Séance du
vendredi 22 juin 2018 à
8h
2e
législature -
1re
année -
2e
session -
12e
séance
La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Jean Romain, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Pierre Maudet, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Mauro Poggia et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Antonio Hodgers et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat Julian Alder, Delphine Bachmann, Jacques Blondin, Christian Dandrès, Patrick Dimier, Carole-Anne Kast, Eric Leyvraz, Salima Moyard, Sandrine Salerno, Stéphanie Valentino, Salika Wenger et Christian Zaugg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Olivier Baud, Pierre Bayenet, Florian Gander, Amanda Gavilanes, Patrick Hulliger, Xhevrie Osmani et Martin Staub.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Je passe la parole à M. le député Sandro Pistis.
M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG propose une modification de l'ordre du jour, à savoir l'ajout du projet de loi 12373 intitulé «L'instruction publique doit relever du département de l'instruction publique !» Si cette demande est acceptée, je solliciterai la discussion immédiate et l'urgence par la suite.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député... (Un instant s'écoule.) Nous devons attendre le texte, qui arrive sous peu, puis nous pourrons voter. Dans l'intervalle et pour ne pas perdre de temps, j'indique les temps de parole restants pour cette dernière journée... (Commentaires.)
Des voix. On vote !
Le président. Le texte arrive, Mesdames et Messieurs, nous procéderons au vote juste après. J'indique donc les temps de parole restants pour cette dernière journée que nous passons dans notre salle telle que nous la connaissons. Le Conseil d'Etat... Eh bien le Conseil d'Etat a épuisé son temps ! (Exclamations.) Il reste treize minutes à Ensemble à Gauche, vingt et une minutes aux socialistes, dix-neuf minutes aux Verts, dix-neuf minutes également au PDC, trois minutes trente-quatre au PLR, trente minutes à l'UDC...
Une voix. Mais c'est Byzance !
Le président. ...et trente-sept minutes au MCG. (Commentaires.)
Une voix. Je vends un quart d'heure au Conseil d'Etat, si jamais ! (Rires. Le projet de loi est distribué. Quelques instants s'écoulent.)
Le président. Chers collègues, merci pour votre patience. Vous avez désormais le texte du projet de loi 12373 sous les yeux, et nous pouvons dès lors voter la demande d'ajout du MCG. Je précise qu'il faut la majorité des deux tiers pour qu'elle soit acceptée.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 12373 est adopté par 59 oui contre 21 non et 2 abstentions (majorité des deux tiers atteinte).
Le président. La parole revient une nouvelle fois à M. Pistis.
M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Monsieur le président. Etant donné que l'ajout du projet de loi 12373 a été accepté, nous en demandons la discussion immédiate et l'urgence.
Le président. Très bien, je mets tout d'abord aux voix la discussion immédiate.
Mise aux voix, la discussion immédiate du projet de loi 12373 est rejetée par 54 oui contre 29 non (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. Ce projet de loi est donc renvoyé à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport... (Protestations.) Non, il n'y a pas eu deux tiers des voix !
Une voix. Bien essayé ! (Commentaires.)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous reprenons notre discussion sur les comptes...
Une voix. C'est écrit où, les deux tiers ? (Commentaires.)
Le président. L'article 97, alinéa 2, de la LRGC réglemente la question du vote aux deux tiers, Mesdames et Messieurs. Je vous le lis: «Exceptionnellement, le Grand Conseil peut, sur proposition d'un député, décider en tout temps de modifier l'ordre du jour, à la majorité des deux tiers des membres présents.» (Protestations. Commentaires.) Nous avons toujours procédé ainsi, chers collègues, il faut deux tiers des voix.
Annonces et dépôts
Néant.
Suite du deuxième débat
H - SECURITE ET POPULATION
Le président. A présent, j'appelle la politique publique H «Sécurité et population». Madame Tschudi, à vous la parole.
Mme Paloma Tschudi (Ve). Merci, Monsieur le président... (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Allez-y, Madame.
Mme Paloma Tschudi. Merci, Monsieur le président... (Brouhaha.)
Une voix. Silence !
Des voix. Chut !
Mme Paloma Tschudi. Merci. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts refuseront cette politique publique. Nous constatons qu'elle s'est traduite par un outil répressif qui coûte cher et dont le travers est le manque de prise en considération de l'humain, notamment des victimes. Une politique sécuritaire plus basée sur la répression que sur la réinsertion ou la prévention, en somme.
En ce qui concerne le programme H01, les Verts saluent l'opération Papyrus, un projet qui a permis de régulariser le statut de nombreuses personnes en situation irrégulière à Genève. En revanche, nous regrettons la somme dépensée pour une étude en vue de la construction d'un centre de départ fédéral qui, je le rappelle, serait entouré d'une clôture et où les requérants et requérantes d'asile seraient systématiquement fouillés. En plus de porter atteinte à leurs droits fondamentaux, on criminalise les personnes ! A l'instar de cette stigmatisation, la politique sécuritaire de Genève semble s'organiser autour du criminel - caméras de surveillance, forte présence policière, prisons - et souvent, bien trop souvent, oublier les victimes.
Dans son rapport annuel, le centre LAVI de consultation pour les victimes d'infractions déplore entre autres l'augmentation des cas de traite d'êtres humains et de viols. C'est là le reflet d'une gestion qui se focalise sur la protection de l'Etat et en oublie l'essentiel, l'être humain. La politique menée par le Conseil d'Etat vise une hausse du nombre d'établissements pénitentiaires ainsi que l'agrandissement de ceux déjà existants. Des millions de francs sont investis afin d'obtenir une centaine de places d'incarcération supplémentaires. Or, à notre sens, il conviendrait plutôt d'investir dans l'action sociale et de meilleurs programmes de prévention et de réinsertion.
Est-ce qu'en tant que jeune femme, je me sens en sécurité à Genève avec la politique actuelle ? Non. Est-ce qu'en tant que jeune femme, je me sens davantage protégée parce qu'on construit de plus en plus de prisons ? Non. Est-ce qu'en tant que jeune femme, je suis rassurée par des caméras de surveillance qui nous filment et dont l'usage et le destin des images sont inconnus ? Non.
Vous l'aurez compris, les Verts ne sont pas satisfaits de la politique de sécurité menée par le gouvernement, une politique qui engage des millions de francs dans la vidéosurveillance et la construction d'établissements pénitentiaires, mais n'a pas su réduire le nombre de cas de violences conjugales, de maltraitances envers les enfants et de viols à Genève. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je laisse maintenant la parole à Mme Danièle Magnin.
Mme Danièle Magnin. Je reviendrai plus tard, Monsieur le président.
Le président. C'est-à-dire ?
Mme Danièle Magnin. C'était au sujet du projet de loi 12373.
Le président. D'accord. La parole est à M. Thomas Bläsi.
M. Thomas Bläsi. C'était aussi sur le point précédent, Monsieur le président, merci.
Le président. Bon, alors elle revient à M. Daniel Sormanni. (Remarque.) Non plus ? C'est à vous, Monsieur Bayenet.
M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord le groupe Ensemble à Gauche trouve atterrant que la discussion d'hier visant à réprimer l'action de M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet se soit déroulée sans lui, et je profite de sa présence aujourd'hui pour répéter à quel point nous avons été déçus de ne pas le voir, lui qui se montre d'ordinaire courageux et n'hésite pas à défendre ses idées. Nous espérons donc qu'il se présentera lundi soir devant la commission de contrôle de gestion pour s'expliquer sur les reproches qui lui sont adressés.
Le Conseil d'Etat s'est délivré un autosatisfecit parfaitement injustifié en ce qui concerne la gestion de ce département, et je vais évoquer quelques éléments afin d'expliquer pourquoi mon groupe ne peut pas soutenir sa politique de la sécurité. Pour commencer, l'opération Papyrus est longuement mise en avant, sans doute pour montrer que le département mène une politique humaine en matière de gestion des migrations. Or, je tiens à le souligner, ce programme est tout à fait incomplet: il devrait être étendu, non seulement dans le temps, mais aussi pour s'appliquer à l'ensemble des individus qui relèvent du domaine de l'asile, puisque, vous le savez peut-être ou pas, certains d'entre eux se voient exclus de Papyrus quand bien même ils auraient résidé à Genève depuis dix, quinze ou vingt ans. Dès le moment où une demande d'asile a été rejetée, la personne concernée ne peut plus prétendre à une régularisation, et il s'agit là d'une exception qui n'est pas admissible.
Deuxièmement, la question de l'académie de police de Savatan doit être adressée frontalement. Que lit-on dans le rapport du Conseil d'Etat ? Que le projet sur la formation à Savatan est en cours d'évaluation, mais que l'objectif est la consolidation de la participation genevoise, ce qui est inadmissible. A l'heure actuelle, il existe deux écoles en Suisse romande pour former les policiers, celle de Savatan qui rassemble les cantons de Vaud, Genève et Valais, et celle du CIFPol qui regroupe ceux de Neuchâtel, Jura et Fribourg. D'un côté, à Savatan, on apprend à nos futurs policiers à chanter le matin au lever du drapeau, à tirer, à manier des explosifs - on leur apprend surtout à obéir comme de bons petits soldats. A l'inverse, il y a la méthode CIFPol basée sur l'apprentissage de l'autonomie, de la réflexion, du discernement.
Pour nous, il est incompréhensible que le conseiller d'Etat s'obstine à envoyer nos recrues à Savatan, nous ne voulons pas de militaires dans les rues de Genève. L'académie de Savatan a été abondamment critiquée, notamment par le sociologue David Pichonnaz qui a réalisé une étude à ce sujet et déploré que les policiers passent autant de temps à apprendre à tirer et à obéir, alors qu'ils devraient avant tout réfléchir et faire preuve de discernement. Il faut donc viser à sortir de Savatan, soit en recréant une école à Genève, soit en intégrant celle du CIFPol.
Mais le plus grave, Mesdames et Messieurs les députés, c'est évidemment la question des prisons. Pourquoi est-ce grave ? Parce que le Conseil d'Etat crie aujourd'hui à l'urgence en nous demandant de voter des budgets énormes pour créer des places de détention, alors qu'il a lui-même fermé des prisons, par exemple les établissements ouverts de Villars ou du Vallon, des lieux de semi-détention. A la place, il veut construire des prisons fermées. Certes, la distinction entre une détention fermée et une détention ouverte est subtile, mais sachez que dans le cadre de cette dernière le détenu dispose d'un peu plus de liberté. En réalité, ce qui manque statistiquement à Genève, ce ne sont pas des lieux de détention fermée, mais bien des lieux de détention ouverte. C'est ça qu'il faut construire, c'est ça qui permet de respecter la dignité des prisonniers et de les aider à se réintégrer à la fin de leur sanction.
En conclusion, juste deux mots pour souligner que la question de la démotivation des policiers n'est pas appréhendée de manière adéquate par le Conseil d'Etat. Cette démotivation ressort des enquêtes internes, il faut absolument réagir et prendre les mesures qui s'imposent. Pour toutes ces raisons, nous refuserons cette politique publique. (Quelques applaudissements.)
Mme Marion Sobanek (S). Mesdames et Messieurs, le groupe socialiste, lui aussi, se montre extrêmement sceptique quant à cette politique publique. Nous sommes d'accord avec les critiques formulées par les représentants des Verts et d'Ensemble à Gauche, je vais donc vous éviter des redites. Si nous saluons la mise en place du programme Papyrus, comme mon préopinant l'a dit, nous souhaiterions qu'il soit développé de manière plus large et plus précise.
Il faut se demander si les réductions linéaires voulues par le Conseil d'Etat sont vraiment la meilleure façon d'atteindre les objectifs budgétaires en général, dans cette politique publique en particulier. Ainsi, à l'OCPM, la diminution de 5% a nécessité l'engagement de personnel auxiliaire, ce qui a conduit à des dépassements de budget - vous trouvez ça à la page 164 du rapport. De même, certains postes fixes n'ont pas pu être alloués. Mon préopinant a parlé des difficultés à trouver du personnel; je ne pense pas que tous les jeunes hommes aient envie de passer quelques mois à Savatan, mais ils auront sans doute envie de servir la république en tant que policiers. On a donc souvent recours à des auxiliaires, avec la précarisation qui va de pair, et nous nous posons des questions à ce sujet.
Concernant la migration, nous aurions aimé voir d'autres indicateurs que ceux choisis, qui sont purement quantitatifs et, comme ça a déjà été dit, souvent axés vers une politique répressive. Par exemple, le taux de 100% de renvois Dublin exécutés masque complètement la réalité humaine qui se cache derrière. Quid de l'intégration en termes qualitatifs ? Le développement de dispositifs d'accueil semble être le parent pauvre de ces analyses: sur onze indicateurs, seuls deux ont trait à l'intégration. On compte sur les communes qui, elles, s'en remettent souvent au canton. Il faudrait développer une véritable politique d'intégration innovante et abandonner l'aspect trumpien de l'évaluation de cette politique publique.
En ce qui concerne le programme H07 «Privation de liberté et mesures d'encadrement», nous sommes encore plus sceptiques. Il y a toujours une surpopulation carcérale et les conditions de détention sont extrêmement difficiles à la fois pour les prisonniers et pour le personnel, aggravées par la politique budgétaire. On ne remplace pas les absences de longue durée, ce qui prive les détenus, des mois durant, de l'accès au magasin de la prison, mais également au travail. Ceux-ci restent enfermés 23 heures sur 24 et ne peuvent rien s'acheter ni travailler ni éventuellement suivre de cours.
Trop de personnes en exécution de peine se trouvent à Champ-Dollon, trop de personnes doivent attendre longtemps une décision judiciaire: 33 personnes attendent leur jugement pendant plus d'une année tandis que 186 patientent entre trois mois et une année, c'est inadmissible. Il faut empoigner le problème à sa source et viser d'autres solutions que le simple emprisonnement, option trop souvent privilégiée dans les cantons romands, en particulier à Genève. On doit chercher d'autres pistes; mon préopinant a évoqué la détention semi-ouverte, il faut aller dans cette direction.
Parlons encore des employés: dans le rapport, on se félicite de la réorganisation du personnel des prisons, mais cette restructuration ne leur donne apparemment pas la même satisfaction qu'au chef du département. Pour toutes ces raisons et celles mentionnées auparavant, nous refuserons cette politique publique. Merci. (Applaudissements.)
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien acceptera cette politique publique. Je vais apporter trois éléments: deux félicitations et une inquiétude. Bravo tout d'abord à la police et tout spécialement à la BTPI, la brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illicite. Ma collègue s'exclame en disant que mon Dieu, mon Dieu, quelle horreur, il y a davantage de cas de traite d'êtres humains, mais c'est tout simplement parce qu'il existe désormais une police spécialisée pour en détecter les victimes invisibles ! C'est une première en Suisse depuis 2016, Genève dispose enfin d'une brigade spécialisée. Des centaines de personnes sont victimes de traite d'êtres humains à Genève, et grâce à cette brigade on les voit enfin émerger, elles sont enfin prises en charge et conduites là où elles pourront être accompagnées durant tout le processus de résolution de leur problème. Franchement, on doit s'en réjouir, pas critiquer !
Papyrus, ensuite. Bien sûr qu'on s'en félicite, je ne serai pas la seule à le dire, mais ça fait quinze ans que le parti démocrate-chrétien l'appelle de ses voeux, et c'est un cas tout à fait spécifique de prévention de traite d'êtres humains, ou alors des personnes qui ont été victimes ne le sont plus aujourd'hui grâce à cette opération.
Maintenant, l'inquiétude. Dans le rapport, on relève un non-dépensé de 1,5 million s'agissant du personnel pénitentiaire. Comment se fait-il alors que dans le secteur femmes de Champ-Dollon, qui comprend 26 détenues, l'office cantonal de la détention n'autorise pas l'engagement de personnel lorsqu'une gardienne ou une personne gérant des ateliers à satisfaction est en arrêt maladie durant longtemps ? On nous dit que ces employés ne sont pas remplacés alors que le budget le permettrait, je ne comprends pas. Les détenues qui n'ont déjà pas de formation au départ sortiront de prison encore plus vulnérables qu'elles n'y sont entrées au prétexte qu'il n'y a pas suffisamment de personnel d'encadrement ! Un exemple tout simple: cette unité dispose d'une cuisine qui serait tout à fait gérable pour 26 femmes, elles pourraient confectionner leur propre popote au lieu de faire du coloriage ou des petits bracelets, ce qui ne constitue pas une formation qualifiante pour leur sortie. A cet égard, Monsieur le chef du département, Monsieur le président du Conseil d'Etat, je n'attendrai pas Les Dardelles comme on attend Godot: je ferai des propositions concrètes dès la rentrée. Merci.
M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'ai été quelque peu surpris par bon nombre de déclarations, notamment sur la problématique financière. Ce département ne représente que 7,6% du budget de l'Etat, donc c'est une part relativement congrue. On a ensuite évoqué l'incarcération, la construction de prisons. Je pense que si, depuis l'ouverture de Champ-Dollon, ce dossier avait été suivi par nos autorités de manière régulière, on ne constaterait pas ce pic maintenant.
A cet égard, les statistiques que la police cantonale nous a présentées il y a peu démontrent, contrairement à ce qui a été dit, que les résultats sont plus que positifs et qu'on fait des progrès dans bien des domaines, entre autres dans ceux qui ont été mentionnés tout à l'heure. Ainsi, dans les derniers recensements réalisés, on observe que le sentiment de sécurité de notre population a augmenté, et non pas baissé.
Il serait par ailleurs bon de ne pas oublier toute une série d'éléments en lien avec la protection de la population. Le Conseil d'Etat, par l'intermédiaire de ce département et de sa délégation, n'a-t-il pas remis sur le métier la gestion de l'organisation catastrophe ? Si, ça a été mis sous toit en 2017 et c'est particulièrement positif - j'en sais quelque chose, j'y ai participé. Quant aux relations avec les communes, elles ont permis de développer des contrats locaux de sécurité qui ont largement contribué à une harmonisation des pratiques entre les autorités cantonales, communales et judiciaires. Enfin, rappelons-nous qu'un certain nombre de réorganisations relatives aux sapeurs-pompiers sont en cours afin que les forces professionnelles et volontaires puissent travailler de façon harmonieuse. Il en va de même avec la protection civile, et s'il y a effectivement un programme qui n'a pas été proportionné aux besoins, c'est bien celui-là.
Ces réformes sont en cours, l'année 2017 a vu s'opérer un travail de fond. Eu égard à cet esprit d'entreprise et à ce dynamisme qui n'est pas simplement le fait du magistrat chargé du département, mais également des différents états-majors à tous les échelons, le groupe PLR soutiendra la politique de sécurité. Merci de votre attention. (Quelques applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le MCG refusera la politique publique H «Sécurité et population» en raison des graves dysfonctionnements engendrés par la nouvelle loi sur la police, qui a créé un système en silos - il est pourtant de bon ton, dans cette plénière du Grand Conseil ou en commission, de dire qu'il ne faut surtout pas aller dans cette direction. On se rend compte aujourd'hui des effets de cette gestion parcellaire qui divise et ne permet pas de mener une politique transversale, c'est malheureusement le résultat de la LPol adoptée à environ 50% des voix, donc à une toute petite majorité - mais nous sommes démocrates, nous acceptons le verdict du peuple.
Nous subissons également ce qui a été une totale désinformation et a contribué à désorganiser la police genevoise, il faut le dire. Un certain nombre d'éléments se sont fait jour, par exemple qu'on ne pouvait pas donner suite à des réquisitions à cause de problèmes organisationnels, ce qui est extrêmement grave pour nous. Il en découle un sentiment de démotivation au sein des employés: quel que soit l'effort déployé, ils ne peuvent pas effectuer leur travail correctement ou selon les attentes des citoyennes et citoyens.
Tout cela n'est pas acceptable, parce que la sécurité fait partie des tâches premières de l'Etat auxquelles on ne peut pas s'attaquer, tout comme l'instruction publique dont on a parlé durant ces deux jours. Il y a un certain nombre de fonctions essentielles auxquelles on ne doit pas toucher, dont on doit prendre le plus grand soin et avec lesquelles il ne faut pas faire d'expériences hasardeuses, particulièrement en termes d'organisation, car ça cause énormément de dégâts dans notre république. Voilà pourquoi le groupe MCG s'opposera à la politique publique H.
M. Vincent Maitre (PDC). Ainsi que ma collègue Anne Marie von Arx vous l'a dit, Mesdames et Messieurs, la politique de sécurité est globalement satisfaisante pour le PDC. Un bémol néanmoins en ce qui concerne le service des contraventions - j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet - qui dysfonctionne selon notre groupe.
En effet, les nombreux praticiens du droit à Genève constatent que dans l'écrasante majorité des cas, ce service s'est mué en véritable machine à confirmer des amendes lorsqu'il y est fait opposition par les justiciables, sans même réellement réexaminer les cas. Cela a pour conséquence de surcharger le Tribunal de police, puisque toutes les amendes confirmées par le service des contraventions y passent automatiquement. Pour cette seule raison, le Tribunal de police, qui ne chômait pas jusqu'alors, a dû engager trois juges à plein temps l'année dernière. Pour le PDC, il n'est pas normal de devoir créer des postes à haute valeur ajoutée comme ceux-ci, qui sont importants mais coûteux pour l'Etat, simplement parce que l'un des services de l'administration dysfonctionne. Nous souhaitons donc que le magistrat porte un regard tout particulier sur l'efficacité et le bon fonctionnement du service des contraventions. Néanmoins, nous voterons cette politique publique.
M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, la nouvelle loi sur la police, de l'avis même des policiers, affaiblit l'efficacité de celle-ci, car il y a bientôt plus de hiérarchie que d'agents sur le terrain. Quant à la politique de sécurité en général, lorsqu'on recense des dizaines de milliers de délits par année, je ne vois pas comment on peut en être satisfait; on le sera quand il n'y aura plus de criminalité. Mon collègue Bayenet a parlé de la formation des policiers, et c'est vrai qu'on ne doit plus former des robots, mais des agents aimables avec les honnêtes gens - ce n'est pas toujours le cas - et intransigeants avec les criminels - c'est parfois le contraire.
On nous dit qu'il faut construire de nouvelles prisons, mais Champ-Dollon compte 92% d'étrangers, ce qui signifie que la criminalité genevoise est quasiment nulle ! Et sur ces 92% d'étrangers, 70% à 75% sont des criminels en situation irrégulière, donc il est carrément impossible de mener une politique d'intégration, vous ne pouvez pas intégrer ces individus. Il faudrait plutôt appliquer la loi sur le renvoi des criminels étrangers afin de les éliminer de notre territoire. La population genevoise, je le répète, ne pose pas de problème. D'ailleurs, la cause de l'augmentation de la criminalité, c'est évidemment l'abandon des frontières: avant, nous avions des portes, toutes les villes étaient protégées.
Il faut savoir que les criminels ne sont pas de braves gens qui ont mal tourné, ils ont un problème psychologique, ils ont une mentalité de criminels, et vous ne pouvez pas les changer. Regardez l'histoire de La Pâquerette, on pensait améliorer les choses grâce à des mesures sociales, mais c'est carrément impossible. Non, on doit les empêcher de nuire, et pour ça il faut soit les enfermer, soit les renvoyer dans leur pays. On devrait même faire payer les frais au pays d'origine, car c'est nous, au final, qui payons des centaines de millions de francs en détention par année pour punir des criminels étrangers.
En fait, au lieu de construire de nouvelles prisons, il faudrait augmenter le nombre de gardes-frontière; chacun doit se protéger pour éviter les délits. Le canton doit se protéger en renforçant le nombre de gardes-frontière, ça nous évitera la construction de prisons. Je rappelle que lors de la conférence sur la Palestine dans les années 80, on avait fermé les frontières, et il y a eu 85% de délits en moins à Genève. Voilà ce que je voulais dire. Merci beaucoup.
M. Jean Batou (EAG), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette politique publique va mal. Quelle qu'ait été notre opinion s'agissant de la nouvelle loi sur la police - elle a été adoptée à une très faible majorité, mais adoptée tout de même - aujourd'hui, force est de constater que la police se porte extrêmement mal, ce qui a des incidences sur la politique sécuritaire en général. Or pour résoudre la situation, Monsieur le conseiller d'Etat, il faut être à l'écoute des doléances de votre personnel.
Je vais résumer un certain nombre de points déjà évoqués de manière différente par mes préopinants. Tout d'abord, pourquoi cette militarisation de la police ? Ce n'est pas ce que nous avons demandé, ça ne permet pas d'améliorer la sécurité, bien au contraire. Pourquoi cette multiplication des hiérarchies qui coûte cher et est inefficace ? Pourquoi cette politique du policier unique qui présume qu'il n'y a pas différents métiers au sein de la police et que les agents sont interchangeables, qu'un employé de la police judiciaire peut faire la circulation ou l'inverse ? C'est absurde !
Pourquoi ne pas répondre au manque criant d'effectifs dans les secteurs concernés ? Pourquoi avoir introduit des clivages entre les différents services qui font que la communication fonctionne mal et qui provoquent une inefficacité globale du département ? Pourquoi favoriser la perte d'initiative des policiers qui conduit à leur démotivation ? Pourquoi tolérer une promotion à la tête du client à l'intérieur des services alors qu'elle doit être faite de manière totalement objective ? Enfin, pourquoi systématiquement remettre en cause les acquis sociaux des employés, ce qui constitue un manque de reconnaissance de leur travail ?
Si c'était Jean Batou, député d'Ensemble à Gauche, qui martelait ces propos une énième fois, Monsieur le président du Conseil d'Etat, vous pourriez hausser les épaules, mais il se trouve que ces constats ont été portés par le personnel de la police lui-même dans un sondage qu'a révélé la «Tribune de Genève». Vous me direz que, bon, les syndicats de policiers ont quelque peu excité leurs troupes, mais non: une très sérieuse enquête de l'Institut de recherches sociologiques intitulée «La police en quête de transversalité» et parue en même temps que ce sondage indique peu ou prou la même chose.
Alors je vous en conjure, Monsieur le conseiller d'Etat, écoutez ces doléances, cherchez des réponses indépendamment de la position des uns et des autres sur la LPol, parce que l'absence d'écoute conduit cette politique publique dans le mur. Ce manque d'écoute du département et de la hiérarchie constitue l'un des problèmes principaux auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui, et pas seulement au sein de la police. Merci.
M. Jean-Luc Forni (PDC), rapporteur de majorité ad interim. Dans ce débat, on entend tout et son contraire: certains se plaignent d'insécurité, d'autres ne veulent pas que la police soit formée pour répondre à l'insécurité ressentie dans certains quartiers; on loue l'humanité du magistrat s'agissant de l'opération Papyrus, on réprouve d'un autre côté la création de centres de détention administrative; on critique la surpopulation carcérale, mais on ne veut pas donner de moyens pour la construction de nouvelles prisons ou, comme l'a indiqué ma collègue du PDC plus tôt, pour un encadrement correct de la détention des femmes; d'aucuns disent bravo à la police, tandis que d'autres l'estiment composée uniquement de robots...
Au final, Mesdames et Messieurs, s'il est de bon ton de malmener le magistrat - ou les magistrats de manière générale - on est quand même là pour examiner la gestion du département. Or il n'y a rien de pire que de ne pas faire de choix quand on est à la tête d'un dicastère, et quand on fait des choix, on se crée inévitablement des amis et des ennemis.
Pour ma part, je m'en tiendrai à la conclusion du rapporteur de majorité sur cette politique publique - c'est lui-même avec une collègue de gauche, sauf erreur, qui avait audité le département: «Quoi qu'il en soit, de façon générale, ce département est bien géré, les prestations sont correctement délivrées et le travail se fait. La réalité est que le chef du département est un bon gestionnaire.» Fort de cette déclaration, Mesdames et Messieurs, je vous invite à accepter la politique publique H.
M. Pierre Maudet, président du Conseil d'Etat. Merci au rapporteur de majorité ad interim pour son propos qui m'évitera de devoir le répéter. Mesdames et Messieurs, nous avons tous bien compris que dans ce débat sur le rapport de gestion et les comptes, il s'agit, dans une démarche quelque peu politicienne, de tirer successivement sur l'ensemble des magistrats. Ma foi, c'est le jeu politique ! Il convient de préciser ici, Monsieur le député Bayenet, que le Conseil d'Etat, solidaire, n'a pas souhaité par sa présence cautionner un simulacre d'instruction tel que celui auquel ce parlement s'est livré hier et qu'il répondra en temps et en heure à la résolution qui a été votée.
J'en viens maintenant aux questions qui ont été posées. Le rapporteur de première minorité nous a resservi sa litanie pour la troisième année consécutive. Monsieur le rapporteur, Mesdames et Messieurs les députés, il serait temps d'admettre que la population a accepté la loi sur la police, une loi qui a été débattue dans cette salle. D'ailleurs, j'entends encore résonner les propos du député Vanek, militant contre la militarisation de la police, terme qui a fait l'objet d'un amendement spécifique. Mais oui, la police est basée sur une organisation militaire; ainsi en a voulu votre Grand Conseil, ainsi en a décidé le peuple, voilà comme c'est conçu, voilà comme cela fonctionne. Un jour ou l'autre, il vous faudra l'accepter.
Il s'agirait aussi de reconnaître, car les chiffres sont là à l'appui, que la hiérarchie ne s'est pas développée outre mesure depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle loi; le volume de cadres supérieurs est resté aux alentours de 5% - je vous renvoie aux questions urgentes écrites déposées à ce sujet.
Je vous rappelle encore, Monsieur le député, Mesdames et Messieurs, que ce parlement et le peuple ont voulu une formation avec un tronc commun, ce qui est valable pour l'ensemble de la Suisse. Le concept général de formation 2020 consacre l'idée que le policier est tout d'abord formé en tronc commun avant de se spécialiser par la suite. C'est ce que nous faisons à Genève, il n'y a donc pas lieu d'introduire ces fameuses cloisons que vous décriez par ailleurs au sein de cette même police.
Concernant les effectifs, je rappelle là aussi que durant la dernière législature - c'est sur la dernière année de cette dernière législature que nous portons notre regard aujourd'hui - ce sont 150 ETP de policiers supplémentaires qui ont été versés à l'activité de la police, et je vous en remercie, Mesdames et Messieurs les députés, mais ne venez pas dire ici que le corps de police a été réduit.
Quant à l'inefficacité que vous alléguez, Monsieur, je vous laisse la responsabilité de votre propos; idem en ce qui concerne la perte d'initiative. Et s'agissant des acquis sociaux, une fois encore, Mesdames et Messieurs les députés, il conviendrait d'acter ce que le peuple décide. Lors de la votation du 10 juin, 59% des citoyens se sont prononcés en faveur de l'égalisation des traitements entre la fonction publique et les policiers. Une fois pour toutes, Mesdames et Messieurs, admettons ici le résultat des scrutins populaires !
A présent, quelques points encore sur lesquels je suis obligé de rectifier ce qui a été dit tout à l'heure. On a évoqué sur ces bancs la fermeture du Vallon et de Villars, mais c'est tout à fait erroné: ces deux établissements sont aujourd'hui ouverts et accueillent des détenus. Je vous invite à lire les rapports et à prendre scrupuleusement des notes, car nous n'avons pas fermé ces deux prisons, elles sont au contraire ouvertes et fonctionnent à plein. Cela étant, nous souhaiterions effectivement en ouvrir d'autres; à cet égard, il y a un certain paradoxe à reprocher à longueur d'année les conditions de détention inhumaines des prisonniers et, de l'autre côté, à refuser de voter des crédits pour permettre de réaliser un véritable travail dans la réinsertion des détenus en exécution de peine. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler cette année lors du vote sur Les Dardelles.
Je vous engage aussi à prendre connaissance des statistiques sur les violences domestiques - non pas conjugales, mais domestiques au sens large - car elles ont diminué de 2016 à 2017. Alors est-ce le reflet d'une réalité ? Pas sûr. Il y a un chiffre noir important dans ce domaine-là que nous sommes les premiers à admettre, et la police accomplit un travail extrêmement conséquent pour peu que les plaintes soient déposées, pour peu que les infractions soient reportées. Toutefois, de mon point de vue, il est exagéré, voire carrément abusif, de considérer que ce seul chiffre refléterait une augmentation massive des cas, c'est même le contraire d'une année à l'autre.
S'agissant du personnel, j'attire l'attention de Mme la députée von Arx-Vernon sur le fait que ce sont essentiellement des effectifs administratifs qui n'ont pas été repourvus, et non pas des gardiennes et gardiens - c'est du reste précisé dans le rapport. Par ailleurs, une réflexion a été menée sur les effectifs de l'office des poursuites et faillites. Une diminution de 5% a effectivement été appliquée, c'était le voeu du Conseil d'Etat et il s'en félicite. Mais sur la sécurité au sens strict, c'est-à-dire détention et police, cette réduction n'a pas été réalisée; nous avons sanctuarisé ce périmètre-là et même, à l'inverse, augmenté son volume, il est important de le souligner.
A ce propos, nous ne rencontrons pas de problèmes de recrutement, nous avons repourvu l'ensemble des postes de policiers prévus, donc nous n'avons pas de difficultés, encore moins aujourd'hui, à trouver des gens plus âgés qui sont d'accord de passer une année à Savatan, contrairement à ce que l'on répand ici comme rumeur. Cela est aisément démontrable, et vous pourrez le vérifier cet automne lors de la prestation de serment de la police sur la Treille.
Quant au système d'intégration genevois, il est cité en exemple par la Confédération. Nous sommes l'un des cantons qui investit le plus, grâce au bureau de l'intégration, en faveur des publics vulnérables, notamment sous l'angle des phénomènes de langues - immigrés allophones et langue française - nous menons une politique de soutien au tissu associatif extrêmement dynamique avec le délégué à l'intégration Nicolas Roguet qui imprime depuis maintenant quatre ans la volonté du Conseil d'Etat d'oeuvrer à l'intégration, je ne crois vraiment pas que l'on puisse nous adresser des reproches à ce sujet.
Le plus paradoxal, Mesdames et Messieurs, surtout du côté des bancs de gauche, ce sont les critiques sur Papyrus. Voilà des années, voire des décennies, que l'on parle de la nécessité d'agir concernant la régularisation de personnes qui n'ont aucun passé pénal et contribuent à faire tourner notre économie, et nous l'avons fait lors de la législature précédente ! Après, on peut vouloir en faire plus, y associer l'asile - toutes choses qui, cela étant, sont totalement impossibles sous l'angle du droit fédéral - mais de grâce, reconnaissez que 2017 a été une année particulièrement réjouissante de ce point de vue là.
Un dernier mot sur le service des contraventions. J'entends ce qui est dit ici, mais j'attire l'attention de ce parlement - dont je sais qu'il est soucieux de la séparation des pouvoirs, même s'il ne l'applique pas toujours - sur le fait qu'il s'agit d'une autorité de poursuite pénale et que nous avons une responsabilité partagée avec le Ministère public quant à la façon qu'a le service des contraventions d'apprécier, en deuxième instance - ou en deuxième regard, disons-le ainsi - les décisions prises au niveau des amendes. Ce n'est pas si simple que cela, mais nous avons à coeur, avec le procureur général, de reprendre ce dossier et de vérifier non seulement en termes de flux, mais également en termes d'appréciation de l'opportunité d'opposition que l'administration ne fonctionne pas avec des oeillères.
Mesdames et Messieurs, je conclurai en vous disant que cette politique publique, qui est systématiquement rejetée depuis trois ou quatre ans lorsque l'on en parle au parlement, est inversement proportionnellement soutenue par la population. Ainsi que vous avez pu le constater lors des dernières élections, il n'y a eu aucun débat public sur la sécurité, cette thématique en a été quasi totalement absente. C'est le reflet de deux choses: d'une part, et c'est attesté par sondage de même que par le diagnostic local de sécurité dans les communes, la population considère qu'il y a une nette amélioration dans ce domaine, et le sentiment de sécurité, même s'il n'est pas généralisé, même s'il reste encore beaucoup de travail à faire, est de retour; d'autre part, et les statistiques le démontrent, en cinq ans Genève a connu une diminution de 25% de la criminalité, à tout le moins en termes d'infractions reportées.
Au final, faites ce que vous voulez avec cette politique publique; je dirais presque qu'un refus de votre part constitue un label de qualité. En effet, si elle se voit rejetée chaque année par vos soins, mais qu'elle est à ce point soutenue par la population, qu'elle déploie de tels bons effets, je ne peux que vous encourager à poursuivre dans cette voie. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Je prie maintenant les députés de bien vouloir se prononcer sur cette politique publique.
Mise aux voix, la politique publique H «Sécurité et population» est rejetée par 55 non contre 33 oui.
I - JUSTICE
Le président. Mesdames et Messieurs, nous traitons maintenant la politique publique I «Justice». La parole revient à M. le député Cyril Mizrahi.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le groupe socialiste tire un bilan critique de cette politique publique - dans le respect de la séparation des pouvoirs, bien sûr, puisque nous nous prononçons ici uniquement sur la gestion. Nous sommes interpellés par les revenus qui dépassent le budget de 58% en raison d'une augmentation des émoluments et autres frais.
Si on peut évidemment se réjouir d'une telle hausse, il s'agit de rester sensible à la question de l'accès à la justice. Je rappelle ce qu'a mentionné ma collègue Marion Sobanek tout à l'heure sur la détention avant jugement: peut-être serait-il opportun d'investir davantage de moyens afin d'en raccourcir la durée. L'augmentation des frais et émoluments montre qu'il serait bénéfique de mener une politique différenciée en fonction des domaines pour garantir l'accès à la justice de toutes et tous. Il faut reconnaître que, contrairement à d'autres cantons, le pouvoir judiciaire genevois a déjà adopté cette pratique, par exemple en matière d'assurances sociales. Les frais facturés pour l'introduction des causes sont en effet très bas en comparaison intercantonale. Ainsi, nous l'encourageons à poursuivre cette politique qui permet l'accès du plus grand nombre à la justice.
Ce que l'on constate en tout cas clairement, c'est que notre projet de loi sur l'accès des consommateurs et consommatrices à la justice - que le PLR n'a eu de cesse de remettre en cause sitôt adopté - ne met pas du tout en péril l'équilibre du budget de la justice, lequel se porte au contraire fort bien.
L'assistance juridique constitue encore un enjeu. Selon les indicateurs, 10% des cas soumis à la justice en relèvent, mais cela ne nous fournit que peu d'éléments quant à une certaine réalité, à savoir ses conditions d'accès très restrictives. Il nous faudrait surtout connaître le nombre de refus et de recours admis en matière d'assistance juridique. De façon générale, les indicateurs convoqués sont d'ordre purement quantitatif, mais quid des indicateurs qualitatifs, par exemple en termes de recours admis ? Il serait intéressant de disposer de davantage d'indicateurs qualitatifs.
Ainsi que je l'ai dit en introduction, nous tirons un bilan critique de cette politique publique et, par conséquent, nous la refuserons ou nous abstiendrons. Merci de votre attention. (Quelques applaudissements.)
M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la justice genevoise est-elle à vendre ? Je me pose la question. Si vous avez le rapport d'activité du pouvoir judiciaire sous les yeux, je vous invite à l'ouvrir à la page 13, où vous découvrirez un chiffre tout à fait étonnant, celui d'un revenu divers de 31 millions de francs perçu en 2017, lequel fait écho à un montant de 40 millions de francs versé en 2015 à la justice genevoise.
En recherchant parmi les communiqués de presse du pouvoir judiciaire, on découvre que ces millions ont été déboursés par deux entreprises afin de s'éviter des poursuites pénales: en 2015, c'est HSBC qui versait 40 millions, tandis qu'Addax Petroleum arrosait la justice genevoise de 31 millions de francs l'année dernière. Alors là, si on n'est pas devant une justice à deux vitesses, je ne sais pas comment décrire la situation.
C'est extrêmement grave pour deux raisons. D'abord, cela signifie que si on a de l'argent, on peut s'acheter une espèce de virginité pénale alors même qu'on a beaucoup de choses à se reprocher. Mais, pis encore, il y a la question des victimes. En effet, qu'a fait Addax Petroleum pour qu'une procédure pénale soit ouverte à son encontre ? Selon le communiqué de presse du pouvoir judiciaire, cette société a versé des dizaines de millions de dollars à des cabinets d'avocats suspects au Nigeria afin d'obtenir des contrats. Qui sont les victimes, Mesdames et Messieurs ? Ce sont les Nigérians. Et qui bénéficie de cet argent ? C'est l'Etat de Genève. Non seulement Genève spolie le peuple nigérian avec des personnes travaillant ici à la corruption de certains acteurs, mais les amendes sont de surcroît encaissées par l'Etat lui-même. C'est tout simplement scandaleux, et je ne m'étendrai pas sur le sujet. Pour ce motif déjà, nous refuserons cette politique publique. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Nous formulons une objection fondamentale s'agissant du système judiciaire genevois, à savoir qu'il est nécessaire de détenir une carte de parti pour être juge. C'est une honte, c'est scandaleux, parce que si on n'est pas membre d'un parti, on ne peut pas exercer la fonction de juge. On vous oblige à manifester une appartenance politique, ce qui est inacceptable, contraire aux droits fondamentaux de la personne et constitue une atteinte à la crédibilité et à l'impartialité des jugements. D'ailleurs, quand il est question de dossiers politiques, on se rend vite compte que l'affaire n'est pas examinée d'un point de vue juridique, mais politique. En fait, ces tribunaux rappellent les heures sombres de notre histoire...
Une voix. Malheureusement !
M. François Baertschi. Malheureusement, oui. Nous y sommes, et il faut assumer ça. Quant à nous, nous nous opposons fondamentalement à ce système générateur d'injustices profondes. Evidemment, la grande majorité des juges font bien leur travail, heureusement, mais le comble de l'hypocrisie, c'est que certains prennent une carte de parti sans aucune conviction, dans le seul but d'exercer cette fonction, et ce n'est pas acceptable non plus. Pour le MCG, si le fonctionnement général de la justice genevoise est positif, nous ne pouvons tolérer cet élément de base, et c'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur cette politique publique.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote sur cette politique publique.
Mise aux voix, la politique publique I «Justice» est adoptée par 44 oui contre 20 non et 15 abstentions.
J - MOBILITE
Le président. Nous en sommes présentement à la politique publique J «Mobilité», et je donne la parole à Mme Delphine Klopfenstein Broggini.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts demeurent naturellement très critiques quant à la mobilité, parce que les initiatives et lois votées successivement par la population n'ont pas été mises en oeuvre, ce qui est non seulement un déni démocratique, mais aussi une atteinte directe à la qualité de vie des habitants et habitantes et à leur santé, ainsi qu'à la qualité des déplacements à Genève.
De quels textes s'agit-il ? Il y a d'abord la fameuse initiative 144 sur la mobilité douce, dont on doit régulièrement rappeler l'existence. Elle a été votée le 15 mai 2011, soit il y a plus de sept ans ! Plus dernièrement, la population a plébiscité la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée qui aurait dû voir ses premiers jalons posés en 2017. Chacun de ces deux textes a reçu l'aval des Genevois et des Genevoises, et donne la priorité à la mobilité douce et aux transports publics.
Or, en 2017, on a plutôt assisté à d'autres types de chantiers pour la mobilité, assez éloignés de ces deux objets pourtant adoptés par le peuple, à commencer par l'une des mesures phares, celle qui a fait beaucoup parler d'elle - par bonheur, le nouveau ministre des transports l'a annulée, ce que je salue ici - et qui consistait à ouvrir certaines voies de bus... (Brouhaha.)
Le président. Une seconde, Madame la députée. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Allez-y, Madame.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini. Je vous remercie, Monsieur le président. Je parlais de cette fameuse mesure qui a fort heureusement été annulée et qui consistait à permettre aux deux-roues motorisés de circuler sur certaines voies de bus. Evidemment, cette mesure allait complètement à l'encontre des deux textes que j'ai cités tout à l'heure et entravait clairement la circulation des transports publics. Il faut rappeler ici à quel point nos bus sont lents: nous détenons le record de la vitesse commerciale la plus basse de l'ensemble de la Suisse.
Citons ensuite la tolérance face au stationnement des deux-roues motorisés sur les trottoirs, qui entrave cette fois-ci la sécurité des piétons, parents pauvres des aménagements urbains. A cela s'ajoute la diminution de la subvention aux TPG, certes en partie liée à la baisse du prix du billet, mais surtout à laquelle le Conseil d'Etat n'a proposé aucune solution, ce qui est extrêmement regrettable. En effet, si nous voulons que nos transports publics constituent une réelle alternative aux déplacements motorisés, il faut leur donner les moyens de développer non seulement leur cadence, mais aussi leur vitesse commerciale, et ce n'est pas en coupant les aides financières ou en n'octroyant pas les moyens suffisants qu'ils réussiront à devenir concurrentiels face à d'autres modes de transport. Heureusement, notre Grand Conseil a sauvé la situation en votant, le 21 septembre 2017, un crédit permettant de compenser sensiblement les recettes et d'augmenter la subvention.
Toujours au sujet des transports publics, nous attendons impatiemment la réalisation du tram pour le Grand-Saconnex. A cet endroit, c'est la route des Nations qui a pris le dessus, ce qui est fort regrettable. Nous attendons également le prolongement du tram en direction de Saint-Julien qui desservira Bernex afin de mettre fin au transit par navette sur l'ensemble de la commune. Le retard pris est parfois lié à des recours, mais c'est surtout le fruit d'un manque de volonté politique.
Je compléterai ce triste bilan en constatant un élan marqué en faveur du déploiement de nouvelles routes. Comme nous l'avons signalé à plusieurs reprises lors de la dernière campagne, les Verts sont extrêmement inquiets, car on sait très bien que tous les nouveaux aménagements routiers amènent de nouvelles voitures, ce sont des aspirateurs à véhicules. Or, actuellement, nous construisons la route des Nations avant le tram du Grand-Saconnex, il y a les liaisons L1 et L2 à Plan-les-Ouates, un énorme chantier qui lèse non seulement des communes, mais également de grands espaces de biodiversité. La route de contournement des villages est encore un grand sujet qui nous occupe passablement, sans parler de la traversée du lac qui, pour l'instant, nous coûte énormément d'argent et accapare surtout les services de l'Etat.
S'agissant de la circulation, le système des ondes vertes permet tout simplement aux voitures d'atteindre plus facilement le centre-ville, de se rendre plus rapidement des périphéries à la jonction, ce qui est évidemment à des millénaires des deux textes que je citais en début d'intervention.
Face à ce tableau peu réjouissant, on peut quand même saluer quelques avancées en matière cyclable, par exemple l'aménagement provisoire pour vélos sur le pont du Mont-Blanc. Nous attendons impatiemment qu'il soit rendu définitif et surtout sécurisé. Pour ma part, je l'emprunte régulièrement, et les accès sont encore extrêmement dangereux. Il faut donc absolument aller de l'avant sur cette question, mais je salue toutefois le fait que le pont du Mont-Blanc dispose enfin d'une piste cyclable. Relevons aussi la voie verte du CEVA qui représente une amélioration extrêmement positive.
La population l'a dit à plusieurs reprises, ce sont des projets qui marchent et qu'elle attend réellement. Misons désormais sur l'année 2018 et les suivantes, qui verront notamment l'avènement du Léman Express et de la place piétonne à Cornavin. Nous comptons vraiment sur cette prochaine législature pour que Genève aille de l'avant dans ces projets ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, 2017 a été une année charnière pour notre canton en termes de mobilité, marquant en effet la fin - pas encore définitive, mais du moins politique - de la baisse de l'offre des transports publics. Pendant quasiment quatre ans, c'est-à-dire l'entier de la dernière législature, les prestations des TPG ont été considérablement réduites, vous vous en souvenez. Pourquoi ? Parce que suite à trois votations - oui, trois votations ! - les tarifs sont devenus plus bas qu'auparavant, abordables pour la population et encourageant les gens à utiliser les transports en commun. Or la réponse du Conseil d'Etat à cette décision populaire, en particulier du magistrat concerné à l'époque, a été de diminuer les prestations d'environ 2% par année.
Comme vous pouvez le lire dans le rapport, une nouvelle loi a été votée par notre Grand Conseil en 2017 - qui n'a pas été déposée par le Conseil d'Etat, mais par ma collègue Caroline Marti - soutenue par les socialistes, Ensemble à Gauche, les Verts et le MCG, visant à compenser toute baisse des recettes due aux nouveaux tarifs par une augmentation de la subvention, afin que l'offre continue à augmenter, légèrement d'abord et de manière plus importante par la suite.
De plus, la population a adopté la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, ce qui montre que 2017 a été une année charnière en matière de mobilité durable. Que dit cette loi ? Elle donne la priorité aux transports publics et à la mobilité douce dans les centres urbains. Et comment peut-elle être mise en oeuvre ? En développant l'offre des TPG dans le canton tout comme dans les centres urbains. Voilà pourquoi 2017 a été une année charnière. Avec le vote de cette nouvelle loi compensant toute baisse des recettes par une hausse de la subvention, Monsieur le président, à partir de 2018 les prestations des transports publics vont à nouveau augmenter.
Lors des comptes et du budget, je me permets toujours de rappeler l'avancée des travaux du Léman Express. En décembre 2019, Genève disposera enfin d'un réseau RER: 240 kilomètres de rails et 40 gares interconnectées dans l'ensemble de la région franco-valdo-genevoise, Mesdames et Messieurs ! Ce sera une réelle révolution pour notre mobilité, les gens vont certainement changer leurs habitudes de déplacements. Le rapport de gestion indique que les travaux ont continué en 2017, et on se réjouit de l'inauguration de ce nouveau RER fin 2019.
Ma collègue Verte a mentionné la traversée du lac; bon, on connaît le résultat de la votation populaire sur le principe de cette traversée. Les socialistes, vous le savez, sont très sceptiques quant à la construction d'un tunnel-pont-tunnel pour un coût de trois à cinq milliards de francs, une nouvelle autoroute sur notre lac. En a-t-on vraiment besoin ? Est-ce réellement un projet d'avenir pour Genève ? Pour nous, socialistes, c'est clairement non: il s'agit d'un projet du passé qui va coûter extrêmement cher et pour lequel la Confédération ne nous subventionnera sans doute pas. Non, nous n'avons pas les moyens de financer un tel ouvrage qui n'a aucune cohérence avec ce qu'on veut aujourd'hui en termes de mobilité durable, de mobilité d'avenir. A notre avis, il faut abandonner ce projet et investir l'argent dans d'autres domaines, notamment la mobilité douce et les transports publics.
A la lecture du rapport de gestion, le groupe socialiste reste très sceptique quant à la politique de mobilité menée en 2017, mais nous nourrissons beaucoup d'espoir pour la suite - je sais que je dois bientôt conclure, Monsieur le président - et maintenant nous ne sommes plus en 2017, mais en 2018. Je salue le nouveau conseiller d'Etat chargé de ce dicastère, M. Dal Busco, avec qui je pense que nous pourrons construire une vraie politique de mobilité durable, basée sur la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, et nous nous réjouissons d'avoir des débats ainsi qu'une politique constructive pour une mobilité plus durable dès 2018. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). L'UDC n'acceptera pas le rapport de gestion de ce département, mais pour d'autres raisons que celles indiquées par les Verts et les socialistes. Pour nous, la mobilité se détériore d'année en année. Les quatre piliers qu'évoque le Conseil d'Etat dans ses priorités sont sans véritable ancrage, sans base solide.
Certes, les transports publics connaîtront un important développement ces deux ou trois prochaines années - le prolongement des trams de même que le Léman Express représentent 25% d'offre supplémentaire - mais Genève, à l'inverse de Bâle, Berne ou Zurich, est l'unique canton à appliquer un quasi-service public sur l'ensemble du réseau. Est-il juste que la prestation calculée en kilomètres et nombre d'usagers soit aussi chère ? Est-il normal que les contribuables genevois doivent se contenter d'un rapport qualité-prix aussi faible ?
Quant au projet phare du réseau routier qu'est la traversée du lac, bien que 63% de nos concitoyens en aient accepté le principe en 2016, il y a un flou total et bien trop de questions. En tant que projet autoroutier, cette traversée du lac devrait être payée par la Confédération. Pourtant, Berne n'y fait mention ni dans son plan 2030 ni dans son plan 2040. La Berne fédérale doit impérativement s'exprimer et prendre position avant que notre canton ne se lance dans des dépenses d'étude pour plus de cent millions. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera ce rapport.
M. François Lance (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, selon les termes du rapport sur les comptes, la politique publique J a pour but d'assumer une mobilité de qualité dans une vision de complémentarité et de recherche d'efficience reposant sur quatre piliers: les transports publics, les transports privés, la mobilité douce et le stationnement. Comme nous avons pu le constater encore récemment, il s'agit d'une politique susceptible de fâcher les partisans d'un mode de déplacement ou d'un autre, selon les options prises, et qui requiert donc des efforts de discussion. En effet, la mobilité à Genève ne pourra être améliorée qu'à force de compromis, comme cela a été fait avec l'élaboration de la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée.
A présent, j'aimerais relever quelques points qui ont marqué 2017. La planification en matière de réseau routier et de mobilité douce s'est poursuivie afin de concrétiser les différentes mesures inscrites dans les deux plans d'action y relatifs. Ces derniers ont été votés à l'unanimité du Grand Conseil en janvier 2017. Les indicateurs montrent que 11,6 kilomètres de voies cyclables ont été réalisés depuis 2014 et que 479 places de vélo ont été créées, ce qui répond en partie à l'initiative 144.
En matière de transports publics, l'année 2017 a connu une poursuite très limitée de la mise en application des mesures prévues au plan directeur des transports collectifs 2015-2018 dans l'attente du résultat de la votation référendaire sur l'augmentation des tarifs des TPG. Cette hausse a été refusée par les électeurs, dont acte. Toutefois, grâce à deux subventions extraordinaires de quatre millions et un million de francs votées par le parlement, des lignes de bus express ont été mises en place.
Relevons par ailleurs la mise en service du TOSA en décembre 2017 - un peu chaotique au départ, il faut bien l'avouer, mais devenue performante depuis le printemps 2018 - ainsi que l'obtention définitive de la procédure d'approbation des plans pour l'extension du tram à Bernex et le démarrage des travaux sur la plate-forme de Moillesulaz en vue du prolongement de la ligne de tram à Annemasse. Quant au prolongement du tram aux Cherpines, la procédure a été retardée en raison de nombreuses oppositions. Au niveau ferroviaire, les points de croisement de Mies et Chambésy ont été finalisés en 2017, permettant l'instauration de la cadence au quart d'heure entre Coppet et Lancy-Pont-Rouge au début de ce mois de juin.
S'agissant du CEVA et en vue de sa mise en service en décembre 2019, la société Lémanis, autorité organisatrice commune, a été créée afin de gérer un système tarifaire à l'échelle du réseau. Les premières rames de nouvelle génération appelées à assurer l'exploitation du réseau transfrontalier ont été livrées. La construction du CEVA s'est poursuivie, notamment la partie ferroviaire des interfaces de même que le tunnel de Champel.
Notre Grand Conseil a voté un crédit de 50 millions pour exécuter des mesures d'exploitation inscrites dans le plan d'action du réseau routier, ce qui a permis la création d'une centrale de régulation du trafic en fin d'année. Des mesures de fluidification de la moyenne ceinture ont également débuté en 2017. Citons encore des études concernant les routes nationales, les différentes jonctions prévues, en particulier à Vernier et Lancy-Sud, ainsi que le début du chantier de la route des Nations et de la liaison avec l'autoroute.
Il ressort des comptes 2017 que le cadre budgétaire correspondant à la politique publique J «Mobilité» a été globalement respecté. Rappelons que cette politique dépend non seulement des crédits votés par le parlement, mais également de la participation financière de Berne, du bon déroulement des différentes procédures d'autorisations et d'oppositions, et des contraintes techniques.
Au vu de ce qui précède, nous estimons que la gestion de la mobilité par Luc Barthassat a été bonne en 2017, en dépit de contraintes à la fois politiques, financières et techniques, et nous tenons à remercier l'ensemble des collaborateurs qui s'attèlent à cette tâche tous les jours de l'année. Bien entendu, Mesdames et Messieurs, le groupe PDC votera cette politique publique, et je vous engage à en faire de même. Merci, Monsieur le président.
M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le groupe MCG refusera la politique publique J. Pourquoi ? Parce qu'il y a eu beaucoup de promesses et peu de réalisations, en tout cas peu de changements concrets en termes de circulation pour Monsieur et Madame Tout-le-Monde.
En effet, nous avons voté une loi dont je ne citerai même pas le titre tellement il est pompeux et ridicule, c'est davantage une propagande politique qu'un texte de loi digne de ce nom. On nous a fait de belles promesses, mais on n'a toujours pas de mobilité cohérente et efficace pour les Genevois, il suffit de voir le nombre de bouchons à travers le canton pour s'en rendre compte.
Quant à la lettre d'intention entre les entités genevoises - communes et canton - et françaises, c'est un catalogue de belles promesses tout à fait vaines: allez à Soral, Perly-Certoux ou Chancy et vous verrez qu'on ne parvient pas à obtenir de résultats ni d'améliorations pour ces villages qui souffrent des difficultés du transit. Non, cette politique publique est très décevante, parce qu'on nous a fait beaucoup de promesses, mais qu'on ne nous a rien donné, et le groupe MCG ne peut pas accepter ça. Voilà pourquoi nous voterons non de façon déterminée.
M. Guy Mettan (PDC). J'aimerais juste compléter ce qu'a dit mon excellent collègue François Lance et, malgré toute l'amitié que j'ai pour le parti des Verts, réagir à quelques-unes de leurs déclarations en précisant un certain nombre de points. Tout d'abord, on a critiqué la route des Nations, mais je rappelle que c'est de sa construction que dépend le prolongement du tram à la route de Ferney ! Si on n'avait pas ouvert ce chantier, on ne pourrait pas construire la ligne de tram, puisque les travaux empêcheraient la circulation sur la route de Ferney; il s'agit donc d'une condition nécessaire à la réalisation du tram, et j'aimerais que cela soit bien compris par ce parlement comme par nos concitoyens.
Ensuite, il ne faut pas oublier que l'une des grandes opérations de M. Barthassat avait été de réunir des assises des transports, une initiative unanimement saluée il y a trois ou quatre ans. Pourquoi ? Parce qu'on avait réussi à rétablir la fameuse paix des transports en mettant fin aux blocages qui empêchaient tout développement en matière de mobilité. Grâce à ça, on a notamment pu effectuer un certain rééquilibrage en faveur du transport privé. En effet, pendant des décennies, le transport privé a été stigmatisé et par conséquent sous-développé. Or là, on a voté d'une part la route des Nations, mais aussi le projet du barreau sud L1-L2 afin de rétablir une forme d'équilibre et instaurer la paix des transports.
Idem s'agissant de la circulation des scooters: une voiture, c'est quatre scooters, donc pénaliser les deux-roues à Genève, c'est tout simplement entraver le trafic, y compris celui des bus. Je ne comprends pas qu'on n'ait pas encore pris conscience de ça ! Un scooter économise de la place sur la chaussée, ce qui est au bénéfice des transports publics; c'est tout de même simple à saisir, et je ne m'explique pas pourquoi on s'obstine à ignorer cette réalité dans ce parlement.
Si on veut conserver cet esprit et avancer dans la mise en service de nouveaux trams, dans le développement des transports collectifs et de la mobilité douce, il faut savoir faire la part des choses et accepter que le transport privé et les deux-roues notamment aient aussi le droit de jouir de la voie publique. Voilà ce que je voulais rappeler à propos de cette politique publique.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, dans l'inventaire à la Prévert de nos amis de gauche, je m'étonne de ne pas avoir entendu le mot TOSA, alors que sa mise en service revêt une importance capitale pour nos transports publics. En effet, on n'a fait que parler des particules fines hier après-midi, et nous avons peut-être là un élément de réponse à cette problématique. Aussi, j'invite d'ores et déjà le Conseil d'Etat à penser à la réduction de nos modes de transport à moteurs thermiques.
Quant à Monsieur et Madame Tout-le-Monde que se plaît à évoquer le MCG, je ne suis pas sûr que lors des trois votations sur les tarifs des TPG, l'ensemble de la population ait pensé comme vous; à mon avis, une partie des citoyens de notre canton estiment qu'on peut faire tout aussi bien avec les moyens à disposition, sans forcément avoir recours à une diminution des prestations. Je vous remercie.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les prises de position et remarques des uns et des autres - des critiques, bien sûr, mais aussi des points positifs - et j'ai noté une certaine sérénité, un climat relativement calme et apaisé - je ne sais pas si c'est l'heure matinale. J'espère que ce même climat va habiter la législature qui commence, c'est en tout cas l'esprit dans lequel j'entends moi-même travailler. Je ne peux pas vraiment faire de commentaires sur l'exercice 2017, si ce n'est souligner, à l'instar de M. Lance, les éléments positifs. En fait, je voudrais plutôt... (Brouhaha.)
Le président. Un peu de silence, Mesdames et Messieurs ! M. Dal Busco répond aux questions qui ont été les vôtres, il serait élégant de l'écouter.
M. Serge Dal Busco. C'est bien aimable, Monsieur le président ! Mais plutôt que de répondre à des questions que je n'ai pas vraiment entendues, je vais me projeter dans l'avenir, dans ce qui nous attend. Cet avenir est positif à bien des égards, c'est en tout cas ce que le Conseil d'Etat considère puisque, vous l'aurez certainement relevé, le premier point qui a été évoqué dans le discours de Saint-Pierre, ce que d'aucuns et d'aucunes d'entre vous ont mentionné il y a quelques instants, c'est le fait que Genève va entrer dans une nouvelle dimension très prochainement, va véritablement entrer dans le XXIe siècle.
La mise en service du Léman Express, Mesdames et Messieurs, est un rendez-vous que nous ne pouvons pas manquer. Nous avons investi presque deux milliards - pas tout à fait, un tiers a été payé par la collectivité cantonale - et nous devons absolument tout mettre en oeuvre pour que cet investissement soit fructueux. Les dispositions que nous avons prévues et que nous devrons prévoir, y compris d'un point de vue budgétaire, devront concourir à ce qu'un maximum des habitants du canton et de la région utilisent cette nouvelle infrastructure.
D'autres éléments positifs sont à citer, dus à un calendrier qu'il était presque impossible d'influencer. L'extension du réseau des lignes de tram va se poursuivre: Annemasse fin 2019, cela a été indiqué, puis le démarrage du prolongement à Bernex qui s'achèvera en 2020, ensuite Plan-les-Ouates, la ZIPLO un peu plus tard, et enfin, mais toujours dans les perspectives de la présente législature, une fois que nous aurons réglé certains problèmes, le Grand-Saconnex - les difficultés à la fois techniques et budgétaires auxquelles nous sommes confrontés ont été indiquées.
Je prends ici l'engagement - sans en garantir le résultat, naturellement - de me rendre auprès des autorités fédérales pour essayer de décrocher les financements qui nous manquent, ce qui nous avait considérablement déçus, en tout cas dans les premières annonces. Il faut absolument que l'on partage, dans les officines bernoises, l'importance de cet ouvrage et d'autres projets en matière de mobilité afin d'obtenir des aides financières de ce côté-là.
Nous avons un cadre, Mesdames et Messieurs, qui a été rappelé par plusieurs d'entre vous et plébiscité par la population en 2016, c'est cette fameuse LMCE qui n'a rien du qualificatif que M. Baertschi lui a donné tout à l'heure, mais qui constitue une base sur laquelle nous devons construire notre politique des transports au cours des prochaines années, et c'est ce à quoi je vais m'employer à oeuvrer, je peux vous l'assurer. Certains ont parlé de la nécessité de trouver des compromis, il est évident qu'en matière de mobilité, c'est la base de la réussite. Cette loi le permettra, je l'espère, et j'aurai l'occasion de revenir dans quelque temps avec des orientations plus précises du Conseil d'Etat quant à la suite des opérations que nous entendons mener et qui, de toute évidence, revêtent des aspects extrêmement positifs et prometteurs. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. A présent, Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes appelés à vous prononcer sur la politique publique J «Mobilité».
Mise aux voix, la politique publique J «Mobilité» est rejetée par 54 non contre 26 oui.
K - SANTE
Le président. Nous abordons la politique publique K «Santé». Je laisse immédiatement la parole à Mme Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts voteront la politique publique K «Santé». En ce qui concerne les prestations sociales accordées aux ménages privés dans le domaine de la santé, les subsides LAMal ont augmenté de quatre millions. Il y a donc une hausse du nombre de bénéficiaires. En parallèle, les primes d'assurance-maladie continuent de croître de façon exponentielle, l'explosion se poursuit. Certes, la population vieillit, mais on note aussi une augmentation des maladies chroniques, des burn-out, etc.
Il faut relever que les subsides à l'assurance-maladie ont dépassé l'aide sociale dans le canton. C'est un signal important: nous connaissons un problème majeur en termes de gestion de la santé. Les familles peinent, voire n'arrivent plus à payer leurs primes, tandis que de nombreuses personnes préfèrent renoncer à des soins de base en raison de la franchise élevée. Les primes doivent être contenues et ne pas représenter une charge de plus de 10%, les Verts ont d'ailleurs lancé une initiative dans ce sens avec leurs partenaires de l'Alternative.
Ensuite, nous souhaitons rappeler l'importance de développer des politiques de prévention afin d'agir en amont plutôt qu'en aval, et ceci peut se faire dans le cadre d'une meilleure collaboration interdépartementale et de politiques transversales - je peux donner l'exemple des coûts de la santé en matière de pollution de l'air ou de nuisances sonores.
En conclusion, les Verts soutiendront cette politique publique, mais resteront vigilants... (Panne de micro.)
Le président. Puis-je vous suggérer d'utiliser le micro d'à côté pour terminer votre intervention, Madame la députée ? (Mme Marjorie de Chastonay change de place.)
Une voix. Ça ne marche pas non plus !
Une autre voix. Essaie encore !
Le président. Non, décidément, on n'entend rien... (Un instant s'écoule.) Ah voilà, il semble que le micro soit allumé !
Mme Marjorie de Chastonay. C'est une blague ! En conclusion, donc, les Verts soutiendront cette politique publique, mais resteront vigilants quant aux politiques de prévention, à la qualité des prestations et au personnel des réseaux de soins tels que l'IMAD, qui travaille dans des conditions difficiles, avec une surcharge de travail importante, des cadences accrues, une augmentation du stress et une surcharge administrative. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la députée. Puisse notre système tenir encore jusqu'à ce soir ! Je passe la parole à M. le député Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. La politique de la santé est l'une des plus importantes pour la population, dans notre canton comme au niveau suisse. Vous l'avez vu lors des dernières élections, il s'agissait d'un point primordial du débat public, et ce sera probablement la même chose pour les élections fédérales l'année prochaine.
Le parti démocrate-chrétien votera cette politique publique. Nous saluons le combat de M. le conseiller d'Etat pour essayer de diminuer les primes d'assurance-maladie, et nous le menons avec lui en récoltant des signatures en faveur de deux initiatives. La création d'une caisse de compensation au niveau cantonal représente l'une des meilleures solutions avancées jusqu'à maintenant pour réduire les primes.
Le problème actuel est surtout un problème de coûts. On peut tenter de juguler l'augmentation des primes d'assurance-maladie, mais le problème reste quand même un problème de coûts, et là nous avons des critiques à émettre à l'égard du magistrat. En effet, on ne peut pas mener une politique de la santé contre les gens, et ses récentes déclarations sur les médecins et les cliniques privées n'ont pas contribué à instaurer une paix de la santé, comme on a essayé de trouver une paix des transports. Nous espérons retrouver ces prochaines années un certain équilibre, une sérénité dans les discussions sur ce sujet.
Ce que l'on constate actuellement à Genève, c'est une course effrénée au développement d'appareils coûteux, une course effrénée à l'augmentation des coûts de la santé, chacun voulant manger la part de l'autre, chacun voulant gagner la part de l'autre, et cette politique est malsaine. Si on veut limiter les coûts de la santé, il faut conduire une politique coordonnée en matière d'acquisitions et travailler avec les acteurs de la santé, pas contre eux. L'Hôpital cantonal grossit beaucoup trop vite, il fait des choses qu'il ne devrait pas faire et qu'il devrait laisser aux privés, et cette politique doit être discutée.
Dans la synthèse des priorités figurant à la page 216 du rapport, il est signalé que le Conseil d'Etat a adopté la planification sanitaire cantonale. Bravo, mais la discussion à ce sujet n'est pas arrivée devant ce parlement, parce que le rapport n'a pas été déposé dans les six mois par le propre parti de M. le conseiller d'Etat ! Si nous voulons avoir une discussion essentielle sur la planification sanitaire pour essayer de réduire les coûts de la santé, il faudrait peut-être déposer les rapports à temps afin qu'on puisse mener cette discussion en plénum.
Pour terminer, j'ai un petit souci avec MonDossierMedical.ch, et j'ai d'ailleurs déposé une question écrite urgente à ce sujet cette semaine. Ce dossier électronique est vraiment une réussite et nous sommes pour, mais le problème, c'est que la Poste s'est retirée, décidant qu'elle n'avait plus les moyens de s'en occuper. Aussi, c'est une firme privée, Siemens, qui a repris le flambeau, ce qui nous cause des soucis s'agissant de la gestion des données. Nous attendons des explications du Conseil d'Etat quant à la suite qu'il entend donner à cette affaire. Je vous remercie.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y aurait beaucoup à dire sur cette politique publique essentielle à la population. Le Grand Conseil aura le loisir d'en débattre plus longuement lors du traitement du rapport du Conseil d'Etat sur la planification sanitaire. Dans le cadre de l'examen des comptes 2017, le groupe socialiste souhaite spécifiquement revenir sur trois éléments.
Une remarque positive, d'abord: nous saluons la résistance du Conseil d'Etat face à la pression des cliniques privées. Celles-ci souhaitent en effet tirer le maximum de la réforme de la LAMal en vigueur depuis 2012 et pouvoir librement exercer, à la charge du contribuable et de l'assurance obligatoire des soins. Le canton de Zurich a fait l'expérience de la libéralisation de l'accès aux cliniques privées, et les coûts d'hospitalisation, il faut le relever, ont augmenté de 25%. Notons qu'en plus de renchérir les coûts, l'action des cliniques privées menace également les conditions de travail des salariés du secteur de la santé. La grille des salaires de la convention collective de travail des cliniques privées prévoit en effet des revenus moyens oscillant entre 4400 F et 5000 F par mois, soit au moins 1000 F à 3000 F de moins que dans les établissements publics.
Le deuxième point, Mesdames et Messieurs, concerne les EMS. Il serait possible de gagner en efficience par l'intermédiaire des organisations faîtières. Rappelons à cet égard l'action décisive de la Fédération genevoise des établissements médico-sociaux. A notre avis, on pourrait constituer des pools de remplacement communs à plusieurs EMS, ce qui éviterait de recourir à des travailleurs intérimaires. Ce serait à l'avantage des EMS tout comme des travailleurs concernés, qui seraient ainsi soumis à la CCT des EMS, et non pas aux mauvaises conditions de la CCT du travail intérimaire. Dans le même esprit, il serait souhaitable de mettre en place des centrales d'achat communes aux EMS. Le Conseil d'Etat peut et doit faire mieux dans ce domaine.
Enfin, dernier point, les socialistes souhaitent revenir ici sur les défaillances du Conseil d'Etat en matière de surveillance d'un établissement de soins en particulier, à savoir la clinique Corela. Durant plus de dix ans, cette clinique a travaillé quasi exclusivement pour les assureurs privés en réalisant des expertises souvent tronquées afin de favoriser les clients assureurs au détriment des assurés. Il ressort d'un arrêt du Tribunal fédéral que la clinique Corela collaborait avec des soignants qui n'étaient pas au bénéfice d'une autorisation de pratique et que les rapports d'expertise étaient modifiés par des médecins n'ayant jamais vu l'assuré. Ces expertises ont permis à des assureurs de se soustraire à leurs obligations de servir des prestations pourtant dues. L'ampleur des fraudes est considérable, puisqu'il s'agit de plusieurs dizaines d'expertises.
Or, en guise de sanction, au lieu d'interdire purement et simplement à l'établissement et aux médecins mis en cause de continuer à exercer, le département s'est borné à une interdiction de trois mois, ce qui est pour nous un véritable scandale. Il est donc vraisemblable que la clinique Corela - qui, dans l'intervalle, a changé de nom pour s'appeler MedLex SA - continuera à sévir. Le département, lorsqu'il s'agit d'abus des bénéficiaires de l'aide sociale - par exemple des omissions de notifications, on en a parlé hier lors du débat sur l'action sociale - annonce des procédures pénales, tandis qu'il laisse quasiment le champ libre dans le cas de la clinique Corela.
Pourtant, les conséquences financières de ces fraudes sont importantes pour notre canton. Il est certain que des assurés qui ont perdu leurs droits par la faute de cette clinique ont dû faire appel à l'assistance publique. Ce principe de deux poids, deux mesures n'est pas acceptable. Quel suivi le Conseil d'Etat va-t-il donner à cette affaire ? Va-t-il entreprendre des procédures pour aider les assurés victimes de cette clinique à obtenir la réparation du dommage subi ?
Nous aimerions conclure sur une note positive et adresser nos remerciements à l'ensemble du personnel de la fonction publique qui a assuré la qualité des prestations tout au long de l'année 2017. Merci, Mesdames et Messieurs. (Quelques applaudissements.)
M. Thomas Bläsi (UDC). Comme tous les six mois, Mesdames et Messieurs, voici le petit bulletin d'information de Pharma24, projet phare de notre république ! Aujourd'hui, le nombre d'officines touchées, alors qu'elles ne devaient pas l'être, par la création de cette pharmacie centralisée de type exclusivement commercial est de cinq. Le chiffre d'affaires qui nous avait été annoncé comme optimum pour son fonctionnement, à savoir deux millions, atteint déjà presque les huit millions. Pour rappel, la somme des ordonnances sortant de l'hôpital représente environ 40 millions. Le poids des grands groupes au sein du conseil d'administration est toujours aussi conséquent: il y a des représentants de Pharmacie Populaire - qui, comme je vous l'ai déjà dit, appartient aux caisses maladie, Concordia et autres - Amavita, Pharmacieplus et du service de facturation Ofac.
Les pharmacies de garde traditionnelles ne sont plus signalées par les services de l'Hôpital cantonal, et tous les patients sont automatiquement orientés vers Pharma24, contrairement aux promesses qui nous avaient été faites par le magistrat. La fréquentation des pharmacies indépendantes est passée de 400 clients par week-end de garde à 40 clients en moyenne.
Or les stocks de Pharma24 sont insuffisants, et les pharmaciens indépendants ont dû proposer leur propre assortiment en urgence durant les gardes de décembre, les antibiotiques pour enfants n'ayant pas été prévus en quantité suffisante pour la période hivernale. Par ailleurs, le temps estimé de dix minutes pour rejoindre les pharmacies de garde, qui avait justifié la création de cette structure centralisée, est aujourd'hui remplacé par un temps d'attente de quarante-cinq minutes, selon les patients - une véritable réussite !
Quant à... (Un instant s'écoule.) Excusez-moi, il y a tellement de choses à dire que je finis par m'y perdre ! Quant à la fameuse formation du pharmacien du futur, elle n'a toujours pas été mise en place et n'est visiblement pas prévue dans cet établissement pour l'instant. Comme vous le voyez, la plupart des arguments, voire quasiment la totalité, qui avaient été avancés pour que nous acceptions ce projet sont caducs. Le groupe UDC ne conteste pas la nécessité d'une structure pharmaceutique centralisée aux HUG, mais bien la forme commerciale qu'elle a prise.
Maintenant, parlons de la politique des prix: elle est particulièrement intéressante, puisque ce n'est pas une politique des prix d'une chaîne de type Amavita, qui indique sur sa vitrine 10%, 20%, 30% voire 40% de rabais. Sur les 150 principales références testées, il se trouve que, quel que soit le pourcentage accordé, les pharmaciens indépendants fournissent des tarifs moins chers, et ce sans aucun rabais. Pourquoi ? C'est très simple: parce que le prix de vente des médicaments qui ne sont pas soumis à l'ordonnance médicale est libre, on peut donc proposer 50% sur tout son stock sans changer un seul montant.
Vous l'aurez compris, le groupe UDC n'est toujours pas satisfait de la gestion du projet Pharma24. Toutefois, cet épiphénomène du monde de la santé n'est pas suffisant pour qu'il refuse la politique publique dans son entier. Le constat fait en commission de la santé est qu'on relève de nettes améliorations dans la gestion de certains services de l'Hôpital cantonal que notre groupe avait dénoncée au travers de nombreuses motions. Si nous regrettons le temps pris pour déterminer les dysfonctionnements et mettre en place les adaptations nécessaires, force est de reconnaître que les choses fonctionnent nettement mieux.
Quant au souhait de l'UDC de voir diminuer la subvention des HUG au profit d'une utilisation plus raisonnable des moyens à disposition, en particulier des cliniques privées, il s'agit d'une ligne politique que ne partage pas le magistrat, et on ne saurait condamner complètement une politique publique en raison du non-accomplissement de certains paramètres. Notre groupe soutiendra donc la politique de la santé en espérant que les efforts accomplis à l'hôpital se poursuivront et que les arguments de ceux qui visent une stratégie sanitaire différente soient davantage pris en compte par le conseiller d'Etat à l'avenir. En vous remerciant.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, vous êtes encore nombreux à être inscrits pour prendre la parole sur cette politique publique, je propose donc que nous en poursuivions la discussion après la pause.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous reprenons nos travaux à 10h.
La séance est levée à 9h45.