Séance du vendredi 1 novembre 2019 à 14h
2e législature - 2e année - 6e session - 29e séance

P 2067-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition des habitants du quai du Seujet 12-14
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 31 octobre, 1er et 7 novembre 2019.
Rapport de majorité de M. Stéphane Florey (UDC)
Rapport de minorité de M. Olivier Baud (EAG)

Débat

Le président. Nous abordons maintenant les pétitions, que nous traitons toutes en catégorie II, trente minutes. Voici la première: la P 2067-A. Je passe la parole à M. Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une fois encore, notre Grand Conseil est saisi d'une pétition sur les nuisances liées d'une part au trafic de drogue qui gravite autour de l'Usine, d'autre part au bruit qui en émane. Une fois de plus, nous sommes confrontés à des habitants qui n'en peuvent plus, qui vivent une situation pénible à tous les niveaux; ils subissent les déprédations des personnes qui viennent squatter les rez-de-chaussée des immeubles, notamment ceux situés au quai du Seujet 12-14.

Il faut souligner que nous avons traité l'ensemble des plaintes en une seule séance, parce que la commission est déjà bien au courant de ces problèmes. Comme je l'ai dit en préambule, ce n'est pas la première fois que nous abordons ce sujet: de nombreuses pétitions ont été déposées par d'autres habitants du quai du Seujet, par des résidents de Saint-Jean s'agissant des falaises de Saint-Jean et par des personnes habitant la Jonction, toutes concernant exactement les mêmes nuisances.

Toutes ces doléances se rejoignent, c'est la raison pour laquelle la commission des pétitions a décidé qu'il fallait tout de suite renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour qu'il nous apporte de nouvelles réponses: qu'entend-il entreprendre, qu'a-t-il éventuellement déjà fait, que pourrait-il encore améliorer ? Le tout en répondant aux préoccupations des pétitionnaires sur le texte dont il est question aujourd'hui. Voilà pourquoi la majorité vous invite à suivre ses conclusions et à soutenir le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Olivier Baud (EAG), député suppléant et rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition «des habitants du quai du Seujet 12-14» ne porte pas un titre très explicite, vous en conviendrez, et peut-être certains d'entre vous n'ont-ils pas eu le temps d'en prendre connaissance. Son contenu est assez complexe, il est difficile de déterminer a priori ce qu'elle demande exactement.

On constate d'abord que les pétitionnaires fustigent la permissivité des forces de l'ordre qui ne feraient rien contre les dealers fréquentant les alentours de l'Usine; dans le même temps, ils évoquent un sentiment d'insécurité sans que l'on sache vraiment quelles en sont les causes, puisque les dealers sont reconnus comme non dangereux. Le problème serait donc le bruit, mais celui de l'Usine ou celui des personnes qui restent dehors pour jouir d'un espace ma foi public, ainsi que c'est autorisé ?

Ensemble à Gauche, vous le savez, a toujours souhaité que la commission des pétitions ne constitue pas qu'une simple chambre d'enregistrement et exécute son travail correctement. Ce qu'on a compris en auditionnant les pétitionnaires, c'est qu'ils dénoncent surtout la pollution sonore, laquelle porte atteinte à la santé des habitants de l'immeuble, puisqu'elle les empêche de dormir. Il s'agit certes d'un problème important, mais puisque la commission n'a entendu que les pétitionnaires, on ne peut pas dire qu'elle ait véritablement fait son travail. Rien ne justifie le renvoi immédiat au Conseil d'Etat: les pétitionnaires l'ont dit, cela fait trente-huit ans que la situation dure. Renvoyer le texte au gouvernement comme ça, sans écouter ne serait-ce que la gendarmerie, la Ville de Genève ou la GIM - l'Usine relève des affaires municipales - ça ne va pas.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité que représente Ensemble à Gauche demande le renvoi de cette pétition en commission. Nous souhaitons que les auditions qui ont été demandées et refusées aient lieu, que la commission effectue correctement son travail et débroussaille cette affaire qui dure en effet depuis longtemps. Se borner à la renvoyer au Conseil d'Etat ne changera rien, on n'améliorera pas la situation. Mesdames et Messieurs les députés, acceptez le renvoi en commission; une ou deux auditions devraient suffire, et la commission des pétitions aura fait son travail.

Le président. Merci. Monsieur Florey, avez-vous quelque chose à ajouter par rapport à cette requête ? (Remarque.) Je vous redonne la parole.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Le renvoi de la pétition en commission ne sert absolument à rien. La minorité ne cherche qu'une chose, noyer le poisson, si on peut le formuler comme ça, en multipliant les auditions sur un problème qui, je le répète, est largement connu.

Voilà des années que la commission des pétitions traite régulièrement ce sujet: nous avons examiné de nombreuses pétitions qui ont toutes été renvoyées au Conseil d'Etat et auxquelles celui-ci a déjà répondu; malheureusement, le problème persiste. Mais les éléments et les faits sont connus ! Procéder à de nouvelles auditions n'apportera aucun élément nouveau.

Ce que la majorité veut aujourd'hui, c'est aller vite, répondre rapidement aux pétitionnaires et savoir ce que le Conseil d'Etat entend faire, comment améliorer les choses et apporter une réponse aux habitants du quai du Seujet 12-14. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, je vous recommande fortement de refuser le renvoi de cette pétition en commission et, à la place, de l'adresser au Conseil d'Etat. Merci.

Le président. Merci bien. Je lance la procédure de vote sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2067 à la commission des pétitions est rejeté par 39 non contre 36 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons le débat, et je laisse la parole à Mme Anne Marie von Arx-Vernon.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, au nom du parti démocrate-chrétien, je m'inscris en faux contre les propos du rapporteur de minorité. Il ne s'agit pas de diluer les choses et de perdre du temps, il s'agit de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat précisément pour gagner du temps, c'est le plus grand témoignage de respect que l'on puisse manifester aux pétitionnaires.

Comme l'indique le rapport de majorité, les faits dénoncés dans ce texte ont été corroborés par de nombreuses autres motions et pétitions. Procéder à des auditions supplémentaires ne servira qu'à générer des jetons de présence pour les députés... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ce qui n'est pas notre priorité. (Un instant s'écoule.)

Le président. Poursuivez, Madame.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon. Merci, Monsieur le président. Notre priorité, c'est l'écoute des pétitionnaires, puis la réflexion pour trouver une solution rationnelle et efficace aux problèmes identifiés; ensuite, notre responsabilité est de nous décider rapidement pour mobiliser le gouvernement qui, en l'occurrence, est le seul à pouvoir prendre des mesures. Pour le parti démocrate-chrétien, il convient donc de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Jean Romain (PLR). Ecoutez, la pétition n'est pas particulièrement complexe. Deux aspects sont relevés: celui des dealers et celui du bruit - évidemment, ce ne sont pas forcément eux qui causent le bruit, nous sommes d'accord. Les pétitionnaires éprouvent un sentiment d'insécurité qui est moins suscité par les dealers que par les clients de ceux-ci, par toute la faune qui tourne autour: il y a des défécations, des vomissements.

On nous dit que nous avons voulu aller trop vite... (Brouhaha. Un instant s'écoule.)

Le président. Je vous laisse continuer, Monsieur Romain.

M. Jean Romain. Je vous remercie, Monsieur le président. Non, nous ne sommes pas allés trop vite, parce qu'il y a déjà eu quantité de pétitions demandant exactement la même chose. La commission judiciaire, de son côté, a traité une motion sur ce sujet et auditionné la police cantonale. On ne va pas refaire le même travail ! Les résultats sont connus, le problème est récurrent. Certes, nous n'allons pas le résoudre d'un seul coup, mais enfin, renvoyons la pétition immédiatement au Conseil d'Etat, puisque de nombreuses pétitions sont du même ordre, pour gagner du temps et éviter d'en perdre, comme l'a dit Mme von Arx. C'est le plus simple; ensuite, le Conseil d'Etat nous communiquera sa réponse, qui sera ce qu'elle est.

Voilà ce qu'il faut faire, et certainement pas renvoyer la pétition en commission. En effet, je ne vois pas au nom de quoi de nouvelles auditions feraient changer d'avis les commissaires qui n'ont pas voulu perdre de temps: c'est peine perdue. Il faut savoir raison garder, et le PLR propose de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat, selon la position de la majorité des députés qui se sont exprimés. Merci.

M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition demande trois choses simples - ou plutôt fait le constat de trois problèmes autour de l'Usine: l'attroupement des jeunes dans l'espace public, le deal dans ce périmètre et le bruit qui émane de l'Usine et de ses alentours.

Le parti socialiste connaît les enjeux autour de ce quartier, entend les pétitionnaires, partage leur souci quant aux nuisances; en revanche, il est totalement en désaccord avec les solutions préconisées dans le texte, à savoir déloger les dealers, proscrire les réunions devant les entrées d'immeubles et imposer aux organisateurs de limiter les émissions sonores - on ne sait même pas si elles proviennent de l'intérieur ou de l'extérieur de l'Usine.

Plutôt que de déloger les dealers, nous suggérons, comme l'a fait le Portugal en 2001, de dépénaliser les drogues... (Commentaires.) ...et de les légaliser à terme: ce serait une piste créative pour changer de paradigme. Plutôt que d'interdire aux jeunes d'investir le domaine public, nous proposons de leur offrir des espaces dédiés. Quand, dans les années 80, Genève avait des squats, des endroits où on pouvait se rendre sans payer une bière 8 ou 10 francs, nous étions moins confrontés à ces situations où les jeunes, chassés des préaux ou ne pouvant pas entrer dans les lieux nocturnes, se retrouvent à l'extérieur et engendrent des nuisances pour les habitants. Enfin, plutôt que de dicter des limites, nous souhaitons développer des médiateurs de nuit, des chuchoteurs; c'est ce qui a été entrepris dans les bars à la rue de l'Ecole-de-Médecine, et on constate une baisse des problèmes.

Nous regrettons que la droite s'en tienne à des propositions qui ont échoué. S'agissant du climat et de l'écologie, par exemple, la droite s'est obstinée durant des années à nier le réchauffement climatique ainsi que les mutations structurelles pour finir tardivement - trop tardivement ! - par amorcer un changement. En ce qui concerne les nuisances et les difficultés de vie ensemble, là aussi, nous pensons qu'il faut changer de paradigme, arrêter de vouloir déloger, interdire, imposer, mais au contraire ouvrir et développer de nouveaux espaces, permettre aux gens de nouer des dialogues et aux jeunes de s'approprier d'autres lieux.

C'est la raison pour laquelle nous sollicitons à nouveau le renvoi de cette pétition en commission; nous espérons que la droite changera de disque - pas dans vingt ans, mais maintenant - comprendra que la ville évolue, que nous devons penser à d'autres solutions. A la place de renvoyer constamment au Conseil d'Etat des textes qui ne visent qu'à durcir la répression sans rien changer, il s'agirait de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil puis de chercher ensemble, Mesdames et Messieurs de tous les bords politiques, de vraies réponses aux problématiques de la ville. Merci !

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci. Je salue dans le public les membres de l'association Women Alb World International Association. Elles sont accompagnées par Mme Juliana Cici, secrétaire générale. (Applaudissements.) Concernant la demande de renvoi, je cède la parole à M. Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je le répète: le renvoi de cette pétition en commission ne sert absolument à rien. Ce que cherche à faire la minorité, c'est imposer une solution que voudrait non pas la Ville, mais la gauche, c'est nous entraîner dans un débat pour légaliser les drogues et leur trafic. Or le pétitionnaire s'y est clairement refusé, suivi par la majorité de la commission qui n'est pas entrée dans ce petit jeu. Je le redis ici: il faut rejeter le renvoi de cette pétition en commission et soutenir celui au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Olivier Baud (EAG), député suppléant et rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il y a quelque chose de fondamentalement antinomique dans le discours de la majorité, puisqu'elle prétend que toutes les réponses aux questions que soulève cette pétition ont déjà été apportées; dans ce cas, pourquoi la renvoyer au Conseil d'Etat ? Si les solutions sont connues, alors épargnons un texte au Conseil d'Etat et déposons-la sur le bureau du Grand Conseil.

Bon, il se trouve que ce n'est pas ma position ni celle de mon parti. Désolé, mais le groupe Ensemble à Gauche est dénué de partis pris politiques: nous sollicitons le renvoi en commission non pas pour que les commissaires changent d'avis, Monsieur Romain, mais simplement pour que la commission fasse son travail et que ses membres bénéficient d'informations étayées. C'est la seule raison.

Il règne une grande hypocrisie au sein de ce plénum, Mesdames et Messieurs. En effet, quand il est question de pétitions qui réclament une baisse des nuisances sonores, notamment en réduisant la vitesse des véhicules, elles sont systématiquement refusées. Pourtant, pour diminuer le bruit, il serait beaucoup plus simple de faire passer la vitesse des véhicules de 60 à 40 km/h. Mais non, c'est une proposition que vous rejetez systématiquement. Et quand il s'agit de fustiger l'Usine, que les pétitionnaires demandaient par ailleurs de déplacer à l'aéroport, parce que sous les avions, ça ne gênerait personne... Non, nous devons faire le travail décemment.

Si l'on veut traiter le problème des nuisances sonores avec sérieux, il nous faut entendre par exemple la gendarmerie. Les pétitionnaires soutiennent que la police ne fait rien, ça vous laisse insensibles ? Les forces de l'ordre de notre canton sont remises en question assez durement, et elles ne pourraient pas se défendre, on ne pourrait pas les écouter ? Je n'aimerais pas qu'on détourne notre demande de renvoi en commission: il s'agit simplement de mener les auditions qui ont été demandées, il n'y a aucune volonté de prolonger le débat, non, simplement de disposer des éléments permettant à la commission de prendre une décision en toute connaissance de cause. Merci.

Le président. Merci. Je mets aux voix cette nouvelle proposition de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2067 à la commission des pétitions est rejeté par 47 non contre 40 oui et 1 abstention.

Le président. La parole revient à M. Pierre Bayenet pour quarante-quatre secondes.

M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Je serai bref, puisqu'il me reste quarante-quatre secondes. Tant que la politique en matière de drogue sera fondée sur la répression, nous ne trouverons pas de solution. Il faut ouvrir la boîte, il faut réfléchir: c'est une question de gestion de l'espace public, de cohabitation délicate, donc il s'agit de réglementer son usage, de renforcer la prévention, d'offrir des lieux aux jeunes pour qu'ils ne passent pas leur temps dehors à boire de l'alcool.

Tout cela fait aussi partie de ce qui est relevé dans cette pétition: elle ne s'attaque pas seulement aux dealers, mais au difficile partage du domaine public dans un périmètre très occupé. Nous devons ainsi réfléchir et faire des propositions utiles, pas simplement exiger que la police débarque pour chasser tout le monde, car ce n'est pas le genre de ville que nous voulons développer; nous voulons une ville dans laquelle les gens réussissent à cohabiter. Par conséquent, nous préconisons le classement de cette pétition. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, voilà un débat intéressant ! Nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter au Conseil municipal et nous voulions placer la Ville de Genève devant ses responsabilités, puisque c'est elle qui met à disposition le bâtiment de l'Usine. Un rapport de police en partie reproduit dans la presse - «Tribune de Genève» et «GHI» - met en lumière une certaine complicité entre l'Usine et les dealers pour que ceux-ci échappent à la police. A un moment donné, il faut que l'Etat agisse et règle cette situation en rappelant à la Ville ses responsabilités: certes, elle met la structure à disposition, mais il existe un certain nombre de règles et de lois à respecter, il n'y a aucune raison que tout cela soit bafoué.

Il y a quelques semaines, l'Usine a fêté ses trente ans d'activité: c'était musique et bruit 24 heures sur 24 pendant quatre jours ! Demandez aux habitants du Seujet et de Saint-Jean comment ils ont dormi pendant ces quatre jours: ils n'ont pas fermé l'oeil, qu'il s'agisse de jeunes ou de personnes âgées. Il y a des responsabilités à définir, et nous demandons au Conseil d'Etat... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur Sormanni ! Attendons que le silence se rétablisse, histoire qu'on vous comprenne mieux.

M. Daniel Sormanni. Oui, oui. (Un instant s'écoule.) Merci, Monsieur le président. Il y a donc des responsabilités à définir, et je compte sur le Conseil d'Etat pour agir - avec mesure, bien entendu. Il ne s'agit pas de lancer trois bataillons de police pour évacuer les gens autour de l'Usine, mais simplement de faire respecter la loi. L'Usine ne doit pas servir de refuge aux dealers qui tournent sur la place, la Ville de Genève doit prendre ses responsabilités et faire respecter les règles minimales quant à la mise à disposition de ce bâtiment. Alors je compte sur le Conseil d'Etat, je compte sur M. Poggia pour s'en occuper.

Lors des débats au Municipal - trois débats assez nourris, d'ailleurs - la police a été mise en cause, on a prétendu qu'elle ne faisait rien, qu'elle tolérait tout. Non, je ne pense pas que la police ne fasse rien, mais il ne s'agit pas d'embarquer tout le monde pour que ça recommence le lendemain, il s'agit de trouver des solutions pérennes. Encore une fois, je compte sur le Conseil d'Etat pour qu'il s'en charge. En conclusion, quand j'entends des gens ici dire que la solution est de légaliser la drogue, eh bien je me demande où sont les dealers: dans la rue ou dans cette salle ?

Mme Adrienne Sordet (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, au premier abord, ce texte semble porter la même revendication que celle de la pétition 2060 que nous avons traitée en avril dernier, c'est-à-dire en finir avec le deal de rue. Toutefois, après avoir entendu les pétitionnaires et comme cela a été dit, plusieurs thématiques entremêlées nous sont apparues: le deal de rue, les nuisances sonores émanant de l'Usine, mais aussi le rassemblement des personnes sur les terrasses du quai du Seujet, au sixième étage.

Si la commission des pétitions s'est déjà penchée sur ces thèmes à plusieurs reprises, renvoyer cet objet au Conseil d'Etat sans procéder à des auditions, en prétextant que la situation est urgente, que le sujet est connu et qu'il faut gagner du temps donne l'impression que le but est de refiler la patate chaude au gouvernement plutôt que de travailler, d'analyser la situation et de changer réellement les choses.

Quelles pistes et quelles solutions quant au deal dans la rue ? Déloger les dealers ne suffit pas, une réflexion doit être entamée en examinant les causes, en étudiant des alternatives comme la légalisation de certaines drogues. Quelles pistes et solutions quant aux personnes occupant les terrasses du quai du Seujet tard le soir ? Là aussi, une réflexion doit être menée sur la vie nocturne et l'accessibilité pour toutes et tous à des lieux de fête, de culture et d'échange. Quelles pistes et solutions quant aux nuisances sonores engendrées par l'Usine ? La délocaliser à l'aéroport sous prétexte qu'elle ne dérangera personne ne constitue pas une solution pour la culture locale et les jeunes du canton. En effet, l'Usine étant un lieu de culture alternative, elle ne se déplace pas comme on débarrasse un simple container.

Ces voies n'ont pas pu être explorées, puisque la majorité de la commission - un peu fataliste, peut-être - a tout simplement refusé d'entrer en matière sur les auditions de la Ville et de la police. Une entrevue avec le Conseil d'Etat nous aurait par ailleurs permis de connaître les dispositions réellement prises s'agissant de toutes les pétitions mentionnées par M. Florey tout à l'heure. Pour le groupe des Verts, un travail supplémentaire est nécessaire avant de renvoyer cette pétition au gouvernement en toute connaissance de cause. C'est pourquoi nous ne suivrons pas la majorité sur le renvoi au Conseil d'Etat. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie. La parole est au député Jean Romain pour une minute.

M. Jean Romain (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président. En fait, si je comprends bien, voici le raisonnement de la minorité: puisque vous, la droite, n'entendez pas légaliser certaines drogues, puisque vous vous cantonnez à la seule répression, puisque vous ne voulez pas renvoyer cette pétition en commission comme nous le demandons, eh bien il faut la classer - c'est ce que propose M. Bayenet.

Or c'est ne pas tenir compte de ceux qui sont venus se plaindre devant nous, c'est ne pas leur accorder le respect qu'ils méritent. Je rappelle que la possibilité de déposer une pétition constitue un droit démocratique important. Si on la classait, le message serait le suivant: vous qui êtes venus vous plaindre devant nous par le biais d'une pétition, vous êtes malvenus, nous ne voulons pas y donner suite.

Si, nous voulons y donner suite, et il convient pour cela de la confier au Conseil d'Etat; peut-être faudra-t-il attendre sa réponse pour voir ce qu'il en est, mais il est hors de question, chers collègues, de classer cette pétition. Nous allons donc faire ce que la majorité souhaite, à savoir la renvoyer au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci bien. Monsieur Baertschi, vous avez la parole pour une minute.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. J'ai l'impression que certains vivent dans un monde de Bisounours sans voir la réalité. Il suffit pourtant d'arpenter les rues de Genève, d'aller à Plainpalais, à la Jonction ou à Saint-Jean pour se rendre compte qu'il y a un problème très grave, des dealers dans la rue qui pourrissent la vie des habitants de tous ces quartiers. Ne pas l'admettre, c'est vraiment nier la réalité.

Que demandent les personnes qui ont signé cette pétition ? C'est très simple: elles demandent que l'on déloge les dealers des rues, ce qui me semble tout à fait logique, et que l'on fasse respecter la loi, ce qui est tout à fait judicieux également. Bien évidemment, c'est la politique qui est menée actuellement par le Conseil d'Etat et par Mauro Poggia; néanmoins, il est important de soutenir le dépôt...

Une voix. Le renvoi !

M. François Baertschi. Oui, excusez-moi: le renvoi au Conseil d'Etat. Pourquoi est-il important de le soutenir ? Parce que c'est un appui que l'on apporte à la politique...

Le président. Il vous faut terminer, Monsieur Baertschi.

M. François Baertschi. ...du Conseil d'Etat et de Mauro Poggia, c'est un signal que l'on doit donner.

Le président. Merci, Monsieur !

M. François Baertschi. Autrement, c'est le désespoir !

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Je précise, puisque des collègues doutent encore de l'intérêt de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et exigent même l'audition de celui-ci en commission, que ce serait un non-sens. En effet, en renvoyant la pétition au gouvernement, nous aurons une réponse plus rapidement sur les éléments concrets qu'il a peut-être déjà mis en place ou a l'intention de mettre en place. Dans tous les cas, cela nous fera gagner du temps, et c'est la raison pour laquelle le parti démocrate-chrétien vous enjoint de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais rappeler à Mme Sordet - vous transmettrez, Monsieur le président - que le Grand Conseil dispose d'un Mémorial. Comme je l'ai dit dans mes interventions précédentes, toutes les pétitions qui ont déjà été renvoyées au Conseil d'Etat sur ce sujet ont fait l'objet d'une réponse de celui-ci. Ça ne sert à rien d'auditionner le Conseil d'Etat sur des éléments auxquels il a déjà répondu ! Je vous invite à faire une petite recherche dans le Mémorial et à relire les réponses qu'il a déjà apportées; celle qu'il nous donnera sur la pétition 2067 qui nous occupe aujourd'hui viendra les compléter, et nous aurons ainsi rapidement une réponse complète. Encore une fois, Mesdames et Messieurs, je vous demande de soutenir le renvoi au Conseil d'Etat. Merci.

Le président. Merci, Monsieur. Nous passons au vote.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2067 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 46 oui contre 39 non et 1 abstention.