Séance du jeudi 22 juin 2023 à 20h30
3e législature - 1re année - 2e session - 9e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Anne Hiltpold, Carole-Anne Kast et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes Nathalie Fontanet et Delphine Bachmann, conseillères d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Lara Atassi, Thierry Cerutti, Adrien Genecand, Danièle Magnin, Caroline Marti, Caroline Renold et Vincent Subilia, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Thomas Bruchez, Rémy Burri, Sami Gashi, Uzma Khamis Vannini, Thierry Oppikofer et Nicole Valiquer Grecuccio.

Annonces et dépôts

Néant.

E 2907-A
Prestation de serment de Philippe THELIN, élu juge à la Cour d'appel du Pouvoir judiciaire
E 2922-A
Prestation de serment de Tania SANCHEZ WALTER, élue juge suppléante au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant
E 2961-A
Prestation de serment de Fabio BURGENER, élu juge suppléant au Tribunal pénal
E 2882-A
Prestation de serment de Sibel UZUN, élue juge assesseure à la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice, représentant les groupements de locataires
E 2883-A
Prestation de serment de Charlotte VERMEIL et Francesco MODICA, élus juges assesseurs au Tribunal des baux et loyers du Tribunal civil, représentant les groupements de locataires
E 2894-A
Prestation de serment de Amel MERABET, élue juge assesseure à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers du Tribunal civil, représentant les groupements de locataires
E 2962-A
Prestation de serment de Charlotte SECHAUD, élue juge assesseure au Tribunal des baux et loyers du Tribunal civil, représentant les bailleurs
E 2964-A
Prestation de serment de Serge GARCIA, élu juge assesseur à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)

Mesdames et Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;

- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;

- de me conformer strictement aux lois;

- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;

- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;

- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»

Ont prêté serment:

Mmes et MM. Philippe Thélin, Tania Sanchez Walter, Fabio Burgener, Sibel Uzun, Charlotte Vermeil, Francesco Modica, Amel Merabet, Charlotte Séchaud et Serge Garcia.

La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)

R 1016
Proposition de résolution du Conseil d'Etat approuvant la modification de la composition des départements
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.

La présidente. Nous abordons notre premier point fixe, la R 1016, classée en catégorie II, trente minutes. Personne ne sollicite la parole, je mets immédiatement cet objet aux voix.

Mise aux voix, la résolution 1016 est adoptée par 44 oui (unanimité des votants) (vote nominal).

Résolution 1016 Vote nominal

IN 191
Initiative populaire cantonale 191 « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
IN 191-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative populaire cantonale 191 « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.

Débat

La présidente. J'appelle le deuxième point fixe, soit l'IN 191 et l'IN 191-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. La parole échoit à M. Cédric Jeanneret.

M. Cédric Jeanneret (Ve). Merci, Madame la présidente. La terre reçoit en une heure plus d'énergie du soleil que l'humanité n'en consomme en une année entière. Pendant des millénaires, les humains ont fonctionné en valorisant l'énergie solaire et ses dérivés: cycle de l'eau, vent et biomasse. Léonard de Vinci, Jean-Jacques Rousseau, Olympe de Gouges ont vécu dans un monde 100% renouvelable.

Puis, la révolution industrielle est arrivée, et nous sommes devenus dépendants d'énergies fossiles dont nous cherchons aujourd'hui à nous passer, comme cela a été confirmé par la votation sur le climat du week-end dernier, grâce à des mesures de sobriété énergétique, d'efficacité énergétique et à un recours accru aux énergies renouvelables.

Le plan directeur de l'énergie genevois mentionne que le photovoltaïque pourrait couvrir la moitié de la consommation d'électricité du canton. Or bien qu'il s'agisse d'une technologie complètement mature, nous en sommes loin, en comparaison avec l'Allemagne ou les Pays-Bas, par exemple, où 10% de l'électricité est déjà d'origine solaire. On peut s'interroger quant à l'opportunité de faire venir des capteurs de l'autre côté de la planète, mais à l'heure où certains envisagent de tapisser les Alpes de panneaux solaires, on ne peut plus remettre en question la pertinence d'en poser sur nos toits, à proximité des appareils consommateurs.

Les Verts souscrivent à l'objectif d'accélérer l'utilisation de l'énergie photovoltaïque dans le canton ainsi que le propose l'initiative 191, qui a été pour partie inspirée de la motion 2835 déposée l'an dernier par notre parti, mais nous préférons utiliser ce texte comme base pour un contreprojet qui permettra de prioriser les installations les plus rentables afin de viser un développement rapide, de valoriser les surfaces les plus prometteuses, notamment celles situées en zone industrielle, et d'éviter le surplus de bureaucratie qu'introduiraient les mécanismes de garantie de prêts et de tarifs de rachat envisagés par les initiants.

Chers collègues, nous vous recommandons de renvoyer cette initiative à la commission de l'énergie en vue de la rédaction d'un contreprojet basé notamment sur les éléments développés dans le rapport du Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

M. Jean-Pierre Tombola (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, cette initiative est dans l'air du temps, puisqu'elle a pour objet la transition écologique et la lutte contre le réchauffement climatique. L'IN 191 répond à des préoccupations réelles, tout comme la loi fédérale sur le climat et l'innovation, qui a été plébiscitée par la population genevoise - ou plutôt suisse - le 18 juin dernier, confirme la volonté politique de la Confédération s'agissant de la lutte contre le changement climatique et de la transition énergétique. L'IN 191 aborde donc des sujets d'actualité.

Le parti socialiste soutiendra le principe d'un contreprojet: nous sommes prêts à discuter de sa teneur, mais surtout nous veillerons à ce que les efforts déployés en faveur de la transition écologique, en l'occurrence l'installation de panneaux photovoltaïques, n'aient pas d'impact sur les locataires. Il est important que nous puissions évoquer cette question dans le cadre des travaux de la commission sur le contreprojet.

Cette initiative vient malheureusement un peu tard, puisque le Grand Conseil avait examiné, lors de la dernière législature, les possibilités d'allégement de certaines procédures, notamment l'accélération des procédures administratives. Cela étant, nous soutiendrons un contreprojet et travaillerons dans ce sens, tout en veillant, je le répète, à ce que les locataires ne subissent pas les conséquences des coûts des travaux en vue de la transition énergétique. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

M. Philippe Morel (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, l'initiative 191 est extrêmement louable, elle poursuit un but auquel nous aspirons tous. Son réalisme, en revanche, est un peu plus douteux. Je salue au passage les observations très factuelles du Conseil d'Etat, qui a émis des réserves quant aux obligations, à l'éligibilité des bâtiments, aux aspects financiers et aux garanties. Pour ma part, je voudrais formuler quelques commentaires généraux.

En Suisse, 40% de l'énergie consommée est de l'énergie électrique, dont environ 32% pour les transports - un tiers -, 28% pour les ménages et 20% pour l'industrie. On sait déjà que la part dévolue aux transports va augmenter significativement avec les modes de déplacement par voie électrique, que ce soit les voitures ou d'autres véhicules. L'énergie est produite à 60% par les barrages, avec les limitations qu'on connaît, à 35% par le nucléaire et les énergies fossiles et, actuellement, à 3,7% par le photovoltaïque. 0,4% de la production solaire fournit de l'énergie sous forme de chaleur; en ce qui concerne les éoliennes, c'est 0,2%, et nous avons en Suisse environ 40 éoliennes - il y en a plus de 1000 en Autriche.

Voyons un petit peu comment sont fabriqués ces fameux panneaux photovoltaïques que nous installons avec beaucoup de discernement chez nous: pour une grande partie - plus de 70% -, ils sont confectionnés en Chine et en Inde. Il faut des mines de quartz, et à partir du quartz chauffé à de très hautes températures, on extrait du silicium. Ces très hautes températures sont obtenues par le biais d'énergies fossiles, essentiellement le charbon. 3000 kilos de quartz fournissent environ une tonne de silicium, et une tonne de silicium permet la fabrication de quelque 1000 panneaux solaires d'un mètre sur un mètre. Pour cela, il faut 12 000 kilowatts-heure ou l'équivalent de 3922 kilos de charbon, et bien sûr qu'en Chine et en Inde, c'est le charbon qui est utilisé. C'est dire que la pollution est énorme pour fabriquer ces installations à partir du quartz et du silicium. De plus, d'autres produits dangereux sont utilisés.

La fabrication de panneaux photovoltaïques et leur provenance ont dès lors un impact écologique majeur, aussi s'agissant du transport de la Chine et de l'Inde jusqu'à nos maisons. Le recyclage constitue également un problème: si l'aluminium et le cuivre peuvent être recyclés, de même que le verre, ce n'est pas le cas du silicium. En Allemagne, en 2021, on comptait 150 000 tonnes de silicium dont on ne sait pas très bien quoi faire.

Ma conclusion est la suivante: bien sûr qu'il faut développer le photovoltaïque, mais il faut le faire chez nous; il s'agit d'un facteur économique important, cela peut stimuler des industries et c'est dans cette orientation-là qu'il faut s'inscrire. Mesdames et Messieurs, nous vous recommandons le renvoi de cette initiative à la commission de l'énergie. Merci. (Applaudissements.)

M. Stefan Balaban (LJS). Sur le principe, le groupe LJS accueille favorablement les projets visant à améliorer l'autonomie énergétique de notre canton. Développer l'installation de panneaux solaires est pertinent. Néanmoins, en l'état, cette initiative est trop restrictive et précise dans son application. De ce fait, un renvoi en commission est souhaité; les travaux nous permettront de prendre en compte ces éléments. Merci, Madame la présidente.

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat, à l'instar de tous les intervenants, partage les buts de l'initiative, mais insiste sur la nécessaire réflexion quant aux modalités de mise en oeuvre de celle-ci dans un contexte particulier. Il convient dès lors de la renvoyer en commission et d'élaborer un contreprojet pour affiner les questions pertinentes qui ont été soulevées. Merci.

La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat.

L'initiative 191 et le rapport du Conseil d'Etat IN 191-A sont renvoyés à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.

IN 192
Initiative populaire cantonale 192 « Initiative piétonne : pour un canton qui marche »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
IN 192-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative populaire cantonale 192 « Initiative piétonne : pour un canton qui marche »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.

Débat

La présidente. Voici le point fixe suivant: l'IN 192 et l'IN 192-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je donne la parole à Mme Marjorie de Chastonay.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'«initiative piétonne: pour un canton qui marche» promeut un moyen de transport 100% décarboné, bénéfique pour la santé, gratuit et qui favorise l'économie de proximité: la marche. Alors que Genève est la capitale suisse de la marche, ce mode de locomotion est négligé dans les politiques de mobilité. Dans notre canton, 40% des déplacements se font à pied; aucune autre agglomération du pays n'enregistre une part de mobilité piétonne aussi élevée.

Pourtant, il y a très peu de zones piétonnes ou à priorité piétonne, sans même parler de voies dédiées à la marche directes et continues. A un moment donné, nous sommes toutes et tous piétonnes et piétons. Or, tous les jours, sur notre territoire cantonal propice à ce moyen de transport, les obstacles sont nombreux: chaussées piétonnes interrompues, attente aux feux, trottoirs minuscules et j'en passe.

Cette initiative vise notamment la création d'axes forts piétons, tout comme il en existera, en parallèle, pour les vélos, auxquels ce parlement manifeste - ou en tout cas manifestait - un soutien politique, puisqu'il a récemment voté la création d'axes forts vélos pour plusieurs dizaines de millions. Une politique de mobilité piétonne, c'est également faire en sorte de ne pas empiéter sur les autres modes doux, dont le vélo, c'est réaliser le réseau cyclable et piéton de manière complémentaire afin que l'un ne prétérite pas l'autre, c'est prévoir une signalétique cyclable et piétonne spécifique. Il faut résoudre les conflits, nombreux, entre cyclistes et piétons en privilégiant les flux séparés. Ce texte cible donc le respect des flux, mais aussi l'accessibilité universelle, un principe qui implique un objectif d'équité et une approche inclusive.

Dans la perspective de l'accessibilité pour toutes et tous, pas seulement pour les PMR (personnes à mobilité réduite), mais aussi pour les personnes vieillissantes et les familles, cette initiative entend par ailleurs favoriser l'accès aux gares et autres infrastructures. Nous savons qu'à ce niveau-là, du moins en ce qui concerne les gares CEVA - l'ATE a réalisé un bilan il y a quelques mois -, il y a une grande marge d'amélioration.

En conclusion, avec le soutien du Conseil d'Etat, je vous recommande de soutenir cette initiative qui gravite autour de trois lois fondamentales en lien avec la mobilité: la LMCE (loi pour une mobilité cohérente et équilibrée), la LMD (loi sur la mobilité douce) et la LRoutes (loi sur les routes). Non seulement le texte s'articule autour de ces trois axes, mais surtout il marie mobilité et santé. Dès lors, je vous recommande de le renvoyer à la commission des transports. Merci. (Applaudissements.)

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Très brièvement, le Conseil d'Etat soutient pleinement cette initiative qui rejoint parfaitement sa vision en ce qui concerne la mobilité piétonne. Comme cela a été souligné, nous sommes toutes et tous piétons en premier lieu, avant d'utiliser un quelconque moyen de transport, et ce mode de déplacement mérite une protection et une attention suffisantes. Par conséquent, le Conseil d'Etat non seulement appuie le renvoi en commission, mais soutiendra également l'adoption de ce texte sans lui opposer de contreprojet, puisqu'il correspond très largement à ses orientations stratégiques en la matière. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

La présidente. Je vous remercie.

L'initiative 192 et le rapport du Conseil d'Etat IN 192-A sont renvoyés à la commission des transports.

IN 178-C
Rapport de la commission fiscale chargée de rédiger un contreprojet à l'initiative populaire 178 «Pour la réduction de l'impôt sur les véhicules»
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de majorité de M. Grégoire Carasso (S)
Rapport de première minorité de M. Sandro Pistis (MCG)
Rapport de deuxième minorité de M. Christo Ivanov (UDC)
PL 12888-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi de Francisco Valentin, Françoise Sapin, Florian Gander, Ana Roch, Jean-Marie Voumard, Thierry Cerutti, Daniel Sormanni, Christian Flury modifiant la loi générale sur les contributions publiques (LCP) (D 3 05) (Pour une imposition écoresponsable et équitable des véhicules motorisés)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de majorité de M. Grégoire Carasso (S)
Rapport de première minorité de M. Sandro Pistis (MCG)
Rapport de deuxième minorité de M. Christo Ivanov (UDC)

Premier débat

La présidente. Nous passons aux points fixes liés suivants: l'IN 178-C et le PL 12888-A. Ils sont classés en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Grégoire Carasso.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai le plaisir de représenter ici la majorité de la commission fiscale, une majorité qui rassemble - et je ne serai au moins pas contredit sur ce point - le parti socialiste, les Verts, Le Centre, le PLR et, en tout cas dans les travaux de commission, une partie du MCG.

L'initiative populaire cantonale 178, sur l'impôt auto, comme on le dit, a abouti en septembre 2021. Elle visait simplement - on pourrait ajouter «bêtement» - à diminuer de moitié l'impôt des véhicules à moteur, sans s'interroger, alors que c'était le voeu unanime de ce parlement, sur la pertinence de ce vieux système en vigueur à Genève.

Une petite délégation de la commission fiscale, composée - je les cite parce que le travail a été effectué en marge de la commission, et il a été assez intense - de Mme Sapin pour le MCG, de M. Zweifel pour le PLR, de M. Eckert pour les Verts, de M. Blondin pour Le Centre et de votre serviteur pour le PS, est arrivée à une proposition validée avec quasi cette même large majorité à la commission fiscale sur un contreprojet, qui s'inscrit dans la droite ligne, je vous le disais à l'instant, de la motion interpartis votée à l'unanimité du Grand Conseil en 2019, pour mémoire, la motion 2539.

Que demandait ce parlement unanime à l'époque ? De revoir le système d'imposition des véhicules et de l'actualiser autour de trois principes: la neutralité fiscale (cela ne devait représenter ni des impôts supplémentaires ni une baisse d'impôts), tenir compte des évolutions technologiques (le système n'est absolument pas adapté aux véhicules hybrides et électriques) et intégrer dans ces paramètres l'impératif de la lutte contre la pollution de l'air.

Le contreprojet qui vous est ici proposé, en quelques mots, répond à ces principes. Je les énonce brièvement. La commission fiscale a souhaité un système simple et facile à comprendre. Je le mentionne parce que le projet de l'époque du Conseil d'Etat ne l'était pas. Le principe simple est le suivant: les véhicules thermiques sont imposés sur le seul critère - et vous savez à quel point c'est un enjeu, ne serait-ce qu'au regard des accords de Paris - du CO2. Les véhicules électriques sont imposés sur le seul critère du poids. Et, grâce au fait que les véhicules hybrides, qui émettent peu de CO2, sont rangés dans la catégorie thermique et que le barème d'imposition pour les véhicules électriques sur le poids est particulièrement avantageux, nous avons là un système d'imposition qui est un réel incitatif sur le plan fiscal en faveur des véhicules hybrides et électriques tout particulièrement.

Enfin, un paramètre important de l'équation - en particulier face à une initiative qui se contentait de diminuer les impôts par deux, sans résoudre toutes les absurdités de ce système - était la neutralité fiscale (on parle de quelque 100 millions par année). Le projet qui vous est soumis ici respecte, dans les grandes lignes, ce principe et permet à Genève de rester dans la moyenne des cantons suisses en la matière. Je vous remercie.

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, les embouteillages se multiplient. Il devient de plus en plus difficile de circuler à Genève, les places de parkings se raréfient. Les automobilistes de notre canton sont taxés de manière excessive. Genève est le canton de Suisse qui taxe le plus excessivement les automobilistes.

Une voix. Tellement faux !

M. Sandro Pistis. Dans le même temps, les frontaliers utilisent de manière intensive les routes de notre canton, sans être taxés. Pour mémoire, nous avons plus de 100 000 frontaliers qui arrivent le matin à Genève et qui repartent le soir. Les automobilistes frontaliers bénéficient, eux, de la gratuité totale de l'impôt auto, alors que les habitants de notre canton sont imposés de manière excessive. Et ça, c'est une réalité. Une fois de plus, les résidents genevois sont discriminés, et cela doit changer.

Le MCG défend la cause des habitants genevois. Plus fondamentalement, Genève s'écarte de plus en plus du principe de la constitution genevoise, qui fixe la complémentarité des divers modes de transport. Lors de la dernière législature, une politique agressive à l'encontre des seuls automobilistes genevois a été menée par le Conseil d'Etat et par ce Grand Conseil. Le MCG déplore qu'au même moment, les automobilistes frontaliers aient été épargnés par cet acharnement fiscal. C'est la raison pour laquelle le groupe MCG s'est associé à une initiative qui demande une réduction massive de l'impôt automobile. Dans un premier temps, nous avons observé de manière positive le lancement d'un contreprojet, mais le résultat final ne nous a pas convaincus. Nous refuserons donc le contreprojet et soutiendrons uniquement l'initiative 178 «Pour la réduction de l'impôt sur les véhicules».

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. J'aimerais remercier toute la commission fiscale qui a effectué un énorme travail, ainsi que la sous-commission, qui a fait le travail bénévolement, il faut le dire, sans jetons de présence - c'est à relever - pour pondre ce contreprojet. Rendons à César ce qui appartient à César !

Il faut savoir que, lors du traitement de l'initiative 178 à la commission fiscale, il y avait deux propositions: un projet de loi du Conseil d'Etat et le PL 12888, qui venait des rangs du MCG. La commission fiscale a décidé que ce PL 12888 serait le contreprojet à l'IN 178.

Ce contreprojet propose de nouveaux principes pour les véhicules de tourisme, les véhicules électriques, les deux-roues motorisés, les voitures de livraison et les camions; des impôts supplémentaires basés sur le poids pour les véhicules électriques, sur le CO2 pour les véhicules thermiques; une surtaxe pour les véhicules antérieurs à la norme EURO 03 dès la troisième année, dès l'entrée en vigueur du nouveau système. Pour les deux-roues motorisés, un système de calcul basé sur la puissance est introduit, avec un bonus de 50% pour les motos électriques. Pour les véhicules de livraison et les camions, le système basé sur le poids est reconduit, avec l'introduction d'un bonus de 50% pour les véhicules électriques.

Malheureusement, ce PL 12888 ainsi modifié induit une perte théorique de 258 000 francs par année. La perte de recettes récoltées est estimée à 400 000 francs à l'horizon 2030. Ce PL 12888 devenu le contreprojet à l'IN 178 propose donc quelques avancées intéressantes avec une quasi-neutralité fiscale, soit une goutte d'eau dans l'océan de la fiscalité genevoise, alors que les impôts sur les véhicules automobiles encaissés sont de l'ordre de 100 millions de francs par année.

La minorité de la commission fiscale vous demande de refuser ce PL 12888, contreprojet à l'IN 178, qui n'est, à ses yeux, qu'un écran de fumée. Il convient donc d'accepter l'original et non la copie. La minorité vous demande donc de refuser le contreprojet à l'IN 178.

M. Sébastien Desfayes (LC). Le groupe Le Centre s'opposera à l'initiative 178 et soutient le contreprojet avec enthousiasme. En premier lieu, je tiens vraiment à féliciter le rapporteur de majorité, Grégoire Carasso, pour l'excellence de son rapport. Ce n'est pas un simple copier-coller qui reprend servilement les propos tenus en commission. C'est un véritable travail de synthèse. Qu'il en soit remercié ! Je me demande d'ailleurs, Madame la présidente, s'il ne faudrait pas afficher le rapport de Grégoire Carasso pour tous les autres députés, afin qu'il serve de modèle aux futurs rapports de majorité.

Des voix. Bravo ! (Commentaires. Applaudissements.)

M. Sébastien Desfayes. Bravo, Grégoire ! Je crois aussi que le rapporteur de seconde minorité a raison quand il souligne qu'un grand travail a été effectué par cette sous-commission, gratuitement - à se demander d'ailleurs s'il ne faudrait pas supprimer les jetons de présence, ce qui permet de travailler beaucoup plus rapidement... (Brouhaha.)

La présidente. S'il vous plaît, un peu de calme !

M. Sébastien Desfayes. ...et de trouver des consensus, parce que c'est un consensus regroupant une large majorité qui a été trouvé par cette commission. Je tiens à dire, en tant que membre de la commission fiscale, que celle-ci ne s'est pas toujours caractérisée par son esprit consensuel, au contraire: on était plus dans une atmosphère, pendant quatre ans en tout cas, de «Full Metal Jacket» et, pour les connaisseurs, aujourd'hui, on est plutôt dans un film de David Hamilton... (Rire.) ...«Volupté et Amour», avec un premier succès sur la taxe professionnelle et un second sur la taxe auto, qui sont pourtant des sujets très compliqués.

Tout est parti de l'initiative 178 de l'UDC, qui avait l'immense mérite, il faut le lui reconnaître, de pointer du doigt une imposition obsolète des véhicules, mais cette initiative était finalement d'un autre temps, parce qu'elle ne cherchait pas à améliorer, à moderniser l'imposition des véhicules, mais simplement à couper à la hache les recettes fiscales du canton, sans tenir compte de la capacité contributive. C'était une baisse des recettes fiscales de l'ordre de 50 millions, sans appréhender les enjeux qui sont les nôtres et qui résultent notamment des accords de Paris, mais aussi de la motion du Grand Conseil votée en 2019, invitant à déclarer l'urgence climatique. En fait, en ne respectant pas les engagements pris par la Suisse, respectivement par le canton de Genève via le Grand Conseil, on crée une certaine méfiance des habitants du canton par rapport aux institutions. Le rôle de celles-ci est d'appliquer ce qui a été voté - l'accord de Paris, qui prévoit notamment la réduction des émissions de CO2.

C'est précisément dans cette direction que la commission fiscale est allée avec ce contreprojet, qui vise, en substance, trois points. Ils ont déjà été énoncés, mais je vais les répéter, quand bien même c'est déjà clair aujourd'hui: pour les véhicules thermiques, imposition fondée sur l'émission de CO2; pour les véhicules électriques, c'est sur le poids; et puis, un troisième axe important est la neutralité fiscale - si on est optimiste ! Ce qui est le cas, bien évidemment, du Centre. On peut imaginer qu'il y aura toujours plus de véhicules électriques, que ceux-ci seront toujours plus légers et que, par conséquent, il y aura une diminution d'impôts au bénéfice des automobilistes.

Un grand bravo donc à la commission fiscale, plus particulièrement à son groupe de travail ! Le groupe Le Centre vous encourage à voter avec enthousiasme le contreprojet. Merci.

M. Pierre Eckert (Ve). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, je fais partie de ce groupe de «Volupté et Amour» dont on parlait, mais je dirai d'emblée que l'impôt auto ne compte que de façon marginale dans les coûts de fonctionnement d'un véhicule. Je pense que c'est important de le relever. Il suffit de penser aux assurances, aux énergies utilisées (électricité ou essence) ou à l'entretien. Mais cet impôt a tout de même une valeur symbolique, pour ne pas dire émotionnelle, qui peut orienter l'achat de l'un ou l'autre type de véhicule.

Rappelons aussi que l'impôt auto n'est pas un impôt affecté et qu'il ne sert donc ni à construire ni à entretenir les routes du canton. Essayer de lier la hauteur de l'impôt à la quantité de routes disponibles n'a rigoureusement aucun sens. L'impôt auto existe donc principalement pour alimenter le fonctionnement de l'Etat, mais aussi pour prendre en charge les diverses nuisances engendrées par les véhicules motorisés. On parle ici par exemple d'impacts sur la santé ou de la forte occupation de l'espace public. Je pense que 100 millions, ce n'est de loin pas ce qu'il faudrait payer pour les nuisances engendrées.

Le potentiel de l'impôt auto d'orienter les achats de véhicules a aussi été reconnu depuis longtemps par le Conseil d'Etat et le Grand Conseil. La dernière réforme remonte à 2010, avec l'introduction d'un système de bonus-malus basé sur les émissions de CO2. Les seuils introduits correspondaient à la technologie de l'époque. Les standards ont bien progressé depuis, si bien qu'il est parfaitement incohérent de reprendre cette loi ancienne et de diviser bêtement les résultats par deux.

Il est donc important de revoir plus fondamentalement la loi sur l'imposition des véhicules, en tenant compte de l'évolution du marché, qu'il soit thermique ou électrique d'ailleurs. C'est ce que la commission fiscale s'est attachée à faire dans ce contreprojet. Un contreprojet simple, lisible, basé sur le projet de loi du MCG, comme cela a été déjà dit, le PL 12888, et qui respecte également la motion que nous avons votée à l'unanimité.

Nous voyons toutefois un point d'achoppement dans ce contreprojet: celui de la faramineuse multiplication de gros véhicules utilitaires sportifs, les fameux SUV. Ils sont souvent puissants et lourds, occupent un espace démesuré et surtout représentent un danger majeur pour les autres usagers de l'espace public en ville. Rien que la vision d'un pare-buffle placé à la hauteur de la tête d'un enfant me donne des frissons. (Brouhaha.)

La présidente. Excusez-moi ! Les discussions peuvent se faire dehors ! Merci.

M. Pierre Eckert. Merci, Madame la présidente. Une partie de ce type de véhicules verra son imposition diminuer, ce que nous regrettons, mais nous espérons que d'autres moyens de régulation que l'impôt permettront de limiter la casse s'agissant de ces voitures-là.

Maintenant, nous voyons dans ce contreprojet plus d'avantages que d'inconvénients et nous le soutiendrons, car il contient une taxation basée sur l'utilisation des ressources de la planète. Pour les véhicules thermiques, cela a été dit, une taxation progressive sur le CO2 est introduite et remplace la taxation sur la puissance. Moins de CO2, c'est non seulement intéressant pour la réduction des gaz à effet de serre, mais c'est également intéressant parce que c'est lié à la consommation: moins de CO2, moins de carburant. Les véhicules qui consomment le moins seront donc ceux qui paieront le moins d'impôts.

Pour les véhicules électriques, c'est la masse qui est prise en considération. La progression commence à 1400 kilos à vide, compte tenu de l'amendement qui vous sera présenté. Ici aussi, la masse des véhicules est directement liée aux batteries et donc à l'utilisation des divers types de métaux rares et d'autres ressources minières, cela a été dit tout à l'heure.

Au temps zéro, la neutralité fiscale est assurée. Au fur et à mesure de l'évolution du parc automobile, une légère perte pourra être observée. Le contreprojet permet une transition vers des véhicules électriques légers. C'est la raison principale pour laquelle nous soutiendrons ce contreprojet intelligent, simple et moderne, que d'autres cantons nous envieront très bientôt. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Chers collègues, je commencerai par la dernière remarque de notre collègue Eckert. Ce qu'il vient de dire est juste un non-sens, pour plusieurs raisons. D'abord, il a évoqué la valeur symbolique. Oui, peut-être qu'on peut parler de symbole, puisque certains estiment que ce n'est jamais trop payé, mais il n'empêche que Genève est parmi les cantons qui taxent le plus l'automobile. C'est la première chose.

Maintenant, il faut vraiment être clair et il faut arrêter de raconter n'importe quoi: ce projet de loi n'a absolument rien à voir avec un contreprojet. Ce que vous proposez là, c'est uniquement une manière différente de taxer. Et par rapport à la dernière remarque de M. Eckert, qui disait qu'on va nous envier ce projet de loi, moi je vous renverrai simplement à la votation bernoise: ce que vous proposez aujourd'hui a été purement et simplement balayé à quasiment 80%, parce que la population, il faut le dire ici, en a marre de se faire taxer, de se faire saigner à blanc. Elle n'est pas là pour payer, payer et payer, et ça, elle commence à le refuser. Tout comme le Jura, qui, je vous le rappelle, quelques mois avant Berne, a voté le principe de l'initiative, à savoir une réelle baisse d'impôts. Et ce n'est même pas pour dire que ce sera le canton le moins cher de Suisse, mais uniquement - c'est ce que propose notre initiative - pour être dans la moyenne de ce que taxent les cantons suisses.

Parce que, quand vous faites de vraies comparaisons... La seule et unique manière de faire de vraies comparaisons, c'est de prendre un modèle au hasard, n'importe lequel, et d'aller voir comment les autres cantons le taxent. La plupart des modèles - et on avait présenté des comparaisons avec mon collègue Michael Andersen, quand on est allés en tant qu'initiants présenter l'initiative... La comparaison est simple: vous prenez un modèle, vous regardez dans les autres cantons et vous voyez que dans certains d'entre eux, on taxe jusqu'à trois fois moins ! Ce qui fait que, pour une grande majorité des véhicules, vous êtes taxés jusqu'à trois, voire quatre fois plus pour certains gros modèles; donc oui, Genève est réellement un des cantons qui taxe le plus.

Maintenant, s'agissant de la neutralité fiscale, pour nous, il n'en a jamais été question. C'est le troisième point. Et finalement, nous constatons que ce contreprojet - on l'avait également dit avec mon collègue... Pour qu'un contreprojet soit acceptable pour nous, il aurait dû, a minima, tenir compte d'une baisse d'impôts ! Chose qu'il ne fait pas, parce que 400 000 francs... Mais vous rigolez ! Sur les 110 millions que rapporte l'impôt automobile des véhicules à moteur, pour être précis... Et de dire que la neutralité, ce sera quand même moins 400 000 francs, c'est juste risible ! Nous, nous restons confiants vis-à-vis du vote de la population, qui sera toute contente d'être moins taxée, et, je le redis ici, juste pour être dans la moyenne des autres cantons. Nous vous invitons donc à refuser ce contreprojet qui n'en est pas un, à en rester là et à inviter la population à voter en faveur de l'initiative. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Stefan Balaban (LJS). Le groupe LJS accepte le PL 12888-A, en contreprojet à l'initiative 178. Le critère de puissance qui permet actuellement de calculer l'impôt sur les véhicules est devenu archaïque, puisque, pour deux véhicules qui ont la même puissance, la quantité de CO2 émise varie du simple au double. Plus important encore, nous pensons qu'il est temps de simplifier la méthode de calcul de cet impôt, qui doit être plus transparente et plus équitable. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Yvan Zweifel (PLR). Lors de la précédente législature, on avait l'habitude d'avoir deux sujets qui polarisaient et qui fâchaient: c'était, d'une part, la fiscalité et, d'autre part, les transports. Alors là, évidemment, quand on a décidé de traiter un sujet qui concernait à la fois l'un et l'autre, on s'est dit: «Ça va être la grande bagarre !» Heureusement, la commission fiscale, malgré les oppositions qui existent encore, a su trouver une majorité de compromis, pour effectivement essayer de trouver une solution. Une solution qui certes ne permettait pas d'aller dans la direction de l'initiative, dont l'objectif principal était de baisser les impôts, et j'y reviendrai tout à l'heure, mais qui permettait au moins de trouver une taxation qui soit moderne, qui tienne compte des nouveaux véhicules et des futurs, et bien sûr de la question environnementale.

Je rappellerai ici, parce que cela n'a pas encore été fait, qu'il y a un historique. Je ne sais pas si c'était lors de la précédente législature, peut-être était-ce encore lors de l'avant-dernière, la commission fiscale avait voté à l'unanimité, puis en plénière à la quasi-unanimité - à l'exception du groupe UDC, c'est juste - une motion qui visait précisément à revoir la manière de taxer les véhicules, pour tenir compte des nouveaux effets, notamment environnementaux, mais le tout avec une neutralité fiscale. Le Conseil d'Etat est alors venu avec un projet qui, on s'en souvient, était assez alambiqué, dont on peinait à comprendre où il voulait aller et qui, surtout, ne respectait pas le principe cher aux yeux du PLR de la neutralité fiscale. Je rappellerai aussi que si le PLR est évidemment en faveur d'une baisse d'impôts dans le canton qui taxe le plus, ce sont avant tout les impôts directs qu'il faut baisser et pas nécessairement les impôts indirects, comme c'est le cas ici.

Et puis s'est rajoutée à tout cela l'initiative 178 de l'UDC, qui pouvait rencontrer de mon côté un certain assentiment, mais qui effectivement, à part le fait de baisser l'impôt en divisant par deux le barème, ne proposait aucune réflexion de fond sur comment taxer de manière moderne les véhicules, et ne paraissait à nos yeux pas acceptable. C'est en ce sens que nous refuserons l'initiative et que nous accepterons ce contreprojet, qui nous semble moderne, avec un double barème, on l'a dit, basé sur le poids pour les véhicules électriques - puisqu'ils n'émettent pas de CO2 - et, pour tous les autres véhicules, basé entièrement sur le CO2. Le tout avec une neutralité fiscale au temps «t» et, en réalité, avec une baisse... Alors on dit qu'elle n'est que de 400 000 francs, mais en réalité, c'est parce qu'on n'arriverait qu'à 40% de passage du parc de véhicules à des véhicules électriques; mais si on va plus loin et qu'on pense à des batteries beaucoup moins lourdes - et la technologie nous amènera forcément à cela -, on aura une baisse bien plus prononcée.

Nous voterons donc évidemment ce contreprojet, qui nous amène à être deux fois gagnants: pour les contribuables d'une part et pour l'environnement d'autre part, avec une hausse des recettes également, parce qu'un certain nombre de véhicules dits de luxe étaient largement surtaxés à Genève, ce qui faisait que certains contribuables allaient les immatriculer ailleurs. On peut imaginer qu'ils reviendront.

Concernant les amendements techniques du Conseil d'Etat, nous les voterons. Nous vous invitons aussi à voter le nôtre, qui vise simplement à une petite correction en faveur des collectionneurs de voitures anciennes, dont on n'a pas assez tenu compte et qui se retrouveraient, eux, largement surtaxés. Ce sera «peanuts», comme disait l'autre, dans l'intégralité du projet et je vous invite à le voter. Le groupe PLR vous invite donc à refuser l'initiative, à voter pour un contreprojet moderne, neutre fiscalement, et même positif à terme, tant pour le contribuable que pour l'environnement. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme l'a dit le rapporteur socialiste de majorité, nous allons bien entendu accepter ce contreprojet et refuser l'initiative. Je me joins aux remerciements adressés au groupe de travail, qui a vraiment travaillé en bonne intelligence.

Je reviendrai peut-être sur ce qui a été dit par les représentants de l'UDC et du MCG sur l'initiative, qui veut réduire de moitié l'imposition des véhicules. M. Florey - vous transmettrez, Madame la présidente - nous dit qu'à Genève, les véhicules sont les plus taxés de tous les cantons suisses, qu'on n'a qu'à prendre n'importe quel véhicule, au pifomètre, et on verra que ce sont les plus taxés, etc. C'est faux ! Cela a été dit et on a reçu tous les chiffres en commission: c'est totalement faux ! L'imposition générale des véhicules dans le canton de Genève est dans la moyenne suisse. Et quels sont les véhicules qui sont le plus taxés à Genève par rapport aux autres cantons suisses ? Ce sont effectivement les gros véhicules de luxe, les plus puissants. Si vous avez un véhicule électrique, un véhicule citadin, vous êtes dans la moyenne basse de la taxation au niveau suisse; il s'agit donc totalement - on parlait de la presse plus tôt - d'une fake news. Quand le représentant de l'UDC nous dit qu'il faut arrêter de raconter n'importe quoi, eh bien là, en l'occurrence - vous transmettrez, Madame la présidente -, c'est lui qui raconte n'importe quoi aux personnes qui nous écoutent. (Remarque. Applaudissements.)

Quand le représentant du MCG nous dit qu'il y a de plus en plus d'embouteillages, qu'ils se multiplient à Genève, il a raison ! On fait tous le même constat. Mais c'est quoi, la solution ? C'est de développer les alternatives de mobilité durable ou c'est de dire aux automobilistes qu'on va baisser leur impôt de moitié, comme ça, ils prendront encore plus la voiture ? Et c'est marrant, quand il y a déjà des embouteillages et qu'on prend encore plus la voiture, le résultat, c'est qu'il y a encore plus d'embouteillages ! Je ne suis donc pas sûr que ce soit vraiment la solution. La solution, ce sont vraiment les alternatives de mobilité durable. Et quand le MCG dit: «Nous, on s'intéresse - par rapport aux véhicules frontaliers ! - à défendre la cause des Genevoises et des Genevois»... Défendre la cause des Genevoises et des Genevois, c'est le faire en diminuant la pollution et en diminuant le bruit ! Aujourd'hui, on croule sous la pollution des véhicules à moteur et il y a 120 000 personnes qui vivent dans des zones où les normes fédérales de protection contre le bruit sont dépassées. C'est donc ça, défendre les Genevoises et les Genevois et défendre leur cause: c'est diminuer la pollution et le bruit des véhicules à moteur.

Je pense que ce contreprojet va dans ce sens-là, parce que, comme il a été dit, pour les véhicules électriques, il y a une surtaxe sur le poids - parce que le véhicule prend quand même beaucoup de place dans le domaine public - et une surtaxe sur le CO2 pour les véhicules thermiques. C'est un bon compromis et je vous encourage à le voter pour aller vers une mobilité plus durable. Merci. (Applaudissements.)

M. François Baertschi (MCG). Il y a quelque chose que M. Thomas Wenger oublie dans ce qu'il vient d'indiquer - vous lui transmettrez, je vous remercie par avance: il oublie la différence qui existe entre la voiture d'un Genevois et celle d'un frontalier.

Des voix. Ah ! (Exclamations. Rires. Commentaires.)

M. François Baertschi. Le Genevois est taxé plein pot, le frontalier, lui, ne paie rien ! (Commentaires.) Non ! Ça doit changer ! Les automobilistes genevois ne doivent plus être des vaches à lait. (Commentaires.) Les frontaliers sont déjà favorisés sur le marché du travail, ils sont favorisés du point de vue du logement, du pouvoir d'achat, et ils le sont encore avec cette taxe qui leur est épargnée, parce qu'on n'a pas encore trouvé de solution pour taxer les automobilistes frontaliers.

Alors j'écoute M. Wenger - vous transmettrez, Madame la présidente -, qui parle des habitants de Genève victimes du bruit et de la pollution. Je vous suis ! Mais, Monsieur Wenger, vous n'écoutez pas du tout - vous transmettrez, Madame la présidente - les problèmes des habitants de Genève qui sont victimes de ce trafic frontalier, des nuisances, du bruit et de la pollution de ces automobiles frontalières ! D'autant plus qu'avec la rétrocession excessive que nous versons à la France voisine, nous envoyons des sommes conséquentes, considérables et excessives pour financer des infrastructures routières qui débouchent sur le canton de Genève un peu comme un entonnoir et qui créent des nuisances ! Parce que, passez-moi l'expression, le CEVA est un cache-sexe...

Des voix. Oh ! (Commentaires.)

M. François Baertschi. ...de la politique du Grand Genève, politique qui multiplie les nuisances, qui se fait au détriment des habitants du canton de Genève. Cela, nous ne pouvons pas l'accepter. Le MCG soutiendra l'initiative déposée par l'UDC et le MCG - n'oublions pas nos amis de l'UDC -, qui favorise les habitants du canton. C'est la meilleure des choses. C'est pour cela que nous soutiendrons avec détermination cette initiative. Merci de votre attention.

La présidente. Merci. Monsieur Patrick Dimier, vous avez la parole pour une minute.

M. Patrick Dimier (MCG). Pas besoin de beaucoup plus, Madame la présidente. J'interviens pour un créneau tout à fait particulier, à savoir les véhicules anciens. Je sais que, pour beaucoup d'entre vous, le patrimoine n'a pas beaucoup d'intérêt: la preuve, c'est qu'on abat volontiers des grands arbres pour planter des poireaux à la place ! (Commentaires.) Cela pour dire qu'on ne peut pas traiter les véhicules anciens - qui, pour mériter cette immatriculation particulière, sont limités à 2000 kilomètres par année - de la même manière que les autres. On doit donc absolument préserver une imposition particulière pour ces véhicules, étant entendu qu'ils sont restreints dans leur usage. Merci beaucoup.

La présidente. Merci. Je donne la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Christo Ivanov, pour une minute quinze.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Ce sera largement suffisant. Merci beaucoup, Madame la présidente. Aujourd'hui, tout le monde parle de pouvoir d'achat. Tout le monde voit bien avec l'inflation, la hausse des taux d'intérêt... Pas plus tard qu'aujourd'hui, les instances fédérales ont encore augmenté leur taux directeur. Il y aura donc encore moins dans le porte-monnaie de la ménagère. Or cette initiative 178 vise justement à diviser par deux l'impôt sur les véhicules et permettra au citoyen d'avoir un peu plus dans son porte-monnaie. Oui, il faut être factuel, soyons honnêtes ! Il faut dire oui à l'initiative 178, refuser le contreprojet et favoriser cette baisse d'impôts indirects, afin de revenir dans une moyenne suisse. Je vous remercie, Madame la présidente.

La présidente. Merci. Est-ce que le rapporteur de première minorité veut reprendre la parole ? (Un instant s'écoule.) Monsieur Pistis, est-ce que vous voulez prendre la parole ? (Remarque.) Non, très bien. Je donne la parole au rapporteur de majorité, Grégoire Carasso, pour une minute vingt.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Comment ne pas rappeler au MCG que, lors des auditions sur le PL 12888 en 2021, le TCS, le GTE, RouteGenève, l'ASTAG, Carrosserie Suisse - j'en oublie quelques-uns encore...

Une voix. L'UPSA !

M. Grégoire Carasso. L'UPSA, merci ! ...donc des milieux favorables à la voiture - qui vous sont chers, qui peut-être, pour certains d'entre eux, soutiendront l'initiative MCG et UDC -, tous ont expliqué au MCG - qui, de manière pavlovienne, posait la question: «Mais pourquoi n'impose-t-on pas les frontaliers ?» - que l'imposition, partout en Europe, partout dans le monde où il y a un Etat de droit qui fonctionne et qui prélève des impôts, se fait sur le lieu de domicile ? Cela se fait sur le lieu de domicile. (Remarque.) Je vous le redis au cas où vous ne l'auriez pas imprimé pendant les quinze auditions: cela se fait sur le lieu de domicile. (Commentaires.)

Une voix. Sauf aux Etats-Unis ! (Commentaires.)

M. Grégoire Carasso. Sur la moyenne... (Commentaires.) Sur la moyenne - ou, selon l'UDC, le maximum: je ne suis pas sûr que tout le monde ait bien compris comment M. Florey - vous transmettrez, Madame la présidente - calcule le fait que Genève est un canton qui impose cher ses voitures. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il nous l'avait expliqué il y a exactement un an et demi. Il a pris - je le cite - «au hasard certains véhicules pour comparer leur taxation dans différents cantons, ce qui est la seule» - je continue de citer - «comparaison possible si on veut être objectif». (Commentaires.) Ça, c'est l'approche de l'UDC des faits alternatifs.

La présidente. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.

M. Grégoire Carasso. Sinon, l'Association des services des automobiles place le canton de Genève exactement dans la moyenne suisse. Et, enfin, sur les projections fiscales...

La présidente. Merci de conclure.

M. Grégoire Carasso. ...tout dépendra de l'évolution du parc de véhicules: le poids des batteries baisse, mais le poids des véhicules augmente. Affaire à suivre en 2040 ! Merci. (Applaudissements.)

La présidente. Merci. Monsieur Pistis, je suis navrée, je vous ai demandé avant si vous vouliez vous exprimer. Ce sont d'abord les rapporteurs de minorité et on conclut par le rapport de majorité. (Remarque.) Je vous ai demandé si vous vouliez prendre la parole, vous m'avez dit non. Maintenant, vous n'avez plus la parole. (Commentaires.) Non, on finit par le rapporteur de majorité. (Brouhaha.) Je donne la parole au conseiller d'Etat, M. Pierre Maudet.

Une voix. Mis en cause !

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons écouté avec beaucoup d'attention les arguments intéressants qui ont été développés de part et d'autre et avons lu avec beaucoup d'intérêt le rapport de M. Carasso. Le Conseil d'Etat, ce soir, doit s'incliner, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, devant cette frénésie législative quant aux réformes fiscales qui saisit Genève.

Nous avons salué, lors de la session précédente, la réforme de la taxe professionnelle communale - réforme au sens étymologique du terme, c'est-à-dire suppression. Nous saluons ce soir l'évolution, la modernisation de cet impôt auto, dont les limites ont été soulignées par plusieurs d'entre vous, à travers un contreprojet. Et là, toutes mes excuses au représentant du groupe UDC, mais on parle véritablement d'un contreprojet qui est une alternative - et pas un ersatz d'initiative -, qui offre une véritable alternative au souverain, avec la possibilité de se diriger vers un impôt beaucoup plus juste, équilibré et, accessoirement - c'est un argument qui devrait vous convaincre -, très neutre du point de vue de ses effets fiscaux.

Le Conseil d'Etat estime que ce nouveau système fiscal qui sort de commission - et il salue le travail de la majorité - permet d'être en phase avec les objectifs environnementaux que nous poursuivons tous. Il permet également, cela a été dit par certains, d'atteindre un objectif de simplicité, et vous le savez, cette législature doit être placée sous le signe de la simplicité, de la compréhension des mécanismes qui président, dans le cas d'espèce, à une ponction fiscale facile à appréhender pour la citoyenne ou le citoyen.

Il intègre un principe d'actualité, cela a été rappelé sur ces bancs, avec le fait qu'aujourd'hui, il faut se diriger vers une taxation plus faible des véhicules légers et plus lourde des véhicules qui ont une emprise plus importante sur le domaine public, mais également, et c'est important de le souligner - je me tourne vers celles et ceux qui sont encore rétifs à ce contreprojet -, un véritable principe d'équité. Parce qu'avec la possibilité de voter pour ce contreprojet, ce soir, vous octroyez la possibilité aussi de limiter la «surexponentialité» des véhicules puissants et, ainsi, c'est le pari que fait le Conseil d'Etat avec la majorité de la commission, de rapatrier à Genève toute une série de grosses cylindrées, en général immatriculées un peu à l'ouest du lac de Genève... (Commentaires.) ...dans cette contrée qui est au bénéfice en tout cas d'un accord fiscal avec la Suisse et que l'on nomme le Valais. (Commentaires.)

Pour toutes ces raisons, le Conseil d'Etat fait sien ce contreprojet. Il estime que nous atteignons ces objectifs de modernité, de simplicité, d'actualité, d'équité et de neutralité. Nous sommes quant à nous convaincus que le souverain suivra la majorité. Nous ne saurions trop vous recommander de soutenir ce contreprojet. Je vous remercie de votre attention.

La présidente. Merci. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12888 est adopté en premier débat par 69 oui contre 24 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 415, alinéa 2, présenté par le Conseil d'Etat. Il s'énonce comme suit:

«Art. 415, al. 2 (nouvelle teneur)

2 En sus, pour les voitures 100% électriques ou à hydrogène, une surtaxe sur le poids à vide est calculée selon le barème suivant:

Voitures dont le poids à vide est

a) de 1 401 à 1 650 kg      50 fr.

b) de 1 651 à 1 750 kg      100 fr.

c) de 1 751 à 1 900 kg      200 fr.

d) de 1 901 à 2 100 kg      400 fr.

e) de 2 101 à 2 300 kg      600 fr.

f) de 2 301 à 2 400 kg      800 fr.

g) de 2 401 à 2 500 kg      1'100 fr.

h) de 2 501 à 2 600 kg      1'200 fr.

i) plus de 2 600 kg         1'400 fr.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 96 oui (unanimité des votants).

La présidente. L'article 415 fait l'objet d'un autre amendement, présenté cette fois par le PLR. Il consiste à introduire un nouvel alinéa, que voici:

«Art. 415, al. 6 (nouveau)

6 Les véhicules vétérans ne sont pas soumis aux surtaxes prévues à l'article 415, alinéas 4 et 5.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 65 oui contre 33 non.

Mis aux voix, l'art. 415 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 416, al. 4 (nouveau), est adopté, de même que les art. 418, al. 4 (nouveau), à 459, al. 3 (nouveau).

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12888 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 73 oui contre 25 non (vote nominal).

Loi 12888 Vote nominal

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 178-C.

IN 189-B
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier l'initiative populaire cantonale 189 « Une Vie ici, une Voix ici... Renforçons notre démocratie ! »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de majorité de M. Romain de Sainte Marie (S)
Rapport de minorité de M. Jean-Pierre Pasquier (PLR)

Débat

La présidente. Nous traitons le point fixe suivant: l'IN 189-B. Nous sommes en catégorie II, soixante minutes. Je cède la parole à M. Romain de Sainte Marie.

M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil a examiné l'initiative 189 intitulée «Une Vie ici, une Voix ici... Renforçons notre démocratie !». Précisons d'emblée que la commission ayant déjà étudié le projet de loi 12441 qui visait à peu près le même objectif d'extension des droits politiques et d'éligibilité pour les personnes étrangères, elle a accéléré ses travaux et n'a procédé qu'à quelques auditions restreintes, c'est-à-dire celles du comité d'initiative et du département. Il s'en est suivi des débats qui ont amené une majorité à voter en faveur de cette initiative. J'espère, Mesdames et Messieurs, que cette majorité en faveur de l'IN 189 sera conservée ce soir.

Je reviens maintenant sur le fond et je garderai un peu de temps de parole pour plus tard, car j'imagine que les discussions seront animées. C'est un moment crucial pour notre Grand Conseil, qui pourrait aujourd'hui faire avancer un peu notre démocratie, qui pourrait faire franchir à notre canton un pas de plus vers une meilleure représentation. En effet, notre système fonctionne selon la représentation et l'expression directe: dans notre démocratie semi-directe, le peuple élit des représentantes et des représentants, et s'exprime très concrètement sur des objets tous les trois mois.

Or le constat, actuellement, c'est que dans le canton de Genève, 40% des personnes majeures n'ont pas le droit de vote, parce qu'elles sont d'origine étrangère. Dans un régime politique, 40% de personnes majeures qui ne disposent pas du droit de vote, c'est beaucoup, c'est même trop pour qu'on puisse parler de réelle démocratie. Ces gens constituent en effet une base qui doit correspondre à la base électorale. Une démocratie doit fonctionner sur la base électorale la plus large possible; si celle-ci n'est pas suffisamment représentative, alors on ne peut pas parler de démocratie en tant que telle.

A ces 40% de personnes, l'initiative préconise d'accorder les droits politiques après huit ans de résidence en Suisse. Huit ans de résidence en Suisse, en l'occurrence à Genève, c'est autant d'années passées à vivre dans notre canton, comme vous, comme moi, à travailler, à s'amuser. Pourquoi ne pas donner la parole à ces individus que nous côtoyons tous les jours, qui partagent notre quotidien ?

Ces personnes-là, nous les croisons tous les jours dans les supermarchés en faisant les courses: les supermarchés constituent des sujets politiques que nous évoquons au Grand Conseil, par exemple dans le cadre des horaires d'ouverture des magasins. Ces personnes-là qui ne bénéficient pas des droits de vote et d'éligibilité, nous rencontrons leurs enfants à l'école: là aussi, il s'agit d'une question politique importante dont nous débattons au sein de cette assemblée. Ces personnes-là, nous les fréquentons quotidiennement au travail, elles paient des impôts: les conditions de travail, l'imposition, la fiscalité constituent autant d'objets politiques que nous traitons au parlement, mais aussi lors de votations. Ces personnes-là sont concernées par la sécurité dans nos rues, encore un sujet qui nous occupe dans ce plénum et au moment des votations, lesquelles ont lieu tous les trois mois.

Mesdames et Messieurs les députés, il est essentiel de donner une voix à ces gens qui font Genève, qui y travaillent quotidiennement, y vivent, y vont à l'école, y paient des impôts. A l'heure actuelle, ces personnes sont exclues du processus politique, lequel façonne pourtant l'avenir de notre canton et permet de prendre les mesures, les décisions, les réformes nécessaires au futur de la collectivité.

Il est temps désormais, par cette initiative, par le vote de notre Grand Conseil, de leur offrir la possibilité de s'exprimer. Ce texte constitue une porte ouverte, puisque nous nous prononcerons également sur la question d'un contreprojet. Ce soir, nous pouvons réaliser une grande avancée avec cette initiative ou, pourquoi pas, réfléchir à un premier pas en avant dans ce sens en acceptant le principe d'un contreprojet. C'est la raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs, en tant que rapporteur de majorité, à soutenir cette initiative ainsi que le principe d'un contreprojet. (Applaudissements.)

Présidence de M. Alberto Velasco, premier vice-président

M. Jean-Pierre Pasquier (PLR), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, pour la minorité de la commission, l'extension des droits civiques pour les résidents étrangers n'est envisageable que par l'obtention de la nationalité. Le passeport suisse n'est pas une carte Cumulus, il ne se brade pas, il ne vous fait pas bénéficier de rabais d'impôts ni d'entrées gratuites à des musées ou à des concerts; le passeport helvétique représente une reconnaissance d'appartenance à notre pays, à un canton, à une commune. C'est cette citoyenneté qui nous fait entonner l'hymne national le 1er août, mais surtout qui nous donne le droit de vote et d'éligibilité dans notre système démocratique. Voter constitue un acte fort qui exprime la fidélité et l'engagement envers sa commune, son canton et son pays.

Les personnes d'origine étrangère vivant en Suisse depuis un certain temps ont la possibilité de prendre part à la vie politique par le biais de la naturalisation; elles deviennent ainsi des citoyennes et des citoyens aux niveaux communal, cantonal et fédéral. L'obtention de la nationalité est la manifestation d'une intégration réussie. Le processus de naturalisation a été assoupli, la durée de résidence effective a été réduite, passant de douze à dix années; de même, les démarches ont été facilitées pour les jeunes de la troisième génération.

Par ailleurs, Genève figure parmi les cantons qui naturalisent le plus proportionnellement au pourcentage de population étrangère. On prétend que les étrangers sont exclus de la société, c'est faux: ils sont intégrés dans la vie associative, culturelle ou sportive, ils participent par exemple à des ateliers sur l'aménagement du territoire organisés par les communes et le canton. Des conseils des habitants se développent dans nos villes, à Lancy, à Vernier et à Thônex. Le bureau de l'intégration des étrangers fait figure d'acteur majeur de la cohésion sociale, il est partie prenante notamment dans le dispositif genevois de naturalisation.

Pour revenir à l'initiative 189, elle prévoit entre autres le droit de vote et d'éligibilité au niveau cantonal sans aucun critère d'intégration hormis l'exigence de résidence depuis huit ans. Aucun canton suisse ne va aussi loin. Les cantons du Jura et de Neuchâtel accordent le droit de vote aux résidents étrangers sur le plan cantonal, mais pas celui d'éligibilité; Neuchâtel exige toutefois qu'ils soient titulaires d'une autorisation d'établissement, le permis C.

En ce qui concerne le droit d'éligibilité des personnes étrangères à l'échelle cantonale, il n'existe pas dans le pays. A Genève, les Suisses de l'étranger n'ont même pas le droit de vote sur le plan communal. Au sein de l'Union européenne, les droits politiques au niveau communal sont octroyés uniquement à celles et ceux qui possèdent la nationalité d'un autre Etat membre. Les Suissesses et les Suisses en sont exclus.

L'initiative 189 prévoit que le seul fait d'avoir son domicile légal en Suisse depuis huit années permette aux étrangers, sans aucune autre condition, de se présenter aux élections communales et cantonales. Par exemple, comme cela avait déjà été souligné lors d'un précédent débat, des résidents étrangers pourraient être élus au Conseil des Etats à Berne pour représenter Genève à la chambre haute de l'Assemblée fédérale. Imaginons qu'ils siègent à la commission de politique extérieure ou à celle de la politique de sécurité: des risques de collusion pourraient se poser, portant atteinte aux relations de confiance. Offrir des droits politiques étendus sans aucun critère hormis celui de huit ans de résidence ne permet pas de garantir une intégration minimale dans notre société ni la volonté de partager une communauté de valeurs fondamentales.

Notre Grand Conseil s'est déjà prononcé sur ce sujet en mars 2021 en refusant un projet de loi constitutionnelle similaire à cette initiative populaire. L'opposition d'un contreprojet à cette initiative n'est pas voulue par la minorité de la commission: la naturalisation doit constituer la voie unique pour bénéficier des droits civiques complets.

L'intégration des étrangers est un enjeu important pour notre canton qui compte plus de 30 000 fonctionnaires actifs dans les organisations internationales. Il en va de même pour les nombreux expatriés qui travaillent dans les multinationales installées à Genève. Comme nous le savons, elles contribuent grandement à l'attractivité et à la prospérité de notre canton.

Toutefois, l'extension des droits politiques des étrangers ne peut se faire qu'à travers un processus de naturalisation garant d'une bonne intégration et de la compréhension des valeurs de la Suisse, de ses droits et de ses obligations. L'acquisition de la nationalité représente l'ultime étape d'une intégration réussie et permet un accès plein et entier à la citoyenneté. Il s'agit du véritable aboutissement d'un parcours personnel et volontaire.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité de la commission des droits politiques vous invite à refuser cette initiative et à ne pas lui opposer de contreprojet. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente

M. Yves de Matteis (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, l'IN 189 a été lancée par un groupement représentant notamment des associations de personnes étrangères; elle se fonde sur le principe que les droits politiques, idéalement, devraient être accordés de manière pleine et entière: soit on est citoyen ou citoyenne, soit on ne l'est pas, et si on l'est, on devrait bénéficier de l'ensemble des droits civiques rattachés à ce statut.

Cette initiative constitue déjà en partie une réalité dans d'autres cantons, dont certains octroient plus de droits aux personnes de nationalité étrangère que ne le fait Genève avec le droit de vote communal après huit ans de séjour. Il ne s'agit donc pas d'une Genferei, comme d'aucuns voudraient le faire croire.

Dans le canton de Neuchâtel, le droit de vote des personnes d'origine étrangère au niveau communal a été introduit en 1849 déjà, il y a bientôt 175 ans, par voie législative, suite à la réalisation de la constitution de 1848. Cela ne date donc pas d'hier. Le 17 juin 2007, l'éligibilité communale, y compris à l'exécutif, a été acceptée, et cela directement par le peuple, pour la première fois, avec 54,5% des voix. A Neuchâtel, les étrangers ont également le droit de vote lors de l'élection des deux représentants ou représentantes au Conseil des Etats du Parlement fédéral.

Dans le canton du Jura, c'est la constitution de 1978 qui a ouvert la voie: le droit de vote sur les plans communal et cantonal, sauf en matière constitutionnelle et sans éligibilité, est inscrit dans la loi sur les droits politiques de 1978. En 2014, les Jurassiens et Jurassiennes ont approuvé l'éligibilité des étrangers et étrangères dans les exécutifs communaux, à l'exception du maire ou de la maire. Dans le Jura toujours, les résidents étrangers disposent du droit de vote lors de l'élection des deux représentants au Conseil des Etats du Parlement fédéral.

Avec ces possibilités offertes aux individus de nationalité étrangère, les cantons de Neuchâtel et du Jura ne se sont pas écroulés; les majorités politiques n'ont pas été modifiées de manière significative et aucune révolution n'a été constatée. Concernant la question d'un éventuel contreprojet, c'est mon collègue, M. Pierre Eckert, qui prendra la parole. Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)

Mme Virna Conti (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord remettre l'église au milieu du village. J'ai entendu parler d'un rapport de majorité qu'il faudrait garder à l'esprit, mais il s'agit d'une ancienne majorité, ne l'oublions pas.

Ensuite, il a été indiqué que 40% de la population ne vote pas à Genève et que, par conséquent, ce serait une forme de non-intégration de ces personnes. Bon, si je dois me mettre du côté de la gauche, et je vais tenter de le faire dans les cinq prochaines secondes... (Remarque.) Qu'est-ce qu'il y a ?

La présidente. Un instant, s'il vous plaît. Je profite de cette interruption pour signaler, comme d'habitude, que les discussions doivent se tenir en dehors de la salle. (Un instant s'écoule.) Je vous remercie. Poursuivez, Madame la députée.

Mme Virna Conti. Merci, Madame la présidente. Pour revenir à l'argument de la non-intégration des gens sous prétexte qu'ils ne se prononcent pas dans notre canton, je vais tenter de me mettre du côté de la gauche cinq secondes. Effectivement, sur le plan communal, les étrangers peuvent déjà voter, donc ce serait un pas en avant vers une extension de leurs droits. Manque de bol pour la gauche, une étude publiée par l'Université de Genève écrit noir sur blanc que les étrangers votent significativement moins que les Suisses, à tel point qu'ils ne seraient même pas 20% à se rendre aux urnes le dimanche. Je ne soutiens pas que puisqu'ils ne votent pas en masse, il ne faudrait pas leur octroyer de droits civiques, mais force est de constater qu'on ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif.

Par ailleurs, on a entendu que l'association qui a lancé cette initiative est composée de... (Commentaires.) J'aimerais bien pouvoir terminer, Madame la présidente ! On a entendu que l'association qui a lancé cette initiative est composée de personnes étrangères; je le sais bien, parce que j'ai été regarder un peu à gauche, à droite, et il est merveilleux de constater que l'une des personnes formant cette association, qui est d'origine... Bon, je ne vais pas préciser de quelle origine elle est, je n'ai pas envie qu'on la montre du doigt, mais cette personne disait très clairement: «Moi, je veux voter, mais en revanche, le passeport helvétique, je n'en veux pas.» Je m'excuse, mais c'est déjà une marque significative de quelqu'un qui ne veut pas s'intégrer, qui ne veut pas être suisse.

Une dernière petite chose. Si on revoit maintenant le système de vote, je vais aller plus loin dans mes propos avec cette question: au sein des partis politiques, de manière générale, comment êtes-vous élus ? Vous allez me répondre que vous êtes élus par le peuple. Certes, mais vous êtes d'abord élus par vos adhérents, respectivement par vos militants. Pourquoi ? Parce que vous faites partie d'un club, au fond. Dès lors, en suivant votre logique, eh bien je me ferai un grand plaisir de venir à vos assemblées et de ne pas voter pour vous. Pour toutes ces raisons, nous ne soutiendrons pas cette initiative. Merci, Madame la présidente.

La présidente. Merci bien. Mesdames et Messieurs, je me permets de rappeler qu'il s'agit d'un débat de soixante minutes avec six minutes par groupe, donc vous avez le temps de vous exprimer. Si vous n'êtes pas d'accord avec les propos des autres intervenants, appuyez sur votre bouton et prenez la parole, mais ne le faites pas en même temps qu'eux. La parole va à Mme Xhevrie Osmani.

Mme Xhevrie Osmani (S). Merci, Madame la présidente. Nous traitons ce soir d'un sujet passionnant touchant aux droits les plus fondamentaux dans une démocratie. C'est d'ailleurs dans l'optique d'un renforcement de ceux-ci que l'initiative a été déposée, et ce serait la pervertir que de faire croire qu'elle ne vise que des intérêts électoralistes. Je signale que l'IN 189 a été lancée par plusieurs acteurs de la société civile. J'irai même plus loin en rappelant que le PL 12441 avait été soutenu par une bonne partie du Centre et que le PLR avait même participé à l'élaboration d'amendements pour le remanier.

Les débats sont d'autant plus passionnés qu'on connaît la culture politique helvétique, une démocratie semi-directe où l'exercice des droits politiques est souvent sollicité. La plupart des votations dans le monde ont lieu dans notre pays, nous sommes régulièrement appelés à nous prononcer sur de nombreux objets - à cet égard, je rappellerai à ma préopinante qu'ils ne sont pas très fréquents ni saillants au niveau des communes -, mais quand je dis «nous», je parle d'une Suisse où 25% de la population est sous-représentée, et ce taux s'élève même jusqu'à 40% à Genève.

Notre conception de l'intégration implique une absence totale des droits politiques jusqu'à l'obtention de la nationalité. Cela empêche les étrangers d'élire les personnes qui les représenteront et de s'exprimer sur tout sujet constitutif de l'avenir de notre collectivité. Chacun sait que l'acquisition du passeport helvétique n'est pas chose aisée, nous connaissons toutes et tous le régime de naturalisation exigeant de la Suisse, qui est l'un des systèmes les plus restrictifs du monde. Depuis 2018, avec le durcissement de la loi, on en demande toujours plus aux gens, allant même jusqu'à leur faire regretter d'avoir été dépendants financièrement. C'est une manière très étroite de concevoir l'intégration, puisqu'elle exclut davantage qu'elle ne contribue à rendre le processus dynamique.

Il a été indiqué que la Suisse compte une importante population d'origine étrangère: dans un classement mondial comparant le pourcentage de résidents nés à l'étranger dans chaque pays, elle se place douzième et même première en Europe. La Suisse a été une terre d'émigration et d'immigration, mais reste l'un des derniers bastions du droit du sang.

Il est important de comprendre que la citoyenneté doit être dissociée de la nationalité. Prenons un exemple: on ne reprocherait pas à quelqu'un qui vient du Tessin de ne rien saisir au fonctionnement de Genève et de ne pas maîtriser la langue; cette personne s'abstiendra vraisemblablement ou votera par consigne, mais elle sera tout de même considérée comme plus citoyenne qu'un individu étranger vivant ici depuis de nombreuses années.

Je tiens encore à souligner un fait essentiel: les études démontrent que la citoyenneté complète l'intégration des personnes résidentes et que les lacunes dans ce domaine sont aussi le résultat du non-exercice des droits politiques. Mesdames et Messieurs les députés, lier les droits civiques à la seule nationalité constitue une vision archaïque de notre démocratie, ce n'est pas le meilleur moyen de la rendre vivante.

Les gens ne vont pas attendre la naturalisation pour se prononcer, comme en témoignent d'ailleurs d'autres cantons - ceux du Jura et de Neuchâtel -, et ne soyez pas naïfs quant à celles et ceux qui décident de franchir le pas. Il y a certes le projet de devenir suisse, mais il y a également des réalités concrètes: ils ne le font pas dans le seul but de voter, d'élire ou de se présenter à des élections, mais aussi pour faciliter leurs conditions de vie, et vous le savez très bien. Il est de notoriété publique que postuler en tant que Suisse augmente les chances de décrocher un emploi ou de trouver un logement.

Il est temps de rendre notre démocratie plus représentative, chemin sur lequel d'autres se sont déjà lancés. Je vous invite dès lors, Mesdames et Messieurs, à voter favorablement sur l'initiative ainsi qu'à réserver un bon accueil au principe d'un contreprojet, qui viendraient tous deux étendre les droits démocratiques. Merci. (Applaudissements.)

M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chers collègues, concernant l'initiative 189, pour le groupe Libertés et Justice sociale, les choses sont claires: nous refuserons le droit de vote et d'éligibilité des étrangers sur le plan cantonal, mais entrerons en matière sur le principe d'un contreprojet. Ces nouveaux droits entraîneraient une modification de la constitution et de certaines dispositions légales, ce qui paraît peu adéquat aujourd'hui. Par conséquent, nous vous invitons à soutenir le renvoi en commission afin que nous puissions y élaborer un contreprojet. Merci.

M. Pierre Conne (PLR). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe PLR s'opposera à l'initiative de même qu'au principe d'un contreprojet. Selon le rapport de majorité, pour assurer le bon fonctionnement démocratique de notre pays, il faudrait donner les droits de vote et d'éligibilité aux personnes étrangères à partir de huit ans de résidence dans notre pays. Je pense que cette approche confond deux choses.

Le bon fonctionnement démocratique est une chose, nous l'interprétons comme le bon fonctionnement des institutions démocratiques, et celles-ci ont été conçues par les Suisses pour les Suisses; c'est ce bon fonctionnement des institutions démocratiques qui fait que la Suisse est ce qu'elle est aujourd'hui, qui fait que la Suisse est attractive pour les étrangers qui, eux, viennent participer au bon fonctionnement du pays et s'engagent sur le plan de l'économie, des activités culturelles et de l'ensemble des aspects sociétaux afin que la nation soit prospère dans tous les domaines. Le groupe PLR maintient sa position selon laquelle les droits de vote et d'éligibilité doivent rester en main des Suisses.

Il est vrai qu'à Genève, le droit de vote pour les résidents étrangers existe à l'échelle communale, mais nous tenons à rappeler que les communes genevoises ne légifèrent pas; participer directement à la bonne gestion communale et légiférer à un niveau cantonal constituent deux enjeux différents.

Le groupe PLR n'entend pas octroyer les droits de vote et d'éligibilité au plan cantonal aux personnes étrangères vivant à Genève, considérant qu'elles ne doivent pas accéder à la possibilité de légiférer. C'est par la voie législative que nous allons continuer à faire vivre nos institutions démocratiques et à garantir qu'à l'avenir, notre pays évoluera de façon souhaitable pour tout le monde. Nous vous invitons dès lors, Mesdames et Messieurs, à refuser l'initiative ainsi que le principe d'un contreprojet. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

M. Patrick Dimier (MCG). S'il est un projet enthousiasmant, c'est le projet suisse. Le fait d'être suisse confère une dynamique, fait naître une volonté de participation et d'intégration des uns et des autres en fonction - véritablement en fonction - de leurs origines. Certains votes au sein de notre pays prennent des directions auxquelles on ne s'attendait pas, parce qu'on n'a tout simplement pas pris en compte l'origine de certains de nos compatriotes.

Cela étant, je n'ai jamais vu qu'on propose à des personnes de participer à un projet sans être membre du club ! Il faut bien évidemment adhérer à notre fantastique projet pour pouvoir bénéficier de l'ensemble des droits qui y sont liés, et ceux-ci sont non seulement nombreux, mais surtout exercés avec une grande conviction.

On nous dit souvent: «Il n'y a que 35% de votants.» Ce qu'on oublie, c'est que ces 35% ne sont pas les mêmes d'une votation à l'autre, ce qui fait qu'en réalité, le taux de participation des citoyens est de beaucoup supérieur à 50%.

La seule solution envisageable, c'est d'être membre du club. C'est la raison pour laquelle nous nous opposerons à cette initiative ainsi qu'à toute autre tentative qui irait dans le même sens. C'est tellement bien d'être suisse, Mesdames et Messieurs, soyez-en fiers et soyons-en heureux ! Merci.

M. Yves Nidegger (UDC). L'argument le plus boomerang qui ait été énoncé ce soir est venu des rangs socialistes, un brillant orateur s'indignant de ce que l'on puisse saucissonner la citoyenneté et soutenant: «Le droit de vote pour les personnes étrangères existe à partir d'un certain temps au niveau communal, il est immoral de leur refuser le même droit au niveau cantonal, car la citoyenneté est une et indivisible.»

Or c'était précisément là l'argument des opposants au droit de vote des étrangers sur le plan communal il y a quelques années, Mesdames et Messieurs, et vous reconnaissez aujourd'hui avoir procédé à ce saucissonnage - enfin, à ce qu'on appelle la tactique du salami - en relevant ce que soulignaient vos adversaires d'hier, c'est-à-dire que la citoyenneté suisse est ainsi conçue que nous sommes à la fois des citoyens communaux, cantonaux et fédéraux, que c'est en cela que consiste le fait d'être citoyen et qu'il est malsain de vouloir le saucissonner.

Je suis en désaccord avec M. Conne lorsqu'il indique que les choses sont différentes; certes, les prérogatives communales ne sont pas les mêmes que les cantonales et les fédérales, mais la citoyenneté est un tout qu'on ne peut pas compartimenter.

Pourquoi cet argument a-t-il un effet boomerang ? Parce qu'il fait fi de ce que les règles qui donnent accès aux Chambres fédérales, du moins au Conseil national, sont d'ordre fédéral et que, partant, jamais un canton - pas même Genève - ne serait compétent pour accorder l'intégralité de la citoyenneté à des personnes d'origine étrangère, tout simplement parce que le droit supérieur l'interdit.

Chers collègues des bancs de gauche, ne saucissonnons pas la citoyenneté et repentons-nous de l'avoir fait dans le passé en retranchant l'aspect communal qu'on a considéré à tort comme quantité négligeable, comme quelque chose qu'on pouvait sacrifier sans grande peine. Ce qu'il faudrait au contraire, Mesdames et Messieurs, et cela se justifie quand on observe le taux de participation des étrangers dans les communes aujourd'hui, c'est revenir sur les droits politiques communaux. Soyez sûrs que dès le lendemain de la votation qui rejettera cette initiative, c'est une initiative de notre part qui sera lancée.

Quant au contreprojet, naturellement, il n'en est pas question. Un contreprojet, c'est ce que vous faites lorsque vous dites: «Bonne question, mauvaise réponse; nous allons apporter une meilleure réponse à votre bonne question.» Ici, la question est mauvaise, il est dès lors exclu, sur le principe, d'envisager un contreprojet. Je vous remercie.

M. Sébastien Desfayes (LC). Le groupe Le Centre adoptera la liberté de vote sur l'initiative et le principe d'un contreprojet. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Madame Virna Conti, vous avez vingt-cinq secondes.

Mme Virna Conti (UDC). Merci, Madame la présidente, cela suffira amplement. Je bondis de ma chaise quand j'entends ce qui a été affirmé. On a fait référence aux Suisses italiens ou aux Suisses allemands qui pourraient venir à Genève, respectivement y voter. Alors bon, j'ai tout de même appris une chose aujourd'hui, c'est qu'apparemment, la diversité dérange la gauche. On marche vraiment sur la tête ! Voilà, c'est tout. Merci, Madame la présidente.

M. Leonard Ferati (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord réagir à l'intervention de Mme Conti, qui attribue des caractéristiques animales aux personnes étrangères en affirmant qu'on ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif. Ces propos sont au mieux totalement inappropriés, au pire proprement scandaleux. (Applaudissements.) L'UDC passe son temps à donner des leçons de morale, et j'aimerais rappeler à ses représentants que ce type de discours n'a pas sa place dans cette honorable assemblée. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

La présidente. Merci...

M. Leonard Ferati. Je n'ai pas fini.

La présidente. Ah, vous n'avez pas terminé. (Commentaires.) S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs, un peu de silence ! J'ai déjà signalé que si l'un d'entre vous a une réaction à manifester, il faut appuyer sur le bouton et je lui donnerai la parole le moment venu.

M. Leonard Ferati. Qu'est-ce qu'elle est belle, notre démocratie ! Elle est enviée de part et d'autre du globe. Mais permettez-moi de vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que notre démocratie est imparfaite, partiale et partielle. Notre système clive les Genevoises et les Genevois entre celles et ceux qui votent et celles et ceux qui ne votent pas; il discrimine politiquement celles et ceux qui sont déjà lésés sur le plan de l'emploi, du logement et en matière administrative; il désavantage des personnes qui participent à la vie sociale, économique et fiscale du canton.

Il est important de poser la question éthique de la légitimité de la démocratie: comment pouvons-nous concevoir que nos institutions gouvernent ce canton en se servant des recettes fiscales amenées en partie par les étrangers, mais discriminent ces derniers lorsqu'il s'agit de prendre des décisions politiques qui les concernent ? Sommes-nous assez matures pour dissocier la nationalité de la citoyenneté ? La participation électorale des résidents étrangers ne rendrait pas notre démocratie moins belle; celle-ci serait au contraire plus légitime, plus accomplie, plus grande et montrerait à quel point Genève est avant-gardiste sur le plan du fonctionnement politique. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Francisco Taboada (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, c'est très humblement que je vais tenir un discours non pas juridique, mais plutôt émotionnel. Je suis d'origine espagnole, je suis non voyant; ma vie a été l'inclusion. C'est une fierté pour moi d'être devenu suisse, c'est quelque chose d'extrêmement important à mes yeux, et je remercie la Suisse de m'avoir accueilli lorsque j'avais cinq ans.

Oui, mes parents sont venus dans ce pays pour pouvoir me payer les opérations dont j'avais besoin pour mes yeux. La Suisse leur a offert cette opportunité, ils l'ont saisie et ont rendu la pareille par leur travail, par l'éducation qu'ils m'ont transmise et qui m'amène aujourd'hui à me trouver très modestement à vos côtés.

Je suis fier de ce parlement, je suis fier d'être suisse et je pense qu'avant toute chose, avant d'octroyer des droits... Alors oui, on peut accorder des droits, mais quelle est leur valeur ? Je ne prétends pas qu'il faut tout mériter dans la vie, mais s'inclure, c'est apprendre à vivre avec l'autre, c'est s'intégrer avec l'autre, ce n'est pas une question de durée de présence dans un endroit. Voilà, ce que j'exprime ici est vraiment très émotionnel. Comme l'a indiqué tout à l'heure mon collègue LJS Jean-Louis Fazio, nous irons plutôt dans le sens d'un contreprojet. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Mauro Poggia (MCG). Chères et chers collègues, ce qui est présenté ici comme une marque de respect envers les femmes et les hommes qui font notre quotidien et qu'on voudrait, après huit ans sur notre territoire, faire participer pleinement à la vie politique du canton constitue en réalité une manifestation d'irrespect pour ces autres femmes et hommes qui ont fait et qui font Genève et qui, après des années dans notre canton, ont franchi le pas pour acquérir la nationalité suisse avec tout ce que cela implique.

Pour avoir procédé à l'assermentation de centaines de nouveaux Confédérés, de nouvelles Genevoises et de nouveaux Genevois, je peux vous assurer à quel point cette démarche est importante à leurs yeux, à quel point ce processus solennel et ce moment de partage représentent véritablement une avancée dans leur parcours d'intégration au sein de notre pays. Je peux vous garantir - on le dit souvent, cette phrase est sans doute galvaudée - qu'il n'y a pas plus suisses que les personnes qui ont obtenu la nationalité helvétique. Et ces gens-là méritent notre respect.

Que leur dire aujourd'hui si, finalement, votre conclusion est qu'une partie de cette nationalité et des droits qui y sont attachés sont accordés à d'autres simplement parce qu'ils vivent ici ? Non, il faut être davantage que juste présent pour disposer des droits liés à notre nationalité. Si l'on pouvait avoir de la compréhension à une certaine époque, lorsque la double nationalité n'était pas possible et qu'on devait renoncer à une partie de ses racines pour devenir suisse, cela n'est plus vrai à l'heure actuelle.

Les personnes qui ne franchissent pas le pas, mais exigent malgré tout d'exercer certaines prérogatives inhérentes à notre nationalité n'ont pas d'excuses. Je ne peux pas comprendre que quelqu'un soutienne: «Je ne veux pas être suisse, mais je demande à être élu, à occuper des fonctions gouvernementales ou parlementaires, parce que je vis ici depuis assez longtemps.» Nous ne pouvons pas l'accepter, par respect pour toutes celles et ceux, dont je fais humblement partie, qui ont fait l'effort de donner pour recevoir. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Yvan Zweifel (PLR). Mesdames et Messieurs, permettez-moi de poursuivre l'analogie qui a été établie par notre collègue Virna Conti et reprise par M. Patrick Dimier. Imaginons que la Suisse soit - on parlait de club - une association. Est-ce que dans une association, Mesdames et Messieurs, qu'elle soit sportive, culturelle ou politique, les membres accepteraient que quelqu'un qui n'est pas adhérent, qui n'est pas en règle avec ses cotisations vienne à l'assemblée générale, vote les investissements de l'organisation, élise son comité ?

Est-ce que, Mesdames et Messieurs du parti socialiste, vous seriez d'accord qu'une personne qui se dit socialiste, mais qui ne possède pas la carte du parti, n'a jamais demandé son adhésion ni versé de cotisation participe à l'assemblée générale et décide si M. Wenger peut continuer à présider ou non le parti ? Moi, je l'aime bien, ne vous méprenez pas, mais je ne peux pas venir voter pour lui. Idem pour les Verts.

La réponse, Mesdames et Messieurs, est bien sûr que non. Parce que ce que l'on attend d'abord d'un individu qui partage les idées socialistes ou Vertes - ou n'importe lesquelles, d'ailleurs - ou encore les positions d'un club culturel ou sportif, eh bien c'est de soumettre son adhésion. C'est aussi simple que cela, et pour un pays, cela passe par la naturalisation, par la demande de la nationalité. Mesdames et Messieurs, ce que vous n'acceptez pas pour vous-mêmes et vos partis politiques, vous n'avez pas le droit de l'imposer au reste du pays. (Applaudissements.)

La présidente. Merci. Je donne la parole à M. Murat-Julian Alder pour deux minutes vingt.

M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on entend souvent, dans certains cercles intellectuels, que Genève serait en retard par rapport au reste de la Suisse romande en matière de droits politiques des étrangers. Alors il est vrai que d'autres cantons romands sont beaucoup plus généreux que nous dans ce domaine, mais qui sont les responsables de cet état de fait, Mesdames et Messieurs ? Ce sont celles et ceux à l'origine des initiatives «J'y vis, j'y vote» qui, à l'époque déjà, soutenaient l'idée qu'il suffisait de vivre pendant huit ans quelque part en Suisse, peu importe la commune, peu importe le canton, pour pouvoir bénéficier immédiatement des droits civiques à Genève. En d'autres termes, celle ou celui qui habite pendant huit ans à Bümpliz, dans le canton de Berne, ou encore à Ziefen, dans le canton de Bâle-Campagne, en arrivant à Genève, sans même avoir à parler le français, disposerait automatiquement des droits politiques.

Partout ailleurs en Suisse romande, là où les résidents étrangers ont le droit de vote, que ce soit au niveau communal ou cantonal, cela a toujours été lié exclusivement au permis C, à l'autorisation d'établissement, et non pas au simple écoulement du temps. La durée ne crée aucune intégration. Aujourd'hui, fort heureusement, on n'obtient plus le permis C automatiquement, il y a un examen du degré d'intégration de la personne qui en présente la demande.

Si on voulait aller dans le sens du plus généreux des cantons romands, la moindre des choses serait de revoir les ambitions à la baisse et de proposer que les droits citoyens soient liés au permis C. Mais cela n'intéresse pas la gauche, qui veut juste brader les droits politiques pour remporter les élections après avoir convaincu de nouveaux électeurs qu'elle aura fidèlement associés à son destin. Voilà la réalité ! Depuis toujours, votre démarche est totalement opportuniste, et cela, la droite n'en veut pas. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

M. Pierre Eckert (Ve). Je ne vais pas entrer dans le fond des éléments qui viennent d'être mentionnés. J'ai tout de même été un peu surpris d'entendre toute cette polémique autour de la notion de club. Le club dont nous faisons partie, c'est la Suisse; on parle de nationalité suisse, de droits de vote et d'éligibilité au niveau national. Pour moi, c'est ça, le club. Dans le cas d'espèce, il ne s'agit pas de ça, mais de droits politiques aux échelons communal et cantonal. Ce n'est pas du tout le même club.

Comme cela a été souligné par le rapporteur de majorité, les sujets qui pourraient se révéler intéressants pour des personnes d'origine étrangère vivant dans le canton depuis un certain temps sont extrêmement proches de leurs préoccupations: il peut s'agir de l'école, des horaires d'ouverture des magasins. En ce qui concerne l'âge de la retraite ou d'autres objets d'envergure fédérale, il n'en est pas question ici. A mon sens, on peut soutenir le fait que des résidents étrangers bénéficient d'un certain nombre de prérogatives supplémentaires dans leur commune ou leur canton.

Nous avions franchi le pas en 2005 en leur accordant le droit de vote sur le plan communal. Vous vous en souvenez peut-être, Mesdames et Messieurs, mais l'objectif des initiants n'était pas forcément de restreindre cela au droit de vote; ceux-ci ne souhaitaient pas diviser les droits politiques, mais accorder à la fois le droit de vote et d'éligibilité. Voilà pourquoi il y a eu deux initiatives, et le peuple a finalement préféré emprunter une direction restreinte et octroyer uniquement le droit de vote.

Ce droit de vote communal fonctionne bien. Vous pouvez bien prétendre que la participation n'est pas élevée, mais au niveau communal, à l'exception peut-être de la Ville de Genève, on se rend aux urnes au mieux tous les cinq ans, alors bien entendu, ce n'est pas ancré dans les habitudes. Aussi, mettre simplement en avant un faible taux de participation est un argument qui ne tient pas.

Maintenant, c'est le moment d'essayer de réaliser un pas de plus, et avec cette initiative, on franchit un grand pas supplémentaire. Nous sommes bien conscients que cette avancée n'est pas du goût d'une grande partie des groupes politiques qui se trouvent ici, on l'a entendu. Encore que pour moi, et je respecte notamment l'opinion du Centre, le fait d'étendre ou pas les droits politiques relève plutôt d'un choix individuel.

Un certain nombre de points particuliers de l'initiative ont été relevés qui ne conviennent pas, comme la représentation au Conseil des Etats, l'éligibilité au sein des exécutifs, la durée de résidence. Ecoutez, pour notre part, nous sommes prêts à discuter. Il est vrai qu'actuellement, toute personne venant à Genève depuis n'importe quelle autre commune de Suisse dispose directement du droit de vote au niveau communal; nous sommes ouverts au débat si vous souhaitez instaurer une durée minimale de résidence dans la commune ou le canton, ce n'est pas un problème.

Ce que je veux dire, c'est que nous tendons très volontiers la main à tous les députés de bonne volonté qui siègent dans ce parlement et qui soutiennent une extension, quelle qu'elle soit, des droits politiques des personnes étrangères, de façon que nous élaborions ensemble un contreprojet qui puisse constituer le plus grand dénominateur commun entre les partis représentés ici. (Applaudissements.)

M. Djawed Sangdel (LJS). Chers collègues, on ne parle pas des étrangers, mais des citoyens suisses ou genevois. Il ne s'agit pas seulement des membres du club, il s'agit de citoyens qui sont actifs pour l'image de la Suisse, qui contribuent à l'économie de notre pays, de notre canton.

Je partage avec vous mon expérience personnelle: j'ai fait les démarches pour obtenir la nationalité en 2009, mais avant cela, je représentais la Suisse dans 128 pays. Je n'étais pas suisse, mais j'adorais la Suisse, je suis tombé amoureux de notre pays, de notre canton, et je représentais la Suisse.

Aujourd'hui, il faut mieux intégrer les étrangers - les citoyens, faudrait-il plutôt dire - qui habitent à Genève depuis non seulement huit ans, mais dix, quinze, vingt, vingt-cinq, trente, quarante ans. Ce n'est pas seulement à travers le passeport helvétique qu'on peut s'intégrer, de nombreux résidents ne possèdent pas la nationalité suisse et sont mieux intégrés que certains locaux. Pour les motiver, pour leur donner des prérogatives dans un pays comme la Suisse qui présente une grande diversité, il faut revoir leurs droits.

Nous devons renvoyer ce texte en commission pour bien l'étudier, parce qu'il s'agit d'une question sensible, importante pour notre citoyenneté. Personnellement, et le groupe LJS avec moi, je propose un renvoi en commission afin d'y élaborer un contreprojet, afin d'examiner, d'approfondir le sujet et de revenir avec des résultats scientifiques et pertinents. Faisons-le pour notre canton, car nous sommes fiers des étrangers qui vivent à Genève. Je vous remercie beaucoup, Mesdames et Messieurs les députés, Madame la présidente.

La présidente. Merci. Je rappelle quelques éléments de procédure: nous allons d'abord nous prononcer sur l'initiative, puis sur le principe d'un contreprojet; si celui-ci est accepté, le rapport sera renvoyé en commission en vue de sa conception. La parole revient maintenant... (Remarque.) Ah, excusez-moi. Non, Monsieur Mizrahi, vous n'avez plus de temps de parole. Monsieur Jean-Pierre Pasquier, c'est à vous pour quarante-cinq secondes.

M. Jean-Pierre Pasquier (PLR), rapporteur de minorité. Oui, Madame la présidente, merci. Mesdames et Messieurs, j'aimerais très rapidement reprendre les propos de Mauro Poggia et de Francisco Taboada et vous dire que dans cette salle, nous sommes certainement nombreux, et j'en suis, à avoir des parents - un père, une mère - issus de l'immigration qui ont fait l'effort d'obtenir le passeport suisse; nous sommes certainement nombreux à avoir des amis proches qui ont fait l'effort de réaliser tout le processus de naturalisation. Non, au début du XXIe siècle, le passeport suisse n'est pas quelque chose d'archaïque, bien au contraire, c'est l'élément essentiel d'une intégration réussie. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser le principe d'un contreprojet tout comme cette initiative. Merci, Madame la présidente.

La présidente. Je vous remercie et rends la parole à M. Romain de Sainte Marie pour quarante-cinq secondes.

M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, le rapporteur de minorité a mentionné des ateliers sur l'aménagement du territoire pour les étrangers. Tentez l'exercice mental quelques instants: vous vivez dans un pays depuis plus de huit ans, vous y faites vos courses, vous y travaillez, vos enfants y vont à l'école et on vous propose, comme forme d'intégration, un atelier sur l'aménagement du territoire ! C'est ça, l'intégration ? Non, ce n'est pas ça ! L'intégration, c'est pouvoir faire entendre sa voix, c'est pouvoir voter, c'est pouvoir être élu.

J'ai entendu parler d'association. Mesdames et Messieurs, lorsque quelqu'un joue au foot sur un terrain qui appartient au canton de Genève, lorsqu'il paie sa cotisation, c'est-à-dire des impôts, à ce moment-là, oui, il fait partie du club; oui, il a le droit de voter; oui, il a le droit d'être élu ! (Applaudissements.)

La présidente. Merci. Je passe la parole... (Commentaires.) S'il vous plaît ! Le débat s'est plutôt bien déroulé jusqu'à présent, ce serait bien qu'on puisse le terminer dans le calme. Je cède la parole à M. le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz.

M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le débat s'est en effet bien déroulé et le Conseil d'Etat sera bref dans sa prise de parole - peut-être pas aussi bref que le représentant du Centre -, parce qu'il souhaite que le processus avance. Nous avons besoin d'une démocratie vivante qui puisse se renouveler, qui puisse apporter des avancées en matière de droits politiques.

Le Conseil d'Etat se tient à disposition de la commission pour trouver, dans le cadre d'un contreprojet, une proposition qui rassemble les groupes. Nous avons vu certains fronts figés, nous avons entendu quelques termes malheureux. Le respect de la démocratie doit s'exprimer dans l'ensemble des dispositifs existants. Un contreprojet est souhaité par le Conseil d'Etat, lequel collaborera avec la commission qui l'élaborera. Il existe plusieurs variantes, différentes possibilités pour faire avancer notre démocratie cantonale et communale; nous souhaitons y travailler, y réfléchir, analyser les choses.

Les propos de certaines et certains membres de ce parlement méritent d'être explicités, parce que quand on dit que les étrangères et étrangers votent plus pour la gauche, c'est faux. On entend également que la participation des habitantes et habitants étrangers aux votations communales est plus faible; c'est vrai, mais pourquoi est-ce le cas, pourquoi est-ce qu'à un moment donné, on exprime sa voix ? C'est d'abord le sentiment d'appartenance, puis l'habitus du vote. Lorsqu'on est citoyenne et citoyen d'une commune et que l'on ne participe qu'une fois tous les cinq ans à un processus de votation ou d'élection, l'usage ne s'établit pas. L'espacement entre les échéances ne crée pas l'habitude: dans les communes genevoises, il est assez rare que des référendums ou des initiatives soient lancés qui requièrent une participation citoyenne, respectivement donnent lieu à un débat démocratique municipal. A cet égard, l'étude de l'UNIGE évoquée par Mme la députée Conti montre bien cet élément-là aussi, à savoir qu'il faut avoir l'habitude de prendre part à des scrutins démocratiques pour continuer à le faire de manière plus régulière.

En conclusion, Madame la présidente, Mesdames les députées, Messieurs les députés, le Conseil d'Etat souhaite que nous travaillions ensemble sur un contreprojet dont les termes restent encore à définir.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. A présent, j'ouvre la procédure de vote.

Mise aux voix, l'initiative 189 est refusée par 60 non contre 35 oui (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est refusé par 51 non contre 43 oui et 2 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Vote nominal

M 2929-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Julien Nicolet-dit-Félix, Marjorie de Chastonay, Dilara Bayrak, Emilie Fernandez, Léo Peterschmitt, Cédric Jeanneret, Lara Atassi, Sophie Bobillier, Pierre Eckert, Laura Mach, David Martin, Caroline Marti, Cyril Mizrahi, Grégoire Carasso, Jean-Charles Rielle, Sophie Demaurex, Sylvain Thévoz : Projet d'horaire CFF à partir de 2025 - Préservons une desserte ferroviaire de qualité entre notre canton et le reste de la Suisse
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de M. Michael Andersen (UDC)
M 2930-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Murat-Julian Alder, Céline Zuber-Roy, Pierre Nicollier, Joëlle Fiss, Francine de Planta, Vincent Subilia, Cyril Aellen, Natacha Buffet-Desfayes, Marc Saudan : Dans l'intérêt des voyageurs, des pendulaires et du transfert modal : Garantissons la liaison ferroviaire Genève-Neuchâtel et évitons un réseau à deux vitesses !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de M. Michael Andersen (UDC)

Débat

La présidente. Nous commençons le traitement de nos urgences avec deux motions, la M 2929-A et la M 2930-A, traitées en catégorie II, trente minutes. Je sais que, comme d'habitude, des gens souhaitent fêter ou regretter les votes précédents; qu'ils n'hésitent pas à le faire à la buvette, car nous continuons nos travaux. Monsieur le rapporteur, si vous demandez la parole, je vous la donnerai; il faut appuyer sur le bouton pour cela. Vous avez la parole.

M. Michael Andersen (UDC), rapporteur. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, la commission s'est réunie à deux reprises afin de traiter ces motions de manière conjointe. Dans le cadre de ses travaux, la commission a auditionné, outre les auteurs, M. David Fattebert, directeur régional des CFF pour la Suisse romande, qui a répondu très rapidement à notre invitation - j'en profite pour le remercier à nouveau d'être venu si rapidement devant la commission - ainsi que MM. Favre et Pavageau, de l'office cantonal des transports.

Commençons par rappeler le contexte de ces motions. Celles-ci font suite à l'annonce conjointe des CFF et de la Conférence des transports de la Suisse occidentale, le 5 mai 2023, d'importantes modifications de l'horaire CFF en Suisse romande pour la période 2025 à 2034, qui entreront théoriquement en vigueur au mois de décembre 2024. Ces modifications affectent considérablement notre canton: elles allongent de 4 minutes le temps de trajet en direction de Lausanne, et donc de tous les cantons suisses, et suppriment les liaisons directes entre Genève et Zurich et entre Genève et Bâle via le pied du Jura sauf aux heures de pointe. Désormais, un changement de train sera nécessaire à Renens, et un allongement du temps de trajet de 8 minutes impactera ces différents parcours. Ces nouveaux horaires sont appelés à durer au moins dix ans.

Dans le cadre de l'audition de M. Fattebert, mention a été faite du réseau et des infrastructures en Suisse romande. 25% des voies ferrées de Suisse romande ont dépassé leur durée de vie théorique, ce qui est un pourcentage très conséquent, et des travaux d'entretien, qui ont mené à l'établissement de ce nouvel horaire, sont inévitables - le directeur des CFF pour la Suisse romande l'a souligné.

L'offre s'est grandement développée en Suisse romande, et même plus rapidement qu'en Suisse allemande. M. Fattebert l'a rappelé: depuis 2011, l'offre a augmenté de 20% en Suisse romande, et de 10% en Suisse allemande. Mais il est surtout important de rappeler les investissements effectués sur les infrastructures. Quasi aucun n'a été fait en Suisse romande, tandis que l'offre a augmenté de 20%; des millions d'investissement en Suisse allemande ont été faits et l'offre a, certes, augmenté, mais de manière moins importante. Cela conduit en Suisse romande à un réseau et à des infrastructures aujourd'hui complètement saturés, avec les conséquences que vous connaissez, par exemple le fameux trou de Tolochenaz et l'impact qu'il a eu sur notre réseau ferroviaire.

Bien entendu, la commission est consciente que ces motions auraient pu être perfectionnées, qu'elles sont perfectibles; mais l'urgence est là, et le pragmatisme a pris le dessus dans les travaux des commissaires. La pression doit être maintenue afin d'obtenir un soutien plus important de la Confédération, notamment financier, dans le cadre du développement des infrastructures de Suisse romande, avec entre autres la création d'une deuxième ligne. Par ailleurs, suite à cet horaire qui péjore la Suisse romande, ces motions demandent des mesures compensatoires, comme des changements quai à quai en gare de Renens ou des transports de bagages pour l'aéroport. Pour toutes ces raisons, la commission a soutenu ces deux motions à l'unanimité et vous invite à les renvoyer au Conseil d'Etat. Merci, Madame la présidente.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je suppose que chacune et chacun se rappelle cette journée du 5 mai dernier: lors d'une conférence de presse des CFF et de la CTSO, on apprenait que le nouvel horaire prévu sur une durée de dix ans pour la Suisse, et notamment la Suisse occidentale et notre canton, allait péjorer de façon considérable la desserte ferroviaire de notre ville et de notre canton.

La stupéfaction que nous avons ressentie était si largement partagée que simultanément, aux deux extrémités de cet hémicycle, nous avons conçu des motions en quelques jours; c'était un peu dans l'urgence, parce qu'il fallait les déposer pour la session du 11 mai. Du reste, je salue celle de notre collègue Murat-Julian Alder qui, une fois n'est pas coutume, était presque parfaitement alignée sur mes opinions. (L'orateur rit.) Je pense qu'il faudra la soutenir, car elle a globalement un but similaire, même si les invites ne sont pas tout à fait les mêmes que celles des Verts.

Je ne vais pas répéter ce que le rapporteur de majorité a dit, si ce n'est que la desserte ferroviaire prévue de notre canton serait considérablement péjorée: il n'y aurait plus de train sans arrêt en direction de Lausanne; les relations sur cette fameuse ligne du pied du Jura, qui étaient un progrès considérable dans l'offre ferroviaire de Suisse romande dans les années 1980 grâce à la mise en service du bypass de Bussigny, seraient supprimées, sauf aux heures de pointe, ce qui impliquerait... (Brouhaha.)

La présidente. Excusez-moi, mais personne ne vous écoute, à part moi.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Oui, je sais ! J'ai l'habitude: je suis enseignant. (L'orateur rit. Hilarité. Applaudissements.)

La présidente. Je suis aussi enseignante et, personnellement, j'aime bien qu'on m'écoute !

M. Julien Nicolet-dit-Félix. En général, mes élèves sont légèrement plus respectueux.

La présidente.  Ça ne vous dérange pas ?

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Oui, ça me dérange, mais comme je le disais, mes élèves...

La présidente. Ah non, je ne parlais pas à vous en l'occurrence ! Je comprends que ça vous dérange. J'aimerais juste... Si d'autres personnes peuvent arrêter... Parfait ! Magnifique ! Alors, entre enseignants, on va essayer de s'écouter.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Je vous remercie, Madame la présidente, je vous remercie, chers collègues. Mes élèves sont un tantinet plus respectueux mais n'écoutent pas forcément beaucoup plus que vous.

Tout ça pour dire qu'on était stupéfait. On a bien compris les arguments des CFF, qui sont des arguments techniques. Ils sont, pour la plupart, parfaitement recevables: il faut que le réseau soit entretenu et amélioré, simplement, nous déplorons le manque d'interventions, et peut-être le manque de volonté politique de notre canton et des cantons de Suisse occidentale au cours des dernières décennies, pour que nous ayons un réseau qui atteigne le niveau de celui de nos compatriotes de Suisse orientale et du Tessin. On peut rappeler par exemple que le temps de trajet entre Genève et Berne a été voué à s'allonger de 9 minutes au cours des vingt dernières années, alors que dans le même intervalle, le parcours entre Berne et Zurich a été raccourci de 17 minutes, et idem entre Berne et Bâle. Quant à celui entre Zurich et Lugano, je ne sais pas si vous arrivez à le deviner: les usagers de cette ligne ont gagné carrément 60 minutes dans le même temps. On voit bien qu'il y a une disparité énorme.

Le contexte politique est évidemment favorable au transfert sur le rail; tout le monde souhaite que l'on puisse abandonner et décongestionner les autoroutes. C'est pourquoi nous vous invitons à soutenir cette proposition de motion, ainsi que la M 2930, qui visent à préserver une desserte de qualité à Genève, et surtout à envisager un avenir plus serein avec la mise en place d'une seconde ligne ferroviaire entre Genève et Lausanne. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, c'est vrai que l'annonce du nouvel horaire CFF a été un véritable choc. Un véritable choc pour la Suisse romande, un véritable choc pour Genève. On l'a dit, on a aujourd'hui deux possibilités par heure pour aller directement à Zurich, une fois en passant par Berne et une fois en passant par la ligne du pied du Jura. Or avec le nouvel horaire, on va nous supprimer la liaison Genève-Zurich par le pied du Jura et, à part aux heures de pointe, nous obliger à changer à la gare de Renens. Alors on aime certainement tous Renens, mais si on pouvait éviter d'y changer, ce serait quand même mieux, surtout - et je le dis sans rigoler - pour les personnes à mobilité réduite, pour celles qui ont des poussettes, des valises, etc. Certes, pour moi, un changement à Renens prend peut-être trente secondes, je vais vite en changeant de quai. Néanmoins, pour un certain nombre de personnes, ce n'est pas aussi facile que ça.

Le choc provient aussi du discours tenu dans le cadre de la politique de la mobilité au niveau suisse. On nous dit: «Il faut absolument changer de paradigme; il faut se diriger beaucoup plus vers le ferroviaire, vers une mobilité plus durable, et réduire les trajets en véhicule individuel motorisé.» Or la réponse consiste à dire: «On va augmenter, pour les Romands, le temps de trajet, notamment sur la liaison vers Zurich.» De plus - on ne l'a pas mentionné dans ces motions, parce que ce n'est pas l'objet -, les tarifs vont également augmenter. On tient donc le discours suivant: «Changez, ne prenez plus votre voiture, prenez le train, mais on va vous augmenter le temps de trajet et les tarifs.» Bien sûr, on fait tout faux dans la politique fédérale des transports. Je crois qu'on peut le dire très clairement: on se plaint parfois un peu, mais concernant le ferroviaire, la Suisse romande est vraiment le parent pauvre. Je pense qu'au-delà d'un Röstigraben, on peut parler d'un «Röstibahnen». (Exclamations.)

Il est vrai que quand arrive un problème sur la ligne entre Genève et Zurich - vous vous rappelez tous le fameux trou de Tolochenaz -, tout est bloqué. Alors que quand survient un problème entre Berne et Zurich, par exemple, il existe de nombreuses possibilités de dévier les trains, et les usagères et usagers ne voient quasiment pas la différence.

Mesdames et Messieurs les députés, nous allons, bien sûr, soutenir ces deux motions; nous devons faire pression sur Berne, sur l'Office fédéral des transports, sur les CFF afin d'essayer d'améliorer cet horaire pour la Suisse romande et pour les Genevoises et les Genevois. De manière générale, nous devons toutes et tous être unis à Berne - on est en campagne pour les élections fédérales - en vue de voter des crédits supplémentaires pour le ferroviaire romand. On a parlé de cette nouvelle ligne ferroviaire entre Genève et Lausanne; on ferait pour une fois mieux de mettre tous nos oeufs dans le même panier, c'est-à-dire dans le domaine du ferroviaire, plutôt que de vouloir également un élargissement de l'autoroute et une traversée autoroutière du lac. On n'est pas crédibles à Berne. Misons tout sur le ferroviaire: c'est le seul moyen de répondre aux objectifs climatiques et environnementaux. Merci. (Applaudissements.)

M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, il est effectivement très heureux qu'avec ces motions les trains PLR et Vert soient entrés en gare simultanément, sans causer de déraillement, et je remercie Julien Nicolet-dit-Félix de son soutien, dont le terminus est mon coeur. (Exclamations.)

Afin de terminer cette soirée sur une note plus légère et plus joyeuse, je vous propose de profiter de ce débat pour redécouvrir l'oeuvre de Ginette Girardier. (L'orateur chante.)

«J'ai un petit train en bois

Qui ne va pas vite ma foi

Mais il peut aller partout

Même sur les cailloux

Tchou tchou tchou...» (Rires. Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Murat-Julian Alder. La vision de la Confédération pour la mobilité en Suisse occidentale, c'est de ne surtout pas encourager les citoyens à renoncer à la voiture au profit du train; c'est de nier le nécessaire transfert de la route vers le rail. Voici un exemple très concret: après avoir supprimé les trains directs entre Genève et Bâle en introduisant une escale à Delémont, on veut ajouter une escale supplémentaire à Bienne sur ce même trajet, sans parler des nombreuses escales annoncées à Renens, prélude possible à des ruptures de charge ultérieures à Romont et à Palézieux.

«J'ai un beau train à vapeur

Qui fait bien du dix à l'heure

Mais il faut le remonter

Pour qu'il se mette à marcher

Tchou tchou tchou...» (Rires.)

La vision de la Confédération pour la mobilité en Suisse occidentale, c'est de ne guère tenir compte du fait que Genève est le seul canton romand contributeur à la péréquation financière intercantonale; c'est de faire comme si la Genève internationale ne jouait aucun rôle dans la politique étrangère et la politique de sécurité de notre pays; c'est comme si notre aéroport n'existait pas, en donnant tout son sens à l'ancien nom officiel de l'aéroport de Zurich, «Unique».

«J'ai un grand train électrique

Qui est tout automatique

Mais je n'ose pas y toucher

C'est Zurich qui le fait marcher

Tchou tchou tchou...»

La vision de la Confédération pour la mobilité en Suisse occidentale, c'est de payer aussi cher que possible pour se déplacer aussi lentement que nécessaire. (Rires.) Alors que nous avons, fort heureusement, rapproché le Tessin du reste de la Suisse, on vient nous dire, les yeux dans les yeux, que le moment est venu de créer une distance supplémentaire entre la Romandie et la Suisse alémanique.

J'aimerais quand même remercier le directeur régional des CFF pour la Suisse romande d'être venu courageusement et promptement dans notre commission pour une audition. Je ne sais pas s'il est venu en train, mais croyez-moi, nous lui avons clairement fait comprendre que nous ne nous laisserons pas mener en bateau. (Rires.)

Mesdames et Messieurs, vous m'aurez compris, les horaires CFF prévus pour les années 2025 et suivantes sont parfaitement inacceptables. C'est pourquoi je vous invite à soutenir sans réserve les deux motions dont nous sommes saisis. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Jacques Jeannerat (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, avec cette décision des CFF, même si elle est justifiée par des travaux qu'on nous a dit être nécessaires et indispensables, Genève et toute sa région se trouvent satellisées. C'est inadmissible: Genève est une ville importante, M. Murat-Julian Alder vient de le préciser. On ne peut donc pas accepter d'être satellisés comme ça, à une époque où - Monsieur Wenger, vous avez raison - on encourage les gens à passer de la route au rail. On nous propose pourtant des allongements de trajet.

Si on avait annoncé des travaux sur la ligne Berne-Olten-Zurich, je n'ose pas imaginer la violence des réactions de la part de nos collègues suisses alémaniques. Comme vous l'avez dit, on baisse la qualité de l'offre et on augmente les prix ! Passez-moi l'expression, Madame la présidente, c'est complètement débile, incompréhensible !

Je souhaite que ce parlement vote à l'unanimité ces deux motions et qu'il n'y ait ni une abstention, ni une voix contre. Comme je l'ai dit en commission, je souhaite que les auteurs principaux de ces deux motions prennent contact avec le Forum interparlementaire romand de manière à ce qu'il y ait aussi des relais de ce type de motion qui soient votés dans les Grands Conseils des cantons voisins. Merci pour votre attention.

M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, pour la première fois, je regrette d'avoir demandé et pris la parole après Murat, parce qu'après la chanson qu'il nous a gentiment fait apprécier, c'est difficile. Comme l'orage est déjà passé, je vais vous épargner la chanson que j'avais également prévue... (Rires.) ...pour éviter de sortir les pieds mouillés. Je serai bref, car tout a déjà été dit. Par ailleurs, j'ai l'impression qu'on s'oriente vers une majorité à suspense, mais on verra ça au moment du vote.

Lors du traitement de ces objets en commission, on a appris plusieurs choses. Premièrement, tous les commissaires ne sont pas des spécialistes des CFF, à l'exception peut-être d'un seul que je ne vois pas dans la salle. On a appris également que M. Fattebert, lui, était un vrai spécialiste: le directeur des CFF pour la Suisse romande nous a franchement bluffés, d'abord par sa passion du sujet et puis par ses explications. Je ne serai pas technique, parce que, franchement, je n'ai pas tout compris - les 5 minutes, les 4 minutes et les 12 minutes. Tout ce que je sais, c'est que les CFF ont bien compris et pris en compte les demandes de Genève.

Je terminerai en remerciant et félicitant le département: on comprend qu'il a fait le job en amont et que les décisions, ou disons la finalité qu'on a malheureusement vécue en mai 2023 par cette annonce, avaient déjà été discutées par le département et anticipées par ses services. Je les en remercie.

Quelques mots encore pour vous dire que Le Centre se joint aux motions afin de rappeler aux CFF qu'un canton qui a quand même donné son nom au plus grand lac d'Europe - le lac de Genève, pour ne pas le citer - ne peut pas être ignoré et voir sa desserte marginalisée. C'est pour ça que Le Centre se joint à l'ensemble du parlement - d'après ce que j'ai cru comprendre - pour accepter et renvoyer ces motions au Conseil d'Etat, et peut-être plus loin à Berne, s'il le faut. Je vous remercie.

M. Yves Nidegger (UDC). Je n'imaginais pas, en prêtant serment dans cet hémicycle, que je serais invité à participer gratuitement à une thérapie de groupe. La discussion que nous avons ce soir est une discussion entre Genevois, qui fait du bien au coeur, parce qu'on n'est pas contents d'avoir des cadences ferroviaires qui vont baisser. L'émotion est parfaitement légitime, elle doit s'exprimer: il est sain que les choses soient dites, tous les psychologues vous confirmeront que c'est plutôt bon pour la santé d'avoir verbalisé la chose plutôt que de vivre avec elle de manière contrainte et réprimée.

Cela étant, les invites de ces motions visent à enjoindre au Conseil d'Etat d'agir. Ce même Conseil d'Etat, qui a suivi tous les travaux fédéraux en lien avec les discussions des horaires CFF, nous expliquait par la bouche du précédent ministre des transports et de la mobilité qu'il n'y avait strictement rien à y faire, que ce que nous avions obtenu n'était pas bien, mais que c'était le mieux possible.

On est en train de s'adresser à un Conseil d'Etat dont la composition a à peine changé pour lui demander d'intervenir plus tard, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a plus rien à faire, dans un domaine sur lequel il aurait pu intervenir en amont, lorsqu'il y avait quelque chose à faire et qu'il a choisi de ne pas le faire. Chers collègues, si vous avez la conviction que ces motions vont faire bouger autre chose que votre estime de vous quand vous vous regarderez dans la glace demain matin, votez-les, mais je m'abstiendrai.

M. Patrick Dimier (MCG). Je tiens à remercier notre préopinant pour la considération qu'il a pour notre assemblée, et je l'invite à prendre une séance de thérapie spéciale pour lui. Merci. (Rires. Applaudissements.)

La présidente. Merci. Monsieur Thévoz, vous n'avez plus de temps de parole, je suis navrée. (Remarque.) Non. (Rires.) Je donne la parole au conseiller d'Etat, M. Pierre Maudet.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, merci pour cet intéressant débat, et notamment pour la contribution de l'ancien conseiller national Nidegger, qui a pu faire la démonstration ce soir de la pertinence de joindre santé et mobilité... (Rires.) ...ce qu'il a d'ailleurs sans doute voté en début de soirée. Il y a des thérapies dont on va entendre parler dans les cinq prochaines années.

Cela dit, Monsieur le député, j'aimerais insister sur l'importance d'une unanimité dans le domaine des mobilités, pour le premier vote de cette assemblée sur ce sujet avec ce nouveau Conseil d'Etat. Il y a quelques jours, on m'a dit: «Tu verras, les transports, la mobilité, c'est très compliqué, c'est très clivant.» Eh bien, Mesdames et Messieurs, si ce soir vous pouvez faire la démonstration, à l'exception de quelques abstentions, que vous êtes réellement derrière un gouvernement qui souhaite développer le ferroviaire, qui souhaite de façon anticipée poser les jalons des plans 2035, 2040, 2050, nous, le Conseil d'Etat, nous prendrons avec beaucoup d'intérêt et d'enthousiasme la marque de confiance que vous nous ferez. Cela nous permettra de pousser ces projets, avec la députation genevoise à Berne qui sera renouvelée, comme vous le savez, cet automne, et d'agir de manière à ne pas nous retrouver dans ces situations paradoxales, pour ne pas dire complètement aberrantes: en quelques décennies, le temps de trajet nécessaire pour accomplir la liaison Paris-Marseille a été divisé par deux, tandis que le temps pour effectuer la liaison Genève-Zurich a augmenté - sans toutefois avoir été multiplié par deux - et qu'on annonce - vous l'avez rappelé avec pertinence, Monsieur Wenger - une augmentation générale des tarifs de 4% pour l'ensemble de la Suisse à l'horizon de 2024, ce qui est un paradoxe absolu.

Nous vous incitons donc à soutenir ces deux motions si possible de manière unanime, et nous nous engageons à vous tenir informés des jalons que nous pourrons poser dans les années à venir pour soutenir ces efforts dans le domaine du ferroviaire. Je vous remercie de votre attention.

La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mise aux voix, la motion 2929 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 89 oui et 3 abstentions (vote nominal).

Motion 2929 Vote nominal

Mise aux voix, la motion 2930 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 88 oui et 3 abstentions (vote nominal).

Motion 2930 Vote nominal

PL 13229-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat pour la promotion de la culture et de la création artistique (LPCCA) (C 3 05)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de Mme Francine de Planta (PLR)

Premier débat

La présidente. Nous passons à la prochaine urgence, soit le PL 13229-A. Je vous rassure, Mesdames et Messieurs: nous n'allons pas entamer le débat, mais comme vous avez eu la gentillesse de prévoir une lecture de courrier et qu'il nous reste encore un peu de temps, je propose que nous procédions à celle-ci; le reste de la discussion aura lieu demain. Je prie Mme Bidaux de bien vouloir nous lire le courrier 4095.

Mme Patricia Bidaux. Merci. Mesdames et Messieurs, je ne suis pas enseignante, donc j'espère que vous aurez l'obligeance de m'écouter !

Courrier 4095

La présidente. Je vous remercie.

Fin du débat: Séance du vendredi 23 juin 2023 à 16h10

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous souhaite un bon retour chez vous. Nous reprendrons nos travaux demain à 14h avec les extraits.

La séance est levée à 22h55.