Séance du
vendredi 4 novembre 2022 à
18h05
2e
législature -
5e
année -
6e
session -
37e
séance
La séance est ouverte à 18h05, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, et Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Serge Dal Busco, Nathalie Fontanet, Thierry Apothéloz et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Alexis Barbey, Diane Barbier-Mueller, Jennifer Conti, Edouard Cuendet, Patrick Dimier, Serge Hiltpold, Christina Meissner, Cyril Mizrahi, Philippe Morel, Salika Wenger, François Wolfisberg et Céline Zuber-Roy, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Rémy Burri, Nicolas Clémence, Jean-Charles Lathion, Aude Martenot, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti, Gabriela Sonderegger et Pascal Uehlinger.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Nous poursuivons avec le traitement des urgences en commençant par le PL 12944-A, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Jean-Luc Forni, remplacé par M. Jacques Blondin; je lui cède la parole.
M. Jacques Blondin (PDC), rapporteur ad interim. Merci, Monsieur le président. C'est avec plaisir que je vous remplace pour présenter ce rapport. Je vais me limiter à lire vos excellentes conclusions, qui se situent à la fin du document et résument fort bien la teneur de ce projet de loi.
«Une large majorité de la commission de l'enseignement supérieur vous invite à accepter ce projet de loi 12944.
«La commission a auditionné les étudiants de l'IUFE, la CUAE, les différents départements concernés ainsi que les représentants des enseignants du secondaire et ceux de la CIIP.
«Il en ressort que la modification de la LBPE voulue par ce PL permet de faire bénéficier de bourses et prêts d'études les étudiants devant effectuer un deuxième master pour accomplir leur formation. La LBPE ainsi modifiée permettra d'apporter une aide ciblée aux étudiants de l'IUFE dans la précarité, aux yeux d'une large majorité de la commission de l'enseignement supérieur. La commission a constaté que cela ne concernait qu'une minorité d'étudiants qui ne peuvent bénéficier d'un stage rémunéré, faute de places disponibles, durant une partie de leur cursus et qui n'ont pas la possibilité d'effectuer une suppléance ou des remplacements à côté de leur stage en accompagnement. Après des années difficiles liées aux restrictions budgétaires et à la covid-19, le DIP a montré que, pour les prochaines années, les stages en responsabilité resteraient largement majoritaires, mais qu'il fallait aussi tenir compte de la reconnaissance de ces stages liée au cadre fédéral et aux places disponibles, la mobilité des enseignants diplômés entre le secondaire I et le secondaire II restant prioritaire. Le DIP a aussi informé la commission que le salaire médian des stagiaires (50% d'entre eux) au niveau du département est à peu près de 30 000 francs (tous revenus confondus). 25% des stagiaires se retrouvent en dessous des 21 000 francs de revenus annuels. Le salaire maximum est de 69 000 francs.
«La LBPE ainsi modifiée pourra offrir un soutien financier ciblé et personnalisé aux stagiaires en situation précaire. C'est pourquoi la commission de l'enseignement supérieur vous recommande d'adopter ce PL.» Merci.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur, de cet excellent rapport ! (Rires.) Je passe la parole à M. le député Emmanuel Deonna.
M. Emmanuel Deonna (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Notre parlement a été saisi de plusieurs objets concernant la précarité à l'université: celle des étudiants, qui exigeaient des menus à 3 francs à la cafétéria, ainsi que celle du corps intermédiaire, qui demandait, et réclame toujours, de meilleures conditions tant d'embauche que de travail. Avec ce projet de loi, notre Grand Conseil cherche spécifiquement à mieux répondre aux besoins des étudiants de l'Institut universitaire de formation des enseignants - l'IUFE -, comme l'a rappelé M. Blondin.
Proposé par notre collègue Patricia Bidaux, du PDC, ce texte a été examiné au même moment que la M 2753 déposée par Mme Glenna Baillon-Lopez, Mme Amanda Gavilanes et moi-même pour le PS. Cette proposition de motion demande de maintenir la possibilité, pour chaque étudiant, d'effectuer un stage en responsabilité d'au moins une année, de rémunérer les stages en accompagnement, de procéder à l'augmentation de la ligne budgétaire dédiée aux stages dans le budget de fonctionnement de l'Etat et de clarifier et harmoniser l'organisation des stages en accompagnement avec l'IUFE. Comme l'indique le rapport du député Forni - du président Forni -, les auditions de la CIIP, de l'IUFE et de l'Union du corps enseignant secondaire genevois ont permis de mieux comprendre la situation des étudiants et de déboucher sur un compromis qui a convaincu une large majorité de la commission.
En mars 2020, le DIP a levé l'obligation d'effectuer des stages en responsabilité. Les stages en accompagnement ne sont pas rémunérés, ce qui a mis les futurs enseignants dans des difficultés financières. Les futurs enseignants du secondaire I et II doivent passer par la case stage de deux ans; les étudiants de l'IUFE n'ont toutefois pas tous accès à des stages en responsabilité rémunérés. Le nombre de bourses a été multiplié par trois pendant la dure épreuve du covid: la situation des étudiants s'est beaucoup précarisée et les bourses déterminent la trajectoire de très nombreux étudiants qui deviendront des enseignants. Les bourses sont souhaitables, car leur octroi exige un examen réel et concret de la situation des étudiants qui garantit une égalité de traitement - déclaration, fiches de salaires, etc.; en ce sens, elles protègent donc de l'arbitraire.
Selon les enseignants du secondaire, ce projet de loi permettra de tenir compte des difficultés des étudiants qui se trouvent dans des situations financières difficiles. Avoir une année de stage en responsabilité rémunéré et une année de stage en responsabilité partagée non rémunéré est problématique, en particulier pour des étudiants dont la moyenne d'âge est de 35 ans. Les étudiants à l'IUFE, comme vous le savez, je pense, sont pour la plupart en reconversion professionnelle. Le groupe socialiste vous recommande donc d'approuver ce projet de loi: il profitera aux étudiants qui doivent effectuer un deuxième master pour achever leur formation et permettra d'apporter une aide nécessaire, ciblée aux étudiants de l'IUFE qui se retrouvent dans des situations de précarité. Je vous remercie.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, afin d'enseigner au secondaire I et II, vous le savez probablement, il est nécessaire d'achever d'abord des études dans un domaine spécifique et de passer par la case master dans cette discipline particulière. Une fois ce master terminé, il est nécessaire d'enchaîner - pour autant que les inscriptions dans le domaine précis soient ouvertes - avec un master en pédagogie à l'Institut universitaire de formation des enseignants, l'IUFE. Deux masters sont donc requis pour devenir enseignant au secondaire.
Ce sont de très longues études qui sont parfois semées d'embûches puisque certains étudiants, par exemple formés en philosophie ou en italien - des branches bénéficiant de très peu d'heures d'enseignement -, doivent attendre plusieurs années avant qu'une place se libère dans leur discipline. Et cela sans même avoir l'assurance d'un emploi au bout de leur formation. Cela implique mathématiquement que la moyenne d'âge au sein de l'IUFE est plus élevée que dans d'autres filières de même niveau; la plupart de ces étudiants en passe de devenir enseignants ont donc déjà eu un emploi, souvent ils ont même déjà fondé une famille, et ils ne peuvent dans tous les cas pas se passer d'une rentrée d'argent pendant deux ans. Or la loi sur les bourses et prêts d'études, actuellement, ne permet pas aux étudiants effectuant un second master d'avoir accès à un prêt ou à une bourse puisque cette formation est jugée non nécessaire - autrement dit, comme un luxe. Ce projet de loi vise à combler cette lacune, étant donné qu'un second master est indispensable pour devenir enseignant.
Durant son audition, l'association des étudiants nous a informés que l'IUFE considère que le taux d'activité de la formation s'élève à 75% pour le master à une discipline et varie de 93% à 95% pour celui à deux disciplines. Etant donné qu'ils n'ont accès à aucune aide financière, les étudiants effectuent parfois de nombreuses heures de remplacement, allant jusqu'à travailler à 150% pour avoir des rentrées d'argent décentes. Ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, sont parfaitement indignes. Pour mettre fin à une partie des peines des étudiants et étudiantes de l'IUFE, nous nous invitons à soutenir ce projet de loi PDC tel qu'amendé en commission. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole va à Mme Dilara Bayrak... (Remarque.) C'est une erreur. Je passe donc la parole à M. Olivier Baud.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames les députées, Messieurs les députés, Ensemble à Gauche soutient ce projet de loi. La remarque qu'on pourrait faire, c'est que, d'une manière générale - je dis bien d'une manière générale -, les formations en emploi devraient quand même être plus valorisées, favorisées, dans notre canton, mais la tendance constatée est plutôt à leur disparition. Je parle bien d'une manière générale, pas uniquement dans le domaine de l'enseignement.
Ce projet de loi concerne plus particulièrement l'IUFE, l'Institut universitaire de formation des enseignants. C'est vrai que ça devient aussi très compliqué pour la reconnaissance des diplômes, et puis il y a toutes les règles imposées par la Conférence suisse des directeurs de l'instruction publique. Comment jongler avec ça dans ce parcours ? Tout le monde s'accorde à dire que c'est très compliqué et que ce n'est pas forcément bénéfique. Cependant, il ne s'agit pas là de remettre en question ce qu'a édicté la CDIP ou l'IUFE, mais simplement de constater que c'est bien d'avoir au moins le droit de faire une demande de prêt ou de bourse d'études lors d'un deuxième master, et qu'empêcher les étudiantes et les étudiants de ce canton de pouvoir en faire la demande est une forme d'inégalité de traitement. (Brouhaha.) Ensemble à Gauche soutient ce projet de loi tel qu'amendé - intelligemment - en commission. (Brouhaha. Remarque.) Merci, Monsieur Velasco. Oui... (Remarque.) Qu'est-ce qui est impossible ?
M. Alberto Velasco. Ce n'est pas possible de travailler comme ça, avec la porte ouverte !
M. Olivier Baud. Ah, ce n'est pas possible de travailler comme ça ! Oui, alors fermez la porte, s'il vous plaît. Merci. Je crois que je vais conclure là: votez ce projet de loi ! Merci beaucoup.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, tout a été dit, tout a été bien dit, et je remercie la commission pour le travail qu'elle a mené: il a permis d'apporter des clarifications, peut-être même d'affiner le texte. Il était en tout cas important, pour le groupe PDC, de trouver un nouvel équilibre, notamment en matière de droits et d'accès à des aides pour des étudiants qui ont l'obligation de faire un deuxième master. Donc merci de soutenir cette motion... (Remarque.) ...pardon, ce projet de loi - merci, Monsieur le député, de me corriger. Voilà, c'est tout !
M. Daniel Sormanni (MCG). Juste quelques mots concernant ce projet de loi. M. Deonna l'a dit tout à l'heure, on avait quelque part le choix entre ce texte et la proposition de motion déposée par le parti socialiste, la M 2753, qui en effet demande tout simplement que les stages soient rémunérés - point ! - et que la ligne budgétaire du département de l'instruction publique soit augmentée pour ce faire. Je pense que c'est un petit peu plus compliqué, et à mon avis ce projet de loi répond finalement à cette problématique: ceux qui sont en difficulté peuvent désormais avoir accès aux bourses. C'est beaucoup plus ciblé et, surtout, probablement beaucoup moins coûteux et beaucoup plus souple. Je vous invite donc bien évidemment à voter ce projet de loi. Merci.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat se réjouit que le parlement ait trouvé une solution, mais permettez-moi d'apporter quelques précisions, parce que je ne suis pas sûre que tout le monde ici connaisse les tenants et aboutissants de la formation des enseignants. Effectivement, les enseignants du secondaire doivent d'abord avoir une formation disciplinaire - un master en mathématiques, en allemand, en histoire, en géographie, que sais-je - puis la faire suivre d'un deuxième master, pédagogique, qui les prépare à enseigner. De ce fait, dans le système actuel des bourses d'études, ils n'ont pas droit à une aide.
Pourquoi auraient-ils besoin d'aide ? Mme Leonelli et M. Deonna nous ont parlé de l'âge des étudiants à leur entrée à l'Institut universitaire de formation des enseignants, qui est en effet relativement élevé; non pas qu'ils ont enseigné avant et qu'ils étaient en attente ou autre, mais probablement parce que ce sont des personnes qui ont occupé un poste ailleurs, dans le privé, après leur formation. Elles doivent trouver que la fonction publique, que l'enseignement à Genève est suffisamment attractif et intéressant pour chercher à y entrer. Ces personnes sont donc plus âgées, avec parfois une charge de famille, et c'est effectivement difficile quand on a 35 ans et une charge de famille de se retrouver sans salaire.
Pourquoi se retrouvent-ils sans salaire ? C'est là que j'aimerais apporter une petite explication: ce n'est pas une volonté du DIP - M. Baud l'a évoqué -, c'est lié à des exigences intercantonales, posées par la CDIP. La CDIP ne veut pas de formation en emploi, en principe. Monsieur Baud, je le regrette infiniment, parce qu'il y a une tradition genevoise en la matière que je soutiens - et j'ai été formée de cette manière-là; on était formé en emploi. La CDIP veut que ce soit plutôt ce qu'on appelle «en accompagnement», qu'on soit avec d'autres enseignants, et ne soutient pas, ou de manière minime, je dirais, la formation en emploi. En tout cas, lorsqu'elle l'admet, elle la limite - elle la limite à quatre à six périodes par semaine environ, contrairement à l'époque bénie que j'ai connue: on était alors à mi-temps, et en plus payé aux trois quarts. On était payé, de mon temps, pour suivre les cours de formation ! C'est vous dire si c'était une autre époque et si elle était effectivement bénie pour les étudiants. Première remarque, donc: la CDIP freine sur la formation en emploi.
Deuxième remarque: c'est une particularité genevoise - une genevoiserie, me direz-vous, mais à laquelle, semble-t-il, les enseignants du secondaire tiennent, nous avons un statut du corps enseignant unique: les enseignants du secondaire sont formés pour enseigner à la fois au cycle d'orientation et au secondaire II. Or, que nous dit la CDIP ? Elle refuse qu'un enseignant qui serait par hypothèse formé en emploi au cycle d'orientation n'ait jamais touché... enfin, ne soit jamais allé dans une classe du collège... (Remarque. Rires.) Oui, ne me faites pas dire ce que je ne voulais pas dire ! (L'oratrice rit.) Il est effectivement obligatoire qu'une partie des stages soit effectuée au gymnase, ainsi qu'on l'appelle en Suisse alémanique et dans d'autres cantons romands, c'est-à-dire au collège chez nous. Ce qui a obligé l'IUFE et le département, le gros de la formation se faisant plutôt au cycle parce que c'est là que les besoins se font essentiellement sentir à l'heure actuelle, à imaginer un système où on peut, dans la mesure du possible - et c'est souvent le cas en première année -, être formé en responsabilité et donc avoir des heures d'emploi rémunérées. Mais, par la force des choses, ces enseignants formés au cycle en première année doivent aller en accompagnement au collège en deuxième année, sans rémunération. Ce sont ces éléments-là qui ont de fait engendré un problème qui n'existait pas par le passé.
Quant à l'année 2020, elle a effectivement été un peu particulière. On a pu heureusement rectifier le tir - je rappelle que nous n'avions pas de nouveaux postes au budget et que nous avons par conséquent dû... Nous aurions pu faire le choix de renoncer complètement à former des enseignants parce qu'on n'avait pas de stages en responsabilité à leur offrir ou très peu - beaucoup moins que d'habitude -, mais nous avons choisi de permettre quand même la formation pour éviter aussi qu'on se retrouve à terme en manque d'enseignants. Elle s'est toutefois davantage déroulée en accompagnement et a par conséquent été moins rémunérée que d'habitude.
Voilà pour les quelques explications que je voulais vous donner. Et je me réjouis au fond de cette solution qui sera, à mon avis, probablement la bonne et qui permettra de cibler les personnes qui en ont le plus besoin. Merci.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12944 est adopté en premier débat par 68 oui et 2 abstentions.
Le projet de loi 12944 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12944 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 21 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Une voix. Bravo !
Débat
Le président. Nous passons à notre urgence suivante, la M 2835-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à la rapporteuse de majorité, Mme Amanda Gavilanes.
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. C'est par un jour de pluie que je viens vous parler de cette motion qui vise à réaliser le potentiel photovoltaïque du canton. Heureusement que toute l'énergie photovoltaïque ne doit pas être collectée aujourd'hui, n'est-ce pas ! J'ai donc le plaisir de vous présenter, au nom de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève, le rapport sur la M 2835 «Réalisons le potentiel photovoltaïque du canton». La commission s'est réunie à deux reprises en avril et mai 2022 pour traiter de ce sujet. En plus de l'auteur de la motion, elle a auditionné l'office cantonal de l'énergie et l'office du patrimoine, avec son service des monuments et des sites. Ceux-ci sont venus nous présenter les politiques et pratiques actuelles du canton en matière de photovoltaïque.
Le développement photovoltaïque s'inscrit dans le cadre d'évolutions sociétales ainsi que dans un contexte géopolitique tendu, notamment avec la guerre en Ukraine, qui entraîne le renchérissement des énergies fossiles. C'est pourquoi il est important de réaffirmer l'ambition du canton en matière de valorisation du solaire à l'horizon 2030. Le solaire possède deux variantes, une photovoltaïque et une thermique. Le plan directeur de l'énergie fixe un objectif ambitieux de 350 GWh/an. Le potentiel solaire du canton s'élève quant à lui à 1400 GWh/an. L'atteinte de ce potentiel solaire nécessite l'installation de 400 m2 de panneaux solaires par jour jusqu'en 2030.
Ces objectifs correspondent à un tiers du potentiel total et sont donc à la fois ambitieux et réalistes. Actuellement, on assiste à une montée en puissance du solaire à Genève avec une installation annuelle correspondant à 85 GWh/an. Par ailleurs, la stratégie solaire s'inscrit dans un cadre fédéral qui donne la priorité à l'énergie solaire tout en préservant les biens culturels et les sites naturels. Ainsi, le dispositif actuel s'inscrit pleinement dans le cadre fédéral. A l'échelle cantonale, il est nécessaire de valoriser les ressources locales, tout en préservant le patrimoine bâti. L'idée n'est pas de faire du solaire à tout prix, mais d'en proposer au bon endroit et de s'assurer de la bonne préservation du parc bâti. L'idée est de promouvoir les installations intégrées afin de préserver l'intégrité architecturale des bâtiments. L'autre objectif consiste à favoriser le solaire et à aller vers une valorisation des toitures, de sorte à avoir une architecture de bonne qualité. Il s'agit également de conjuguer l'utilisation de l'énergie solaire avec celle des pompes à chaleur et de réfléchir à la question du stockage.
La motion originale donnait une impulsion volontaire à ce sprint solaire en demandant à l'Etat de rendre obligatoire la pose de panneaux photovoltaïques sur l'ensemble des surfaces qui s'y prêtent et ainsi d'exploiter une partie significative du potentiel solaire tel que défini dans le plan directeur de l'énergie. A la suite des auditions et des discussions internes, la commission a décidé d'amender la deuxième invite de la motion afin d'enlever la notion d'obligation, estimant que les mesures mises en place actuellement par l'Etat rendaient cette invite caduque et redondante. C'est ainsi, par 10 voix contre 4, que la commission a accepté la M 2835 telle qu'amendée. Je vous invite donc, au nom de la commission, à accepter cette motion.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de minorité. Nous avons déposé ce rapport de minorité non pas pour dire que nous sommes contre tout ce qui est environnemental et ce qui vise à faire des économies d'énergie et à modifier nos comportements en matière d'utilisation d'énergies fossiles. Le problème est que ces propositions de motions et ces projets de lois sont chaque fois tellement jusqu'au-boutistes qu'on s'en mord les dents pour finir, parce qu'on n'arrive pas à appliquer... (Remarque.) On s'en mord les doigts, pardon ! (Rires. L'orateur rit.) On s'en mord les doigts ! Et Mme Gavilanes vient de le dire: il faudrait 400 m2 par jour jusqu'en 2030. C'est clair qu'on ne va pas y arriver ! Alors qu'est-ce qu'on fait ? On dépose des textes comme cette motion pour atteindre l'objectif de l'équipement de toutes les toitures qui s'y prêtent; pour avoir une obligation de couverture partielle ou totale des façades; pour développer des modèles de financement - qui va payer ? hein ? ça, ce n'est pas défini non plus ! - et pour développer ou faire développer des méthodes de stockage de l'électricité, comme si c'était l'Etat de Genève qui, lui-même, allait développer des méthodes de stockage de l'électricité ! (Remarque.)
Non, ce qui est une évidence, c'est que la lutte contre le réchauffement climatique est un combat permanent que nous devons tous avoir à l'esprit. C'est d'ailleurs ce à quoi toutes les entreprises, tous les investisseurs en matière de construction sont confrontés au quotidien et ce qu'ils intègrent dans toutes leurs décisions stratégiques. La preuve, ce sont toutes les normes ESG, c'est le développement durable qui est mis à toutes les sauces et la responsabilité environnementale qui est absolument partout. Et qu'est-ce qui permettra, effectivement, d'améliorer l'état de notre planète ? C'est l'innovation. Et l'innovation, ce sont les entrepreneurs, les chercheurs, c'est tout sauf les contraintes étatiques, qui dérèglent complètement le marché ! La meilleure preuve, c'est ce qu'il s'est passé en France avec l'éolien: ces installations d'éoliennes qui étaient prétendument la panacée ont surtout été très rentables pour les structures qui ont financé ces parcs éoliens, mais assez peu globalement pour les consommateurs et pour la planète.
Il ne faut donc pas se voiler la face avec des discours et des projets alibi, juste pour se donner bonne conscience, et c'est malheureusement ce que le politique a trop souvent l'occasion de faire. Les «y-a-qu'à-faut-qu'on-mais-on-ne-dit-pas-comment», c'est un petit peu dommage. Le but est tout à fait louable. Nous préférons, nous, essayer de favoriser sans imposer. Mme Gavilanes a dit: «Pas du solaire à tout prix !», mais quand on lit la motion, c'est: «Du solaire à tout prix et quoi qu'il en coûte, peu importe qui paie !» Nous vous invitons donc soit à refuser tout simplement cette motion, soit à la renvoyer en commission pour l'étudier à nouveau, sous l'angle de la nouvelle loi sur l'énergie, qui permettrait de savoir qui paie et comment. Je vous remercie.
Le président. Monsieur le rapporteur, vous demandez un renvoi en commission ? (Remarque.) Très bien. Madame la rapporteuse de majorité, sur le renvoi en commission ?
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Nous refuserons ce renvoi, car nous estimons que la commission, lors de ses travaux, a fait le tour de la question. Une large majorité s'est dégagée en faveur de ce texte et il est temps que nous donnions une impulsion en faveur du photovoltaïque. Pour cela, il faut voter cette motion ce soir. Merci.
Le président. Merci, Madame la rapporteuse. Monsieur le conseiller d'Etat, sur le renvoi en commission ?
M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Oui, volontiers, merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat recevra volontiers cette motion. Il considère également qu'il n'est pas nécessaire de la renvoyer en commission, il y répondra et souscrit évidemment aux principes énoncés. Nous sommes tous convaincus qu'il faut essayer d'accélérer le mouvement. Genève travaille déjà sur des projets dans ce sens, qui, pour certains, sont mis en pratique. Nous accueillerons donc cette motion et nous y répondrons certainement dans le sens des motionnaires. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur la demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2835 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est rejeté par 53 non contre 18 oui.
Le président. Nous poursuivons donc notre débat et je passe la parole à M. le député André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion 2835 est effectivement contraignante et je donne raison au rapporteur de minorité. Mais surtout, surtout, elle est en contradiction avec le projet de loi 13086, que la commission de l'énergie a approuvé à la quasi-unanimité - je crois que c'était à l'unanimité, je ne me souviens plus. Ce projet de loi sera une vraie avancée et un vrai progrès.
Je vais vous donner les différences qu'il y a entre cette motion et le projet de loi. Les deux premières invites, qui demandent d'accentuer les efforts pour réaliser les panneaux sur les toits et couvrir tous ceux qui s'y prêtent, ne posent aucun problème. Par contre, la troisième demande d'intégrer une autorisation de construire pour l'installation de panneaux photovoltaïques. Je précise que le projet de loi, qui est le fruit d'un vrai consensus et qui a été approuvé par une très très large majorité de la commission de l'énergie, lui, précise en son article 106, alinéa 4, que «la pose d'installations solaires n'est pas soumise à autorisation de construire». Je répète: la troisième invite de la motion est en totale contradiction avec l'article 106, alinéa 4, du projet de loi 13086.
Je continue. La quatrième invite demande de développer des modèles de financement sous forme de prêts, etc. On peut se demander si c'est nécessaire et si c'est la tâche de l'Etat. La cinquième invite demande de développer des méthodes de stockage. C'est évidemment le problème de l'électricité actuellement. On sait pertinemment qu'à Genève, il y a environ 10 000 heures d'ensoleillement par année et que la capacité de ces panneaux photovoltaïques est seulement de 15% à 20% en hiver. Alors effectivement, il faudrait pouvoir stocker. Mais le stockage est indiscutablement un problème de recherche, d'innovation, et on peut se demander si l'Etat est un acteur et doit faire quelque chose dans ce domaine-là.
Je reviens maintenant brièvement sur le projet de loi 13086. Il dit effectivement qu'il n'y aurait plus besoin d'autorisations de construire...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. André Pfeffer. ...pour les panneaux, sauf lorsque les bâtiments sont protégés.
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
Une voix. Il n'entend pas !
M. André Pfeffer. A ce moment-là, il faudrait une autorisation de construire...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député !
M. André Pfeffer. ...avec un préavis de l'office du patrimoine.
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. André Pfeffer. J'aimerais présenter... (Commentaires. Rires.)
Le président. Il n'y a plus de temps !
M. André Pfeffer. ...un amendement pour supprimer les trois dernières invites. Merci.
Le président. Il faut le faire, Monsieur le député, mais cela ne vous donne pas droit à du temps supplémentaire. Je passe maintenant la parole à M. le député Daniel Sormanni.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, écoutez, il faut voter cette motion telle qu'elle est. Il n'y a pas vraiment de contradiction, parce qu'au moment où on a discuté de ce texte - et ce n'est donc qu'une motion, hein, je vous le rappelle quand même, ce n'est pas un projet de loi ! -, les autorisations de construire étaient nécessaires, elles le sont aujourd'hui, parce que c'est la loi actuelle. Et on ne dit pas qu'il faut les imposer, on dit qu'il faut intégrer une obligation de couverture partielle des façades dans le cadre des autorisations de construire, puisque aujourd'hui, il en faut une pour installer des panneaux solaires. Lorsque le parlement aura reçu le rapport sur ce nouveau projet de loi et que nous l'aurons voté, il n'y aura plus besoin d'autorisation de construire, hormis en zone protégée, puisque c'est conforme aussi à la loi fédérale. Donc, Mesdames et Messieurs, cette motion n'est pas du tout contradictoire avec le projet de loi qui vous sera soumis, et je vous invite à la voter. Merci.
M. Jacques Blondin (PDC). Vous le savez tous, actuellement, à Genève, les attentes en matière d'énergie et d'objectifs du plan climat cantonal sont grandes, ce n'est pas nouveau, c'est sur toutes les lèvres, on en parle partout. Et, une nouvelle fois - on en a parlé tout à l'heure -, les propriétaires vont se retrouver au centre des discussions par rapport aux équipements et investissements qu'il faut faire pour essayer d'atteindre ces objectifs.
Alors bien évidemment, les équipements photovoltaïques et les pompes à chaleur qui vont avec sont une nécessité absolue à développer actuellement dans le canton. Et vous transmettrez à M. Pfeffer, Monsieur le président, que mélanger avec cette problématique le projet de loi qui a été discuté par rapport à la question des zones 4B protégées, c'est très réducteur. Les problèmes - même si on parle de photovoltaïque - ne sont pas les mêmes.
Lors des discussions en commission, notre groupe a été partagé sur cette motion, essentiellement en raison de la troisième invite. Celle-ci est claire et introduit une obligation. Alors on peut formuler cela comme on veut, mais il s'agit d'une obligation et je tiens à rappeler que nous, nous sommes partisans de l'incitatif, et l'incitatif peut être accompagné de subventions. Mais à partir du moment où on parle d'obligations, alors on aimerait savoir quelles sont les contributions qui permettraient à la personne qui fait l'objet d'une obligation de faire face aux coûts qui résulteraient de celle-ci.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement qui demande de biffer la troisième invite. Alors qu'on s'entende bien: sur le principe de cette motion, sur l'incitation et sur l'élan qu'on donne au Conseil d'Etat, nous sommes absolument derrière. Mais cette obligation qui serait faite aux propriétaires d'équiper les murs - on ne parle pas des toits, on parle de verticalité ! -, dans le contexte actuel, sans définir les règles du jeu... Parce que la quatrième invite, qui est très vague et laisse une porte ouverte à des interprétations, ne nous satisfait que très moyennement.
Par ailleurs, n'oubliez pas que, s'agissant des coûts, on a un gros projet, vous le savez, avec les IDC; ces prochaines années, visiblement, les propriétaires vont être soumis à des charges sérieuses liées à l'énergie: d'une part, il s'agit d'en produire, ce qui paraît intelligent, et, d'autre part, d'en économiser, ce qui l'est tout autant. Mais, chaque fois, cela impliquera de très gros investissements. Donc, si la volonté du parlement est de faire face à cette obligation en matière d'énergie liée à nos contraintes que je qualifierais de planétaires, alors il faut déterminer les moyens financiers qui vont avec. Par conséquent, nous vous demandons d'accepter notre amendement qui consiste à biffer la troisième invite. Merci.
Une voix. Bravo !
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme vous le savez, cette motion est largement inspirée de la décision que le parlement de Bâle-Ville - pour reprendre le... (L'orateur rit. Exclamations. Commentaires.) Cette motion est largement inspirée de la décision qu'a prise le parlement de Bâle-Ville il y a une année consistant à introduire une obligation de réalisation du potentiel photovoltaïque d'ici quinze ans. Vous voyez qu'on est beaucoup plus radical à Bâle-Ville qu'à Genève. La stratégie énergétique 2050 implique la sortie du carbone et du nucléaire. La sortie du carbone signifie partiellement un transfert vers l'électricité. La consommation d'électricité en Suisse devrait augmenter d'environ un tiers à l'horizon 2050. Qu'on le veuille ou non, une grande partie de cette différence doit être couverte par le solaire photovoltaïque. La technologie est mûre, le rayonnement solaire est présent, même en hiver et même aujourd'hui, malgré ce que dit la rapporteure de majorité ! D'autres technologies comme l'éolien ou la biomasse peuvent également être développées. Les projections montrent toutefois qu'elles ne compteront que pour moins de 10% de la production électrique.
Au contraire de ce qu'insinue le rapporteur de minorité, la motion permet l'innovation technique, que cela soit pour le développement de panneaux de meilleur rendement ou pour des méthodes locales de distribution d'énergie. Nous demandons simplement que l'Etat mette en place les conditions-cadres pour favoriser ces développements et pour mettre à disposition les surfaces nécessaires.
La quatrième invite, qui demande de développer des modèles de financement, est importante. Tout le monde n'a pas la capacité d'investissement suffisante. On peut imaginer des prêts à taux avantageux, voire nuls. Il doit également être plus facile de mettre à disposition des toitures, de façon que d'autres entités réalisent les installations photovoltaïques.
Les Vertes et les Verts regrettent que le délai de quinze ans et l'obligation de réalisation aient été supprimés de la motion par des amendements. Vous voyez que cette motion n'est plus du tout jusqu'au-boutiste, puisque la notion d'obligation a été supprimée. A ce propos, elle demande également d'implanter des panneaux sur les surfaces verticales, ce qui est intéressant en début et en fin de journée, ainsi qu'en hiver, puisque le soleil est bas à ces moments-là. M. Blondin souhaite supprimer cette invite, ce qui serait dommage. Je vous ai proposé une formulation plus souple, qui a enlevé l'obligation, et je vous incite à accepter l'amendement qui n'a plus l'obligation à l'intérieur, mais qui propose plutôt une incitation.
Une voix. On n'a rien compris !
Une autre voix. C'est donc notre amendement...
M. Pierre Eckert. Non, c'est l'amendement que je vous ai proposé et qui est plus souple. Cette motion finit par n'être que peu contraignante. L'initiative des Vert'libéraux sur le même sujet risque de frapper nettement plus fort. Avec cette motion, notre parlement peut garder une longueur d'avance. Le temps presse, nous avons pris un énorme retard. Il ne s'agit pas d'un projet alibi, comme le rapporteur de minorité le laisse entendre de façon sournoise, mais d'un projet qui va enfin nous sortir des énergies fossiles, qui sont accompagnées par leur cortège de dépendances géopolitiques délétères - je n'ai pas besoin de vous faire un dessin. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à M. Patrick Saudan pour une minute et demie.
Une voix. Moi j'aimerais quand même le dessin !
M. Patrick Saudan (HP). Merci, Monsieur le président. Ce sera court ! Mesdames et Messieurs les députés, c'est une très bonne motion, qui est bien documentée, bien argumentée, et je vais évidemment la soutenir. M. Eckert vient de le souligner, c'est vrai que l'initiative déposée par les Vert'libéraux a recueilli 7300 signatures en deux mois. Notre plénum ainsi que la population vont de toute façon se déterminer sur cette problématique. Cette initiative a des objectifs beaucoup plus contraignants que la motion. Ce débat va donc revenir chez nous, ce dont je suis tout à fait heureux.
Je suis aussi heureux de constater qu'il y a une sorte de communion d'esprit pour développer le photovoltaïque dans ce canton. Je pense que c'est la seule solution pour diminuer les effets du réchauffement climatique et de la crise énergétique. Je vous encourage donc à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat et à ne pas soutenir les amendements. Merci.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous soutiendrons cette motion, parce qu'elle va dans le bon sens, pour une fois, elle donne une direction. Mais il ne faut pas se leurrer: 40% à 50% des émissions de CO2 sont le fait des passoires énergétiques que sont nos bâtiments. La mise en place de cellules photovoltaïques avec des pompes à chaleur est efficace, mais cela ne changera rien si on n'isole pas les bâtiments, ainsi que nous en avons discuté, et si on n'aide pas pour cela les propriétaires qui en ont réellement besoin. Parce que, de fait, les technologies actuelles permettent, avec des cellules photovoltaïques et une pompe à chaleur efficace, de suppléer à l'apport d'énergie. Et cela rapporte de l'argent, parce que cela permet aux propriétaires de villas et aux propriétaires de bâtiments d'économiser, ainsi qu'aux locataires d'économiser en charges. Ce système-là en tant que tel permet l'autonomie énergétique.
Sauf qu'il y a des inconvénients, et c'est pour cela que je me suis abstenu lors du vote final en commission, non pas sur cette motion, mais sur le projet de loi qui vous est soumis, parce qu'en réalité, on ne règle pas le problème en installant partout des cellules photovoltaïques - d'ailleurs, cela risque de provoquer l'effet contraire: les gens, en allant se promener dans la campagne, verront un patchwork de cellules photovoltaïques installées n'importe comment, comme dans certaines régions en Europe où les gens y deviennent allergiques.
C'est pourquoi nous soutiendrons le fait d'intégrer ces cellules photovoltaïques dans des toits, dans la largeur du toit, avec une couleur appropriée, en réfléchissant à la manière idéale de procéder à ces installations, notamment parce qu'il existe quand même un règlement suisse lié à l'ISOS qui ne permet pas de faire tout et n'importe quoi dans beaucoup de nos villages protégés.
Pour nous, l'essentiel, c'est donc d'aller de l'avant, de voter - que ce soit une obligation ou une invitation, ce n'est pas le problème - le principe et l'orientation contenus dans cette motion. Je vous remercie de votre attention.
M. Adrien Genecand (PLR). Cela a été rappelé par Rémy Pagani, depuis une dizaine d'années, la question du photovoltaïque est problématique à Genève à cause des autorisations de construire et à cause du préavis de la CMNS. C'est une chose que nous allons par ailleurs peut-être traiter dans une loi bientôt. Or, venir en parallèle contredire ce qu'on demande - c'est-à-dire que la pose de panneaux solaires ne soit pas soumise à une demande de permis tant qu'on est dans le respect de la loi fédérale et de son règlement - avec cette motion qui demande autre chose, c'est nous assurer que ce qu'on pourrait éventuellement envisager - à savoir une réalisation plus simple du photovoltaïque dans ce canton - va être tout de suite tué dans l'oeuf. Voilà pourquoi il faut refuser cette motion en tant que telle.
Le fait de dire qu'on veut faire du photovoltaïque... Bon, on a voté une loi sur l'énergie, ce sont les articles 1 et successifs, où on dit juste, en gros, qu'on veut faire ça. Il n'y a pas besoin d'une motion pour dire qu'on veut respecter notre loi - sauf à considérer que notre travail ne consiste en rien, ou consiste à répéter des choses qu'on a rédigées dans la loi.
Le vrai problème, s'agissant du photovoltaïque, ce sont les autorisations de construire, ce qu'on va peut-être régler en parallèle dans le cadre d'un autre projet de loi. Mais voter ici quelque chose qui demande d'intégrer aux autorisations de construire à venir une obligation X ou Y, c'est l'assurance que, du coup, on va retomber dans les travers genevois, à savoir - et c'est sorti dans le cadre de l'enquête Tamedia -, quand on parle ne serait-ce que du cas de la Ville de Genève, que nous sommes les plus mauvais en Suisse pour la pose, et ce parce que la loi actuelle, les diverses lois de ce Grand Conseil et de ce canton font que ce n'est pas possible, que c'est très compliqué ou que c'est trop cher. Par conséquent, ce qu'il faut faire, c'est justement diminuer cela et non pas voter des motions pour dire qu'on veut le faire.
C'est pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que si vous voulez vraiment qu'on réalise ce potentiel, il faut refuser cette motion, il faut simplifier la loi, respecter le droit fédéral en disant qu'il n'y a pas besoin d'autorisations de construire dans ce domaine, que c'est réglé par le droit fédéral et son ordonnance. C'est ce qui permettra à tous ceux qui veulent le faire de le faire.
La question du financement sera traitée dans le cadre de l'indice des dépenses de chaleur et de ce qu'on pourrait mettre en place dans ce domaine-là, parce que, à nouveau, comme l'a dit M. Rémy Pagani, en fait, c'est une question d'argent: il va falloir rénover non seulement le toit, mais probablement aussi l'enveloppe; les questions de système énergétique, ça coûte beaucoup d'argent. Et juste le dire ne suffira pas. Cela va probablement coûter beaucoup d'argent à ce Grand Conseil et au contribuable et c'est dans une autre loi que cela se traitera. Cette motion n'aide en rien le début de la construction du premier panneau solaire de demain. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Danièle Magnin pour une minute cinquante-sept.
Mme Danièle Magnin (MCG). Merci, Monsieur le président, je vais faire très vite, parce que je vois que M. Sormanni a aussi demandé la parole. Je voudrais simplement dire que poser des panneaux solaires partout et sans autorisation de construire est une chose essentielle, parce qu'à l'heure actuelle, vu les problèmes d'énergie, il ne faut pas s'amuser à faire les lits quand il y a le feu dans la maison, si je puis dire. J'aimerais également indiquer que les règlements, ça se change, et qu'à certains endroits de la planète on trouve des maisons de toutes les couleurs, des toits de toutes les couleurs. Ce n'est pas un vrai problème. Ensuite, il existe des méthodes de conservation de l'énergie - je pense notamment à la conservation de la chaleur dans des cuves de paraffine, qui sont très efficaces et qui permettent ensuite de redistribuer cette chaleur. Quant à moi, je fais confiance au Conseil d'Etat pour rédiger une loi qui tiendra compte de l'ensemble des desiderata émis à travers cette motion par notre Grand Conseil, et s'il faut changer des lois, c'est à nous de le faire. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe maintenant la parole à M. Daniel Sormanni pour une minute.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce sera très rapide. Evidemment qu'il faut poser ces panneaux, et c'est pour ça que le MCG a proposé un amendement à la commission sur la deuxième invite. Ça ne sert à rien de poser des panneaux sur des passoires, justement ! C'est pour ça qu'on a précisé: «des toitures qui s'y prêtent». Et je rappelle qu'il ne s'agit que d'une motion.
Par ailleurs, certains ici à gauche disent que la droite nous freine dans l'installation de panneaux et l'isolation des bâtiments en vue de la transition écologique. C'est un petit peu facile de dire cela, parce qu'on l'a vu, et cela vient d'être redit par le député Genecand, dans ce domaine, on est les plus mauvais élèves à Genève - les plus mauvais élèves ! Et particulièrement la Ville de Genève ! Il n'en demeure pas moins que cela fait trente ans qu'il y a une majorité de gauche à la Ville de Genève, et ils n'ont rien fait pendant trente ans ! (Commentaires.) Alors ne venez pas donner des leçons, et maintenant on vote cette motion telle que sortie de la commission, sans amendements ! Merci. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à M. Jean Burgermeister pour quarante-trois secondes.
M. Jean Burgermeister (EAG). Merci, Monsieur le président. Très rapidement, le député Rémy Pagani l'a bien dit, dans le fond, il ne faut pas trop attendre de cette motion, mais elle a le mérite d'envoyer un signal, à savoir qu'il faut accélérer le développement du photovoltaïque. A ce titre-là, la réponse de M. Béné est édifiante: il nous explique que, dans le fond, l'Etat n'a rien à faire et que ce sont les entreprises qui trouveront miraculeusement la solution. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Mesdames et Messieurs, dans ce rapport figure très clairement la raison pour laquelle le PLR est devenu un danger pour l'humanité ! (Rires.) Puisque, au contraire, il faut bien comprendre qu'il y a une contradiction élémentaire entre, d'une part, les bénéfices privés et à court terme que sont les calculs des entreprises et, d'autre part, l'enjeu global et à long terme...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jean Burgermeister. ...qu'est celui de la planète. La preuve: l'industrie pétrolière n'a jamais été aussi rentable qu'aujourd'hui !
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Jean Burgermeister. Alors même que, de toute évidence, il faut l'abandonner au plus vite !
Une voix. 200 millions de morts !
M. Jean Burgermeister. Il est donc urgent de planifier...
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Jean Burgermeister. ...une sortie de l'économie carbonée. M. Béné se trompe et... (Commentaires.)
Le président. On a bien compris. Merci, Monsieur le député.
M. Jean Burgermeister. ...il devient un danger pour l'humanité tout entière ! Merci. (Commentaires.)
Le président. Je passe encore brièvement la parole à M. le député Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (HP). Merci, Monsieur le président. C'est juste pour apporter une précision à mon préopinant, M. Genecand, concernant les autorisations de construire. Selon le texte de notre initiative, «les installations conformes aux conditions posées par le droit fédéral n'ont pas besoin d'autorisation de construire et le droit cantonal ne peut ajouter aucune réserve ou condition supplémentaire». L'initiative sera beaucoup plus contraignante et le peuple tranchera. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la rapporteuse de majorité pour trois minutes.
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je donnerai ici la position du groupe socialiste. Contrairement à ce qu'ont évoqué certains de mes préopinants, le projet de loi dont ils parlaient ne concerne que la zone 4B protégée. Cette motion, elle, concerne l'ensemble des zones et des types d'habitation. Elle constitue donc une impulsion politique nécessaire. La crise énergétique dans laquelle nous nous trouvons, induite par la guerre en Ukraine, va profondément marquer et transformer nos modes de consommation et de production d'énergie. Elle va clairement contribuer à accélérer la transition énergétique si nécessaire à la préservation de notre planète et à la lutte contre le réchauffement climatique. Le parti socialiste estime qu'il est essentiel d'accentuer les efforts pour l'installation de panneaux photovoltaïques afin de contribuer à garantir et à améliorer l'approvisionnement énergétique de notre canton. Des progrès doivent être faits en la matière, notamment s'agissant de formation et d'environnement. Cette motion permet de donner l'impulsion politique, comme je le disais, indispensable pour répondre à l'urgence de la crise énergétique. Pour toutes ces raisons, le parti socialiste la soutiendra.
Le président. Merci, Madame la rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons à la procédure de vote et commençons avec les amendements qui nous sont parvenus. Les propositions d'amendements de M. Pfeffer consistent à biffer les invites 3, 4 et 5. Je mets en premier lieu aux voix la proposition consistant à biffer la troisième invite, qui correspond à l'amendement de M. Blondin - nous les voterons donc les deux en même temps. Le vote est lancé. (Un instant s'écoule. Commentaires.) Vous avez refusé cet amendement... (Commentaires.)
Des voix. Ça n'a pas marché !
Une voix. On refait ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)
Le président. Très bien, on relance le vote ! (Commentaires.)
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 36 oui.
Le président. Nous passons à l'amendement proposé par M. Eckert, qui modifie la troisième invite de la manière suivante: «à y ajouter un objectif de couverture en panneaux photovoltaïques des façades bien orientées, notamment pour les nouvelles constructions;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 38 oui.
Le président. Je vous prie maintenant de vous prononcer sur la suppression de la quatrième invite, proposée par M. Pfeffer.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 32 oui.
Le président. Enfin, je mets aux voix la proposition de supprimer la cinquième invite, qui émane toujours de M. Pfeffer.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 37 oui.
Mise aux voix, la motion 2835 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 60 oui contre 25 non et 1 abstention (vote nominal).
Premier débat
Le président. Voici la prochaine urgence: le PL 12860-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Je cède la parole à Mme Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission de la santé était prête à jeter ce projet de loi aux oubliettes ce soir, ceci pour de multiples raisons, notamment le risque d'accointances avec les industries pharmaceutiques, le risque de perte du double contrôle médecin-pharmacien, le risque d'ouvrir la boîte de Pandore pour d'autres spécialités médicales, le fait qu'il faille développer davantage l'interprofessionnalité entre le médecin et le pharmacien, et j'en passe.
Néanmoins, puisque nous avons reçu des amendements du Conseil d'Etat il y a vingt-quatre heures, nous sommes d'accord de les étudier en commission. En effet, il semblerait que ceux-ci obtiennent l'aval des acteurs du terrain, tant des pharmaciens que des HUG ou des oncologues.
Relevons en particulier ceci: «La remise de médicaments a lieu en pratique plutôt pour des médicaments oncologiques et le département doit délivrer une autorisation pour les institutions de santé qui souhaitent pouvoir le faire. Seules celles au bénéfice d'une autorisation formelle seront admises. L'alinéa 3 fixe les conditions à remplir pour obtenir l'autorisation précitée. Par ailleurs, lorsque le traitement est stabilisé, le patient doit ensuite être transféré vers les pharmacies de ville.» Il est également mentionné à l'article 114, alinéa 2: «La vente directe de médicaments par le médecin traitant (propharmacie) est interdite.»
Pour tous ces motifs, en tant que rapporteuse de majorité sur ce texte, je demande son renvoi à la commission de la santé.
Le président. Je vous remercie. Sur la demande de renvoi en commission, je passe la parole aux rapporteurs de minorité ainsi qu'au Conseil d'Etat. Monsieur François Baertschi, c'est à vous.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Ecoutez, si un renvoi en commission permet d'ôter les doutes de certains députés, pourquoi pas ? C'est vrai qu'il y a un enjeu très important autour de ce projet de loi. En deux mots - je serai très court, parce que c'est une prise de parole sur le renvoi en commission, je vous ai bien compris, Monsieur le président -, cette propharmacie constitue une exception, valable uniquement en oncologie. Il se trouve que l'oncologie est un domaine spécifique et qu'il faut tenir compte de cette spécificité, on parle de traitements très particuliers au bénéfice du client...
Des voix. Du patient !
M. François Baertschi. Du patient, du patient, excusez-moi ! C'est un lapsus hélas révélateur d'un problème que j'aurais voulu éviter d'évoquer; dans mon esprit, c'est le patient, et non le client, mais il y a parfois un problème de client - enfin bon, je ne vais pas entrer dans ces eaux un peu sombres. Je propose de soutenir la demande de renvoi en commission afin de lever les inquiétudes et d'examiner attentivement les amendements.
M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je préfère un renvoi à un rejet, bien sûr. Il faudrait que ces amendements soient examinés rapidement par la commission de la santé. Je rappelle qu'il s'agit d'un vrai problème de santé publique. Nous savons qu'en oncologie, les médicaments sont de plus en plus pointus, adaptés aux patients et aux patientes, et il est important que lorsqu'un traitement est déterminé par le médecin traitant - cela se fait par des «tumor boards», ce n'est plus simplement un médecin face à son patient, mais véritablement une mutualisation des connaissances qui fixe le type de traitement le plus adapté -, les médicaments puissent être immédiatement remis et qu'il n'y ait pas d'attente, car les pharmacies n'ont pas en stock l'ensemble des médicaments nécessaires.
Il y a eu un refus majoritaire en commission parce qu'on craignait d'ouvrir la porte à une propharmacie, mais je rappelle que la loi l'interdit, et il n'est pas question d'admettre d'autres exceptions. Nous ne voulons pas que le médecin remette lui-même des traitements dans d'autres domaines, donc nous avons circonscrit cette possibilité à des institutions de santé. Il faut que ces établissements disposent d'un pharmacien clinicien avec du personnel, des locaux et des équipements déterminés par le département, donc il s'agit véritablement d'hôpitaux, que ce soient les Hôpitaux universitaires de Genève ou certaines cliniques à Genève qui disposent de leur propre pharmacie et pharmacien responsable.
Il y a vraiment un contrôle du pharmacien, ce n'est pas simplement un médecin qui remet le médicament; «simplement» est certainement un abus de langage, puisque le médecin est censé savoir ce qu'il prescrit, mais la crainte qui avait été exprimée en commission était que le pharmacien n'apporte pas son regard supplémentaire avant la remise d'un médicament. Ce double contrôle sera là.
Comme je l'ai déjà dit, je pense que tout mois qui passe est un mois de perdu, mais je préfère que l'on en «perde», entre guillemets, encore deux ou trois si nous pouvons être certains d'arriver à un projet de loi qui soit finalement accepté ici à l'unanimité. Je pense que ce serait un signe salutaire pour l'ensemble des patients et des patientes qui attendent une réponse immédiate à une problématique que l'on sait douloureuse. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Je mets aux voix la proposition de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12860 à la commission de la santé est adopté par 74 oui et 2 abstentions.
Débat
Le président. Nous abordons notre dernière urgence, soit les objets liés M 2774-A et M 2825-A, en catégorie II, trente minutes. La parole revient à Mme Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de la santé a étudié les propositions de motions 2774 et 2825 pendant cinq séances sous l'excellente présidence de Mme Jennifer Conti. Dans le cadre des travaux, nous avons auditionné l'ancien directeur du SABRA et actuel directeur général de l'office cantonal de l'environnement, M. Royer, l'association Médecins en faveur de l'environnement, l'association 5G Moratoire pour la Suisse et l'Association suisse des télécommunications, l'ASUT.
La proposition de motion 2774, qui date de juin 2021, traite des demandes d'installations de téléphonie mobile dites mineures; elle a été déposée car le 15 avril 2021, la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice avait invalidé la modification de la LCI adoptée par ce Grand Conseil en février 2020. Suite à cette décision, le Conseil d'Etat a levé la suspension des autorisations de construire pour les antennes de téléphonie mobile. Il faut savoir que l'application de cette procédure a permis aux opérateurs, en 2019 et 2020, de modifier plus de quatre cents antennes sur le territoire cantonal genevois en les préparant à des émissions 5G.
Par ailleurs, Genève est l'un des rares cantons à continuer de suivre les recommandations de la DTAP, la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Seuls sept cantons contre 19 les appliquaient en Suisse à ce moment-là. Par conséquent, 19 sur 26 avaient tout de même décidé de ne plus admettre de demandes de modifications mineures, type 4G+, ceci par simple circulaire administrative aux opérateurs.
Enfin, vu l'évolution de la situation suite à la nouvelle aide à la décision, la DTAP a entamé une réflexion pour une révision de ces fameuses recommandations, révision qui prendrait mieux en compte les conséquences de la nouvelle aide à la décision et viserait un meilleur contrôle des installations. Pour rappel, la fin du moratoire ainsi que les décisions de justice n'empêchent ni une réflexion ni une modération quant aux actions à entreprendre. Au vu de ces informations, l'option prise par le Conseil d'Etat paraît inadaptée. Voilà les raisons pour lesquelles les Vertes et les Verts avaient déposé cet objet.
Entre-temps, la proposition de motion 2825 a été présentée, qui s'inscrit dans la continuité des décisions prises sur le plan fédéral. Ce deuxième texte porte sur la mise en oeuvre de la modification de l'ORNI au niveau cantonal. La commission de la santé a souhaité, par souci de cohérence, examiner ces deux textes ensemble de manière chronologique, puisque l'un fait suite à l'autre.
En effet, le 17 décembre 2021, le Conseil fédéral a modifié cette ordonnance en assouplissant de manière drastique les conditions d'autorisation de transformations d'antennes 5G. Cette décision n'a pas été soumise aux Chambres fédérales et est entrée en vigueur dans un délai très court, à savoir le 1er janvier de cette année 2022, empêchant tout processus démocratique. Les recommandations de la DTAP ne constituent pas des obligations légales, donc les cantons sont libres de les suivre ou non.
L'objectif principal de la proposition de motion 2774 est de respecter le principe de précaution en soumettant toutes les demandes d'installations à une mise à l'enquête alors que celui de la proposition de motion 2825 porte davantage sur la mise en oeuvre de la modification de l'ORNI au niveau cantonal.
Suite à l'audition du SABRA, nous avons discuté des nombreuses contradictions en lien avec l'avis de droit de Fribourg et les décisions politiques suisses. Il a également été question des limites quant à la façon de mesurer et de contrôler, ce qui répond à un souci de la population pour la santé publique et l'environnement. Les réponses fournies lors de l'audition ont été que le canton ne dispose pas de moyens de contrôle et que c'est l'opérateur qui envoie ses propres rapports. Un inspecteur travaille pour cela à temps partiel; c'est peu par rapport aux centaines d'antennes à contrôler. Concernant la santé, nous n'en avons pas vraiment appris davantage. Le même jour, une décision a d'ailleurs été prise, celle que j'ai évoquée tout à l'heure et qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Une rapidité qui a laissé peu de place au débat, à la réflexion, à la collaboration, à l'analyse, à la consultation, bref, au processus démocratique.
En résumé, une porte a été ouverte pour le rééquipement et l'agrandissement de milliers d'antennes en Suisse sans possibilité de recours et sans que nous en connaissions l'impact potentiel sur l'environnement et la santé. Voilà pourquoi cette proposition de motion a été déposée et que la majorité de la commission de la santé vous encourage à la soutenir. Le but, c'est que le canton de Genève affiche une position claire et interdépartementale vis-à-vis de Berne par rapport à ces questions.
Je terminerai mon propos en soulignant que ces textes invoquent des raisons démocratiques, des raisons de contrôle, des raisons juridiques, des raisons scientifiques et des raisons sanitaires, et pour plus de transversalité entre les départements, il est fondamental de les accepter ce soir.
J'ajoute enfin que depuis le vote positif de ces deux propositions de motions par la majorité de la commission de la santé, une initiative populaire a été déposée au niveau fédéral pour une meilleure protection contre le rayonnement de la téléphonie mobile et un réseau durable. Intitulée «SaferPhone», elle vise à ancrer dans la Constitution fédérale une sorte de principe de précaution ainsi que des mesures pour protéger les êtres humains et les animaux. Mesdames et Messieurs, je vous recommande d'adopter ces deux objets. Merci.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Chers collègues, la question de la 5G est en soi estimable et mérite d'être évoquée dans notre parlement de diverses façons, oui, mais pas n'importe comment. Or c'est précisément quant à la manière que pèchent ces deux propositions de motions. Il s'agit d'effectuer un travail efficace, c'est-à-dire de proposer des textes qui servent à quelque chose, qui n'enfoncent pas des portes ouvertes, qui ne suscitent pas de faux espoirs auprès d'une grande partie de la population, laquelle attend des réponses. On ne peut pas faire ce genre de choses.
En particulier, on demande au Conseil d'Etat d'aller tirer les oreilles du Conseil fédéral. C'est quand même assez curieux ! Est-ce vraiment le rôle du gouvernement genevois de dire: «Mesdames et Messieurs les conseillers fédéraux, vous n'avez pas bien fait le travail, vous devez changer les choses» ? Non, je regrette. Il y a des élus fédéraux qui sont là pour ça. D'ailleurs, je m'étonne que des partis qui ont des représentants sous la coupole soutiennent ce genre d'objets en passant par notre Grand Conseil au lieu d'intervenir directement à Berne.
En fait, c'est une perte de temps et d'énergie, voire un risque de décrédibilisation pour Genève. Comme on le sait, notre canton est déjà connu pour bénéficier d'une crédibilité limitée, alors si des partis nationaux nous en font perdre davantage encore... Nous, qui sommes un modeste parti genevois, n'avons actuellement pas de représentants à Berne; nous en avons eu longtemps, mais nous n'en avons plus, nous serions donc habilités à déposer ce genre de textes. Mais venant de partis qui sont représentés à Berne ?! Y a-t-il une telle méfiance, pensez-vous que nos conseillers nationaux genevois sont à ce point de piètre valeur ? Je laisse les auteurs de ces propositions de motions prendre toutes leurs responsabilités dans cette affaire.
Si on veut à tout prix perdre de la crédibilité et gesticuler, eh bien allons dans la direction de ces deux propositions de motions. Pour ma part, je conseille aux députés qui ont soutenu ces deux objets d'en déposer d'autres ou de les revoir, de les affiner davantage et d'en faire des textes efficaces. C'est la seule chose que je peux dire.
Ce n'est pas une question de fond sur le problème de la 5G, parce qu'il y a vraiment tout un travail à accomplir, particulièrement un travail d'étude et d'analyse sur les effets de la 5G, il y a des moyens à mettre en action pour analyser ces questions importantes, mais il faut le faire au bon niveau, c'est-à-dire au niveau fédéral. A mon sens, c'est là que les auteurs se sont fourvoyés avec ces deux textes parlementaires, Mesdames et Messieurs, et c'est pour cela que je vous invite à les refuser. Merci, Monsieur le président.
M. Emmanuel Deonna (S). Mesdames et Messieurs les députés, la très grande majorité des études scientifiques démontrent la dangerosité des rayonnements non ionisants, mais elles sont systématiquement minimisées et ignorées pour des raisons politiques et économiques. En Suisse, le pourcentage de personnes électrosensibles varie de 5% à 7% selon les estimations. On ne naît pas électrosensible, on le devient. C'est comme un coup de soleil: au bout d'un moment, on sera brûlé. Ainsi, la quantité de personnes qui perdent leur immunité est amenée à augmenter logiquement avec le déploiement de la 5G.
Aujourd'hui, dans le canton de Genève, s'il y a une modification conséquente ou une nouvelle installation, il faut passer par une autorisation de construire. En revanche, s'il s'agit d'une modification mineure, une notification des opérateurs au SABRA suffit. Le SABRA contrôle s'il s'agit bien d'une modification mineure.
Mme la motionnaire, que je remercie pour tout son travail sur ce dossier important, a rappelé le contexte du dépôt de ces deux propositions de motions: l'aide à la décision, la fin du moratoire. Nous sommes dans une situation nouvelle, car contrairement à ce qu'affirme le député Baertschi, la position du législateur fédéral est en train d'évoluer. Les services du DETEC et l'OFEV ont eux-mêmes déjà publié des études très alarmantes.
Mesdames et Messieurs les députés, la question ne se résume pas à la valeur limite de rayonnement des ondes; il existe des indices probants selon lesquels non seulement l'apport d'énergie, mais encore les caractéristiques du signal ont un effet biologique. Le rayonnement a une influence attestée sur l'activité électrique du cerveau. Des preuves d'effets cognitifs chez les adolescents ont été récoltées. Les potentiels cancérigènes sont reconnus et doivent maintenant vraiment être pris en compte.
Par ailleurs, nous devons nous montrer vigilants et critiques par rapport aux pourvoyeurs de la 5G et de ces technologies, car il y a un vrai problème environnemental. L'obsolescence programmée constitue un réel enjeu, les circuits de recyclage et le conditionnement des matières premières, des matières plastiques et des métaux ne prennent pas en charge le stockage des déchets informatiques. Toutes ces antennes 5G vont servir à nous faire acheter de nouveaux téléphones qui seront remplacés très rapidement; mal recyclés, ils causeront des dégâts écologiques majeurs. On entre dans une spirale infinie. Nous devrions mettre la question de la réparation, du recyclage, de la prévention des dégâts environnementaux beaucoup plus au coeur de nos interrogations.
La surconsommation a des impacts environnementaux et sociosanitaires délétères, des conséquences sur le comportement, sur le stress, sur la qualité du sommeil. Or ces questions, Mesdames et Messieurs les députés, ne semblent pas vraiment être étudiées de manière transversale au sein de l'administration.
Ces propositions de motions ont l'avantage de plaider pour un développement raisonnable de la communication mobile, pour une technologie responsable. De plus, elles vont dans le sens de l'initiative populaire fédérale très intéressante qui vient d'être déposée pour un développement durable des télécommunications. C'est pourquoi le parti socialiste vous recommande d'accepter ces deux textes. Je vous remercie.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, les deux propositions de motions que nous traitons nous renvoient à des modes de fonctionnement qui doivent nous interpeller. Tout d'abord, il y a le manque de transparence des opérateurs, qui contournent les normes, ainsi que les décisions des autorités en matière d'installations d'antennes pour la téléphonie mobile, plus particulièrement les manoeuvres sournoises pour transformer les antennes existantes afin d'augmenter leur puissance, implantant ainsi de véritables chevaux de Troie dans les installations de téléphonie mobile.
Mais ce qui devrait nous inquiéter plus encore, c'est la non-application du principe de précaution et l'absence de réflexion quant au choix de société qu'implique cette course à la performance qui, comme le promet la 5G, générerait un accès de dix à cent fois plus rapide que celui que nous connaissons actuellement avec la 4G. Aujourd'hui, il apparaît que l'impact sur le vivant et la santé humaine n'a jamais véritablement été évalué; il y a là une préoccupation en matière de santé publique et d'environnement qui doit questionner les autorités.
Le rapport «Téléphonie mobile et rayonnement» réalisé sous l'égide du Département fédéral de l'environnement considère comme suffisantes les preuves attestant que l'exposition de la tête aux rayonnements de haute fréquence de la téléphonie mobile affecte les ondes cérébrales au repos et pendant le sommeil. Il y a donc là un signal d'alarme dont il faudrait pour le moins tenir compte.
Comme si cette alerte ne suffisait pas, il faut encore savoir que le chef de la section rayonnement non ionisant à l'Office fédéral de l'environnement a reconnu dans la presse qu'un rayonnement dans les fréquences utilisées pour la téléphonie mobile peut provoquer un réchauffement des tissus. Durant les travaux de la commission, il est apparu qu'effectivement, on dispose sur le plan médical de peu de certitudes quant à l'impact des ondes téléphoniques sur la santé, ce qui tendrait à renforcer notre conviction que des recherches rigoureuses en la matière s'imposent. Cependant, il a été mis en lumière, c'est d'ores et déjà attesté, des atteintes sur les tissus mous, en particulier les yeux et la peau.
Ces indications ainsi que les doutes qui subsistent rendent indispensables de véritables études cliniques et épidémiologiques sur les modifications cellulaires et les éventuelles altérations susceptibles d'être développées par l'expansion des antennes de téléphonie mobile. Pour des raisons évidentes de crédibilité et d'objectivité scientifique, elles devraient impérativement être menées par des experts réellement indépendants.
Pour conclure, Mesdames et Messieurs, une question centrale demeure: la volonté d'aller toujours plus vite est-elle à ce point impérative que nous en venions à prendre des risques pour la santé de la population et l'environnement ? Il s'agit là d'un choix de société qui mérite à tout le moins qu'on y réfléchisse consciencieusement et honnêtement. C'est ce à quoi le groupe Ensemble à Gauche vous invite et ce pour quoi il vous recommande pour l'heure de soutenir ces deux propositions de motions. (Applaudissements.)
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, je suis surpris d'entendre que les scientifiques de la Confédération ne sont pas indépendants. Je suis également étonné d'apprendre qu'il y a dans cet hémicycle de bien meilleurs spécialistes que les ingénieurs et biologistes de la Confédération. A vous d'en tirer les conclusions que vous souhaitez.
Si vous vous souvenez bien, une majorité de ce parlement a voté un moratoire sur l'installation d'antennes 5G dans le canton de Genève au début de la législature. Une Genferei de plus, puisque la justice a établi que ce texte était contraire au droit fédéral. Cette décision n'est malheureusement pas la première de ce type, et chacun de ces jugements n'améliore pas l'image de notre canton au sein de la Confédération. Visiblement, cela ne suffit pas, parce que nous voilà face à une nouvelle salve antitechnologique avec ces propositions de motions.
Je souhaite ici rappeler à votre attention la question écrite urgente de notre brillant collègue Hiltpold, qui a montré que le gouvernement refuse systématiquement l'installation de nouvelles antennes téléphoniques sur les bâtiments dont l'Etat est propriétaire. Une fois de plus, des décisions sont prises par la bande, sans débat public, sans débat politique, puis elles sont annulées par un tribunal. Cette manière de procéder est proprement scandaleuse.
Pour revenir aux propositions de motions, en juin 2022, l'Office fédéral de l'environnement a publié un premier rapport de monitoring du rayonnement non ionisant. L'objectif était de déterminer à quel point la population est exposée au rayonnement non ionisant. Cette étude, basée sur des mesures scientifiques et des tests, démontre que la technologie ne présente pas de risques pour la santé. Les mesures vont continuer pendant cinq ans en Suisse.
Pour rappel, la 5G fonctionne sur de courtes distances et se transmet difficilement au travers des bâtiments; elle offre en outre des antennes à faisceau directionnel qui permettent de diriger les ondes radio dans la direction souhaitée. Avec la 5G, nous éliminons les ondes qui sont aujourd'hui envoyées dans toutes les directions. La question qui reste en suspens est de comprendre l'évolution du mix d'ondes avec l'augmentation des équipements. C'est précisément l'objet des recherches de l'OFEV.
Nous devons garder en tête qu'en Suisse, les fréquences attribuées actuellement pour la 5G se trouvent entre 800 MHz et 2,6 GHz. La dernière technologie de wifi que vous avez à la maison utilise 5 GHz. Si vous êtes vraiment inquiets, vous feriez mieux d'éviter la multiplication des wifis et d'éteindre les routeurs dans votre appartement.
Mettre un frein à une technologie qui doit nous permettre de créer un canton plus intelligent est un non-sens. La 5G nous aidera à gérer les transports, les flux, l'énergie. Ne votons pas sur des émotions, votons sur des faits ! Dites non à ces deux textes !
Une voix. Bravo.
M. Bertrand Buchs (PDC). Ces propositions de motions s'inscrivent dans la droite ligne du moratoire qui avait été voté. Pour ma part, j'aimerais renverser les arguments présentés. Actuellement, au niveau scientifique, Monsieur Deonna, on n'a rien de clair. Sur le plan médical, on n'a strictement rien de probant s'agissant de l'action des rayonnements non ionisants. Pourquoi ? Parce qu'ils n'existent pas encore ! Cette 5G est une monstre arnaque. Pourquoi ? On nous vend de la 5G, on vous vend des téléphones en vous disant qu'il y a de la 5G, mais il n'y en a pas encore. C'est de la 4G+. La 5G n'existe pas encore.
La 5G, ce sont des ondes millimétriques, et aucune étude n'a encore été réalisée sur les ondes millimétriques et leur action sur le corps humain. Alors le minimum, avant de se lancer dans une nouvelle technologie, c'est quand même de mener des enquêtes sérieuses pour déterminer s'il y a un risque ou pas. A l'heure actuelle, aucune étude sérieuse n'a été mise en place. Ce qui est très intéressant, c'est que le Conseil des Etats a demandé des recherches supplémentaires et a voté contre la 5G dernièrement, parce qu'il veut des études scientifiques, il a des doutes quant à la technologie de la 5G.
On n'est pas contre la 5G, on n'est pas contre la technologie, mais celle-ci est-elle nécessaire pour tout le monde ? La 5G est extrêmement utile, comme vient de le souligner M. Nicollier, pour gérer les flux de circulation, pour manipuler les robots chirurgicaux utilisés dans les salles d'opération des hôpitaux, pour contrôler en temps réel les appareils qui produisent des biens dans l'industrie. En revanche, est-elle indispensable pour le commun des mortels, pour que les téléphones fonctionnent encore plus vite, pour que chacun puisse y regarder des conneries - excusez-moi du terme - à longueur de journée et soit complètement scotché à son portable en dehors de toute réalité ? Non ! La 5G est nécessaire pour des choses extrêmement précises, mais pas pour tout le monde.
Maintenant, il est quand même aberrant de développer une technique qui n'arrive pas à traverser les murs des bâtiments ! Et vous utilisez votre 5G dans votre immeuble ! Il faut des zones extrêmement ciblées et des rayonnements très forts pour traverser les murs des bâtiments. Mais on marche sur la tête ! On est en train de proposer, pour vendre aux gens des appareils inutiles, une technique qu'on ne connaît pas et qui n'existe pas encore. Arrêtons-nous, réfléchissons et réalisons des études, puis on ira de l'avant, c'est tout. Nous allons voter ces propositions de motions. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole est à M. Patrick Saudan pour une minute et demie.
M. Patrick Saudan (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne comptais pas intervenir dans ce débat parce que, pour répondre à M. Nicollier, je ne suis pas du tout un expert. Mais je m'étonne tout de même des propos de M. Deonna, qui nous parle des effets dangereux de la 5G sur la santé. Je ne suis pas un expert, mais j'ai un petit peu consulté ce qui se trouve dans la littérature. En 2021, une revue australienne a compulsé assez exhaustivement les résultats de 107 études sur la 5G et n'a relevé aucun impact néfaste pour la santé. Alors c'est du court terme, ce ne sont que 31 études épidémiologiques, mais actuellement, il n'y a pas de preuves quant à des effets négatifs de la 5G sur la santé.
Certes, cette absence d'évidence n'est pas une évidence d'absence. Vous connaissez le principe de précaution, et il se peut que dans quelques années, on mette en lumière le fait que la 5G est délétère pour la santé humaine. Je rejoins les propos de mon préopinant, le Dr Buchs: à l'heure où on devrait tendre vers une certaine sobriété numérique afin de diminuer notre consommation de gaz à effets de serre induits par l'utilisation extensive de nos appareils, eh bien la 5G ne va pas dans la bonne direction. Je m'abstiendrai sur ces deux propositions de motions. Merci.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Je ne peux pas m'empêcher de pointer du doigt deux éléments des invites de la proposition de motion 2825. Le Conseil d'Etat est invité «à protester vivement auprès du Conseil fédéral». Je vois bien le gouvernement genevois s'exclamer vivement: «Je proteste !» devant le Palais fédéral, venir trépigner en s'écriant: «Je proteste, je proteste !» J'ai la scène en tête, j'attends le moment où le Conseil d'Etat nous annoncera qu'il va protester sur la Place fédérale, nous serons là pour observer la chose.
Ensuite, on invite le Conseil d'Etat «à agir auprès [...] du Conseil fédéral», donc on lui demande en quelque sorte d'être un magicien. Vous agissez sur le Conseil fédéral, vous avez un pouvoir magique sur le Conseil fédéral ! C'est peut-être la 5G, la 10G, la 15G ou même la 20G qui confère des pouvoirs magiques via des ondes très particulières. Je ne sais pas, j'imagine, mais au point où on en est, on arrive un peu à ce genre de situation.
Soyons sérieux, refusons ces deux propositions de motions, demandons aux conseillers nationaux et conseillères nationales d'effectuer leur travail sérieusement et arrêtons de faire perdre du temps à l'administration cantonale ainsi qu'à notre Grand Conseil. Merci.
M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, les débats auxquels nous venons d'assister sont certainement très intéressants, mais ils sont du niveau d'une discussion entre copains ou entre amis. Nous sommes ici dans un parlement, je vous le rappelle, il s'agit d'établir des actes parlementaires dont on peut espérer non pas avec certitude qu'ils aboutissent à un résultat, mais à tout le moins que leurs chances d'aboutissement soient proportionnellement adaptées à l'énergie déployée pour les établir et les adopter.
Ces deux propositions de motions ont uniquement pour but de revenir à la modification de la LCI qui a été annulée par la Chambre constitutionnelle - c'était le 15 avril 2021 -, laquelle a statué que l'intention que vous aviez exprimée dans cette modification de la LCI était contraire au droit fédéral. Je peux concevoir qu'une décision de justice ne plaise pas, mais il s'agit tout de même d'en prendre acte.
Depuis cette décision de justice, le Conseil fédéral a revu sa copie, et le 17 décembre 2021, il a modifié l'ORNI, c'est-à-dire l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant, et il l'a fait suite à une demande de la conférence des directeurs cantonaux dans ce domaine, lesquels avaient constaté, sur la base d'un avis de droit, qu'il y avait une faiblesse juridique et qu'il fallait trouver une solution.
Le Conseil d'Etat était lui-même intervenu au mois de novembre 2021, soit environ un mois avant la modification de l'ORNI, pour demander que tout cela soit éclairci. Le rapport explicatif concernant la révision de l'ORNI de l'Office fédéral de l'environnement stipule que «[...] l'application d'un facteur de correction aux antennes adaptatives déjà autorisées n'est pas considérée comme une modification d'une installation au sens de l'ORNI, mais que seul un formulaire actualisé doit être remis à l'autorité compétente pour des questions de traçabilité». La question était réglée. La justice et l'autorité fédérale compétente, unanimes, indiquaient l'une que le droit fédéral s'applique, l'autre que selon ce même droit fédéral, on ne peut pas aller dans le sens de la première proposition de motion.
Alors voilà qu'on dépose une deuxième proposition de motion le 7 février 2022, celle qui m'invite à aller trépigner sur la Place fédérale, pour reprendre les mots du rapporteur de minorité. La M 2825 demande de ne pas appliquer le droit fédéral, parce que ce droit fédéral ne plaît pas. Beaucoup de choses ne me plaisent pas, Mesdames et Messieurs, je peux vous en dresser la liste, mais à un moment donné, il existe une hiérarchie des normes, et le droit fédéral est supérieur au droit cantonal.
C'est bien gentil de me dire d'aller protester, mais si toutes les forces - excellentes, bien sûr - que les partis ici représentés ont à Berne n'arrivent pas à faire changer les choses, comment voulez-vous que le petit Conseil d'Etat genevois y parvienne en se rendant sur la Place fédérale et en criant, avec des calicots: «Nous ne sommes pas d'accord» ? Je plaisante à peine.
Soyons sérieux, Mesdames et Messieurs. Nous déposons de nombreux textes au niveau fédéral dont on sait l'issue qu'ils connaissent en majorité, si ce n'est dans leur ensemble. Essayons de conserver un peu de crédibilité et de travailler de manière sérieuse. Alors, par pitié, ai-je presque envie de dire, n'acceptez pas ces propositions de motions, pour que nous, petit Conseil d'Etat genevois, puissions sauver la face ! Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. A présent, Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote.
Mise aux voix, la proposition de motion 2774 est rejetée par 40 non contre 39 oui et 4 abstentions (vote nominal). (Exclamations et applaudissements à l'annonce du résultat.)
Mise aux voix, la proposition de motion 2825 est rejetée par 41 non contre 38 oui et 2 abstentions (vote nominal).
Le président. Mesdames et Messieurs, nous avons épuisé nos urgences et bien avancé dans l'ordre du jour, puisque nous avons traité plusieurs points. Nous pouvons donc être satisfaits de notre travail durant cette session ! Je vous souhaite une bonne rentrée chez vous, une belle suite de soirée et vous donne rendez-vous dans trois semaines. D'ici là, nous nous verrons pour les Assises transfrontalières à Saint-Julien-en-Genevois. Bon week-end et bonne nuit !
La séance est levée à 19h40.