Séance du jeudi 28 mai 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 9e session - 21e séance

No 21/III

Jeudi 28 mai 1998,

aube

Présidence :

M. René Koechlin,président

La séance est ouverte à 8 h.

Assistent à la séance : Mme et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Janine Berberat, Anne Briol, Caroline Dallèves-Romaneschi, Hervé Dessimoz, Erica Deuber-Pauli, Marie-Thérèse Engelberts, Bénédict Fontanet, Jean-Pierre Gardiol, Luc Gilly, Claude Haegi, Michel Halpérin, Armand Lombard, Micheline Spoerri, Alain Vaissade et Pierre-Pascal Visseur, députés.

3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

Le président. Le point 8, rapport de la commission de grâce, sera traité à la séance de 10 h.

Je vous rappelle l'adjonction de deux points à notre ordre du jour :

- le rapport sur le projet de loi 7681-A pour la constitution d'une fondation communale du Grand-Saconnex pour la petite enfance, qui sera traité au point 61 bis. Rapporteur: M. Hiler.

- le rapport sur le projet de loi 7196-A modifiant la loi sur l'université, qui sera traité au point 70 bis. Rapporteur: M. Lescaze.

Il est prévu également de traiter le point 83, réexamen en matière de naturalisation, en fin de séance, à huis clos. Il s'agit du rapport divers 278-B et non 293-B, comme indiqué par erreur dans l'ordre du jour.

R 370
b) Proposition de résolution de Mmes Fabienne Bugnon, Jeannine de Haller et Marianne Grobet-Wellner pour la nomination d'une commission d'enquête parlementaire ad hoc sur les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'OMC. ( )R370
R 371
c) Proposition de résolution de Mmes et MM. Roger Beer, Madeleine Bernasconi, Thomas Büchi, Marie-Françoise de Tassigny, Hervé Dessimoz, Daniel Ducommun, John Dupraz, Pierre Froidevaux, Bernard Lescaze, Jean-Louis Mory, Jean-Marc Odier, Louis Serex, Walter Spinucci et Pierre-Pascal Visseur relative aux émeutes qui ont marqué le 50e anniversaire de l'Organisation mondiale du commerce. ( )R371

4. a)  Déclaration du Conseil d'Etat.

Proposition de résolution

(370)

pour la nomination d'une Commission d'enquête parlementaire ad hoc sur les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'OMC

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les événements qui se sont passés en marge de la commémoration du 50e anniversaire du GATT/OMC et également en marge des manifestations non violentes nous interpellent en tant qu'autorité.

Au-delà des réactions épidermiques de part et d'autre, nous ne pouvons esquiver les vraies questions. La ville de Genève a été ces derniers jours le théâtre de grandes scènes de violence, commises par une population organisée et composée de jeunes, voire très jeunes individus. Il y a bien entendu, à l'heure des comptes et des bilans, les conséquences, qui se chiffrent en blessures physiques à panser et en coût financier. Mais il doit y avoir aussi l'étude des causes, d'où vient et où va cette violence ?

Cet exposé des motifs se veut résolument court, car les auteurs n'ont pas plus que vous, Mesdames et Messieurs les députés, les réponses à ces questions. Toutefois, ils trouvent indispensable de se les poser.

Pour toutes ces raisons, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, d'approuver la création d'une Commission parlementaire ad hoc qui nous permette d'enquêter sur ce phénomène et de participer activement à la recherche de solutions préventives et concrètes.

Proposition de résolution

(371)

relative aux émeutes qui ont marqué le 50e anniversairede l'Organisation mondiale du commerce

EXPOSE DES MOTIFS

Genève ne saurait déroger à une vieille tradition qui est celle de son ouverture sur le monde. Après avoir été le berceau du Comité international de la Croix-Rouge, puis de la Société des Nations, elle n'a cessé de voir son rôle de ville internationale grandir.

Aujourd'hui, elle abrite quinze organisations internationales, 150 ONG et 140 missions. La Genève internationale emploie quelque 20 000 personnes.

Après s'être battu âprement pour garder à Genève le siège de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), celle-ci fêtait ces jours derniers son 50e anniversaire. Ce fut l'occasion pour notre canton de recevoir un important nombre d'hôtes de marque, soit les présidents, premiers ministres ou ministres des 132 pays membres de l'OMC:

Si les manifestations officielles se sont heureusement déroulées sans problème, il faut déplorer les dérapages répétés d'un certain nombre de contre-manifestations. En effet, au terme de cinq soirées d'émeutes, une centaine de commerces ont vu leurs vitrines voler en éclats, parfois à de multiples reprises. De la marchandise a été volée dans un certain nombre d'entre eux, essentiellement au détriment de petits commerçants de quartier. Plus de 60 véhicules ont également été endommagés, ainsi que des panneaux de signalisation, des cabines téléphoniques et des abribus. Quatre tombes sises au cimetière des Rois ont même été profanées. Les dégâts se chiffrent en plusieurs millions. Mais heureusement aucun blessé grave n'est à déplorer.

Vu l'importance de ces faits et leur intensité, il nous semble capital de connaître le pourquoi de ce soudain déchaînement de violence. Avant de tirer la moindre conclusion hâtive de ces événements, il nous paraît indispensable de les analyser. Ensuite de quoi, le Conseil d'Etat sera à même de nous proposer notamment une redéfinition de sa politique d'intervention des forces de l'ordre lors de manifestations.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention la présente proposition de résolution.

Déclaration du Conseil d'Etat

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat entend revenir brièvement sur les événements qui ont marqué notre ville du 16 au 20 mai dernier.

Le Conseil d'Etat estime tout d'abord nécessaire de rappeler que sa mission permanente consiste d'une part à protéger les biens et les personnes, ainsi qu'en l'occurrence à garantir la sécurité de la conférence internationale qui se tenait à l'ONU. Il lui incombe d'autre part de garantir la liberté du droit d'expression. Cette mission globale, en l'espèce, devait être conduite dans des conditions particulièrement difficiles.

Le Conseil d'Etat a tenu à remercier et féliciter la police genevoise de la manière dont elle s'est acquittée pour l'essentiel de sa tâche. Il tient également à distinguer les manifestants dignes et corrects des casseurs irresponsables à l'origine des graves débordements qui se sont produits.

Ces violences, à n'en pas douter, nous interpellent.

Sur le plan de la répression, les enquêtes judiciaires en cours permettront à la justice de déterminer les responsabilités et de punir les coupables.

Sur le plan de la prévention par contre, il appert que son analyse est l'affaire d'un certain nombre d'instances. C'est pour conduire cette analyse que le Conseil d'Etat a décidé, en début de semaine, de confier à un collège d'experts la mission de se pencher, à la lumière de ces événements, sur « la violence des jeunes en milieu urbain».

Il s'agira d'une part de mettre en évidence les raisons probablement multiples de ces débordements et, d'autre part, de proposer des pistes de solutions. Cette mission d'expertise sera initiée cette semaine encore.

Le Conseil d'Etat entend ainsi assumer son rôle institutionnel de garant de la sécurité publique et de la liberté d'expression, en condamnant fermement toute violence et en prenant toute mesure de nature à la prévenir.

Débat

Mme Fabienne Bugnon (Ve). J'ai bien entendu la déclaration de M. le conseiller d'Etat.

Je suis satisfaite, Monsieur Ramseyer, de vous voir empoigner le problème d'une autre manière que vous l'avez fait tout au long de cette semaine à travers la presse. Vous avez enfin décidé d'avoir une attitude plus ou moins raisonnable et de réfléchir plutôt que de punir.

Comme je ne fais pas partie des «niais», je laisserai les niais s'exprimer, - pour reprendre vos termes - et puisque je suis une femme «intelligente», je m'exprimerai intelligemment, comme vous l'avez dit.

Vous avez enfin compris qu'il y a un réel problème et que des personnes doivent être désignées pour essayer de le résoudre. Bien que votre proposition de collège d'experts soit intéressante, il n'en demeure pas moins que les autorités de ce canton doivent s'interroger, ce que, en tant qu'autorités, nous faisons.

En ce sens, j'ai déposé avec mes collègues Jeannine de Haller et Marianne Grobet une proposition de résolution pour la mise sur pied d'une commission parlementaire ad hoc composée de représentants de tous les partis. Cette commission pourrait s'adjoindre les fameux experts dont vous parlez - sociologues ou autres spécialistes.

Cette commission devra en tout cas se poser deux questions afin d'essayer de comprendre ces jeunes que vous condamnez assez durement. S'il n'y a pas lieu de les excuser pour tous les dégâts commis, il faut néanmoins chercher à savoir pourquoi, âgés de 14 à 18 ans, ils descendent dans la rue casser des vitrines et quel message ils tentent de faire passer de cette manière.

Nous devons essayer de comprendre également si cette violence est liée à l'OMC ou à tout autre chose. J'aimerais que cette question soit clairement posée, car elle pourrait nous servir à trouver des pistes préventives et concrètes pour éviter que de tels événements se reproduisent.

La deuxième question posée par cette résolution est de savoir si la police est réellement préparée à ce genre de contestation. C'est la première fois - ou peut-être la deuxième avec le défilé militaire - que Genève se voit confrontée à des manifestants qui agissent de manière spécifique. Je ne porte aucun jugement, mais nous devons nous poser ces questions et la police également.

Pour cette raison, j'aimerais que la résolution déposée hier soit distribuée afin d'être discutée dans le cadre du débat que M. le conseiller d'Etat nous permet d'avoir.

M. Rémy Pagani (AdG). Je suis également satisfait de la prise de position du Conseil d'Etat.

J'imagine que M. Ramseyer se détermine au nom du Conseil d'Etat et pas en son nom personnel, comme il l'a fait en jetant de l'huile sur le feu ces derniers jours, notamment dans la presse de dimanche dernier.

Je ne dirai pas que nous sommes des «niais», ni que M. Ramseyer jette de l'huile sur le feu en amalgamant les organisateurs et les pilleurs, ni que certains représentants du capital financier sont en collusion. Notamment M. Ramseyer, ex-membre d'une grande assurance et aussi colonel...

Une voix. Quel est le rapport?

M. Rémy Pagani. Il n'y a pas de rapport, je continue! Je tiens simplement à dire que tout a commencé la semaine dernière avec ce plan de sécurité. Jamais, à Genève, on n'a décidé unilatéralement de mettre les uns à l'intérieur d'un périmètre de sécurité avec liberté de circulation et d'expression, et les autres, dans un périmètre «fliqué» avec un policier à tous les carrefours, trois dans chaque parc et des contrôles d'identité. Résultat : plus de trois cents arrestations et un hélicoptère vrombissant cinq jours durant, tout cela rappelant tristement un état de siège propre aux pays du tiers-monde.

Je critique le Conseil d'Etat et trouve pour le moins désagréable qu'il désigne aujourd'hui une commission d'experts n'ayant qu'un seul objectif : se pencher sur les problèmes de la jeunesse. On sait déjà qu'il y a de gros problèmes dans les cycles d'orientation et les maisons de quartiers, les animateurs et les enseignants font face, mais on ne sait pas qui en porte la responsabilité.

Nous sommes tombés d'accord pour mettre sur pied une commission d'enquête qui devra répondre à des questions bien précises. Il s'agira de déterminer quelle est la politique responsable de la situation actuelle, où de plus en plus de gens sont exclus ou projetés dans la misère. Quand je vois dans nos rues des gens en train de laver les pare-brise aux feux rouges, j'estime que cette société conduit à la misère !

Qu'est-ce le néolibéralisme aujourd'hui ? C'est l'image que vous nous avez donnée ces cinq derniers jours : la possibilité de siroter un petit verre face au lac et 500 m de liberté pour les uns; la répression et la misère pour les autres.

Il faut discuter aujourd'hui de cette commission d'enquête parlementaire, raison pour laquelle je me rallierai à la proposition de Mme Fabienne Bugnon.

Mme Jacqueline Cogne (S). Sur le même sujet, s'il est vrai que la police a eu une patience et une tenue exemplaires, selon les dires de certains, alors je me demande, Monsieur le président, pourquoi la visite de Champ-Dollon nous a été refusée le 21 mai dernier à nous, membres de la commission des visiteurs officiels des prisons.

Je me demande tout simplement, et je ne suis pas la seule, s'il n'y avait pas quelques cicatrices à cacher. C'est grave et, s'il n'est pas dénoncé, ce geste peut être recommencé, et notre crédibilité, mise à rude épreuve.

C'est pourquoi, Monsieur le président, je demande qu'une enquête parlementaire soit ouverte, voire avec sanction à la clé, sur cette façon d'agir d'un directeur de prison qui, visiblement, savait très bien pourquoi il refusait cette visite, alors qu'il se mettait dans l'illégalité la plus complète.

M. John Dupraz (R). Lorsqu'une cité accueille une conférence internationale, le premier devoir des autorités est d'assurer l'intégrité corporelle de ses hôtes ainsi que le bon déroulement de la conférence. A cet égard, l'action et les décisions du Conseil d'Etat et de la police ont été exemplaires.

Quant à M. Pagani, il n'a pas changé : il fait partie depuis vingt-cinq ans de tout ce qui bouge et sème la pagaille à Genève. Je trouve scabreux de le voir s'élever comme certains contre les méfaits du libéralisme économique, alors que ni lui ni aucun parti ou syndicat de gauche ne se sont manifestés pour dénoncer les effets des accords de l'Uruguay Round. A l'époque, seuls les responsables agricoles l'ont fait, mais ils ont été pris pour des rigolos. (Brouhaha.)

Cela étant, le groupe radical ne dénie pas le droit d'exprimer sa désapprobation envers certains événements ou décisions prises par les grands de ce monde en manifestant. Mais nous ne pouvons accepter que la voyouterie européenne vienne se greffer sur ces manifestations pour casser. Nous comprenons l'exaspération de nos commerçants, victimes de violences et de dégâts à leurs biens immobiliers, qui n'admettent pas que la cité ne puisse pas être entièrement protégée, alors que les diplomates et les lieux de conférences le sont en priorité.

Mesdames et Messieurs les députés, lorsque des jeunes cassent gratuitement pour prouver leur mal de vivre et leurs problèmes existentiels, il y a un réel problème de société. La décision prise par le Conseil d'Etat de désigner une commission d'experts pour analyser la situation est juste. Je regrette que Mme Fabienne Bugnon ne se rallie pas à cette proposition, car une commission d'enquête parlementaire n'est pas apte à traiter ce problème de société. En conséquence, il doit être examiné de façon professionnelle; notre Grand Conseil, parlement de milice, n'a pas les moyens d'en débattre.

Nous approuvons pleinement l'attitude de la police et saluons son courage lors de ces événements difficiles. Nous remercions le Conseil d'Etat d'avoir pris les décisions qui s'imposent et dénonçons les méfaits de casseurs professionnels venus de tous les pays environnants et d'autres villes de Suisse en profitant du cinquantième anniversaire de l'OMC pour casser gratuitement. (Applaudissements.)

M. Gilles Desplanches (L). Le droit à la manifestation est un droit démocratique garantissant à tout opposant la possibilité de revendiquer son point de vue. Notre société garantit une telle liberté, mais où cette dernière s'arrête-t-elle ?

Pendant cette manifestation qui se devait festive, pacifique et ludique, une minorité de manifestants avait l'envie de casser. On pourrait éventuellement croire que ce désir était idéologique, mais comment justifier le nombre impressionnant de commerces de détails endommagés et souvent pillés par les casseurs ? Les commerçants genevois étaient-ils la cible de ces agitateurs en mal d'action, désireux d'en découdre avec la police, ou ne s'agissait-il que d'un passe-temps ?

On comprend facilement le ras-le-bol des commerçants face à ce vandalisme et leurs inquiétudes au sujet du remboursement. Cette agressivité aurait pu inciter nombre d'entre eux à pratiquer l'autodéfense pour protéger leur outil de travail. Selon les premières estimations, les dégâts s'élèveraient entre 3 et 5 millions.

Pour la plupart chevronnés, les organisateurs de ces manifestations en connaissent parfaitement la dynamique et doivent donc admettre leur responsabilité pour les déprédations commises du 18 au 24 mai dernier. Les responsables de l'AMP ont stimulé la dynamique de la violence, ils ont toléré les casseurs et n'ont jamais collaboré activement avec la police pour les neutraliser. Cette responsabilité les implique formellement.

Ces mêmes responsables s'insurgent contre de soi-disant violences policières, mais force est de constater que les fonctionnaires de l'ordre ont été particulièrement patients tout en faisant preuve d'un grand professionnalisme par leur retenue et leur comportement.

Des mesures spécifiques pour empêcher les casseurs de pénétrer dans le Centre-Ville et la Vieille-Ville ont été prises par la gendarmerie qui a également organisé des patrouilles pour assurer la protection des commerces. L'effectif au complet étant réquisitionné pour ces actions de maintien de l'ordre, il lui était impossible de disperser ses forces. Il est utile de rappeler que plus de six cents policiers d'autres cantons ont été dépêchés par la Confédération pour prêter main-forte et pour un coût de plus de 1,2 million.

Il faut souligner également l'ampleur de la tâche réalisée par la police genevoise qui a effectué plus de vingt-deux mille heures supplémentaires. Malgré leur engagement et leur retenue, neuf policiers et deux inspecteurs ont subi des blessures nécessitant un arrêt de travail à 100%. A l'agression de ces deux inspecteurs relatée par la presse, il faut ajouter celle subie par une femme gendarme chargée de régler la circulation aux abords de la manifestation du 16 mai à la place des Vingt-Deux-Cantons qui a été jetée à terre et rouée de coups.

Il faut également souligner le comportement de certains manifestants lors de ces agressions qui ont jeté des heures durant des projectiles sur les gendarmes : billes d'acier, pavés, pierres, projectiles remplis de peinture, d'urine ou autres objets et marchandises, dans le seul but de provoquer la police.

Le Grand Conseil ne peut pas admettre ces violences, et les membres de l'AMP ayant appelé à la désobéissance civile comme au chahut nocturne ne peuvent pas se prétendre innocents. Ils cherchent aujourd'hui à prendre leurs distances avec les casseurs tout en accusant la police d'avoir osé intervenir. Je vous livre quelques exemples de ces interventions.

Le samedi 16 mai, trois mille personnes, dont deux à trois cents masquées, participent à une manifestation autorisée à la place Neuve. De gros dégâts sont commis à Confédération-Centre, au McDonald's, à Rive, dans différents petits commerces; des véhicules sont renversés; plus de cent plaintes sont enregistrées.

Le même jour, cinq à huit cents manifestants se dirigent à 23 h vers la plaine de Plainpalais pendant que des casseurs entrent en action à la rue de Lausanne, à la place des Vingt-Deux-Cantons, à Chantepoulet, à la rue Necker, au boulevard Georges-Favon, au rond-point de Plainpalais, à l'avenue du Mail, à la rue de Carouge, à la rue Leschot...

Le 17 mai, tentative d'infiltration à l'ONU et à l'OMC.

Le 18 mai, manifestations et personnes encagoulées à la Place Neuve jusqu'à 1 h; dégâts sur des abris de bus et des commerces.

Le 19 mai, reprise des violences avec, pour cibles, des commerces au rond-point de Plainpalais, à la rue de Carouge, à la rue Leschot, autour de la plaine et, finalement, à l'Hôtel de police de la Jonction.

Le 20 mai, tentative d'infiltration dans les dispositifs de l'Hôtel Intercontinental et de l'OMC.

Pour toutes ces raisons, le collège d'experts est utile : il fera la lumière sur ces événements et déterminera la responsabilité de l'AMP et des autres organisateurs de ces manifestations. (Applaudissements.)

M. Bernard Clerc (AdG). J'ai été heureux d'entendre le Conseil d'Etat condamner toute violence. Malheureusement, les violences essentielles, fondamentales, ne sont pas évoquées dans cette prise de position. Quelles sont-elles?

Ce sont des violences liées à la mise en oeuvre du processus de libéralisation des échanges prônée notamment par l'OMC qui conduit des centaines de milliers de paysans dans le monde à quitter leur terre pour essayer de survivre dans les grandes villes.

Ce sont ces milliers d'êtres humains morts de faim.

Ce sont ces centaines de millions de personnes au chômage.

Ce sont, enfin, tous ceux qui meurent pour défendre des droits syndicaux et des libertés, comme nous le voyons ces jours dans les pays du Sud-Est asiatique.

Voilà la violence fondamentale; voilà la violence causale.

Lorsqu'on parle des responsabilités, il faut les placer là où elles sont. Nous dénonçons depuis longtemps les processus économiques tels qu'ils se développent aujourd'hui qui ne peuvent conduire à terme qu'à la violence; à la multiplication des actes de violence; à l'explosion de la violence.

Quelques vitres cassées à Genève - événement purement anecdotique... (Exclamations.) ...ne vont pas changer ces données fondamentales. On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre; prôner d'un côté la libéralisation à tous crins et la déréglementation et s'étonner que des pavés soient jetés dans nos vitrines.

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce qui, à mon avis, devait être dit aujourd'hui. (Applaudissements.)

M. Christian Brunier (S). Le parti socialiste tient à souligner la modération de la déclaration du Conseil d'Etat. Lorsque M. Ramseyer lit un texte rédigé collectivement, ses propos sont plus pondérés et plus dignes d'un chef de gouvernement que ses dérapages médiatiques.

J'aimerais revenir sur l'amalgame excessivement dangereux que certains font entre manifestants et casseurs, car le droit de manifester est un droit élémentaire de la démocratie, comme l'a dit notre collègue libéral avant de déraper lui aussi. Chiffre énorme pour Genève : on a dénombré huit mille manifestants pacifiques; contre seulement cent à deux cents casseurs ayant tout saccagé inutilement. Voilà ce qui doit être dit.

Cet amalgame a toutefois quelque chose de rassurant : en amalgamant les casseurs et les manifestants, la droite fait une sorte de mea culpa pour avoir autorisé il y a quelques années un défilé militaire qui a mal tourné. Etait-elle complice de ces violences ? J'espère qu'il s'agit d'un aveu et qu'elle ne soutiendra plus dorénavant de tels rassemblements militaires qui sont des sources de violence.

Les partis de gauche ont appelé à manifester contre l'OMC dont la politique actuelle n'est pas acceptable; nous en sommes fiers et l'avons proclamé dans la rue. A propos d'amalgame, lors de la dernière séance du Grand Conseil, les députés Blanc et Dupraz ont lancé un appel en conseillant à la gauche de se mobiliser contre l'OMC; M. Dupraz l'a répété aujourd'hui en faisant un historique bien bancal de notre combat contre l'OMC. (M. Blanc, lui, a l'art de donner des conseils exceptionnels : le dernier en date a fait perdre un siège au Conseil d'Etat à son parti !) MM. Blanc et Dupraz sont-ils responsables de la casse pour autant ? Il est clair que non !

Notre président du Conseil d'Etat et les partis de droite ont parlé de la voyouterie européenne qui s'est mobilisée à Genève...

M. John Dupraz. Tu appelles ça comment, toi ?

M. Christian Brunier. J'aimerais que vous soyez aussi loquace, Monsieur Dupraz, à propos de la voyouterie mondiale qui vient placer de l'argent sale dans nos banques. La voilà la véritable voyouterie ! Concernant les événements liés à l'OMC, il s'agit là de quelques casseurs... (Exclamations.) Nous condamnons la casse, mais nous saluons ce mouvement de solidarité et cette mobilisation exceptionnelle face à la politique menée par l'OMC contre les agriculteurs, les PME, les citoyennes et citoyens de ce monde. Le parti socialiste, dont les vitrines ont été brisées, a également fait les frais de cette casse. Il s'agit maintenant de comprendre ce phénomène de violence gratuite qui fait du tort à la cause.

Beaucoup de policiers ont bien accompli une tâche difficile tout en accumulant une fois de plus des heures supplémentaires. Il y a eu cependant quelques dérives que je voudrais comprendre et condamner s'il y a lieu. Qui a donné l'ordre d'effectuer de véritables rafles dans certains milieux alternatifs ?

Naturellement, nous soutiendrons la résolution présentée par la majorité parlementaire et rejetons la proposition gouvernementale.

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Le groupe radical a déposé une résolution qui rejoint en tout point la position du Conseil d'Etat.

Il se félicite de voir ces éléments pris au sérieux et analysés en profondeur pour permettre à Genève de poursuivre sa mission d'accueil international.

Notre résolution a pour objectif d'apporter un éclairage constructif à un débat ayant de fortes chances d'être un peu trop passionnel.

Si la commission d'enquête prend une coloration politique, le groupe radical hésitera fortement à la soutenir. Rappelons par ailleurs que le Conseil d'Etat a décidé d'une commission d'enquête au préalable.

M. Rémy Pagani (AdG). Ma collègue Fabienne Bugnon a demandé que soit distribuée la résolution, mais nous ne l'avons toujours pas reçue. Je vous prierais donc, Monsieur le président, de faire le nécessaire auprès de la sautière pour que...

Le président. C'est fait, Monsieur le député.

M. Rémy Pagani. Très bien, merci, Monsieur le président !

J'aimerais intervenir de manière plus spécifique au sujet de la police.

Comme plus de huit mille personnes, j'ai participé à la manifestation de samedi passé. Par ce rassemblement, nous voulions dénoncer les activés au niveau mondial de l'OMC. Moi-même, j'ai empêché qu'une voiture ne soit renversée à la rue de Lausanne...

Des voix. Bravo!

M. Rémy Pagani. C'est dire à quel point je me préoccupe du sens des manifestations que nous organisons. J'ai pu ainsi constater que les consignes de la police, données en accord avec les organisateurs, étaient respectées : la police n'apparaissait pas ou était plus ou moins cachée. Tout s'est bien passé jusqu'à la fin de cette manifestation à la rue de Lausanne.

Dans la nuit de lundi à mardi, j'ai participé... enfin, j'ai essayé de comprendre ce qui était en train de se passer avec un groupe de jeunes de 12 à 14 ans que je connais en tant que travailleur social... (Brouhaha.) Laissez-moi finir ! Là aussi, j'ai pu constater que les policiers étaient relativement pondérés envers ces jeunes qui leur jetaient les canettes de bière qu'ils venaient d'écluser - geste que je trouve regrettable, tout comme le fait de piller des magasins. Je m'opposerai d'ailleurs à toute forme de pillage : à celui des commerçants comme à celui de la planète.

J'ai également participé à la manifestation de mercredi midi devant l'ONU. Là, j'ai constaté un véritable dérapage de la part de professionnels : trois policiers se sont saisis d'un manifestant et lui ont cassé le nez volontairement. J'ignore quelles étaient les consignes, mais la responsabilité du chef de la police est engagée et nous devons prendre des dispositions. Si vous le niez, vous cautionnez ce genre de dérapages.

Jusqu'à mercredi midi, la police a agi de manière pondérée par rapport aux événements, mais il y a eu ensuite des rafles et des dérapages qui doivent être analysés de manière précise par la commission d'enquête pour déterminer les responsabilités.

Pour cette raison, il est important de voter cette résolution et de s'opposer à la décision du Conseil d'Etat de mettre sur pied une commission de spécialistes qui ne proposeraient que des mesures générales, alors qu'en tant que parlementaires nous avons besoin de mesures particulières pour exercer un contrôle.

M. Claude Blanc (PDC). Le président du parti socialiste vient de perdre une belle occasion de se taire ! Il peut bien gloser sur les propos tenus par M. Dupraz et votre serviteur lors de la dernière séance du Grand Conseil. M. Dupraz lui répondra s'il en a l'intention, quant à moi je vous rappelle, Monsieur le président du Grand Conseil, que j'ai dit aux socialistes qu'il était bien tard pour se préoccuper des méfaits de l'OMC.

Au moment où les Chambres fédérales ratifiaient le traité, les socialistes ont suivi comme des moutons. Maintenant, ils jouent les Tartufe et condamnent cette organisation, alors qu'ils savaient très bien où l'OMC allait mener le monde en accélérant la paupérisation. Mais ils étaient obnubilés par le fait que les classes moyenne et pauvre qu'ils représentent allaient pouvoir vivre meilleur marché en Suisse, une fois que les produits agricoles coûteraient moins cher «grâce» à l'exploitation des agriculteurs du tiers-monde.

C'est bien de cela qu'il s'agissait, mais tous les socialistes se sont mis à bêler... (Exclamations.) Pas un seul n'a ouvert la bouche pour dénoncer ce traité et, aujourd'hui, ils provoquent des incendies dans la ville et tirent sur les pompiers ! (Rires.)

Mesdames et Messieurs les députés, n'oubliez pas que dans ce Grand Conseil des gens ont sciemment attisé le feu en provoquant ce genre de manifestations avec des personnes encagoulées ou portant perruque, en possession de documents leur indiquant en plusieurs langues l'attitude à adopter en cas d'interpellation par la police. Les organisateurs qui siègent ici devraient au moins avoir la pudeur de se taire. (Applaudissements.)

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Ce débat étant inévitable, l'objet de ma résolution était précisément d'éviter qu'il ait lieu ici, avec, d'un côté, la police sur le banc des accusés, et, de l'autre, un rapport de police sur tous les méchants manifestants. C'est regrettable, et je ne comprends pas pourquoi le texte de ma résolution ne vous a pas encore été remis après trente-cinq minutes. Ce serait plus simple de discuter en l'ayant sous les yeux.

Je maintiens dans son entier le texte de la résolution que j'ai déposée pour plusieurs raisons. Il est indispensable que nous, autorités, posions un certain nombre de questions. Selon M. Dupraz, ce n'est pas le rôle des politiciens; il a parlé de «politique politicienne». Or c'est exactement le contraire ! Vous n'avez peut-être pas encore compris qu'il appartient aux politiciens de réfléchir à certaines choses; nous le faisons en commission sur des sujets très ardus que nous ne comprenons pas toujours. Comme dans ces cas-là, nous ne devons pas hésiter à faire appel aujourd'hui à des spécialistes de ce genre de phénomènes en les faisant même venir de l'étranger, s'il le faut.

Dans la proposition du Conseil d'Etat, mollement reprise dans la résolution du parti radical que j'ai sous les yeux, une analyse en profondeur de ces événements est demandée pour mieux comprendre cette soudaine apparition de violence urbaine. C'est également l'objet de ma résolution, mais je ne souhaite pas que le Conseil d'Etat nomme à lui seul une commission d'experts.

Il y a plusieurs types de conseillers d'Etat, vous l'aurez compris. Pour ma part, je me range plutôt derrière M. Moutinot et Mme Brunschwig Graf dont j'ai entendu la conférence de presse au sujet de la situation actuelle. Je ne me range évidemment pas derrière M. Ramseyer, président du Conseil d'Etat, qui a passé son temps à invectiver tout le monde, à chercher des coupables et à divulguer leur nom dans la presse. Je ne lui fais pas confiance, car une commission sous sa responsabilité ne ferait qu'attiser le feu et chercherait les moyens d'exercer plus de répression, pour mieux juger, punir et condamner. C'est inadmissible.

Pour ces raisons, je vous demande de soutenir le texte de la résolution qui vous est distribuée.

M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur Ferrazino, soyez rassurés : je n'aurai pas l'outrecuidance de tenir les mêmes propos «allumeurs» que M. Pagani !

Je relève l'intelligente pondération de M. le député Clerc qui nous propose d'analyser la violence «causale», «fondamentale», à l'origine des derniers événements.

Si l'on peut comprendre que l'on manifeste contre les décisions prises au sein de l'OMC, il est important néanmoins de protéger les organisations internationales qui siègent à Genève et représentent des ressources économiques essentielles. A cet égard, la police a parfaitement bien tenu son rôle. Malheureusement, des débordements ont eu lieu et il nous appartient désormais de trouver des solutions.

Avant la lecture de la résolution qui vient de nous être remise, j'allais vous proposer non pas un collège d'experts ou une commission parlementaire - on peut en effet relever que les suggestions du gouvernement ou de la résolution sont nécessaires et nous les approuvons - mais une commission extraparlementaire composée de représentants politiques, sociaux, de membres de la police et de quelques organisateurs de ces manifestations.

En considérant l'ensemble des composantes du problème, nous pourrons obtenir un résultat constructif. Voilà ma contre-proposition à la résolution ou au collège d'experts proposé par le Conseil d'Etat.

M. Michel Balestra (L). Le droit de manifester est évident et nous le défendrons. J'en veux pour preuve les huit mille manifestants qui ont pu regagner leur domicile sans se voir reprocher par quiconque leur prise de position. Quant aux deux cents, quatre cents ou huit cents casseurs, il est normal qu'ils aient eu maille à partir avec la police, car ce ne sont pas des manifestants mais des casseurs; ils n'ont pas participé à une prise de position mais à des délits. Etant dans un Etat de droit garant de nos institutions, nous devons nous battre pour que tous les délits soient punis et tous les auteurs poursuivis; y compris ceux que vous nous reprochez de ne pas vouloir poursuivre. La police a bien fait son travail. Genève a la chance d'accueillir l'OMC et est enviée par toutes les villes européennes : c'est dans notre ville que toutes les décisions fondamentales sont prises.

Par ailleurs, je m'inscris en faux contre les affirmations de mes collègues qui prétendent que l'ouverture des marchés paupérise les masses laborieuses et le tiers-monde. Mesdames et Messieurs les députés, l'ouverture a permis, ces cinquante dernières années, au bloc de l'Ouest d'avoir cette supériorité sur d'autres régimes que vous défendez encore aujourd'hui de manière pathétique. Vous ne voulez pas l'anarchie, nous non plus ! Notre soutien au Conseil d'Etat dans cette affaire en est la preuve.

L'OMC sert justement à fixer des règles à titre permanent pour tous, et je félicite cette organisation pour l'avenir meilleur qu'elle promet aux peuples du monde... (Exclamations et rires.) J'adresse également mes félicitations au Conseil d'Etat pour sa parfaite maîtrise de la situation et à la police genevoise qui a su maintenir l'ordre nécessaire au bon déroulement de ces conférences.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, afin de ne pas devoir rouvrir cette discussion, le Bureau vous propose, à l'unanimité, d'ouvrir formellement le débat - déjà bien entamé - sur ces deux résolutions et de les traiter. S'il n'y a pas d'objection, il en sera fait ainsi.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Afin d'éviter tout malentendu, j'aimerais apporter une précision : la déclaration du président du Conseil d'Etat est l'expression de la décision de notre collège gouvernemental de confier à un certain nombre d'experts la mission d'analyser les récents événements et surtout leur violence.

Cette décision est prise; elle ne représente pas une alternative à l'une ou l'autre des résolutions dont votre parlement discute. Le Grand Conseil est libre de prendre la décision qui convient sur l'une ou l'autre de ces résolutions, de les accepter ou de les refuser, de les renvoyer en commission, de prendre ultérieurement connaissance de manière plus détaillée de ce que le Conseil d'Etat a initié en début de semaine seulement pour voir dans quelle mesure cela peut lui convenir. Toutefois, la décision du Conseil d'Etat de confier un mandat d'expertise ne sera pas modifiée par ce débat.

M. John Dupraz (R). Je ne veux pas reprendre le débat de fond sur les bienfaits ou les méfaits du libéralisme économique prôné par l'OMC, mais j'aimerais dire à notre ami Brunier qu'il est un peu tard pour jouer les vierges effarouchées. Au moment de la signature des accords de Marrakech, vous avez été totalement silencieux et complice, il faut donc que vous en assumiez les conséquences.

Notre attitude doit être constructive : la Suisse est membre de l'OMC que Genève a la chance d'accueillir. Pratiquer la politique du siège vide est une erreur fondamentale, car les absents ont toujours tort. Il faut participer à l'élaboration des futurs accords en corrigeant les méfaits du libéralisme outrancier que nous connaissons aujourd'hui; en ce sens, notre pays a un rôle important à jouer.

Pour revenir aux événements qui ont secoué Genève, on peut comprendre que le Conseil d'Etat soit excédé et que son président ait été amené à faire quelques déclarations à la presse qui ont froissé certains députés qualifiés de «naïfs»...

Des voix. «Niais»! «Niais»!

M. John Dupraz. Nous ne nous permettons pas de qualifier le Conseil d'Etat de grand dadais, car nous avons beaucoup trop de respect pour la fonction et les personnes qui accomplissent cette lourde tâche à la tête de l'exécutif de notre République et canton de Genève. (Remarque et rires.) Monsieur Hausser, je vous interdis de rire, lorsque je tiens des propos sensés et pesés; vous êtes un des responsables de cette manif', un des «fouteurs» de pagaille... (Brouhaha.)

En présence de ces deux résolutions - le débat de fond étant cette jeunesse en détresse qui s'exprime de façon violente, casse et nous interpelle - ne pourrions-nous pas réunir un petit groupe de rédaction pour proposer une seule résolution ? Trouver une solution pour que le Conseil d'Etat adjoigne à sa commission d'experts un représentant par parti siégeant dans ce Grand Conseil, sans choisir forcément des députés ?

Nous pourrions trouver une solution constructive à ces problèmes dramatiques en réunissant un groupe de travail qui cherche la vérité. Il ne sert à rien de mener un combat de politique politicienne sur ces résolutions. Je suis favorable à une solution plus consensuelle qui rejoindrait celle du Conseil d'Etat et lui adjoindrait un représentant par parti, car dans les partis politiques il y a aussi des gens qui connaissent ces problèmes.

Je vous propose, Monsieur le président, de suspendre les débats sur ces deux résolutions, pour autant que le Grand Conseil et le Conseil d'Etat soient d'accord, afin qu'un membre par parti et les chefs de groupe se réunissent pour trouver une résolution commune.

Le président. Je mettrai aux voix votre proposition en temps voulu, Monsieur le député.

M. Christian Ferrazino (AdG). Tout en écoutant la proposition de M. Dupraz, j'ai pris connaissance du projet de résolution de son groupe. Ceux qui ont fait de même auront compris que le groupe radical, après s'être gratté la tête sur les violences que nous avons connues, a décidé d'intervenir. Il vaut la peine d'examiner la résolution signée par le groupe au complet. Elle invite le Conseil d'Etat «à mener une analyse en profondeur de ces événements afin de mieux comprendre cette soudaine apparition de la violence urbaine.» En d'autres termes, les radicaux demandent au gouvernement de réfléchir !

Je suis d'accord avec vous, Monsieur Dupraz : en lisant les interviews données par le président du gouvernement, qui est assez proche du groupe que vous représentez... (Rires.) ...et lance des slogans populistes dans les gazettes du dimanche, il m'apparaît effectivement qu'il ne réfléchit pas beaucoup. Vu ses fonctions de chef du gouvernement et de la police, on ne peut pas lui laisser manier le bâton s'il n'entend pas réfléchir sur le pourquoi du comment des derniers événements. Or quand M. Ramseyer lit un texte, certains l'ont relevé, ses propos sont un peu plus contenus. (Brouhaha.) Vous invitez le gouvernement à réfléchir, Monsieur Dupraz, mais vous pouvez également le faire ! L'exercice n'est pas difficile.

M. Moutinot l'a déclaré : que l'on soit pour ou contre, la commission d'experts proposée par le Conseil d'Etat est nommée et fera son travail. Il arrive fréquemment qu'un gouvernement se décharge sur une commission d'experts, mais nous, parlementaires, n'entendons pas nous décharger sur d'autres et sommes déterminés à attaquer à bras-le-corps ce problème pour tenter de le comprendre. On ne peut se contenter de faire des déclarations du genre de celle de M. Balestra, auxquelles j'ai déjà fait allusion, qui consistent à invoquer un certain nombre de principes et exclure les casseurs et les voyous. On ne peut pas résumer la situation sociale explosive de ces derniers jours - qui ne peut que s'amplifier à la suite de tels propos - en l'assimilant à un phénomène de voyouterie.

Notre société sécrète des gagnants et des perdants, et il est assez cocasse que certains s'étonnent que ces deux catégories n'aient pas les mêmes habitudes et les mêmes comportements. M. Clerc a rappelé que les perdants subissent quotidiennement la violence de cette société. Voilà le problème que nous devons aborder plus en profondeur, au-delà des invectives des uns et des autres qui ne font pas beaucoup avancer le débat. La nécessité d'une commission parlementaire s'impose, afin que nous puissions nous-mêmes désigner les personnes, le cas échéant les experts, que nous entendons consulter. Sur la base de leurs déclarations, nous pourrons prendre un certain nombre de décisions dans ce parlement.

Comme Mme Bugnon, je ne fais pas confiance à la nomination d'experts par une personne ayant tenu les propos rapportés par la presse de dimanche dernier. Nous nous abstiendrons sur le projet de résolution du groupe radical. Que le gouvernement réfléchisse, nous n'y sommes pas opposés et souhaitons même qu'il le fasse plus souvent, mais le parlement a aussi un rôle à jouer.

Lorsque nous votons, cela doit avoir une signification. Aussi nous vous demandons de voter le projet de résolution de l'Alternative, afin de pouvoir rapidement constituer une commission parlementaire, commencer les travaux et prendre les mesures que nous jugerons utiles.

M. Chaïm Nissim (Ve). Plusieurs de mes préopinants se sont exprimés non pas à propos des casseurs ou des violences mais de l'OMC à laquelle M. Balestra a adressé ses félicitations en soulignant la nécessité de son rôle au niveau mondial. MM. Blanc et Dupraz étaient d'un autre avis : ils refuseraient plutôt l'OMC et regrettent que les socialistes aient vu trop tard les problèmes qui se poseront aux plus pauvres, aux paysans notamment, tout en souhaitant notre participation afin de pouvoir modifier les décisions.

J'ai lu l'interview passionnante de M. Ruggerio auquel «Le Courrier» consacrait une page entière voilà un mois environ. Selon son président, le but de l'OMC est de «maximiser» les flux financiers au niveau de la planète. «Maximiser» ! En se fixant cet unique objectif, il oublie bien sûr la paupérisation et l'écologie, mais il y a pire : il s'agit d'un mythe technocratique exactement de même nature que celui qu'ont voulu nous imposer les ingénieurs nucléaires voilà vingt-cinq ans à propos de Malville. En «maximisant» la production d'électricité, ils pensaient «maximiser» également le bien-être global, mais ils se sont doublement trompés : ils ont oublié le problème de la production de déchets radioactifs et, sur le fond, ce n'est pas en «maximisant» une production qu'on accroît le bien-être global. Au contraire, c'est en réfléchissant avec d'autres paradigmes.

Nous devons être présents à l'OMC pas seulement pour l'humaniser et veiller à ce que les plus pauvres et l'écologie soient pris en considération mais pour changer son but. Il ne s'agit pas de «maximiser» les flux financiers et commerciaux mais de les réguler et d'harmoniser le commerce mondial.

M. Régis de Battista (S). Je regrette toutes les critiques adressées à MM. Hausser et Pagani et tiens à remercier ce dernier de son témoignage. Il mérite notre respect pour être venu témoigner des événements qu'il a vécus. D'autres responsables d'associations essaient d'intervenir de la même façon pour prévenir les dérapages pendant les manifestations. Je voudrais donc que les critiques cessent à leur sujet.

Le parti socialiste et sa section genevoise ont pris des positions différentes; il y a des réflexions au niveau local et national. M. Dupraz doit arriver à comprendre qu'en démocratie le canton de Genève puisse être minoritaire.

Lors des interventions de mes collègues de droite, j'ai constaté leur ignorance de certains faits : leurs enfants ont peut-être participé aux manifestations, la contestation n'est pas une affaire d'âge. Par mesure de prévention, il faut essayer de comprendre qui sont les casseurs et ce qui se passe sur le terrain. C'est trop facile de rapporter des propos de presse ! Je vous convie à venir aux prochaines manifestations à Genève et à tenter d'intervenir au lieu de vous borner à critiquer !

Quant à la résolution, le Conseil d'Etat ne peut pas proposer lui-même une commission ou un groupe d'experts, car il est juge et partie et, vu les positions de M. Ramseyer, ce n'est pas acceptable. Il nous appartient, à nous députés, de choisir les experts que nous voulons entendre. Et nous entendrons aussi le Conseil d'Etat sur la manière dont il a travaillé. Voilà l'enjeu !

Enfin, je tiens à remercier l'Action mondiale des peuples qui, dans des moments difficiles, a réussi à organiser des manifestations pacifiques. Il y a eu des dérapages à cause de cent vingt à deux cents casseurs, mais il y en a eu d'autres au cours de manifestations que vous avez vous-mêmes organisées. L'objectif de l'AMP était de mettre en évidence un enjeu important de l'OMC et elle a atteint son but : la population genevoise, ignorante du problème, réfléchit enfin sur le sujet. Il est vrai que les dérapages coûtent cher et qu'il faut trouver les responsables, mais en faisant preuve d'une certaine modération et grâce à une commission ad hoc composée de parlementaires et d'experts choisis par les parlementaires.

Le président. Je rappelle qu'une des règles de bienséance de notre Grand Conseil exige que l'on se présente dans l'enceinte la tête décoiffée. Je prie donc la personne qui porte un chapeau de bien vouloir l'ôter. Merci !

M. Bernard Lescaze (R). Nous sommes en présence de deux résolutions et, sur le plan strictement parlementaire, c'est d'elles dont nous devons débattre. Je regrette que certains prennent ce Grand Conseil pour une tribune servant à prolonger les débats sur les affrontements de la semaine dernière.

De façon très claire, le groupe radical a demandé au Conseil d'Etat d'entamer une réflexion sur ces événements et, de ce point de vue, la déclaration du président du Conseil d'Etat le satisfait entièrement. La commission ou le groupe d'experts proposé aboutira plus sûrement à cette véritable réflexion en profondeur que vous prétendez vouloir mener avec une commission parlementaire.

En réalité, si je dis: «que vous prétendez vouloir mener», c'est que votre commission parlementaire n'entend faire qu'une seule chose : le procès politique de la police. De cela, Mesdames et Messieurs les députés, nous n'en voulons pas ! Nous sommes opposés à ce type de commissions parlementaires qui n'apportera rien de concret ni de précis mais qui vous permettrait de mener votre action politique de déstabilisation et de déstructuration.

Les propos qui viennent d'être tenus, les remerciements adressés par les bancs de la gauche et de l'extrême-gauche à l'Action mondiale des peuples, sont une insulte à la population genevoise... (Brouhaha.)... et vont exactement à fin contraire des mouvements que vous prétendez promouvoir. Nous ne vous suivrons pas sur cette voie et voterons contre le projet d'enquête parlementaire. Selon toutes probabilités, nous refuserons de siéger dans cette commission qui n'aboutira à rien et demandons le vote nominal sur cette résolution, car nous n'entendons pas faire le procès politique des serviteurs de l'Etat, que vous représentez comme nous, Mesdames et Messieurs les députés !

M. Nicolas Brunschwig (L). Dans son discours prononcé à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'OMC, M. Clinton déclarait que les aspects sociaux et environnementaux devaient être pris en considération et représentaient même la priorité de l'OMC. Tout le monde a apprécié son intervention, même M. Castro a pris des notes ! (Brouhaha.) C'est dire que l'OMC est le lieu privilégié pour établir un dialogue entre les nations et trouver un consensus permettant de déterminer le niveau de libéralisme à atteindre par le commerce mondial ainsi que les autres aspects à prendre en considération. Les récentes manifestations n'ont dès lors pas réellement de lien avec les sujets traités qui n'ont servi que de prétextes.

En tout état de cause, le groupe libéral refusera les deux résolutions présentées aujourd'hui. En revanche, il soutient la position du Conseil d'Etat telle qu'elle ressort de la déclaration faite par son président, M. Ramseyer, et des précisions apportées par M. Moutinot.

M. Gilles Desplanches (L). A M. Pagani qui nous a fait part de ses tentatives pour retenir les casseurs j'aimerais répondre que les nombreux commerçants ayant eu leurs vitrines cassées ne semblent pas bénéficier de ses largesses. De plus, il n'y avait pas seulement cent à deux cents casseurs mais plutôt huit cents dont certains étaient masqués et traînaient des chariots chargés de projectiles destinés à la police.

Il est parfaitement justifié que la police ait cherché à se défendre et l'on ne peut pas impunément, dans ce parlement, attaquer ces fonctionnaires et les accuser d'avoir osé préserver l'ordre à Genève.

Je rejoins donc la position du Conseil d'Etat qui vise à créer une commission extraparlementaire composée si possible non de politiciens mais d'experts.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je ne sais pas si nous avons dans ce parlement des députés «niais», mais nous avons en tout cas des députés qui ne savent pas très bien lire ! Je pense en particulier à M. Lescaze.

Où lisez-vous, Monsieur, que nous voulons une commission parlementaire pour enquêter, juger et condamner la police ? Je vous rappelle la première invite : «Quelles sont les causes qui peuvent être mises en relation avec les pillages et plus généralement avec la violence exprimée par certains jeunes ? (L'oratrice est interpellée. Le président agite la cloche.) La police est-elle préparée à cette nouvelle forme de protestation ?»

Je ne vois là aucun jugement ou condamnation préalable de la police. Idem dans l'exposé des motifs où il est dit qu'on doit se poser des questions. Si vous affirmez d'ores et déjà, Monsieur Lescaze, que vous ne viendrez pas à cette commission, parce que vous avez la réponse à toutes ces questions, je trouve cela lamentable.

A la suite de l'intervention de M. Balestra, j'aimerais préciser deux points. Je ne reviendrai pas sur l'OMC : M. Clerc et d'autres ont clairement exposé notre avis. Premièrement, comme M. Balestra, je trouve que nous avons de la chance d'avoir le siège de cette organisation à Genève. Nous pouvons ainsi exprimer notre solidarité avec d'autres peuples très fortement victimes de l'OMC et manifester. Si le siège se trouvait aux Philippines, barricadé derrière des murs de protection, nous n'aurions pas grand-chose à dire.

Deuxièmement, nous avons des choses à faire savoir aux décideurs de l'OMC, et dans la réflexion qui doit être menée en commission - avec ou sans M. Lescaze - il faudra intégrer l'avenir de la Genève internationale qui doit se construire avec les organisations internationales et les missions diplomatiques. Il faudra donc les entendre au sujet des derniers événements.

M. Chaïm Nissim (Ve). Je voudrais inviter les excellents orateurs du parti radical à se mettre d'accord ! M. Dupraz, trouvant les deux résolutions voisines, propose qu'une sous-commission n'en fasse qu'une seule version, alors que M. Lescaze ne veut absolument pas entrer en matière, ni sur notre commission d'enquête ni sur notre résolution. Que les gens du parti radical se mettent d'accord !

M. Bernard Lescaze (R). Il faudrait d'abord que les textes soient lus correctement !

La préopinante socialiste s'est bien gardée de citer l'une des missions confiées à cette fameuse commission d'enquête parlementaire concernant la police : «Son comportement a-t-il été adapté en toute circonstance ?» Je prétends que cette formulation est une forme de préjugé, aussi je maintiens entièrement mes propos.

Par ailleurs, la même députée déclare un peu tardivement qu'il faudrait construire l'avenir de la Genève internationale avec ses organisations internationales. On aurait souhaité que les organisateurs des manifestations de la semaine dernière s'en préoccupent avant !

Quant aux prétendues contradictions relevées par le député Nissim, je constate que le parti radical a déposé à l'unanimité une résolution qui rejoint les décisions du Conseil d'Etat. Par ailleurs, Monsieur le député Dupraz a très justement répondu à certaines accusations fort désagréables et personnelles en tendant la perche à cette partie du parlement qui veut faire un procès politique, mais nous n'avons pas entendu le moindre propos sur les bancs de la gauche pour soutenir la résolution radicale. Or ces résolutions n'étaient pas absolument contradictoires et, dans ces conditions, nous maintenons absolument nos positions.

Pas au mieux de sa forme, M. le député Ferrazino a cru pouvoir ironiser à ce sujet... (Brouhaha.) Mais, après les déclarations tonitruantes de certains députés libéraux, je suis encore plus étonné de la déclaration de M. Brunschwig qui ne soutiendra pas la résolution radicale. Si c'était le cas, ayant obtenu entière satisfaction du Conseil d'Etat, nous veillerons à la retirer.

M. Albert Rodrik (S). Avant de passer au vote, et pour autant que dans d'autres secteurs que l'Alternative on soit tenté de lire les textes déposés, je voudrais affirmer que pour le groupe socialiste les procès sont faits par la justice, qu'il s'agisse d'un manifestant, d'un casseur ou d'un agent de police. S'il y a une chose que le parlement ne doit pas faire, c'est la justice à la place de la justice. A cela, nous tenons.

S'il y a une signature du groupe socialiste sur cette résolution, cela signifie que nous ne prêterons pas la main pour permettre au parlement de se substituer au pouvoir judiciaire.

Si tant est que le Conseil d'Etat constitue un groupe d'experts pour élucider la chose, il fait son travail.

Si tant est que le groupe radical veut que le gouvernement réfléchisse - nous avons fondé aujourd'hui même avec quelques-uns la Ligue des citoyens pour faire réfléchir les gouvernants - nous sommes tout à fait pour.

M. Ferrazino a déclaré que son groupe s'abstiendrait. Nous le suivrons sur la résolution radicale, parce qu'il nous semblait que les élus du 16 novembre avaient une culture de réflexion préétablie et donc nul besoin de la motion radicale. Mais s'il y a nécessité, on prêtera main-forte à cette incitation à la réflexion du gouvernement.

Je vous le répète : le groupe socialiste a signé cette résolution, parce qu'il veut que le parlement prenne ses responsabilités face au déroulement des événements et à la capacité des uns et des autres d'affronter de telles situations, et non pour faire le procès de qui que ce soit. La justice est là pour ça.

Une telle résolution n'a de sens que si elle est l'émanation d'un parlement pas trop divisé. Je ne vois pas pourquoi M. Lescaze dit qu'il sera absent. Elus du peuple, nous devons tous ensemble comprendre le pourquoi et le comment de ce que Genève a vécu pendant cinq jours.

Si vous voulez voter contre cette résolution, faites-le ! Mais nous, nous n'entendons pas faire de procès à qui que ce soit; les procès sont le fait de la justice.

Le président. Monsieur le député Dupraz, maintenez-vous votre proposition de suspendre la séance pour rédiger une seule résolution ?

M. John Dupraz (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, une suspension de séance n'est pas nécessaire : on pourrait confier la rédaction d'un texte commun à un groupe où chaque parti serait représenté par un de ses membres, et voter cet après-midi.

Je vous demande de mettre aux voix cette proposition. Si, malgré nos propositions qui tendent à un consensus, ce parlement n'en veut pas, ce que je crains beaucoup vu l'état d'esprit de certaines personnes notamment de l'Alliance de gauche, cette commission d'enquête parlementaire tournera en réquisitoire contre la police.

Le président. Je vous donne la parole uniquement sur cette question, Madame la députée Bugnon !

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Uniquement sur cette question, Monsieur le président ! Je propose que nous votions d'abord : si ces deux résolutions passaient, la question se poserait; si une seule passait, elle ne se poserait pas.

Le président. La proposition de M. Dupraz étant maintenue, je suis obligé de la mettre aux voix, vous en conviendrez, Madame !

M. John Dupraz (R). Je m'aperçois que la proposition de Mme Bugnon n'est pas éloignée de la mienne, mais elle veut voir, premièrement, si les deux résolutions passent la rampe de ce parlement.

Procédons au vote, nous verrons ensuite, Monsieur le président !

M. Claude Blanc (PDC). Je suppose que nous commençons par la résolution R 370 ?

Le président. C'est cela, Monsieur le député.

M. Claude Blanc. Avant de procéder au vote, je vous remets un amendement qui consiste à ajouter un troisième alinéa et s'énonce comme suit :

«Etablir le rôle joué par certains responsables politiques et certains fonctionnaires, en particulier ceux du DIP, et dans quelle mesure l'action de ces derniers est compatible avec le devoir de leur charge.»

Pour cet amendement ainsi que pour le vote final, je demande l'appel nominal. (Appuyé.)

Le président. Nous allons procéder au vote de l'amendement de M. Blanc.

Celles et ceux qui l'acceptent répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 32 oui.

Ont voté non (48 ) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolorès Loly Bolay (AG)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Debelle (S)

Bernard Clerc (AG)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

John Dupraz (R)

René Ecuyer (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Alexandra Gobet (S)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

René Longet (S)

Pierre Meyll (AG)

Louiza Mottaz (Ve)

Chaïm Nissim (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Albert Rodrik (S)

Martine Ruchat (AG)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Louis Serex (R)

Jean Spielmann (AG)

Pierre Vanek (AG)

Alberto Velasco (S)

Salika Wenger (AG)

Ont voté oui (32) :

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Jacques Béné (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Christian de Saussure (L)

Gilles Desplanches (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Pierre Froidevaux (R)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Yvonne Humbert (L)

Bernard Lescaze (R)

Olivier Lorenzini (DC)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Walter Spinucci (R)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Personne ne s'est abstenu.

Etaient excusés à la séance (16) :

Bernard Annen (L)

Janine Berberat (L)

Anne Briol (Ve)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Hervé Dessimoz (R)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Luc Gilly (AG)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

Armand Lombard (L)

Micheline Spoerri (L)

Alain Vaissade (Ve)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Etaient absents au moment du vote (3) :

Roger Beer (R)

Henri Duvillard (DC)

Christine Sayegh (S)

Présidence :

M. René Koechlin, président.

M. Claude Blanc (PDC). Sans les nommer, je constate que certains députés ont voté en contradiction avec l'article 24.

Une voix. Des noms!

M. Claude Blanc. Il se trouve qu'on n'a pas le droit de voter quand on est directement concerné, Monsieur Vanek ! (Brouhaha.)

Le président. Ce n'est pas possible, Monsieur Blanc, puisqu'il y a incompatibilité entre le mandat de député et le mandat de fonctionnaire ! Maintenez-vous votre demande d'appel nominal pour le vote de la résolution ?

M. Claude Blanc. J'ai fait allusion aux responsables politiques et non aux députés. Or des députés siégeant dans ce parlement et visés par mon amendement ont voté contre... (Brouhaha.)

Le président. Bon ! Maintenez-vous votre demande d'appel nominal, Monsieur le député ? Oui. Je mets donc aux voix la résolution R 370... Monsieur le député Vaucher?

M. Olivier Vaucher (L). Comme je l'ai dit dans ma précédente intervention, je propose un autre amendement qui devrait pouvoir rallier peut-être plus de personnes dans cette enceinte. Simple, il n'ajoute qu'un mot à la résolution R 370 qui s'énoncerait comme suit :

«Résolution pour la nomination d'une commission d'enquête extraparlementaire...»

Cette commission sera composée de tous les intervenants possibles afin de trouver une solution aux problèmes que nous avons vécus.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Le président. Nous allons procéder au vote de la résolution 370. Celles et ceux qui acceptent le projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

La résolution 370 (mise sur pied d'une commission d'enquête parlementaire) est adoptée par 44 oui contre 36 non.

Ont voté oui (44 ) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolorès Loly Bolay (AG)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Debelle (S)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

René Ecuyer (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Alexandra Gobet (S)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

René Longet (S)

Pierre Meyll (AG)

Louiza Mottaz (Ve)

Chaïm Nissim (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Albert Rodrik (S)

Martine Ruchat (AG)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Jean Spielmann (AG)

Pierre Vanek (AG)

Alberto Velasco (S)

Salika Wenger (AG)

Ont voté non (36) :

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Roger Beer (R)

Jacques Béné (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Bernard Clerc (AG)

Christian de Saussure (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

John Dupraz (R)

Pierre Froidevaux (R)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Yvonne Humbert (L)

Bernard Lescaze (R)

Olivier Lorenzini (DC)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Louis Serex (R)

Walter Spinucci (R)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Personne ne s'est abstenu.

Etaient excusés à la séance (16) :

Bernard Annen (L)

Janine Berberat (L)

Anne Briol (Ve)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Hervé Dessimoz (R)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Luc Gilly (AG)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

Armand Lombard (L)

Micheline Spoerri (L)

Alain Vaissade (Ve)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Etaient absents au moment du vote (3) :

Juliette Buffat (L)

Henri Duvillard (DC)

Christine Sayegh (S)

Présidence :

M. René Koechlin, président.

Cette résolution est renvoyée à la commission ad hoc d'enquête parlementaire.

Elle est ainsi conçue :

Résolution

(370)

pour la nomination d'une Commission d'enquête parlementaire ad hoc sur les événements qui ont secoué Genève durant la commémoration du 50e anniversaire de l'OMC

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,considérant :

- les événements qui se sont déroulés à Genève autour de la conférence ministérielle de l'OMC ;

- les manifestations non violentes organisées par l'Action mondiale des peuples, et soutenues par de nombreuses associations et partis politiques ;

- les actes de violence qui ont eu de graves conséquences au niveau physique et matériel ;

- la nécessité pour tout un chacun de comprendre les raisons profondes qui sous-tendent la révolte exprimée par une partie de la jeunesse ;

- le risque de ne voir que les conséquences et de ne pas chercher à en comprendre les causes ;

Elle aura pour mandat de répondre aux questions suivantes et de proposer des mesures concrètes :

1. Quelles sont les causes qui peuvent être mises en relation avec les pillages et plus généralement avec la violence exprimée par certains jeunes ?

2. La police est-elle préparée à cette nouvelle forme de protestation et son comportement a-t-il été adapté en toutes circonstances ?

La Commission aura toute latitude d'élargir le champ des questions, de procéder à des auditions et de s'adjoindre les services de spécialistes, notamment sociologues.

La Commission rendra son rapport au Grand Conseil au plus tard le 30 novembre 1998.

Le président. Cette commission est composée de Mmes et MM. Gilles Desplanches, Michel Halpérin, Geneviève Mottet-Durand, pour le parti libéral, Fabienne Blanc-Kühn, Marianne Grobet-Wellner, Elisabeth Reusse-Decrey, pour le parti socialiste, Dolorès Loly Bolay, Jeannine de Haller, Rémy Pagani, pour l'Alliance de gauche, Bernard Lescaze, Pierre-Pascal Visseur, pour le parti radical, Claude Blanc, Jean-Claude Vaudroz, pour le parti démocrate-chrétien, Fabienne Bugnon et David Hiler pour le parti des Verts.

Je mets aux voix la résolution 371 proposée par le groupe radical.

Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat.

Elle est ainsi conçue :

Résolution

(371)

relative aux émeutes qui ont marqué le 50e anniversairede l'Organisation mondiale du commerce

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant:

- que Genève possède une longue tradition d'accueil d'organisations internationales et d'organisations non gouvernementales, laquelle ne doit sous aucun prétexte être remise en question;

- que l'anniversaire de l'Organisation mondiale du commerce fut une excellente occasion pour Genève et pour la Confédération de faire entendre leurs voix sur la scène mondiale;

- que nous devons déplorer les scènes de violence et de pillage qui ont frappé notre canton à cette occasion, malgré l'action diligente de la police cantonale aidée des Confédérés,

invite le Conseil d'Etat

à mener une analyse en profondeur de ces événements afin de mieux comprendre cette soudaine apparition de la violence urbaine.

M. Nicolas Brunschwig (L). Etant donné que les deux résolutions ont été acceptées, il faudrait voter la proposition de M. le député Dupraz.

Le président. Monsieur le député, maintenez-vous votre proposition ?

M. John Dupraz. Oui, Monsieur le président.

Le président. Dans ce cas, je mets aux voix la proposition d'intégrer les deux résolutions en une seule.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). La résolution que nous avons très largement votée demande au Grand Conseil de mettre sur pied une commission d'enquête parlementaire, alors que la résolution du groupe radical invite, elle, le Conseil d'Etat à mener une analyse en profondeur.

La réponse à cette dernière résolution vient d'être donnée par M. Moutinot qui a affirmé - il me corrigera si j'ai mal compris ses propos - que la décision du Conseil d'Etat étant prise le collège d'experts allait se mettre au travail, quelles que soient les décisions prises par le parlement aujourd'hui.

M. John Dupraz (R). Je suis étonné des déclarations tonitruantes de ma charmante collègue, Mme Fabienne Bugnon ! Selon elle, le Conseil d'Etat s'étant prononcé, le débat est clos ! Il va de son côté et le Grand Conseil, du sien !

Or je doute que le Conseil d'Etat refuse le dialogue et ne participe pas à des travaux de commission où l'on pourrait se mettre d'accord sur un texte ! Je demande donc au Conseil d'Etat s'il est possible de constituer dans un premier temps une petite commission ad hoc pour voir en une ou deux séances s'il est possible de trouver un accord englobant à la fois la proposition du Conseil d'Etat et celle de Mme Bugnon et de l'Alternative.

Si ce n'est pas possible, la commission d'enquête parlementaire suivra son chemin.

M. Pierre Vanek (AdG). Deux résolutions ont été votées.

La résolution 370 prévoit la création d'une commission d'enquête parlementaire ayant pour mandat de répondre à un certain nombre de questions et également toute latitude pour procéder à diverses auditions, y compris celle du Conseil d'Etat et du groupe d'experts qu'il entend nommer.

Il ne s'agit pas, aujourd'hui, de bricoler et de se mettre d'accord en une ou deux séances sur un texte, en vitesse, mais d'étudier l'ensemble du problème comme le propose cette résolution. Je ne vois donc pas l'utilité de la proposition de M. Dupraz, étant entendu que dans cette commission nous auditionnerons tout le monde et travaillerons sérieusement.

Des députés ont annoncé qu'ils ne participeraient pas à ces travaux, mais j'espère qu'ils reviendront sur cette décision un peu infantile de blocage et de refus du dialogue.

Il est temps de passer à la suite de l'ordre du jour.

Le président. Je ferais remarquer à M. le député Dupraz que les deux résolutions ayant été votées, la troisième qui serait conçue par le groupe qu'il appelle de ses voeux ne constituerait qu'une troisième résolution n'annulant aucune des deux autres.

Sur le plan formel, je ne comprends pas votre démarche, Monsieur le député. Veuillez vous expliquer !

M. John Dupraz (R). Monsieur le président, en politique tout est possible; vous le savez bien, la politique est irrationnelle. (Remarque.) Ecoute, Pagani, l'erreur dramatique qu'a faite la République, c'est de confier des gamins à un irresponsable de ton espèce !

Le président. Monsieur le député, adressez-vous à l'assemblée et non à M. Pagani !

M. John Dupraz. Il ne faut pas me chatouiller, je suis très délicat ! (Rires.)

L'idée est d'aller en commission. De toute façon, on va y aller ! S'il y a accord sur un texte, on présentera un bref rapport lors d'une prochaine séance et la commission poursuivra ses travaux. Je ne vois pas d'obstacle !

Le président. Mais les deux textes ont été votés, Monsieur, ils sont donc en force !

M. Nicolas Brunschwig (L). Monsieur le président, les procédures de vote n'ont pas été très claires.

Il était convenu que, dans le cas où les deux résolutions seraient adoptées, on voterait pour déterminer si une commission peut concilier ces deux résolutions. Deux intervenants, l'un de droite, l'autre de gauche, ont appuyé cette démarche, et c'est pour eux qu'on a voté comme cela.

Si l'on interrompt maintenant la procédure en disant que ces deux résolutions ayant été votées tout est terminé, je considère que ce parlement a été quelque peu trompé.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, j'estime que vous avez parfaitement raison sur le plan juridique.

A l'intention de M. Brunschwig, j'ajouterai que j'ai compris la proposition d'un vote éventuel de discussion d'un texte commun, dans l'hypothèse où l'une des résolutions, celle des radicaux, en particulier, présentée par un seul groupe, n'aboutissait pas. Dans la mesure où les deux ont abouti, chacun a eu satisfaction.

Je tiens à relever que ces deux résolutions ne sont pas contradictoires mais complémentaires. Comme cela a été fort justement relevé, l'une demande une intervention au niveau du Grand Conseil par la création d'une commission d'enquête; l'autre s'adresse au Conseil d'Etat.

M. Dupraz a donc obtenu totale satisfaction : même si sa résolution aux yeux de certains paraît inutile, elle a été votée et demande au Conseil d'Etat de faire le travail de réflexion qui est le sien.

L'autre résolution demande la création d'une commission parlementaire.

Procédons au vote, Monsieur le président, pour liquider ce débat le plus rapidement possible ! Pour notre part, nous ne voyons aucune raison de créer ce groupe : nous sommes déjà submergés de travail dans ce parlement. Aujourd'hui, jeudi, nous siégeons toute la journée pour essayer de nous mettre à jour. Alors, de grâce, Monsieur Dupraz, ne nous suggérez pas de réunions supplémentaires pour des affaires acquises ! Il n'y a pas de contradiction entre les deux textes.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). La résolution des radicaux a été envoyée au Conseil d'Etat. Si nous avions voulu procéder de la sorte, il aurait fallu qu'elle soit renvoyée en commission, en l'occurrence à la commission ad hoc que nous venons de créer. Ce vote est sans objet !

Le président. Je me suis efforcé d'expliquer cela à M. le député Dupraz, mais comme il maintient sa proposition je la mets aux voix !

M. John Dupraz (R). Je retire ma proposition ! (Applaudissements.)

5. Communications.

Le président. Nous poursuivons au point des communications.

Notre collègue Mme Loly Bolay-Cruz précise que, en ce qui concerne le point 85 de la séance du Grand Conseil du 20 mars, la résolution 362 «Pour la réhabilitation des Brigadistes suisses et des anciens résistants qui ont combattu en Espagne et en France contre les forces fascistes et nazies», elle avait demandé son renvoi à l'Assemblée fédérale et non au Conseil fédéral comme indiqué dans le procès-verbal des séances des 19 et 20 mars.

Il est pris acte de cette correction et la résolution 362 sera acheminée à l'Assemblée fédérale.

Le département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures adresse aux personnes que cela intéresse le programme des séances d'information thématique sur le programme communautaire INTEREEG II Région Rhône-Alpes/Suisse.

Ce document est à votre disposition sur la table de la salle des Pas Perdus.

J'ai le plaisir de vous annoncer l'engagement d'un nouvel huissier attaché au Conseil d'Etat et de vous présenter M. Emile Tinner. (Applaudissements.)

6. Correspondance et pétitions.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 776
Copie de la lettre que le conseiller fédéral Adolf Ogi a adressée au conseiller d'Etat Gérard Ramseyer au sujet de la cérémonie de la signature, dans la salle de l'Alabama, de l'acte de fondation du «Centre international de déminage humanitaire». ( )C776

Il en est pris acte.

C 777
Le conseiller d'Etat M. Gérard Ramseyer nous fait part de ses préoccupations concernant l'IN 109 «Genève, République de paix» quant à l'absence de décision du Grand Conseil du 23 avril, ce qui équivaut à une décision de validation de l'initiative, et nous transmet une note juridique de Me Manfrini à ce sujet. Il nous informe que cette affaire pourrait être portée devant le Tribunal fédéral par la voie qui comporte une autre interprétation du délai imparti au Grand Conseil. ( )C777

M. Bernard Lescaze(R). Il faudra demander au président du Conseil d'Etat s'il est bien sûr du numéro de son initiative. A ma connaissance, le fond de cette initiative est traité en ce moment par une commission ad hoc. En effet, après le courrier reçu voilà quelques semaines, nous avions conclu, à la commission législative, de la renvoyer à cette commission.

Le président. Il s'agit d'un problème qui porte sur la forme, Monsieur le député, et non sur le fond, d'un problème de délai et de son appréciation. Raison pour laquelle le Bureau se penchera sur cette question et reprendra un avis de droit autre que celui qu'il avait déjà pris, lorsqu'il a décidé de proposer au Grand Conseil de renvoyer cette initiative en commission pour qu'elle soit traitée sur le fond. Mais le problème étant soulevé par le Conseil d'Etat, nous sommes bien obligés d'y répondre.

M. Bernard Lescaze. Mais elle est valide !

M. Christian Grobet (AG). Cette question est effectivement importante, et il n'appartient en tout cas pas au Bureau de se substituer au plénum, Monsieur le président ! Avant les séances du Grand Conseil, vous avez le droit de débattre au sein du Bureau de questions de procédure et autres, mais vous n'avez en tout cas pas le droit de prendre une décision sur cette question.

J'insiste en me permettant de vous rappeler que l'ancien Bureau a commis un certain nombre d'erreurs, provoquées également par celles du Conseil d'Etat. Nous ne sommes pas prêts à admettre que de nouvelles erreurs soient commises, ni que cette question d'initiative soit débattue maintenant, alors qu'un arrêt du Tribunal fédéral a été évoqué, à l'occasion des communications...

Le président. Il n'est pas question de débattre, Monsieur !

M. Christian Grobet. Ah, vous en avez peut-être un peu trop dit, Monsieur le président ! Pour que toutes ces questions soient clarifiées au niveau du plénum, il faut prévoir un point précis à l'ordre du jour pour débattre de cette initiative. M. Gilly, rapporteur, a malheureusement des problèmes de santé, mais il nous a fait savoir qu'il participera à ce débat.

Je demande formellement que le Bureau se préoccupe des questions de procédure et inscrive cette initiative à un ordre du jour, afin de la traiter autrement que dans une salle à moitié vide.

Le président. Monsieur le député, nous n'avons pas dit - et je n'ai pas dit - que le Bureau trancherait d'une manière quelconque. Mais, ayant reçu cette lettre, le Bureau est bien obligé d'en étudier les termes et d'en comprendre le sens juridique.

Si une entité comme le Conseil d'Etat décide de recourir contre une décision du Grand Conseil, il peut le faire. Pour le moment, on nous informe qu'il y a eu vice de forme. Je vous transmets cette information, mais nous n'avons pris aucune décision !

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, c'est une affaire pourtant relativement simple !

Le Tribunal fédéral a rendu un jugement dont nous avons pris connaissance, mais nous avons estimé que les termes n'étaient pas clairs. En particulier, le Tribunal fédéral ne donnait pas la marche à suivre pour reprendre les travaux parlementaires de manière normale.

Nous avons donc d'une part interrogé le Tribunal fédéral et d'autre part pris l'avis de droit de Me Manfrini... (Brouhaha.) Cet avis de droit donne une marche à suivre qui n'est pas celle que le Grand Conseil a adoptée. En particulier, le Tribunal fédéral nous enjoignait de prendre une décision sur la recevabilité, alors même que la commission ne s'est pas saisie de la recevabilité mais du fond. Mais une commission ne peut pas travailler sur le fond si la recevabilité n'a pas été déterminée !

A notre sens, la décision n'a même pas été prise par le parlement : ce sont les chefs de groupe qui ont renvoyé le point de l'ordre du jour en commission. Nous avons donc de nouveau demandé au Tribunal fédéral de clarifier la situation et fourni à M. le président du Grand Conseil notre avis de droit. En effet, on ne peut pas discuter en commission ad hoc du fond de cette initiative tant que la question de la recevabilité n'a pas été tranchée : il s'agirait là, à nos yeux, d'une irrégularité. Les députés peuvent parfaitement penser que le cheminement adopté est juste, mais, à mon département, nous pensons que ce n'est pas exact et l'avons fait savoir à M. le président du Grand Conseil.

Par contre, il n'est pas question que le Conseil d'Etat ou mon département fasse recours. Cependant, tout citoyen de ce canton a toute latitude de le faire. Nous avons transmis la décision telle qu'elle nous a été communiquée par le Tribunal fédéral, mais il semble qu'il y ait divergence sur la manière dont ce jugement doit être interprété.

Le président. C'est une question d'interprétation du délai de réponse. Le Bureau et les chefs de groupe avaient considéré - et considèrent toujours jusqu'à avis contraire - que le délai étant dépassé la recevabilité de l'initiative était automatique. Raison pour laquelle, au mois d'avril, le Bureau et les chefs de groupe à l'unanimité ont considéré que cette initiative devait être renvoyée en commission pour être traitée sur le fond.

Le Conseil d'Etat conteste cette façon de procéder : à ses yeux, le délai n'est pas dépassé. S'agissant d'une interprétation de délai, nous devons, pour le moment, nous concentrer sur des avis de droit relatifs à cette interprétation.

Nous n'allons pas ouvrir un débat sur une interprétation de droit en plénière mais examiner, en premier lieu, la question en toute quiétude au sein du Bureau en considérant les avis de droit pour avoir la confirmation de la décision prise par le Bureau et les chefs de groupe, à savoir de faire renvoyer par ce Grand Conseil l'initiative en commission et de la traiter sur le fond.

Si les avis de droit donnent tort à l'interprétation faite par le Bureau et les chefs de groupe qui pensaient que les délais étant dépassés on ne pouvait plus se prononcer sur la recevabilité, nous reviendrons devant ce Grand Conseil pour vous faire part de tous les avis de droit que nous aurions reçus dans la mesure où ils convergeraient. Pour le moment, votre décision reste ce qu'elle a été au mois d'avril : cette initiative est renvoyée en commission pour y être traitée sur le fond.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose d'en rester là et de ne pas poursuivre un débat inutile. Pour le moment, il n'est pas question de remettre en cause la décision du Grand Conseil.

M. Christian Grobet(AdG). A vrai dire, je ne suis pas étonné des propos de M. Ramseyer. Dans cette affaire, le Conseil d'Etat se mêle de choses qui ne le regardent pas et a pris une position partisane, extrêmement désagréable en ce qui concerne le respect des droits populaires.

L'arrêt du Tribunal fédéral, Monsieur Ramseyer, est parfaitement clair. Si vous croyez devoir écrire au Tribunal fédéral pour demander des explications sur des considérants que tout le monde comprend, il n'est pas certain que ce dernier entre en matière; il sera intéressant de le savoir.

D'après les règles relatives au traitement des initiatives, le Conseil d'Etat a pour rôle à un moment donné de faire un rapport destiné au Grand Conseil sur leur recevabilité. Ce rapport ayant été fait sur la base de l'avis de droit partisan de Me Manfrini, le rôle du Conseil d'Etat s'arrête là. A partir de ce moment précis, le dossier est transféré au Grand Conseil, seule autorité compétente pour décider. Je suis choqué de voir actuellement le Conseil d'Etat essayer de s'occuper en coulisse de décisions qui ne sont pas de sa compétence. De surcroît, il sollicite des avis de droit - je serais curieux de savoir sur quelle ligne budgétaire - pour tenter d'étayer une thèse juridique déjà tranchée par le Grand Conseil qui a décidé de renvoyer cette affaire en commission.

On ne peut pas empêcher le Bureau de discuter ou de disserter sur le temps qu'il fera, mais je ne vois pas pourquoi, Monsieur Koechlin, vous entrez en matière sur cette lettre du Conseil d'Etat. Il serait souhaitable au demeurant que tous les députés reçoivent une copie de la lettre... (L'orateur est interrompu.) Ecoutez, c'est M. Lescaze, auquel je décerne souvent le premier prix de débrouillardise, qui m'a remis cela ...

Le président. Ce courrier a été distribué aux chefs de groupe, Monsieur le député !

M. Christian Grobet. J'ai beaucoup de respect pour Me Manfrini, mais - et là je m'adresse au nouveau Conseil d'Etat - il serait souhaitable que l'on casse le monopole des avis de droit qu'on sollicite exclusivement de la part d'un seul avocat de la place. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : cet avocat rend des avis sur mesure qui plaisent à celui qui demande l'avis de droit; il est engagé dans cette affaire. Cela, je ne suis pas d'accord de l'admettre.

Monsieur le président du Grand Conseil, vous avez déclaré que vous reverrez votre position en fonction des avis de droit. Quels avis de droit ? Celui, partisan, de Me Manfrini ? Ou voulez-vous encore engager les sous des contribuables pour solliciter un avis de droit auprès d'un second juriste ?

Tout cela est absurde, Mesdames et Messieurs les députés ! La décision du Grand Conseil doit être respectée ! Monsieur Ramseyer, une question posée par un membre de l'Alliance de gauche n'a jamais reçu de réponse : combien d'avis de droit ont été sollicités auprès de Me Manfrini ces quinze dernières années par le Conseil d'Etat ? Il y a eu tout d'abord le professeur Knapp qui faisait des avis de droit sur mesure, maintenant, c'est Me Manfrini ! Cela suffit !

Le président. Bien, Monsieur le député !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de ne pas ouvrir de débat sur cette question. Il s'agissait d'une simple communication, et il n'y a aucune modification de la décision du Grand Conseil; il reste maître de ses décisions.

J'invite la commission ad hoc à poursuivre ses travaux sur le fond, mais vous n'empêcherez pas le Bureau de tenir compte du courrier et d'y répondre. Pour le faire de façon avisée, un avis de droit dont nous vous informerons est nécessaire. Pour le moment, nous nous en tenons à la décision du Grand Conseil, et je vous propose de passer au point suivant.

Il en est pris acte. Le Bureau étudiera ce problème.

C 778
Nous avons reçu copie du courrier que l'association Artamis a adressé au Conseil d'Etat concernant des «arrestations collectives à Artamis, le 20 mai». ( )C778

M. Pierre Vanek(AdG). Je demande la lecture de ce courrier qui me semble d'actualité et utile pour contribuer à l'information de l'ensemble des députés qui sont dans cette salle.

Le président. Nous donnerons lecture de ce courrier dès que le secrétaire aura mis la main dessus... (Rires.)

lettre page 1

page 2

page 3

Il est pris acte de ce courrier.

Le président. Il est pris acte de ce courrier.

Par ailleurs, la pétition suivante est parvenue à la présidence :

P 1202
Pétition : Pour donner à l'Ecole de culture générale les moyens d'enseignement au 10e degré. ( )  P1202

Elle est renvoyée à la commission des pétitions.

Mme Jeannine de Haller(AdG). Je demande lecture de cette pétition.

M. Olivier Vaucher (L). Excusez-moi, Monsieur le président, j'interviens au sujet de la demande de lecture d'une pétition ! Sauf erreur, cela n'est pas réglementaire. De plus, si nous devions lire toutes les pétitions, je ne vois pas ce que cela nous apporterait...

Le président. Le règlement prévoit de lire et la correspondance et les pétitions sur la demande expresse de députés si cette demande est appuyée, et je suppose qu'elle l'est. Veuillez donc procéder à la lecture de la pétition, Monsieur le secrétaire ! (Brouhaha.)

lettre manuscrite page 1

page 2

Pétition

L'Ecole de culture générale a été créée pour répondre aux besoins d'une population particulière d'élèves. Une forte majorité de cette population est particulière à plusieurs titres. Il s'agit en effet:

• de jeunes qui terminent une scolarité obligatoire en section "; générale " des C.O. et qui, le plus souvent, n'ont pas le niveau pour entrer dans un collège ou à l'Ecole de commerce ;

• de jeunes qui ont cherché sans succès ou cherchent encore une place d'apprentissage ;

• de jeunes issus des milieux socio-économiques les moins favorisé ou de jeunes dont les parents sont des immigrés, et qui par conséquent ne sont pas totalement francophones.

Pour répondre de manière adéquate à ces profils d'élèves, l'Ecole de culture générale avait défini des quotas d'effectifs de classes qui permettent d'appliquer des stratégies pédagogiques évitant la sélection et offrant un maximum de chances de réussite aux élèves, particulièrement au niveau du 10e degré.

Si les prévisions pour la rentrée 1998-99 montrent clairement une augmentation encore plus forte d'élèves du 10e degré, il est impératif qu'aucune des classes du 10e degré ne dépasse l'effectif maximum de 16 élèves.

Le respect absolu de ce nombre d'élèves n'est certes pas la panacée, mais il est la condition sine qua non pour maintenir l'équilibre pédagogique nécessaire à la motivation des élèves, et à la reprise en mains par ces derniers d'un projet scolaire ou d'apprentissage sérieux.

Nous demandons que le Grand Conseil donne à l'Ecole de culture générale les moyens en postes d'enseignement pour qu'elle puisse assurer sa mission au niveau du 10e degré.

N.B. : 166 signatures

APJP

. .

7. Annonces et dépôts :

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

Le président. Nous suspendons nos travaux et les reprendrons à 10 h 15.

La séance est levée à 10 h.