Séance du
vendredi 2 juillet 2021 à
16h05
2e
législature -
4e
année -
2e
session -
14e
séance
La séance est ouverte à 16h05, sous la présidence de M. Diego Esteban, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, Anne Emery-Torracinta, Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet, Thierry Apothéloz et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jacques Apothéloz, Delphine Bachmann, Diane Barbier-Mueller, Antoine Barde, Jean Batou, Jennifer Conti, Marc Falquet, Jean-Marc Guinchard, Serge Hiltpold, Youniss Mussa, Jean Romain, Romain de Sainte Marie, Patrick Saudan, Adrienne Sordet, Vincent Subilia et Christian Zaugg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Pierre Bayenet, Nicolas Clémence, Joëlle Fiss, Jean-Charles Lathion, Badia Luthi, Xavier Magnin, Patrick Malek-Asghar, Eliane Michaud Ansermet, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti et Philippe de Rougemont.
Annonces et dépôts
Néant.
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez reçu par messagerie les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Papyrus : 9% de fraude et beaucoup de dégâts pour Genève ! (QUE-1559)
Question écrite urgente de M. Guy Mettan : Tous les contrôles de conformité ont-ils été effectués pour le projet immobilier de la « Chevillarde » ? (QUE-1560)
Question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Notre démocratie est-elle condamnée à faire le trottoir ? (QUE-1561)
Question écrite urgente de Mme Nicole Valiquer Grecuccio : Absentéisme et heures supplémentaires dans les établissements pénitentiaires : où est-on depuis près de 2 ans et quel bilan tirer suite à la création du secteur psychosocial ? (QUE-1562)
Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : 14 heures de travail trois jours de suite : est-ce humainement acceptable ? (QUE-1563)
Question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Vaccination des sans-papiers contre le COVID-19 (QUE-1564)
Question écrite urgente de M. André Pfeffer : Frein au déficit : comment sont choisis les impôts à augmenter ou les charges à diminuer ? (QUE-1565)
Question écrite urgente de M. Jean Romain : Maltraitance des directeurs du secondaire II, on a besoin d'explications plus précises (QUE-1566)
Question écrite urgente de M. Yvan Zweifel : Comment l'Etat prend-il en considération, dans ses marchés, les hausses massives des prix des matériaux et les difficultés d'approvisionnement affectant actuellement le secteur de la construction ? (QUE-1567)
Question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : Projet immobilier au Petit-Saconnex, habitant-e-s dans l'ignorance ? (QUE-1568)
Question écrite urgente de M. Bertrand Buchs : Quand les médecins pourront-ils, enfin, vacciner dans leur cabinet ? (QUE-1569)
Question écrite urgente de M. Raymond Wicky : Recyclage des matériaux de construction : veut-on délocaliser ou utiliser la zone industrielle ? (QUE-1570)
Question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : Sommet américano-russe du mercredi 16 juin : quel coût total pour les collectivités publiques ? (QUE-1571)
Question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : Rentrée scolaire 2021, un pas de plus vers le tout-numérique ? (QUE-1572)
Question écrite urgente de Mme Natacha Buffet-Desfayes : Dispositif sport-art-études (SAE) en classes spécifiques. Quel bilan, quelles garanties, quelles améliorations ? (QUE-1573)
Question écrite urgente de M. Charles Selleger : Aumônerie de l'université : quand l'Etat va-t-il faire respecter la loi ? (QUE-1574)
Question écrite urgente de M. Patrick Dimier : Le taux d'absentéisme, le mal endémique (QUE-1575)
Question écrite urgente de Mme Ana Roch : Indemnisation pour perte de revenus liée aux mesures de lutte contre le corona. Que reste-t-il ? (QUE-1576)
Question écrite urgente de Mme Ana Roch : Etat-major chez Mme Fischer (QUE-1577)
Question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Représailles au DEE ? (QUE-1578)
Question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Suite à la non-réponse à ma question QUE 1543 concernant la fermeture de ProFormations (QUE-1579)
Question écrite urgente de M. Patrick Dimier : La multiplication des parachutes dorés est-elle une nouvelle forme de gouvernance à Genève alors que c'est plutôt une pratique française ? (QUE-1580)
Question écrite urgente de Mme Marjorie de Chastonay : Enseignement spécialisé : un enseignement au rabais ? (QUE-1581)
Question écrite urgente de Mme Xhevrie Osmani : Quels sont les usages qui s'appliquent dans le secteur de l'assistance au sol à l'AIG ? (QUE-1582)
Question écrite urgente de Mme Xhevrie Osmani : Quel est l'encadrement légal de la demande d'attestation de non-poursuite à l'Etat et quelles en sont les pratiques ? (QUE-1583)
Question écrite urgente de Mme Marjorie de Chastonay : Antennes 5G et santé publique (QUE-1584)
Question écrite urgente de M. Emmanuel Deonna : L'Etat de Genève va-t-il se désengager de la FASe ? Comment le Conseil d'Etat organise-t-il la consultation au sujet de la politique en matière d'animation socioculturelle ? (QUE-1585)
Question écrite urgente de M. Emmanuel Deonna : Quelle politique du Conseil d'Etat face au refus du peuple suisse de la loi sur le CO2 ? (QUE-1586)
QUE 1559 QUE 1560 QUE 1561 QUE 1562 QUE 1563 QUE 1564 QUE 1565 QUE 1566 QUE 1567 QUE 1568 QUE 1569 QUE 1570 QUE 1571 QUE 1572 QUE 1573 QUE 1574 QUE 1575 QUE 1576 QUE 1577 QUE 1578 QUE 1579 QUE 1580 QUE 1581 QUE 1582 QUE 1583 QUE 1584 QUE 1585 QUE 1586
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également reçu par messagerie les questions écrites suivantes:
Question écrite de M. Sandro Pistis : Naturisme au bord de l'Allondon : quel est l'encadrement de cette pratique ? (Q-3859)
Question écrite de M. Pierre Eckert : A quoi servent les cotisations à l'Association suisse de l'industrie gazière (ASIG) ? (Q-3860)
Question écrite de Mme Léna Strasser : Unité de formation de base de l'HG : quel suivi, quels résultats, quel avenir ? (Q-3861)
Question écrite de Mme Dilara Bayrak : Quelles perspectives pour le domaine de la biotechnologie à Genève ? (Q-3862)
Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Premier débat
Le président. Nous reprenons le programme des urgences avec le PL 12990, classé en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz pour la présentation de cet objet.
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vous remercie d'avoir accueilli favorablement cette demande d'urgence. Le PL 12990 nécessite effectivement une réponse rapide de votre part, qui nous permettra de concrétiser l'ordonnance fédérale s'agissant des indemnités pour le secteur culturel dans notre canton. Ce secteur est particulièrement meurtri par les différents arrêts et, même si aujourd'hui nous constatons de la part du Conseil fédéral des propositions visant à alléger ou augmenter la jauge, il n'en demeure pas moins que la reprise est difficile pour un certain nombre d'artistes et que les entreprises culturelles sont très fragilisées par ce qu'elles ont vécu depuis un an et demi. Cela dit, l'ordonnance 1 du Conseil fédéral - qui a été mise en oeuvre ensuite par le vote favorable de votre Conseil de la loi sur l'atténuation des conséquences économiques du coronavirus dans le secteur de la culture - a permis, durant l'année 2020, de combler les pertes grâce à des indemnités versées aux entreprises culturelles.
Avec le présent projet de loi, le Conseil d'Etat a l'honneur de vous présenter un dispositif légal comprenant trois volets. A travers le premier, il s'agit là encore de combler par des indemnités les pertes liées à la pandémie et à la reprise qui se trouve être plus lente que prévu. Le Conseil fédéral, via son ordonnance 2, a prévu une fois encore une aide de la Confédération, selon le même principe adopté durant l'année 2020, c'est-à-dire qu'un franc investi par le canton de Genève est égal à un franc investi par la Confédération.
La nouveauté de ce projet de loi réside dans les deux points suivants: tout d'abord, le Conseil fédéral, via son ordonnance 2, a permis d'accompagner les entreprises culturelles avec des projets de transformation. En quoi consistent ces projets de transformation ? Au fond, l'idée est d'arriver à faire en sorte que les entreprises culturelles de notre canton puissent s'adapter aux circonstances actuelles et développer de nouvelles stratégies. En gros, il s'agit pour Genève d'avoir un laboratoire avec des possibilités d'accompagner celles et ceux qui s'investissent dans ce domaine, pour leur permettre de continuer à travailler dans un secteur dans lequel nous avons largement investi - je pense à la formation, mais aussi à l'ensemble des processus budgétaires proposés.
Enfin, la troisième volonté, le troisième but de ce projet de loi se concrétise par des mesures de soutien à la relance culturelle à laquelle nous avons souhaité contribuer au cours de cette année 2021. Ainsi, le PL 12990 vous permettra d'une part de prendre la mesure de l'engagement très fort de notre canton à l'égard du secteur culturel et d'autre part d'éviter des ruptures massives de l'activité culturelle. Je le précise, parce que le dernier sondage des milieux intéressés montrait que 43% des artistes étaient prêts à renoncer à leur activité, alors même qu'ils ont bénéficié d'une formation adéquate et qu'ils ont reçu un soutien de la part de la Confédération et du canton. Il s'agit là encore de préserver la substance culturelle de notre canton et, partant, de soutenir ce secteur.
Le dispositif prévoit in fine une aide pour le secteur administratif, chargé de délivrer les prestations tant aux entreprises qu'aux actrices et acteurs culturels. Ce dispositif est aussi financé par la Confédération, à hauteur de 3%, ce que nous avons obtenu de haute lutte, étant donné que le Conseil fédéral n'avait pas prévu de soutien aux cantons pour la délivrance des prestations.
Ce projet de loi, Mesdames les députées, Messieurs les députés - et je terminerai là, Monsieur le président -, est important: il nous permettra de verser les indemnités aux personnes concernées ainsi qu'aux institutions culturelles. Je vous remercie d'ores et déjà de votre accueil favorable à celui-ci, ainsi qu'à la clause d'urgence qu'il prévoit. Merci beaucoup.
M. Boris Calame (Ve). Monsieur le président, chères et chers collègues, ce projet de loi traitant des aides financières à la culture est tellement bienvenu, mais terriblement tardif ! Il s'applique en effet à la période allant du 26 septembre 2020 au 31 décembre 2021, soit une période de quinze mois, qui a débuté il y a plus de neuf mois déjà. La réponse du Conseil d'Etat du 19 mai à la question écrite urgente 1533, qui l'interrogeait sous le titre «Une culture oubliée dans les aides de l'Etat ?», donne des chiffres effarants sur le taux de réponses positives du département aux demandes du monde de la culture: 11% pour les entreprises sur 168 demandes, 0% pour les indépendants sur 45 demandes et, enfin, 20,5% pour les projets de transformation sur 254 demandes.
Alors même que la situation du monde de la culture est dramatique, il faut être conscient que l'impact de cette crise sur la culture sera réellement palpable dans quelques années seulement. Il est donc grand temps de se réveiller avant qu'un trop grand nombre d'acteurs culturels n'ait abandonné la profession, par dépit ou par obligation. Ils et elles ne pourront alors plus nourrir et questionner nos esprits.
Malgré la très forte mobilisation des milieux culturels, notamment à travers le mouvement «No culture, no future», la précarité s'y renforce au quotidien. C'est aussi tout un écosystème composé de nombreux métiers qui est menacé ou en cours d'effondrement. Pour faire face aux situations d'urgence financière, auxquelles sont confrontés depuis plus d'une année nombre d'entreprises, d'actrices et d'acteurs culturels, il est particulièrement surprenant que le département propose des avances limitées à 40% de l'indemnisation demandée, celle-là même qui est limitée à 80% des pertes financières. Cela signifie qu'une avance d'urgence, aujourd'hui, sera seulement de 32%. Mais qui peut vivre avec 32% de son revenu - sous réserve qu'il soit versé en temps et en heure -, d'autant plus s'agissant de métiers qui offrent des revenus souvent précaires ?
Nous invitons le département à répondre pleinement et rapidement aux nombreuses demandes en attente, voire en souffrance, pour enfin soutenir plus sérieusement le monde de la culture, qui se trouve dans un profond désarroi financier. Les Verts voteront ce projet de loi, mais regrettent très fortement le caractère tardif et la lenteur du soutien au monde de la culture. Je vous remercie.
M. Nicolas Clémence (S), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, la crise sanitaire que nous connaissons depuis mars 2020 a eu et continue d'avoir un impact majeur sur la culture et ses acteurs. Bien que la situation semble s'améliorer ces dernières semaines, rien encore ne permet d'affirmer que cette crise, qui s'inscrit dans la durée depuis seize mois, est derrière nous. Certaines entreprises culturelles, en particulier dans l'événementiel, subissent encore des restrictions et doivent mettre en place des mesures coûteuses pour poursuivre ou reprendre certaines de leurs activités et tenter de survivre.
Le projet de loi qui nous est soumis ce soir par le Conseil d'Etat vise à prolonger jusqu'à la fin de l'année 2021 des aides adoptées déjà en 2020 par ce Grand Conseil, et ce en application de l'ordonnance fédérale covid culture 2. La crise a contraint les acteurs culturels à réduire leurs activités et même à les cesser totalement pendant plus d'une année, et cela perdurera malgré la reprise progressive qui se dessine. En effet, les productions qui pourront être reprogrammées le seront sur une période prolongée, avec souvent des effets d'embouteillage; certaines ne pourront même jamais avoir lieu. Certains investissements réalisés ont été purement et simplement perdus ou rendus inutiles par ces fermetures ou ces reports.
Ce projet de loi est donc une participation cantonale importante à une aide décidée par la Confédération, qui y contribue pour moitié. La part cantonale sera, de plus, couverte conjointement et solidairement par la Loterie romande, l'Association des communes genevoises et la Ville de Genève. Il s'agira dès lors par ce dispositif conjoint d'apporter un soutien crucial aux entreprises et institutions culturelles, aux associations, mais aussi aux indépendants et aux intermittents, car ces derniers passent souvent entre les mailles du filet et connaissent ainsi un statut précaire.
Ce projet de loi offre un accompagnement à la reprise culturelle, avec des aides complémentaires sous forme de bourses, des aides aux projets de transformation, qui permettent de s'adapter à la crise sanitaire, notamment avec la mise en place de mesures visant à conserver son public, voire à l'élargir, ou encore des aides ponctuelles à l'innovation, avec de nouveaux lieux et de nouvelles formes culturelles. Le parti socialiste soutiendra ce texte et vous invite à faire de même. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). Ce projet de loi propose des aides financières aux entreprises culturelles ainsi qu'aux actrices et acteurs culturels. Il s'agit plus précisément d'accorder des indemnisations pour couvrir jusqu'à 80% des pertes financières, mais aussi des contributions à des projets de transformation. De plus, il est question d'aides complémentaires cantonales, telles que des bourses, des aides exceptionnelles et des aides ponctuelles. Qu'entend le Conseil d'Etat par aides exceptionnelles et complémentaires ? Personne ne le sait ! C'est flou et confus !
Les montants des sommes allouées pour ces financements sont également peu explicites. Par exemple, le crédit demandé pour la période de septembre à décembre 2020 se monterait à environ 3,8 millions de francs et celui pour la période de janvier à décembre 2021 à environ 11,2 millions. Il y aurait de plus des financements complémentaires pour 2021 de l'ordre de 15,7 millions et des financements supplémentaires d'à peu près 4,95 millions, sans compter un crédit de 1,3 million pour des frais administratifs. Par ailleurs, le projet de loi prévoit à l'article 7, alinéa 6, que la Ville de Genève, l'Association des communes genevoises et l'organe genevois de répartition des bénéfices de la Loterie romande y participent également. Mais aucune idée pour quel montant ! Les modalités pour ces collaborations seront définies par une convention, qui viendra ultérieurement.
Pour le groupe UDC, le PL 12990 doit absolument être renvoyé à la commission de l'économie pour y être étudié et analysé. Si cette demande devait être rejetée, le groupe UDC refuserait alors ce projet de loi. Merci de votre attention.
Le président. Merci. Il est pris note de votre demande, qui sera traitée à la fin des débats. Je cède maintenant la parole à M. le député Jean Burgermeister.
M. Jean Burgermeister (EAG). Merci, Monsieur le président. Effectivement, le secteur culturel est l'un des secteurs les plus touchés par la crise, puisque la plupart de ses activités ont été rendues impossibles, et ce depuis le début de la crise du covid. C'est aussi malheureusement, bien souvent, l'un des secteurs les plus oubliés des autorités en ce qui concerne les aides essentielles aux entreprises ainsi qu'aux acteurs et aux actrices culturels. Cette difficulté provient notamment du fait qu'il s'agit d'un domaine qui connaît une grande précarité, y compris dans son fonctionnement normal, et donc des difficultés à faire des calculs quant aux indemnisations pour pertes de revenus, s'agissant de personnes qui bien souvent n'ont pas des revenus tout à fait réguliers.
A ce titre, Ensemble à Gauche votera naturellement le projet de loi du Conseil d'Etat, mais nous regrettons, comme d'autres avant, qu'il arrive aussi tard. Malheureusement, il servira à peine à combler les manques les plus criants qui se font sentir depuis de nombreux mois dans ce secteur.
Par ailleurs, notre groupe a tout de même déposé un amendement pour demander aux entreprises culturelles de respecter les usages professionnels dans leur secteur d'activité, comme nous l'avions fait pour les aides aux entreprises, afin de s'assurer que l'argent public ne soit pas dépensé sans aucune condition - ne serait-ce que les conditions minimales pour les salariés.
M. Jacques Blondin (PDC). Vous pouvez lire dans l'exposé des motifs qui accompagne ce projet de loi qu'un sondage effectué auprès des milieux culturels romands révèle que 43% des actrices et acteurs culturels romands craignent de devoir mettre un terme à leur activité pour des raisons financières. Ce chiffre parle de lui-même. Il est vrai que la culture a été largement oubliée dans cette pandémie dramatique qui a touché tous les milieux; les causes sont multiples, je ne vais pas m'y attarder, mais mieux vaut tard que jamais, dirais-je. Il est évident qu'il est indispensable maintenant d'intervenir pour aider tous ces secteurs culturels à tous les degrés qui ont été présentés par le conseiller d'Etat.
Bien sûr, nous nous opposerons au renvoi en commission, parce que l'urgence prime - il est déjà tard. Alors, pour éviter qu'il ne soit trop tard, nous vous invitons à soutenir ce projet et à voter massivement en faveur de la culture qui, ne l'oublions pas, fait la qualité de notre vie et de notre ville. Merci.
M. Jacques Béné (PLR). Le PLR va également voter ce texte. On aurait effectivement apprécié qu'il soit présenté au préalable à la commission de l'économie, comme cela a été fait pour le projet de loi sur les RHT qu'on a traité hier. Il aurait été assez bienvenu de la part du Conseil d'Etat de venir le présenter; malheureusement, cela n'a pas été le cas. Cela dit, je ne pense pas qu'un renvoi en commission soit justifié: les explications contenues dans l'exposé des motifs et le fait qu'il y ait une référence aux lois-cadres fédérales sont plutôt rassurants; ce n'est donc pas un dispositif totalement inconnu qu'on met en place. Il est vrai aussi que les milieux culturels n'ont pas bénéficié de toutes les aides qu'on aurait peut-être dû leur verser. On ne va pas dire qu'ils sont les parents pauvres de cette crise covid, même s'ils l'ont effectivement subie très gravement - mais comme d'autres également.
Nous allons donc accepter ce projet de loi, mais refuser les amendements qui seront proposés par Ensemble à Gauche. Nous espérons que ce soutien permettra effectivement aux milieux concernés de mieux vivre la fin de cette crise, même si on peut aussi confirmer qu'il est un peu tard pour déposer ce type de projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rends la parole à M. André Pfeffer pour quarante-cinq secondes.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. J'aimerais rappeler la demande de renvoi à la commission de l'économie que j'ai formulée tout à l'heure. Ce projet est mal étudié, peu clair, et il propose un arrosage général. Il faudrait au minimum examiner l'utilité et la pertinence de ce texte, ainsi que la façon de l'appliquer. Je maintiens donc ma demande de renvoi en commission, pour que cet objet soit étudié et analysé, ce qui n'a pas été fait. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus sollicitée, je mets aux voix cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 12990 à la commission de l'économie est rejeté par 66 non contre 19 oui.
Le président. Nous allons donc maintenant nous prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12990 est adopté en premier débat par 82 oui contre 5 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 3.
Le président. A l'article 4, nous sommes saisis d'un amendement déposé par Ensemble à Gauche. Il s'agit d'ajouter une cinquième condition pour le versement de l'aide financière, à savoir: «- l'entreprise bénéficiaire respecte les conditions de travail en usage et s'engage à respecter les usages professionnels du secteur d'activité.» Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 44 non contre 32 oui et 10 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 4 est adopté, de même que les art. 5 à 9.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 10 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.
Mis aux voix, l'art. 10 est adopté par 85 oui contre 8 non (majorité des deux tiers atteinte).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12990 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 83 oui contre 5 non et 2 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, le PL 12991, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Je laisse quelques minutes aux membres du Conseil d'Etat pour changer de place. (Un instant s'écoule.) Madame la conseillère d'Etat Fabienne Fischer, à vous la parole.
Mme Fabienne Fischer, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je viens vous présenter un projet de loi modifiant une loi que vous avez adoptée le 30 avril 2021 - la loi 12938 - et qui a pour objectif d'intégrer les modifications apportées le 18 juin 2021 par le Conseil fédéral à l'ordonnance fédérale relative aux cas de rigueur. Le texte qui vous est soumis contient également une ou deux modifications de forme visant à clarifier la systématique rédactionnelle de la loi.
Concrètement, ce projet de loi consiste pour l'essentiel, en ce qui concerne les indemnisations, à relever le plafond - à 30% du chiffre d'affaires annuel et 1,5 million de francs - des contributions à fonds perdu qui peuvent être allouées aux entreprises réalisant un chiffre d'affaires inférieur à 5 millions de francs par année et ayant subi un recul du chiffre d'affaires supérieur à 70%, de la même manière que la Confédération traite ce qu'elle a appelé «les cas de rigueur parmi les cas de rigueur».
Le deuxième point important de la modification de la loi qui vous est soumise concerne l'indication du montant alloué par le Conseil fédéral au canton de Genève grâce à la dissolution partielle de la réserve fédérale. Cela va permettre un soutien complémentaire aux entreprises économiquement importantes pour le canton et dont l'activité est particulièrement touchée par les conséquences de la pandémie. Il s'agit d'une allocation d'un montant de 21,87 millions de francs, et je dois tout de suite préciser que cette manne supplémentaire devra être distribuée à des conditions qui sont pour l'essentiel fixées par la Confédération; elle devra donc répondre à un certain nombre de critères préétablis.
Je demande l'urgence sur ce texte dans l'objectif essentiel et évident de permettre le paiement sans délai des montants pouvant être alloués aux entreprises, qui en ont assurément un besoin immédiat. Enfin, un certain nombre d'amendements vous ont été soumis; une partie d'entre eux sont déjà couverts par la loi et doivent par conséquent être considérés sans objet, tandis que les autres consistent en des interventions de nature de droit privé dans une loi de nature administrative. C'est la raison pour laquelle je vous invite à accepter le projet de loi sans amendement.
M. André Pfeffer (UDC). Ce projet de loi est une adaptation au changement intervenu à l'échelon fédéral et une actualisation des aides aux entreprises considérées comme des cas de rigueur. Il est notamment question d'augmenter le plafond des aides de 20% du chiffre d'affaires à dorénavant 30%. La hausse de ces aides était déjà sollicitée par nos entreprises et entrepreneurs sinistrés depuis des mois. Ce texte propose de soutenir environ 2700 entreprises... (Remarque.) ...qui ont été durement touchées et auxquelles, pour certaines, on a interdit de travailler. Cette augmentation des aides permettra également de sauver des milliers de postes de travail. Le groupe UDC soutient donc ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe socialiste soutiendra bien sûr lui aussi ce projet de loi. Voilà maintenant seize mois que notre canton vit une crise - une crise sanitaire, une crise économique, une crise sociale - et il est extrêmement important que notre Grand Conseil continue à prendre ses responsabilités et à voter des crédits pour soutenir les entreprises et, par là même, bien entendu les salariées et salariés, les employées et employés qui travaillent au sein de ces entreprises dans un contexte extrêmement difficile.
Le parti socialiste est aussi extrêmement inquiet pour la suite s'agissant de l'évolution du chômage et du nombre de personnes qui devront encore demander l'aide sociale ces prochains mois. Il est donc important pour nous de continuer à soutenir les entreprises, mais également d'aider les gens que la crise a laissés au bord du chemin. Merci, Monsieur le président.
Une voix. Bravo !
M. Jean Burgermeister (EAG). Ensemble à Gauche votera le projet de loi, à condition naturellement que notre amendement soit adopté par le parlement. Je ne comprends pas très bien la distinction entre le droit privé et le droit administratif qu'a faite Mme la conseillère d'Etat tout à l'heure. En réalité, le principe est très simple: il s'agit de poser des conditions à un versement d'argent public aux entreprises. Je le dis et le répète ! Nous considérons par exemple que les entreprises aidées par l'Etat doivent s'engager à ne pas licencier. On nous répète mois après mois qu'aider les entreprises, c'est aider les salariés; eh bien assurons-nous qu'en aidant les entreprises, nous aidons effectivement les salariés ! Celles et ceux qui sont licenciés ne bénéficient pas de telle ou telle aide à l'entreprise, et je regrette sincèrement que le gouvernement ne soit jamais entré en matière sur ce sujet - ni dans sa majorité de droite ni dans sa nouvelle majorité PS-Verts.
Je remarque également que les autorités ont mis un empressement réel à répondre aux besoins des entreprises qui, il ne faut pas l'oublier, étaient évidemment aussi réels. Mais nous avons tout juste commencé hier à aborder les aides complémentaires aux salariés, et ce qui semble se dessiner, c'est qu'il y aura une majorité au sein de ce parlement pour les refuser. Cela démontre bien qu'il aurait fallu inclure cet aspect dès le départ dans les projets de lois d'aides aux entreprises. Et c'est ce qu'Ensemble à Gauche a demandé dès le début: lorsque nous aidons des entreprises, nous voulons des garanties en matière tant de salaires que d'emplois. Si l'exécutif et le reste de la gauche également avaient joué le jeu, eh bien nous n'aurions sans doute pas besoin maintenant de nous réveiller paniqués pour essayer de réparer, de mettre un petit bout de scotch sur les fractures sociales, béantes, qui se sont ouvertes dès le début sous l'effet de la crise d'abord, puis de l'inaction totale du Conseil d'Etat et de ce parlement ! Je vous remercie.
M. François Lefort (Ve). Ainsi qu'on vous l'a expliqué, ce projet de loi vient compléter la loi 12938 du 30 avril pour mettre en oeuvre les modifications des critères de l'ordonnance fédérale covid-19 cas de rigueur du 18 juin. La loi 12938 du 30 avril - il vaut la peine de le rappeler - concernait 2700 entreprises éligibles à un budget global d'aide de 568,5 millions de francs. Cette loi a développé ses effets comme il était attendu: 221 millions de francs d'aides ont déjà été octroyés jusqu'à maintenant.
En regard de ce que je viens de vous dire, le texte proposé ici est modeste, puisqu'il ajoute 5,3 millions d'aides - dont 70% financés par la Confédération - et qu'il concerne 122 entreprises. Je le précise simplement pour que vous ayez une idée de ce que représente ce projet de loi complémentaire. C'est modeste, mais c'est un complément nécessaire et utile pour certaines entreprises. De plus, 21 millions de paiements anticipés seront transférés par la Confédération aux cantons, charge à ces derniers de les distribuer.
Voilà les raisons pour lesquelles les Verts voteront cet objet. Ils ont aussi pris connaissance de l'amendement présenté par Ensemble à Gauche, qu'ils soutiendront; cela dit, si cet amendement n'est pas accepté, les Verts voteront quand même bien sûr le projet de loi, ainsi que la clause d'urgence. Merci, Monsieur le président.
M. Jacques Blondin (PDC). Vous avez constaté qu'on parle maintenant de cas de rigueur parmi les cas de rigueur; c'est bien la preuve que la situation est sérieuse et que les mesures ne sont bien évidemment pas encore terminées. Il s'agit ici d'une adaptation cantonale à une loi fédérale: partant du principe que 70% des mesures sont financées par Berne, il serait complètement aberrant que Genève ne s'adapte pas ! Ainsi, ce seul élément d'arithmétique soulève la question d'une manière différente.
Et puis ce qui est intéressant ici, c'est que le plafond - fixé à 30% du chiffre d'affaires - est maintenant identique pour les entreprises réalisant plus ou moins de 5 millions de chiffre d'affaires; je pense que c'est un point important. Nous voterons par conséquent ce projet de loi des deux mains et vous remercions d'en faire de même.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG va lui aussi bien sûr appuyer ce projet de loi qui vise à adapter la loi 12938, puisque c'est assez logique. Je pense que la loi a effectivement développé ses effets et que l'harmonisation prévue pour ces cas de rigueur est une bonne chose. En revanche, nous ne voterons pas non plus l'amendement proposé; nous accepterons donc le projet de loi tel qu'il a été déposé par le Conseil d'Etat, et le MCG soutiendra également la clause d'urgence. Merci.
M. Jacques Béné (PLR). Mon intervention sera très rapide: le PLR est entièrement d'accord avec cette modification de la loi 12938, qui correspond à une adaptation de la loi cantonale suite aux dernières décisions fédérales, et nous remercions Mme Fischer d'être venue nous présenter ce projet de loi à la commission de l'économie. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, j'invite l'assemblée à se prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12991 est adopté en premier débat par 78 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 4, al. 1, lettre c (nouvelle teneur).
Le président. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement déposée par le groupe Ensemble à Gauche à l'article 5 «Conditions d'octroi des aides»:
«Art. 5, lettres f, g et h (nouvelles)
f) l'entreprise respecte les conditions de travail en usage et s'engage à respecter les usages professionnels du secteur d'activité;
g) l'entreprise ne peut pas licencier le personnel durant toute la durée de l'aide et les 6 mois suivants, sauf en cas de faute grave et avérée;
h) en cas de RHT l'entreprise s'engage à verser aux employés la différence entre les indemnités pour les réductions d'horaire de travail (RHT) et les salaires perçus ordinairement.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 34 oui.
Mis aux voix, l'art. 6A (nouveau, à insérer avant la section 1 du chapitre I du titre II) est adopté, de même que les art. 7, al. 2 (nouvelle teneur), al. 3 (nouveau), à 10, al. 1 (nouvelle teneur), al. 2 (nouveau, l'al. 2 ancien devenant l'al. 3).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 2 souligné «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté par 73 oui contre 6 non (majorité des deux tiers atteinte).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12991 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 73 oui contre 6 non.
Premier débat
Le président. Nous passons au point suivant de notre programme des urgences, le PL 12859-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Monsieur le rapporteur de majorité Jean Burgermeister, vous avez la parole.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi du Conseil d'Etat, qui a été amendé par la commission des finances, vise avant tout à mettre en conformité l'organisation du comité de la caisse et de l'assemblée des délégués suite à un arrêté du Tribunal administratif fédéral du 1er juillet 2020, entré en vigueur le 8 septembre 2020. Celui-ci revêt un caractère urgent s'agissant du traitement du PL 12859, puisque tant que le comité de la caisse n'est pas conforme à l'arrêté, il n'a plus les compétences de prendre des décisions autres que celles portant sur la gestion des affaires courantes. Il est donc essentiel que le parlement vote rapidement une réforme, en tout cas pour ce qui est de la mise en conformité de l'organisation de la caisse avec l'arrêté du TAF.
Cet arrêté faisait suite à une plainte déposée auprès de l'ASFIP, c'est-à-dire l'Autorité cantonale de surveillance des fondations et des institutions de prévoyance, par le Syndicat des services publics, soit le SSP, qui considérait que les cadres supérieurs devaient être inéligibles à l'assemblée des délégués - des représentants du personnel - et qui souhaitait supprimer le groupe des cadres et sa représentation automatique au sein du comité. Dans un premier temps, l'ASFIP a refusé la plainte du Syndicat des services publics; celui-ci a fait recours au TAF, qui a fini par rendre la décision évoquée en préambule, donnant donc en partie raison au SSP. Le TAF a en effet estimé que la représentation automatique des cadres au sein du comité n'était pas conforme à la LPP, puisqu'on ne pouvait pas considérer que les cadres constituaient une catégorie professionnelle à part.
Cela étant, le TAF s'est aussi intéressé à un aspect que le SSP n'avait pas soulevé dans sa plainte, à savoir la représentation des pensionnés au sein de ce comité. Le tribunal a considéré que cette représentation automatique des pensionnés dans le comité n'était pas conforme du point de vue de la parité employeurs-employés au sein de la caisse et du comité, puisque les pensionnés «occupaient», entre guillemets, les places qui devaient normalement être dévolues aux représentants des salariés - des employés -, alors que les pensionnés ne sont précisément plus des employés de l'Etat. Or il est important, en tout cas pour ce qui est des voix délibératives au sein du comité, d'avoir une parité, c'est-à-dire un nombre équivalent de voix entre les représentants de l'employeur d'une part et les représentants des employés d'autre part.
Sur la base de cet arrêté du TAF, le Conseil d'Etat s'est penché sur la rédaction du projet de loi que nous avons sous les yeux, mais il a décidé d'élargir un peu la réforme plutôt que de procéder à une simple application stricte des recommandations du tribunal.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Jean Burgermeister. Je vous remercie. En premier lieu, il a proposé de réduire l'assemblée des délégués - qui comprenait 200 personnes - à seulement 100 personnes. Cet élément n'a pas nécessairement fait l'unanimité, mais il n'a pas soulevé d'opposition, que ce soit en commission, parmi les représentants du personnel ou des employeurs, ou au sein de la CPEG elle-même. En revanche, le point qui a été principalement débattu, d'abord entre le Conseil d'Etat et les représentants des salariés - en particulier le Cartel intersyndical - et qui a aussi été au centre des débats de la commission des finances, c'est la décision du Conseil d'Etat de réduire le comité de la caisse, qui constitue réellement l'organe de décision et de fonctionnement de la CPEG. Il avait en effet choisi de le faire passer de 20 membres, dont une voix pour les cadres qui n'est plus valable, puisqu'elle n'est plus en conformité avec la loi, et une voix pour les assurés - c'était donc la situation jusqu'à maintenant - à 18 membres seulement, avec une voix uniquement consultative des assurés. La majorité de la commission a de son côté préféré maintenir un comité de 20 membres ayant une voix délibérative, c'est-à-dire 10 représentants des employés, 10 représentants de l'employeur, plus 2 voix consultatives pour les assurés.
Pourquoi la commission a-t-elle décidé d'aller dans cette direction ? Elle l'a fait notamment après avoir entendu les représentants du personnel de l'Etat. Il faut en effet savoir que le fait de siéger au sein du comité de la caisse est un investissement très lourd pour les salariés de l'Etat, qu'ils le font de manière militante et qu'ils n'ont a priori pas forcément les connaissances et compétences techniques nécessaires - ils doivent donc se former sur le tas -, tout cela avec des responsabilités extrêmement importantes, pouvant être de l'ordre du pénal lorsqu'une erreur est commise. Par conséquent, les représentants du personnel considéraient qu'il était vraiment important d'avoir une masse critique de représentants au sein du comité, afin qu'ils puissent discuter entre eux et se répartir le travail, d'autant plus que le comité est organisé en 3 commissions. Il faut aussi savoir que, sur les 20 membres que la majorité de la commission propose, il y a un président et un vice-président qui ne siègent pas dans ces commissions. Restent donc 18 membres, avec la proposition de la commission des finances, ce qui permet d'avoir 3 commissions avec 6 membres titulaires. Avec la proposition du Conseil d'Etat, soit un comité composé uniquement de 18 membres, l'une des commissions aurait dû fonctionner avec seulement 4 titulaires, c'est-à-dire 2 représentants du personnel et 2 représentants de l'employeur, or les personnes que nous avons auditionnées ont considéré que c'était insuffisant, en tout cas pour ce qui est du personnel. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Par ailleurs, les assurés, qui sont également venus en commission, nous ont convaincus qu'ils avaient une réelle envie de participer aux travaux, même s'ils ne peuvent pas avoir une voix délibérative - c'est d'ailleurs l'un des groupes les plus impliqués dans le fonctionnement de la caisse - et qu'il était nécessaire pour eux d'être au moins deux pour pouvoir se répartir le travail. (Applaudissements.)
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de minorité. Le rapporteur de majorité l'a dit, il s'agissait de prime abord d'une mise en conformité avec un arrêt du Tribunal administratif fédéral concernant l'organisation du comité de la fameuse CPEG. Jusque-là, on n'avait pas grand-chose à redire, ni d'ailleurs sur l'urgence de ce sujet. En effet - et on tombera d'accord sur au moins un point avec M. Burgermeister - l'urgence est importante dans la mesure où aujourd'hui le comité n'a pas tous ses pouvoirs. Il ne lui est par exemple pas possible de modifier un règlement sans l'autorisation de l'autorité de surveillance, ce qui évidemment peut poser des problèmes pour ce même comité. Sur la mise en conformité, je pense donc que l'entier de la commission était d'accord.
Seulement voilà, Mesdames et Messieurs, lorsque l'on traite de la CPEG, il y a une espèce de réflexe pavlovien dans la tête des députés de gauche: il s'agit évidemment pour eux de charger la barque pour rappeler à leurs affidés, au Cartel intersyndical de la fonction publique, qu'ils sont là pour eux, qu'ils ne les oublient jamais - du reste, la nouveauté, c'est que maintenant on ne pense plus seulement aux fonctionnaires actuels, mais également aux anciens fonctionnaires qui ne le sont plus - et pour faire une nouvelle démonstration de leur allégeance à toute la fonction publique. On a donc décidé de charger la barque pour leur faire plaisir !
Quel est le problème, Mesdames et Messieurs ? Il est de deux ordres. Le premier, c'est qu'effectivement on augmente le nombre de membres du comité par rapport à la proposition initiale du Conseil d'Etat, puisqu'on passe de 19 à 22. C'est connu: plus on est, mieux on travaille ! Non, bien sûr, je rigole, c'est l'inverse: un comité est d'autant plus efficace qu'il n'est pas pléthorique. C'est donc évidemment le contraire qu'il aurait fallu faire. Le deuxième souci, c'est que l'on augmente également le nombre des représentants des pensionnés: ils seront deux à la place d'un. Cela pose deux problèmes, notamment parce que les pensionnés sont un groupe qui n'a en réalité aucun intérêt à se défendre au sein du comité de la caisse, puisque toutes les mesures qui pourraient être prises par celle-ci s'adressent exclusivement aux cotisants - donc aux actifs - et non aux pensionnés, à la seule exception de l'indexation des rentes, mais qui d'ailleurs ne serait qu'un bonus pour eux, jamais un malus.
Mesdames et Messieurs, nous nous trouvons dans une situation où l'on demande aux fonctionnaires actifs, actuels, de faire des efforts, parce que les fonctionnaires retraités n'ont pas assez cotisé pour leur propre rente. Ce n'est pas une attaque contre ces mêmes pensionnés - j'avertis ceux qui voudraient le dire -, puisque ce n'est tout simplement pas de leur fait: c'est dû à ce système absurde de primauté des prestations, qui a pour conséquence que les fonctionnaires retraités aujourd'hui ont effectivement une bonne rente - tant mieux pour eux ! -, mais que les actifs actuels devront faire des efforts. Du reste, les plus jeunes aujourd'hui doivent déjà faire des efforts pour ceux qui sont encore en fonction, actifs, lesquels doivent faire des efforts pour ceux qui sont à la retraite. C'est un système qui va droit dans le mur ! Il s'agit de l'arrêter, mais ce n'est pas, je suis d'accord, le sujet du jour. Je voulais simplement rappeler encore une fois à la gauche de ce parlement qu'il serait peut-être temps une fois d'ouvrir les yeux.
Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris, le groupe PLR et la minorité de la commission des finances ne sont pas contre la mise en conformité ni contre l'urgence s'agissant de redonner le pouvoir qui est le sien au comité, mais nous souhaitons en revanche revenir à la raison, avec un comité qui n'est pas pléthorique.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Yvan Zweifel. C'est pourquoi un amendement a été déposé pour que l'on en revienne à la situation initiale demandée par le Conseil d'Etat. Si cet amendement n'est pas accepté, nous ne voterons pas le projet, Mesdames et Messieurs, car nous refusons de charger la barque. Nous refusons d'alourdir inutilement l'organisation du comité de la CPEG ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Olivier Cerutti (PDC). Chères et chers collègues, cette mise en conformité, qui a été négociée par le Conseil d'Etat, partait effectivement d'une proposition de 14 membres: 7 et 7. Puis on est passé à 19, plus un membre du personnel retraité. A l'issue des travaux de la commission, nous étions finalement à 20 membres, plus 2 retraités avec voix consultative. Mesdames et Messieurs, vous vous rendez bien compte que, pour fonctionner, cette institution - qui est d'une importance capitale et qui gère quand même une masse de plus de 20 milliards - nécessite d'avoir des compétences, de véritables compétences au sein du comité de caisse, comme l'a dit le rapporteur de majorité.
Je pense pour ma part que le Conseil d'Etat a vu juste en voulant diminuer le nombre de représentants. Nous nous trouvons dans une situation où le travail des retraités, qui sont des pensionnés, au sein de ce comité a été clairement très pertinent, mais qui appelle peut-être maintenant au temps du repos; il n'était donc pas forcément nécessaire de reconduire leurs fonctions qui ne sont que consultatives.
Comme le PLR l'a exprimé, le parti démocrate-chrétien n'est pas opposé à cette réforme. En revanche, nous souhaitons pouvoir revenir à la situation proposée par le Conseil d'Etat. Nous accepterons donc l'amendement du PLR. S'il est adopté, nous voterons la loi; dans le cas contraire, nous la refuserons. Je vous remercie de votre attention.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, le projet de loi tel qu'il est ressorti des travaux de commission ne correspond plus à ce qui avait été souhaité par le Conseil d'Etat, à savoir une toute petite réduction du comité. Aujourd'hui, ce comité est élargi, avec 2 retraités pensionnés, ce qui n'a pas véritablement de sens, comme l'a indiqué le rapporteur de minorité, étant donné que ces 2 retraités pensionnés ne seront pas touchés par les décisions de la caisse.
Cela dit, évidemment, votre parlement est celui qui décide. Le Conseil d'Etat a toutefois déposé des amendements, pour le cas où celui de M. Zweifel et du groupe PLR demandant un retour au projet tel que déposé par le Conseil d'Etat ne devait pas être accepté. En voici la raison: le projet de loi que vous avez voté en séance est malheureusement faux, puisque vous n'avez modifié que le nombre de personnes qui composent le comité, mais pas l'alinéa 2 de l'article 42, qui doit aussi l'être. En effet, si vous décidez que 22 personnes siègent au sein du comité, dont 2 pensionnés, vous devez évidemment modifier l'alinéa 2 afin de passer de 18 à 20 membres, ainsi que les articles suivants.
Par conséquent, si vous deviez refuser de revenir au projet de loi tel que déposé par le Conseil d'Etat, il serait obligatoire que vous votiez les amendements de ce dernier, faute de quoi il ne pourrait pas demander le troisième débat, dès lors que ce projet de loi serait juridiquement faux. Merci.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12859 est adopté en premier débat par 92 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 39, al. 1 (nouvelle teneur), al. 3 (abrogé, l'al. 4 ancien devenant l'al. 3).
Le président. A l'article 42, nous sommes saisis d'un amendement du rapporteur de minorité Yvan Zweifel, que voici:
«Art. 42, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Le comité est composé de 19 membres, dont 1 pensionné ayant voix consultative.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 44 oui.
Le président. L'article 42 fait également l'objet d'un amendement du Conseil d'Etat, qui s'énonce comme suit:
«Art. 42, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Membres salariés et employeurs ont chacun le droit de désigner 10 représentants au comité.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 83 oui contre 4 non et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Mis aux voix, l'art. 42 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.
Le président. Je précise que l'amendement que nous venons de voter était de nature technique: il fallait qu'il soit accepté pour que le projet de loi soit correct. Monsieur Burgermeister, vous maintenez votre demande de parole ? (Remarque.) De toute façon, il ne vous reste plus de temps, je suis désolé ! (Rires.)
Nous poursuivons avec un autre amendement du Conseil d'Etat, qui vise à modifier l'article 44A. Je vous le lis:
«Art. 44A Représentant des pensionnés (nouvelle teneur)
Les représentants du groupe D à l'assemblée des délégués élisent les représentants des pensionnés au comité.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 62 oui contre 32 non.
Mis aux voix, l'art. 44A (nouveau) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 48, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté.
Le président. Nous sommes saisis d'un dernier amendement du Conseil d'Etat à l'article 49, qui se présente comme suit:
«Art. 49, al. 1, lettre h (nouvelle teneur)
1 L'assemblée des délégués a les compétences suivantes:
h) élire les représentants des membres pensionnés au comité, le groupe D constituant le cercle électoral, à l'exclusion des autres groupes.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 94 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'art. 49, al. 1, lettre h (nouvelle teneur), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12859 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 39 non et 1 abstention.
Débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, la proposition de motion 2771. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je cède la parole à l'auteure du texte, Mme la députée Patricia Bidaux.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la motion qui vous est présentée ce soir et pour laquelle le PDC demande un traitement sur le siège et en urgence est très simple: elle repose sur le travail de la commission chargée de proposer une analyse et un avant-projet de loi de réforme de la LIASI. Un travail mené en onze mois par une commission mandatée par le Conseil d'Etat, présidée par M. Stéphane Rossini - directeur depuis le 1er janvier 2019 de l'Office fédéral des assurances sociales -, et rendu au Conseil d'Etat en décembre 2019. Tout y était; il s'agissait pour le Conseil d'Etat d'étudier la faisabilité de la proposition déposée. Nous voici plus d'une année et demie après son dépôt et nous en sommes encore à attendre de voir quelque chose venir ! (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Madame la députée ! Je compte six conversations de travée... Si elles pouvaient se déplacer de quelques mètres, de sorte que nous puissions entendre l'auteure de cet objet en toute tranquillité, ce serait bénéfique. Vous pouvez poursuivre, Madame.
Mme Patricia Bidaux. Je vous remercie, Monsieur le président. Mais finalement, pourquoi demander une révision de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle ? (Le brouhaha persiste.)
Le président. Un instant, Madame Bidaux ! Je crains de ne pas avoir été assez clair: si les personnes qui sont debout en ce moment peuvent quitter la salle... (Un instant s'écoule.) Vous pouvez poursuivre, Madame la députée.
Mme Patricia Bidaux. Merci ! La première raison est la complexité du système - d'ailleurs, je ne sais même pas si j'aurai assez de temps pour vous transmettre l'ensemble des motifs pour lesquels il est absolument nécessaire de réformer la loi sur l'aide sociale individuelle !
Le rapport annuel de 2017 de l'Hospice général mentionnait une nouvelle stratégie, «Inventer l'Hospice général de demain», un document qui soulignait la nécessité d'offrir de meilleures conditions pour plus d'encadrement social et moins d'administratif. Il était nécessaire de travailler sur la réorganisation des centres d'action sociale pour simplifier et fluidifier les processus de travail, notamment au travers de la gestion électronique des documents, dont le but était de réduire de manière conséquente les tâches administratives. Tout au long des différents rapports suivants, l'Hospice général a eu un seul refrain: déployer un accompagnement social adapté en intégrant les bénéficiaires et l'innovation sociale. Et depuis, des équipes épuisées, des bénéficiaires insatisfaits.
En mai 2017, la LIASI a fait l'objet d'une étude comparative du fonctionnement de l'aide sociale dans les six cantons romands. Il s'agit d'un travail de master de Mme Elisa Favre, stagiaire à l'Association romande et tessinoise des institutions d'action sociale, que je ne peux que vous encourager à lire - et à lire attentivement. Ce document très intéressant démontre la complexité du système genevois par rapport aux autres cantons romands.
Mais voyons cette complexité de plus près et résumée en neuf étapes depuis l'arrivée de la demande: d'abord, première évaluation afin de déterminer s'il s'agit d'une aide liée à un accompagnement social ou d'une aide uniquement financière - cela dit, les deux situations débouchent sur un rendez-vous avec un assistant social. Deuxièmement, le rendez-vous a lieu. Troisièmement, le requérant doit remplir une demande en bonne et due forme - dixit le texte - et signer un document intitulé «Mon engagement». Quatrièmement, la demande arrive à l'Hospice général, qui lance une enquête via son service interne. Si tout est en ordre, le processus continue. Cinquièmement, la décision d'octroi de prestations est remise. Sixièmement, un stage d'évaluation est automatiquement mis en place... (Brouhaha. L'oratrice s'interrompt.)
Le président. Messieurs au fond de la salle: allez dehors, s'il vous plaît ! (Commentaires. Un instant s'écoule.) Messieurs Florey et Cerutti, ça vous concerne également ! Merci. Poursuivez - sur le temps de votre groupe.
Mme Patricia Bidaux. Je vous remercie. Je vais bientôt être toute seule ! (Commentaires.)
Une voix. Et Cerutti ?!
Mme Patricia Bidaux. Un stage... (Commentaires. L'oratrice s'interrompt. Un instant s'écoule.) Je reprends: un stage d'évaluation est automatiquement mis en place pour une durée de quatre semaines. C'est l'Hospice général qui se charge de l'inscription à ce stage. Le bilan de stage constitue la septième étape et sert à organiser la suite du suivi: centre d'action sociale - point de départ de la demande, dixit le document mentionné - ou service de réinsertion professionnelle, SRP. Huitième étape: dans les deux cas, mise en place d'un contrat d'aide sociale individuelle formalisant le projet personnel, et signature du contrat par le requérant et le représentant de l'Hospice général. En principe, ce contrat est réalisé dans les trois mois suivant l'ouverture du dossier; il est obligatoire pour les demandeurs, mais aussi pour les concubins et les conjoints. La situation de départ est la suivante: le contrat fixe des objectifs à atteindre en termes de calendrier et de responsabilité de mise en oeuvre, ainsi que l'organisation d'une évaluation de la situation déterminée par le contrat. Il vise quatre priorités: la restauration de la dignité humaine, la socialisation de la personne, l'insertion professionnelle et l'amélioration de la situation matérielle si la personne a un revenu insuffisant. Si au contraire il s'agit d'un contrat de réinsertion établi sur la base d'un stage, alors le service offre à chaque bénéficiaire un suivi individualisé. Si le stage n'aboutit à aucune reprise d'emploi, c'est retour à la case départ. La neuvième étape consiste en l'évaluation mensuelle du droit à l'aide sociale. Un parcours poussif et lourdement administratif !
Une autre différence avec tous les cantons romands se situe au niveau du financement. Genève est le seul canton romand où le financement de l'aide sociale est uniquement porté par le canton - ailleurs, cela varie entre 40% et 70% selon le canton.
J'ai parlé vite, mais vous aurez néanmoins compris qu'il devient plus qu'urgent que notre parlement reçoive du département une réforme que nous espérons profonde et simplificatrice de tout le système. Quant au contenu, s'agissant d'un projet de loi complexe, sur lequel un préavis a été transmis via le rapport dit Rossini... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Pour toutes les raisons qui précèdent, je vous remercie de bien vouloir soutenir cette motion !
M. Didier Bonny (Ve). Je rappelle quand même que la motion invite le Conseil d'Etat à déposer avant le 31 décembre 2021 le projet de loi révisant et modifiant la LIASI. Nous ne sommes donc pas là, ce soir, en train de discuter de la LIASI ! L'objet de la motion consiste bel et bien à dire au conseiller d'Etat de déposer son projet de loi. Par conséquent, Mesdames les députées, Messieurs les députés, pour nous, les Vertes et les Verts, la motion du PDC enfonce une porte ouverte, car le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz a déjà informé les membres de la commission des affaires sociales que le projet de loi révisant et modifiant la LIASI serait déposé après la pause estivale. Il l'a confirmé il y a trois semaines dans une interview accordée à un hebdomadaire gratuit, lu par 145 000 personnes. On peut imaginer que le conseiller d'Etat n'aurait pas fait cette déclaration qui l'engage fortement sans être sûr de lui !
Cela dit, si la députation verte regrette la forme utilisée par le PDC pour exercer une pression inutile sur le magistrat - une question écrite urgente aurait tout aussi bien fait l'affaire, tout en épargnant à notre Grand Conseil trente minutes de débat -, elle attend avec impatience le dépôt de ce projet de loi, car la LIASI doit être révisée et modifiée, cela ne fait aucun doute. C'est la raison pour laquelle les Vertes et les Verts s'abstiendront au moment du vote. Merci.
M. André Pfeffer (UDC). Cette motion demande qu'une promesse de notre Conseil d'Etat soit enfin réalisée. Le programme de législature 2018-2023 promettait une politique de lutte contre les inégalités. Un rapport concernant la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle avait été sollicité début 2019. Aujourd'hui, le Conseil d'Etat n'y a toujours pas donné suite. Evaluer la pertinence du dispositif de l'assistance publique, examiner des pistes de réforme, clarifier certaines règles, estimer les conséquences financières, etc., tous ces sujets doivent être débattus et étudiés. Il est donc urgent que notre Conseil d'Etat nous soumette un projet de loi révisant la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle, et cette motion lui accorde un délai jusqu'au 31 décembre 2021 pour le déposer. Merci de votre attention.
Mme Véronique Kämpfen (PLR). La révision de la loi cantonale sur l'insertion et l'aide sociale individuelle - la fameuse LIASI - a fait l'objet d'un rapport de Stéphane Rossini, l'actuel directeur de l'Office fédéral des assurances sociales. Il a été remis au Conseil d'Etat, qui en était le mandataire, fin 2019. Plusieurs points positifs sont à relever dans la démarche qui a présidé à la rédaction de ce rapport, dont l'intégration des milieux économiques dans la commission d'étude. L'une des recommandations du rapport souligne d'ailleurs, je cite, que «l'insertion professionnelle suppose des relations étroites entre les institutions sociales et l'économie, à savoir les entreprises du premier marché et les entreprises sociales et d'insertion». Plus loin, il est indiqué - je cite encore - que «la commission demande au Département de la cohésion sociale d'approfondir la question de la création d'une plateforme centralisée d'information et d'échange entre les autorités publiques (dont celles chargées de l'aide sociale) et l'économie. Il s'agit de créer un espace permettant de recenser et de mettre à disposition l'offre des entreprises en matière d'insertion et d'intégration professionnelles; et de structurer les demandes des acteurs sociaux à l'adresse des entreprises. Un groupe de travail ad hoc devrait procéder à une analyse d'opportunité et de faisabilité».
Cette proposition frappée au coin du bon sens n'en est qu'une parmi une ribambelle d'autres que la commission des affaires sociales demande à traiter dans les meilleurs délais. Le rapport va jusqu'à proposer un avant-projet de loi, rédigé de A à Z. Nous avons hâte de savoir si cette proposition sera retenue par le Conseil d'Etat ou s'il va nous suggérer tout à fait autre chose. Quoi qu'il en soit, la tâche sera colossale et nécessite un temps de travail serein qu'il s'agit de mener à bien avant la fin de cette législature. Le groupe PLR se réjouit de voir le projet de loi qui sera soumis à notre parlement par le Conseil d'Etat et soutiendra cette motion, qui ne demande rien d'autre qu'un planning raisonnable. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Les personnes qui m'ont précédée dans ce débat ont fait référence au dépôt du rapport de la commission Rossini dans les délais qui lui avaient été impartis, et c'est un point important. Pour ma part, j'aimerais vous parler d'une autre date: celle du 1er février 2012, jour de l'entrée en vigueur de la nouvelle LIASI, dont tous les acteurs de terrain disaient que ce n'était pas une loi adéquate à même de répondre aux besoins des usagers. Preuve en est qu'elle a subi toute une série de modifications et qu'un certain nombre de ses dispositions ne sont plus respectées aujourd'hui, simplement parce qu'elles étaient inadéquates. Je vous rappelle que les deux rapports Evaluanda - le rapport intermédiaire édité en 2014, de même que le rapport final de 2016 - concluaient également à la nécessité de modifier drastiquement cette loi. Ce n'est donc pas seulement depuis 2019 que nous attendons une révision de la LIASI, vous le savez: pour les usagers et pour un grand nombre de professionnels, c'est depuis 2012 ! A l'époque, d'ailleurs, la loi avait fait l'objet d'un référendum.
Aujourd'hui, il est donc important de terminer ce travail de révision de la LIASI. Il faut véritablement que la loi corresponde à la réalité. Or, en raison de son inadéquation, de plus en plus de distances sont prises vis-à-vis des concepts fondamentaux du travail social, eu égard à la loi qui n'est pas respectée. Ce n'est pas possible ! Cela crée une marge d'arbitraire qui n'est pas acceptable. Il est donc important qu'on puisse aller de l'avant dans ce processus. Il ne s'agit pas pour autant de remettre en question le travail qui a été effectué par le département, mais le dépôt de l'avant-projet de loi avait été annoncé au 1er juillet pour une période de consultation et ce travail va maintenant être repoussé de deux mois. Je crois qu'il est important de fixer un terme, pour qu'on puisse garantir que ce travail de révision de la LIASI se déroule durant cette législature et qu'on ne le reporte pas encore à la législature suivante. Cela n'aurait aucun sens, et ce serait assez inquiétant quant à la manière dont fonctionnent nos institutions. C'est pourquoi le groupe Ensemble à Gauche vous invite à accepter cette motion.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous décelons une unanimité sur le fait qu'il faut réviser la loi cantonale sur l'insertion et l'aide sociale individuelle. Nous constatons également une unanimité sur le fait que le conseiller d'Etat, que le Conseil d'Etat s'est engagé à déposer ce projet de loi à la rentrée 2021, c'est-à-dire dans quelques mois. Il semble donc au parti socialiste que cette motion, comme l'a dit M. le député Bonny, enfonce une porte ouverte. On pourrait aussi y voir une forme de récupération. Elle n'amène rien d'autre qu'un rappel du consensus assez large sur la nécessité de réviser la LIASI.
Mes préopinants ont oublié un élément qui, depuis un peu plus d'une année, agite la république, à savoir le covid-19. Ce virus a quand même fondamentalement ébranlé notre société et donc également la nécessité et les fondements de la révision de la LIASI, mais j'imagine que nous aurons l'occasion d'entendre M. Apothéloz sur cet enjeu et sur le fait que ce n'est pas si simple. On ne compte pas en mois une révision de loi, comme si cela se faisait dans un bocal, hors de la société, hors des enjeux légaux, hors des modifications qui ont lieu à Berne, par des votes notamment sur la rente-pont en juin 2020. Par conséquent, le fait que cette révision de la LIASI soit complexe, prenne du temps et doive intégrer des révisions de lois fédérales, mais aussi des modifications communales dans des répartitions des tâches complexes, avec des communes - vous le savez - qui sont engagées dans des processus de discussions parfois tendus avec le canton, nous invite plutôt à ne pas forcer la main au Conseil d'Etat et à ne pas donner le signal d'une urgence qui pourrait au contraire conduire à bâcler ce projet de loi. Nous sommes plutôt enclins à laisser le temps au temps, à laisser la parole de M. Apothéloz se réaliser par le biais du dépôt d'un projet de loi à la rentrée. A ce moment-là, nous pourrons travailler en commission sur le fond du projet d'une manière critique, comme nous savons le faire. En l'occurrence, cette motion n'apporte rien et ne demande rien, si ce n'est une évidence. Nous proposons donc de la refuser, c'est en tout cas ce que fera le parti socialiste. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à M. Stéphane Florey pour une minute cinquante.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Quand on a discuté de ce point au sein de notre caucus, on était assez surpris de voir que le PDC s'inquiète des belles promesses d'autres conseillers d'Etat; ce n'est pas commun, il faut quand même le dire. Toutefois, en ce qui nous concerne, nous sommes assez dubitatifs sur le projet lui-même. Je veux dire par là que, soit, on veut faire une réforme, mais dans quel sens on va aller ? Si c'est pour se retrouver avec une hausse et un élargissement du nombre de bénéficiaires, une augmentation, voire une forte augmentation des prestations, tout ça pour arriver à une explosion des coûts, eh bien franchement, l'UDC ne voit pas ça d'un très bon oeil. C'est pour cette raison qu'on n'est pas non plus très pressé de voir arriver cette réforme, parce qu'on est à peu près convaincu que c'est plutôt dans ce sens-là qu'on risque d'aller, connaissant la politique du magistrat. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Non, ce qu'on voudrait, nous - et on le demande pour l'ensemble du Conseil d'Etat, pas seulement dans le domaine social - c'est une fois pour toutes de vraies réformes structurelles qui amènent à l'efficience des coûts...
Le président. Merci.
M. Stéphane Florey. ...et à une vraie économie dans la gestion même de ce qu'est le social à Genève. Voilà pourquoi on refusera également cette motion. Je vous remercie.
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le département de la cohésion sociale a en effet dû définir un certain nombre de priorités sur cet objet. Non qu'il n'en avait pas forcément envie, au contraire: d'emblée, le DCS a souhaité réformer, revoir, réviser cette LIASI. Mme Haller a évoqué les débats de fond qui se sont déroulés au moment de la fin du RMCAS et de l'introduction de la nouvelle LIASI - débats dont il est effectivement important de se souvenir pour conduire des réflexions majeures sur la LIASI et son application. Ainsi, au moment où nous devions gérer cette situation de pandémie en mars 2020, les priorités du Conseil d'Etat se sont orientées vers la délivrance des prestations aux personnes concernées, qu'elles relèvent de l'Hospice général ou des différents projets que votre parlement a soutenus, et il était plus qu'urgent et plus que nécessaire de pouvoir le faire.
Dans toute ma carrière politique, Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai à coeur de faire de la politique différemment, en veillant à ce que la concertation et la consultation ne soient pas que de simples mots, mais véritablement une ambition dans la construction d'un nouveau projet de loi. Réviser une telle loi, dans la situation complexe dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui s'agissant de l'aide sociale au sens large, nécessite effectivement une concertation serrée avec les milieux intéressés. Mme Kämpfen a parlé des milieux économiques, c'est vrai, mais il y a aussi les milieux associatifs, ainsi que les milieux d'experts, notamment à l'Université de Genève et au sein des hautes écoles en particulier. J'ai eu à coeur de faire en sorte que le dispositif de la LIASI soit chiffrable, pour qu'on puisse vous donner l'ensemble des informations; charge à vous ensuite de procéder aux arbitrages politiques. Nous avons mandaté la Haute école de gestion pour modéliser les changements qui se sont préparés entre l'Hospice général et le département, de manière que nous puissions arriver en commission avec l'ensemble des éléments.
Qu'aurait dit le parti démocrate-chrétien à l'idée que ce projet de loi ne prenne pas en compte les effets de la crise ? Il aurait certainement râlé - et j'aurais été d'accord avec lui - si nous avions proposé un projet qui ne tenait pas compte de ces éléments dans la LIASI. Je suis également ravi de savoir que le parti démocrate-chrétien est prêt à suivre les propositions du département que j'ai déjà présentées deux fois à la commission des affaires sociales - la question des forfaits pour les bénéficiaires de l'Hospice, par exemple, en est une. En revanche, que les choses soient claires, Mesdames et Messieurs les députés: il est hors de question que la nouvelle LIASI privatise l'aide sociale à Genève. Ce sera une tâche étatique via l'Hospice général et il en sera ainsi.
Un mot - pour terminer - sur le planning, puisque je l'ai annoncé lors de ma dernière audition à la commission des affaires sociales: ce projet de loi sera présenté au Conseil d'Etat début septembre. S'il est adopté par notre gouvernement, il sera ensuite présenté à votre parlement, puis à votre commission, ce qui permettra - cela a été évoqué, et je vous en remercie - un traitement serein de ce projet si important pour les bénéficiaires de l'Hospice général.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur cette proposition de motion.
Mise aux voix, la motion 2771 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 53 oui contre 22 non et 15 abstentions.
Débat
Le président. Nous abordons l'urgence suivante, la M 2772, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à Mme la députée Caroline Marti.
Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, selon l'Observatoire de la vie étudiante de l'Université de Genève, 50% des étudiantes et des étudiants travaillent à côté de leurs études; ces emplois se situent majoritairement dans les secteurs de la restauration ou de l'hôtellerie, de la culture et du spectacle, de l'industrie touristique. Or, nous le savons toutes et tous, ce sont des secteurs qui ont été particulièrement touchés par la crise du covid, et la reprise des activités y est plus que timide. Lors de la première vague, le Centre de carrière de l'Université de Genève a d'ailleurs constaté une chute de 75% des offres de jobs étudiants, et les bénéficiaires de bourses et d'aides ont augmenté de 210% entre mars et août 2020 ! Ces quelques chiffres illustrent évidemment l'énorme précarité de la communauté estudiantine dans notre canton et la nécessité de la soutenir.
Face à ce constat, un certain nombre de mesures et d'initiatives émanant de personnes individuelles, d'associations, de privés ont pu être mises en place afin d'assurer l'accès à l'alimentation - et à une alimentation saine - pour l'ensemble des étudiantes et des étudiants de notre canton. Je pense notamment à la création d'une épicerie gratuite à leur intention, mais également à cette disposition dont on a souvent parlé, à savoir les repas à 3 francs. Ces différentes mesures ont rencontré un succès énorme; c'est encore une fois la preuve que la communauté étudiante a besoin de ces prestations. Or ces repas à 3 francs vont hélas purement et simplement s'arrêter à la fin de l'année en raison de la fin de la subvention, du financement par des fonds privés, ce qui empêche la pérennisation de cette mesure.
Si on parle aujourd'hui de toute une série d'enjeux autour des finances et des capacités économiques des étudiantes et des étudiants, il faut aussi relever l'énorme souffrance de certains et certaines de ces jeunes due à la perte de liens sociaux durant cette crise - une perte de liens sociaux qui pour certains a engendré des impacts extrêmement graves, notamment sur leur santé mentale. Or faciliter par un coût modique le partage d'un repas contribue également à recréer ces liens sociaux qui ont été mis à mal pendant la crise. Et puis, pour des étudiants qui se retrouvent, comme je le disais, dans une situation de grande vulnérabilité et précarité financière, cette initiative des repas à 3 francs assure l'accès à un repas sain et équilibré, ce qui constitue évidemment un véritable enjeu de santé publique. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Cette motion propose un financement public pour faire le pont entre ces repas à 3 francs financés par le privé et une autre mesure - mais qui ne prendra effet qu'en septembre 2022 -, à savoir les repas à 5 francs à l'université.
Le président. Merci.
Mme Caroline Marti. Pour conclure, il faut relever que cette disposition a un coût somme toute très modeste: 1,5 million pour la totalité de l'année universitaire. C'est évidemment une goutte d'eau en comparaison des centaines de millions...
Le président. C'est terminé, merci.
Mme Caroline Marti. ...que nous avons votés pour les aides aux entreprises, et nous vous prions de ce fait...
Le président. Merci, Madame la députée.
Mme Caroline Marti. ...d'accepter cette motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion invite le Conseil d'Etat à poursuivre durant un an, pour l'année académique 2021-2022, les repas à prix réduit - 3 francs - pour les étudiantes et étudiants de l'Université de Genève, mais aussi pour celles et ceux de la HES-SO Genève. Les étudiantes et étudiants, on l'a déjà dit, ont bénéficié de ces repas en mai et juin de cette année: plus de 22 000 repas ont été vendus à ce prix. Malheureusement, cette mesure ne peut être pérennisée à la rentrée scolaire; bien qu'un autre projet, pour des repas à 5 francs, soit en cours d'élaboration, il ne sera pas mis en place à la rentrée, faute de temps.
Contrairement aux idées préconçues, il faut savoir que la crise sanitaire, économique et sociale a fortement impacté les jeunes. Des centaines de colis ont été distribués chaque semaine par l'épicerie gratuite La FARCE et les besoins sont encore criants. Beaucoup de jeunes ont perdu leur travail durant la crise; parmi eux, 30% avaient besoin de ces petits jobs pour se nourrir. Ils sont aussi touchés par les problèmes financiers de leur famille. Au-delà des besoins financiers et économiques, d'autres encore sont alarmants et non négligeables: des besoins en lien avec la santé alimentaire, mais également des besoins sociaux liés à la santé psychique. L'avenir de leurs études est en jeu et il faut éviter que les étudiantes et étudiants décrochent en raison de problèmes financiers, par manque de motivation ou encore par manque d'interactions. Les étudiantes et étudiants se sont exprimés plusieurs fois à ce propos. Derrière ces nombreux témoignages, un sentiment d'invisibilité, d'inutilité et d'incompréhension. Ces ressentis sont en relation avec l'isolement qu'ils et elles ont vécu, avec les problèmes financiers et le manque de liens sociaux. Enfin, à côté de l'impact psychologique et social de la crise, ces repas à 3 francs permettraient aux jeunes de se réunir, de se retrouver et d'échanger - aspect fondamental de la socialisation, en lien avec l'équilibre et le bien-être en général, et meilleur antidote à la déprime environnante.
Avec cette proposition de repas abordables et sains, les jeunes auront précisément accès à des repas sains, et ce n'est pas anodin. La direction générale de la santé doit d'ailleurs mettre en oeuvre le plan cantonal de promotion de la santé et de prévention 2019-2023. Dans ce contexte, avec la crise covid, les jeunes sont aujourd'hui considérés comme une population vulnérable et fragile. Leur offrir un plat sain par jour, à un prix accessible, c'est leur permettre de bénéficier de ce qui est souvent leur seule opportunité de la journée de manger sainement et équilibré.
Certes, cette opération aura un coût financier, mais à combien s'élèvera le coût social et humain si des jeunes décrochent, dépriment, ne mangent pas sainement ? C'est une question d'investissement dans la jeunesse, pour que les étudiantes et étudiants continuent à avoir des perspectives et gardent leur motivation, leur concentration, leur moral et surtout leur santé. Cette opération à l'apparence caritative est un puissant vecteur de promotion de la santé physique et mentale, un levier contre l'isolement et la précarisation des jeunes, mais surtout un geste de confiance envers cette génération. Il faut donc voter oui au renvoi au Conseil d'Etat - et je demande le vote nominal ! Merci.
Le président. Merci, il est pris note de cette demande. Etes-vous suivie ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Monsieur le député Stéphane Florey, c'est à vous.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. A la lecture de cette motion, on a du mal à saisir l'objectif des auteurs du texte. Il est assez surprenant de vouloir absolument maintenir ces repas à 3 francs ! Soit l'enjeu est purement électoraliste et c'est un bon coup de pub pour eux... (Exclamations.) ...soit il y a un élément sous-jacent à cette mesure. Mais il faut revenir sur terre, Mesdames et Messieurs ! On ne peut plus, aujourd'hui, offrir des repas à 3 francs à l'un, la gratuité à l'autre, la gratuité pour ceci et cela... Non, ce n'est pas comme ça que ça marche ! D'ailleurs, votre repas à 3 francs, c'est du vent: quelqu'un, derrière, paiera de toute façon la différence. On l'a dit, ça va nous coûter au bas mot plus d'un million, qu'il faudra rallonger. C'est la première chose.
Et qui sont les réels bénéficiaires de ces repas à 3 francs ? Certainement ceux qui sont déjà pris en charge à plus de 100% par la société, à savoir les personnes qui touchent des bourses, qui ne paient pas de logement parce qu'elles sont prises en charge d'une manière ou d'une autre. A notre sens, ce sont ces personnes-là qui sont principalement visées par cette motion. Et ça, non: on dit stop ! On dit stop à cette longue fuite en avant, au tout-gratuit, parce que la réalité, c'est que ce n'est pas comme ça que marche notre société.
Nous aurons toutefois la liberté de vote sur cet objet. J'ai exprimé un avis fortement défavorable, mais il est vrai que notre collègue Virna Conti notamment, aujourd'hui absente, était entièrement favorable à la mesure lors de notre caucus; je le dis en toute franchise. Mais une partie du groupe en tout cas est farouchement opposée à cette mesure. Je vous remercie.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est évident que l'année estudiantine qui se termine a été très compliquée pour beaucoup de nos jeunes: vie sociale fracturée, astreinte à demeure, plus de contacts, plus de job, plus de revenu. Tout le monde ne dispose donc pas de ce qu'il faut pour vivre et il est évident que cela pose problème. Ce qu'on nous demande, en fin de compte, c'est simplement de faire le pont entre une mesure qui a été appliquée jusqu'à maintenant et une autre potentiellement réalisable dans une année, c'est-à-dire le menu à 5 francs qui doit encore faire l'objet de négociations. Par conséquent, il s'agit ni plus ni moins de mettre à disposition pendant une année une certaine somme en faveur de notre jeunesse, matière grise de notre avenir. C'est vrai qu'on peut s'interroger - et le PDC l'a fait - sur la nécessité d'intervenir en la matière, mais une crise est quand même un moment exceptionnel et il faut aider la jeunesse. C'est pourquoi nous avons finalement pris la décision de soutenir cette motion. Merci. (Applaudissements.)
M. Jacques Béné (PLR). Nous sommes tout à fait conscients que la situation que nous avons vécue ces derniers mois a été difficile - et pour tout le monde. Nous ne voyons toutefois pas en quoi cette mesure serait prioritaire, puisque les choses vont maintenant reprendre. On a parlé de plans de relance; on n'en veut pas, des plans de relance ! L'économie va fonctionner: le PIB va augmenter de 4% en 2021. Alors que les choses vont tranquillement reprendre, on continue à parler à tout prix de précarité, mais chaque fois de manière bien ciblée ! Parce que là, on ne parle pas des apprentis, des chômeurs qui ont également souffert; on ne parle pas des bénéficiaires de RHT, qui eux aussi aimeraient bien pouvoir manger à la cafétéria pour 3 francs ! On pourrait aller encore plus loin: pourquoi 3 francs ? Pourquoi pas gratuit ? On pourrait même éventuellement étatiser tous les restaurants du canton et offrir la gratuité à tout le monde ! Non, je pense qu'il faut être réaliste.
La seule chose qui est convaincante dans cette motion, c'est le rappel de l'augmentation des bourses - de 210%. Eh bien tant mieux qu'elles aient augmenté de 210% ! Ça veut dire que le système fonctionne: quand les gens ont besoin de quelque chose et qu'ils y ont droit, on le leur donne ! C'est ça, le principe de l'Etat de droit ! Si vous avez droit à quelque chose, on vous le donne; par contre, on n'arrose pas tout le monde, même si je comprends que c'est effectivement très intéressant d'un point de vue électoral.
Franchement, il y en a marre de parler de précarité. Votre économie planifiée, Mesdames et Messieurs les signataires de cette motion, remplie d'assistés dans tout le canton, on n'en veut pas ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. En l'absence des deux premiers signataires de ce texte, c'est la troisième signataire, Mme Jocelyne Haller, qui tient le rôle d'auteure. A vous la parole, Madame.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. J'avoue que les bras m'en tombent ! Dire ici dans ce parlement qu'il y en a marre d'entendre parler de la précarité, il faut oser ! (Applaudissements.) Si je devais quant à moi en avoir marre de quelque chose, ce serait de la précarité ! C'est cela qu'il faut proscrire et éradiquer, ce n'est pas le fait d'en parler ! (Commentaires.) C'est de la précarité qu'il faut se débarrasser ! La précarité est une réalité. Allez demander à vos statisticiens, ils vous le diront: la pauvreté et la précarité augmentent ! Elles augmentent partout; les écarts se creusent et vous savez très bien que l'aide sociale, par exemple, a dû faire face à une hausse drastique du nombre de dossiers. C'est le cas depuis des années ! Pourquoi ? Parce qu'il y a une dérégulation et une transformation du marché du travail ! Parce qu'il y a une dégradation du contexte économique et social ! Certains tirent leur épingle du jeu: ils y gagnent, ils font du bénéfice, mais ce n'est pas le cas d'une grande partie des travailleurs. Alors, pour commencer, ne venez pas nous asséner des contrevérités comme celles-là !
On nous dit ensuite qu'il faut revenir sur terre; eh bien quand on a les deux pieds bien ancrés dans la terre, ce que l'on constate, c'est que la pauvreté et la précarité augmentent bel et bien ! Il ne suffit pas de mettre la tête dans le sable: il faut essayer de trouver des moyens de lutter contre cette précarité. Ce qu'on nous propose aujourd'hui, c'est donc d'apporter une aide, au moins transitoirement, à des personnes en difficulté. Vous le savez, les petits jobs étudiants ont disparu avec la crise. On nous dit que les jeunes ont des bourses, dont le nombre a augmenté. Certes, mais le montant des bourses ne permet pas de couvrir tous les besoins ! C'est pour cette raison que les jeunes ont besoin de jobs étudiants parallèles; or, aujourd'hui, c'est particulièrement difficile pour eux. Leur donner accès à un repas à un prix correct permet effectivement de répondre à un certain nombre de besoins et d'impératifs. Je crois donc qu'il faut être juste: cette mesure est relativement modeste. Elle permet à des jeunes de manger correctement - peut-être, pour certains, particulièrement démunis, d'avoir au moins un repas correct par jour.
Certains ont déclaré tout à l'heure que les personnes en RHT également aimeraient bien avoir des repas à 3 ou 5 francs; eh bien je leur signale que les étudiants sont peut-être des enfants de ces personnes en RHT; pour eux, avoir accès à un repas à 3 francs, c'est déjà décharger le budget familial ! Si vous voulez jouer à ça, on pourrait toutefois développer le dispositif bien plus largement. Je crois qu'il s'agit simplement d'une mesure correcte vis-à-vis de jeunes en difficulté qui ont été particulièrement affectés par la crise du covid. C'est une mesure d'aide et de santé publique qui a du sens; nous ne pouvons donc que vous encourager à voter ce texte. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements. Exclamations.)
Des voix. Bravo !
Mme Danièle Magnin (MCG). Ce n'est pas seulement à cause du covid que les étudiants se trouvent en difficulté: ils le sont depuis qu'on a accepté les accords de Bologne et qu'on a changé la répartition annuelle des semaines et des mois pendant lesquels ils peuvent travailler. Maintenant, ils ont trois quadrimestres - il n'y a plus un semestre d'été et un semestre d'hiver; il n'est plus possible de travailler pendant deux, voire trois mois d'été pour réussir à faire des économies. Ça ne fonctionne plus comme avant et c'est ce qui a causé la précarité des étudiants.
Je voudrais simplement dire que, sur le fond, le MCG est d'accord de soutenir ce projet. Il demande en revanche le retour en commission afin qu'on détermine les conditions dans lesquelles ces aides seront données et qu'on fixe des règles qui ne reposent pas simplement sur le principe de l'arrosoir. Voilà pourquoi je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter le retour en commission pour déterminer ces conditions. Merci.
Le président. Madame la députée, ce texte est un nouvel objet: il n'est donc pas sorti d'une commission. A laquelle souhaitez-vous l'envoyer ? (Commentaires.)
Mme Danièle Magnin. A la commission de l'enseignement supérieur, Monsieur le président.
Le président. Merci, il en est pris note. Monsieur Thomas Bläsi, vous avez la parole pour quarante-huit secondes.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président, je vais essayer d'être rapide. L'UDC, loin de tout clivage politique, ne s'est pas interdit ce débat en interne et je représente, comme Mme Virna Conti, ceux qui sont favorables à cette mesure. Pourquoi favorables ? Parce que nous savons que les seniors et les étudiants ont des revenus inférieurs à la moyenne de la société. C'est donc normal qu'ils bénéficient d'un certain nombre d'avantages. Leur permettre d'accéder à des repas moins chers durant leurs études est de toute façon susceptible de favoriser plus tard l'économie en améliorant leurs conditions de travail. Il n'est pas très acceptable non plus que les cafétérias estudiantines ou universitaires soient confiées à des prestataires externes qui ont vocation à faire des bénéfices importants. A partir de là, si au moins ces...
Le président. Merci.
M. Thomas Bläsi. C'est terminé ? Très bien. En conclusion, comme Mme Virna Conti, signataire, je soutiendrai ce texte. Merci.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la situation de bon nombre d'étudiantes et étudiants a en effet été compliquée pendant la période du covid, mais elle l'a aussi été pour nombre de nos concitoyennes et concitoyens. Quelques chiffres pour commencer. Habituellement, l'université et les HES soutiennent leurs étudiants par le biais de bourses ou d'aides très ponctuelles; la bourse consiste en une somme versée mensuellement, tandis que l'aide ponctuelle peut être destinée à couvrir une dépense de dentiste ou autre. Si je prends les chiffres de l'année 2019, les hautes écoles ont aidé 468 personnes. Ça, c'était en 2019; en 2020, 1476 personnes ont dû être soutenues, c'est-à-dire environ trois fois plus. Il est donc vrai que la crise du covid a eu un impact. Si on regarde maintenant le détail des chiffres, les hautes écoles - avec bien sûr l'aide de partenaires privés, de fondations - ont déboursé un peu plus de 3,2 millions de francs en 2019, contre à peu près 8,3 millions en 2020. Où en est-on à l'heure actuelle ? Au premier semestre de cette année, 707 personnes ont été aidées, pour 2 millions de francs. Quel constat peut-on en tirer ? Qu'il y aura probablement, en 2021, un peu moins d'étudiantes et étudiants en situation de précarité, et pour des sommes vraisemblablement moins importantes. La situation est donc malgré tout sans doute en train de s'améliorer. Voilà la première remarque que je souhaitais faire.
Deuxièmement, si on désire aider les étudiantes et étudiants qui se trouvent dans des situations difficiles, une question va se poser: est-ce qu'il faut donner accès aux repas à 3 francs à l'ensemble des 25 000 étudiantes et étudiants du canton ? C'est une vraie question. Je vous ai dit qu'on avait aidé à peu près - on va arrondir - 1500 étudiantes et étudiants en 2020, mais on en compte 25 000 dans le canton ! Il s'agit donc d'une vraie question, qu'il faut se poser. En ce sens, les chiffres donnés par la motion sont vraisemblablement bien inférieurs à ce que pourrait être la réalité des coûts pour l'Etat ou pour l'université si on allait de l'avant. En effet, la motion indique qu'au lieu de payer un repas 8,90 francs, on le paierait 3 francs, le solde étant de 5,90 francs par étudiant. Si vous multipliez ce montant par 25 000, le coût de la mesure revient à 147 500 francs pour un seul repas. Si les étudiants mangeaient un seul repas par mois à 3 francs, cela coûterait 147 500 francs à l'Etat; vous voyez donc bien que s'ils en mangent dix par mois, il sera tout de suite question de sommes beaucoup plus importantes.
Qu'est-ce que cela signifie ? Si votre Conseil estime qu'il y a effectivement un problème de précarité sur lequel il faut se pencher, on devra sans doute demander à l'université de mettre en place un système un peu différent, probablement en ciblant les bénéficiaires, mais certainement pas en arrosant, je dirais, tout le monde avec une mesure de ce type, d'autant plus - et j'attire votre attention sur ce point - que la question pourrait se poser pour les écoles du secondaire II. Pourquoi pas des repas à 3 francs au secondaire II ? Certaines écoles comptent des élèves qui sont eux aussi précarisés. Vous voyez donc bien que la question deviendrait plus générale. Le Conseil d'Etat peut parfaitement étudier le sujet avec l'université, mais je ne peux pas vous garantir que la réponse sera effectivement un repas à 3 francs pour tout le monde; il y aura peut-être une réponse ciblée, en fonction des besoins qui pourraient apparaître. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, je vous fais voter en premier lieu sur la proposition de Mme Magnin, à savoir le renvoi de la M 2772 à la commission de l'enseignement supérieur.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2772 à la commission de l'enseignement supérieur est rejeté par 48 non contre 44 oui.
Le président. Nous passons maintenant au vote sur la prise en considération du texte; je vous rappelle que le vote nominal a été demandé et soutenu.
Mise aux voix, la motion 2772 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 50 oui contre 34 non et 8 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous faisons une pause jusqu'à 18h05, heure à laquelle nous nous retrouverons pour terminer les urgences.
La séance est levée à 17h45.