Séance du
vendredi 25 novembre 2022 à
18h10
2e
législature -
5e
année -
7e
session -
42e
séance
La séance est ouverte à 18h10, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, et Serge Dal Busco, conseiller d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta, Nathalie Fontanet, Thierry Apothéloz et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Diane Barbier-Mueller, Antoine Barde, Natacha Buffet-Desfayes, Jean Burgermeister, Beatriz de Candolle, Thierry Cerutti, Jennifer Conti, Eric Leyvraz, Cyril Mizrahi, Corinne Müller Sontag, Adrienne Sordet, Salika Wenger et Raymond Wicky, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Anne Bonvin Bonfanti, Rémy Burri, Gilbert Catelain, Denis Chiaradonna, Aude Martenot, Françoise Nyffeler, Jean-Pierre Pasquier, Maria José Quijano Garcia, Helena Rigotti, Gabriela Sonderegger et Pascal Uehlinger.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Nous continuons avec l'ordre du jour ordinaire et abordons le PL 12708-A. Le débat se tient en catégorie II, trente minutes. M. Jean Burgermeister, rapporteur de minorité, est remplacé par M. Rémy Pagani. La parole est à M. Murat-Julian Alder, rapporteur de majorité.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission des finances a traité cet objet il y a maintenant quelques années, lorsque nous faisions face à la crise du covid. Nous estimons que ce projet de loi s'inscrit dans la logique d'une partie de ce parlement et du gouvernement, qui consiste à vouloir accorder une part prioritaire au vélo par rapport aux autres moyens de transport, et qu'il viole les principes de la complémentarité et du libre choix des modes de transport au même titre que la politique menée par le Conseil d'Etat. Selon nous, l'Etat n'a pas de raison de subventionner l'acquisition et l'entretien de vélos; c'est pour cette raison que nous refusons ce texte, position également adoptée par la majorité de la commission des finances. Merci de votre attention.
M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de minorité ad interim. Je suis assez stupéfait de voir M. Murat Alder... Je ne sais pas comment il est venu ici, mais... (Remarque.) A pied ? Ah, c'est encore mieux, à pied. Les trottoirs ont été élargis depuis, pour permettre à tout un chacun de circuler librement, et on a enlevé les obstacles. Moi, je suis venu en scooter électrique. Je n'ai pas suffisamment de place et j'en réclame au gouvernement. Toutes les épingles à vélo, juste à côté de l'Hôtel de Ville - je propose aux citoyens de le vérifier - sont squattées par des scooters. Voilà la situation actuelle.
Je trouve qu'affirmer encore aujourd'hui, deux ans après le dépôt d'un projet de loi qui m'est cher et a été défendu par notre chef de groupe, M. Burgermeister, que c'est illégal - les termes que vous avez utilisés sont un peu, si j'ose dire, radicaux, bien que vous ne soyez plus de la tendance radicale que je pouvais apprécier à certains moments - et qu'il faut balayer tout ça du revers de la main... Il y a pourtant nécessité de mettre plus d'épingles à vélo, même si depuis deux ans beaucoup ont été installées, ce que je trouve assez remarquable. Cela répond à une de mes préoccupations et de mes demandes, c'est-à-dire de faire en sorte que la Ville de Genève, puisque j'ai déposé un objet similaire quand j'étais aux affaires... La Ville de Genève a fait son boulot, si j'ose dire, et le canton aussi, même sans le vote de ce projet de loi. Très bien !
Il y a aussi la nécessité de soutenir... C'est là où je ne vous comprends pas. Vous soutenez les petites et moyennes entreprises, les petits entrepreneurs, notamment les réparateurs. Il y a, selon ce que je sais, une vingtaine de mécaniciens de vélos; je ne parle pas de ceux qui sont soutenus par la Ville de Genève, Genèveroule par exemple, mais de tous les autres, qui ont fait florès depuis deux ans et vendent des vélos. Ça se vend, et en disant que tout ça est stupide, n'a aucune valeur et est illégal, vous êtes hors de notre temps ! (Remarque.)
En conséquence de quoi je vous invite à voter ce projet. Certes, tout a été réalisé, sauf le fait d'offrir une subvention de cinquante francs - cinquante malheureux francs ! - pour aider les gens qui auraient encore un vélo dans leur cave à le ressortir, à se souvenir d'ailleurs qu'ils en ont un dans leur cave ou... (Commentaires.) ...dans leur garage à vélos, les inviter à aller chez ces petits réparateurs - enfin, ces petits, parfois ce sont de grosses arcades, elles font beaucoup de chiffre d'affaires et rapportent beaucoup d'impôts à notre république - pour faire réparer leur vélo. Ça coûtera évidemment beaucoup plus cher de faire réparer son vélo, mais cette aumône de l'Etat, si j'ose dire, permettrait à tout un chacun, y compris à vos supporters, qui sont prétendument les petites et moyennes entreprises - ce dont je doute, parce que de plus en plus nous les soutenons plus que vous... Vous, vous soutenez des grandes multinationales, les assurances, tout ça, mais les petits ne croient plus en votre discours. Il n'y a qu'à entendre ce que vous venez d'affirmer: ça vous est inutile de soutenir ces petites et moyennes entreprises, alors que c'est notre volonté, à moi et à notre groupe Ensemble à Gauche, de soutenir ces magasins de vélos qui réparent de manière tout à fait efficiente - pour utiliser vos termes - les vélos et pourraient mieux les réparer et avoir encore plus de clients. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Je n'ai pas très bien compris, Monsieur le président, pourquoi notre collègue Murat Alder dit que ce projet de loi enfreint le principe de complémentarité des transports. Franchement, dans le texte, il n'y a rien qui interdit aux voitures et aux motos de circuler. Il n'y a rien ! Il est seulement demandé que soit prévu un crédit d'un million afin de donner, comme l'a dit M. Pagani, 50 francs aux gens qui ont peu de moyens.
Vous connaissez le pavillon Cayla, dans ce magnifique quartier qu'est Saint-Jean: c'est un petit pavillon qui devait être détruit et qu'on a remis en état grâce à des aides. L'objectif est justement d'y réparer des vélos. Vous serez étonnés: des gens qui n'ont même pas les moyens de se payer les pièces y viennent. C'est pour cette raison qu'un petit fonds existe, pour que les gens dans la difficulté puissent réparer leur vélo; on leur donne les pièces et ils les réparent eux-mêmes. Quand on propose 50 francs, ce n'est donc pas une proposition sans fondement: c'est vrai, des personnes ont des difficultés à réparer leur vélo. C'est une action qui, pour moi, est très très importante, et je vous encourage, Mesdames et Messieurs, à voter ce projet de loi.
Ensuite, les personnes qui se déplacent à vélo ne produisent pas de CO2; elles n'usent pas... (Remarque.) Mais c'est vrai ! ...le béton de nos routes; elles n'engendrent pas beaucoup de coûts et ont une meilleure santé. Il faut donc d'une part tout faire pour encourager les gens à circuler à vélo et d'autre part, si par malheur ils ne peuvent ni réparer leur vélo ni s'en acheter un, les aider pour cela.
Je ne comprends pas comment un parti ouvert, libéral - ça vient du mot «liberté» -, peut s'opposer à cette subvention. Je ne comprends pas ! En plus, comme l'a dit M. Pagani - il a raison -, ça encourage les petites et moyennes entreprises, les vendeurs et les réparateurs de vélos. C'est donc positif du point de vue économique, de la santé et de la circulation. Monsieur Alder, je vous le dis, ça ne contredit absolument pas le principe de complémentarité des divers transports, publics et non publics. Par conséquent, chers collègues, le parti socialiste votera avec beaucoup de plaisir ce projet de loi, et je vous encourage à faire de même. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je comprends que les 500 000 francs évoqués dans l'article 2 concernent des supports sécurisés pour vélos, mais est-ce qu'on parle bien des épingles à vélo ?
Des voix. Oui.
M. Jacques Blondin. Alors j'ai un amendement à vous proposer: j'aimerais remplacer les épingles à vélo par des pinces à vélo. (Commentaires. Rires.)
Des voix. Oui !
M. Jacques Blondin. Mais oui ! Parce que tant qu'à faire... Permettez-moi cette boutade. Concernant l'utilisation des vélos, vous le savez, dans les communes il y a des aides pour les achats de vélos; elles sont bienvenues, normales, et de plus en plus pratiquées, parce que c'est incitatif, etc. Maintenant, quand on a un vélo, on s'en occupe, on le soigne. A partir du moment où il y aurait une participation à l'entretien d'un vélo, un certain laisser-aller serait à craindre, puisque finalement il suffirait de l'amener à la réparation.
Puis alors les communes... Je ne comprends plus: on est en période d'élaboration du budget - ceux qui sont à la commission des finances le savent - et on est en train d'essayer d'obtenir des transferts de charges de l'Etat aux communes. Or là, tout d'un coup, on parle de 500 000 francs; ce n'est pas énorme, mais c'est quand même beaucoup d'argent. C'est pourtant l'Etat qui va arroser les communes pour une prestation dont elles peuvent s'occuper si elles ont envie de le faire.
Je ne veux pas banaliser l'intérêt d'utiliser un vélo - je m'y suis mis moi-même, Monsieur Velasco, et je vous prouve ainsi que rien n'est impossible -, on soigne son vélo, on en fait avec grand plaisir; les communes nous aident, elles participent à l'achat d'un vélo, certes de moins en moins mais toujours. Or nous, on trouve que cette contribution d'un million est excessive et ne va pas dans le sens de l'incitation à l'usage du vélo. On doit acheter un vélo, oui ! Electrique ou pas, ce n'est pas important ! Quand on a un vélo, on le soigne. On peut se le faire voler, il faut donc des épingles, mais les communes ont largement les moyens de les installer là où elles peuvent le faire. C'est pourquoi le PDC refusera ce projet de loi. Merci.
M. Serge Hiltpold (PLR). Tout d'abord, j'aimerais rappeler la temporalité. C'est un projet de loi qui demande une ligne au budget 2021, et on est en train d'élaborer le budget pour 2023. On est donc déjà trop tard.
J'aimerais vous rendre attentifs à une chose: on a tout un travail sur la répartition des tâches entre le canton et les communes. Le deuxième point que vous demandez, c'est que l'Etat subventionne les communes pour les soutenir dans l'implantation de supports. Mais on ne va pas apporter un soutien aux communes de Collonge-Bellerive, de Genthod ou de Cologny pour qu'elles créent des supports à vélo ! Je pense que les communes sont assez responsables pour savoir ce qu'elles ont à faire sur leur territoire, ce d'autant qu'elles le connaissent suffisamment pour installer ces supports dans les lieux adéquats. Ça, c'est le premier élément.
Ensuite, il y a une question philosophique: jusqu'où on va aller, où va-t-on s'arrêter ? On va inciter les gens à acheter des baskets en leur donnant une prime, parce qu'ils marchent ? (Rires. Commentaires. Exclamations.) Non, mais jusqu'où vous voulez aller ? Franchement ! A un moment donné, ça suffit ! Ce n'est juste plus possible ! Moi, je suis un cycliste; on fait le choix d'un mode de transport - je ne suis pas en train de critiquer le vélo -, et après, on assume ! Quand je vais changer les pneus de mon vélo, je ne vous demande pas de l'argent; de même en ce qui concerne la voiture. Je ne vois pas pourquoi on ferait un cas séparé pour changer un pneu de vélo, un dérailleur, une poulie ou une cassette ! Si vous faites le choix de rouler à vélo et que vous n'avez pas d'argent, vous allez à des endroits comme le Vélosophe, vous empruntez des outils, vous démontez la cassette et vous vous débrouillez. Il n'y a aucun problème, Monsieur Velasco ! Si vous voulez, on peut le faire ensemble. (Rires.) Je le fais volontiers.
Voilà, je pense qu'il faut simplement être rationnel. Je ne vais pas entrer dans le discours de M. Pagani, selon qui Ensemble à Gauche soutient les entreprises. Je dirai juste que nous, les petits entrepreneurs et commerces, nous n'avons pas vraiment été aidés par les deux jours de grève des fonctionnaires; et je ne pense pas que nos milieux aient soutenu les syndicats. Merci, Monsieur le président, j'ai terminé. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. François Baertschi (MCG). On s'est plaint, tout à l'heure, du manque de sérieux d'une pétition. C'était une pétition qui prétendument n'avait pas d'unité de matière. Admettons. Elle a été classée, ce qui est quand même assez infamant dans les règles de ce Grand Conseil. Et là, on découvre un projet de loi de la plus grande fantaisie: la mobilité douce aurait un lien avec le covid-19 ! Ça voudrait dire que la mobilité douce est contagieuse... (Commentaires.) ...ou que le covid-19 peut circuler avec une mobilité dure ou douce. Je ne sais pas ! On est dans un illogisme complet ! C'est vraiment une fabrication idéologico-politique de la plus grande... Comment dire ? ...fantaisie. Je me demande si c'est du Pierre Dac, en fait ! (Rires. L'orateur rit.)
Une voix. Lui, il avait du talent !
M. François Baertschi. C'est du Pierre Dac. Je me demande si c'est un gag. Soit les auteurs de ce projet de loi étaient bourrés, soit ils ont voulu faire une farce, soit ils n'avaient plus d'imagination et ils se sont dit: «Qu'est-ce qu'on va faire sur la mobilité douce ou sur le covid ?» Moi, j'ai quelques idées à vous donner: il y avait «Martine à la plage», «Martine à la montagne». (Rires.) Ecrivez «Le covid à la plage», «Le covid à la montagne», «Le covid aux sports d'hiver», je ne sais pas, on peut trouver tout un ensemble de choses complètement insolites. Continuons dans cette direction !
Je crois que c'est un manque de sérieux total de ce Grand Conseil que d'examiner... de proposer, déjà, ce genre d'objet. Quelque part, j'ai un petit peu honte pour les auteurs de ce projet de loi - car il s'agit bien d'un projet de loi, pas d'une pétition. C'est aussi une manière de dire: «Tiens, on fait n'importe quoi dans ce Grand Conseil, on fait n'importe quoi avec l'argent du contribuable.» Pour cette seule raison, il est tout à fait indécent de voter ce texte, et je vous demande de le classer verticalement, c'est-à-dire de refuser l'entrée en matière. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je repasse la parole à M. Velasco. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Je crois que mes collègues ont suffisamment de moyens pour débourser 50 francs au cas où ils doivent réparer leur vélo, mais la réalité - et, Monsieur le président, je le dis à mes collègues Baertschi et Hiltpold, que j'apprécie par ailleurs -, c'est que certaines personnes dans ce canton aujourd'hui n'arrivent pas à boucler la fin du mois. Et si elles ont une famille... La moindre réparation sur un vélo, Mesdames et Messieurs, va au-delà de 50 francs. Au-delà de 50 francs ! Il y a des gens qui, avec leurs revenus, n'arrivent pas à réparer leur vélo, Messieurs ! (Commentaires.)
Une voix. Voilà !
M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de minorité ad interim. D'abord, je souhaite juste répondre - mais je ne sais pas si ça en vaut la peine - et dire que le vélo fait faire de l'exercice et permet de lutter contre le covid. En l'occurrence, il permet à des personnes de vivre plus sainement et d'être plus aptes à affronter ce virus.
Cela étant, il y a une chose que je ne comprends pas sur le fond. On est tout heureux quand la Confédération soutient les projets d'agglomération, mais elle pourrait dire: «Non, mais les Genevois ! Vous savez combien le canton est prospère ? On ne va pas soutenir les Genevois ! En plus, ils font toujours des lois un peu spéciales !» Et pourtant la Confédération sait qu'en subventionnant largement, avec des millions, ces projets, et ce depuis de nombreuses années, elle invite le canton à imaginer un développement régional cohérent - je vous passe les détails. On reçoit de l'argent de la Confédération, parce qu'on a besoin de structurer notre politique régionale, et on dirait en même temps: «Ah, mais les gens qui ont besoin de réparer leur vélo, il ne faut pas les encourager à le faire, ni à circuler à vélo.» Je trouve que c'est parfaitement incohérent. A ce moment-là, on décide de se passer des subventions fédérales et ça va faire un trou dans le budget du canton, on se passe aussi de la péréquation cantonale.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Rémy Pagani. De toute façon, j'imagine que ce projet va être refusé, mais dans la réalité, il a été accepté...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.
M. Rémy Pagani. ...sauf le subventionnement des petites et moyennes entreprises qui font aujourd'hui avancer la petite reine. Je vous remercie de votre attention.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Je crois que le moins qu'on puisse dire, c'est qu'avec Ensemble à Gauche on pédale dans le vide. (Rires.) Ici, ce qui est en cause, c'est le rôle de l'Etat dans le pays où nous nous trouvons. Nous ne sommes pas dans un pays avec une économie planifiée, nous ne sommes pas dans un pays socialiste ou communiste, mais dans un Etat de droit démocratique et libéral. Et dans un tel Etat, le principe cardinal, inscrit tant dans notre Constitution fédérale que dans notre constitution cantonale, c'est celui de la subsidiarité. Or ce qui est proposé ici, ce n'est pas la subsidiarité de l'Etat, c'est la politique de l'arrosoir, puisque avec ce projet de loi, même quelqu'un qui gagne des millions et des millions pourrait bénéficier de ce chèque de 50 francs pour faire réparer son vélo. Et la responsabilité individuelle, dans tout ça ? Est-ce que si on fait le choix d'acquérir un vélo, ce n'est finalement pas normal qu'on l'entretienne soi-même et qu'on y mette les moyens ?
Alors oui, effectivement, ce projet de loi est contraire aux principes de la complémentarité et du libre choix du mode de transport, puisqu'il a pour effet de créer une subvention directe au profit d'un moyen de transport en particulier, sans pourtant offrir cette même possibilité aux usagers d'autres modes de déplacement. Le député Serge Hiltpold l'a très bien dit: pourquoi est-ce qu'on ne distribuerait pas 50 francs à chaque Genevoise et à chaque Genevois pour entretenir les semelles de leurs chaussures, parce qu'il est bon de marcher ?
A un moment donné, Mesdames et Messieurs, je crois que le covid a bon dos. Nous dire qu'on doit encourager la pratique du vélo parce qu'il limite le risque de contamination, nous dire que la distance physique est respectée, nous le dire en 2022 alors que cette crise est - on l'espère - derrière nous une bonne fois pour toutes, c'est tout simplement faire preuve de mauvaise foi. Au même titre que la politique menée par le Conseil d'Etat qui consiste à avancer l'argument du covid pour justifier la pose des pistes cyclables, alors qu'il n'y a absolument aucun lien de causalité entre le fait de prendre le vélo et celui d'éviter de tomber malade et ainsi d'en souffrir ! Mesdames et Messieurs, je crois que le moment est venu de siffler la fin de la récréation des mesures covid en matière de mobilité et de refuser ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, il me semble que dans les débats sur le vélo, à part dans celui-ci où effectivement on parle de covid, il est question du développement du vélo, comme dans le débat d'hier soir lors duquel on a parlé des axes forts, etc.; ça n'a donc plus rien à voir avec le covid, c'est tout autre chose. Il faudrait changer de registre, Monsieur le rapporteur de majorité; chaque fois il y a une allusion, au demeurant tout à fait démocratique, mais qui commence à être un peu lassante, à ces fameuses pistes construites nuitamment. On passe donc à autre chose, si vous le voulez bien, mais il ne faut pas dire «Il faut passer à autre chose» puis continuer à revenir avec cette histoire.
Monsieur Pagani, je me permets, si vous m'y autorisez - je ne dois pas m'adresser directement aux personnes, mais je le fais -, de préciser que vous faites une comparaison un peu hasardeuse entre, d'une part, les projets d'agglomération et les financements fort bienvenus de la Confédération, et d'autre part ce subventionnement que vous proposez: il y a une différence fondamentale entre ces deux éléments. Ça me permet de préciser ma pensée: la Confédération ne verse pas de l'argent comme ça, comme un hélicoptère, elle ne fait pas de l'arrosage; elle verse de l'argent pour financer des projets d'infrastructures, parce qu'elle les juge utiles, etc.
Je pense que c'est effectivement le rôle de l'Etat que d'axer ces moyens financiers sur l'amélioration des infrastructures, en particulier cyclables, comme ce parlement a décidé de le faire hier. Encore une fois, j'exprime ma satisfaction à ce propos. Ce n'est cependant pas le rôle de l'Etat - je partage l'avis de la majorité, nous partageons l'avis de la majorité - d'arroser, comme on voudrait le faire. Ce n'est pas non plus son rôle d'aller dans le sens proposé, notamment s'agissant des frais de réparation, même s'il le fait toujours pour inciter à employer certains types de véhicules comme les vélos cargos, qui sont encore relativement chers - pour ceux-ci, on le fait encore. Ce n'est pas le rôle du canton non plus de donner de l'argent à des communes dont c'est la compétence et qui ont toutes largement la possibilité et surtout les moyens de financer elles-mêmes ces fameux arceaux à vélo. Ça, c'est absolument clair. Il était fait allusion à ces questions de transfert de charges, etc.: je veux dire par là qu'on ne va pas ajouter une couche supplémentaire dans ce domaine-là. Ça fait donc deux raisons très largement suffisantes, me semble-t-il, qui expliquent pourquoi le Conseil d'Etat ne soutient pas ce projet de loi.
Si vous me permettez encore une précision - et là, c'est mon esprit libéral, qui est au fond de mes gènes et qui n'est pas du tout incompatible avec ce volontarisme en matière de mobilité douce et de transports publics, qui s'exprime: si un écosystème se développe autour d'un nombre accru d'usagers du vélo, le marché, auquel je crois profondément, va s'adapter. D'ailleurs on le constate: on voit des échoppes, on voit des magasins qui s'ouvrent, des commerces qui se créent. Ça veut dire qu'un marché est là, tout à fait bienvenu et souhaitable, et que toute une série de services, avec une concurrence et une certaine qualité, vont aussi se développer. Les gens iront entretenir leur vélo, à moins qu'ils ne fassent appel au député Hiltpold qui sait démonter les cassettes. Pour accéder à ces services, si on croit à cet écosystème-là, à cette économie nouvelle qui se met en place, il n'est pas nécessaire que l'Etat apporte une subvention, fasse de l'arrosage de manière totalement indiscriminée.
Voilà donc, Mesdames et Messieurs, un certain nombre de raisons pour lesquelles, même si nous soutenons évidemment avec conviction le développement des équipements cyclables, nous ne pouvons pas aller dans le sens proposé par ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, l'entrée en matière sur ce projet de loi 12708 est soumise au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12708 est rejeté en premier débat par 50 non contre 18 oui et 14 abstentions.
Premier débat
Le président. J'appelle à présent le PL 12730-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et la parole revient à Mme Fabienne Monbaron.
Mme Fabienne Monbaron (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Dans la ligne des discussions précédentes, nous n'avons pas fini de parler des pistes cyclables installées nuitamment, puisque ce projet de loi a justement été déposé suite à l'extension dite sauvage de certaines bandes cyclables durant le covid. Les auteurs les trouvant totalement incohérentes sur certains tronçons, ils estiment qu'il ne devrait pas être possible de doubler, voire de tripler, la taille d'une piste cyclable; ils jugent également que les aménagements cyclables réalisés par le canton contreviennent à l'article 190, alinéa 3, de la constitution genevoise qui garantit la liberté individuelle du choix du mode de transport et qu'en élargissant une voie de circulation au profit d'une autre, l'esprit de cette disposition n'est pas respecté.
De fait, ils se sont penchés sur la question de la délimitation des voies de circulation et ont constaté que la législation ne mentionne pas de largeur minimale ou maximale, mais qu'il existe tout un catalogue de normes concernant les aspects routiers. L'objectif de ce texte est de régler le partage des voies de circulation en fixant des dimensions afin de répartir équitablement la chaussée entre les différents utilisateurs. Une fois les gabarits délimités, les autres aménagements, notamment les pistes cyclables, ne pourraient être réalisés que s'il reste de la place et, dans le cas contraire, seraient reportés sur une voie adjacente.
Selon les auteurs, il devrait généralement être possible de conserver deux voies de circulation si la piste cyclable a une largeur d'un mètre vingt; cela éviterait les rétrécissements qui suppriment une voie pour le transport individuel motorisé. Cela étant, certaines routes devraient être élargies et des exceptions pourraient être admises, par exemple dans les villages.
L'audition du département a permis de clarifier tant les usages que les notions juridiques. En effet, les acteurs de la mobilité appliquent les normes établies par l'Association suisse des professionnels de la route et des transports - VSS -, et lorsqu'il y a des recours ou des accidents, les juges examinent si celles-ci sont respectées. Certaines normes VSS sont intégrées à une norme fédérale et ont force de loi.
Pour déterminer un gabarit routier, différents facteurs entrent en ligne de compte, comme la largeur de la voie et le type de véhicules qui y circulent, les marges de mouvement et de sécurité, la situation - voie bidirectionnelle ou à sens unique, en pente ou non -, les délimitations latérales, la vitesse réglementaire et la hiérarchie du réseau routier. Ainsi, il n'est pas envisageable de fixer une largeur unique identique pour toutes les routes, elle ne pourrait pas convenir à la fois au réseau primaire à 80 km/h, au réseau secondaire à 50 km/h et aux zones à 30 km/h. En cas d'accident, une incitation à la vitesse pourrait être reprochée.
L'analyse juridique a confirmé la non-conformité de ce projet de loi au droit supérieur. Si la législation fédérale ne prévoit effectivement rien en matière de gabarit des voies de circulation, la jurisprudence du Tribunal fédéral, en tant que source du droit fédéral, indique clairement que les normes établies par l'Association suisse des professionnels de la route et des transports doivent être appliquées et qu'il s'agit d'un élément important en cas d'accident. Il serait donc contraire au droit supérieur d'intégrer dans la législation cantonale des largeurs minimales et maximales. Pour cette raison, la commission a refusé l'entrée en matière sur ce projet de loi par 11 voix contre 1 et vous recommande d'en faire de même.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, Mme Monbaron, rapporteuse de majorité, a dit l'essentiel sur ce projet de loi. J'aimerais toutefois rebondir sur ce qu'elle vient d'indiquer, car le canton de Berne, entre autres, a adopté une directive assez claire qui est tout à fait en ligne et adéquate avec les recommandations fédérales, donc les exceptions existent, à commencer par le canton de Berne.
Comme cela a été souligné, ce projet de loi fait suite à l'extension sauvage de pistes cyclables, qu'on a vite surnommées «autoroutes à vélos». Il s'agit donc de définir les gabarits des voies de circulation. Il a été constaté que la loi actuelle ne mentionne pas de largeur minimale ou maximale des routes, mais qu'il existe tout un catalogue de normes concernant les aspects routiers. Ainsi que je viens de le relever, le canton de Berne applique une directive assez claire reprenant d'ailleurs les recommandations fédérales.
Les auteurs du texte proposent d'introduire une disposition traitant de la largeur des voies de circulation tant pour le trafic motorisé que pour les deux-roues, c'est-à-dire les pistes et bandes cyclables. Il paraît important de clarifier la situation et de montrer qu'à Genève, il n'est pas possible de réaliser n'importe quel changement; certaines décisions, douteuses, n'améliorent pas l'image de notre canton auprès des Chambres fédérales. Le constat que tous les modes de transport sont indispensables a été entériné dans notre constitution genevoise, qui garantit la liberté individuelle du choix du mode de transport. La minorité de la commission des transports vous recommande de voter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, les objets déposés par l'UDC dans le domaine de la mobilité se suivent et se ressemblent; ils ont pour point commun de ne pas être conformes au droit fédéral, d'être tout à fait inapplicables, de n'être soutenus en commission que par leur groupe et, dans le cas présent, de réduire drastiquement les possibilités d'extension du réseau de pistes cyclables et d'aménagements en faveur des cyclistes sur les routes de notre canton. Pour ces raisons, le groupe socialiste vous recommande de rejeter le présent projet de loi.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Je serai bref, parce que les enjeux de ce débat ont été posés, ils sont relativement clairs. Ce projet de loi vise à fixer de façon stricte dans la loi les gabarits des routes et bandes cyclables. Nous avons appris en commission que ces dimensions étaient déterminées en application des normes de l'Association suisse des professionnels de la route et des transports et qu'elles pouvaient varier, car il faut prendre en compte la largeur des voies, le type de véhicules qui y circulent, les marges de mouvement, la sécurité.
Il n'est pas envisageable de graver dans le marbre une largeur unique qui conviendrait à la fois aux réseaux primaire et secondaire. Les normes sont validées par la jurisprudence du Tribunal fédéral, lequel a très clairement indiqué qu'il fallait les suivre. Ainsi, ce texte du groupe UDC est tout simplement contraire au droit supérieur. Pour ce motif, il convient de refuser l'entrée en matière. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Patrick Saudan pour une minute trente.
M. Patrick Saudan (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je profite de ce débat sur la largeur des pistes cyclables pour revenir sur la prétendue dangerosité de la pratique du vélo, qu'on a soutenue hier soir dans notre hémicycle. Quelques faits: pendant les six premiers mois de 2022, 24 cyclistes sont décédés sur les routes suisses, 19 en vélo électrique et le reste en vélo normal. Il y a eu 220 blessés graves. Ces chiffres sont à mettre en relation avec les 40 000 morts chaque année des suites d'une maladie cardiovasculaire ou d'un cancer - ce sont des chiffres stables sur 2019 et 2020.
Prenez l'étude du «Lancet» - excusez du peu: 400 000 Anglais ont été suivis pendant vingt-cinq ans, on a examiné leurs pratiques de transport, avec évidemment une analyse statistique pour les facteurs confondants, c'est-à-dire leurs caractéristiques clinico-démographiques. Eh bien on relève 25% de mortalité cardiovasculaire en moins, 16% de mortalité liée au cancer en moins. Si vous extrapolez ces chiffres à la Suisse, ce sont des milliers de décès que nous éviterions par année.
Alors plutôt que de tenir des discours anxiogènes sur la prétendue dangerosité de la pratique du vélo, je vous conjure au contraire de contribuer à sécuriser au maximum nos pistes cyclables et je vous remercie. Au revoir ! (Applaudissements. Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député, mais la séance n'est pas encore finie ! La parole va maintenant à Mme Marjorie de Chastonay. (Un instant s'écoule.)
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Zut ! (Un instant s'écoule.) Merci, Monsieur le président. Je suis un peu prise au dépourvu, parce que je n'avais pas vu mon micro clignoter. Mesdames et Messieurs les députés, voici encore un projet de loi de l'UDC qui essaie par tous les moyens de freiner l'élan enthousiaste des habitantes et habitants de Genève en faveur de la mobilité douce. Sous couvert d'éléments techniques et réglementaires, il s'agit en réalité d'une réaction à l'extension de certaines pistes cyclables qualifiées d'«autoroutes à vélos» ou de «pistes de décollage».
Nous avons l'impression que les auteurs du texte ont pour objectif plutôt de conserver le nombre actuel de voies de circulation que de fixer le gabarit des routes et nous ne comprenons pas en quoi ce projet de loi réalisera cette volonté.
Une fois de plus, l'UDC invoque l'article 190, alinéa 3, de la constitution genevoise qui garantit la liberté individuelle du choix du mode de transport. Nous, les Vertes et les Verts, répliquons à cela par une autre disposition constitutionnelle... (Brouhaha. L'oratrice soupire.) Franchement ! ...celle du droit à un environnement sain, c'est-à-dire l'article 19.
Par ailleurs, pour nous, les Vertes et les Verts, il est facile d'établir un lien entre la largeur des bandes cyclables et la sécurité. Enfin, les auditions ont mis en évidence le fait que ce projet de loi est contraire au droit fédéral, notamment pour des raisons de sécurité. Pour toutes ces raisons, nous voterons non à l'entrée en matière. Merci.
M. Stéphane Florey (UDC). Une fois de plus, ce débat montre que Genève se croit supérieur aux autres cantons, et on est juste incapables aujourd'hui... On nous sert de mauvais prétextes, on nous parle du droit supérieur, mais dans ce cas, vous me direz, le canton de Berne ne respecte pas le droit fédéral ! Pourquoi est-ce qu'à Berne ils y arrivent très bien, pourquoi est-ce que dans d'autres cantons ils y arrivent aussi en appliquant des normes ?
Certes, ce ne sont pas des lois, ce sont des normes, mais on applique des normes dans de nombreux domaines. Prenons les plus connues, les normes SIA: font-elles l'objet d'une loi ? Non. Or les normes SIA sont appliquées à longueur d'année pour tout ce qui concerne l'architecture et les constructions. Là, on parle de normes fixant des gabarits qu'on devrait appliquer à la circulation routière; ça fonctionne ailleurs, mais ici, non, on est incapables d'aller dans ce sens, on n'en veut pas.
Alors vous n'en voulez pas, Mesdames et Messieurs, on l'a bien compris, mais ce qui me fait un peu rigoler, pour ma part, c'est que la plupart des partis ici qui vont refuser ce projet de loi ont été les premiers à gueuler quand on a créé ces autoroutes à vélos. A un moment donné, je suis désolé, mais vous devriez être cohérents avec vos discours, et c'est pour cela que je vous invite à soutenir cet objet.
Et puisqu'il est question de droit supérieur, je vois le conseiller d'Etat rigoler doucement dans son coin, mais en attendant, quand il était ministre des finances, il a fait voter des textes concernant la transmission des certificats de salaire, il a tenu jusqu'au bout et il s'est quand même cassé les dents devant le Tribunal fédéral, il faut le rappeler, il faut le dire clairement. Donc qui a vraiment tout juste, qui a vraiment tout faux ? L'avenir nous le dira peut-être si vous changez d'avis un jour, mais en attendant, on n'est jamais tout blanc ou tout noir. Partant de ce principe, l'UDC est convaincue de la légitimité de ce projet de loi et vous enjoint de changer d'avis et de le soutenir. Merci.
Une voix. Bravo.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit ici d'un projet de loi de la mauvaise humeur, c'est clair et net, cela a d'ailleurs été dit. Désolé, Monsieur le conseiller d'Etat, on revient effectivement sur ces extensions nocturnes qualifiées de sauvages. Ce texte vise simplement à graver dans le marbre des conditions restrictives pour éviter que cela se reproduise. Or il y a d'autres moyens pour parvenir à ce but. Je ne vais pas répéter ce que la rapporteure de majorité a excellemment indiqué dans son rapport, qui est très complet. Le parti démocrate-chrétien refusera ce projet de loi. Merci.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Charles Selleger, c'est à vous pour une minute trente.
M. Charles Selleger (HP). Oui, merci, Monsieur le président, j'espère que ce sera suffisant. Je viens d'être attaqué avec une rare violence par l'un des préopinants - vous lui transmettrez, il s'agit de Patrick Saudan -, à qui je recommanderai d'abord de garder son calme, parce que le stress constitue également un facteur de risque cardiovasculaire... (Rires.) ...mais il doit le savoir aussi bien que moi !
Maintenant, pour ce qui est des statistiques qu'on nous sert avec un prosélytisme appuyé s'agissant de la pratique des sports en général et du vélo en particulier - encore une fois, un sport que j'aime et que je pratique encore régulièrement, même en ville -, je répondrai que toute étude scientifique, si on veut s'y fier, doit être réalisée de manière contrôlée, c'est-à-dire avec des groupes témoins en double insu. Or, que je sache, les études qui démontrent les bienfaits du sport ne sont pas de ce type-là, parce qu'on ne peut pas dire, en tirant au hasard des groupes de personnes: «Vous, vous ferez du sport, et vous, vous n'en ferez pas.»
Aussi, je crois qu'avant de donner des leçons, il faut simplement revenir aux fondamentaux, et je suis étonné qu'un professeur de la faculté tienne de tels propos. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements. Commentaires. Huées.)
Le président. Merci. Monsieur Saudan, je vous accorde trente secondes pour répondre.
M. Patrick Saudan (HP). Oui, Monsieur le président, merci, je vais répondre brièvement: au niveau statistique, des études épidémiologiques qui portent sur 400 000 personnes avec un suivi sur vingt-cinq ans sont considérées de niveau A, elles sont donc extrêmement fiables. Evidemment, on ne peut pas mener d'études randomisées, comme l'a souligné M. Selleger, sur la pratique du sport. De la même manière, on ne va pas faire une étude randomisée sur le parachute. Tout le monde sait qu'un parachute vous sauve la vie quand vous sautez d'un avion; vous allez faire un essai randomisé avec un groupe qui prend le parachute et l'autre qui ne le prend pas ? (Rires. Applaudissements.)
Une voix. Joli !
M. Patrick Saudan. Ce que dit M. Selleger est totalement absurde.
Le président. Merci...
M. Patrick Saudan. Ce contre quoi je me suis opposé, c'est son discours anxiogène selon lequel le vélo serait dangereux pour la santé.
Le président. Merci...
M. Patrick Saudan. Le vélo nécessite des pistes cyclables sécurisées, mais c'est probablement le moyen le plus sûr d'améliorer la santé publique dans notre pays. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Je n'ai jamais dit ça ! (Exclamations. Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous reprenons le cours des interventions. La parole est à M. Patrick Dimier.
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Peut-être que M. Saudan, après deux jours de session, a des problèmes de fatigue. (Exclamations.) Celui qui a ironisé sur le danger de la pratique du vélo n'était pas M. Selleger, mais M. Desfayes, et il a fait une très belle pirouette pour montrer qu'au contraire, il était en faveur du vélo. C'est vrai que les débats, à un certain âge, deviennent difficiles, en tout cas pour d'aucuns. (Rires.)
Une voix. Non, mais c'est pas vrai ! La barbe !
Une autre voix. Article 24 !
Une autre voix. Il y en a une deuxième preuve en face !
Le président. S'il vous plaît, on arrête avec ce genre de propos !
M. Patrick Dimier. L'article 24, Monsieur Béné, ne s'applique qu'à ceux qui sont directement concernés, et rassurez-vous, je ne me sens pas concerné du tout, merci !
Le président. Merci, Monsieur le député...
M. Patrick Dimier. Je n'ai pas fini.
Le président. Ah, vous n'avez pas terminé ? Alors poursuivez, s'il vous plaît.
M. Patrick Dimier. Merci, Monsieur le président. Tout ça pour dire que ce débat est complètement surréaliste. Ce qui est mis en cause, ce ne sont pas les pistes cyclables, comme indiqué hier soir, c'est leur taille et leur coût. Il n'est en aucun cas question - et je pratique le vélo comme certains d'entre vous...
Une voix. Il est où, ton vélo ?
M. Patrick Dimier. C'est aussi l'article 24 ?
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Dimier. Velasco, on peut se taire !? (Exclamations.)
Une voix. Oh, y en a marre !
Le président. Messieurs, s'il vous plaît ! (Commentaires.)
Une voix. Eh, les poissonniers, ça suffit !
Une autre voix. Y en a marre !
Le président. S'il vous plaît ! Continuez, Monsieur.
M. Patrick Dimier. Merci. Je suis désolé d'agiter cette assemblée, il est bientôt temps que tout le monde parte en week-end... (Commentaires.) ...pour pratiquer le vélo, bien entendu ! Je voulais simplement dire que, comme dans tout, il faut raison garder et surtout essayer de faire quelque chose qui tienne la route. A titre très personnel, et mon groupe suivra, je soutiendrai l'exposé de M. Christo Ivanov. Merci, Monsieur le président.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mon préopinant Patrick Dimier m'a enlevé les mots de la bouche. En effet, ce projet de loi est basé uniquement sur le fait que le groupe UDC trouve la largeur de certaines pistes cyclables exagérée, de même que leur coût. Comme cela a été souligné par l'auteur du projet de loi, Stéphane Florey, dans le canton de Berne, ils appliquent un règlement, même si cela a été contesté au niveau du Tribunal fédéral. Celui-ci, je le rappelle, indique que la législation fédérale ne précise pas la largeur des voies. D'où le fait que ce projet de loi a toute sa... (Un instant s'écoule.)
Une voix. Sa pertinence !
M. Christo Ivanov. Sa pertinence, merci, cher collègue ! Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, la minorité de la commission des transports vous demande d'accepter l'entrée en matière sur le PL 12730. Je vous remercie, Monsieur le président, j'ai dit.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, je ne vais pas m'engager dans la querelle pour déterminer quel est le statut de ces fameuses normes VSS qui, comme les normes SIA, ont valeur de loi dans ce pays, je vous le confirme. Voilà, on peut continuer à prétendre le contraire, je n'arriverai pas à vous faire changer d'avis.
Par contre, j'aimerais revenir dans le domaine du factuel, parce que tout au début de l'exposé des motifs des auteurs du projet de loi, il est fait référence à l'article constitutionnel qui revient très souvent dans les débats sur la mobilité, à savoir l'article 190 - les principes relatifs à la mobilité -, alinéa 3: «Il garantit la liberté individuelle du choix du mode de transport.» Il s'agit d'une disposition constitutionnelle que nous veillons naturellement à respecter, mais personne parmi les auteurs - visiblement, en tout cas - ne pousse l'analyse plus loin et ne se prête à l'exercice d'examiner ce que stipule l'alinéa suivant de ce même article: «Il encourage la mobilité douce.» Voilà ce qui y figure exactement.
J'observe que dans les principes constitutionnels qui englobent l'article auquel on se réfère constamment - pas moi le premier, mais du moins les auteurs du texte qui demandent toujours à peu près la même chose -, il n'existe pas de disposition visant à encourager la mobilité individuelle motorisée. Il n'y en a pas. En revanche, la constitution exige d'encourager la mobilité douce. C'est ce que nous avons fait et ce que nous essayons de faire en la matière, c'est ce que nous avons fait en l'occurrence au printemps 2020. Dès lors, agir différemment, comme le propose le projet de loi en question, c'est non seulement agir contre les normes - des textes relativement arides -, mais c'est également agir contre notre constitution cantonale. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. A présent, Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12730 est rejeté en premier débat par 62 non contre 20 oui.
Premier débat
Le président. Nous poursuivons avec le PL 12734-A dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Marjorie de Chastonay... à qui je céderai la parole quand elle se sera installée à la table des rapporteurs. (Un instant s'écoule.) Allez-y, Madame.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des transports a traité ce projet de loi en une séance. Celui-ci vise à modifier la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière via un nouvel article 2, alinéa 2, qui demande très exactement: «Toute restriction de la circulation sur les routes des réseaux routiers primaire et secondaire de nature à péjorer fortement la fluidité du trafic est subordonnée à un préavis favorable du Grand Conseil, à l'exception des manifestations temporaires de 5 jours.»
Après la présentation par l'auteur, la majorité des commissaires a refusé d'entrer en matière par 12 non, car ils ne souhaitent pas solliciter le Grand Conseil chaque fois qu'il y a des travaux ou des manifestations, ce serait ingérable en termes de temps, d'organisation et de logistique. En effet, il existe un service qui s'occupe des chantiers et une plateforme qui coordonne l'ensemble. Cela concerne des milliers d'interventions. Par ailleurs, on sait très bien que l'ordre du jour du parlement est complètement surchargé.
En conclusion, ce texte pose des problèmes de constitutionnalité, car il ne respecte pas la séparation des pouvoirs, il engendre des problèmes juridiques par manque de bases légales et enfin il génère une mise en application de la procédure longue et complexe. Pour toutes ces raisons, la commission des transports, dans sa majorité, vous invite à refuser l'entrée en matière. Merci.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme l'a mentionné la rapporteuse, l'entrée en matière sur ce projet de loi a été refusée en commission. Celui-ci déroge au droit fédéral, ce serait au Grand Conseil de s'occuper de mesures prises par la police en matière de circulation, ce qui paraît être une grosse aberration.
Ce texte pose des problèmes de constitutionnalité par son non-respect de la séparation des pouvoirs, manque de bases légales et surtout génère une mise en application de la procédure complexe et longue. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC rejettera l'entrée en matière. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Ce projet de loi demande que notre Grand Conseil donne un préavis quand il y a des modifications concernant la circulation. C'est important, les communes ne peuvent pas faire tout et n'importe quoi. Voilà l'objectif de ce texte, c'est ce qui est souhaité. Nous ne voulons pas que, par exemple, la Ville de Genève, ou d'autres communes...
On voit que des politiques très négatives sont menées, qu'il y a un esprit anti-voitures partagé par le département de notre magistrat, qui se trouve dans la salle et qui fait profession de foi... ou, disons, qui est quelque peu asservi en la matière au parti des Verts alors que nous n'arrivons plus à circuler dans ce canton...
Une voix. N'importe quoi !
M. François Baertschi. D'ailleurs, on se demande s'il ne va pas demander son adhésion au parti des Verts et quitter Le Centre ou le PDC, mais ça, c'est son problème.
Il n'en demeure pas moins qu'on se retrouve, par exemple aux Eaux-Vives, dans des quartiers où on ne peut plus circuler. Un ancien député, par ailleurs commerçant dans ce quartier, nous a confié: «J'ai perdu 40 000 francs !» 40 000 francs à cause de modifications de circulation inacceptables, qui font perdre des moyens. C'est tout un quartier qu'on détruit, parce que la Ville de Genève, irresponsable, prend des mesures, et il faut à tout prix lutter contre cette irresponsabilité. Voilà pourquoi le MCG a déposé ce projet de loi, il s'agit de défendre la population genevoise et le canton. Merci.
Une voix. Bravo, François.
M. Jacques Blondin (PDC). Je n'avais pas l'intention d'intervenir sur ce projet de loi, car le résultat de la commission est assez clair, mais juste pour illustrer les propos qui nous ont été rapportés, il y a 4000 chantiers par année dans le canton de Genève, alors imaginez si ne serait-ce que la moitié d'entre eux étaient concernés par ce texte, cela en ferait cinq à dix par jour ouvrable, toute l'année ! Dans ce cas, on devrait aussi ajouter dans ce projet de loi la création d'une commission ad hoc qui siégerait jour et nuit toute l'année pour rendre ses préavis, si possible en un jour, faute de quoi les travaux coûteraient encore plus cher qu'actuellement. Effectivement, il y a un problème de praticabilité, et c'est la raison pour laquelle la commission a tranché très vite et décidé de ne pas soutenir ce projet de loi, ce que nous ne ferons pas non plus. Merci.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Je crois en effet qu'il faut passer peu de temps sur ce projet de loi tant il n'est pas conforme au droit supérieur, tant il intervient avec des notions juridiques indéterminées, tant il est totalement contraire à la séparation des pouvoirs et tant il rendrait nos travaux ingérables et impraticables, avec quelque 2000 à 4000 textes qui nous reviendraient chaque année. Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à refuser cet objet. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie. Monsieur François Baertschi, je vous rends la parole pour une minute quatre.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On parle d'inconstitutionnalité du projet de loi, mais j'aimerais bien entendre ces grands juristes s'exprimer sur d'autres textes que nous traitons au sein de ce parlement. C'est une manière un peu facile de balayer un objet qui dérange. Pourquoi est-ce qu'il dérange ? Il faut que les partis qui s'opposent à ce projet de loi reconnaissent qu'ils bloquent les quartiers de Genève, ils sont les complices, voire les acteurs directs, de ce blocage. Allez aux Pâquis, Mesdames et Messieurs, allez aux Eaux-Vives, allez dans de nombreux quartiers de Genève où on ne circule plus. Pourquoi ? Parce qu'il y a ce blocage institutionnel. Certains sont complices de cette situation dans ce Grand Conseil.
Le MCG, lui, s'oppose au blocage de la ville. Nous faisons l'impossible pour aller là contre. C'est vrai que nous sommes très minoritaires, malheureusement...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. François Baertschi. ...parce que de nombreux partis sont irresponsables. Nous sommes...
Le président. C'est terminé...
M. François Baertschi. Merci, Monsieur le président.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, moi non plus, je ne pensais pas intervenir sur cet objet qui a été déposé par le MCG, qui a été voté par un seul député MCG en commission, mais enfin... Ça fait toujours mal au coeur d'entendre le MCG essayer de nous faire croire que c'est le seul parti qui défend la population alors que là, en l'occurrence, c'est tout le contraire. On en reparlera tout à l'heure avec les questions de phonoabsorbant et de réduction de la vitesse à 30 km/h, mais aujourd'hui, à Genève, 120 000 personnes souffrent des nuisances sonores quotidiennement, des nuisances qui dépassent les normes - j'y reviendrai - de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit.
Enormément de personnes, Monsieur Baertschi, souffrent de la pollution liée au trafic individuel motorisé, et quand vous vous exclamez: «Allez aux Pâquis, allez aux Eaux-Vives !», je vous réponds: «Mais allez, vous, aux Pâquis, aux Eaux-Vives !» Vous nous avez trouvé un seul commerçant qui n'était pas très content pour son chiffre d'affaires. Un commerçant ! Mais allez discuter avec les gens, allez discuter avec les associations de quartier, allez discuter avec les personnes qui vivent au jour le jour dans ces quartiers, ils n'en peuvent plus ! Ils n'en peuvent plus de quoi ? En partie, ils n'en peuvent plus du bruit du trafic aérien et en partie, s'ils n'habitent pas dans ces zones-là, ils n'en peuvent plus du bruit du trafic individuel motorisé. (Commentaires.) Quand il est question de mobilité... Monsieur Sormanni, écoutez ce qu'on vous dit, parce que pour les nuisances sonores, vous n'êtes pas mal non plus ! (Rires.) A un moment donné, il faut aller dans les quartiers écouter les gens qui n'en peuvent plus de toutes ces nuisances.
Alors il faut entreprendre des mesures, et bien entendu, Monsieur le président, que cela ne consiste pas à ce que le Grand Conseil - donc une commission, comme l'a relevé mon collègue - préavise sur les plus de 4000 décisions à prendre par année quant aux réseaux primaire et secondaire. Vous imaginez le Grand Conseil préaviser sur tel bout de rue, tel bout de rue, tel bout de rue ? C'est absolument impossible !
Ce que je vous dis, Monsieur Sormanni et Monsieur Baertschi, c'est que le résultat sera exactement le même, parce qu'une immense majorité de la population genevoise veut un trafic apaisé, plus de qualité de vie, moins de nuisances sonores, moins de pollution, et qu'on change enfin notre manière de nous déplacer à Genève. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous nous prononçons maintenant sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12734 est rejeté en premier débat par 68 non contre 11 oui et 2 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous traitons maintenant le PL 12970-A, classé en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole à Mme Marjorie de Chastonay, rapporteure de majorité.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des transports a étudié ce projet de loi durant trois séances. Il propose de prioriser le phonoabsorbant avant la mesure de limitation de vitesse à 30 km/h. La commission a auditionné, bien évidemment, le département, puis il y a eu une discussion interne, qui a abouti au vote d'entrée en matière. La commission des transports vous invite à refuser ce projet de loi pour de nombreuses raisons.
La première, c'est qu'il faut laisser une marge de manoeuvre au département dans la réponse à la problématique des nuisances sonores. Le fait de conditionner la limitation à 30 km/h sur les routes au fait qu'il y ait un revêtement phonoabsorbant semble trop lier les mains de l'Etat. Toutes les villes, en Europe et en Suisse, passent à une limitation à 30 km/h, d'abord la nuit, puis en journée. Ce sont des mesures complémentaires. La politique du département est de prioriser le phonoabsorbant avant d'imposer les 30 km/h, mais il ne souhaite pas avoir une obligation, sachant que, dans certaines situations, le phonoabsorbant n'aurait pas beaucoup d'efficacité et qu'il faudrait plutôt passer aux 30 km/h sans prioriser le phonoabsorbant.
Une deuxième raison invoquée pendant les discussions, c'est que le canton n'applique pas le phonoabsorbant partout, parce que justement, il applique la loi 8644 ouvrant un crédit d'investissement pour assainir le bruit routier. Du point de vue légal, le reste du réseau ne nécessite pas de diminution des nuisances sonores. Par ailleurs, les revêtements phonoabsorbants sont légèrement plus fragiles et ont une durée de vie réduite. Si on les posait partout, on devrait les renouveler de manière plus fréquente, avec les conséquences financières que cela suppose en raison des chantiers. Ce sont évidemment des interventions qui impacteraient la circulation et qui créeraient des nuisances pour les riverains. C'est pour cette raison que le département agit principalement sur le revêtement phonoabsorbant dans les secteurs à assainir mais pas forcément partout, et qu'il n'est pas exclu de mettre aussi du phonoabsorbant à un endroit sensible, si cela est nécessaire. En fait, c'est étudié au cas par cas. C'était la deuxième raison invoquée.
La troisième, c'est qu'il existe plusieurs manières d'agir sur le bruit: par exemple en limitant la vitesse à 30 km/h; en posant du revêtement phonoabsorbant; en utilisant ces deux méthodes de manière complémentaire; ou encore en réduisant le trafic, et bien d'autres.
Quatrièmement, ce projet de loi mélange les mesures de prévention du bruit et des accidents. On ne peut pas conditionner l'une à l'autre: ce sont des mesures complémentaires, elles ne doivent pas être subordonnées l'une à l'autre. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas de phonoabsorbant qu'on ne peut pas limiter la vitesse à 30 km/h - ce point est important - dans certains quartiers, alors que cela pourrait être nécessaire pour des raisons de sécurité, de trafic ou d'assainissement du bruit.
Cinquième raison: cette disposition ne doit pas être inscrite dans la LMCE. Cette dernière ne parle justement pas de protection contre le bruit et concerne par ailleurs les zones I et II.
La sixième raison de l'opposition de la commission des transports invoquée pendant nos débats était relative à la baisse de vitesse; or à travers la loi qui est proposée, on pourrait avoir des contraintes difficiles à mettre en place d'un point de vue technique.
Septièmement, au niveau fédéral, avec l'OPB, il y a une nécessité de prioriser les mesures à la source, et l'OPB met au même niveau ces deux mesures.
Enfin, huitième raison: pour préserver l'avenir, si à un moment donné la question du phonoabsorbant devait évoluer différemment, il ne faudrait pas que cette contrainte-là empêche le canton d'assurer une protection efficace des habitantes et des habitants soumis à des nuisances excessives.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des transports vous recommande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi, qui a été déposé il y a un peu plus d'une d'année, demandait qu'on trouve une solution pour la mise en oeuvre rapide d'un revêtement phonoabsorbant. J'aimerais quand même rappeler ici que ce projet de loi était couplé avec le PL 12971, avec lequel il a été traité conjointement - et qui est d'ailleurs, je crois, le point suivant de l'ordre du jour; ce dernier projet de loi demandait l'ouverture d'un crédit d'investissement de 100 millions de francs pour la mise en oeuvre rapide d'un revêtement phonoabsorbant sur l'ensemble du réseau routier cantonal.
Le PL 12970 propose que la limitation à 30 km/h ne soit possible que si la pose d'un revêtement phonoabsorbant n'a pas été suffisante pour diminuer les nuisances liées au bruit routier dépassant les valeurs limites d'exposition, qui se situent, d'après l'ordonnance fédérale, à 60 ou 65 décibels de jour et à 50 ou 55 décibels de nuit.
Trois thèmes d'une étude de l'OFEV datant de 2016 ont été utilisés dans l'exposé des motifs. Cette étude est intitulée «Revêtements de routes peu bruyants. L'asphalte phonoabsorbant: un fort potentiel». D'après l'OFEV, l'asphalte phonoabsorbant a un fort potentiel, c'est d'une rare évidence.
Le bruit de roulement des pneus dérange effectivement aussi beaucoup et, aujourd'hui, le phonoabsorbant est certainement le seul moyen de diminuer l'impact des pneus sur la voirie. Je reviendrai plus tard sur la suite de l'argumentation. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Jean Romain (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. La rédactrice du rapporteur de majorité a dit que trois séances avaient suffi; trois séances avaient suffi, évidemment, selon elle, pour refuser ce projet de loi. Il nous en faudra peut-être beaucoup moins, et ce que j'aimerais, c'est que vous acceptiez cet excellent projet de loi qui vise à prioriser les méthodes de diminution du bruit routier que sont soit la pose d'un revêtement phonoabsorbant, soit une limitation de vitesse à 30 km/h. Rappelons que l'impératif reste la préservation d'un trafic fluide ainsi que le fait de permettre aux personnes de continuer de pouvoir choisir librement leur mode de transport, ainsi que cela est garanti par notre constitution. (Remarque.)
L'OPB avait fixé un délai au 31 mars 2018 pour que les tronçons routiers cantonaux - environ 140 kilomètres pour le canton de Genève - et communaux à assainir le soient. Le canton de Genève a, à ce jour, accompli des travaux sur plus de 90% de ce réseau, un travail qui a commencé en 1998 déjà et qui nécessite une dépense de 5,4 millions par année pour la période 2020-2024, date de la fin de ces travaux d'assainissement.
Nul doute, l'excès de bruit est une nuisance qui porte à conséquence sur notre santé. Il faut cependant souligner en préambule que depuis des années, des efforts importants ont déjà été consentis. Les constructeurs automobiles fabriquent des véhicules moins bruyants et moins polluants. Les émissions sonores des moteurs ont fait l'objet d'une attention particulière, de même que celles des pots d'échappement. Les pneumatiques contribuent largement aux émissions sonores. A des vitesses de 25 à 35 km/h, le bruit émis par le moteur et le pot d'échappement est pratiquement égal à celui produit par les pneus. Les voitures fabriquées depuis l'an 2000 environ sont équipées de moteurs à tel point silencieux que le bruit du roulement des pneus l'emporte à partir de 15 à 25 km/h selon le type de véhicule. La nature du pneu est un élément important dans cette chasse au bruit. Une voiture équipée de pneumatiques silencieux permet de réduire de moitié ces émissions sonores - environ de 3 décibels.
Le revêtement routier est un deuxième facteur important générateur du bruit du roulement des véhicules. Une étude de l'OFEV montre que les revêtements phonoabsorbants les plus efficaces entraînent une réduction du bruit routier qui équivaut à une diminution de 85% du trafic. D'ailleurs, un représentant du département nous a même affirmé: «Le revêtement phonoabsorbant est la mesure la plus efficace aujourd'hui pour lutter contre le bruit routier.» Et il a même ajouté: «Au niveau des entités publiques, on pose du phonoabsorbant dans un premier temps et on complète ces mesures avec d'autres mesures. On y est contraint par l'OPB, parce que si on ne le fait pas, la justice pourrait l'ordonner par la suite.» Donc, on commence par le phonoabsorbant ! Chers collègues, c'est l'objet même de ce projet de loi. Ce revêtement est beaucoup moins bruyant, grâce à sa structure superficielle fine, d'une granulométrie maximale de 4 millimètres et très poreuse, avec une teneur en vide d'au moins 12%.
Dans la chasse au bruit routier, il apparaît donc rationnel et simplement logique de considérer en priorité la pose d'un pareil revêtement, ainsi que ce projet de loi le propose, avant de vouloir systématiquement imposer une limite drastique de vitesse qui apparaît bien plus comme une nouvelle contrainte aux automobilistes que l'on veut voir disparaître des routes.
Pour les raisons évoquées, chers collègues, Monsieur le président, et avec une volonté affirmée de réduction efficace du bruit routier, le PLR soutiendra ce projet de loi et vous demande évidemment d'en faire autant.
M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Mes deux préopinants ont tellement bien couvert ce sujet que je vais prendre peu de temps, si ce n'est pour dire deux choses.
Aujourd'hui, cela vient d'être dit par le rapporteur de deuxième minorité, les pneumatiques ont fait d'énormes progrès. Il faut savoir que - cela a été dit en commission par le fonctionnaire qui s'occupe des questions relatives au bruit - il n'y a pas si longtemps que ça, un pneu ordinaire émettait 71 décibels. Aujourd'hui, et à moindres coûts - ce n'est donc pas une question d'être en faveur des riches, je le précise pour leur éviter la remarque de certains -, on trouve des pneus qui émettent 68 décibels.
Qu'est-ce que cela veut dire ? Vous savez tous comme moi que les décibels, c'est une exponentielle. Par conséquent, de 71 à 68, c'est plus de la moitié du bruit de roulage qui disparaît ! Cela signifie que la limite à 30 km/h est de nouveau une mesure tout à fait wokiste et dans l'air: on veut tous attaquer tout ce qui est bien établi, qui fonctionne. On préfère la marche des gens à la marche des affaires; c'est une manière de voir les choses. Ce n'est pas la nôtre. Ce que je veux dire, c'est: oui, mettons l'effort sur le phonoabsorbant, oui, mettons l'effort sur... Je crois même qu'il a été dit en commission qu'on pouvait envisager éventuellement des grâces fiscales sur les impôts des autos, si les voitures sont équipées de pneumatiques efficaces en matière de bruit.
Une fois encore, c'est comme tout à l'heure, sur la largeur des pistes cyclables: ce n'est pas le bruit qu'on soutient. Evidemment pas. Personne n'aime le bruit ! A commencer par moi-même. Mais trouvons pour le faire baisser des moyens techniques autres que de toucher par la petite porte, celle que préfèrent certains, aux libertés des gens. On est de nouveau ici dans un combat et un débat qui touchent aux libertés individuelles. Alors, évidemment, se déplacer à pied, c'est le pied pour certains, mais il faut comprendre que pour d'autres, le caoutchouc des pneus est tout aussi bien. Merci.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à commencer par rassurer M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco: je ne vais pas parler des pistes cyclables ni du covid ! (Commentaires.) Mais je vais dire à M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat chargé du département des infrastructures, que les Genevois sont très reconnaissants envers le Conseil d'Etat en ce qui concerne la politique qui a été menée ces dernières années, avec la pose de ces surfaces phonoabsorbantes, puisqu'elles sont efficaces. Elles fonctionnent. Et, en politique, c'est important aussi de dire quand quelque chose fonctionne et de ne pas toujours dénoncer ce qui dysfonctionne.
La grande question qui se pose aujourd'hui, c'est: quelle interprétation donnons-nous au principe de proportionnalité ? Le principe de proportionnalité, c'est celui qui veut que, lorsqu'on a une palette de mesures à disposition pour atteindre un objectif déterminé, on commence par les mesures les plus douces pour atteindre l'objectif en question et qu'on utilise les mesures les plus dures seulement s'il n'est pas possible de faire autrement. Pour ma part, contrairement à la «marjorité»... (Rires. Commentaires.) ...de la commission des transports, je pense que la limitation à 30 km/h, ce n'est pas la mesure la plus douce, mais bien au contraire, c'est la mesure la plus dure. Cela devrait donc être l'ultima ratio, le dernier recours. Et on ne doit pas oublier une chose: on vit à une époque où on a énormément d'autres moyens de réduire le bruit que ces surfaces phonoabsorbantes, on a aussi l'isolation des bâtiments contre le bruit, qui a connu des développements importants ces dernières années. Alors certes, on peut toujours s'améliorer, mais on ne doit pas oublier cette mesure qui est essentielle.
Je dois dire qu'il y a quand même quelque chose de très curieux dans ce débat: au fond, on sait que les nouvelles technologies nous permettent d'entrevoir le développement rapide de véhicules qui fonctionnent autrement qu'avec du carburant, qui fonctionnent par exemple à l'électrique. Or que reproche-t-on aujourd'hui aux véhicules électriques ? Justement de ne pas faire assez de bruit ! Il y a même des spécialistes qui préconisent de doter ces véhicules de dispositifs qui génèrent un bruit artificiel pour alerter les piétons et les cyclistes ! C'est là qu'on en est aujourd'hui ! Par conséquent, si on adopte une vision véritablement progressiste et tournée vers l'avenir, le bon sens commande de partir du principe que dans quelques années, les véhicules, par la force des choses, vont faire moins de bruit, parce que c'est le type de véhicule qui va changer, parce qu'on va utiliser de moins en moins de véhicules qui tournent à la benzine et parce que, on l'espère, les nouveaux véhicules que nous aurons à l'avenir pourront faire des économies d'énergie.
Pour l'ensemble de ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous invite à soutenir ce projet de loi qui n'est rien d'autre que la retranscription dans la loi du principe de proportionnalité. Merci de votre attention.
Une voix. Bravo !
M. Philippe de Rougemont (Ve). Les auteurs de ce projet de loi auraient parfaitement raison de vouloir prioriser le phonoabsorbant, à condition d'éviter des éléments de la réalité que je vais devoir rappeler ici.
D'abord, le phonoabsorbant, c'est une méthode que l'on compte en centaines de millions et non pas en centaines de milliers. Il s'agit d'une technique qui perd ses effets au bout de trois à quatre ans. (Remarque.) La moitié de l'effet phonoabsorbant part au bout de trois à quatre ans après la pose... (Commentaires.) ...ce qui nécessite d'en remettre.
Autre élément de réalité: de toute façon, un tel réseau de chaleur va être - heureusement - installé à travers le canton que, par renouvellement naturel, chaque fois qu'il y a des travaux, c'est du phonoabsorbant qu'on pose. Donc, de toute façon, c'est dans le pipeline pour toutes les routes; on mettra du phonoabsorbant partout, parce que c'est devenu le nouveau standard.
Ensuite, prioriser les 30 km/h plutôt que le phonoabsorbant - c'est-à-dire l'inverse de ce qui est proposé ici - permet de réaliser d'abord une économie substantielle. Cela permet également des gains de sécurité: quand vous roulez à 50 km/h et que vous voulez vous arrêter, il faut 27 mètres; quand vous roulez à 30 km/h, c'est 13 mètres, parce qu'un véhicule, aujourd'hui, pèse 2 tonnes; or faire freiner 2 tonnes nécessite une longue distance. Et la différence entre 27 et 13 mètres peut sauver des vies.
Ensuite, demandez aux voisins, aux riverains, aux usagers des rues équipées de phonoabsorbant ce qu'ils en pensent lorsque passe un camion, lorsque démarre un scooter, lorsque passe une grosse moto: sont-ils contents ou pas contents de l'effet du phonoabsorbant à ce moment-là ? A mon avis, cela ne change rien du tout, parce que, quelle que soit la technique du pneu, quelle que soit la technique de la voiture, ces véhicules-là - et ils sont nombreux - effacent tous les effets du phonoabsorbant.
Dernier élément qui tient à coeur aux Verts: la première chose à faire lorsque l'on fait face à un problème, c'est de mettre en oeuvre la sobriété; mettre en oeuvre, comme on dit, les fruits les plus proches de la main. (L'orateur est interpellé. Remarque.) Ce qui coûte le moins cher, qu'on peut mettre en oeuvre immédiatement, ce sont les panneaux 30 km/h, c'est ce qu'il y a de plus intelligent. Il y a un effet sur la sécurité, il y a un effet sur le bruit, à moindre coût, et ensuite, on procède à ce qui est le plus cher. Et, comme je le rappelais tout à l'heure, cela va se faire de toute façon.
Ce projet de loi représente donc une mauvaise idée. C'est pour cela que les Verts vous invitent à refuser l'entrée en matière. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Vous transmettrez à M. de Rougemont que je le remercie d'avoir osé dire la vérité sur les objectifs des opposants à ce projet de loi. Je crois que M. de Rougemont a été clair: aujourd'hui, ils vont voter clairement contre la mobilité motorisée et ce sont clairement des mesures anti-voitures qui marquent de telles oppositions. Au moins, vous avez eu le courage de le reconnaître, de le dire très franchement, et je ne peux que le saluer.
Pour les mêmes raisons, et on l'a déjà dit à plusieurs reprises, le Conseil d'Etat en fait et en a toujours fait sa feuille de route - et il l'a lui-même rappelé tout à l'heure -, depuis le fameux dimanche noir où plus de 58% de la population a été trompée, où elle a accepté cette LMCE qui devait prétendument pacifier la mobilité... (Commentaires.) ...alors que, depuis ce fameux dimanche, cela n'a jamais été le cas. Non, le Conseil d'Etat a clairement pris le pari de mener une politique anti-voitures. Et on est convaincus que si la population devait revoter la LMCE aujourd'hui, les résultats ne seraient clairement plus les mêmes. (Commentaires.) Même si elle était acceptée une deuxième fois, le résultat serait beaucoup plus serré, parce que, quand on voit les oppositions aux mesures, ne serait-ce qu'à celles qui ont été prises dernièrement consistant à mettre quatre cents routes à 30 km/h, quand on voit tous les recours qui ont été déposés, on constate que la population n'est pas satisfaite de voir toutes ces rues mises à 30 km/h et on va plus vers un blocage qu'autre chose.
Reste la question de la jurisprudence; M. Murat Alder l'a très bien rappelé, il y a cette proportionnalité, mais il y a aussi ce que dit cette jurisprudence. Il me semble que la Confédération a été claire: on doit d'abord prendre des mesures telles que le phonoabsorbant, et après, si ces mesures ne suffisent pas, effectivement, on en vient à réduire la vitesse. Mais cela reste de toute façon une mauvaise solution, parce qu'aujourd'hui, l'Etat lui-même pousse à l'électrification des véhicules, mais il reste les pneus: si vous roulez avec un véhicule électrique qui est beaucoup plus lourd et qui a donc plus de frottement sur du phonoabsorbant, cela fait de toute façon davantage de bruit. (Commentaires.) Par conséquent, vous avez un revêtement phonoabsorbant, vous avez un véhicule électrique qui fait moins de bruit, mais il y a quand même ces histoires de frottement, d'où l'utilité du phonoabsorbant. Vous pourrez tourner les chiffres comme vous voulez...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. ...il n'empêche que nous vous recommandons fortement d'accepter ce projet de loi pour les raisons qui ont été évoquées...
Le président. Merci.
M. Stéphane Florey. ...notamment par les trois rapporteurs de minorité. Je vous remercie.
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, cette fin de soirée est assez sympathique. Cette opposition que l'on fait entre les véhicules et les vélos est regrettable, mais elle est malheureusement nécessaire pour les débats. Le Centre est parfaitement conscient que les nuisances sonores ont un impact majeur sur la santé de la population, et tout ce qui peut être fait pour épargner la population doit être réalisé.
Il se trouve qu'en commission, nous avons appris que «fin 2020, la pose des revêtements phonoabsorbants réalisée à ce jour» - en 2020, donc - «est de 92%. En 2024, 100% des revêtements phonoabsorbants seront posés sur les routes cantonales». Même ainsi, il se trouve que ce n'est pas suffisant pour un certain nombre d'habitants de cette ville.
Le Centre, futur ex-PDC, sous l'impulsion de son magistrat, a fait beaucoup de bruit autour de la lutte contre le bruit... (Remarque. Rires.) ...et c'est à toute vitesse - et pas à 30 km/h ! - que l'arrêté déposé le 11 octobre par le Conseil d'Etat a scellé le sort de ce projet de loi, levant tout suspense quant au résultat du vote ou même de son application. Pour cette raison, le PDC a participé au résultat de la «marjorité» et a choisi de refuser ce projet de loi. (Rires. L'orateur rit.)
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, évidemment qu'il est intéressant de favoriser le phonoabsorbant, bien qu'il y ait un certain nombre de cautèles qui doivent être posées, et je crois que M. de Rougemont les a rappelées, par rapport à la perte d'efficacité.
Par contre, le problème de ce projet de loi est le fait de conditionner la mesure des 30 km/h à une pose préalable de phonoabsorbant, bien sûr, parce que la limitation à 30 km/h a d'infinis avantages sur le phonoabsorbant ! D'abord, elle fluidifie le trafic, et si les commissaires avaient écouté les auditions qui ont eu lieu à la commission des transports - vous savez que je ne suis pas un des plus assidus, et pourtant, je l'ai entendu, c'est donc la preuve qu'on pouvait l'entendre, si on écoutait...! Tout le monde le dit, l'Office fédéral de l'environnement l'a dit, un certain nombre d'associations l'ont dit: la limitation à 30 km/h fluidifie le trafic... (Exclamation.) ...en raison de la diminution des temps de freinage...
Une voix. Bien sûr ! (Commentaires.)
M. Pablo Cruchon. Bien sûr, évidemment ! ...et ce, études à l'appui. Deuxième avantage non négligeable: cela réduit l'ensemble du bruit, pas seulement celui du frottement, mais aussi celui des moteurs, et cela évite en partie en tout cas les pétarades, qui sont liées aux scooters, aux voitures à grosses cylindrées; je peux vous dire, habitant sur un axe fréquenté, sans phonoabsorbant, que les moteurs sont autant une nuisance que le roulement.
Troisième avantage, bien sûr, et pas des moindres: la sécurité. Une sécurité nécessaire, je l'ai rappelé dans le cadre du point précédent. Notre hypercentre et notre centre sont particulièrement hostiles pour les personnes âgées, pour les personnes à mobilité réduite, pour les enfants, pour les personnes qui ont des poussettes. C'est un environnement hostile, et nous avons bien entendu tout intérêt à réduire la vitesse, surtout que nous avons affaire à des voitures de plus en plus grosses, de plus en plus imposantes - des deux-tonnes, des gros SUV -, qui sont particulièrement dangereuses pour nos enfants. Par ailleurs, toujours du point de vue de la sécurité, on diminue la gravité des accidents qui pourraient survenir, puisqu'on a une vitesse d'impact beaucoup moins élevée.
Le dernier avantage des 30 km/h par rapport au phonoabsorbant, c'est bien entendu l'immédiateté ! On peut décréter demain que toutes les rues de l'hypercentre sont limitées à 30 km/h, réduisant d'un coup massivement les nuisances sonores. Or, pour atteindre l'objectif de la pose du phonoabsorbant sur toutes les routes du canton, il faudra quelque temps. Et là, j'ai une critique à adresser au collègue Murat Alder, qui disait que la question de la proportionnalité était importante. Oui, elle est extrêmement importante ! Et comment appliquer cette proportionnalité, quand il s'agit d'un côté de vies humaines - je rappelle que les nuisances liées au bruit génèrent plus de cinq cents décès en Suisse et un grand nombre à Genève ? Comment mettre cela en proportionnalité avec le fait de pouvoir tranquillement rouler dans son SUV parce qu'on a la flemme de prendre un vélo ou de se déplacer à pied ? Ça n'a aucun sens ! Ce n'est pas proportionnel ! C'est au contraire, à tous les points de vue, criminel: criminel du point de vue de la santé publique, criminel du point de vue de l'urgence climatique. Il ne faut donc pas traiter ce problème dans ce sens-là.
Bien sûr, Ensemble à Gauche ne s'oppose pas à la pose de phonoabsorbant, mais on ne doit en aucun cas conditionner le développement de zones 30 km/h à cela. Par ailleurs, ce projet est particulièrement malhonnête, je tiens à le dire, parce qu'il a été déposé uniquement pour attaquer le plan du département sur la limitation à 30 km/h et non pas pour réellement gérer une problématique qui est importante pour nos concitoyennes et concitoyens. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai donné le chiffre avant, je le répète: 120 000 personnes aujourd'hui... (Exclamations.) ...120 000 habitantes et habitants du canton de Genève souffrent du bruit routier, souffrent d'une pollution sonore qui est trop élevée aujourd'hui, et non pas trop élevée au sens que ce seraient des personnes qui souffrent parce qu'elles seraient un petit peu sensibles au bruit. Non: elles habitent dans des endroits où les normes en la matière, selon l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit, sont dépassées. Il s'agit donc de quelque chose d'objectif, ces 120 000 personnes souffrent et c'est une souffrance tout à fait objective.
Pour cela, il faut agir. M. le conseiller d'Etat Dal Busco prend des mesures, avec le canton et avec nous, au Grand Conseil, qui sont des mesures simultanées. On ne peut pas en prendre une seule, on doit prendre un paquet de mesures. Dans celui-ci, il y a bien entendu la pose de phonoabsorbant - j'y reviendrai; il y a la réduction de vitesse à 30 km/h; il y a le fait de créer, notamment dans les quartiers, des zones 30 ou des zones dites de rencontre à 20 km/h; il y a bien sûr le fait de réaliser des travaux d'isolation des bâtiments, et notamment de finir d'installer du double vitrage dans les bâtiments. Il faut agir simultanément. Il ne faut pas prioriser une de ces mesures, et c'est ce que le canton, l'Etat essaie de faire aujourd'hui.
Par rapport à la pose du phonoabsorbant, cela a été dit, 92% du réseau cantonal routier à assainir bénéficie aujourd'hui de revêtement phonoabsorbant. Ce serait donc faux de dire que rien ne se fait en la matière. C'est fait par le canton; c'est fait de manière importante, mais ce n'est pas la seule mesure.
Par rapport à la réduction de vitesse à 30 km/h, alors oui, ça vous a énervés - certains et certaines dans cette salle. Mais il y a beaucoup de villes qui vont dans ce sens-là aujourd'hui ! On peut citer Lausanne, qui est en train de prendre des mesures ambitieuses à ce titre; au niveau européen, on peut citer Paris, Grenoble, Lille, Nantes; en Autriche, Graz, par exemple; Bilbao, Madrid, Bruxelles... Toutes ces villes prennent des mesures de réduction généralisée à 30 km/h ! Alors vous transmettrez, Monsieur le président, quand j'entends M. Florey, UDC, nous dire: «Il y a eu des recours contre les arrêtés du 30 km/h, on voit bien que la population est contre !» (Rire.) Non, mais c'est absolument incroyable ! Vous avez l'UDC, le PLR, le TCS - donc, excusez-moi du raccourci, les «Neinsager» de la mobilité durable ! - qui déposent des recours contre les pistes cyclables, contre la limitation à 30 km/h, et qui osent nous dire: «Vous voyez, la population est contre !» Mais c'est vous qui êtes contre ! (Rires.) Et vous êtes complètement déconnectés de la majorité de la population par rapport à ça !
Il faut réduire la vitesse à 30 km/h, à part sur certains axes structurants, je vous l'accorde; il faut créer des zones 30; il faut créer des zones de rencontre; il faut, de manière générale, apaiser le trafic, réduire le trafic motorisé. Les gens le demandent, les 120 000 personnes qui souffrent du bruit routier nous le demandent, c'est également une question de santé publique avant d'être une question de mobilité. Je vous demande donc, une fois de plus, dans ce Grand Conseil, de prendre vos responsabilités. Le parti socialiste ne veut pas prioriser une mesure par rapport à une autre, mais veut agir avec un paquet de mesures, et nous irons dans ce sens-là. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ah, quel débat passionné ! C'est intéressant ! Ecoutez, moi je constate quand même une chose depuis que cette LMCE a été votée: au lieu de calmer le débat sur les transports, ça l'a ravivé, puissance dix ! Et d'ailleurs, qui a rallumé la mèche ? C'est les Verts ! (Exclamations. Commentaires.) Les Verts, parce qu'à peine elle était votée qu'ils ont déposé un projet d'amendement pour aller encore plus loin ! Donc en fait, ils ne voulaient rien pacifier ! Ils voulaient mettre le feu à la maison, et ils ont réussi, avec la complicité du conseiller d'Etat chargé de l'immobilité généralisée aujourd'hui ! (Commentaires.)
On peut interpréter tout ce qu'on veut, mais aujourd'hui, on voit tous les jours des travaux, sans qu'ils soient présentés dans un quelconque parlement - ni au Municipal, ni ici -, où on supprime les places de parking - on ne sait pas comment elles sont compensées, on ne sait pas comment la loi est appliquée -, on élargit les trottoirs... Voilà !
Et est-ce que, vraiment, on a la preuve que les 30 km/h, ça fait moins de bruit ? Pas sûr du tout ! (Commentaires.) Ouais, ben on ne l'a pas vu ! (Vifs commentaires.) Tout ça fait que quand il y a eu sur la route du Pont-Butin l'essai d'abaissement de la vitesse à 50 km/h pour voir si ça faisait moins de bruit pour les immeubles d'à côté, ça a été un échec ! Ça n'a pas fait moins de bruit, puisque la vitesse est ensuite revenue à 60 km/h !
Une voix. C'est pas vrai !
Une autre voix. Si, c'est vrai ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Daniel Sormanni. Taisez-vous ! Chacun son tour ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît ! On se tait ! Laissez parler l'orateur !
M. Daniel Sormanni. Et puis alors, allons encore un peu plus loin ! Vous prétendez que les 30 km/h fluidifient le trafic ? Non ! La ville est complètement engorgée et bouchée, alors si vous voulez vraiment fluidifier le trafic, mettez-le à 0 km/h ! Alors là, c'est vraiment fluidifié, il n'y a plus rien qui bouge ! (Commentaires.) Et voyez-vous, il y a même des experts qui viennent nous raconter... Et c'est toujours les mêmes ! Notamment M. Kaufmann, de l'EPFL, qui vient toujours nous raconter la même chose ! Je ne le crois pas, je ne le crois plus ! Qu'il vienne aussi prétendre que pour fluidifier le trafic sur l'autoroute, il faut mettre une limitation à 60 km/h ! Non, mais on marche sur la tête ! Vous vous trompez complètement et je pense que... (Commentaires.) Oui ! Il faut contester cette mesure, et d'ailleurs, le MCG l'a aussi contestée - vous transmettrez à M. Wenger, parce qu'apparemment il n'a pas compris que le MCG a aussi contesté devant les tribunaux cette mesure généralisée des 30 km/h en ville ! C'est une erreur, ça n'améliorera pas la santé des gens ! (Commentaires.) Il faut voter ce projet de loi. Merci.
Une voix. Bravo, Daniel ! (Commentaires.)
Le président. Merci. Je passe la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Jean Romain.
M. Jean Romain (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Merci, Monsieur le président.
Le président. Pour vingt-cinq secondes.
M. Jean Romain. Oh là là ! Ecoutez, la réduction de vitesse ne peut à elle seule être une simple alternative aux autres mesures de diminution du bruit, parce qu'en fait, l'effet espéré de réduction du bruit, avec une limitation à 30 km/h, va être réduit par tout ce que l'on va faire pour justement un peu forcer les 30 km/h, à savoir les coussins berlinois, à savoir...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Jean Romain. ...les rehaussements, et le bruit qu'on prétendait supprimer...
Le président. C'est terminé.
M. Jean Romain. ...risque d'être augmenté par toutes ces mesures inutiles. Mettons d'abord le phonoabsorbant...
Le président. Merci.
M. Jean Romain. ...et ensuite, voyons ce qu'il faut faire...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.
M. Jean Romain. ...pour continuer dans le même sens. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au rapporteur de troisième minorité, M. Patrick Dimier.
M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Déjà ? (L'orateur rit.) Merci, Monsieur le président. Dans ce débat, on a entendu tout et un peu n'importe quoi. Je veux dire...
Une voix. Il est bien placé ! (Commentaires.)
M. Patrick Dimier. Je suis bien placé, Monsieur Guinchard, vous avez raison, mais attendez, vous allez en prendre une ! (Rires. Sifflements. Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Dimier. Moi je ne fais que dans la parole, hein, je ne suis pas du tout quelqu'un de violent ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît, laissez parler le rapporteur !
M. Patrick Dimier. Quand on vient nous dire que - je ne sais pas si vous avez capté cette phrase - «c'est les gens avec leur SUV», on cherche, on cible des catégories sociales pour un débat général. (Remarque.) Mais j'ai l'impression que Joseph est revenu parmi nous ! (Rire.) Que le père des peuples est là ! Il est dans cette salle ! (Rire.)
Une voix. Communiste !
Une autre voix. Staline, ouais... (Commentaires.)
M. Patrick Dimier. Tout ce qui est excessif est insignifiant. Mettons l'effort sur la diminution des bruits de roulement et on aura résolu notre problème; la question de la vitesse telle qu'elle a été exposée n'a rien à voir avec le bruit. C'est un combat social, wokiste et inacceptable ! On est dans une démocratie ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole va maintenant au rapporteur de première minorité, M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Pour deux minutes !
Le président. Tout à fait !
M. Christo Ivanov. Merci, Monsieur le président. Ce sera amplement suffisant. Cela a été dit par mon préopinant, un des gros enjeux sera toute la question du bruit, du développement des pneus sur le plan technologique, avec - on le voit - les améliorations qui ont été apportées, qui sont absolument incroyables - d'ailleurs, des tests se font dans le cadre des grandes compétitions internationales, de la formule 1, de la formule électrique qui se développe énormément dans le monde entier. Tôt ou tard, ils répondront à nos besoins en matière de réduction du bruit routier.
Pour répondre à notre collègue Philippe de Rougemont - vous transmettrez, Monsieur le président -, le phonoabsorbant, c'est huit à dix ans et non quatre à six ans. Ensuite, je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit par mon préopinant Daniel Sormanni: la gauche rouvre la guerre des transports, et je pense que ce n'est pas demain la veille qu'elle va se calmer !
En ce qui concerne les revêtements usuels, qui ont une granulométrie beaucoup plus grossière, ils sont tellement compactés lors de leur pose qu'ils ne comprennent presque plus de vide susceptible d'absorber une partie des bruits. Des recherches récentes montrent que les revêtements les plus silencieux génèrent 9 décibels de moins à l'état neuf, ce qui correspond, quant à la perception sonore, à l'élimination de six véhicules sur sept. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On voit donc bien que l'industrie fait un maximum pour améliorer et atténuer le bruit, qui, effectivement...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Christo Ivanov. Oui, je vais conclure. La minorité vous demande donc d'accepter cet excellent projet de loi. J'ai dit. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rends la parole au rapporteur de troisième minorité.
M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Oui, merci, Monsieur le président. C'est juste pour redire ce qui vient d'être dit par mon préopinant et souligner l'essentiel des efforts consentis par l'industrie d'une manière générale. Je comprends que des gens n'aiment pas les automobiles, je l'accepte, aucun problème ! Mais qu'on ne dise pas, s'il vous plaît, et de grâce, n'importe quoi ! Les efforts qui ont été faits, comme dans tous les domaines qui touchent la mobilité, ont été énormes ! Enormes ! Ce soir, j'ai l'impression qu'on est un peu shakespearien et qu'on fait «Beaucoup de bruit pour rien». (Exclamations.) Merci.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole. Il vous reste une minute treize.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai entendu des mots comme «wokisme», «Shakespeare», «pneus», «efforts de l'industrie»... (Remarque.) Bon, on peut expliquer la vie avec ce projet de loi, mais je pense que le but de ce texte, c'est vraiment toute cette question de conditionnalité; et nous, nous nous opposons très fermement à cette conditionnalité, parce que si on acceptait ce projet de loi, cela bloquerait la possibilité...
Une voix. Pas du tout !
Mme Marjorie de Chastonay. ...de limiter à 30 km/h...
Une voix. Pas du tout !
Mme Marjorie de Chastonay. ...s'il n'y avait pas de phonoabsorbant ! (Remarque.) Il s'agit de questions de bruit ou de sécurité. Ce sont deux sujets différents, il y a eu un mélange, une confusion. (Remarque.) Là, je parle du bruit. Cela a été évoqué, 120 000 personnes à Genève en souffrent. C'est un véritable fléau, c'est une question de santé publique. Il ne faut donc pas qu'il y ait cette conditionnalité, mais il faut laisser cette marge de manoeuvre au Conseil d'Etat pour justement évaluer quelles sont les mesures nécessaires et à quel endroit. Je conclurai sur ceci: la majorité de la commission des transports, je le redis, refuse ce projet de loi. Merci.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de loi, à l'instar d'autres dont vous avez débattu précédemment, donne évidemment la désagréable impression - mais ce sentiment désagréable, on l'a assez souvent au sein du Conseil d'Etat par rapport à des objets... (L'orateur rit.) - d'être en quelque sorte une réaction à l'action du gouvernement. Pourtant, l'action du gouvernement, dans ce domaine comme dans d'autres, n'est pas là pour chicaner les gens. (Remarque.) Elle est là en premier lieu pour faire respecter la loi - nous sommes le pouvoir exécutif -, et en particulier des lois qui ne sont même pas genevoises, mais fédérales: ici, l'ordonnance sur la protection contre le bruit.
Cela a été dit par plusieurs d'entre vous, il y a, dans ce canton, plus de 120 000 personnes, nos concitoyens... qui ne sont certainement pas tous devant leur écran de TV, mais je peux m'imaginer que ceux qui le sont, pour autant que le bruit dans l'endroit où ils se trouvent ne soit pas excessif - ou en tout cas pas trop important -, ont pu s'étonner des propos tenus ici. On a oublié cette réalité ! On nous a parlé de développement technologique, de ceci, de cela. La réalité, c'est qu'une bonne partie de nos concitoyennes et concitoyens se trouvent dans des endroits où les normes sont allégrement dépassées.
Le Conseil d'Etat ne veut pas rester inactif. Il n'est pas resté inactif, et ce depuis de très nombreuses années, puisque, comme cela a été très justement rappelé, il a fait ce qu'il pouvait faire, ce qu'il devait faire, en utilisant les outils à disposition, en particulier la pose de revêtement phonoabsorbant: plus de 90% du réseau cantonal est équipé - bientôt, ce sera la totalité, il faudra d'ailleurs renouveler tout cela -, mais ça ne suffit pas ! Ça ne suffit pas ! Et si, à certains endroits, des essais ont été menés... On a parlé de la route du Pont-Butin, d'ailleurs un endroit où il n'est pas question d'abaisser à 30 km/h. (Remarque.) Il s'agit de la ceinture urbaine, la vitesse y sera de 50 km/h d'après la stratégie vitesse. (Remarque.) A d'autres endroits, comme le boulevard du Pont-d'Arve ou le boulevard de la Tour, des essais qui nous ont été imposés par la justice, suite à des recours des habitants, et qui ont été menés de manière scientifique, ont démontré que, malgré le revêtement, l'abaissement de la vitesse à 30 km/h réduisait le bruit de moitié. (Remarque.) C'est la réalité ! Et le Conseil d'Etat ne peut pas ignorer cette réalité et ne peut surtout pas ignorer le fait que, désormais, l'abaissement de la vitesse est reconnu comme étant un moyen, comme le phonoabsorbant, d'atteindre les objectifs et de permettre à nos concitoyennes et concitoyens d'habiter dans un environnement un peu plus calme. C'est ça, la question.
Avec cette loi, vous établissez un lien qui n'a pas lieu d'être, parce que nous faisons déjà cela. Alors vous allez me dire que ça ne nous coûte rien de l'inscrire dans la loi si on le fait déjà. Non, cela pose un problème: cela rigidifie la manière dont on pourra agir. C'est totalement préjudiciable, la rapporteuse de majorité a donné des exemples précis expliquant pourquoi il n'est pas souhaitable de le faire. Mais je voudrais juste rappeler encore une fois que la quintessence et le fond du problème, c'est la situation que vivent 120 000 habitantes et habitants de ce canton; je pense que si on a une petite pensée pour ces personnes-là, on doit refuser ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je mets aux voix l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12970 est rejeté en premier débat par 47 non contre 43 oui. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous rappelle que nous avons notre traditionnelle rencontre de la course de l'Escalade, le dimanche 4 décembre à partir de 14h, suivie d'un apéritif dînatoire. Je vous souhaite une bonne soirée et un bon week-end !
La séance est levée à 20h.