Séance du
jeudi 23 juin 2022 à
14h
2e
législature -
5e
année -
2e
session -
11e
séance
PL 13091-A
Premier débat
Le président. Nous arrivons maintenant à notre débat sur les comptes 2021. Nous commençons par le projet de loi approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2021. Il s'agit du PL 13091-A. Le premier débat est en catégorie II, cinquante minutes. Je cède la parole à Mme la rapporteure de majorité Caroline Marti.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous en conviendrez, 2021, à l'instar de 2020, a été une année à nouveau en tous points exceptionnelle et imprévisible. Elle a été, vous le savez, très fortement frappée, marquée par la crise du covid et ses conséquences économiques et sociales. On se souvient des restrictions et des règles de protection sanitaire mises en place durant les cinq premiers mois de l'année, qui ont eu un impact évidemment très important sur la vie de l'Etat. Cette situation très particulière a bien entendu demandé de grands efforts et une grande capacité de réactivité et d'adaptation à l'ensemble du personnel du grand et du petit Etat pour assurer la délivrance des prestations avec la célérité requise, d'autant plus importante au vu du contexte, et ce dans une situation difficile, qu'on pourrait même qualifier de chaotique dans certains secteurs, services et institutions, avec un manque de personnel et d'autres difficultés directement liées à cette crise sanitaire. Les différents services de l'Etat ont également dû imaginer, créer, développer toute une série de nouvelles prestations de manière à répondre aux nouveaux besoins qui ont émergé dans le cadre de cette crise, des besoins en perpétuelle évolution en fonction du contexte.
Cette année a été également exceptionnelle d'un point de vue comptable, puisque, si on regarde les chiffres, on constate que les plus de 800 millions de déficit sur l'année 2021 prévus par le budget se sont transformés en un excédent de quelque 50 millions dans le cadre des comptes. Alors si, bien sûr, tout le monde reconnaît volontiers qu'il est particulièrement difficile de faire des évaluations précises dans un contexte aussi évolutif et incertain, cet écart entre les recettes estimées dans le budget et le résultat dans les comptes laisse malgré tout un peu songeur et en tout cas illustre le fait qu'on ne peut pas se fier de façon absolue aux chiffres annoncés dans le cadre du budget et qu'ils doivent laisser une certaine marge d'interprétation.
Bien entendu, la majorité que je représente est composée de partis politiques dont les positions sont assez diverses, voire parfois divergentes dans leurs interprétations de ce qu'il faut faire face à cette situation financière de l'Etat de Genève, qui, d'un point de vue comptable, est bonne, en 2021 - mais je vais laisser les différents groupes s'exprimer sur cette question: malgré mon passé très ancien de gymnaste, je vais éviter de faire le grand écart aujourd'hui ! Mais peut-être que ce qui rassemble les partis qui composent cette majorité, c'est la reconnaissance du travail accompli, de l'abnégation des collaboratrices et des collaborateurs du grand et du petit Etat, pour que notre Etat puisse tenir le choc et continuer à fonctionner; cela est vraiment à souligner.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, merci à la rapporteure de majorité d'avoir rappelé les deux événements majeurs qui ont trait à la fois aux comptes et à la gestion de ceux-ci. Premièrement, la crise du covid: il est juste de rappeler que 2021 a encore connu les soubresauts de cette crise non seulement sanitaire, mais également sociale et économique. Dans ce sens-là, il y avait une partie de gestion dite extraordinaire, qu'il s'agira tout de même de découpler de la gestion ordinaire - j'y reviendrai tout à l'heure.
L'autre élément, c'est, puisque la rapporteure de majorité en parlait, le grand écart. Pour ma part, je n'ai rien d'un gymnaste, mais j'arrive à visualiser en tout cas budgétairement ce que cela signifie. Il s'agit de rappeler qu'effectivement, le résultat s'écarte de ce qui était prévu au budget 2021 de 896 millions: l'exercice 2021 se clôt avec un excédent de 49 millions, alors qu'un déficit de 847 millions était attendu dans le budget 2021. On peut évidemment s'en étonner et critiquer le Conseil d'Etat - et j'aurai plein de critiques tout à l'heure -, mais sur ce point-là, on ne peut pas vraiment le critiquer, puisque c'est une question de temporalité: nous avons voté ce budget en décembre 2020, c'est-à-dire au pic de la deuxième... Comment appelle-t-on ça, déjà ? (Commentaires.) La deuxième vague ! Merci ! ...vague du covid - qui était la plus violente par ailleurs, du point de vue tant sanitaire qu'économique et social -, et il est clair qu'à ce moment-là, il y a eu une forme d'union sacrée entre les partis de ce parlement pour dire: «Ok, il s'agit maintenant de ne pas discuter et de voter les moyens pour sortir de cette crise» - sans aucune visibilité sur celle-ci, précisément !
Et puis, lorsque arrivent les comptes en mars 2022, on voit que les aides qui ont été votées à juste titre par ce parlement n'ont pas toutes été utilisées: les entreprises et les personnes concernées s'en sont mieux sorties que ce qui était attendu, et c'est tant mieux; de plus, les entreprises qui participent précisément le plus aux recettes fiscales de ce canton n'ont été en fait que peu touchées par cette crise - et c'est aussi tant mieux ! - et ont eu en outre des charges moindres. On peut penser aux banques, qui n'ont pas payé les voyages de certains de leurs gestionnaires à l'autre bout de la planète et qui ont organisé leurs réunions sur Zoom, ce qui évidemment a participé à la réalisation d'un certain nombre d'économies - je prends cet exemple, il peut y en avoir d'autres. De ce fait, on obtient effectivement des résultats plus importants que prévu, et c'est ce qui explique ce grand écart.
L'autre raison est fiscale. Elle a évidemment trait à une réforme majeure, votée par la population en 2019, la RFFA, la réforme de l'imposition des entreprises, qui a permis à celles-ci de dégager sur leurs recettes des montants supplémentaires qui ont pu être investis et ont donné la possibilité à ces entreprises d'engager du personnel supplémentaire, personnel mieux rétribué, et du coup plus gros contributeur à la fiscalité et donc aux recettes fiscales de ce canton. S'agissant de la RFFA, on l'a vu - j'y reviendrai tout à l'heure -, ce parlement avait estimé qu'en huit ans, elle devait être absorbée. Le Conseil d'Etat, à la base, avait prévu cela en cinq ans. Finalement, cela s'est fait en deux ans - je reviendrai sur les chiffres tout à l'heure. C'est cette réalité - n'en déplaise à celui qui parlera juste après moi - qui fait que nous avons une situation de grand écart, et on ne peut pas critiquer sur ce point le Conseil d'Etat, mais plutôt se féliciter de la bonne résilience de notre économie, qui permet effectivement à notre canton d'avoir les moyens de continuer à offrir des prestations de qualité à notre population.
Les hausses fiscales, on l'a dit, sont de 1 milliard - 1 milliard ! - par rapport à ce qui était prévu au budget, et, même si on regarde par rapport aux comptes... Le Conseil d'Etat nous rappelle toujours qu'on est censé faire, dans le cadre de l'étude des comptes, une comparaison avec le budget; c'est juste, en ce sens que nous, parlement, décidons de certaines lignes budgétaires et donc d'enveloppes de dépenses maximales que l'on autorise au Conseil d'Etat, politique publique par politique publique, mais il est juste aussi de comparer avec les comptes, et d'ailleurs pas seulement ceux de l'année précédente, mais sur une plus grande distance temporelle, de manière à voir l'évolution des recettes et des charges et à se rendre compte peut-être des domaines où il y a des efforts à faire ou, au contraire, des boulons à insérer. Là-dessus, beaucoup de choses doivent être dites.
Vous verrez dans mon rapport, à la page 113, que cet excédent de 49 millions, en réalité, si on sortait en les analysant les éléments dits extraordinaires - la crise sanitaire, mais aussi des recettes extraordinaires, par exemple les 133 millions liés à l'impôt sur le bénéfice sur les gains immobiliers, qui étaient très ponctuelles -, n'aurait pas été de 49 millions: il aurait été de 331 millions ! 331 millions qui auraient été à la disposition de l'Etat, mais surtout 331 millions qui sont en fait des impôts prélevés en trop auprès des contribuables, tant auprès des personnes morales que des personnes physiques. Il devient urgent de rendre cet argent au contribuable. Je rappelle le projet de loi 12247 déposé par le groupe PLR en 2018 déjà, qui prévoit une baisse de 5% des impôts pour les contribuables - personnes physiques -, ce pour toutes et tous, sans privilèges.
La problématique de notre canton, on la connaît, et là, j'en viens aux critiques: si on prend la gestion extraordinaire, je répète, moi je n'ai pas grand-chose à dire, on ne peut que remercier l'administration et le Conseil d'Etat des efforts qui ont été faits, avec des éléments justement extraordinaires, qui changeaient toutes les deux semaines, si ce n'est toutes les semaines. Mais il s'agit ici de regarder la gestion ordinaire. Or on constate qu'une fois de plus, l'Etat a des moyens surdimensionnés en comparaison de la plupart des autres cantons - ce n'est pas moi qui le dis, c'est le fameux rapport BAK, qui, je le rappelle, a été commandité par le Conseil d'Etat et qui a été extrêmement vite mis sous le tapis, parce qu'apparemment, il avait tendance à déranger certaines personnes. Pourtant, il est extrêmement éloquent.
J'aimerais rappeler un certain nombre d'éléments figurant dans ce rapport BAK. A la page 5: Genève a une fiscalité plus élevée que la très grande majorité des autres cantons. «La combinaison du potentiel de ressources et d'exploitation du potentiel fiscal donne les recettes fiscales par tête. Dans le canton de Genève, celles-ci sont supérieures d'environ 90% à la moyenne des cantons.» Cela est d'ailleurs confirmé par l'administration fédérale des finances, qui publie chaque année l'exploitation du potentiel fiscal de chaque canton - vous trouverez le graphique à la page 117 de mon rapport, qui rappelle que Genève exploite 34,2% de son potentiel fiscal, la moyenne suisse étant de 24,6%, et si vous regardez le graphique, entre nous et le deuxième, il y a quand même un certain écart. Il y a donc vraiment matière à faire quelque chose. A la page 116 de mon rapport, vous verrez également des chiffres éloquents: entre 1998 et 2021, la population a augmenté de 27%; les recettes fiscales ont augmenté de 121% - 121% ! -, là où le total des charges de l'Etat a augmenté, lui, de 82%. Dans la période 2011-2021, c'est 10% d'augmentation de la population, 40% d'augmentation des recettes fiscales - quatre fois plus ! - et une augmentation du total des charges de l'Etat de 29%, soit trois fois plus que l'évolution de la population.
Alors j'entends ce que M. Burgermeister va évidemment dire tout à l'heure: il va nous dire que Genève est différent, que Genève a davantage de moyens, qu'on ne peut pas juste regarder l'évolution de la population. Je l'entends, mais on n'en est même pas à dire que les charges doivent croître dans la même proportion que la population, on en est à trois fois l'augmentation de la population ! Aucun autre canton ne connaît cela, il est largement temps de se rendre compte qu'ici, les charges explosent chaque année, que ceux qui pensent encore qu'il y a un problème d'austérité doivent reprendre leur dictionnaire et réaliser qu'on est très loin, très loin, mais vraiment très loin de cela.
Je ne vais pas faire beaucoup plus long. J'aimerais rappeler encore une fois que cette situation n'est en fait pas seulement de la faute de ce Conseil d'Etat, ce n'est pas un problème de gestion de la seule année 2021: c'est un problème de gestion de l'année 2021, 2020, 2019, 2018, 2017, 2016, 2015, j'en passe et des meilleures - ou des moins bonnes - en arrière ! Mesdames et Messieurs, il est grand temps que ce Conseil d'Etat, enfin, ouvre les yeux, et ce parlement avec lui: oui, nos recettes fiscales augmentent grâce à notre économie et grâce aux dispositions prises par la majorité responsable et raisonnable de droite de ce parlement les années précédentes, qui permettent d'avoir ici des contribuables - personnes morales et physiques - en nombre et en qualité, de remplir les caisses de l'Etat et donc d'offrir des prestations de qualité à notre population, notamment aux plus démunis; oui, il faut continuer avec ce trend-là et évidemment ne pas faire l'exact contraire. La RFFA nous l'a démontré: huit ans prévus pour l'absorber; en deux ans, cela a été réglé ! En deux ans, cela a été réglé ! Et aujourd'hui, ces entreprises remplissent les caisses de l'Etat. Il y a certainement une urgence climatique, il y a aussi, Mesdames et Messieurs, une urgence budgétaire et financière, et c'est pour cette raison, et parce que le Conseil d'Etat ne le voit pas et parce que la majorité de ce parlement refuse de le voir, que nous refusons le budget... (Commentaires.) Pardon ! ...que nous refusons la gestion des comptes 2021.
Une voix. Tu anticipes un peu !
M. Yvan Zweifel. J'anticipe effectivement ce qu'il va se passer en décembre ! (Rires. Commentaires.) Mais je suis un éternel positif et je suis certain que le Conseil d'Etat, ayant écouté mon message et celui de la minorité responsable et raisonnable de ce parlement, nous proposera un budget meilleur que celui que j'imagine dans mes pires cauchemars. Je vous remercie de refuser l'entrée en matière sur ces comptes 2021.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. En préambule, j'aimerais répondre à ce qui a été dit tout à l'heure sur la difficulté d'estimer les rentrées fiscales du canton et la différence que l'on constate entre les budgets et les comptes, qui est de plus de 800 millions. Evidemment, cette différence a des répercussions politiques au moment où l'on élabore les budgets, puisque c'est ce déficit qui est pris comme prétexte pour, rappelez-vous, ne pas étendre les prestations malgré les besoins évidents de la population et ne pas payer les salaires à la fonction publique, puisque en 2021, l'annuité n'a pas été versée. Au regard des comptes 2021, ce choix-là, qui a été fait par l'ensemble du parlement - à l'exception d'Ensemble à Gauche - soutenu par le Conseil d'Etat, est parfaitement injustifiable.
J'aimerais dire à M. Zweifel que, naturellement, il est vrai que les estimations étaient difficiles à effectuer en automne 2020 pour l'année 2021. Pensez, tout de même: 1 milliard de différence en revenus fiscaux entre ce qui a été prévu et ce qu'on enregistre, ce n'est pas rien ! Prenons les années précédentes: en 2020, l'augmentation des revenus a été de 445 millions supplémentaires au moment des comptes par rapport au budget, alors même que le budget avait été établi avant la crise covid ! C'est-à-dire que malgré la crise covid, l'Etat a enregistré 445 millions de revenus supplémentaires par rapport à ce qui avait été prévu. En 2019, au moment des comptes, les revenus ne dépassaient que de 282 millions ce qui avait été prévu au budget.
Voyez donc, Mesdames et Messieurs, qu'il est difficile de dire que 2021 est simplement une année extraordinaire. Nous constatons une tendance lourde à un écart grandissant entre les chiffres annoncés par le Conseil d'Etat au moment du budget et ceux que l'on constate au moment des comptes, et cette différence-là a des répercussions politiques pour ce parlement, mais aussi des répercussions pour les salariés de la fonction publique, et au-delà, pour l'ensemble de la population. Il est donc urgent que le Conseil d'Etat redresse la barre et puisse nous garantir des chiffres un minimum fiables - un minimum, parce que je comprends bien que nous ne sommes pas à quelques dizaines de millions près, mais un milliard, quand même, vous en conviendrez, ce n'est pas très sérieux.
Pour ce qui est des comptes 2021 eux-mêmes, ce que l'on constate, c'est d'abord qu'ils nous montrent de manière plus claire que jamais l'ampleur des inégalités dans ce canton. Il faut rappeler que 2021 a été, pour une grande partie de la population, une année difficile, marquée par la crise, avec une stagnation voire une baisse des revenus. C'est vrai notamment pour les salariés qui étaient au régime des RHT, mais c'est le cas aussi de nombreux indépendants et de microentreprises, qui ont été celles et ceux qui ont le plus durement souffert de la crise et qui ont beaucoup moins perçu d'aides que les grosses entreprises de ce canton.
En revanche, 2021 a été une année faste, encore une fois, pour les grosses entreprises et les plus riches de ce canton, et on voit là encore la différence s'accroître, et ce d'autant plus rapidement avec la crise du covid. On a vu que les grosses entreprises ont emmagasiné des bénéfices records en 2021. C'est une croissance, pour ce qui est de l'horlogerie, de plus de 65% ! Mais c'est vrai aussi pour le secteur de la finance, du commerce international, qui emmagasinent des chiffres absolument colossaux et qui, de plus, ont bénéficié de la baisse massive de l'imposition sur le bénéfice des entreprises, en tout cas pour ce qui est de l'horlogerie et de la finance - dans le commerce international, il s'agissait d'entreprises à statut, pas forcément toutes, mais beaucoup, elles ont donc vu leur taux d'imposition augmenter, marginalement, certes, mais augmenter quelque peu tout de même. (Remarque.)
On le voit, du point de vue de l'économie aussi, il y a une différence qui s'accroît entre grandes et petites entreprises, et c'est vrai aussi d'ailleurs dans le commerce de détail, vous le savez, qui affiche des chiffres tout à fait bons, voire très bons, en 2021. Pourtant, rappelez-vous qu'en 2021, le Conseil d'Etat avait décidé, appuyé par une majorité de ce parlement, de passer en force pour une ouverture prolongée des magasins le samedi soir, le dimanche, au détriment des salariés et en prétextant la nécessité d'un bol d'air pour un secteur qui, visiblement, n'en avait pas particulièrement besoin. Heureusement, sur ce point-là, il faut le rappeler, le gouvernement, comme la majorité de ce parlement, a été sèchement désavoué par la population.
Alors maintenant, quand M. Zweifel déclare - comme a essayé de nous le faire croire Mme Fontanet d'ailleurs, au moment de la présentation des comptes - que si les rentrées fiscales sont si bonnes en matière d'imposition des personnes morales, c'est grâce à la RFFA, je dois vous dire que c'est grotesque ! Il est grotesque de prétendre qu'entre 2020 et 2021, c'est-à-dire au plus fort de la crise, au moment même où les infrastructures pesaient particulièrement lourd, on peut le comprendre, sur le choix des entreprises, à ce moment-là, précisément, ces entreprises auraient délocalisé si la RFFA n'était pas entrée en vigueur. M. Zweifel essaie donc de nous convaincre que Rolex, par exemple, serait parti à l'étranger s'il n'y avait pas eu la RFFA durant l'année 2021. (Remarque.) Evidemment, tout cela est grotesque ! La réalité, c'est que la RFFA a privé l'Etat de Genève de plusieurs centaines de millions de rentrées fiscales.
Une voix. C'est sidérant !
M. Jean Burgermeister. D'un autre côté... (Commentaires.) Je vois le Conseil d'Etat qui rigole, ce n'est pas son rôle, mais ce n'est pas grave...
Une voix. Il a raison !
M. Jean Burgermeister. ...il aura l'occasion de me répondre du mieux qu'il peut tout à l'heure. D'un autre côté, on a vu un Conseil d'Etat et un parlement qui n'ont cessé d'attaquer les revenus de la population ! (Remarque.) Je l'ai déjà dit, c'était d'abord en amputant les salaires de la fonction publique de l'annuité qui lui était légalement due en 2021. Une décision soutenue de l'UDC jusqu'au parti socialiste, combattue uniquement par Ensemble à Gauche, mais le Conseil d'Etat souhaitait encore aller bien plus loin: rappelez-vous, Mesdames et Messieurs, en automne 2020, au plus fort de la crise sanitaire, lorsque la fonction publique, à commencer par le personnel de l'hôpital, bataillait durement au quotidien contre la pandémie, dans des conditions très difficiles, le Conseil d'Etat proposait de baisser de 1% les salaires de l'ensemble de la fonction publique et il parlait alors de «privilégiés» ! Pourquoi des privilégiés ? Que le Conseil d'Etat reprochait-il à la fonction publique ? Il lui reprochait d'avoir touché la totalité de son salaire !
Voilà où nous en sommes, Mesdames et Messieurs: un gouvernement qui reproche à la fonction publique de pouvoir bénéficier du salaire qui lui est dû ! Sur ce point-là d'ailleurs, sur la nécessité de préserver les salaires de la fonction publique et ceux de la population, force est de constater que nous n'avons pas vu d'inflexion sensible au moment du changement de majorité du Conseil d'Etat; avec le passage à une majorité PS-Verts, le Conseil d'Etat a maintenu le cap, à l'encontre des besoins d'une grande majorité de la population et dans les intérêts des plus riches, puisque, si les revenus sur les personnes physiques ont une tendance à la stagnation, voire à la baisse en 2021, il y a une exception à cela: ce sont les impôts sur la fortune, qui continuent leur très nette hausse. Et qu'est-ce que cela nous dit ? Cela signifie que les fortunes continuent d'augmenter année après année. On continue à observer ce processus ahurissant de concentration des richesses dans ce canton, et il faut rappeler qu'avant même la crise du covid, le canton de Genève était le plus inégalitaire de Suisse, où près de la moitié de la richesse du canton - c'étaient, de tête, les chiffres de 2017 - était détenue par des fortunes de 10 millions ou plus.
Du côté d'Ensemble à Gauche, nous regrettons cette indifférence partagée, quelle que soit la majorité du Conseil d'Etat, pour ce qui est de garantir les revenus de la population, de renforcer le rôle essentiel de redistribution des richesses, une indifférence que l'on constate d'ailleurs aussi dans ce parlement: aujourd'hui, si Mme Marti présente le rapport de majorité en faveur de la gestion du Conseil d'Etat et M. Zweifel un rapport de minorité contre la gestion de ce Conseil d'Etat, c'est tout simplement parce que la majorité a changé, mais pas la politique ! Et si M. Maudet ne s'était pas brûlé les ailes à Abou Dhabi, il y a fort à parier qu'aujourd'hui, les rôles seraient inversés. On voit donc que dans ce parlement, les considérations au moment des comptes dépendent plus d'intérêts partisans que de véritables principes politiques. Nous le regrettons naturellement et nous continuerons, en ce qui nous concerne, la bataille pour garantir les revenus à la population, et surtout, n'en déplaise au PLR et au Conseil d'Etat, pour taxer plus fortement les plus riches qui se portent très très bien, taxer davantage les plus riches afin de financer les services publics et les prestations à la population. Mesdames et Messieurs, voilà pourquoi le groupe Ensemble à Gauche vous recommande de refuser ce rapport.
M. Eric Leyvraz (UDC). L'Etat de Genève semble béni des dieux. Alors que l'on s'attendait à un déficit record des comptes, il termine dans les chiffres noirs l'année 2021, mais il doit cela à la Confédération, qui couvre beaucoup de frais de la covid, à la baisse de la péréquation et à la dotation généreuse de la Banque nationale, et aussi bien sûr à la magnifique résilience des entreprises genevoises, avec leur incroyable capacité d'adaptation. Si Genève obtient plus d'un milliard supplémentaire de rentrées fiscales en 2021, c'est la Confédération qui essuie les plâtres, avec un manque à gagner de 12 milliards. Il est évident que des comparaisons avec les comptes des années précédentes sont hasardeuses - espérons que cette pandémie n'aura pas l'occasion de démentir ce propos !
Alors que des efforts colossaux ont permis de faire perdurer le tissu économique, la communauté genevoise verrait d'un très bon oeil un Etat également prêt à se serrer la ceinture. Mais aucun progrès n'améliore cette situation. La fonction publique continue son petit train-train comme si de rien n'était. Cela fait longtemps que les promesses du Conseil d'Etat sur les réformes essentielles au respect des deniers publics restent lettre morte, de même que l'assurance d'une nouvelle grille salariale pour remplacer l'actuelle, obsolète. Ah, que de fois M. Dal Busco est venu devant la commission des finances, lors de la législature précédente, nous assurant que SCORE était à bout touchant ! Et puis: plus personne, plus rien ! Aucun effort de réduction des dépenses. Mme Torracinta vient pleurer devant la commission des finances pour des demandes de crédits supplémentaires de quelques centaines de milliers de francs, alors que son département a un budget de 2,2 milliards ! Ne me dites pas qu'une économie, même de 0,5%, est impossible ! Ici, 0,5%, cela représente 11 millions. Toujours une administration pléthorique qui nous coûte par tête 35% de plus qu'à Zurich; toujours une dette énorme dont les taux d'intérêt vont reprendre l'ascenseur.
En parlant de cette dette, le Conseil d'Etat n'est-il pas fatigué de raconter des fadaises à la population en affirmant qu'elle n'est que de 12,4 milliards - chiffre déjà colossal pour une communauté d'à peine 500 000 habitants -, alors qu'il met en pied de bilan l'argent que l'on doit à la caisse de pension de l'Etat, soit 6 milliards ? Standard & Poor's, qui évalue les performances de l'Etat, ne s'y trompe pas et évalue la dette du canton à plus de 18 milliards. L'UDC dénonce ce manque de transparence, pour ne pas dire ce mensonge qui perdure depuis des années. C'est l'usure qui gagne le député qui parle, fatigué de répéter dans le vide des évidences et de devoir continuer avec ce Conseil d'Etat qui tire à hue et à dia sans concertation - voir l'affaire Firmenich. Vivement les élections pour remettre un peu d'ordre ! Enfin... L'espoir rend les fous joyeux !
Revenons à nos comptes. L'UDC souligne la qualité de ces derniers, l'excellent travail de clarté du département des finances et la mise à disposition pour une députation de milice d'un outil compréhensible. Pour résumer la situation, l'UDC reconnaît la justesse des comptes, acceptera les PL 13092 et 13093 sur les états financiers individuels et consolidés de l'Etat de Genève, mais refusera ce projet de loi 13091, constatant qu'avec la gestion du Conseil d'Etat, on est loin du compte ! (Commentaires.)
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, il est important de revenir un petit peu en arrière, en se souvenant comment a été élaboré le budget 2021. Celui-ci a été établi, par définition, en 2020 et on se rappelle que 2020 était une année dramatique pour notre canton, pour notre pays, pour la planète entière, avec cette crise sanitaire, sociale et économique, qui a donné des frissons dans le dos à tous les gouvernements à travers le monde. Nous avions de grosses inquiétudes s'agissant de la santé, de notre économie, de nos entreprises, de l'emploi bien sûr, des salariés et des indépendants, ainsi que des conséquences sociales et des recettes fiscales. On a élaboré, autant que faire se peut, un budget 2021, avec un déficit d'environ 850 millions; il y a eu, effectivement, une espèce de compromis général au sein de ce Grand Conseil pour voter ce budget très particulier. En 2021, cette situation de crise sanitaire a perduré avec le covid et avec l'augmentation des coûts, notamment au sein des HUG, dans toute la politique de la santé, pour la coordination - il faut se souvenir de cela aussi -, avec l'arrivée des vaccins, des tests, les soins à domicile, et au sein du social - j'en ai parlé -, des TPG, qui ont perdu beaucoup de recettes, pour l'aide aux entreprises, l'aide aux salariés, etc.
Aujourd'hui, pour ce qui est du rapport de gestion - je vais peut-être commencer par là -, au parti socialiste, on n'a qu'un mot à la bouche, c'est «remerciements»: remerciements à toute la fonction publique, à toutes les collaboratrices et collaborateurs dans les différents secteurs que j'ai nommés et bien d'autres, qui ont travaillé en 2020, en 2021, pour faire en sorte qu'on puisse faire face à cette crise sanitaire, sociale et économique. Et, comme on aime bien dire au sein du groupe socialiste, on a vu à quel point il était important de remettre l'Etat au milieu du village, à quel point il était important d'avoir un service public fort pour répondre aux besoins de la population genevoise.
Pour ce qui est des comptes 2021, on l'a dit, on a un excédent de 49 millions, on a mis quelques petites noisettes supplémentaires de côté s'agissant de la CPEG et quelques noisettes de côté dans la réserve conjoncturelle, ce qui diminue un peu l'excédent, effectivement, mais on a, et c'est une bonne chose en soi, 1 milliard de recettes fiscales supplémentaires. Cela a été dit, elles proviennent en grande partie des personnes morales, des entreprises, dans les domaines qui ont été cités, comme l'horlogerie, la finance ou le commerce international, notamment le trading de matières premières. On constate aussi une légère diminution de l'imposition des personnes physiques, mais pas en ce qui concerne la fortune, l'imposition de celle-ci ayant augmenté - ce qui montre que les gens qui détiennent de la fortune restent à Genève et que leurs avoirs continuent d'augmenter. Le revers de la médaille, c'est toujours la même chose: les besoins sociaux qui augmentent, les primes d'assurance-maladie que les gens ont de plus en plus de peine à payer, les difficultés à se loger, à payer le loyer, l'augmentation constante des coûts des HUG et la problématique des maladies psychiques, de plus en plus de personnes, notamment notre jeunesse, se sentant mal et ayant besoin d'un suivi psychologique ou psychiatrique.
Pour le parti socialiste, ces comptes 2021 ne représentent donc pas une réjouissance, mais plutôt un «ouf» de soulagement. C'est un gros «ouf» de soulagement, mais, malheureusement, il n'est que passager, parce que ce qu'on voit arriver aujourd'hui, ou ce qu'on traite déjà au Grand Conseil, ce sont des attaques de la droite sur les recettes fiscales: c'est la suppression de la taxe professionnelle - là, cela concerne plutôt le niveau communal -, qui, certes, a été lancée par les bébés PLR et PDC, mais on sait que papa et maman PLR et PDC qui siègent ici soutiennent cette initiative pour la suppression; c'est la réforme de la fiscalité du patrimoine immobilier; c'est la diminution de l'imposition sur la fortune. Cela va faire perdre 100 millions à l'Etat, et tout cet argent, nous en aurons besoin pour le budget 2023 que nous allons commencer à négocier. Les besoins sont énormes. Je n'ai plus le temps d'en parler, mais nous espérons qu'au vu des comptes 2021, nous arriverons à nous mettre autour de la table, à trouver une solution pragmatique pour faire en sorte d'augmenter les ressources dont l'Etat a besoin pour pouvoir fonctionner en 2023, pour répondre aux besoins de la population qui croît et renforcer encore notre service public. Merci.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit ici du rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2021. Je ne voudrais pas répéter ce qui a déjà été indiqué, mais rappelez-vous dans quelle situation nous nous trouvions en décembre 2020: en pleine crise du covid, au coeur d'une période d'incertitude, face à des défis immenses. C'est la raison pour laquelle les partis se sont unis pour accepter un budget présentant un déficit abyssal de près d'un milliard - tout juste pas. Il a été validé parce que nous vivions des temps incertains.
Aujourd'hui, le résultat est totalement différent, et fort heureusement, parce que sans ce qui a généré ces recettes exceptionnelles, nous serions maintenant priés de voter un rapport de gestion se soldant par un déficit de près d'un milliard, il faut le dire. Puisqu'on parle de la gestion du Conseil d'Etat, s'agissant des dépenses et par rapport au budget hors covid, à 0,3%, le budget a été respecté dans son intégralité, ce qui constitue un exploit dans le contexte que nous avons connu.
Mon préopinant a parlé de noisettes; je voudrais citer quelques chiffres qui sont un peu plus gros que des noisettes. En effet, nous nous retrouvons avec un bénéfice de 49 millions, donc l'écart est d'un milliard. Un milliard, c'est mille millions, c'est beaucoup. Et tant mieux, tant mieux, parce que les estimations des entreprises à l'époque, et cela est inhérent au système de fonctionnement du budget de l'Etat, portaient sur une période antérieure à septembre 2020, avaient donc été réalisées en pleine incertitude, avec un avenir bouché; on peut imaginer que ces prévisions ont été faites à la baisse, et fort heureusement, elles ne se sont pas avérées.
Maintenant, la pandémie a tout de même coûté 793 millions dans le canton de Genève, 446 millions ayant été payés par la Confédération, 346 par le canton. Ce sont des frais colossaux, et il ne s'agit pas de les contester, ils correspondent à la réalité de ce qui nous est arrivé.
Au final, la dette financière a diminué de 427 millions - ce qui représente pas mal de noisettes -, mais reste malgré tout perchée à 12,4 milliards, c'est très élevé. Quant aux investissements de 534 millions, ils ont été autofinancés, un tour de force qui a permis d'augmenter la réserve conjoncturelle de 49 millions de francs.
Je ne veux pas revenir sur la RFFA, la recapitalisation de la CPEG et le contreprojet, vous avez déjà entendu les deux rapporteurs de minorité s'exprimer à ce sujet, ceux-ci étant totalement opposés dans leur analyse; bien évidemment, la mienne se dirige plutôt dans la direction du député PLR, vous ne serez pas trop surpris.
Quand on voit le résultat des comptes, eh bien on ne peut que se montrer enthousiaste, cela vient d'être souligné, par rapport à ces chiffres, parce qu'ils sont bons, ils sont positifs. Dès lors, nous remercions le Conseil d'Etat pour le travail accompli en 2021 ainsi que tous les collaborateurs de l'Etat, tous ceux qui se sont engagés. Nous serons plus critiques sur les budgets et comptes à venir, mais en ce qui concerne 2021, nous avions tout de même accepté un déficit de 949 millions, il ne faut pas l'oublier.
Bon, le résultat est positif, l'écart d'un milliard provient de la résilience de l'économie genevoise, et il faut le rappeler, il faut remercier celles et ceux qui ont contribué à ces recettes fiscales et tout mettre en oeuvre pour qu'elles perdurent. Cela nous permettra de continuer à aider la population genevoise, qui a subi et subit encore les effets de la crise. A défaut, eh bien il n'y aura pas d'argent et la dette se creusera davantage encore.
Pour nous, le petit coup de canif, c'est que Genève demeure le canton de Suisse avec les charges de fonctionnement les plus importantes de même que celui qui exploite le plus son potentiel fiscal. Ainsi, notre soutien aux comptes 2021 ne remet nullement en question la nécessité d'entreprendre de sérieuses réformes structurelles; nous formulerons nos commentaires à ce sujet dans le cadre de l'exercice 2022 et du budget 2023. Genève est un canton riche, mais cette richesse doit être utilisée à bon escient, et si les choses avaient été entreprises dans ce sens, je ne sais pas si nous aurions prélevé trop d'impôts, mais nous aurions en tout cas réalisé un bénéfice qui nous aurait permis de réduire la dette et d'accroître notre capacité d'investissement, laquelle est importante.
Oui, je soutiens que le moment est venu de penser à Monsieur et Madame Tout-le-Monde, d'envisager de réduire la pression fiscale sur les personnes physiques. On l'avait déjà signalé précédemment, mais cette fois, l'inflation est là, les coûts explosent pour tout un chacun et il faudra bien trouver le moyen de redonner du pouvoir d'achat aux ménages, un peu de flexibilité dans l'élaboration de leur budget. Nous partageons l'idée qu'il est temps de soulever la question de réductions d'impôts pour les personnes physiques.
Cela étant dit, le parti démocrate-chrétien - Le Centre adoptera ce projet de loi et adresse ses remerciements au Conseil d'Etat pour les activités déployées pendant cette année qu'on va qualifier d'exceptionnelle et de particulièrement difficile. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Patrick Saudan pour deux minutes et demie.
M. Patrick Saudan. C'est une erreur, Monsieur le président.
Le président. Bien, alors elle revient à Mme Françoise Sapin.
Mme Françoise Sapin (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, lors du vote du budget 2021, nous éprouvions les plus grandes craintes, nous pensions connaître d'importantes difficultés financières durant cette année vu la conjoncture économique et surtout la crise que nous vivions à l'époque. Au moment des comptes, nous sommes extrêmement surpris, puisque ceux-ci sont excédentaires, il y a même une réduction de l'endettement. Face à cette réalité, le groupe MCG, comme tout être sensé, ne peut que se féliciter de la bonne gestion générale de l'Etat. Voilà pourquoi nous accepterons le rapport de gestion ainsi que les états financiers.
Toutefois, nous demeurons très mécontents quant à la manière dont certaines politiques publiques ont été menées et nous refuserons plusieurs d'entre elles - nous vous expliquerons pourquoi le moment venu.
Soyons un peu plus précis: 896 millions. 896 millions, c'est le chiffre différentiel entre le budget et le résultat des comptes, le grand écart, comme l'a relevé M. Zweifel - je ne pensais pas me faire piquer ce chiffre, mais on reconnaît bien là le défaut des experts-comptables, n'est-ce pas, Yvan ? En effet, le budget de l'Etat prévoyait un déficit de 847 millions, et nous nous en sortons avec un résultat positif de 49 millions. Cela est d'autant plus réjouissant que nous avons absorbé 239 millions pour la crise sanitaire, dont le coût total s'est élevé à 793 millions. Quant aux rentrées fiscales, elles sont supérieures de 999 millions, c'est près d'un milliard de plus. Merci à la RFFA d'une part et merci d'autre part aux gains immobiliers extraordinaires réalisés durant cette année.
Bien entendu, le Mouvement Citoyens Genevois se réjouit de ce résultat et est très fier d'avoir soutenu la RFFA de manière déterminée et déterminante, cette réforme était vraiment indispensable à la pérennité de notre tissu économique. Nous nous félicitons également de la prise de conscience de la BNS, qui s'est résolue à soutenir un peu plus les économies cantonales et a effectué un versement supplémentaire de 117 millions.
L'endettement, qui se monte à 12,4 milliards, cela a été noté, est en recul de 427 millions. Il est heureux qu'il reste inférieur au premier seuil du mécanisme de frein à l'endettement, qui est de 13,3 milliards. Cependant, la dette est toujours trop importante pour le canton et prétérite les générations futures, d'autant que ces 12,4 milliards ne tiennent pas compte de la totalité des engagements du canton, notamment de ceux de la CPEG; en fait, elle serait plutôt de l'ordre de 20 milliards. Pour toutes les raisons invoquées ci-dessus, le MCG votera l'entrée en matière du rapport de gestion de même que les états financiers.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Je commencerai mon intervention en annonçant que les Vertes et les Verts voteront les comptes 2021. Je remercie les collaborateurs et collaboratrices de l'Etat ainsi que le département qui, année après année, nous fournit des documents de très grande qualité.
Cela a été dit: 2021, crise sanitaire, crise sociale et, comme les températures nous le rappellent depuis quelques jours déjà, crise écologique. Le petit et le grand Etat ont tenu le coup, ont réussi à répondre aux besoins des plus précaires, sont venus à la rescousse des personnes physiques et morales qui nécessitaient un soutien et des prestations diverses pendant cette période.
On relève 1,5 milliard de plus par rapport au budget et un milliard supplémentaire par rapport aux comptes 2020. Ces chiffres sont considérables; ils sont dus, comme l'a expliqué le département, à la participation exceptionnelle de la Confédération en ce qui concerne le financement des aides à l'économie, au versement extraordinaire de la BNS, mais aussi aux revenus fiscaux de notre canton.
Je vous épargnerai un rappel de tout ce qui a déjà été indiqué, mais j'aimerais tout de même commenter les propos de certains groupes ici. On se plaint d'une mauvaise gestion, on dénonce des comptes qui ne vont pas, on cite le rapport BAK - qui, au demeurant, a été remis en cause à plusieurs reprises, car certains éléments des points de comparaison effectués entre Genève et les différents autres cantons ne correspondaient pas, il y a des catégories où ça ne jouait pas -, on se lamente de ce que Genève est au bord du gouffre, que la dette prend son envol et que rien ne va plus.
Alors une question, Monsieur Zweifel et le PLR: qui était majoritaire pendant toutes ces années dans ce parlement ? Qui avait la majorité au sein du Conseil d'Etat ? C'est bien joli de venir dire, quelques années après, que nous courons à la catastrophe et que cela dure depuis toujours, mais il faut prendre ses responsabilités et identifier les projets de lois qui ont mené à la situation actuelle. Quand le Grand Conseil vote des baisses fiscales, cela a pour conséquence de vider les caisses de l'Etat. La politique que vous menez aujourd'hui et mènerez demain, contrairement à celle que vous dénoncez, conduit à ce résultat, à savoir tarir les finances de l'Etat.
Plusieurs groupes ont remercié les personnes pour leur contribution aux comptes de l'Etat par le biais de l'impôt. Je trouve quand même un peu curieux de remercier les gens de respecter la loi ! Il me tenait à coeur de soulever ce point, étant donné que tout s'explique par rapport aux projets de lois que vous déposez en ce moment encore dans le but de réduire les revenus de l'Etat; c'est à se demander si les intérêts que vous défendez sont ceux du canton et de la population ou bien d'autres personnes.
Je répète que le groupe Vert votera les comptes, mais nous ne pouvons pas nous contenter des explications qui nous ont été données quant aux recettes. Certes, il faudra réellement ouvrir la voie à des réformes au niveau de l'Etat, mais également à une restructuration de notre système fiscal. En effet, si nous en sommes là aujourd'hui, ce n'est pas en raison de la politique conduite par - allez, au hasard - la gauche, mais de celle d'une droite majoritaire depuis des années au sein de ce parlement et du gouvernement de Genève. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je donne la parole à M. François Baertschi pour une minute trente-sept.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On dit souvent du MCG qu'il sait aisément dépenser l'argent, mais pas apporter des moyens. C'est entièrement faux, c'est tout l'inverse, contrairement à ce que prétendent certaines personnes de mauvaise foi dans ce parlement qui abusent la population avec des informations inexactes.
Preuve en est qu'il suffit de constater que l'endettement a baissé d'un milliard durant cette législature, la première avec un représentant du MCG. Si nous en avions eu quatre, sans doute que la dette de l'Etat aurait diminué bien davantage encore. Cela signifie qu'aux manettes, le MCG mène une politique au service des citoyens. Nous en avons fait la démonstration et nous la refaisons cette année avec l'un de nos représentants au Conseil d'Etat, puisque l'endettement a été réduit de près de 500 millions. Il s'agit d'un montant important eu égard au fait que nous avons dû gérer une épidémie gigantesque, comme nous n'en avons jamais connu, avec les frais en conséquence, et tout cela sans péjorer le service à la population. Ce service à la population, c'est ce que nous voulons assurer, c'est dans ce sens qu'oeuvre le MCG en dehors des dogmatismes, indépendamment des travers dans lesquels certains groupes n'hésitent pas à tomber.
Le président. Merci bien. A présent, la parole retourne à M. Jean Burgermeister pour quarante-quatre secondes.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste répondre à M. Zweifel qui disait: «Nous ne sommes pas dans une situation d'austérité, puisque les charges augmentent plus rapidement que la population, il faut dès lors les diminuer.» Mesdames et Messieurs, j'aimerais simplement signaler que, par exemple, la prise en charge aux HUG avant la crise covid - je cite, de mémoire, les chiffres entre 2015 et 2019 - a été multipliée par quatre ! C'est-à-dire que les besoins de la population croissent beaucoup plus vite que la population elle-même, en raison d'abord du vieillissement...
Le président. Il vous faut conclure...
M. Jean Burgermeister. Oui, je conclus, Monsieur le président ! Tout le monde comprend bien que si nous alignons les dépenses sur la hausse démographique, alors il faudra renoncer dans les années à venir...
Le président. C'est terminé.
M. Jean Burgermeister. ...aux trois quarts des besoins hospitaliers.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Yvan Zweifel, c'est à vous pour vingt-huit secondes.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Vingt-huit secondes de pédagogie comptable à l'attention de M. Wenger, qui indique que la droite attaque les recettes fiscales en tenant compte uniquement de la baisse du taux statique. Evidemment, si les entreprises réalisent chaque année le même bénéfice et qu'on diminue le taux, il y a une réduction des revenus fiscaux. Or l'histoire nous démontre précisément que lorsque l'on allège la fiscalité, les sociétés disposent de moyens supplémentaires pour investir, engager, ce qui a comme conséquence des hausses de recettes fiscales.
Le président. Merci, Monsieur. Enfin, Mme Caroline Marti a de nouveau la parole pour une minute trente.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais répondre à M. Zweifel qui affirme que les moyens mis à disposition à Genève sont surdimensionnés. Mais enfin, Monsieur le député - vous transmettrez, Monsieur le président -, allez dire aux locataires victimes de marchands de sommeil que les moyens sont surdimensionnés; allez le dire aux proches de personnes en situation de handicap qui doivent attendre parfois plusieurs années avant d'obtenir une place adaptée en institution; allez le dire aux employés des HUG et de l'IMAD qui vivent des conditions de travail extrêmement difficiles par manque de personnel; allez le dire aux parents des enfants en bas âge qui cherchent, sans trouver, des places de crèche !
Non, on ne peut pas soutenir aujourd'hui que les moyens mis à disposition des politiques publiques à Genève sont surdimensionnés. Effectivement, Genève est un canton riche, mais cette richesse ne profite pas à tout le monde. Si les recettes fiscales augmentent, cela signifie simplement que la richesse de certains contribuables augmente, cela veut dire aussi que les inégalités augmentent, et c'est la raison pour laquelle nous devons également augmenter les charges, afin de réduire les inégalités et la pauvreté qui en découle.
Enfin, M. Zweifel signalait que les prestations coûtent plus cher à Genève; il est vrai que c'est le cas de certaines d'entre elles, mais cela relève surtout d'un choix politique, un choix politique que nous devons assumer et qui consiste à dire: «Oui, nous développons des places de garde pour les enfants; oui, nous mettons en place un système de prestations complémentaires cantonales pour répondre aux besoins spécifiques de notre population.» (Applaudissements.)
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, je regrette de ne pas retrouver aujourd'hui cet extraordinaire et historique consensus que vous aviez atteint en 2020... (Remarque.) Oui, à part votre groupe, excusez-moi du manque de respect ! ...lorsque le budget 2021 avait été accepté. Cette unanimité devrait pourtant aller de soi, puisque les comptes sont positifs et que la gestion du Conseil d'Etat a été globalement saluée, du moins celle qui concerne la crise covid.
Quelques mots sur ces comptes. Oui, le résultat positif dégageant un bénéfice de 49 millions en a surpris plus d'un, mais il faut rappeler que la situation économique de notre canton a été bien meilleure que prévu. Lors de l'élaboration des amendements au projet de budget 2021, en octobre 2020, Mesdames et Messieurs, les experts du Groupe de perspectives économiques pronostiquaient que l'exercice 2020 se terminerait sur une chute du PIB genevois de 5,5% et que celui-ci remonterait de 4% en 2021.
Nous savons maintenant que la baisse du PIB n'a été que de 1,8% en 2020 et son augmentation de 3,3% en 2021, ce qui fait un différentiel de plus de 3% sur les deux années cumulées. Il s'agit d'un différentiel très important, et nous ne pouvions pas le prévoir. Cela a eu des effets sur les recettes fiscales, mais aussi sur l'emploi, Mesdames et Messieurs - le taux de chômage n'a pas bougé grâce aux RHT notamment - de même que sur le recours aux prestations sociales, qui s'est révélé moindre que prévu.
Concernant les charges, le budget 2021 les estimait à hauteur de 9,426 milliards. A noter qu'il a fallu ajouter 995 millions de crédits supplémentaires en cours d'année. Pour la première fois, les charges totales de l'Etat ont dépassé la barre des dix milliards de francs. Nous pouvons dès lors nous réjouir, Mesdames et Messieurs les députés, que le canton ait touché des revenus en plus, cela nous a permis d'assumer ce dépassement et ces crédits supplémentaires pour 995 millions. Autrement, la situation n'aurait pas été la même.
Du côté des revenus et pour la première fois aussi, la barre des dix milliards a été dépassée, notamment grâce aux recettes fiscales, en hausse de 999 millions par rapport au budget. Mesdames et Messieurs, nos rentrées fiscales n'ont jamais été aussi élevées, et ce malgré la réforme de la RFFA - j'aurai l'occasion d'y revenir lors du débat sur la politique publique I.
Je saisis l'opportunité qui m'est donnée ici de vous faire le même rappel que lors de chaque séance dédiée aux comptes ou au budget en soulignant la fragilité de notre pyramide fiscale. Conspuer certaines ou certains parce que leurs revenus sont supérieurs aux autres, à mon avis, ne permettra pas au canton de continuer à disposer de ces montants. Pour les personnes physiques, Mesdames et Messieurs, ce sont 4,2% des contribuables qui paient actuellement 50,6% de l'impôt sur le revenu et 1,3% d'entre eux qui s'acquittent de 69,8% de l'impôt sur la fortune. S'agissant des personnes morales, 1% d'entre elles versent 77,7% de l'impôt sur le bénéfice et 85,8% de l'impôt sur le capital.
Alors oui, Mesdames et Messieurs les députés, d'aucuns gagnent mieux leur vie, mais ils réussissent également mieux dans leurs entreprises, les sociétés font des bénéfices. Qu'elles soient physiques ou morales, ces personnes contribuent de façon majeure aux finances de l'Etat, et je pense qu'il est absolument essentiel de le souligner.
Nous pouvons remercier toutes celles et tous ceux qui continuent à créer de la valeur en investissant dans leurs entreprises, en créant de l'emploi. Notre canton perçoit les recettes fiscales par habitant les plus élevées de Suisse; naturellement, nous devons tout mettre en oeuvre pour maintenir cette substance fiscale à Genève, et cela signifie surtout ne pas détériorer nos conditions-cadres.
La dette, Mesdames et Messieurs: en finances publiques, c'est elle le véritable juge de paix. Au final, la gestion de l'Etat finit toujours par s'observer dans son évolution. Eh bien l'endettement a diminué de 427 millions en 2021. Depuis 2019, il n'a augmenté que de 500 millions malgré la somme de 1,4 milliard déjà versée à la CPEG pour rembourser le prêt. J'ajoute qu'à fin 2021, la Confédération n'avait pas encore payé les montants qu'elle nous devait pour les cas de rigueur. Notre dette financière se monte finalement à 12,4 milliards. C'est bien entendu toujours trop élevé en comparaison avec les autres cantons suisses. Par ailleurs, si son coût a sensiblement baissé, tel ne sera plus le cas dans les années à venir en raison de la hausse des taux d'intérêt.
Mesdames et Messieurs, si le Conseil d'Etat peut accepter certains reproches portant sur le niveau de la dette, il ne peut en revanche pas souffrir les critiques relatives à sa transparence en la matière. Les députés savent très exactement à quoi elle correspond et où retrouver les chiffres y relatifs. Le résultat du compte de fonctionnement 2021 présente un bénéfice de 45 millions au lieu d'une perte de 847 millions et notre dette diminue. La situation financière de l'Etat de Genève, à l'issue des comptes 2021, est bonne. D'ailleurs, Standard & Poor's vient tout juste de confirmer, au milieu de cette semaine, notre note AA- avec une perspective stable.
Si j'en suis satisfaite, je n'oublie pas les défis qui nous attendent: continuer à gérer les effets des trois réformes votées en 2019, faire face à une situation économique qui a bien changé depuis le début de cette année avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui provoque une hausse de nos dépenses, notamment pour l'accueil des réfugiés, une forte inflation qui impacte négativement nos charges et de très grosses incertitudes quant à nos recettes fiscales. Sans compter les investissements importants qui nous attendent, résultant d'un plan décennal des investissements extrêmement ambitieux liés aux transitions écologique et numérique.
Pour le Conseil d'Etat, 2021 a été une année contrastée: positive d'un côté, grâce au sentiment d'avoir su faire face et de nous être sortis de la crise du covid en limitant au maximum les dégâts pour les sociétés et la population grâce aux aides apportées rapidement. A cet égard, j'en profite pour vous remercier, Mesdames et Messieurs les députés, de vous être montrés très souples et d'avoir accepté de traiter en urgence certains projets. De l'autre côté, le Conseil d'Etat relève des éléments négatifs, notamment notre échec à trouver une majorité au budget 2022.
Pour conclure mon intervention, j'aimerais remercier l'ensemble des collaboratrices et collaborateurs de l'Etat qui ont participé à l'élaboration du rapport de gestion du Conseil d'Etat et des cinq tomes des états financiers. Je pense particulièrement à la direction générale des finances, à l'office du personnel de l'Etat, mais aussi à tous les services financiers des départements qui ont accompagné la commission des finances dans son travail d'examen. Je salue également la commission des finances, en particulier son président, Jacques Béné, et son secrétaire scientifique, M. Audria, pour le très bon déroulement des travaux.
Enfin, vous le savez, même s'il m'arrive de temps à autre de faire preuve d'un certain agacement, j'ai toujours beaucoup de plaisir à venir vous rendre visite à la commission des finances et j'y suis toujours très bien accueillie, même si nous ne sommes pas constamment d'accord.
Je remercie encore l'entier des collaboratrices et collaborateurs de l'administration pour l'excellent travail accompli en 2021 dans la délivrance de toutes les prestations à la population malgré la situation: grâce à eux, l'Etat de Genève fonctionne bien, nonobstant les critiques parfois virulentes, souvent injustes, que l'on peut entendre, entre autres dans cette salle.
Au nom du Conseil d'Etat, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie d'approuver ce rapport de gestion, comme je vous prie par avance de valider les états financiers individuels et consolidés. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote d'entrée en matière.
Une voix. Exceptionnellement, on vote comme Burgermeister ! (Rires.)
Mis aux voix, le projet de loi 13091 est adopté en premier débat par 48 oui contre 40 non.
Le président. Vous avez accepté le rapport de gestion du Conseil d'Etat.
Une voix. Non, on a accepté l'entrée en matière !
Le président. Vous avez accepté l'entrée en matière, exactement, Monsieur le député ! J'allais un peu vite en besogne, vous avez raison. (Rires.)
Deuxième débat
Le président. A présent, Mesdames et Messieurs, nous passons au deuxième débat. Je rappelle que les questions portent sur le rapport de gestion, mais peuvent également trouver leur base dans les éléments chiffrés des livres détaillant les comptes de fonctionnement et d'investissement.
Je vais procéder à l'appel des politiques publiques en commençant par la lettre B; nous les voterons individuellement à la fin de chacun des débats. L'enveloppe totale de temps de parole est de vingt minutes pour les rapporteurs et de trente minutes par groupe, chaque intervention étant limitée à cinq minutes. Le Conseil d'Etat répond aux questions à la fin de chaque politique publique.
B - ÉTATS-MAJORS ET PRESTATIONS TRANSVERSALES
Le président. Nous entamons nos travaux avec la politique publique B «Etats-majors et prestations transversales». La parole n'est pas sollicitée. Est-ce que le Conseil d'Etat souhaite intervenir ? (Remarque.) Non ? (Rires.) Alors je la mets directement aux voix.
Mise aux voix, la politique publique B «Etats-majors et prestations transversales» est adoptée par 29 oui contre 12 non et 43 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
C - COHÉSION SOCIALE
Le président. Nous abordons maintenant la politique publique C «Cohésion sociale». Je passe la parole à M. François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Bon, je voulais dire quelques mots sur la politique publique précédente... (Exclamations.) ...mais vous avez tiré plus vite que votre ombre, Monsieur le président. Nous trouvons, et cela s'applique en fait à l'ensemble des politiques publiques de l'Etat de Genève, qu'il y a un excès de hiérarchie tandis qu'on ne favorise pas suffisamment le personnel sur le terrain. Dès lors, nous avons décidé de faire passer ce message général par une abstention.
En ce qui concerne la politique publique C, on relève un certain nombre d'insuffisances, en particulier au sein du SPAd où le personnel est en souffrance, sans parler de problèmes de gestion qui nous semblent inacceptables et qui doivent être réglés. Le groupe MCG ne peut pas accepter cette politique publique, il se doit de la refuser, parce que trop de dysfonctionnements perdurent. Une réforme globale de certains services est à entreprendre; en l'occurrence, les prestations sont insatisfaisantes pour la population. C'est la raison pour laquelle le MCG rejettera cette politique publique.
Une voix. Très bien.
M. André Pfeffer (UDC). Pour expliquer comment fonctionne l'aide sociale à Genève, je me permets de citer quelques chiffres des comptes de l'Hospice général, qui fait figure d'acteur principal en la matière. Je me base sur ceux du 31 décembre 2020, tout simplement parce qu'ils sont sur internet et que tout un chacun peut les consulter. Que disent ces comptes 2020 ? Les prestations annuelles globales de l'Hospice général s'élèvent à 447 millions - 447 238 000, pour être précis. Dans cette somme sont inclus les services liés à l'asile qui totalisent 145 millions. Pour finir, les charges annuelles du personnel sont de 128 millions - chiffre exact: 127 699 000.
A l'analyse de ces trois montants, on constate que l'Hospice général accorde 300 millions à 26 331 bénéficiaires locaux et plus de 145 millions à 635 migrants pour compléter les allocations de la Confédération. Il est à préciser que la majorité des cantons suisses n'ajoutent pas de supplément aux indemnités fédérales. Pour finir, on note une masse salariale de 130 millions pour 1190 collaborateurs, ce qui fait un revenu de 109 000 francs en moyenne par travailleur.
Comme je l'avais déjà relevé il y a deux ou trois ans, si on additionne à la masse salariale les charges nécessaires telles que bureaux et ordinateurs, on s'aperçoit que l'institution dépense autant pour ses 1190 employés que pour l'ensemble des prestations locales destinées aux 26 331 bénéficiaires de l'aide sociale. Voilà un bel exemple de la gestion de l'Etat de Genève.
Autre situation très genevoise: les allocations d'aide au retour à l'emploi sont offertes par l'Hospice général, l'office cantonal de l'emploi, les EPI et une bonne douzaine d'autres instituts ou associations. Evidemment, pour coordonner tout cela, il faudrait créer une solide équipe de fonctionnaires ! Bref, l'Etat est fier de son administration centralisée et pléthorique; il critique même d'autres cantons qui, eux, disposent de systèmes municipaux décentralisés. Avec le modèle genevois, nous avons juste deux fois plus de personnes à l'assistance sociale et surtout quatre fois plus de dépenses que certains autres cantons suisses.
Le pire, c'est qu'on ne veut pas ouvrir les yeux, on ne veut pas savoir ce qui se passe ailleurs. La Suède, par exemple, possède un système très performant qui affiche d'excellents résultats: il s'agit de fournir le maximum de soutien au départ, ainsi les gens ont les moyens de rebondir; ensuite, le mécanisme d'aide pécuniaire est dégressif. Pourquoi ? Parce qu'il faut tout de même mettre en place une petite incitation pour les bénéficiaires.
Bref, pour en revenir à l'Hospice général, le constat est très simple: la masse salariale progresse plus rapidement que les prestations, ce qui est tout à fait normal, puisque, je le répète, le revenu annuel moyen par collaborateur est de 109 000 francs alors que pour les personnes à l'aide sociale, le montant des indemnités s'élève à seulement 11 400 francs par année. Je vous remercie de votre attention.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Monsieur le président, je commencerai par vous demander de transmettre à M. Pfeffer qu'une méthode dégressive en fonction de la durée de l'aide, comme la propose le modèle suédois qu'il évoquait, revient juste à rendre les gens responsables de leur situation et à considérer que s'ils sont encore à l'assistance au bout d'un moment, c'est parce qu'ils l'ont bien voulu. C'est faire fi de la réalité objective, de la situation du marché de l'emploi ou de celle des assurances sociales.
J'aimerais encore lui rappeler - vous voudrez bien le lui indiquer, Monsieur le président - que le coût de la vie à Genève est particulièrement élevé, bien plus que dans les autres cantons, que le risque de pauvreté est de 30% plus haut qu'ailleurs en Suisse et que s'étonner de la quantité de personnes à l'aide sociale, c'est occulter ces éléments.
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, la politique publique de la cohésion sociale nous renvoie aux conséquences des choix de ce parlement. Aujourd'hui plus que jamais, nous avons épuisé le lard du chat; nous sommes confrontés aux répercussions délétères des politiques d'austérité menées dans ce canton, car quoi qu'en disent certains, ce sont bien des politiques d'austérité qui sont conduites depuis plusieurs décennies à Genève. Nous devrons effectuer le bilan de ces économies imposées en dépit du bon sens à la majeure partie des services publics.
Nombre d'entre vous s'émeuvent des dysfonctionnements de certains offices, d'aucuns vont même jusqu'à réclamer des têtes. Mais où étiez-vous, Mesdames et Messieurs les députés ou ceux qui vous ont précédés dans vos groupes, lorsqu'il fallait assurer à ces entités les moyens de fonctionner ? Ce Grand Conseil a largement plébiscité la nouvelle gestion publique; il serait temps de dresser le bilan de cette dernière, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle a désarmé les services publics et entravé leur bonne marche.
La polarisation de la société, la hausse des inégalités et une injuste répartition des richesses ont augmenté les besoins de la population en matière de soutien de l'Etat et de ses services. Il est temps d'assumer nos responsabilités, il est temps surtout de réparer les erreurs commises par ce parlement s'agissant de la gestion des prestations de l'Etat. Nous ne pouvons faire l'économie de cette analyse et nous devons également nous interroger quant au fait que des non-dépensés, en raison, nous dit-on, des incidences de la crise covid, n'aient pas été réaffectés à une amélioration des services dus à la population tant sur le plan qualitatif que quantitatif.
La pauvreté et la précarité croissent de manière constante dans notre canton. Ce n'est pas une figure de rhétorique, c'est une affligeante réalité qu'il nous faut combattre. Mais cela, il ne suffit pas de le dire, nous devons réellement mettre en oeuvre les moyens de lutter là contre: il faut allouer des ressources, mais aussi revoir les modes de fonctionnement, il faut valoriser et augmenter l'expertise professionnelle et ne pas rogner sur les compétences, comme cela est trop souvent le cas, en n'employant pas les bons métiers au bon endroit.
Entendez les alertes des professionnels de l'action sociale qui, année après année, ne cessent de crier dans le désert. Récemment, ils ont effectué une sorte de chemin de croix des différentes institutions sociales de notre canton. Croyez-vous que cela soit par jeu ou par désoeuvrement ? Non, c'est l'expression d'un profond désarroi, celui de travailleurs quotidiennement confrontés à des personnes en difficulté, à des gens en droit de bénéficier des services de l'Etat et qui voient leurs indemnités se réduire ou s'altérer, des travailleurs en souffrance dont on relève régulièrement les importants taux d'absence, mais en se pinçant soigneusement le nez quand il s'agit d'identifier ce qui motive la souffrance au travail.
Tant que le monde politique refusera de prendre la mesure de la dégradation de la situation sociale et des difficultés auxquelles est confrontée une partie croissante de la population, il continuera à se croire dispensé d'agir sur les causes de cette détérioration. Cette politique de l'autruche n'est plus acceptable, c'est pourquoi nous ne validerons pas la présente politique publique. Je vous remercie de votre attention.
M. Didier Bonny (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, faut-il s'offusquer du fait que le département de la cohésion sociale ait dépensé près de 80 millions de moins que ce qui avait été budgété en 2021 alors que les besoins dans le social sont d'année en année plus importants ? La crise du covid n'a-t-elle pas montré, au sens propre et figuré, qu'une partie de la population genevoise était en grande difficulté ? Pour les Vertes et les Verts, se scandaliser reviendrait à dire au département qu'il n'aurait pas dû tenir compte des incertitudes liées à la crise covid et présenter un budget ordinaire, si j'ose dire. Et que se serait-il passé si la conséquence avait alors été un dépassement de 80 millions ? Poser la question, c'est y répondre.
Cela étant dit, ce résultat comptable «positif», entre guillemets, ne signifie pas pour autant que la situation des Genevoises et des Genevois s'est miraculeusement améliorée en 2021, comme ces quelques chiffres le démontrent: le nombre de dossiers traités par l'Hospice général est en hausse de 3,1%; les prestations sociales délivrées par ce dernier ont donc logiquement progressé à hauteur de près de 18 millions; 2857 personnes supplémentaires bénéficient des prestations complémentaires AVS/AI; il y a toujours autant de familles - 1700, en chiffres arrondis - qui ont besoin d'un soutien financier; les subsides à l'assurance-maladie ont quant à eux augmenté de près de 30 millions avec comme corollaire, il est vrai, une baisse de 19 millions des actes de défaut de biens en lien avec les primes impayées, qui sont prises en charge par le canton. Mais qu'en sera-t-il l'année prochaine avec la forte hausse des primes annoncée ?
Au chapitre des bonnes nouvelles, si on peut les appeler ainsi, relevons la somme de 1,4 million votée par notre parlement pour les personnes sans abri et le soutien que les communes ont annoncé pas plus tard qu'hier pour lutter contre le sans-abrisme. Relevons également, malgré le contexte de crise, l'ouverture de 99 places sur les 138 initialement prévues afin d'augmenter l'offre destinée aux personnes vieillissantes ou souffrant de troubles psychiques.
En conclusion, la députation Verte affirme une fois de plus que toutes les personnes qui vivent sur notre territoire devraient avoir le droit à l'alimentation, au logement et à une vie digne, crise sanitaire ou non. En ce sens, les Vertes et les Verts soutiennent une politique de la cohésion sociale forte et ambitieuse. Merci.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, l'année 2021 a vu se poursuivre la crise sanitaire, puis économique. Si, globalement, notre économie a tenu le choc, l'impact a été féroce pour celles et ceux qui ont souffert de la pandémie et de ses effets, principalement sur le plan social. En 2020, le nombre de personnes à l'Hospice général a augmenté de 9%, c'était la plus forte hausse de l'histoire; elle s'ajoutait à une croissance de 76% - presque un doublement des bénéficiaires - que nous avons connue à Genève en l'espace de dix ans. Certes, l'an dernier, il y a eu un léger recul - 2,1% - de la quantité de dossiers financiers, mais nous ne sommes de loin pas encore revenus à la situation de 2019.
Ces chiffres, Mesdames et Messieurs, permettent de mesurer l'importance des défis qu'ont dû relever le département de la cohésion sociale et l'Hospice général ces dernières années. La pandémie a fortement fragilisé celles et ceux qui se trouvaient déjà aux limites de la précarité: les indépendants, les familles, la classe moyenne, les artistes. A Genève, pour rappel, 40% de la population détient zéro franc de fortune et n'a donc aucune réserve pour faire face à un quelconque imprévu.
Dans le cadre de l'examen des comptes, nous saluons le travail des travailleuses et travailleurs qui a permis de ne laisser personne au bord du chemin ainsi que la politique sociale résiliente et innovante menée par le Conseil d'Etat. Quelques illustrations: le plan d'action contre la précarité a montré des avancées majeures dans le domaine de l'accès aux droits - c'est le fameux bureau d'information sociale; le soutien aux seniors a été renforcé par la formalisation des tâches inhérentes au canton et aux communes; la cohésion sociale en milieu urbain, de son côté, a été renforcée grâce à un appel à projets ad hoc lancé au printemps 2021 - il sera d'ailleurs reconduit en 2022 -, des projets précis seront financés de manière importante.
Nous relevons la finalisation de la loi sur l'aide sociale et la lutte contre la précarité durant cette période; ce travail mènera à un meilleur accompagnement des personnes en augmentant la franchise acceptée pour des revenus du travail et en dynamisant l'insertion professionnelle. Quant à la loi sur le surendettement, elle permettra de lutter contre la pauvreté et d'oeuvrer en amont pour éviter que les gens se retrouvent aux poursuites. Nous applaudissons l'adoption et la mise en oeuvre de la LAPSA, la loi sur l'aide aux personnes sans abri, de même que le développement du projet Domos, dispositif élaboré par le département en collaboration avec la Chambre genevoise immobilière et l'Hospice général, qui vise à accompagner financièrement les personnes rencontrant des difficultés passagères pour faire en sorte qu'elles ne perdent pas leur logement.
En 2021, la loi sur l'indemnisation pour perte de revenus d'un montant de 15 millions a été adoptée par le peuple; cela a permis d'aider des milliers d'individus exclus des prestations sociales en raison de leur situation professionnelle ou de leur statut. Cette année a également vu s'achever la rédaction et la mise en consultation de la phase initiale du plan stratégique du handicap, première étape de la mise en place d'une politique du handicap ambitieuse et novatrice. Par ailleurs, plus de deux cents projets ont été soutenus dans les différents domaines du programme d'intégration cantonal, le PIC. Plusieurs initiatives ont vu le jour dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment contre le racisme anti-noir, et dans le développement de la participation et de la cohésion sociale au sein des quartiers. Nous soulignons ici l'action décisive du BIE, le bureau de l'intégration des étrangers, en la matière.
Mesdames et Messieurs, je pourrais continuer un certain temps à lister tous les projets qui ont été développés, nourris et financés par le département. Il existe un dicton selon lequel un arbre qui tombe fait plus de bruit qu'une forêt qui pousse, et nous en avons là un bel exemple: on sait le Genevois râleur ou très exigeant, comme l'a signalé Mme Fontanet, mais au sein du département, le travail mené a véritablement permis de tenir les mailles du filet social en cette période extrêmement douloureuse et brutale pour la cohésion sociale.
Le parti socialiste, vous l'aurez compris, soutiendra résolument l'action innovante et résiliente conduite par le Conseil d'Etat, grâce à laquelle personne n'a été laissé au bord du chemin durant cette année. Genève finance des projets qui ont permis aux personnes de maintenir leur dignité et leurs revenus dans des temps, je l'ai dit, extrêmement troublés. Merci de réserver un bon accueil à cette politique publique.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Patricia Bidaux (PDC). Mesdames les députées, Messieurs les députés, durant deux ans, notre canton a fait face à la crise sociale liée au covid avec beaucoup de courage. A cet égard, ce Grand Conseil a oeuvré de manière importante afin d'assurer une économie qui maintienne les emplois et, partant, la cohésion sociale. Cette situation impacte le quotidien de nombre de personnes habitant à Genève et engendre des insécurités liées à l'emploi, à l'alimentation, au maintien du logement, mais aussi à l'accès aux soins.
Concernant la politique publique de la cohésion sociale, les comptes ont parlé; maintenant, c'est à nous de répondre aux défis à venir. Et ils sont nombreux, car la pandémie ne semble pas encore avoir dit son dernier mot. Le contexte géopolitique actuel n'est pas non plus sans conséquence sur les mouvements sociaux. Après l'urgence de l'accueil, des voix se sont élevées pour questionner l'équité de traitement; elles doivent être entendues et prises en compte, mais avec le doigté nécessaire, parce que l'asile fait partie de l'ADN de notre canton tout comme le soin aux habitants.
Notre société est en pleine mutation, les modèles politiques courants sont malmenés. Qu'allons-nous proposer pour affronter ces enjeux ? Plus de postes, plus de hiérarchie, et toujours plus ? Ce système est-il le seul ? Pour le PDC-Le Centre, il faudra oser autre chose. L'action de l'Etat doit être menée de manière transversale pour tenir compte de l'ensemble des politiques publiques, en particulier s'agissant de la cohésion sociale, de l'économie, de la santé et de l'environnement - je prends ici une définition large de l'environnement qui inclut l'habitat. Le développement durable figure au coeur de notre engagement politique; à cela, nous devrons ajouter la notion de sécurité car, on l'a vu durant ces deux dernières années, celle-ci prend tout son sens aujourd'hui. Dans cette optique, le PDC-Le Centre acceptera cette politique publique. Je vous remercie.
Une voix. Bravo. (Applaudissements.)
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Il y aurait de nombreux commentaires à formuler sur cette politique publique, Mme Jocelyne Haller en a déjà dit beaucoup. Je voudrais tout de même rappeler quelques éléments. D'abord, c'est vrai que les travailleurs précaires ont été indemnisés, mais il faut souligner que le gouvernement est resté extraordinairement passif face à la crise sanitaire. Durant la première vague, l'aide aux travailleurs précaires a beaucoup trop tardé, pour être finalement combattue par un référendum d'arrière-garde lancé par le MCG, tandis que lors de la deuxième vague, le Conseil d'Etat a pris le pari bien plus hasardeux encore de ne rien faire et de laisser le soin à ce parlement de parer à l'urgence sociale la plus criante.
Cela, Mesdames et Messieurs, est à mettre en perspective avec la célérité avec laquelle ce même Conseil d'Etat a couvert les besoins des dirigeants et des cadres d'entreprises. En effet, notre Grand Conseil a voté des compléments aux allocations fédérales pour les dirigeants des sociétés lors de sa première séance plénière après la première vague ! Les travailleurs et travailleuses précaires, quant à eux, ont dû patienter de nombreux mois avant de toucher un argent qui leur est pourtant indispensable pour vivre au quotidien.
Ce que nous montrent les chiffres des comptes de l'Etat, c'est que le canton de Genève avait largement les moyens de mettre sur place un programme social bien plus ambitieux afin de répondre à l'ensemble des besoins de la population et d'éviter que nombre de citoyens ne sombrent dans la précarité de manière durable, comme c'est malheureusement souvent le cas.
Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, la droite nous a expliqué qu'il était important de résorber le déficit, de réduire la dette, etc. Or quand la droite, PLR en tête, nous indique qu'il s'agit là de sa préoccupation, elle nous ment effrontément, et c'est particulièrement visible dans le cadre de la politique publique C. En effet, vous le savez sans doute, les compagnies d'assurance-maladie privées coûtent chaque année à l'Etat de Genève - notamment en subsides d'assurance-maladie, lesquels sont impératifs, faute de quoi les gens ne parviendraient pas à payer les primes démesurées - plus de 500 millions ! Plus de 500 millions, Mesdames et Messieurs ! Si nous avions un système de santé public avec des primes proportionnelles aux revenus, eh bien un montant annuel de plus de 500 millions serait dégagé pour mettre en oeuvre des politiques sociales, environnementales ou autres - ou encore, histoire de faire plaisir à M. Zweifel, pour réduire la dette.
On l'a vu durant toute la période du covid, les sociétés d'assurance-maladie ne servent à rien, Mesdames et Messieurs, à rien ! Elles ont réalisé des économies folles en pleine pandémie, et malgré cela, l'Etat continue son subventionnement pour des primes qui ont été payées bien trop cher par les habitants, puisque les compagnies ont engrangé des bénéfices. Or cet argent, ni l'Etat ni la population ne l'a récupéré: non seulement les primes, qui auraient dû baisser en 2021 puisqu'elles avaient été indûment élevées en 2020, n'ont pas diminué, mais on nous apprend maintenant que l'année prochaine, la hausse sera de nouveau spectaculaire avec, à l'arrivée, des coûts énormes pour le canton et les Genevois.
En la matière, Mesdames et Messieurs, la population paie trois fois la facture: d'abord, elle doit s'acquitter de primes d'assurance-maladie hors de prix qui ne sont pas proportionnelles aux salaires et donc inaccessibles au plus grand nombre; ensuite, elle doit verser les impôts qui financeront les subsides d'assurance-maladie afin de permettre au système de fonctionner; enfin, elle doit encore payer des impôts pour financer l'hôpital et le réseau de soins publics, qui sont les seuls à avoir réellement répondu à l'urgence du covid, puisque l'essentiel des coûts a été assuré par l'Etat de Genève. Pour ce qui est du manque à gagner des hôpitaux publics dû au report des interventions médicales, eh bien c'est très simple: la participation des assurances-maladie privées a été de zéro franc, zéro centime.
C'est là le casse du siècle, Mesdames et Messieurs, un braquage qui n'est possible qu'avec la complicité indéfectible des sbires des assureurs, le PLR en tête, mais aussi l'UDC et le PDC qui, au sein du Parlement fédéral, votent systématiquement en faveur des intérêts de ces entreprises. Certains répondront: «C'est parce qu'un certain nombre de parlementaires fédéraux sont payés par les compagnies d'assurance privées.» Quant à moi, je pense qu'il s'agit d'un élément secondaire; en réalité, ce qui pèse le plus, c'est bien un choix idéologique, celui de protéger la petite minorité de ceux qui s'engraissent sur le dos de la majorité, au détriment des intérêts du plus grand nombre, et si le PLR et le reste de la droite changeaient de position à Berne, eh bien le canton de Genève pourrait facilement économiser chaque année plus de 500 millions. C'est bien la preuve, Mesdames et Messieurs, que le PLR ment lorsqu'il nous parle de la nécessité de résorber la dette ! (Applaudissements.)
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Il est évidemment facile de traiter les autres de menteurs quand on n'a pas soi-même compris comment fonctionne le système. (Rires. Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Yvan Zweifel. C'est malheureux, mais alors réexpliquons à quoi sert l'assurance-maladie. Qu'est-ce que l'assurance-maladie ? C'est une assurance. A quoi sert une assurance, Mesdames et Messieurs, qu'elle soit maladie, incendie ou ce que vous voulez ? A vous assurer contre un risque. Chacun estime son risque de tomber malade et se retrouve ensuite avec des primes, celles de la LAMal, qui représente la couverture de base, et celles d'une assurance complémentaire s'il veut en souscrire une.
Le rêve de M. Burgermeister, à savoir des primes en fonction du revenu, consiste à ne plus avoir d'assurances, mais un impôt supplémentaire; cela revient à dire à ceux qui paient déjà énormément aujourd'hui pour financer le train de vie dispendieux de l'Etat qu'ils devront payer encore plus sans qu'à un seul moment - à un seul moment ! - on intervienne de quelque manière que ce soit pour régler le problème.
Les primes d'assurance-maladie augmentent parce que les coûts de la santé augmentent; elles diminueront lorsque les coûts de la santé diminueront. C'est extrêmement simple... (Commentaires.) C'est extrêmement simple à saisir, mais il est certain que si on ne souhaite pas l'entendre et qu'on préfère taper sur un bouc émissaire à la place, la chose est extrêmement aisée également.
Quant à affirmer que la solution serait une caisse publique... Je propose à M. Burgermeister de déménager de l'autre côté de la frontière pour voir comment marche le régime de protection sociale en France, et il nous expliquera de quelle façon gérer le trou gigantesque de la «Sécu» qui tend à se creuser chaque année - mais j'imagine que pour lui, ce n'est pas un problème, l'argent poussant sur les arbres ou tombant du ciel, il pourra bien sûr combler ce déficit. Mesdames et Messieurs, il s'agit d'un débat non seulement sérieux, mais avant tout fédéral, et je regrette que M. Burgermeister, qui en aurait eu la possibilité, n'ait pas voulu siéger au Conseil national, il aurait alors contribué à résoudre la question plutôt que de vociférer ici sur quelque chose qu'il ne peut pas contrôler. (Applaudissements.)
Cela étant dit, pour revenir sur la politique publique qui nous intéresse, j'aimerais évoquer le rapport BAK. Les auteurs de cette étude - qui, je vous le rappelle, Mesdames et Messieurs, a disparu des radars alors qu'elle avait été commanditée par le Conseil d'Etat lui-même - se sont livrés à deux analyses pour chaque politique publique. La première se base sur l'indice des coûts standards: on prend les charges totales d'une politique publique et on les divise par le nombre d'habitants avant de comparer le résultat avec l'ensemble des autres cantons.
A ce jeu-là, notre politique d'action sociale n'était pas très bien notée, puisqu'on se retrouvait avec un indice des coûts standards de 203. 203, cela signifie...
Une voix. Jamais deux sans trois !
M. Yvan Zweifel. ...que les coûts par habitant étaient de 103% supérieurs à la moyenne des vingt-cinq autres cantons. Mais, et je rejoins pour une fois M. Burgermeister et Mme Marti, effectuer cette comparaison pour un canton comme Genève n'a pas de sens; en effet, il est juste de dire que notre sociodémographie particulière fait que nous dépensons davantage que dans certaines régions de Suisse centrale. Alors les experts BAK sont allés un peu plus loin, ils ont remplacé l'indice des coûts standards par un indice des coûts par cas. L'idée est de diviser le montant des charges de chaque politique publique non pas par le nombre d'habitants, mais par le nombre de bénéficiaires, puis de comparer cette donnée non pas à l'entier des vingt-cinq autres cantons, mais à une moyenne de cantons présentant un contexte sociodémographique similaire.
Eh bien si nous n'en sommes plus à 203, l'indice genevois culmine tout de même encore à 142. 142, cela veut dire qu'on dépense à Genève 42% de plus par bénéficiaire que dans les cantons comparables. C'est juste gigantesque, et je précise que c'était avant qu'on augmente le montant des subsides d'assurance-maladie suite à l'accord sur la RFFA et avant les crises que nous avons connues par la suite - je n'ose même pas imaginer ce qui se passerait si on refaisait le même exercice maintenant.
Vous trouvez dans le rapport BAK, à la page 32, me semble-t-il... (L'orateur consulte son ordinateur.) Page 32, exactement ! ...la différence de coûts par cas entre les cantons, cette fois-ci en francs. Eh bien la politique publique qui coûte le plus cher en comparaison avec tous les autres cantons, c'est celle de la cohésion sociale: un écart de 58,1 millions entre le canton de Genève et la moyenne des cantons similaires.
Oui, il faut agir pour aider les plus précarisés, c'est juste, mais nous le ferons d'une part avec une fiscalité attractive qui nous permette de garder ou d'attirer ici des contribuables afin de disposer de moyens supplémentaires pour aider les personnes précarisées, d'autre part en réorganisant enfin notre action sociale et l'Etat de manière générale pour que l'argent qui existe déjà soit distribué à ceux qui en ont réellement besoin. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Pour commencer, je vais poser une question à M. Zweifel, qui émet le constat que la politique sociale du canton de Genève coûte plus cher que celle d'autres cantons: mais où coupe-t-on pour réduire les dépenses ? On coupe dans l'aide sociale, qui est déjà calculée pour couvrir le strict minimum vital - il est d'ailleurs trop bas aujourd'hui, raison pour laquelle il y a un projet de loi pour l'augmenter -, ce qui nuit à l'intégration sociale des personnes ? On coupe dans les prestations complémentaires AVS/AI pour les retraités qui ne disposent que de très petites rentes et n'arrivent pas à en vivre ? Voilà la question. Etes-vous prêt, Monsieur Zweifel, à baisser les prestations ?
Une voix. Non.
Mme Caroline Marti. Non, voilà. C'est pourquoi nous avons fait un choix politique, un choix politique assumé qui consiste à se donner l'ambition de conduire une action sociale forte à Genève de manière à soutenir les personnes les plus vulnérables.
Je suis d'accord avec le rapporteur de deuxième minorité, M. Burgermeister, dans une certaine mesure: il est vrai qu'on aurait pu, vu le résultat financier, ou qu'on aurait dû, étant donné les besoins évidents liés notamment au covid, en faire plus pour aider les plus précaires, pour répondre à l'urgence sociale, pour mettre en place un plan de relance sociale afin d'éviter que les conséquences de la crise perdurent dans le temps. Mais il faut tout de même saluer le travail absolument remarquable accompli par les différents services, que ce soit de l'Etat - le service des prestations complémentaires, celui de l'assurance-maladie -, de l'Hospice général ou des EPI, dans un contexte de pandémie qui a vu une explosion des sollicitations auxquelles il a fallu répondre de façon prioritaire.
Citons également les différents projets menés par le département, notamment le développement du dispositif Domos ou la réalisation de la LAPSA - cela a été indiqué par le député Thévoz tout à l'heure. Par ailleurs, il faut reconnaître que si nous n'avons pas forcément pu aller plus loin en matière d'action sociale, cela ne relève pas uniquement de la responsabilité du département de la cohésion sociale, mais de celle d'une majorité parlementaire dans ce Grand Conseil.
S'agissant du bilan de l'année 2021, il faut mentionner l'impact de l'entrée en vigueur du salaire minimum, ce qui a permis de réduire un certain nombre de prestations sociales, et c'est précisément ce que les bancs de gauche martelaient année après année, à savoir que l'irresponsabilité des employeurs qui ne payaient pas suffisamment leurs employés rejaillissait directement sur le coût des prestations sociales et sur l'Etat.
En ce qui concerne la politique du handicap, nous faisons face en 2021 à une situation ou à un résultat quelque peu en trompe-l'oeil, parce qu'un certain nombre d'entrées en institutions ont été retardées en raison d'une crainte liée aux risques sanitaires, mais cela va probablement entraîner un effet de rattrapage, ce qui implique la nécessité de développer de manière très conséquente le nombre de places dans les EPH et les structures mixtes permettant des institutionnalisations à temps partiel: les personnes peuvent rester en partie à domicile et être prises en charge le reste du temps au sein d'un établissement. C'est l'un des grands défis auxquels nous aurons à faire face ces prochaines années.
Je relèverai encore la situation à l'Hospice général, qui, malgré des économies presque de bout de chandelle - il a raclé à peu près tous les tiroirs -, a fini par devoir rogner sur sa réserve et nous a alertés quant au fait que d'ici la fin de l'année 2022, celle-ci serait en dessous de zéro, ce qui est extrêmement préoccupant pour le pilotage de cette entité fondamentale.
Enfin, nous savons le contexte particulièrement difficile que connaissent les EPI depuis de très nombreuses années à cause des moyens insuffisants qui leur ont été alloués pour assumer les tâches qui leur incombent; on parle d'un déficit structurel de 4 millions par an malgré les mesures d'économies drastiques mises en place, lesquelles se répercutent aujourd'hui non seulement sur les conditions de travail, mais aussi sur la qualité de la prise en charge et la sécurité des pensionnaires. A cet égard, nous devons faire un effort supplémentaire pour stabiliser la situation, pour que les EPI sortent de la crise qu'ils ont traversée ces dernières années, notamment en leur accordant le personnel suffisant afin d'assurer un bon encadrement des bénéficiaires.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Je tiens à m'excuser auprès de Mme Marti si je me suis mal exprimé ou si elle m'a mal compris. Je n'ai jamais soutenu qu'il fallait couper où que ce soit. Ce que nous souhaitons, pour notre part, c'est que les moyens soient mieux alloués ou réalloués. J'entends le discours de Mme Marti qui consiste à dire que dans le canton où on dépense déjà le plus par bénéficiaire - et non par habitant ! -, les individus précarisés, les personnes âgées, les jeunes en difficulté seraient malmenés. Mais, Madame Marti, ces personnes-là sont-elles moins bien loties dans le canton de Vaud ? Sont-elles moins bien loties à Zurich, à Berne, à Bâle ? Non, je ne crois pas, bien au contraire. Nous demandons simplement une gestion de bon sens qui consiste à faire ce que font les autres cantons: mieux et moins cher. (Applaudissements.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, en ce qui concerne la politique publique C, il y a toujours un avantage certain à être présent lors de vos débats, d'une part parce qu'ils évoquent des dossiers fédéraux sur lesquels la marge de manoeuvre du Conseil d'Etat est relativement faible, d'autre part parce qu'on entend des discours sur la façon dont il faudrait réaliser des économies ici et là alors même que, cela a été souligné, la précarisation d'un certain nombre d'habitantes et d'habitants de notre canton constitue une réalité. Preuve en est le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale aujourd'hui, à qui nous apportons des réponses - j'y reviendrai tout à l'heure.
Permettez-moi d'abord de vous remercier pour vos encouragements que j'accueille avec gratitude et que je vais immédiatement relayer aux collaboratrices et collaborateurs. Ils en ont besoin. Les années 2020 et 2021 ont été difficiles pour chacune et chacun, bien entendu, mais particulièrement pour celles et ceux qui étaient au front, face à des situations complexes. Je pense notamment au personnel de l'Hospice général, du département, mais également des établissements accueillant des personnes handicapées, qui ont dû composer avec un contexte extraordinaire et qui ont fait preuve d'énergie, de volonté, mobilisant des ressources extrêmement fortes pour tenir le coup.
C'est important, parce que pour qu'ils parviennent justement à tenir bon, plusieurs messages étaient nécessaires: un premier message de votre parlement, qui a accordé durant l'année 2021 des moyens supplémentaires lorsqu'ils ont été sollicités; le deuxième message, c'est l'action que nous avons menée en collaboration avec différentes entités pour développer des projets et répondre aux besoins non seulement d'urgence, mais également de fond; enfin, il y a les signaux que vous envoyez aujourd'hui, au moment de tourner la page de 2021, et ce que vous en dites. Certains se sont exprimés de manière positive, d'autres plus négativement, et je peine encore à comprendre pourquoi Ensemble à Gauche n'accepte pas une politique publique qui a pourtant permis d'offrir des solutions à celles et ceux qui rencontrent le plus de difficultés, et s'obstine, année après année, à transmettre un message très négatif à toutes les personnes qui se sont engagées.
Les critiques sont toujours bienvenues lorsqu'elles sont fondées et pertinentes, mais pas lorsqu'elles frappent à faux. Quand j'entends que le SPAd connaît des dysfonctionnements, je ne peux pas adhérer à cette assertion. On prétend qu'aucune réforme n'a été entreprise: si ! Elle est menée conjointement par le Tribunal de protection de l'adulte et le Conseil d'Etat, les problèmes de gestion ont été largement traités et résorbés grâce à une nouvelle direction. Les critiques émises en filigrane de cette intervention contre le SPAd concernent au fond la question de la curatelle. Aujourd'hui, des mesures de protection sont instaurées par le tribunal et, comme dans le canton de Vaud, elles sont considérablement supérieures à celles d'autres cantons. On peut les désapprouver, mais ne pas reconnaître que le travail en ce qui concerne la protection de l'adulte a évolué est particulièrement dommage pour celles et ceux qui oeuvrent dans ce domaine.
Par ailleurs, la démonstration qui a été effectuée par vos soins s'agissant de l'Hospice général, Monsieur le député Pfeffer, doit à mon sens être améliorée. En effet, nous asséner des chiffres de 2020 sans établir de relation avec la manière dont l'Hospice général agit sur le terrain, notamment en faveur de celles et ceux qui sortent du cadre de l'assistance, c'est un peu court. D'ailleurs, la nouvelle loi sur l'aide sociale et la lutte contre la précarité, dans laquelle nous avons mis toute notre volonté, permet précisément d'atteindre cet objectif.
Il a été mentionné que le Conseil d'Etat a tardé s'agissant de l'indemnisation des travailleuses et travailleurs précaires. Le sujet de la crise sanitaire ayant déjà été abondamment commenté, je ne vais pas y revenir, mais j'aimerais citer deux dates: le 20 mars 2020, le Conseil fédéral décrétait l'état de nécessité, et c'est le 25 mai, soit à peine deux mois plus tard, que le Conseil d'Etat apportait une solution. La préparation du projet de loi sur l'indemnisation pour perte de revenu liée aux mesures de lutte contre le coronavirus - tel était le titre du PL 12723 -, entreprise avec l'ensemble des partenaires patronaux et syndicaux, a duré moins d'un mois et demi. Nous pouvons nous en féliciter, et s'il y a quelque chose à critiquer, c'est la décision d'une partie de ce Grand Conseil de combattre ce texte, ce qui nous a malheureusement conduits à devoir attendre une année avant qu'il soit mis en oeuvre.
Mesdames et Messieurs les députés, la politique publique de la cohésion sociale est hautement sensible, et je tiens à vous remercier de lui avoir alloué des moyens complémentaires; ceux-ci sont essentiels pour que nous puissions continuer à déployer le programme d'action du Conseil d'Etat et répondre aux besoins de la population concernée. Je vous remercie de votre soutien à la politique publique C. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Burgermeister, vous souhaitez encore prendre la parole sur cette politique publique ? Normalement, on ne s'exprime pas après le Conseil d'Etat, mais je vous la donne exceptionnellement.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Oui, mais là, c'est un peu particulier, Monsieur le président, merci. J'aimerais répondre très brièvement à M. Apothéloz et expliquer... (Protestations. Commentaires.)
Le président. Poursuivez, Monsieur, mais brièvement.
Une voix. Ne te laisse pas faire, je les connais !
M. Jean Burgermeister. J'attends, Monsieur le président.
Une voix. C'est pédagogique, c'est pédagogique !
M. Jean Burgermeister. Pour répondre très brièvement, donc, à M. Apothéloz... (Protestations.)
Des voix. Chut !
Le président. S'il vous plaît !
M. Jean Burgermeister. Je vous remercie, Monsieur le président. Pour répondre très brièvement à M. Apothéloz... (Protestations.) J'aimerais dire...
Des voix. Mais non !
Le président. S'il vous plaît !
M. Jean Burgermeister. ...pour lui répondre...
Une voix. On ne prend pas la parole après le Conseil d'Etat !
Le président. Cette règle ne vaut pas pendant le débat sur les comptes. Là, nous avons un régime spécial. (Exclamations.)
M. Jean Burgermeister. Je vous remercie, Monsieur le président. Visiblement, la droite n'a vraiment pas envie de m'entendre, mais enfin, elle va m'entendre ! (Exclamations.) Vous allez m'entendre !
Le président. Vous êtes en train de retarder les travaux et on risque de ne pas terminer très tôt, Mesdames et Messieurs, c'est dommage. Laissez le rapporteur s'exprimer.
M. Jean Burgermeister. Vous savez, plus vous m'interrompez, plus ça durera longtemps, mais à la fin, je finirai par parler et vous serez forcés de m'écouter.
Une voix. Mais tu n'auras plus de temps.
M. Jean Burgermeister. Pour répondre au Conseil d'Etat, parce que ce n'est pas la première fois qu'on l'entend réagir lorsque nous votons contre une politique publique ou un projet de loi, ce n'est pas aux salariés de la fonction publique - qui, c'est vrai, notamment dans le cadre de la politique publique C, ont accompli un travail admirable dans des conditions difficiles - que nous nous en prenons. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs les conseillères et conseillers d'Etat, que nous traitons ici de la gestion du Conseil d'Etat durant l'année 2021, et non du travail des employés de l'administration publique.
Alors je vous en prie, Mesdames et Messieurs, cessez de vous abriter derrière les collaborateurs, que ce soit ceux de l'Etat, de l'Hospice général ou d'autres, et assumez la politique que vous menez. Et si, comme M. Apothéloz, vous vouliez avant tout rendre hommage au travail difficile mais nécessaire des fonctionnaires, alors il aurait fallu commencer par leur verser l'intégralité de leur salaire en 2021, ce que vous avez refusé de faire... (Applaudissements.) ...car, je le rappelle, seul le groupe Ensemble à Gauche a voté en faveur de l'annuité.
Le président. Merci bien. A présent, je mets aux voix la politique publique C «Cohésion sociale».
Mise aux voix, la politique publique C «Cohésion sociale» est adoptée par 32 oui contre 24 non et 21 abstentions.
D - CULTURE, SPORT ET LOISIRS
Le président. J'appelle maintenant la politique publique D «Culture, sport et loisirs». La parole va à M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha.) Est-ce qu'on peut faire un peu de silence ?
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît, nous ne sommes pas encore à la pause !
M. Christo Ivanov. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'interviens sur la politique publique D «Culture, sport et loisirs», en particulier au sujet du sport. Après le refus du souverain, par 9 voix d'écart, du projet du Pré-du-Stand, le Conseil d'Etat et le magistrat concerné se sont tournés vers les Evaux pour installer provisoirement le centre de formation du Servette FC et du pôle football, Genève Education Football. De nombreux recours et oppositions ont été déposés et bloqueront encore le déménagement du cycle d'orientation du Renard à Balexert, il y en aura certainement pour deux à trois ans. Cette situation bloquera donc ce déménagement qui est capital, car le cycle d'orientation du Renard est dans un état de délabrement et de vétusté pathétique, avec des effondrements de plafonds dans les classes, de l'amiante, j'en passe et des meilleures.
Le choix définitif du département pour trouver une issue à ce serpent de mer, c'est de raviver le projet de la Crotte-au-Loup, projet initié et accepté par les riverains en 2009 - il y a donc treize ans -, relancé aujourd'hui par M. Apothéloz et par la commune de Vernier. A nouveau, des oppositions sont en train de se lever - partiellement, mais on peut s'inquiéter du fait que certaines oppositions ont été faites sans convoquer les gens en assemblée générale, ce qui paraît un petit peu particulier dans la commune de Vernier, surtout à Vernier-Village. Le groupe UDC collaborera et acceptera tant sur le plan cantonal que communal ce projet de la Crotte-au-Loup.
On peut se réjouir du fait qu'un crédit d'étude de 11 millions pour la future patinoire du Trèfle-Blanc ait été voté dans le but de réaliser cette infrastructure que tout le monde attend et qui devrait arriver aux alentours de 2028, on l'espère.
Il convient par ailleurs de relever la constitution entre le canton et les communes d'un fonds de soutien de 1 million en 2021 et de 1 million en 2022 destiné aux clubs ayant essuyé des pertes. En 2021, seulement 850 000 francs ont été dépensés et il semblerait qu'en 2022, ce montant sera moindre, ce qui permettra d'avoir un solde non dépensé, et c'est tout à l'honneur du département.
Enfin, il convient de relever que les RHT et les APG versées aux clubs qui engageaient des salariés leur ont permis de traverser cette difficile période de la covid-19. Le commissaire UDC s'est abstenu à la commission des finances et le groupe UDC en fera de même sur cette politique publique. Je vous remercie.
M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vais prendre la parole sur mon sujet favori: la culture - comme chacun sait ! Après les épines, il va y avoir quelques roses. Je veux dire par là que le Conseil d'Etat a pris son bâton de pèlerin, après qu'on l'a poussé, et a lancé une certaine démarche auprès des associations des milieux culturels, qui lui ont permis de lancer son avant-projet de loi sur la culture.
La culture, c'est vaste, bien sûr: cinéma, ateliers du livre, bande dessinée, peinture, sculpture, théâtre. A propos de théâtre, il faut bien avoir à l'esprit qu'il existe à Genève un certain nombre de petites salles qui réalisent un travail admirable, je pense par exemple à La Parfumerie. Mais il y a eu en 2019, il faut s'en souvenir, une initiative partie des milieux de la culture et acceptée par plus de 83% des votants. Ce texte demandait une implication de l'Etat ainsi qu'un partage des tâches entre l'Etat et les communes. Il faut parler un peu concrètement: là, nous entrons dans ce que nous appelons les grandes catégories, c'est-à-dire les grandes institutions. Il y en a plusieurs, mais je vais peut-être commencer par la Nouvelle Comédie.
S'agissant de cette dernière, Dieu merci, l'Etat... nous nous sommes impliqués, puisque nous avons participé pour moitié au crédit de construction. Mais il y a aussi l'opéra, le Grand Théâtre, un outil d'importance régionale et même au-delà. Je rappelle que le Grand Théâtre de Genève est l'une des dix plus grandes scènes d'Europe et que 350 personnes y travaillent. Il perpétue d'ailleurs des métiers qui, sans lui, pourraient disparaître - je pense à des professions comme courtepointière, etc. Il s'agit d'un personnel financé pour moitié par la fondation et, pour l'autre moitié, par la Ville de Genève. Cet outil culturel, comme je le disais, est très important, mais il est, à l'heure où je vous parle, presque entièrement financé par la Ville de Genève, pour près de 63 millions, ce qui est absolument considérable ! Les communes - l'ACG - fournissent 6 millions, ce qui est tout à fait louable, intéressant, mais notre Etat n'y contribue que pour 160 000 francs. C'est totalement ridicule ! Totalement ridicule !
Il faut avoir à l'esprit aussi que ce financement de 63 millions subventionne les places ! C'est-à-dire que quand vous, nous, nous nous asseyons sur un siège du Grand Théâtre, nous sommes financés à hauteur de 250 francs par la Ville, ce qui est quand même extraordinaire ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Les habitants de la Ville de Genève le sont, mais tout autant que ceux des communes avoisinantes - Collonge-Bellerive, Cologny, Satigny, etc. - et bien au-delà, puisque la France voisine vient aux spectacles dans des cars. Nous subventionnons donc très largement la culture, le Grand Théâtre, à l'échelon régional. Alors il faut le dire à un moment donné: l'Etat doit prendre ses responsabilités. Il faut qu'au travers de ce nouveau projet de loi, que j'accueille avec...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Christian Zaugg. Oui, oui. Il faut que nous nous impliquions davantage. Il faut, comme le demandait l'initiative...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Christian Zaugg. ...que nous participions à la culture. Vive la culture !
M. Emmanuel Deonna (S). Mesdames et Messieurs les députés, aides complémentaires aux revenus, bourses, soutiens financiers aux projets de transformation et aux organisations culturelles: l'Etat de Genève a dû indemniser à hauteur de plusieurs dizaines de millions de francs les acteurs et entreprises culturelles très durement impactées par la crise sanitaire. Ce secteur est plongé dans une crise sans précédent. Les indemnités pour pertes financières ont été prolongées jusqu'à fin juin 2022, l'aide d'urgence ainsi que les projets de transformation jusqu'à fin 2022. L'incertitude due à la situation sanitaire a bouleversé le modèle économique du secteur. Ses acteurs se demandent aujourd'hui: est-ce que le public sera au rendez-vous ? Est-ce que les différents partenaires répondront présent au niveau financier à l'avenir ? Si par malheur de nouvelles restrictions s'avèrent indispensables, est-ce que l'Etat assumera les conséquences économiques ?
Le problème du système d'indemnisation mis en place est lié à son calendrier: trop souvent, les mesures ont été prises trop tardivement; le délai de mise en oeuvre de l'indemnisation a retardé les effets escomptés. Les projets de transformation sont la seule mesure fédérale tournée vers une reprise d'activité. Les critères d'octroi de ces projets ont été débattus. Ces projets de transformation permettent de prendre en compte la collaboration d'entreprises culturelles avec des actrices et acteurs culturels. Depuis peu, ceux-ci peuvent déposer des demandes pour de tels projets de transformation en se constituant en communautés de travail juridiquement indépendantes. Cependant, les possibilités existantes sont trop souvent mal connues. Le 19 mai dernier, le Grand Conseil a voté les crédits nécessaires à l'application du dispositif fédéral, ce qui est une très bonne nouvelle. Cependant, il faudrait prévoir une incitation à l'engagement de travailleurs culturels locaux dans le cadre des projets de transformation. Il serait aussi judicieux de les favoriser pour les subventions allouées dans le cadre ordinaire, en tout cas pour l'année à venir, vu la situation très fragile.
Sur le plan législatif, mon préopinant l'a rappelé, il s'agit aussi maintenant de mettre en oeuvre un nouveau projet de loi sur la culture, que ce parlement n'a pas encore voté. Le département de la cohésion sociale a mené des consultations très larges avec des acteurs culturels et les partenaires associatifs et politiques. La question du financement des institutions à rayonnement international comme le Grand Théâtre devra être résolue. Par ailleurs, il ne faut pas trop tarder, Mesdames et Messieurs les députés, parce que ce nouveau projet de loi sur la culture suscite beaucoup d'attentes, non seulement de la part des milieux concernés, mais aussi de la part de la population en général, qui a voté l'initiative 167 voici trois ans.
Il y a quand même eu plusieurs signaux encourageants pour la culture. On peut mentionner les succès de la Nouvelle Comédie et du Théâtre de Carouge; le projet de réhabilitation de Porteous; le projet de musée de la bande dessinée, qui a bien avancé et se concrétisera au Grand-Saconnex, à la villa Sarasin; le Fonds cantonal d'art contemporain, qui a réalisé plus de trente acquisitions auprès d'artistes genevois; un projet ambitieux, «Ge-lis.ch», qui vise à favoriser l'accès aux livres pour le plus grand nombre.
Dans le domaine sportif, M. Ivanov l'a rappelé, on relève l'adoption d'un crédit important de 11,7 millions pour la patinoire du Trèfle-Blanc; un contrat de prestations renouvelé - certes, seulement pour une année - avec la Fondation du Stade de Genève, et un projet pour le nouveau pôle football, qui devrait être accueilli à la Crotte-au-Loup, à Vernier, pour le Servette FC; des engagements qui se sont pérennisés de la part du Fonds du sport et de l'ACG pour venir en aide aux associations sportives qui se trouvent en difficulté financière; une campagne de promotion de la pratique sportive, «Trouve ton club». De plus, les travaux autour de la prévention de la violence dans le football amateur ont avancé: un vrai programme est maintenant mis en oeuvre. Sont également lancés des programmes pour les publics dits empêchés, les personnes en situation de handicap ou migrantes: des projets généreux et ambitieux ont été soutenus.
Le parti socialiste se réjouit de ces projets qui avancent et rayonnent dans le domaine de la culture, du sport et des loisirs. Ils sont vraiment fondamentaux, de notre point de vue, pour le vivre-ensemble dans notre canton. Je vous remercie.
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, je dirai quelques mots au sujet de la culture. Nous ne pouvons que nous féliciter de l'aide à la culture apportée pendant la période covid: elle a permis à de nombreuses entités culturelles de survivre. En référence à l'IN 167, il est important de se poser la question d'une politique culturelle cohérente à Genève, pour éviter un arrosage culturel sans orientation cohérente, précisément. Nous regrettons la ligne supplémentaire qui aurait pu être votée pour une Cité de la musique, ce qui lui aurait permis d'exister, à l'instar des nombreux organismes culturels déjà soutenus comme l'OSR, le musée de la Croix-Rouge, le MAMCO ou d'autres encore.
S'agissant du sport, on ne peut que déplorer l'influence tout de même modeste du canton sur la politique sportive. Par exemple, le soutien de la Ville et de sa maire Barbey-Chappuis, sans lequel le Servette FC n'aurait pas vu la naissance de nouveaux terrains pour son équipe, reste déterminant.
Nous nous félicitons du dépôt du crédit d'étude pour la nouvelle patinoire que tout le monde, ou presque - et je regarde quelques rangs de gauche -, attend. Je pense qu'il est nécessaire de rappeler que cette pandémie, en reléguant le sport aux activités non nécessaires, a entraîné de nombreux problèmes de santé, physique ou même psychique. Il est primordial de ne pas répéter la même erreur lors de la prochaine pandémie qui nous attend, quand elle se présentera. Il faut accorder une priorité au maintien de l'activité physique pour nos associations, nos clubs et toutes les personnes qui s'y adonnent.
Enfin, déplorant le phénomène de la violence dans le sport, lamentablement illustré par certaines rencontres de football, nous félicitons le magistrat d'avoir pris le problème à bras-le-corps. Il est primordial de n'accorder aucune tolérance aux auteurs de ces violences; il n'y a aucune place sur nos terrains pour ces débordements.
Pour ce qui est des loisirs, et je terminerai sur ce point, le programme «GE découvre» apporte une offre de loisirs aux jeunes des catégories socio-économiques défavorisées. Malheureusement, cette offre reste largement insuffisante pour les besoins de la population. Rappelons simplement que les vacances d'été durent deux mois et que cette offre ne couvre absolument pas les quatre ou cinq semaines de vacances habituelles de la population non enseignante. Comment occuper nos enfants alors que l'offre ne couvre pas ces deux mois sans scolarité ? A l'heure où se tient le débat au sujet du congé parental permettant aux parents de passer plus de temps auprès de leurs enfants, il est nécessaire de voir l'offre de loisirs subventionnée élargie à l'ensemble de l'été. Les familles stressées qui doivent jongler avec le résidu de congés des vacances estivales en seront reconnaissantes.
Pour cette raison, et pour les nombreux défis qui nous attendent, le futur ex-PDC, Le Centre, votera naturellement cette politique publique. Je vous remercie.
M. Raymond Wicky (PLR). J'aimerais tout d'abord rendre hommage à notre collègue Zaugg, qui a décliné, comme il l'a fait pas plus tard que mardi, il y a deux jours, son plaidoyer en faveur du Grand Théâtre, et on salue bien entendu sa ténacité. Il est vrai que les choses peuvent évoluer. Je tiens quand même à rappeler - ça, il a oublié de le dire - que si la Ville de Genève supporte la grande majorité des frais, c'est quand même parce que la Ville de Genève, il y a un certain nombre de décennies, a pris la résolution de conserver la dimension culturelle et les sapeurs-pompiers et qu'on avait à l'époque, en substance - il y avait d'autres éléments -, confié à l'Etat la voirie ainsi que la dimension scolaire. La charge inhérente au Grand Théâtre est la conséquence de cette décision qui ne date pas d'hier matin. Ça fait des décennies !
Maintenant, encore une fois, comme je viens de le dire, en ce qui concerne notre groupe, nous sommes tout à fait prêts à examiner le futur projet de loi. Je suis content que M. Zaugg ait eu la possibilité de voir un avant-projet, ce que nous n'avons pas eu dans le cadre de la députation. Nous attendons donc que le magistrat concerné ou le Conseil d'Etat nous transmette un projet qu'il aura mis sous toit. A ce moment-là, nous pourrons statuer, mais, s'il vous plaît, ne tirons pas trop de plans sur la comète, attendons d'avoir quelque chose de concret dans les mains ! Je vous remercie.
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vous remercie pour l'accueil de cette politique publique D, qui a beaucoup été mobilisée au cours de cette année 2021 sur plusieurs plans, je vais rapidement y revenir.
Sur le plan sportif, on peut noter une évolution de la stratégie concernant notre équipe qu'est le Servette FC. Elle se décline sur trois points: d'abord, l'accueil de l'Académie aux Evaux. Le Conseil d'Etat s'était engagé à ce que cet accueil soit temporaire. Par ailleurs, nous avons pu obtenir un accord avec la Ville de Genève et le Servette FC pour que l'équipe professionnelle puisse s'entraîner au centre sportif de Vessy - il s'agit d'un projet que nous finançons entièrement -, la destination finale pour l'Académie et l'équipe professionnelle étant Vernier. Nous avons un peu de temps pour créer les bonnes conditions de réception de ce projet important. Le premier élément est effectivement l'attitude favorable et constructive du Conseil administratif de la Ville de Vernier ainsi que des habitantes et des habitants prêts également à challenger ce projet pour l'accueillir positivement dans leur quartier.
Autre point, la patinoire. Un pas important a été fait vers la concrétisation avec le crédit d'étude, qui a été voté par votre parlement en début d'année et qui nous permettra à la fin de l'été de passer un autre cap, à savoir celui du concours, et de confirmer l'objectif de la réalisation de cette infrastructure d'ici à 2028.
S'agissant de la culture, oui, le peuple genevois a voté en mai 2019 à 83% un changement constitutionnel: l'initiative 167 permet d'inscrire une volonté partagée de votre parlement, du Conseil d'Etat et du peuple genevois de voir le canton de Genève s'impliquer de manière plus importante dans la coordination et la concertation avec les milieux culturels, ainsi qu'un engagement plus fort de l'ensemble des communes genevoises. Ce changement constitutionnel est important puisqu'il permettra le retour du canton dans le financement de la création, ce qui n'existait plus depuis l'adoption de la loi sur la répartition des tâches et son train de lois relatif à la culture.
Néanmoins, dans l'intervalle, avant que nous puissions élaborer ce que nous avions imaginé, la gestion de la crise du covid dans le monde de la culture a pris une place massive au sein de l'office cantonal de la culture et du sport: nous avons géré plus de 34,5 millions de soutien aux milieux culturels, les institutions comme les personnes. Il était nécessaire, et je l'assume, que la priorité soit donnée à celles et ceux qui ont tout perdu du jour au lendemain et qui devaient obtenir une réponse, pas seulement un soutien comme ça, en l'air, mais bien un soutien également financier. Nous avons pu mobiliser l'Association des communes genevoises, la Ville de Genève, l'organe genevois de répartition des bénéfices de la Loterie romande et, bien entendu, le Conseil d'Etat, avec votre appui, puisque les trois projets de lois que vous avez votés ont permis la concrétisation de cette aide ô combien opportune. Dès lors que l'ensemble du dispositif destiné aux artistes et aux institutions a été mis en place, nous avons pu nous remettre à l'oeuvre s'agissant de l'initiative 167 et nous avons fait en sorte que l'avant-projet de loi soit mis en consultation - Monsieur le député, le PLR a bel et bien répondu à la consultation. Grâce aux propositions qui nous ont été envoyées, notamment de l'ensemble des partis, nous pouvons finaliser ce projet de loi pour la fin de l'été; je le présenterai au Conseil d'Etat en septembre, de sorte qu'il soit traité par votre commission le plus rapidement possible.
Oui, la pandémie a fondamentalement bouleversé le monde culturel et a changé la donne sur différents plans, notamment, bien sûr, la condition salariale des artistes, la façon dont les institutions les soutiennent ainsi que la manière dont réagit le public: pour certaines institutions, on constate une marge de progression pour ce qui est de retrouver un public présent et dynamique. Grâce à votre soutien, nous avons pu accompagner et mettre en oeuvre le processus consistant à faire en sorte que le public se réapproprie les milieux culturels, et j'aimerais encore une fois vous en remercier.
On a évoqué l'importance du sport. Vous avez raison, Monsieur le député: il est essentiel de faire en sorte que notre population soit plus active par le sport ou l'activité physique. C'est toujours un peu curieux d'entendre que le canton ne fait pas assez pour le sport. Il s'agit pourtant de la stricte application de la loi sur la répartition des tâches en matière de sport que votre parlement a votée. Elle fixe que l'activité des clubs relève des communes et que le canton s'occupe de l'élite individuelle et collective s'agissant de notre équipe phare pour le pôle football et de la patinoire. Si votre revendication en matière d'activités cantonales est soutenue, nous pourrons évidemment l'étudier - je crois que différentes motions ont été envoyées à votre commission - et peut-être nous poser des questions concernant la répartition des tâches.
Enfin, pour ce qui est des loisirs, j'aimerais immédiatement vous rassurer: notre programme «GE découvre» est en effet rapidement choisi par les parents comme une solution très utile permettant à leurs enfants de découvrir des activités écologiques, sportives, culturelles et de loisirs durant l'été. Fort heureusement, nous n'assumons pas seuls, avec ce seul programme, les activités de l'été. Nous pouvons compter sur les activités du Groupe de liaison genevois des associations de jeunesse, avec des camps ou des centres aérés par exemple, et, bien entendu, sur celles de la Fondation genevoise pour l'animation socioculturelle, en particulier avec les maisons de quartier, qui offrent tout au long de l'été des prestations destinées à notre jeune population, enfants ou adolescents. Nous pouvons ainsi répondre aux besoins notamment des personnes qui arrivent d'Ukraine; nous avons à ce titre augmenté de plus de mille le nombre de places pour donner la possibilité à celles et ceux qui en ont besoin de découvrir de nouvelles activités sportives, culturelles et de loisirs et d'obtenir des réponses, grâce à l'activité de la FASe, ce dont nous sommes particulièrement soucieux.
Je vous remercie de votre soutien à la politique publique D.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur cette politique publique.
Mise aux voix, la politique publique D «Culture, sport et loisirs» est adoptée par 42 oui contre 8 non et 26 abstentions.