Séance du
vendredi 26 mars 2021 à
14h
2e
législature -
3e
année -
10e
session -
63e
séance
M 2741
Débat
Le président. Nous abordons notre urgence suivante. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à l'auteure de ce texte, Mme Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, l'Allondon n'est pas n'importe quelle rivière, c'est la plus belle, la plus emblématique. Véritable trait d'union à travers la frontière, elle tisse entre le Jura et le Rhône un lien naturel, précieux et unique. Réserve d'intérêt cantonal, national et même international, le vallon de l'Allondon est un joyau de biodiversité; sa rivière est vitale pas seulement pour les poissons, mais aussi pour notre population, qui apprécie ses paysages alluviaux et ses rives naturelles, dès les premiers jours du printemps. (Brouhaha.)
Une voix. Chut !
Mme Christina Meissner. Alors qu'en aval, Genève fait tout pour protéger la rivière, en amont, la France multiplie sur ses affluents les centres commerciaux: Val Thoiry sur l'Allemogne et maintenant Open sur la nappe phréatique de l'Ouaf et du Lion. La qualité de l'eau est déjà détériorée, comme l'ont montré les analyses sur ces affluents. Voulons-nous les assécher et infliger à l'Allondon un coup fatal ? Au regard des efforts de renaturation entrepris durant plus de vingt ans, il n'est pas acceptable de condamner maintenant cette rivière. L'Allondon vaut bien plus qu'un centre commercial de plus. Un de trop.
Le moratoire décrété en 2020 par le président Emmanuel Macron sur les nouvelles zones commerciales de périphérie ne semble perturber d'aucune manière le maire de Saint-Genis, alors que ses habitants n'ont pas hésité à aller jusqu'à Bourg-en-Bresse pour interpeller le préfet d'une région où le nombre de mètres carrés de surface commerciale est déjà de 50% supérieur à la moyenne nationale française. Quid du projet d'agglomération et de son objectif de durabilité ? Quid des engagements pris à travers de multiples accords transfrontaliers relatifs à la qualité de l'eau et des milieux naturels ? Il est temps de rappeler à nos amis français que nous partageons le même territoire, ses atouts et ses valeurs, mais aussi les impacts infligés et les déboires. Au-delà des conventions transfrontalières, il en va aussi d'un respect mutuel. La région doit se construire ensemble, elle doit aussi se protéger ensemble.
La conseillère nationale Delphine Klopfenstein a interpellé le Conseil fédéral afin qu'il intervienne auprès de la France pour marquer le refus de ce centre commercial. Il est donc juste et complémentaire d'interpeller avec cette motion notre gouvernement cantonal. Le moment est bien choisi, car il est demandeur de l'appui parlementaire, comme le conseiller d'Etat Antonio Hodgers l'a déclaré en commission à l'occasion du traitement d'une pétition intitulée «De l'eau, de l'eau, pensez aux rivières genevoises !», une pétition que nous avons par ailleurs tous largement soutenue. Le gouvernement - et M. Hodgers me l'a rappelé ce matin - est justement en train de réfléchir aux moyens d'action contre ce centre Open. C'est donc maintenant que notre parlement doit venir l'appuyer dans ses démarches en lui renvoyant directement cette motion.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Christina Meissner. Une motion qui demande non seulement que Genève soit pleinement associée à l'étude d'impact, mais aussi que le gouvernement agisse au niveau juridique, si cela s'avère nécessaire. Pour sauver notre rivière et son environnement, mais pas seulement: il s'agit également de préserver nos entreprises et nos commerçants, mis à mal par la crise sanitaire et qui n'ont nul besoin de cette pression supplémentaire. Il ne s'agit plus de se taire; un signal fort est de mise. Merci de votre soutien au renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est cosignée par les Vertes et notamment par ma collègue Adrienne Sordet. Ce texte invite le Conseil d'Etat à agir. Agir pour la protection de l'environnement - de notre environnement -, pour la protection de notre biodiversité, pour la protection de la rivière de l'Allondon et de son vallon, mais aussi pour la protection de notre région - si belle, mais en danger -, d'une faune et d'une flore exceptionnelles et d'écosystèmes fragiles, pourtant protégés par de nombreuses conventions et accords transfrontaliers, régionaux et internationaux.
L'Allondon est une rivière transfrontalière, qui prend sa source en France et qui s'écoule vers Saint-Genis-Pouilly, puis en direction de Genève pour rejoindre le Rhône. Contrairement aux autres rivières, c'est en aval qu'elle est le plus sauvage et préservée et c'est en amont que les dangers de dégradation sont les plus forts. Pour Genève et pour la Suisse, le vallon de l'Allondon est une zone alluviale d'importance nationale qui risque, si on ne fait rien, de devenir un lit sec et rocailleux. D'ailleurs, notre conseillère nationale Delphine Klopfenstein Broggini a aussi déposé une interpellation à ce sujet. Pourquoi ? Parce qu'un grand danger menace: un projet XXL, un centre commercial et de loisirs doit être construit à proximité. Il s'étalerait sur 50 000 mètres carrés de zone agricole et son parking accueillerait 2000 voitures, ce qui générerait un trafic de plus de 10 000 voitures par jour, soit 40% d'augmentation de la circulation dans une région déjà saturée par le trafic motorisé.
Nous nous opposons fermement à la construction de ce mammouth nommé Open, car au lieu d'utiliser cette surface agricole, nous pensons bien au contraire qu'il faut justement préserver ces surfaces agricoles à l'intérieur du Grand Genève pour pouvoir nourrir la population locale, dans une optique de souveraineté alimentaire, mais aussi parce que ce projet va à l'encontre de la préservation du patrimoine naturel et va péjorer la qualité de vie des habitantes et des habitants de la région.
Enfin, ce projet est à l'opposé de nos valeurs vertes, parce qu'il encourage une consommation frénétique et incohérente dans le contexte de l'urgence climatique. Ce projet passéiste va contre les valeurs de proximité, va contre l'économie circulaire, va contre les valeurs de sobriété que nous défendons, et nous préférons soutenir les artisans et les petits commerçants, encore plus dans le contexte de la crise covid, une crise économique et sociale.
Nous, les Vertes et les Verts, soutenons avec vigueur cette motion et demandons à travers elle que le Conseil d'Etat agisse et s'oppose fermement à ce projet démesuré, dépassé et néfaste pour notre environnement, pour notre qualité de vie et pour notre économie. Merci.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, nous connaissons tous l'Allondon, une petite rivière qui prend sa source au pied du Jura, en France, et qui, après avoir traversé l'ouest de notre canton, se jette dans le Rhône. Dans ma jeunesse, j'y pratiquais le canoë, un peu plus tard, la pêche. C'est une rivière magnifique, un biotope exceptionnel tant du point de vue de sa faune que de sa flore, une des rares rivières de Suisse courant toujours librement dans notre pays.
Le val de l'Allondon fait l'objet de diverses mesures de protection et est inscrit sur la liste des milieux naturels classés de Suisse, voire d'Europe. A l'époque, le CERN, par le biais du rejet de ses eaux de refroidissement, avait déjà mis à mal cette rivière. Il ne sert pas à grand-chose d'investir des moyens financiers considérables pour protéger, surveiller et classer un site naturel d'importance si les débits, notamment en période d'étiage, ou la qualité de l'eau qui l'alimentent sont remis en question.
La construction d'un mégacentre commercial et de loisirs sur la partie française de l'Allondon est clairement de nature à mettre en danger la survie de cette rivière. Il est dès lors opportun de porter un message fort à l'adresse des autorités françaises, pour qu'elles mettent tout en oeuvre afin d'assurer la pérennité et la protection de cette rivière.
S'agissant de nos voisins, ce message s'inscrit dans le droit fil des mesures dont nous souhaitons faire bénéficier également l'Aire ainsi que les autres rivières alimentées par de l'eau provenant des départements de l'Ain ou de la Haute-Savoie. Il faut tout mettre en oeuvre afin que l'eau arrivant à nos frontières soit potable. Le MCG avait d'ailleurs fait oeuvre de pionnier en déposant une motion demandant la protection des eaux de l'Aire, refusée par la commission de l'environnement, mais que d'autres partis de cet hémicycle ont reprise à leur compte, non sans s'en servir ensuite comme objet de campagne. Je rappelle au passage que la rétrocession d'impôts prélevés auprès des bien trop nombreux frontaliers doit également permettre la préservation de nos rivières. Tout naturellement, vu le caractère d'urgence, le groupe MCG vous invite à accepter cette motion et à la voter sur le siège. Je vous remercie de votre attention.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, je ne reviendrai pas sur les aspects, très bien décrits par mes préopinantes et préopinants, de la valeur paysagère de l'Allondon et de l'ensemble du site, valeur qui, bien sûr, nous est chère et que nous entendons, nous, socialistes, défendre.
J'aimerais insister sur le volet aménagement que ce type d'infrastructures suppose. Si nous voulons construire la région ensemble, nous devons regarder ce type d'équipements sur l'ensemble de la région. Or il est inutile de vous nommer tous les centres commerciaux qui jalonnent la route de Meyrin et qui se poursuivent de l'autre côté de la frontière, jusqu'à Ferney. Ce type d'équipements, de grands centres commerciaux, fait partie de l'aménagement du passé. Très clairement, cautionner ce type d'infrastructures revient à renforcer l'imperméabilisation des sols, et pas seulement du point de vue du centre commercial, mais évidemment avec la construction de parkings que cela suppose. Si vous allez aujourd'hui à Saint-Genis, vous constatez que, de semaine en semaine, ce qui était une petite commune devient, pour moi, pour nous, un non-lieu, avec des bâtiments qui poussent hors échelle, comme des champignons; une impression que ce centre commercial vient renforcer.
Si nous voulons un aménagement de qualité à l'échelle transfrontalière, nous devons effectivement nous opposer à ce centre commercial. Nous devons aussi relever qu'il entraînera des flux de voitures énormes, parce qu'aujourd'hui, il n'y a pas d'infrastructures de transports publics dignes de ce nom, et je vous rappelle que nous avons, à la commission d'aménagement, évoqué cette problématique, notamment avec la question du CERN; les problèmes de mobilité qui ont été observés - et qui sont déjà nombreux - seront accentués par ce type de construction.
Alors oui, ce centre commercial est un objet du passé. Il va à l'encontre du commerce local, comme d'autres l'ont mentionné tout à l'heure. C'est une certaine façon de consommer, de ne pas soutenir la proximité et les commerces locaux; c'est aussi une façon de mettre en péril les commerces non seulement du côté genevois, mais également du côté français. Nous renverrons donc cette motion au Conseil d'Etat, en demandant qu'il agisse avec vigueur.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, dans cette affaire, je crois qu'il y a deux responsables: le Conseil d'Etat qui ne fait rien et notre parlement qui ne se mobilise pas. Pourtant, on habite dans le même bassin de vie, les uns et les autres, autour du Léman - on a la chance d'y habiter; de plus, ça bouge, à la base, en France ! J'ai participé - j'étais le seul d'ailleurs, alors que nous étions tous invités - à une manifestation contre cet hypercentre commercial, qui va augmenter l'impact de la mobilité de manière considérable. Pourtant, les autorités, elles aussi au courant et étant elles aussi interpellées - comme elles ont été interpellées au sujet de l'autoroute du Chablais - ne font rien ! Elles ne font rien, et c'est grave ! Alors que les autorités françaises des communes sont également opposées à ce centre commercial ! Et le Conseil d'Etat reste l'arme au pied, en prétendant que ça ne le concerne pas, alors que des investissements très importants - très importants ! - ont été faits par la collectivité, notamment avec le CEVA et le tram, pour aller jusqu'à ces communes amies françaises, pour privilégier le transport collectif plutôt que le transport individuel. C'est effectivement le trafic de 50 000 voitures qui va être généré par ce centre commercial. C'est trop tard, et là on nous dira: «Oui, mais c'est la justice qui tranchera !»
C'est effectivement trop tard, il aurait fallu que les autorités se bougent et déposent un recours elles aussi, comme celles de la Ville l'ont fait contre l'autoroute du Chablais, recours auquel le canton a refusé de s'associer. J'espère qu'il n'en sera pas de même à l'avenir, mais toujours est-il que si nous voulons un bassin de vie cohérent, nous devons nous associer aux habitants de ces régions qui se mobilisent à la base et participer aux manifestations qu'elles et eux organisent régulièrement pour faire en sorte que cette région lutte contre la dégradation du climat, lutte contre la disparition des surfaces agricoles et lutte pour la biodiversité, parce que l'Allondon contribue à la diversité biologique. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Françoise Nyffeler pour trente secondes.
Mme Françoise Nyffeler. Non, excusez-moi ! M. Pagani a parlé pour notre groupe.
Le président. Très bien, je vous remercie. Monsieur le député Stéphane Florey, c'est à vous.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Dire que le Conseil d'Etat ne fait rien sur ce sujet, ce n'est pas tout à fait vrai, puisque en commission, on a eu l'occasion d'en discuter, notamment avec le conseiller d'Etat Antonio Hodgers, dans le cadre d'un débat sur la pétition qui a été évoquée, «De l'eau, de l'eau», ou quelque chose comme ça. On a justement pu évoquer l'impact du centre commercial Open sur l'Allondon. On nous a expliqué qu'effectivement, c'était un dossier compliqué et que lancer des oppositions, c'est une chose; qu'elles aboutissent, c'en est une autre. Mais il est surtout ressorti de ces discussions que c'est un domaine qui relève de la Confédération: c'est à elle principalement qu'il revient de négocier avec les voisins français au sujet de l'impact sur l'Allondon dans toute la région.
Maintenant, bien évidemment, nous allons soutenir cette motion, qui va dans le bon sens. Malheureusement, elle est un peu gentillette, disons. On marque une fois de plus une opposition; ça, c'est juste, on doit le faire, effectivement, on doit remettre un coup sur ce projet, parce que ceux qui ont vu de quoi on parle... On parle d'un projet de malade ! Ceux qui ont l'occasion de naviguer sur YouTube peuvent aller voir: il y a toute une présentation de ce centre commercial - un petit film qui dure plusieurs minutes -, mais c'est vraiment un truc de fou ! On vous explique que Genève est une région totalement dévastée quant aux centres commerciaux, que tout est obsolète, qu'il faut absolument venir à Open, que c'est le nouveau lieu de vie, non pas de Genève, mais de la région entière. C'est vraiment un truc hyper agressif destiné à tuer l'économie genevoise. Il faut véritablement avoir ça à l'esprit. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Enfin, dernière chose, quand je disais «gentillette», c'est parce que finalement, on demande les choses, mais on ne prévoit aucune mesure de rétorsion ou en tout cas on ne demande pas que des mesures de rétorsion vis-à-vis de nos voisins français soient prises, si le projet devait être accepté malgré tout par les autorités françaises. On ne prévoit rien à ce niveau-là. C'est pour ça que j'ai vite bricolé un amendement qui va dans ce sens et qui demande...
Le président. Merci.
M. Stéphane Florey. J'ai écrit vite fait, ça m'est venu, là, comme ça...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député. Je lirai votre amendement.
M. Stéphane Florey. ...un amendement qui demande justement des mesures de rétorsion...
Le président. Oui, c'est terminé.
M. Stéphane Florey. ...à l'encontre de nos voisins français, si ça devait... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur s'exprime hors micro.)
Le président. Madame la députée Danièle Magnin, vous avez la parole pour quarante-cinq secondes. (Un instant s'écoule.)
Mme Danièle Magnin (MCG). C'est à moi ? Merci, Monsieur le président...
Le président. Madame la députée Danièle Magnin, vous avez la parole pour quarante-cinq secondes.
Mme Danièle Magnin. ...mais alors vraiment, on n'entend rien dans cette salle ! Je voudrais raconter l'histoire de ce Genevois, grand voyageur, qui arrive un jour à mille milles de toute terre habitée, en pleine brousse, au Kasaï, dans une mission qui accueille des gens pour le bivouac. Il y a une table commune, à laquelle des gens venant de différents lieux du monde parlent du vallon de l'Allondon et du moût qu'on y boit en octobre. Alors ne laissons pas le démolir, s'il vous plaît, ne laissons pas lui nuire ! Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Madame la députée Christina Meissner, auteure du texte, vous avez la parole pour deux minutes.
Mme Christina Meissner (PDC). Je vous remercie, Monsieur le président. Je souhaitais juste intervenir par rapport à l'amendement que M. Stéphane Florey vient de déposer, qui propose d'ajouter une invite demandant de prévoir des mesures de rétorsion à l'encontre de nos voisins français en cas de construction du projet Open. Bon, quant à moi, j'ai été un tout petit peu plus douce, en disant qu'il est effectivement nécessaire de s'opposer au projet du centre commercial de Saint-Genis, y compris en faisant recours devant les juridictions françaises et en faisant appel à la Confédération pour qu'elle interpelle aussi la France. Je crois qu'il faut commencer par là, par les mesures d'opposition, par faire recours, voir ce qui se passe, et selon les résultats, en effet, peut-être qu'il faudra - parce qu'on a des relations transfrontalières, du moins je l'espère, on a de nombreuses conventions transfrontalières, et c'est là-dessus qu'il faudra jouer à un moment donné, mais probablement que... On va dire que c'est une mesure qu'il faudrait éventuellement prévoir plus tard et pas tout de suite. Mais comme vous voulez ! Je ne m'oppose pas, en tout cas, à cette invite supplémentaire !
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en entendant M. le député Pagani m'est venue en tête une maxime qui dit à peu près ceci: «Pire que les ignorants, ceux qui croient savoir.» Quand on ne sait pas, on pose des questions, à moins qu'on ne veuille pas entendre les réponses ! Mais asséner ici que le Conseil d'Etat ne fait rien et qu'il regarde les choses se faire... Certes, nous n'avons pas engagé de recours tonitruant, qui dessert l'image de Genève davantage qu'il ne la sert, mais le travail se fait, et le Conseil d'Etat communiquera en temps voulu sur les démarches qu'il a entreprises dans l'intérêt du canton de Genève.
D'ailleurs, le Conseil d'Etat reçoit volontiers cette motion, puisqu'il est parfaitement en phase avec les préoccupations exprimées ici. Il est clair que les cours d'eau transfrontaliers font l'objet d'une attention toute particulière - du reste, la France elle-même porte une attention toute particulière aux eaux qui viennent de Suisse et qui passent en France; il y a donc évidemment à tout le moins une réciprocité qui s'impose.
Le Conseil d'Etat reçoit donc volontiers cette motion. Nous sommes heureux que dans les arguments que nous avons entendus en rapport avec ce grand centre commercial Open - puisque c'est le nom qui lui a été attribué -, on entende aussi la volonté de préserver notre économie. Les faiblesses, précisément, de notre économie face au tourisme d'achat transfrontalier constituent une préoccupation exprimée ici à l'occasion d'une problématique, certes importante, de nature écologique; nous souhaiterions que ces mêmes préoccupations s'expriment lorsqu'il s'agira, le moment venu, d'examiner la question des horaires de nos magasins et de leur permettre d'être concurrentiels par rapport à la France voisine. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Rémy Pagani, oui, vous avez demandé la parole, je vous ai vu courir partout, donc nous supputons que vous avez préparé un amendement de dernière minute. Est-ce le cas ?
M. Rémy Pagani (EAG). Oui oui, Monsieur le président. Je propose une quatrième invite...
Une voix. Non ! (Remarque.)
M. Rémy Pagani. ...consistant à supprimer «si cela s'avérait nécessaire» et donc à ne laisser que «à s'opposer au projet d'un centre commercial à Saint-Genis-Pouilly». (Commentaires.)
Le président. Ce serait donc une sixième invite, puisque M. Florey a déjà proposé une cinquième, alors on verra... (Commentaires.)
Une voix. Non, il s'agit de supprimer l'invite !
Une autre voix. Supprimer ! Supprimer l'invite ! (Un instant s'écoule. Commentaires.)
Le président. Monsieur Pagani, si nous avons bien compris... (Rire.) ...parce que c'est un peu succinct, il s'agit donc de supprimer la quatrième invite ?
Une voix. Non, le début ! (Commentaires.)
M. Rémy Pagani. Il ne s'agit pas de supprimer la totalité de la quatrième invite: il est dit, par Mme Meissner, «si cela s'avérait nécessaire». Je propose qu'on enlève ce membre de phrase et qu'on laisse uniquement «à s'opposer au projet du centre commercial de Saint-Genis, y compris en faisant recours».
Le président. Point ?
M. Rémy Pagani. Voilà. (Commentaires.)
Le président. «[...] y compris en faisant recours devant les juridictions françaises [...]» ?
M. Rémy Pagani. Supprimer tout ce qu'il y a avant la virgule !
Le président. Bon, écoutez, le problème, c'est que votre amendement, c'est ça ! (Le président montre l'amendement de M. Rémy Pagani, sur lequel il est écrit à la main: «4. Si ...... à s'opposer». Rires.) Donc voilà, il n'y a rien ! Dites-moi au moins où se trouve le point de la phrase !
M. Rémy Pagani. Le premier... (Remarque.) On est au quatrième alinéa et c'est la première partie de la phrase !
Une voix. Monsieur le président, laissez-moi vous expliquer, je vais faire ça...
Le président. Non ! (Rires.) Non ! (Remarque. Rires.) Absolument pas ! Nous allons attendre que M. Pagani ait fini son amendement et, pendant ce temps, je vais... (Commentaires.) Oui, un instant. Monsieur Murat-Julian Alder ?
M. Murat-Julian Alder (PLR). Merci, Monsieur le président. Ce n'est pas très clair, tout ça ! (Rire.) Afin que M. Pagani puisse trouver le temps de rédiger son amendement et de nous le faire comprendre, je propose le renvoi en commission. Merci. (Exclamations.)
Une voix. Pas du tout ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, comme nous n'avons pas encore commencé à voter les amendements, je vous invite à vous prononcer en premier lieu sur cette demande de renvoi en commission. Le vote est lancé. Ah, attendez, la commission n'est pas précisée ! (Brouhaha.) Quelle commission ?
Une voix. Environnement ! (Commentaires.)
Le président. Voilà, la commission de l'environnement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2741 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejeté par 47 non contre 18 oui et 1 abstention.
Le président. Nous reprenons maintenant le traitement des amendements et commençons par celui de M. Florey, qui a été déposé en premier. Il s'agit d'ajouter une invite disant ceci: «à prévoir des mesures de rétorsion à l'encontre de nos voisins français en cas de construction du projet Open». Donc...
Une voix. A déclarer la guerre !
Le président. Oui, Monsieur Poggia: à déclarer la guerre ! Heureusement que nos voisins sont français et pas chinois ! (Commentaires.) Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 79 non contre 7 oui et 2 abstentions.
Le président. Nous passons maintenant à l'amendement de M. Pagani, qui s'est clarifié. Il consiste à modifier la quatrième invite. Elle se présenterait donc comme suit:
«4e invite (nouvelle teneur)
- à s'opposer au projet du centre commercial de Saint-Genis, y compris en faisant recours devant les juridictions françaises et en faisant appel à la Confédération pour qu'elle interpelle à son tour la France sur le risque d'atteinte aux eaux courantes et souterraines transfrontalières.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 68 oui contre 21 non et 1 abstention.
Mise aux voix, la motion 2741 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 76 oui contre 13 non et 1 abstention. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)