés. Ils auront perdu leur crédibilité. L'actuelle majorité, qui n'existe déjà plus ce soir, ne se recomposera pas. La minorité ne va pas, pour autant, devenir majoritaire. Notre Conseil n'aura plus rien à dire. Seul l'exécutif détiendra le pouvoir. Le débat démocratique aura perdu sa substance. Voter non ce soir ne sera que précéder la volonté populaire. Ce sera aussi préserver notre volonté de soumettre l'exécutif à notre contrôle parlementaire.
Aussi, sans la moindre hésitation, je dis non.
M. Dominique Hausser (S). J'ai entendu les «si» de M. Clerc et je viens d'entendre le sieur Froidevaux exprimer sa volonté de voir la gauche se «planter». Néanmoins, des choses doivent encore être dites.
M. Clerc a déclaré que les socialistes semblaient découvrir la gravité des déficits. Non, Monsieur Clerc, nous nous en doutions depuis longtemps. Si vous reprenez les éditions du Mémorial, vous y trouverez les discours tenus par les socialistes, y compris les miens. Tous ont dit que les budgets étaient cosmétiques et que l'on aboutirait à une situation catastrophique, mais c'est la première fois - et il a fallu attendre cette législature - que nous en avons les preuves.
Ce projet me rappelle le supplice moyenâgeux de l'écartèlement pratiqué avec un cheval attaché à chaque membre. Ici, l'écartèlement se fait avec un spectateur et cinq acteurs - trois d'un côté et deux de l'autre. Ce projet a résisté à cet écartèlement. Ses points ont déçu certains, satisfait d'autres, et vice-versa. Hélas, son manque de perspective ramènera ce canton à la situation et aux discussions menées voici six ans à propos, notamment, de la proposition inapplicable et démagogique de «Halte aux déficits». La situation d'aujourd'hui est similaire avec, en plus, une limitation de la marge de manoeuvre du canton et un démantèlement de l'Etat.
Des cinq milliards du budget combien sont ceux utilisés pour concrétiser des choix politiques ? Combien de milliards sont liés à des dépenses incompressibles ? Combien de milliards sont liés à des choix politiques tendant à assurer une éducation pour tous, un soutien social et financier aux citoyens et citoyennes en situation difficile, résidant dans ce canton ? Ce choix a largement été influencé par la gauche qui, je le rappelle, a toujours été minoritaire dans ce parlement.
Que se passera-t-il si ce projet de loi est refusé ? La majorité de ce parlement votera-t-elle le budget 1999 proposé par l'exécutif ? Ce budget préserve les prestations sociales, engage et stabilise des agents de la fonction publique et assure les mécanismes salariaux pour les années 2000 et suivantes. Il nous donne le temps de chercher de nouvelles pistes pour permettre à l'Etat, exécutif et législatif, de jouer son rôle et de développer la politique sociale voulue par la gauche, au niveau de l'éducation, des logements sociaux, de l'aide aux exclus, aux stigmatisés et aux marginalisés de notre canton.
Ou verrons-nous un gouvernement de droite retirer son projet de budget et nous en présenter un nouveau, avec un déficit inférieur aux quelque 360 millions actuellement inscrits ? Ou verrons-nous un gouvernement ne présenter aucun budget, ce qui amènera le canton à fonctionner avec le budget de l'année précédente, avec ses nouvelles prestations ?
Je vous rappelle que la nouvelle majorité de cette législature a essayé de corriger le budget 1998, mais dans un cadre légal qui lui a laissé une marge de manoeuvre extrêmement limitée. Ce budget 1998, comme ceux des années précédentes, reste cosmétique.
Il est vrai que la fonction publique est touchée mais, contrairement à ce qui s'est passé les années précédentes, elle l'est de manière non linéaire. Un certain nombre de fonctionnaires verront leur salaire effectif, c'est-à-dire en francs réels, augmenter au début de 1999. Les fonctionnaires à haut revenu et ceux en fin de carrière - c'est une première - verront leur salaire diminuer d'environ 2,5%.
Il est vrai que les prestations sociales des personnes invalides sont touchées, prestations instaurées, à l'époque, pour de bonnes raisons. Ce n'est pas une bonne solution, mais un moindre mal. L'Hospice général touche une subvention supplémentaire qui lui permet de maintenir, par tête, un niveau de prestations sociales équivalant à celui de 1998. Il est vrai aussi que ces prestations sont toujours insuffisantes, que le minimum vital, qui mérite bien son nom, n'autorise pas un cadre de vie socialement acceptable, et que tout cela devra être remis sur le métier ces prochaines années.
Les socialistes se sont battus pour que les revenus soient taxés de manière plus substantielle. La discussion a été dure au début, certains groupes politiques n'admettant pas la perception d'un centime de plus sur les revenus. La moitié des contribuables est touchée par ce que M. Ecuyer appelle une taxe personnelle de 25, 50 ou 100 F, l'autre moitié est indexée à 1%, dès un revenu net de 20 000 F. Ce n'est pas satisfaisant. Nous voulions toucher l'assiette fiscale au niveau des salaires bruts, parce que la différence entre le salaire brut et le salaire net, en particulier liée aux réductions, favorise les privilégiés et que cela devra être modifié dans les prochaines années. Cette piste devra être suivie pour permettre de résoudre l'équation financière «140 + 360 + 300 millions» dont parlait M. Clerc tout à l'heure.
L'interprétation du cadre constitutionnel permanent peut être comprise de diverses manières. Ce cadre permettra, à long terme, de développer une politique apte à planifier les moyens que l'on veut mettre en place, la manière de réaliser les objectifs, cela en ne dépendant pas systématiquement de la pression financière liée aux cycles économiques dont l'ampleur, d'ailleurs, ne peut être déterminée à l'avance. Les modèles économétriques sont parfaits pour décrire le passé, mais tous ont failli pour décrire l'avenir.
Mesdames et Messieurs les députés, nous devons accepter ce paquet qui nous permettra de développer une politique de gauche. Pour ce faire, je demande l'appel nominal, en troisième débat, pour le vote final.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Je suis peu intervenu dans ce débat. Néanmoins et bien que l'heure avance, je voudrais faire quelques remarques suite à diverses interventions.
Je commence par les plus pessimistes ! Nous avons entendu le docteur Froidevaux prédire l'échec de ce projet. En tant que médecin, le docteur Froidevaux sait établir des diagnostics. Il m'étonnerait toutefois qu'ayant pronostiqué la mort de son patient il renonce à le soigner sous prétexte que, de toute façon, il va mourir. Je pense que son raisonnement se situe à ce niveau et, malheureusement, je ne peux pas le suivre.
On nous a reproché un unique amendement, purement technique, à ce projet de loi constitutionnelle, voté le 21 octobre. On a même parlé de bricolage. Pour moi, il s'agit d'un ajustement qui tient compte de tous les avis présentés. Je rappelle que cet ajustement s'appliquait à quelque chose qui nous a beaucoup préoccupés, à savoir une remarque du Bureau de l'égalité qui n'aurait d'ailleurs pas dû sortir des services du département des finances. C'est pour tenir compte de cette remarque mettant en jeu une éventuelle discrimination indirecte pour les temps partiels et les bas revenus qui leur sont liés - sociologiquement, il est vrai que ce sont des femmes qui occupent ce type d'emplois - que la majorité a finalement proposé une mesure d'une prime égale pour tous les revenus inférieurs à 60 000 F. D'où une nouvelle discrimination qui nous a conduits à établir cet ajustement technique pour les classes 4 à 13, lesquelles recouvrent 57% des temps partiels.
Comme Mme Pürro, on peut regretter, concernant les mesures à long terme, le plafonnement des investissements qui ne permet pas d'assurer, selon elle, une politique anticyclique. Soyons sérieux ! Quelle politique anticyclique, digne de ce nom, peut-on faire sur un territoire de 282 km2, lac compris, et occupé par quatre cent mille habitants ? Il faut se rendre compte de l'espace sur lequel nous travaillons ! Quant aux investissements - nous reverrons les choses ces prochains jours - il y a parfois de meilleurs choix à faire que de dépenser près de trois millions pour une cafétéria.
Je remercie M. Hausser d'avoir précisé que 50% des contribuables ne seront touchés que par la hausse de leur taxe personnelle, cette contribution de 25, 50 ou 100 F, et que 50% le seront - au-delà d'un revenu net de 20 000 F imposable, c'est-à-dire 30 000 à 40 000 F brut - par un prélèvement de 1%, cette fameuse contribution spéciale. Je tiens à dire à ceux, dont M. Spielmann, qui mettaient en doute la constitutionnalité de cette mesure, qu'il ne s'agit que d'un prélèvement supplémentaire par rapport à l'impôt cantonal, lequel est déjà largement progressif, et que la qualité juridique de cette mesure ne fait aucun doute. L'important n'est pas là.
Certains regrettent que la fortune ne soit pas plus fortement imposée. Cette fortune, qui, à Genève, est la plus taxée de Suisse, subit un prélèvement supplémentaire linéaire, avec trois paliers, selon une proposition de la Chambre de commerce. L'important est de pouvoir maintenir, à Genève, une certaine attractivité fiscale, car l'on sait que les grosses fortunes sont particulièrement mobiles. Lorsque le député de l'Alliance de gauche imagine une sorte d'univers figé, où tout riche reste à l'endroit où il habite, où toute entreprise ferait mécaniquement les mêmes profits d'année en année, il invente simplement un monde utopique qui n'existe pas. Quant à M. le député Ecuyer, je comprends qu'il ait été choqué par les tableaux critiques du Conseil d'Etat, qui dévoilent une certaine vérité des chiffres, à savoir, comme je l'avais déjà dit lors d'une discussion budgétaire, que les plus défavorisés à Genève ne sont pas ceux que défend M. Ecuyer, mais la mère de famille monoparentale, jeune et souvent d'origine étrangère. Personne, dans cette enceinte, n'a pris sa défense et j'ai toujours l'impression de parler dans le désert.
En conclusion, ce paquet ficelé n'enchante certainement personne, mais c'est parce que vous êtes députés et responsables - non seulement vis-à-vis de catégories sectorielles de citoyens qui vous ont élus, mais de l'ensemble de la population de ce canton - que vous devez l'accepter, parce que c'est la moins mauvaise des solutions que nous avons trouvées.
Je ne me livrerai à aucun catastrophisme, mais je crois que tout le monde y perdra, certains plus que d'autres, si ce projet de loi constitutionnelle n'est pas adopté.
M. Claude Blanc (PDC). Depuis que l'on discute de ce projet, on aura entendu tout et le contraire de tout sur les bancs de gauche. Cela fait des mois que vous nous rabâchez, Mesdames et Messieurs les députés de l'Alliance de gauche, que la situation financière actuelle de l'Etat de Genève est le fruit de soixante ans de majorité de droite. Soixante-deux ans exactement, Monsieur Ecuyer, puisqu'en 1936 votre groupe a été chassé du pouvoir après avoir ruiné l'Etat. En 1936 toujours, après avoir promis tout et son contraire, vous avez été obligés de suspendre le paiement des salaires parce que vous aviez vidé les caisses.
Aujourd'hui, M. Ecuyer se dit fier que Genève, depuis la guerre, soit toujours restée à la tête du progrès social en Suisse. Il a raison d'être fier, parce que cela fait bientôt quarante ans qu'il siège dans ce Grand Conseil sans jamais voter le budget. Par conséquent, si notre canton est le premier de Suisse en matière de progrès social, nous pouvons être sûrs que M. Ecuyer n'y a pas participé, parce qu'il n'a jamais voté le budget. (Commentaire de M. Christian Grobet et brouhaha.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Laissez parler l'orateur.
M. Claude Blanc. Monsieur Grobet, si ce canton est le premier de Suisse en matière de progrès social, nous y avons contribué et vous, qui avez été responsable du logement, vous savez bien...
Le président. Monsieur Blanc, adressez-vous à l'assemblée ou à votre président préféré !
M. Claude Blanc. Monsieur le président, M. Grobet sait - s'il dit l'ignorer c'est qu'il est de mauvaise foi, comme d'habitude - que le parti démocrate-chrétien a contribué de manière décisive à la solution du problème du logement social, jusqu'à présent et à la satisfaction de tous. Monsieur Grobet, il faut être de la plus élémentaire bonne foi pour le reconnaître...
Le président. Messieurs Grobet et Annen, si vous avez des propos à échanger, allez à la buvette ! Poursuivez, Monsieur l'orateur !
M. Claude Blanc. Si ce canton est le premier de Suisse en matière de progrès social, c'est parce que les partis au pouvoir depuis la guerre ont voté les budgets nécessaires pour cela. Aujourd'hui, il vous est facile d'affirmer que nous voulons dépouiller les plus faibles, alors que nous les avons toujours soutenus, comme vous venez de le reconnaître !
C'est avec intérêt que j'ai entendu l'intervention du docteur Froidevaux, intervention par laquelle il vous rejoint...
M. Pierre Froidevaux. Je ne les rejoins pas !
M. Claude Blanc. Monsieur le président, M. Froidevaux les a effectivement rejoints. Outre le siège radical qu'il occupe dans ce Grand Conseil, M. Froidevaux est le porte-parole d'une droite extraparlementaire grâce à laquelle il existe une majorité de gauche dans ce parlement. Cette droite extraparlementaire vous aidera, Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, à faire capoter ce projet, parce que c'est son intérêt.
En prétendant défendre les défavorisés, vous vous en faites les fossoyeurs, car vous savez bien que lorsque l'Etat sera aussi exsangue que celui que vous nous avez laissé en 1936, ce seront les plus défavorisés qui paieront.
Vous nous dites de faire payer les riches. Fort bien ! Ici, ils paient plus que partout ailleurs en Suisse et de même que nous sommes le premier canton social de Suisse, nous sommes le canton où les riches paient le plus. Vous nous dites que si les riches peuvent fuir ils ne le font pas. Peut-être, mais encore faudrait-il savoir les attirer, parce que les personnes désireuses d'installer des commerces ou des entreprises à Genève se renseignent, au préalable, sur les conditions de vie et de travail qui les attendent. Croyez-vous qu'il est aisé de leur dire que nous sommes les plus chers de Suisse, que nous sommes plus chers que nos voisins vaudois ? Quand M. Lamprecht reçoit des industriels étrangers qui lui demandent s'ils peuvent bénéficier de forfaits fiscaux, croyez-vous qu'il lui est facile de leur répondre évasivement ? Le Conseil d'Etat ne fait plus rien dans ce domaine depuis une année et il faudra bien qu'il s'en explique. Et si les riches ne viennent plus, qui paiera les salaires et les allocations ? Est-ce les fonctionnaires qui paieront les allocations aux plus démunis ?
J'en viens au programme du Conseil d'Etat concernant l'article 184 Constitution (nouveau). J'ai pris note de vos engagements, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat. J'attends maintenant que nous puissions les mettre en oeuvre. Je crains que la majorité qui votera certainement ce soir le paquet ficelé ne se retrouve pas pour les concrétiser.
Nous attendons au virage ceux qui font semblant d'appuyer le paquet social. Quand il s'agira de concrétiser les engagements du Conseil d'Etat, ils devront répondre «présent» pour que le vote de ce soir ne soit pas un marché de dupes. Soyez-en conscients, Mesdames et Messieurs de la gauche plurielle et modérée !
Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, nous attendons encore de vous que le budget 1999, tel qu'il a été présenté, corresponde à ce que nous voterons ce soir, que vous marquiez votre volonté de l'adapter, car il ne l'est toujours pas : il y a une impasse d'une dizaine de millions. Nous attendons vos propositions, parce que je sais que ce parlement sera incapable d'en présenter lui-même. Vous devrez prendre votre courage à deux mains pour aller jusqu'au bout de ce que vous avez commencé.
Nous vous promettons de vous suivre, mais vous devez continuer à travailler et surtout demeurer fermes sur vos positions. C'est le seul moyen d'arriver à un résultat le 20 décembre. Il faut que le peuple ait la garantie que ce que nous lui promettons aujourd'hui sera fait demain, sinon il ne nous croira plus.
Le peuple dira peut-être non. Alors vous de l'Alliance de gauche pavoiserez parce que vous aurez fait capoter le projet. Vous de la droite extraparlementaire pavoiserez aussi. En réalité, vous pavoiserez ensemble, parce qu'ensemble vous serez les fossoyeurs de l'Etat ! (Applaudissements.)
Le président. Quatre orateurs sont encore inscrits. Je vous suggère de les entendre, mais de voter une motion d'ordre pour ne plus prendre d'autres inscriptions. Les conseillers d'Etat ne sont pas concernés par cette motion.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est adoptée.
M. Gilles Godinat (AdG). Tant de choses ont été dites que je serai bref pour aller à l'essentiel.
Je m'adresse prioritairement à mes amis socialistes et aux Verts. (L'orateur est interpellé par M. John Dupraz.) Je m'adresse à l'assemblée, Monsieur Dupraz ! Mes propos tomberont dans vos douces oreilles !
Le président. Adressez-vous à l'assemblée, Monsieur Godinat !
M. Gilles Godinat. C'est ce que je fais, Monsieur le président. J'entendais cibler l'attention des quelques interlocuteurs que je voulais particulièrement interpeller. Je préciserai des faits que vous avez tous en mémoire. Je ne comprends pas si certains sont déboussolés, aveugles, ou s'ils ont fait un autre choix politique.
Au mois de juin, c'est délibérément que l'Alliance de gauche n'a pas accepté d'entrer dans le cadre proposé par le gouvernement à majorité de droite que nous avons hérité des dernières élections, précisément parce que ce projet est issu d'un gouvernement de droite. C'est une évidence ! Il faut simplement ouvrir les yeux... (Commentaires et brouhaha.)
Le président. Laissez parler l'orateur. Monsieur Godinat, poursuivez calmement, sans vous laisser troubler.
M. Gilles Godinat. Je poursuis calmement et sereinement. Je rappelle qu'accepter le cadre donné par le Conseil d'Etat, en juin dernier, c'était renoncer à un principe commun à la gauche sur le diagnostic de la situation des finances de l'Etat, à savoir le traitement, en priorité, du problème des recettes. Nous avons toujours affirmé ce point de vue politique. Nous l'avons réaffirmé en juin, et c'est la raison principale pour laquelle nous avons refusé le cadre du Conseil d'Etat.
Vous êtes entrés dans le processus de la table ronde et vous pensez pouvoir vous en sortir. Tout au long de l'été, je n'ai cessé de vous démontrer l'existence d'autres alternatives. Il y a une politique de gauche possible à mener dans ce canton. Les gens de gauche et les Verts ont été élus pour la pratiquer.
Maintenant, la situation politique est celle-ci : le texte de ce projet de loi constitutionnelle s'appuie sur deux principes. S'agissant de la parité des efforts, nous avons démontré ce soir que cette parité n'existait pas : c'est un projet de droite qui n'affirme pas la parité des efforts.
Le deuxième principe est également de droite. Il fixe ce que la droite revendique depuis des années, à savoir un carcan aux finances de l'Etat avec un article constitutionnel tendant à assainir les finances selon des règles que les néolibéraux ne renieront jamais. C'est leur politique depuis vingt ans, elle est inscrite dans les manuels classiques néolibéraux ! (Commentaires et brouhaha.)
Alors, de deux choses l'une : soit vous refusez ce projet. Soit vous concluez une alliance politique avec le centre et la droite - et je suis modéré quand je parle du centre... (Rires.)
Le président. On ne peut pas faire autrement, Monsieur Godinat !
M. Gilles Godinat. ...et vous renoncez à faire une politique alternative, réellement de gauche, six mois après les élections du Grand Conseil, nous laissant seuls pour la mener, car nous dirons non à ce paquet ficelé de droite. (Applaudissements.)
Le président. Je donne la parole à M. le député Jean Spielmann qui saura nous démontrer qu'il sait s'exprimer de manière concise et brève.
M. Jean Spielmann (AdG). M. Blanc est souvent obligé de présenter ses excuses après être intervenu dans ce parlement, à moins que d'autres prennent la parole pour rectifier ses propos. Les faits, tels qu'il vient de les décrire, sont falsifiés.
Vous avez dit, Monsieur Blanc, que c'est un gouvernement à majorité de gauche qui a laissé cette République exsangue en 1936. C'est faux ! Il n'y a jamais eu une majorité de gauche dans ce parlement. Par conséquent, vous ne pouvez pas faire endosser à cette soi-disant majorité - qui, à l'époque, était celle du gouvernement mais pas du parlement - la responsabilité de cet échec. C'est la déconfiture de la Banque de Genève qui provoqua une série de problèmes. Aujourd'hui, le PDC et vos amis en causent également, mais à un autre niveau. Voilà votre première erreur !
Votre deuxième erreur : vous avez dit que nous n'avons jamais voté le budget. Cette allégation est complètement fausse, puisqu'à un moment donné les velléités libérales, bientôt partagées par beaucoup, ont fait que la fonction publique a été traitée de pieuvre tentaculaire et le budget attaqué de manière invraisemblable. A ce moment-là, il n'y avait plus de majorité dans ce parlement, la cible était toute désignée, et la politique antisociale, le fait des libéraux, des radicaux et de quelques-uns de vos amis politiques du PDC. Il a bien fallu que certains prennent leurs responsabilités, et nous avons voté ce budget, Monsieur Blanc, alors qu'il y avait danger.
Aujourd'hui, la situation n'est pas du tout la même. D'où une troisième erreur de votre part. Cela en fait beaucoup pour une seule intervention ! Et je pourrais en ajouter d'autres...
Je répète que la situation n'est pas du tout comparable. Elle est limpide. J'ai décrit, tout à l'heure, les processus libéraux qui ont conduit à la situation financière actuelle, les projets présentés, les offensives en cours et la cible toute désignée que sont les pauvres et les plus démunis de ce canton. Effectivement, la population exprime un ras-le-bol parce qu'elle ne comprend pas que, d'un côté, on épargne les millions des millionnaires, on provoque du chômage avec des restructurations économiques et que, de l'autre, ayant élu une nouvelle majorité dans ce Grand Conseil, celle-ci ne trouve rien de mieux à faire que d'aller, hors du parlement, discuter et concocter un projet de loi en acceptant que la chasse aux pauvres de ce canton soit ouverte. Cela, j'espère que les gens le comprendront et qu'ils refuseront ce paquet, car il n'ouvre aucune perspective d'avenir.
Le président. Je félicite M. Spielmann de la brièveté de son discours.
M. René Ecuyer (AdG). Mon camarade Spielmann a fort bien répondu aux aboyantes et malveillantes balivernes de notre ami, M. Blanc.
Je suis satisfait.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). En toute brièveté, je ferai remarquer à M. Blanc qu'une autre équivalence existe entre les années trente et aujourd'hui.
Deux tentations sont dangereuses en période de crise budgétaire. Ce sont, d'une part, le repli de la démocratie - comme démontré par Véronique Pürro, la table ronde est un repli de ce type par rapport à nos institutions démocratiques - et, d'autre part, la tentation autoritaire.
La tentation autoritaire consiste, précisément, à renoncer d'emblée à tout processus de concertations et de négociations là où elles doivent avoir lieu - dans les entreprises, avec la fonction publique, en associant le plus grand nombre de citoyens au devenir des prestations publiques et de l'Etat - et à imposer des décisions en court-circuitant le processus démocratique.
Ce processus s'est produit dans les années trente, avec les conséquences que l'on sait. Aussi je souffre à l'idée, qui n'est venue à personne ce soir, que l'exercice auquel la table ronde s'est livrée est le court-circuitage magistral de tous les processus de concertation démocratique que nous sommes en droit d'attendre en tout temps, et encore plus en cette période de crise.
Les conquêtes sociales de ces cinquante dernières années n'ont pas été données, comme M. Blanc l'a dit. Elles ont été obtenues de haute lutte. Je suis désolée pour nos parents qui se sont battus pour nous, les enfants de la démocratisation - et des enfants convaincus de sa croissance - que nous soyons obligés, même à titre posthume, de leur infliger la démonstration que rien n'est jamais acquis et que tout reste à conquérir.
Je demande à ceux qui sont encore prêts à lutter, à gauche dans ce Grand Conseil, de relever ce défi et de ne pas se battre seuls, en parlementaires ou représentants de partis isolés. Ils doivent retourner à la base pour voir ce qui s'y passe et conclure les alliances qui conviennent afin de construire autrement l'avenir de la cité. (Applaudissements.)
M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Le rapport de minorité donne de l'impôt auto un reflet qui n'est pas exact.
Monsieur le rapporteur de minorité, je vous rappelle qu'au départ l'idée était de doubler cet impôt. La négociation a réuni les milieux de l'automobile et les milieux environnementaux. La discussion a porté sur le coût social de l'automobile. Nous sommes convenus :
1. qu'il n'était pas possible de le déterminer;
2. qu'il n'était pas possible de tenir compte de l'aspect négatif du coût social de la voiture sans mettre en présence son aspect positif, notamment sur le plan économique.
Les milieux automobiles ont alors refusé le doublement de l'impôt auto. Par contre, ils se sont déclarés d'accord avec un impôt qui serait augmenté au niveau suisse. Ils ont également accepté que ce barème soit, pour certaines catégories de véhicules, celui de certains cantons-villes de notre pays.
De sorte que le nouveau barème tient compte du barème de base qui est l'un des seuls, en Suisse, à être déjà progressif eu égard aux critères techniques retenus.
Par conséquent, Monsieur Clerc, vos assertions sur les grosses cylindrées ne sont pas exactes et pas fondées en francs. C'est sans doute la raison pour laquelle vous employez les pourcentages.
En réalité, il demeure que l'impôt auto est le fruit d'une négociation à laquelle ont totalement adhéré les milieux automobiles et les milieux environnementaux. Voilà ce que j'entendais confirmer !
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Dans son intervention consacrée aux rentiers AVS, M. Ecuyer a répété qu'ils étaient les personnes les plus démunies du canton.
Monsieur Ecuyer, permettez-moi de vous rappeler ce que la République et canton de Genève, par l'intermédiaire de l'OCPA, fait pour les 21 000 rentiers AVS bénéficiant de ses prestations.
L'Etat de Genève paie le loyer. Il paie la totalité de la cotisation d'assurance-maladie. Le loyer et la cotisation d'assurance-maladie étant payés, l'Etat de Genève garantit un revenu minimum de 21 727 F pour une personne seule et de 32 591 F pour un couple, ce qui représente, pour les rentiers AVS et AI, le revenu minimum le plus élevé de tous les cantons suisses, celui de vingt-trois autres cantons étant inférieur de 5 000 F.
Après le paiement du loyer et celui de la cotisation d'assurance-maladie, après la garantie de ce revenu de 21 727 F, l'Etat de Genève paie encore tous les frais médicaux non pris en charge par l'assurance-maladie jusqu'à concurrence de 25 000 F par personne.
En 1999, le revenu minimum garanti par l'Etat de Genève à ces 21 000 rentiers sera indexé. Les rentiers AVS/AI ne sont pas les personnes les plus démunies de notre canton : ce sont les familles monoparentales et celles qui sont à l'assistance publique ! Le projet de loi constitutionnelle, soumis à votre vote, ne comporte aucune mesure à leur égard. Leurs prestations seront, elles aussi, régulièrement indexées. (Applaudissements.)
Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Je tiens à remercier ce soir les députés qui ont fait état de leur volonté de voter oui à ce projet de loi constitutionnelle et qui ont pris l'engagement de faire voter oui.
Il est vrai que le grand chantier de la réforme de l'Etat va s'ouvrir et le Conseil d'Etat a besoin de votre soutien à tous pour aboutir.
C'est dans ce sens que je comprends les propos tenus tout à l'heure par M. Halpérin.
Certaines des critiques entendues ce soir présentent toutes les caractéristiques du discours idéologique. Celui-ci est utile à ceux qui le font parce qu'il leur permet d'attendre tranquillement, dans leur coin, que d'autres fassent le travail à leur place. Il leur permet de consacrer leur énergie à l'enseignement de leur théorie, plutôt qu'à changer l'état des choses. C'est donc une position de facilité qui présente, en outre, une contradiction formelle entre la dureté de l'expression et la mollesse de la démonstration.
On y chercherait en vain une analyse sérieuse du projet de loi. L'assertion vaut explication, l'allusion vaut description. C'est un choix que je n'entends pas juger, mais vous comprendrez que je n'ai nullement l'intention de le contredire ce soir. Je souhaiterais simplement apporter quelques précisions.
Précisions concernant les investissements. La marge sur les investissements est parfois jugée insuffisante pour pouvoir mener une politique conjoncturelle efficace. Or le projet de loi permet la souplesse sur ce point, mais peut-être faut-il l'expliciter un peu.
La contrainte des 80% prévue par l'alinéa 2 de l'article 97A ne s'applique qu'au terme de la période transitoire, soit dans six ans au plus tôt.
80% des investissements financés par l'Etat signifie 80% des investissements dont les charges financières sont supportées par l'Etat, à savoir les investissements totaux moins les recettes d'investissement et moins les investissements autofinancés. Pour l'exercice 1999, sur un total de 405 millions de francs d'investissements, la contrainte des 80% porte sur 302 millions, soit sur 74% du total des investissements.
Si cela était insuffisant, la rédaction de l'alinéa précise que la règle des 80% s'applique sur deux ans et permet, par exemple, de les couvrir une année à 90% et l'autre à 70%.
Durant les années à venir, les amortissements augmenteront du fait des investissements passés et de la modification proposée de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat. Cela induira, dans les années à venir, après la période transitoire, des possibilités d'investir à hauteur de 450 à 500 millions de francs.
Que l'on s'entende bien, Mesdames et Messieurs ! Ce n'est pas par plaisir que nous proposons une contrainte d'autofinancement sur les investissements. C'est pour éviter un poids trop important sur le compte de fonctionnement en termes de charges financières, poids qui, à la limite, pourrait le mettre en danger et nous obliger à renoncer à des prestations pour assurer des niveaux trop importants d'investissement.
Autre précision. Le projet de loi constitutionnelle fixe le déficit 1999 à 360 millions de francs. Par rapport au projet déposé, cela signifie une réduction de 7 millions, auxquels s'ajoutent 900 000 F destinés au paiement de la prime d'assurance-maladie aux retraités et l,5 million de francs pour la prime au temps partiel, soit quelque 10 millions de francs à trouver encore.
Pour conclure, permettez-moi de rappeler que ce projet de loi constitutionnelle n'a pas la prétention d'appliquer un programme politique quel qu'il soit. Ceux qui pensent pouvoir en faire l'expression d'un projet de droite ou de gauche se trompent. Le meilleur des mondes possibles s'énonce dans un programme, mais le monde réel est celui des rapports de force au sein duquel un programme devra prendre effet. En clair, l'action politique que nous menons ici exclut, dans son principe, la forme du programme. L'action politique dit que l'on ne peut pas dire d'avance ce que l'on va faire, car la politique ne se fait qu'à plusieurs et nous met devant une réalité incontournable : on n'est pas seul au monde.
Le projet qui vous est soumis ce soir est loin d'être parfait. Il est le résultat d'une négociation dure, au cours de laquelle les uns et les autres ont, tour à tour, renoncé et accepté. Ce projet est le résultat d'un compromis. Je tenais à le rappeler à ceux et celles qui auraient souhaité pouvoir en faire leur projet au travers d'amendements particuliers.
Ce projet n'a pas l'ambition de marquer la fin de l'histoire. A la suite de son adoption, chacun et chacune pourra continuer à placer ses jalons de droite ou de gauche, à exprimer ses idées, à déposer des projets de lois et des motions. Il représente une étape. Il donne au Conseil d'Etat un instrument de navigation et quelques provisions de secours.
Il n'empêche personne, et surtout pas les députés et les partis politiques, de lancer des bouées, de formuler des critiques et des encouragements, pour nous accompagner dans la difficile traversée qui nous attend.
Je dirai enfin que le Conseil d'Etat est convaincu que ce projet est la seule voie raisonnable possible. La situation de déséquilibre et de faiblesse financière de l'Etat touche au premier chef les plus démunis de ce canton. Le déséquilibre de ces dernières années ne les a pas enrichis, bien au contraire ! Sans les mesures d'urgence prises dans le cadre de la table ronde, il n'aurait pas été possible de financer la hausse des aides sociales qui figurent aujourd'hui dans le budget 1999 et qui correspondent bien à une montée des besoins.
Je vous engage donc, Mesdames et Messieurs, à accepter le projet de loi constitutionnelle qui vous est soumis en y intégrant l'amendement proposé par le rapporteur de majorité. (Applaudissements.)
Le président. La parole n'étant plus demandée, nous procédons au vote d'entrée en matière... Monsieur Clerc ?
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je voudrais vous interroger sur un point du règlement de notre Grand Conseil. Nous avons dû travailler rapidement à la commission des finances et je me suis aperçu, en relisant les procès-verbaux, que la commission n'avait pas procédé au vote d'entrée en matière.
J'aimerais savoir, Monsieur le président, si cette omission a une influence quelconque sur nos débats de ce soir. J'ai confiance en votre perspicacité.
Le président. C'est le Grand Conseil qui est souverain en la matière et non la commission. Celle-ci n'est que consultative et donne un préavis.
Mise aux voix, l'entrée en matière est adoptée.
Deuxième débat
Titre et préambule
Le président. Un amendement est proposé par M. Christian Ferrazino, consistant à compléter le titre avant la fermeture de la parenthèse. Le voici :
«Projet de loi constitutionnelle modifiant la constitution de la République et Canton de Genève (Assainissement des finances cantonales : mesures d'économies et impôts nouveaux) (A 2 00)»
M. Christian Ferrazino (AdG). Cet amendement sera certainement accepté, puisque tous les groupes qui se sont exprimés ont fait part de leur souhait, généralement admis, de transparence.
En effet, tout le monde a dit vouloir expliquer clairement les choses à la population bien que certains ne soient pas forcément heureux d'avoir signé un projet dans lequel ils ne se retrouvent pas.
M. Froidevaux, présumant du résultat de la votation, avec une lucidité qui l'honore, nous a demandé de cesser de perdre du temps et de travailler avec plus de sérieux.
Monsieur le président, je vous demande de dire à ceux qui, tout à l'heure, pleurnichaient sur leur incapacité à faire autrement, d'avoir au moins le courage de dire ce qu'ils font. Nous ne procédons pas seulement à un assainissement des finances publiques auquel tout le monde est favorable. Vous ne trouverez personne pour en douter... (Commentaires et brouhaha.) Monsieur Dupraz, tout dépend des moyens que l'on se donne pour y parvenir ! Quels sont les moyens que vous avez retenus pour assainir les finances publiques ? Ce sont, d'une part, des mesures d'économies et, d'autre part, des impôts nouveaux.
Par conséquent, il serait intéressant de voir si ceux qui proposent à la population et des mesures d'économies et des impôts nouveaux ont le courage de faire figurer au moins dans le titre de la loi ce que la population est appelée à voter. Sinon, ils tromperont l'électorat en cachant une partie de ce paquet pas très agréable à faire passer.
Voilà la raison qui nous amène à vous proposer cet amendement. Mesdames et Messieurs les députés, quand on veut augmenter les impôts, la moindre des choses est d'avoir le courage de le dire.
M. Nicolas Brunschwig (L). La tournure de ce débat était prévisible. La position de l'Alliance de gauche était connue, les interventions furent nombreuses, les déclamations de M. Ecuyer répétitives : elles sont les mêmes, budget après budget, comptes après comptes.
Je m'étonnais de n'avoir pas assisté aux habituelles pirouettes de M. Ferrazino. Nous y voilà ! M. Ferrazino gesticule pour changer un texte. A la commission des finances, chaque virgule a été pesée, et je vous recommande d'en rester au texte proposé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Article 1 (souligné)
Art. 97A (nouveau)
M. Christian Grobet (AdG). Nous avons entendu Véronique Pürro dire tout le mal qu'elle pensait de ce projet de loi constitutionnelle. Dans une conclusion particulièrement touchante, elle a avoué être complètement désemparée parce que l'Alliance de gauche n'a pas présenté d'amendements en commission. Il faut croire que l'imagination de certains députés de la gauche socialiste n'arrive même pas à concevoir les amendements qui pourraient être apportés à ce projet. (L'orateur est interpellé par M. John Dupraz.) Je suis resté simplement à gauche, mon cher, en dehors de toute étiquette !
Le président. Adressez-vous à l'assemblée, Monsieur le député ! Un peu de silence, Monsieur Dupraz, calmez-vous ! Monsieur Grobet, poursuivez et ne vous laissez pas impressionner par M. Dupraz.
M. Christian Grobet. Il y a longtemps qu'il ne m'impressionne plus ! Il est vrai que M. Dupraz est beaucoup plus calme au Conseil national où les débats se déroulent...
Le président. Venez-en au fait, Monsieur le député !
M. Christian Grobet. Il s'enflamme à Genève et se confine à Berne dans la courtoisie d'usage. Ce soir, je ne lui reprocherai pas ses excès habituels, surtout à partir de 20 h 30, car il sait faire preuve de retenue en d'autres circonstances.
Sachant le Conseil d'Etat particulièrement pressé de faire aboutir ce projet de loi au point de transgresser les délais usuels, nous ne voulions pas entamer, en commission, une guerre d'amendements. Mais Mme Pürro ayant jugé bon de nous égratigner tout à l'heure, je tiens à lui rappeler que lors d'une séance commune, tenue voici deux ou trois jours, le président du parti socialiste nous a rappelé que les socialistes, fidèles à l'accord qu'ils ont signé avec les autres partis, ne voteraient pas les amendements que nous pourrions présenter. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Par conséquent, il va sans dire que nous présenterons des amendements en plénière, là où les débats sont publics. Tout à l'heure, nous avons été plusieurs à applaudir notre ami Rodrik quand il disait, à propos d'un projet de résolution ridicule du Conseil d'Etat, que nous n'allions tout de même pas remonter à une loi française de 1901.
Avec l'article 97A, que fait-on d'autre que de remonter aux précurseurs d'Adam Smith ? Quel pays d'Europe, aujourd'hui, prétendant qu'il lui faut un équilibre budgétaire, irait jusqu'à l'inscrire dans sa constitution ? Il n'y en a qu'un, et c'est la Suisse ! Notre pays a été le dernier à voter le suffrage féminin et il sera, c'est évident, le dernier à s'aligner sur les règles de l'économie budgétaire appliquées par tous les autres pays. Si nous prenons l'exemple de Maastricht, qui n'est pas le nôtre, nous voyons que tous les pays européens s'alignent sur un déficit limité à un certain pourcentage du produit national brut.
Or que nous propose-t-on aujourd'hui ? L'inscription, dans la constitution, d'une règle absurde et totalement surannée sur le plan économique. Nous n'allons évidemment pas proposer d'amender cet article. Nous vous demandons, purement et simplement, de le rejeter, ce qui fera plaisir à Mme Pürro et à ceux qui n'acceptent pas une règle qu'aucun pays développé n'applique aujourd'hui, règle que Mme Thatcher elle-même n'oserait plus affirmer. Nous vous invitons à rejeter cet article 97A.
M. Michel Balestra (L). Etant en train de lire le Mémorial de la séance de nuit du Grand Conseil du vendredi 20 février 1998, je découvre : «Christian Grobet (AG) : Je n'aborderai pas la forme des propos de M. Dupraz, car à partir de 20 h 30 il a un peu de peine à se contenir... (Exclamations.) La buvette est à côté, il faudrait le lui rappeler, Monsieur le président.»
On peut dire que vous êtes d'une constance remarquable, Monsieur Grobet !
Le reste, c'est-à-dire vider de sa substance ce projet de loi constitutionnelle, est ridicule. C'est pourquoi je propose le rejet de votre amendement.
Le président. Je mets aux voix la proposition d'amendement de M. Christian Grobet, à savoir la suppression de l'article 97A.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 97A (nouveau) est adopté, de même que l'article 182 (nouveau).
Art. 183 (nouveau)
Le président. Nous sommes en présence de plusieurs amendements concernant cet article 183. Le premier est proposé par M. René Ecuyer. Il consiste à supprimer la lettre a) de l'alinéa 1.
L'appel nominal est demandé par M. René Ecuyer. (Appuyé.)
Celles et ceux qui acceptent cet amendement répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 18 oui et 28 abstentions.
Ont voté non (47) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Madeleine Bernasconi (R)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Nicole Castioni (S)
Christian de Saussure (L)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Marie-Thérèse Engelberts (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Nelly Guichard (DC)
Claude Haegi (L)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean-Marc Odier (R)
Barbara Polla (L)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Louis Serex (R)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Ont voté oui (18) :
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Bernard Clerc (AG)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Christian Grobet (AG)
Pierre Meyll (AG)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Martine Ruchat (AG)
Jean Spielmann (AG)
Pierre Vanek (AG)
Salika Wenger (AG)
Se sont abstenus (28) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Pierre-Alain Champod (S)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Caroline Dallèves Romaneschi (Ve)
Régis de Battista (S)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Alexandra Gobet (S)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
René Longet (S)
Louiza Mottaz (Ve)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni (S)
Alberto Velasco (S)
Etaient excusés à la séance (3) :
Fabienne Bugnon (Ve)
Anita Cuénod (AG)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Etaient absents au moment du vote (3) :
Juliette Buffat (L)
Chaïm Nissim (Ve)
Alain Vaissade (Ve)
Présidence :
M. René Koechlin, président.
Le président. Deux autres amendements sont proposés à l'article 183. L'un, de M. Bernard Clerc, rapporteur de minorité, vous a été distribué. L'autre, le plus éloigné du texte, est de M. Rémy Pagani. Il consiste à abroger les lettres b), c), d), e), g) de l'alinéa 1 et à introduire une nouvelle lettre b) audit alinéa ainsi conçue :
«b) Le Conseil d'Etat doit négocier avec les représentants du personnel de l'Etat et des établissements publics cantonaux l'ensemble de leurs conditions salariales et de travail.»
M. Rémy Pagani (AdG). Je suis heureux que cet amendement ne soit pas passé directement à la poubelle. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je le présenterai brièvement pour démontrer dans quelle situation catastrophique nous nous trouvons aujourd'hui. Le Conseil d'Etat a trouvé malin de ne pas négocier avec la fonction publique en mettant sur pied une pseudo-négociation qui entérine une situation de fait. D'une part, il s'attaque de manière autoritaire à la fonction publique et, d'autre part, il ne résout pas les nombreux problèmes de dysfonctionnement au sein de l'Etat, problèmes dénoncés dans ce parlement et par le rapport Andersen.
S'il n'y a pas concertation entre les directions et la base, c'est-à-dire les travailleurs, ces problèmes ne seront jamais réglés.
Je ne citerai qu'un exemple pour démontrer à quel niveau l'on place la fonction publique. Il est proposé de mettre sur pied une assurance-maladie fictive ! Elle ne servira même pas au remplacement des personnes en congé-maladie. Sous le prétexte que le personnel ne participera pas à cette assurance-maladie - ce qui est faux - il est proposé de ponctionner un certain nombre de millions sur le dos de la fonction publique.
Celle-ci passe systématiquement à la caisse depuis dix ans mais, en l'occurrence, la coupe est pleine !
C'est pourquoi je vous propose d'abroger les lettres b), c), d), e), g) de l'alinéa 1 qui concernent l'ensemble de la fonction publique. A mon sens, il ne s'agit pas seulement de protéger les droits acquis de la fonction publique, mais aussi de préserver un climat de confiance lourdement menacé.
Ce climat de confiance retrouvé permettrait de remettre sur pied l'ensemble de la fonction publique, de supprimer les doublons, de réaliser des économies, tout cela ne pouvant se faire qu'avec le soutien de la base de la fonction publique et pas contre elle.
Les lettres abrogées seront remplacées par une lettre b) nouvelle. Sa teneur tend à promouvoir de véritables négociations dans cette République, à l'image de celles qui se déroulent, dans le privé, concernant l'ensemble des conditions de travail du personnel.
M. Dominique Hausser (S). L'Alliance de gauche a refusé l'article 183, alinéa l, lettre b), sans même proposer de l'amender. La page 27 du rapport en fait foi.
En effet, comme dit par M. Ferrazino et répété par M. Grobet, il n'était pas question, pour l'Alliance de gauche, de présenter des amendements en commission, puisqu'elle considère inutile l'ensemble de ses travaux.
Par conséquent, je crois comprendre que l'Alliance de gauche désire la suppression des commissions et que nous siégions de façon permanente en plénière pour pouvoir discuter l'ensemble des textes.
Je m'étonne que l'Alliance de gauche ait refusé, en commission, tous les amendements, même ceux allant dans son sens. En voici trois :
1. Refus de la clause d'urgence sur les revenus.
2. Refus de la diminution de 2% des revenus des conseillers d'Etat.
3. Refus de la suppression de la clause contraignante de 8% de chômage.
Ces exemples sont clairs. Ce soir, l'Alliance de gauche profite de cette enceinte pour faire son show. De toute façon, elle aurait refusé ce projet de loi constitutionnelle même si elle avait présenté des amendements que nous aurions acceptés.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Il va de soi que je propose le rejet de l'amendement de M. Pagani qui vide le projet de loi de sa substance.
C'est le droit imprescriptible de chaque groupe parlementaire de présenter des amendements en deuxième débat. Ne voulant pas participer au travail parlementaire, l'Alliance de gauche a rejeté tous les amendement en commission, mais je suis tout de même très étonné qu'elle n'en ait présenté aucun.
C'est dire que, lorsqu'un travail se fait sérieusement, vous n'avez rien à suggérer, mais quand vous avez un public que vous croyez acquis, vous présentez des amendements qui, en réalité, ne sont pas sérieux, puisqu'ils n'infléchissent pas le projet de loi mais proposent, tout simplement, de le supprimer.
J'espère que tous les députés présents auront médité et pourront parler ironiquement de la référence de M. Pagani au rapport Andersen. Nous, en tout cas, nous nous souviendrons qu'il a l'air de regretter que le Conseil d'Etat n'en ait pas fait un meilleur usage.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. Je suis obligé de répéter ce que j'ai dit...
Le président. Dispensez-vous-en, Monsieur le député...
M. Bernard Clerc, rapporteur de minorité. Vous savez fort bien que si nous n'avons pas présenté des amendements en commission, c'est en raison de la clarté de notre position sur ce projet de loi : nous n'entendions pas entrer en matière sur son contenu, puisque le cadre prédéterminé ne correspondait pas aux options que nous défendons. Alors ne nous reprochez pas d'avoir voté non. N'inventez pas des votes qui n'ont pas eu lieu, Monsieur Hausser ! Qu'est-ce que la clause d'urgence sur les recettes ? Il n'y en a jamais eu et vous le savez bien. Ne dites pas n'importe quoi !
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de majorité. M. le rapporteur de majorité est généralement très fort en matière de discours. Vous en tenez de beaux, comme celui de tout à l'heure sur le projet de loi de M. Ramseyer. Mais ici, vous avez été franchement mauvais... (Brouhaha.)
Le président. Adressez-vous à l'assemblée, Monsieur le député.
M. Christian Grobet. Je m'adresse à l'assemblée, Monsieur le président. Ce faisant, j'ai quand même le droit de relever les propos incongrus du rapporteur de majorité...
Le président. En parlant de lui, veuillez utiliser la troisième personne du singulier. C'est une question de temps.
M. Christian Grobet. ...même si je vous indispose en égratignant quelque peu vos amis politiques. Dans le cas d'espèce, je tiens quand même à souligner, Monsieur Lescaze...
Le président. Non, pas Monsieur Lescaze !
M. Christian Grobet. M. Lescaze s'en prend à l'Alliance de gauche et le modeste député que je suis se permet de répondre aux assertions du rapporteur de majorité, M. Dupraz... (Exclamations et rires.) Quel malencontreux lapsus ! Mais en fait, je réponds aussi à M. Dupraz, de même qu'à M. Balestra, à M. Hausser, à Mme Pürro...
Le président. Bref, à tout le monde !
M. Christian Grobet. ...à M. Segond qui, tout à l'heure, imitait Courteline qui laissait entendre à quatre domestiques : «Je vais vous augmenter. A partir de demain, vous serez augmentés. Vous ne serez plus quatre, mais cinq, avec évidemment les gages de quatre !»
Monsieur Lescaze, vous savez bien que si nous n'avons pas présenté d'amendements en commission c'est parce que son travail a été une mascarade, les cinq partis de cette nouvelle majorité d'occasion ayant signé un accord qu'ils nous ont dit vouloir respecter. C'est honorable, mais qu'ils ne nous fassent pas croire qu'ils auraient, en commission, voté les amendements proposés par ceux qui n'ont pas signé cet accord.
Tout à l'heure, notre président a fort justement rappelé que le rapport de la commission n'est qu'un préavis et le plénum, l'autorité bastante. Il est donc parfaitement normal, n'en déplaise à M. Hausser, que nous affirmions, vis-à-vis du public, un certain nombre de principes... (Commentaires et brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous avons tout le temps, il n'est que minuit moins vingt ! Contrairement à vous, Monsieur Vaucher, nous ne sommes pas pressés !
Le président. Silence, s'il vous plaît ! Venez-en au fait, Monsieur Grobet. Nous parlons d'un amendement.
M. Christian Grobet. En déposant quelques amendements en plénière, nous entendons démontrer, contrairement à certains, notre fidélité à nos principes, dont celui de ne pas accepter un corset sous forme d'un équilibre financier qu'aucun pays européen n'a adopté. Nous sommes également fidèles au principe, et nous comprenons que M. Blanc, tout à l'heure, usant de son droit d'aînesse...
Le président. Monsieur Grobet, veuillez parler de l'amendement. Vous vous écartez du sujet. Veuillez parler de l'amendement, sinon je serai obligé de vous couper la parole.
M. Christian Grobet. Je ne m'écarte pas du sujet ! Monsieur le président, vous n'avez pas interrompu M. Blanc qui a parlé des acquis sociaux de ce canton. Je rappelle que lors des votations populaires des années cinquante et soixante sur le suffrage féminin, les trois semaines de vacances, les acquis sociaux, les partis des bancs d'en face ont toujours recommandé de voter non ! (Chahut.)
Le président. Monsieur, nous ne sommes plus en débat d'entrée en matière, mais en deuxième débat. Vous devez parler d'un amendement et pas de la pluie et du beau temps, ni de M. Blanc !
M. Christian Grobet. Je ne parle pas de la pluie et du beau temps. Vous n'avez pas interrompu M. Lescaze qui nous reprochait de faire des amendements. Il n'empêche que nous en présentons trois ou quatre, sur des principes auxquels nous demeurons fidèles, à savoir : un minimum de flexibilité sur le plan budgétaire; le maintien des acquis sociaux au profit des plus défavorisés dans cette République, même s'il est vrai qu'il y a encore plus malheureux qu'eux; le principe que nous supposions être celui de M. Hausser et de ses amis, à savoir qu'en matière de fixation des salaires et de conditions de travail on négocie avec les salariés sans leur imposer des conditions inacceptables. Enfin, nous proposerons un quatrième amendement pour imposer davantage les millionnaires que les invalides.
M. Nicolas Brunschwig (L). M. le modeste député Grobet a été quelque peu confus. Aussi quelques précisions ne me semblent pas inutiles.
Contrairement à ce que vous dites, Monsieur le député, beaucoup d'amendements ont été proposés en commission des finances, et personne n'a empêché l'Alliance de gauche de participer aux discussions. Elle était dans la minorité, certes, mais ce sont des choses qui arrivent et que l'on doit assumer. Vous avez été gâtés pendant quelque temps, la situation n'est plus la même aujourd'hui et je comprends que vous la viviez mal.
J'en viens à l'amendement et à la capacité de négociation du Conseil d'Etat. Ceux qui ont eu la chance, comme moi, de siéger durant trois législatures successives, donc avec trois Conseils d'Etat successifs, ont pu constater que ceux-ci n'avaient jamais réussi à négocier sereinement avec la fonction publique.
J'en déduis que notre canton possède une caractéristique socio-politique étonnante, à savoir que le peuple n'élit que des conseillers d'Etat incapables de négocier.
Le modeste député que vous êtes a été un modeste conseiller d'Etat appartenant à un gouvernement qui a eu quelque peine, lui aussi, à négocier avec la fonction publique.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je partage avec M. Grobet la caractéristique de faire partie d'un Conseil d'Etat «apparemment modeste» et «ne sachant pas négocier».
Plus sérieusement, je reviens sur les propos de M. Pagani pour dire, au nom du Conseil d'Etat, ce qui suit :
J'ai participé à toutes les séances de négociations - j'appuie sur le mot «négociations» - qui ont eu lieu avec la fonction publique. Monsieur Pagani, à un moment donné, la négociation se termine, dans le privé comme dans le public.
Les problèmes surviennent quand un des partenaires ne sait pas s'arrêter. Les propositions et les conciliations étant faites, les négociations doivent cesser. A plusieurs reprises, nous avons dit à notre partenaire qu'il fallait conclure, le calendrier arrivant à échéance et les députés devant se saisir du projet.
Dans le secteur privé, ce type de problèmes est réglé par un tribunal arbitral qui n'existe pas dans la fonction publique. En l'occurrence, nous avons un Grand Conseil qui doit boucler son budget. Je vous rappelle qu'il s'agit d'une masse de trois milliards que nous ne saurions ignorer.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Rémy Pagani, dont je rappelle qu'il consiste à abroger les lettres b), c), d), e), g) de l'alinéa 1 et à introduire une nouvelle lettre b) audit alinéa ainsi conçue :
«b) Le Conseil d'Etat doit négocier avec les représentants du personnel de l'Etat et des établissements publics cantonaux l'ensemble de leurs conditions salariales et de travail.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Je mets aux voix l'amendement déposé par M. le rapporteur de majorité. Il concerne également l'article 183, alinéa 1 et consiste à ajouter à la lettre g) :
«(...) Cette indemnité ne concerne que les membres du personnel occupés à temps partiel, n'est pas intégrée dans l'échelle des traitements et ne s'applique qu'aux classes 4 à 13.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. M. Bernard Clerc, rapporteur de minorité, propose un amendement à l'alinéa 2 de l'article 183, nouvelle lettre a). Le texte de cet amendement vous a été distribué :
«a) Introduction d'une contribution sur les grandes fortunes destinée à l'assainissement des finances cantonales, qui sera perçue de 1999 à 2002. Cette contribution a pour objet la fortune imposable des personnes physiques supérieure à l,5 million par une modification des tranches d'imposition y relatives de l'impôt supplémentaire sur la fortune conformément au tableau suivant :
Tranches
Impôt maximum de la tranche
Impôt total
Taux de chaque tranche
Taux réel du maximum de la tranche
F
1 500 001 à 3 000 000
3 000 001 à 5 000 000
5 000 001 à 10 000 0000
plus de 10 000 000
F
9 750
13 400
34 500
F
10 502.50
23 902,50
58 402, 50
%
6,5000
6,7000
6,9000
7,1000 tendant vers 7,100
%
3,5000
4,7805
5,8402
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. Cet amendement a pour objectif de procurer des recettes et tient compte de la capacité contributive des contribuables de ce canton. Il tend à frapper les grandes fortunes supérieures à l,5 million. Monsieur le président, je vous prie de procéder au vote par appel nominal pour cet amendement.
M. Nicolas Brunschwig (L). J'attire l'attention de cette assemblée sur la proposition d'amendement de M. Clerc qui tend à doubler quasiment l'impôt sur la fortune pour les catégories désignées. On rejoint ainsi le système suédois où il vaut mieux ne plus avoir de fortune, l'addition de l'impôt sur le revenu généré par la fortune et de l'impôt sur la fortune produisant des intérêts négatifs.
Si cet amendement était voté, vous aurez l'impression d'avoir créé un impôt rapportant des sommes importantes. En ce qui me concerne, je suis convaincu que vous n'aurez plus de contribuables dans ces catégories de fortunes et de revenus.
M. Charles Beer (S). J'aurais souhaité que l'auteur de cet amendement en chiffre le montant. Tout à l'heure, nous avons entériné un déficit de 360 millions, sauf erreur, du compte de fonctionnement. Aussi aimerais-je connaître les conséquences de cet amendement sur ce déficit et entendre les propositions de M. Clerc pour que nous ayons un vote cohérent sur l'ensemble.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur de minorité. La hausse d'impôt est, en moyenne, de 0,5%. Avec l'introduction de ces nouvelles tranches, nous obtiendrons une recette d'environ cinq millions.
Le président. Je mets aux voix l'amendement proposé par M. Bernard Clerc. L'appel nominal (Appuyé.) a été demandé, nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent l'amendement répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 18 oui et 26 abstentions.
Ont voté non (48) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Madeleine Bernasconi (R)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Nicole Castioni (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Christian de Saussure (L)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Marie-Thérèse Engelberts (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Nelly Guichard (DC)
Claude Haegi (L)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean-Marc Odier (R)
Barbara Polla (L)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Christine Sayegh (S)
Louis Serex (R)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Ont voté oui (18) :
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Bernard Clerc (AG)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Christian Grobet (AG)
Pierre Meyll (AG)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Martine Ruchat (AG)
Jean Spielmann (AG)
Pierre Vanek (AG)
Salika Wenger (AG)
Se sont abstenus (26) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Pierre-Alain Champod (S)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Régis de Battista (S)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Alexandra Gobet (S)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
René Longet (S)
Louiza Mottaz (Ve)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni (S)
Alberto Velasco (S)
Etaient excusés à la séance (3) :
Fabienne Bugnon (Ve)
Anita Cuénod (AG)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Etaient absents au moment du vote (4) :
Juliette Buffat (L)
Yvonne Humbert (L)
Chaïm Nissim (Ve)
Alain Vaissade (Ve)
Présidence :
M. René Koechlin, président.
Mis aux voix, l'article 183 (nouveau) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 184 (nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
M. Dominique Hausser (S). Je rappelle la demande que j'ai formulée tout à l'heure, à savoir de procéder au vote en troisième débat par appel nominal. (Appuyé.)
M. Michel Halpérin (L). Lors de cet appel nominal, je noterai attentivement les noms de ceux qui s'abstiendront. Je testerai ainsi leur volonté politique car, tout à l'heure, certaines abstentions m'ont surpris.
A l'occasion du premier débat, j'ai cru que nous étions engagés dans un combat commun pour la République, puis j'ai eu l'impression que des hésitations commençaient à se manifester. Je les trouve préoccupantes.
M. Christian Brunier (S). M. Halpérin voulant tester notre fiabilité, je lui rappelle que cinq partis ont signé l'accord et qu'un seul n'a pas pris position en l'assemblée générale. Et ce n'est pas le parti socialiste.
Le président. L'appel nominal a été demandé par M. Dominique Hausser. Nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent ce projet de loi constitutionnelle répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Ce projet est adopté en troisième débat par 73 oui contre 18 non et 1 abstention.
Ont voté oui (73) :
Esther Alder (Ve)
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Charles Beer (S)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Madeleine Bernasconi (R)
Claude Blanc (DC)
Anne Briol (Ve)
Christian Brunier (S)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Nicole Castioni (S)
Pierre-Alain Champod (S)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Régis de Battista (S)
Christian de Saussure (L)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Marie-Thérèse Engelberts (DC)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Bénédict Fontanet (DC)
Alexandra Gobet (S)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Nelly Guichard (DC)
Claude Haegi (L)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
René Longet (S)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Alain-Dominique Mauris (L)
Pierre Meyll (AG)
Jean-Louis Mory (R)
Louiza Mottaz (Ve)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean-Marc Odier (R)
Barbara Polla (L)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Louis Serex (R)
Myriam Sormanni (S)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Alberto Velasco (S)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Ont voté non (18) :
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Bernard Clerc (AG)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Pierre Froidevaux (R)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Christian Grobet (AG)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Martine Ruchat (AG)
Jean Spielmann (AG)
Pierre Vanek (AG)
Salika Wenger (AG)
S'est abstenu (1) :
Jean-Pierre Gardiol (L)
Etaient excusés à la séance (3) :
Fabienne Bugnon (Ve)
Anita Cuénod (AG)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Etaient absents au moment du vote (4) :
Juliette Buffat (L)
Yvonne Humbert (L)
Chaïm Nissim (Ve)
Alain Vaissade (Ve)
Présidence :
M. René Koechlin, président.
La loi est ainsi conçue :
Loi constitutionnelle(7894)
modifiant la constitution de la République et Canton de Genève
(A 2 00)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 97A Equilibre financier et stabilisation de la dette publique (nouveau)
1 La politique financière de l'Etat tend à l'équilibre du compte de fonctionnement (équilibre financier) et à la stabilisation de la dette publique sur des périodes de six ans (périodes-cadre).
2 Le compte de fonctionnement comprend les revenus et les charges. Les amortissements font partie des charges; ils représentent, par période biennale, 80% au moins des investissements nets d'infrastructure dont les charges financières sont supportées par l'Etat.
3 Le Conseil d'Etat peut prolonger de trois ans au plus la période-cadre avec l'approbation du Grand Conseil, si la situation économique l'exige et à la condition que les déficits de fonctionnement cumulés soient résorbés au terme de la période-cadre ainsi prolongée.
4 Le Conseil d'Etat décide des mesures affectant les charges et les revenus, qui sont nécessaires pour stabiliser la dette publique pendant la période-cadre et qui entrent dans sa compétence.
5 Le Conseil d'Etat propose au Grand Conseilles autres mesures nécessaires affectant les charges et les revenus.
6 Si la dette publique n'est pas stabilisée à la fin de la période-cadre, le Grand Conseil arrêtera par une loi soumise au référendum facultatif, une augmentation des centimes additionnels perçus sur les impôts. A défaut de l'adoption d'une telle loi, le Conseil d'Etat proposera immédiatement au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges.
7 Le Conseil d'Etat peut soumettre au Grand Conseil, en cours d'exercice, des amendements à la loi budgétaire annuelle.
8 Si, à la fin de la période-cadre, la somme des bonis excède celle des déficits du compte de fonctionnement, l'excédent sera affecté pour un tiers au moins au remboursement de la dette publique à concurrence du découvert du bilan.
9 La stabilisation de la dette publique et l'amortissement du découvert du bilan doivent permettre de réduire le rapport entre l'endettement public et le revenu cantonal.
Art. 182 Assainissement des finances cantonales (nouveau)
1 Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat conduisent une politique financière qui doit aboutir à l'équilibre du compte de fonctionnement de l'Etat à la fin d'une période de cinq ans qui s'ouvre à la date de l'entrée en vigueur de la présente disposition (période d'assainissement).
2 Le déficit du compte de fonctionnement ne dépassera pas 360 000 000 F, pour le budget 1999. Le Conseil d'Etat fixera chaque année, dans le délai prévu par la loi pour la transmission du budget au Grand Conseil, la limite du déficit du compte de fonctionnement pour l'exercice suivant. Chaque année, le déficit sera inférieur à celui de l'exercice précédent. Le compte de fonctionnement sera équilibré au terme de l'exercice 2003.
3 Le Conseil d'Etat peut prolonger d'une année la période d'assainissement avec l'approbation du Grand Conseil, si la situation économique l'exige. Dans ce cas le Conseil d'Etat fixera, dans le délai prévu par la loi, la limite du déficit pour l'exercice 2003.
4 Les mesures à prendre pour atteindreles objectifs ainsi fixés affecteront les charges et les revenus.
5 Le Conseil d'Etat arrête en bloc, dès l'entrée en vigueur de la présente disposition, les mesures énumérées à l'article 183.
6 S'il s'avère que les objectifs fixés au deuxième alinéa ne seront pas atteints, le Conseil d'Etat proposera au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges et les revenus.
7 Si l'équilibre du compte de fonctionnement n'est pas réalisé à la fin de la période d'assainissement, le Grand Conseil arrêtera par une loi soumise au référendum facultatif, une augmentation des centimes additionnels perçus sur les impôts. A défaut de l'adoption d'une telle loi, le Conseil d'Etat proposera immédiatement au Grand Conseil de nouvelles mesures affectant les charges.
8 Le Conseil d'Etat peut soumettre au Grand Conseil, en cours d'exercice, des amendements à la loi budgétaire annuelle.
Art. 183 Mesures affectant les charges et les revenus (nouveau)
1 Le Conseil d'Etat arrête les mesures suivantes affectant les charges :
Ces montants seront indexés selon la législation fédérale.
Le Conseil d'Etat règle la situation des personnes qui vivent dans un home ou dans un établissement médico-social, et celle des orphelins et des enfants à charge.
2 Le Conseil d'Etat arrête les mesures suivantes affectant les revenus :
Ces montants ne peuvent être augmentés avant le 1er janvier 2003, au plus tôt.
3 Le Conseil d'Etat est compétent pour adopter par voie réglementaire toutes les mesures utiles à l'application immédiate, dès leur entrée en vigueur, des mesures énumérées aux alinéas 1 et 2 ci-dessus.
Art. 184 Réforme de l'Etat (nouveau)
En arrêtant les mesures d'assainissement des finances cantonales, le Conseil d'Etat met en oeuvre la réforme de l'Etat.
Art. 2
1 Le Conseil d'Etat fixe la date de l'entrée en vigueur de l'article 97 A.
2 Les articles 182, 183 et 184 entrent en vigueur le 1er janvier 1999; les règles de droit antérieures qui seraient contraires à ces dispositions sont suspendues pendant la durée de validité de celles-ci.
3 Les articles 182, 183 et 184 seront abrogés par l'entrée en vigueur de l'article 97A; les mesures énumérées à l'article 183, hormis celles dont la durée est fixée dans le texte, demeurent toutefois en vigueur jusqu'à leur abrogation ou à leur modification par une loi.
La séance est levée à 0 h 5.