Séance du
jeudi 1 mars 2018 à
14h
1re
législature -
4e
année -
12e
session -
70e
séance
M 2288-A
Débat
Présidence de M. Eric Leyvraz, président
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous signale que la motion que nous venons de voter figurait à l'ordre du jour pour la dix-septième fois ! Celle-ci y figure pour la dixième fois. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Monsieur Saudan, vous avez la parole.
M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion a été étudiée par la commission à la fin du printemps 2016. Sa raison d'être est que l'instruction publique serait colonisée par les enseignants frontaliers. Lorsqu'on examine les considérants et qu'on lit l'exposé des motifs ainsi que les déclarations du premier motionnaire, les thèmes qui en ressortent sont assez simples: il y aurait eu un afflux d'enseignants frontaliers qui avoisinent les 10% au sein de l'instruction publique et il y aurait eu des cas de mobbing de la part d'enseignants frontaliers envers des élèves genevois. Le premier signataire a mentionné deux cas qui lui ont été rapportés directement. Un autre considérant porte sur le fait que ces enseignants frontaliers seraient peu acclimatés à notre environnement socioculturel. Pour preuve, le motionnaire cite une anecdote sur un professeur de gymnastique frontalier qui aurait obligé ses élèves à prononcer à la manière gallique le nombre 70. (Rires.)
Concernant les invites, elles sont un peu plus «cash». La première invite demande de ne plus engager d'enseignants frontaliers. La deuxième demande d'examiner les cas de mobbing imputables à des enseignants frontaliers. Troisièmement, il est demandé que notre système de formation puisse fournir un nombre suffisant d'enseignants pour éviter l'engagement d'enseignants frontaliers.
Par la suite, le département a donné des explications concernant les considérants et les invites de cette proposition de motion... (Commentaires.) Merci de me laisser parler ! Tout d'abord, le pourcentage d'enseignants frontaliers au sein de l'instruction publique est de 4,5%. Effectivement, il a été de 10% au cycle d'orientation en raison de pénurie dans des branches bien particulières comme les mathématiques et l'enseignement physique. Deuxièmement, les cas de harcèlement évoqués étaient totalement inconnus et n'ont pas été rapportés à la direction du département. Le harcèlement est en soi inacceptable et il n'y a pas de raison qu'il soit plus ou moins acceptable selon qu'il est le fait d'un enseignant frontalier ou d'un enseignant purement local, dirais-je. Troisièmement, les procédures d'engagement au DIP sont très bien encadrées institutionnellement et elles sont relativement strictes.
Par la suite, les travaux de commission ont plutôt porté sur le fait que 153 personnes inscrites à l'office cantonal de l'emploi au 31 décembre 2013 voulaient un emploi dans l'enseignement mais n'en trouvaient pas. J'apporte deux réflexions pour l'ensemble des députés. Ce nombre de 153 demandeurs doit être relativisé par rapport au nombre global d'enseignants: à Genève, au même moment, il y avait 11074 enseignants, et si vous prenez simplement les enseignants du primaire, il y en avait 2738. Il se trouvait que, sur ces 153 enseignants, 133 postulaient pour des postes dans le primaire. Nous ne savons rien du profil de ces postulants et nous ne pouvons en tirer aucune conclusion.
Après ces explications, la majorité de la commission a considéré que les considérants de cette proposition de motion étaient inexacts et que les invites étaient inappropriées. La majorité vous propose donc de ne pas entrer en matière sur cet objet.
M. Florian Gander (MCG), rapporteur de minorité. Mon préopinant a dit que le nombre de 153 personnes enseignantes et en recherche d'emploi était minime par rapport au nombre total d'enseignants. Minime, ça dépend pour qui ! Je pense que, pour ces 153 personnes en recherche d'emploi, ce n'est pas une minorité. (Commentaires.) C'est peut-être 1,4%, mais je vois dans les chiffres qu'en l'occurrence, quand on demande au département pourquoi on a des enseignants frontaliers, sa réponse est qu'il n'a pas réussi à trouver des professeurs pour des cours spécifiques. Or, si on regarde les chiffres donnés en réponse à la question écrite urgente 510 que j'ai déposée le 22 juin 2016, 153 enseignants se retrouvent à l'office cantonal de l'emploi, soit à 100% soit à temps partiel parce qu'ils ont une activité professionnelle, mais avec un nombre d'heures insuffisant pour avoir un revenu correct - on va dire ça comme ça. Parallèlement, on voit aussi qu'au 31 décembre 2015, on a encore 159 personnes à l'Hospice général dont la dernière activité professionnelle était l'enseignement: 52 enseignants, 19 professeurs, et je vous épargne les autres chiffres. Si on cumule, on n'a pas seulement 153 enseignants en recherche d'emploi à temps plein ou partiel, mais on peut leur ajouter 159 personnes à l'Hospice général ! (Commentaires.) On peut comparer ces chiffres avec les chiffres donnés au 31 décembre 2013: il y avait alors 185 enseignants frontaliers. Si on reprend les deux chiffres donnés en réponse à la question écrite urgente, on arrive à peu près à trois cents enseignants, avec des branches spécifiques. On a donc plus ou moins le détail, en tout cas par rapport à ma question écrite urgente.
Ce que demande principalement cette motion - je vais vraiment axer mon propos là-dessus - c'est d'appliquer la directive en vigueur dans les départements et qu'on engage principalement des personnes résidentes - qu'elles soient suisses ou non - dans les autres cantons ou le canton de Genève. La formation d'enseignant est identique, la connaissance géographique de la Suisse est identique. Des enseignants venant de l'extérieur de la Suisse n'ont pas ça ! Notre histoire a une particularité et si on n'est pas formé en Suisse, on n'a pas ces connaissances qu'on peut transmettre à nos élèves et à nos enfants.
Pour ces raisons-là et au vu du nombre d'enseignants sur le carreau, on doit pouvoir faire le nécessaire pour les engager, quitte à les former pour qu'ils puissent s'adapter à une spécificité dont on a besoin. Je suis sûr que les enseignants n'ont qu'une envie, celle de continuer à apprendre, puisqu'ils ont toujours été à l'école et qu'ils ont toujours étudié. Donc, je suis sûr et certain qu'on peut arriver à trouver une place de travail pour ces 153 personnes au chômage et peut-être pour les 159 à l'Hospice général, surtout qu'on voit actuellement une augmentation du nombre d'élèves dans nos écoles, ce qui demande aussi une augmentation du nombre d'enseignants. Pour toutes ces raisons, je vous demande d'accepter cette motion.
Mme Isabelle Brunier (S). Comme la majorité, le PS a jugé et pense toujours que tant les considérants que les invites de cette motion sont approximatifs, erronés, voire irrecevables, et il vous invite à refuser cette motion.
M. Yves de Matteis (Ve). Je n'étais pas présent lors des débats autour de cette motion, mais j'ai lu les procès-verbaux et je dois dire que j'aurais voté de la même manière que la majorité de la commission, puisque le seul parti à avoir accepté cette motion était celui-là même qui l'avait rédigée. Aucun autre parti n'a donc été convaincu par les arguments avancés en commission.
Oui, bien sûr, il y a des enseignants qui sont d'origine étrangère, voire de nationalité étrangère, dans nos écoles primaires, nos cycles et nos collèges. Oui, il y a aussi des frontaliers parmi ceux-ci ! Mais est-ce vraiment surprenant ? Si on prend n'importe quelle autre ville ou agglomération de la taille de Genève, suisse ou étrangère, on trouve aussi des enseignants travaillant en ville ou dans l'agglomération qui proviennent de cinq, dix, quinze, vingt kilomètres à la ronde. La différence entre ces villes et Genève, c'est qu'ici, on se trouve déjà en France à cinq kilomètres du centre en passant par Chêne-Bourg et Chêne-Bougeries sur la rive gauche et en passant par le Petit-Saconnex et le Grand-Saconnex sur la rive droite. On voudrait donc nous faire croire que cette situation est anormale. Mais non, elle est parfaitement normale ! Croyez-vous vraiment que, dans toutes les autres villes ou agglomérations du monde de la même taille que Genève, on s'interdit d'employer des personnes habitant à plus de cinq kilomètres du centre ? Croyez-vous réellement qu'à Saint-Sébastien, Parme, Bournemouth, Linz ou Aberdeen, les enseignants et enseignantes ne viennent que de l'intérieur d'un périmètre de cinq kilomètres autour de la ville ? Croyez-vous vraiment qu'à Liège, Pampelune, Mayence, Lübeck, Rennes ou Trieste, les écoles, collèges et universités ne sélectionnent leurs collaborateurs et collaboratrices que parmi les personnes habitant à moins de cinq kilomètres du centre-ville ? La réponse est évidemment non, tout comme la réponse du groupe des Verts à cette motion qui sera également et clairement non !
Concernant le mobbing mentionné dans une des invites de cette motion, c'est un problème qui doit effectivement être traité, et il l'est, de fait, par l'organe mis sur pied par l'Etat, à savoir le groupe de confiance dont c'est l'un des rôles; mais ce problème doit être examiné indépendamment du fait que ses auteurs - ou victimes - soient ou non frontaliers, ne serait-ce que du point de vue de l'égalité de traitement et de la non-discrimination.
En conclusion, le groupe des Verts vous enjoint bien évidemment de refuser ce texte. Merci, Monsieur le président.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la commission a fait son travail, elle a examiné cette motion. Comme l'a fort bien dit le rapporteur de majorité, avec un certain humour - je le remercie d'avoir trouvé de quoi faire de l'humour avec ce texte - il est totalement outrancier ! Après, M. Baertschi aurait pu nous dire qu'il y avait plus de 100% d'enseignants frontaliers ! Non, il ne nous l'a pas fait comme ce matin ! Il s'était donc modéré à l'époque, d'une certaine manière. Cette motion n'est le reflet d'aucune réalité, elle est inexacte et inappropriée. Je ne vais pas commenter les chiffres du rapporteur de minorité parce que c'est complètement vain, ça ne sert à rien. Je remercie Mme Brunier pour sa concision, ma conclusion est la même: Mesdames et Messieurs les députés, ne perdons pas de temps avec cette motion, votons et refusons-la !
M. François Baertschi (MCG). On constate que la vérité fait peur ! (Rires.) Qu'on n'ose pas accepter la vérité qui montre qu'il y a 185 enseignants frontaliers au cycle d'orientation, 34 à l'école primaire et 85 dans le postobligatoire, cela pour 2013. Ce sont les chiffres que nous avons déposés à cette époque-là. Cela fait peur à certains, cela en fait rire certains, qu'il y ait des chômeurs. Rions, rions fort ! Amusons-nous de ce qu'il y a des gens dans la misère... (Commentaires.) ...que des gens n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, rions très fort ! Amusons-nous dans ce parlement ! Non, le MCG ne s'amuse pas, le MCG prend les choses au sérieux et critique la légèreté de ce parlement, la majorité de tous ces partis qui sont copains comme cochons et laissent notre éducation être colonisée par les frontaliers. (Exclamations.) Nous n'en voulons pas et nous vous demandons de suivre avec vigueur cette motion. Je sais que vous ne le ferez pas ! Nous savons, hélas, que vous ne le ferez pas ! C'est un constat d'échec pour ce parlement: seul le MCG résiste. Nous résistons et nous demandons à la population de nous soutenir ! (Huées.)
M. Alexandre de Senarclens (PLR). J'aimerais dire après le député Olivier Baud que cette motion est parfaitement outrancière. Effectivement, elle relève du fonds de commerce du MCG qui, à quelques mois des élections, a besoin d'exister. Il a besoin de créer de la cohérence, il a besoin de désigner un ennemi commun et ils l'ont répété mille fois, cet ennemi commun, c'est le frontalier. Le frontalier, on le sait, est partout; il s'infiltre, il détruit nos valeurs ! Voilà ce discours absolument abominable, qui est malheureusement une recette historiquement bien connue ! De plus, cela ne repose sur rien: il n'y a pas de preuves, il n'y a pas de faits réels. On est dans l'anecdote: il y aurait eu un frontalier qui aurait été méchant avec un élève et qui aurait fait du mobbing... Voilà ce que l'on trouve dans cette motion, et c'est très triste pour ce parlement !
Maintenant, parlons un peu préférence cantonale. Je vous rappelle qu'est inscrite dans la législation genevoise une priorité aux chômeurs genevois, une priorité lorsqu'il y a un poste qui s'ouvre à l'Etat. Ce dispositif, il faut le rappeler, a été mis en oeuvre durant la précédente législature par les conseillers d'Etat François Longchamp et David Hiler. Si le MCG considère qu'il y a un manque de résultats dans le domaine, je pense qu'il doit adresser les critiques à son propre conseiller d'Etat, M. Mauro Poggia, qui est, paraît-il, chargé de l'emploi. C'est une bataille de tous les jours, il faut certes qu'il y ait une meilleure adéquation entre les emplois offerts à Genève et les formations données afin que nos chômeurs puissent pourvoir ces places. C'est évidemment une tâche au sein du département de l'instruction publique, mais c'est également une tâche au sein du département de la santé: je vous rappellerai juste que la Haute école de santé est incapable de former soixante personnes qui ne demanderaient qu'une chose, venir travailler comme infirmiers ou infirmières, et ça, c'est la responsabilité de M. Mauro Poggia, votre conseiller d'Etat. Pour tous ces motifs, nous refuserons cette motion.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le groupe démocrate-chrétien va voter contre cette motion. Il y a quatre ans, trois mois avant les élections, nous avions M. Stauffer pour ce genre de prise de parole; aujourd'hui, on a M. Baertschi. La seule différence, c'est que M. Stauffer avait un peu plus de talent que M. Baertschi ! (Exclamations. Commentaires.) Merci beaucoup, ça vous énerve, donc ça touche juste !
C'est toujours la même discussion pour savoir si on peut régler le chômage en employant les personnes locales. Je rappelle simplement qu'à Genève, il y a plus de places d'emploi que de travailleurs disponibles dans le canton; on a la chance d'avoir une économie qui fonctionne bien. On a cette chance-là par rapport à d'autres régions du monde, et on a cette chance-là parce que des gens ont travaillé pour, parce que des gens se sont investis pour avoir une économie qui marche bien. Je suis entièrement d'accord avec vous sur le fait qu'il faut peut-être mieux régler le problème du chômage et qu'il faut être plus actif à l'office de l'emploi, mais ça, c'est votre conseiller d'Etat qui en est responsable, Mesdames et Messieurs du MCG ! Alors balayez devant votre porte ! (Commentaires.)
M. Francisco Valentin (MCG). J'aimerais juste rappeler à mon préopinant du PLR, dont j'ai oublié le nom, que ce n'est pas M. Poggia qui est chargé de ça, mais bien le DIP. Le DIP n'est pas encore en mains du MCG, même si ça ne va pas tarder ! (Rires.) Il est vrai que, pour certaines personnes, et surtout pour les entrepreneurs de ce canton, la main-d'oeuvre frontalière est une manne infinie. Ce sont de nouveaux esclavagistes ! Rien que pour cela, je trouve scandaleux que ces gens votent des lois qui leur permettent d'exploiter des gens qui ont besoin de travailler et qui ont besoin de nourrir leur famille, tout ça au détriment des électeurs genevois et des citoyens résidents. C'est simplement inacceptable !
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à Mme Magnin pour une minute quarante-sept.
Mme Danièle Magnin (MCG). Merci, Monsieur le président. Moi, j'ai passé un an dans l'enseignement français: j'ai supplié mes parents de me remettre dans l'enseignement suisse. Un baccalauréat français sans mention ne donne pas accès à l'université en Suisse. C'est bien la preuve que cet enseignement n'a pas la même qualité que le nôtre et que les enseignants formés en France n'ont pas forcément non plus la même qualité que nos enseignants à nous. Ensuite, nous ne sommes pas des jacobins et nous ne voulons pas que ce soient ces valeurs-là qui soient enseignées à nos enfants !
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je souhaiterais vous faire part d'une certaine exaspération: c'est au moins la quatrième fois aujourd'hui que le thème des frontaliers est utilisé, à n'importe quelle sauce ! On prend n'importe quel sujet pour asséner les thèses du MCG à ce propos, en prétendant que les autres ne se soucient pas des problèmes des Genevois. J'aimerais juste vous rappeler une chose: le problème des Genevois, leur problème principal, ce ne sont pas les frontaliers, c'est la dérégulation du marché du travail ! C'est le chômage structurel, c'est la sous-enchère salariale ! Des choses contre lesquelles, lorsqu'il s'agit de prendre des décisions, vous n'êtes pas au rendez-vous ! (Exclamations.) Alors si vous voulez parler de ce qui préoccupe les Genevois, faites-le, mais cessez d'utiliser ce parlement pour faire votre pub électorale ! (Applaudissements. Commentaires.)
Le président. Merci, Madame. La parole est à M. Saudan pour une minute quarante-six.
M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voulais simplement réaffirmer un fait très simple...
Le président. Je vous ai passé la parole trop tôt, il y a peut-être encore d'autres intervenants. (Commentaires.) Excusez-moi. Je passe la parole à M. Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR). Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste réagir aux propos de M. Valentin. Je trouve parfaitement inacceptable, clairement inacceptable, de traiter les entrepreneurs de ce canton d'esclavagistes utilisant une manne en parlant des travailleurs frontaliers. C'est inacceptable, je crois qu'il y a des limites à ne pas dépasser dans notre parlement ! Il y a des conventions collectives de travail, vous ne pouvez pas faire du fascisme ainsi. (Commentaires. Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais rebondir sur ce qu'a dit M. Hiltpold. Je crois que ces paroles sur l'esclavagisme sont purement scandaleuses, surtout pour de petits entrepreneurs qui créent des postes de travail. Dire qu'ils sont des esclavagistes est proprement scandaleux, je pense qu'on est en train de dépasser les bornes. C'est n'importe quoi. Si un parti veut gagner des voix en disant n'importe quoi, qu'il le fasse et qu'il obtienne une majorité, mais je crois qu'à ce moment-là, Genève sera perdue ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur. Essayons de rester un peu calmes ! Monsieur Baertschi, je compte sur vous.
M. François Baertschi (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Buchs que certaines personnes doutent de ses qualités professionnelles médicales... (Exclamations.) Et il ferait bien de dormir un peu moins pendant les séances pour participer un peu mieux ! Parce qu'il s'assoupit !
Il y a quand même un gros problème venant de ces milieux-là, ces milieux qui favorisent les frontaliers à tous points de vue, qui font tout pour mettre des bâtons dans les roues à la politique de préférence cantonale que nous essayons de mener. Ces mêmes partis feraient mieux de dire à leurs élus de réduire le nombre des permis G et des permis frontaliers. Malheureusement, ça ne se fait pas et vous avez une lourde responsabilité. A l'Entente, vous portez une lourde responsabilité dans la situation du chômage à Genève !
Le président. Merci. Madame Salika Wenger, c'est à vous, dans le calme.
Mme Salika Wenger (EAG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, nous avons tous parfaitement compris depuis ce matin huit heures que le MCG n'a pas de politique à présenter à la population et que son unique et seul argument, ce sont les frontaliers. Nous n'avons rien entendu d'autre, aucune proposition, aucune analyse politique. Rien qui soit cohérent ! La seule chose, ce sont les frontaliers ! Alors on va faire un petit exercice. Je suis frontalière, je cherche du travail. Il est bien évident que, quand je vais arriver chez un employeur suisse, je vais lui dire tout de suite: Monsieur, de grâce, payez-moi le plus mal possible, payez-moi en dessous des Suisses qui sont beaucoup trop payés, parce que j'ai besoin de cet emploi ! Est-ce que vous prenez les gens pour des abrutis ?
Une voix. Oui !
Mme Salika Wenger. Est-ce que vous pensez réellement que ça va dans ce sens-là ? Est-ce qu'il ne vous est jamais venu à l'esprit qu'il y aurait peut-être une responsabilité du patronat que vous défendez tout le temps ? Au moment des votes, on vous a vus être favorables aux baisses d'impôts; vous avez toujours voté avec la droite et jamais avec ceux qui avaient besoin de vous et que vous prétendez défendre maintenant ! Vous êtes des hypocrites ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame. Monsieur Valentin, vous avez vingt-neuf secondes.
M. Francisco Valentin (MCG). C'est largement suffisant. J'espère simplement qu'à partir du 15 avril certaines personnes ici vont se chercher un vrai travail ! (Commentaires.)
M. Jean-Charles Lathion (PDC). J'aimerais approuver ce que vient de dire mon préopinant et j'espère moi aussi que certains d'entre nous vont pouvoir trouver un vrai travail après le 15 avril. Cela dit, je suis vraiment estomaqué par les allégations et la façon de se comporter de M. Baertschi. Ces attaques personnelles sont vraiment indignes d'un parlement tel que le nôtre. De plus, ces attaques permanentes contre les frontaliers sont du plus mauvais goût. (Commentaires.) Nous sommes à Genève et nous savons tous que notre économie ne peut pas se passer de cette main-d'oeuvre. Vouloir se mettre des oeillères et ne pas accepter cette réalité, c'est vraiment faire de l'infantilisme au plus haut niveau. (Commentaires.) Mesdames et Messieurs du MCG, je ne sais pas comment vont se passer ces élections puisque vous êtes dans cette voie-là et que vous essayez de surfer sur tous les bas sentiments pour essayer d'attirer le bon peuple de votre côté, mais je suis certain que les personnes intelligentes n'iront pas dans votre sens et qu'elles sauront faire la part des choses. Comme vous le souhaitez vous-même, j'espère vraiment que le résultat de ce 15 avril sera clair et net ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Flury, vous avez vingt secondes.
M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Une question à nos amis du fond de la salle et d'en face: à votre avis, combien d'étrangers, même domiciliés en France, travaillent dans l'administration française ? Pour l'Hexagone, DOM-TOM compris, ça doit être pas loin de zéro ! Nous sommes dans le seul pays du monde qui ne protège pas ses propres concitoyens. Nos amis orange du fond de la salle vont même faire des stands électoraux en France pour drainer l'électorat français afin d'obtenir leur soutien pour l'élection du parlement. Ils sont tellement au bout du rouleau qu'ils vont racoler en France !
Une voix. Bravo !
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, nos enfants ont besoin d'avoir des enseignants qualifiés, responsables, qui leur enseignent les matières de manière correcte et contrôlée. Pour moi, l'important par rapport à l'instruction publique et par rapport à l'éducation, c'est ça ! Ensuite, nous habitons un bassin géographique dans lequel, de temps en temps, en tant que Genevois, on aime bien, avec nos enfants, aussi, se promener de l'autre côté de la frontière, sur certaines montagnes qui nous entourent. Dont acte. Mesdames et Messieurs les députés, avec le 65% de la population genevoise de première et deuxième génération qui est d'origine étrangère, je crois que nous devons modérer nos propos ! (Applaudissements.)
M. Jean-Luc Forni (PDC). Le parti démocrate-chrétien traverse la frontière parce que le parti démocrate-chrétien se souvient aussi qu'il y a des Genevois de l'autre côté de la frontière: ces Genevois ont aussi des problèmes quand ils reviennent en Suisse, même en raison de la préférence cantonale, puisque la préférence cantonale, je vous le rappelle, Mesdames et Messieurs, discrimine aussi les Genevois qui sont de l'autre côté de la frontière ! (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, je le rappelle volontiers au MCG qui n'a semble-t-il pas suivi de cours d'histoire à l'école: l'histoire de Genève est intimement liée à celle du Genevois. Si des frontières ont été établies autrefois, au congrès de Vienne, il y a des frontières naturelles et nous avons finalement tout intérêt à construire une région qui soit prospère, non seulement pour les Genevois, mais aussi pour toute la région du Grand Genève. Messieurs du MCG, je vous invite dorénavant à être un peu plus ouverts sur le monde et à ne pas rester enfermés sur vous-mêmes, parce que, souvent, l'enfermement ne conduit à rien de bon ! (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). J'aimerais relever certains propos totalement faux, notamment de la part du PDC. D'une part, les personnes concernées par la préférence cantonale ne sont pas les Genevois habitant en France voisine. Ceux-là, premièrement, on ne peut pas les considérer comme des frontaliers; deuxièmement, ils n'ont pas besoin d'un permis G pour venir travailler à Genève: c'est un droit qui leur est acquis !
Une voix. Merci !
M. Stéphane Florey. Vous transmettrez, Monsieur le président. Quand vous dites et déclarez sur certains sites internet et dans certaines associations que vous défendez les Genevois, il faut arrêter de se foutre de la gueule de la population ! (Applaudissements.) La moitié de vos candidats vont soi-disant défendre les Genevois dans une association qui s'appelle Genevois sans frontière, et parce que c'est une proposition de l'UDC, vous n'êtes pas capables d'accepter une motion demandant de ne pas exclure de nos écoles les élèves genevois habitant en France voisine. Vous faites croire tout ce que vous voulez, mais vous ne défendez pas la proposition de motion parce qu'elle est UDC. Il faut juste arrêter de tenir ce discours. Vous êtes des menteurs, vous ne travaillez que pour votre propre électorat ! Vous ne défendez absolument pas les Genevois quand ils habitent en France voisine et, de toute façon, vous ne défendez pas la population des résidents ! Ça, c'est la réalité et c'est la vérité ! (Quelques applaudissements. Commentaires.)
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, on entend depuis des années des choses qu'il faut parfois corriger. Quelles sont les conditions pour devenir fonctionnaire en France ? Il faut être français ou européen, citoyen d'un pays membre de l'Espace économique européen - ou suisse ! C'est écrit textuellement dans les documents français. (L'orateur est interpellé.) Monsieur Rintintin, vous avez un bouton devant vous: appuyez dessus et laissez-moi finir ! (Rires.) On peut être suisse ! C'est possible dans l'ensemble des pays européens, Mesdames et Messieurs du MCG et de l'UDC ! Ceci, nous le précisons pour que l'UDC et le MCG, pour reprendre leurs mots, arrêtent de se foutre de la gueule de la population et en particulier des plus de 550 000 Suisses qui résident dans les pays européens et qui ont accès à la fonction publique des Etats européens. A bon entendeur, merci ! (Exclamations.)
Le président. Un peu de calme, Merci ! Monsieur Aellen, vous avez une minute douze.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président, ça me suffira. Quand on s'appelle Francisco Valentin, c'est qu'on a eu le privilège de venir dans notre canton pour trouver du travail avec sa famille au moins depuis quelques générations ! (Vives exclamations. Chahut.)
Le président. S'il vous plaît, mon Dieu, mais...
Une voix. C'est scandaleux !
Une autre voix. Raciste !
Le président. Vous répondrez !
M. Cyril Aellen. Quand on s'appelle Sormanni, c'est la même chose ! Quand on s'appelle Sandro Pistis, c'est pareil. Quand on s'appelle Cyril Aellen aussi on est venu à Genève ! Quand on s'appelle Turrettini également ! C'est parce que des gens nous ont accueillis que toutes nos familles ont pu venir et, moi, je suis particulièrement fier de cette tradition genevoise.
Maintenant, une petite chose toute simple... (Exclamations.) Je ne vous ai pas interrompue, Madame ! Une petite chose toute simple: la préférence cantonale est aussi absurde que la politique que vous voulez mener. La préférence cantonale, ça veut dire que le Français qui est domicilié à Saint-Julien, il lui suffit de s'inscrire au chômage, de prendre un logement à Perly-Certoux et il aura la priorité ! Ça ne changera strictement rien à cela, vous pourrez faire ce que vous voulez ! La réalité, Mesdames et Messieurs, c'est qu'il faut avoir des gens formés. La réalité, Mesdames et Messieurs, c'est qu'il faut avoir des emplois qui soient créés avec une économie dynamique ! La vérité, Mesdames et Messieurs, c'est qu'il faut que Genève soit un canton socialement accueillant et dans lequel on intègre les gens, parce que si les gens s'intègrent, si les gens peuvent venir ici, vous comme moi, c'est précisément parce qu'on a été une terre d'accueil et parce qu'on a eu envie de développer un pont économique et social dans notre canton. Nous devons en être fiers et nous ne voulons pas vilipender cela ! Merci, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements. Huées.)
Le président. On peut se calmer un peu, quand même ! On peut être opposé sans crier dans tous les coins. Un peu de tenue, on vous regarde à la télévision ! L'image que vous donnez est lamentable. Monsieur Forni, vous n'avez que huit secondes, je vous laisse dire deux mots !
M. Jean-Luc Forni (PDC). Merci, Monsieur le président. Je souhaite simplement dire que nous ne nous «foutons pas de la gueule», comme je viens de l'entendre de la bouche d'un préopinant. (Commentaires.) Nous avons simplement un peu d'éducation. Quand on aspire à devenir conseiller d'Etat, il est de bon ton d'utiliser un langage protocolaire. Moi, je n'utiliserai donc pas l'expression «se foutre de la gueule», mais «se moquer du monde».
Le président. Merci. Madame Engelberts, je pense que vous, vous allez intervenir avec calme, pendant deux minutes.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Avec calme, pondération et harmonie, si on peut ! Je regrette beaucoup que ce sujet soit abordé de cette manière-là. Il peut être intéressant de débattre de n'importe quel sujet, des frontaliers comme d'autres. Je fais partie de la liste des personnes qui ont été naturalisées. Mon père a été naturalisé, je m'appelais au départ Leone - pas du tout Engelberts - et j'en suis très contente et très heureuse. Je veux dire que je suis surtout reconnaissante.
Par rapport aux personnes au chômage, je voudrais dire une chose: on ne peut pas engager quelqu'un qui est au chômage simplement parce qu'il est suisse. Il n'est pas forcément compétent dans le domaine de l'entreprise ou dans le domaine des soins. (Commentaires.) Parce que, très souvent, on dit qu'on va les mettre avec les infirmiers, comme soignants, par exemple. C'est un raisonnement que je souhaite que vous fassiez: regardez quels sont les profils actuellement en formation à l'Hospice général. Vous verrez que la grande difficulté pour ces personnes-là, c'est de croire en eux-mêmes, pour qu'ils puissent à nouveau se former, qu'ils parviennent à remettre le pied à l'étrier. Et c'est la quadrature du cercle: quand vous avez été au chômage de deux jusqu'à cinq ans, je vous assure que, comme adulte qui arrive en formation, remonter la pente peut prendre des années - et ça peut échouer. Regardons les choses avec une certaine humilité quand même. Il y a besoin de personnel dans notre canton. Regardons qui est le mieux placé, mais ne critiquons pas d'emblée une catégorie ou une autre. Et arrêtons de vociférer, parce que franchement, ce n'est pas très élégant ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame. La parole est à M. Vanek pour une minute trente.
M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. Je vais tenter de faire preuve d'élégance et de ne pas vociférer, j'y arrive aussi parfois. (Rires.) Je voulais reprendre, exceptionnellement, et ne pas tirer sur l'ambulance du MCG... (Commentaires.) Je ne voulais pas tirer sur l'ambulance du MCG, mais je voulais reprendre ce qu'a dit Cyril Aellen dans un emportement qu'il n'a pas constamment. Deux éléments, Monsieur Aellen: je n'ai pas du tout apprécié quand vous avez repris M. Valentin parce qu'il a un nom d'origine supposée étrangère, en disant que s'il était là, c'était bien parce que la Suisse avait eu une politique d'accueil, etc. Je pense que ce n'est pas très bien ! Ce n'est pas très bien parce que la politique d'accueil - entre guillemets - de la Suisse par rapport aux immigrés, ce sont aussi les permis saisonniers, ce sont aussi les baraquements pour les saisonniers, ce sont aussi toutes sortes de conditions indignes et des prélèvements des cotisations sociales qui n'ont pas été rendus, etc. J'ai aussi un nom étranger et je suis né ici apatride. On ne me l'a pas donnée, ma nationalité: j'ai dû me battre ! Je l'ai obtenue par les poils ! Ne soyons donc pas si fiers de la politique d'accueil de la Suisse et ne tenons pas, pour répondre à nos amis ou adversaires du MCG, des propos qui sont aussi teintés du sceau de la xénophobie !
Le président. Merci, il faut terminer, Monsieur !
M. Pierre Vanek. Ensuite, vous avez dit le fond de votre pensée sur la préférence nationale. On en reparlera avec l'objet concernant les TPG et la sous-traitance, votre projet de loi, Monsieur Aellen !
Une voix. Avec plaisir !
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Gauthier pour deux minutes.
M. Pierre Gauthier (HP). Merci, Monsieur le président. Je pense qu'il ne faut pas confondre les causes et les conséquences, même si nous pouvons toutes et tous comprendre la frustration de certains habitants du canton qui ne trouvent pas de travail. Ces habitants ne doivent pas se faire abuser par le discours qu'on entend trop souvent, qui leur fait croire que le frontalier vient manger leur pain. Cela me fait penser à un sketch de Fernand Reynaud. Si celui-ci était drôle, ce qui se passe aujourd'hui ne l'est pas du tout ! De mon point de vue en tout cas, la cause est très simple: depuis une quarantaine d'années, nous suivons une politique qui est mauvaise et qui va dans le mauvais sens. Nous avons donné la priorité à l'importation d'entreprises du secteur tertiaire au détriment du secteur artisanal et secondaire, comme on l'appelle. C'est cela qui a créé cette frustration chez des dizaines de milliers de Genevois - des dizaines de milliers ! - qui n'ont pas trouvé d'emploi et se trouvent aujourd'hui abusés par le langage de certains démagogues, qui utilisent de manière totalement abusive la détresse de ces chômeurs pour vendre leur idéologie que je qualifierais tout à fait gentiment de nauséabonde.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Velasco pour deux minutes cinquante.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je trouve que stigmatiser les Français en tant que tels, c'est comme stigmatiser les Espagnols ou d'autres nationalités, et c'est assez dégueulasse. Par contre, Mesdames et Messieurs les libéraux, il est évident que cette libre circulation de conception éminemment libérale a fait se confronter des travailleurs de France et d'Allemagne aux travailleurs d'ici, cela sans aucune protection ! Encore pire, la libre circulation a fait qu'il y a eu une diminution du taux de vacance de logements. Non seulement le travail s'est raréfié, mais en plus les logements se sont raréfiés ! J'ajoute qu'à l'époque, quand un jeune sortait d'apprentissage, il avait droit à six mois dans l'entreprise avec la possibilité d'apprendre encore et de s'insérer. C'est fini, ça, on veut des travailleurs qui soient immédiatement utilisables et exploitables ! Voilà la situation à laquelle on est arrivé. Le MCG est un pur produit de ça: avec cette politique de libre circulation éminemment violente, vous avez justement produit le parti du MCG. Aujourd'hui, vous vous en plaignez, mais c'est votre politique qui a produit ça ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Je passe la parole à M. Gander, rapporteur de minorité, pour vingt secondes.
M. Florian Gander (MCG), rapporteur de minorité. Vingt secondes, ça va être très court !
Le président. Quarante-huit secondes, excusez-moi !
M. Florian Gander. Merci, Monsieur le président. En préambule, je suis content d'apprendre aujourd'hui la généalogie de certains de mes collègues; c'est très mignon, mais c'est hors sujet ! Là, le problème, ce sont des enseignants qui sont sur le carreau parce que des frontaliers sont venus prendre leur place. J'ai entendu plein de choses, j'ai entendu dire du côté du PLR qu'il était inadmissible que le MCG se comporte comme ça. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) J'aimerais juste rappeler que votre candidate Mme Fontanet a déclaré dans la presse qu'il fallait une priorité cantonale, que c'était indispensable. Ce ne sont pas mes propos, ce sont les vôtres, je vous en laisse les droits !
Concernant la motion, j'entends dire qu'elle est inadmissible et inacceptable. Ce qui est inacceptable, c'est vous, chers collègues ! Ce qui est inacceptable, c'est de laisser ces trois cents enseignants sur le carreau et de venir me dire qu'ils sont devenus débiles mentaux et ne sont plus capables de travailler parce qu'ils ont été une ou deux années au chômage. C'est simplement inacceptable !
Le président. Il vous faut terminer !
M. Florian Gander. Moi, à leur place, je serais complètement outré par ce parlement. Chers collègues, je vous demande donc de soutenir cette motion et de mettre en place la préférence cantonale, comme nous le faisons avec notre conseiller d'Etat Mauro Poggia !
Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Saudan, c'est à vous pour quarante secondes.
M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement, la préférence cantonale doit aller de pair avec la compétence égale et s'il y a trois cents personnes sur le carreau qui veulent un poste dans l'enseignement, c'est qu'elles n'ont pas les prérequis pour enseigner à nos enfants. (Exclamations.) Merci de me laisser parler ! Je voulais aussi vite répondre à Mme Magnin qui fustigeait l'enseignement français et lui dire que nous avons un indicateur assez fiable: nous avons un nombre non négligeable d'étudiants frontaliers ou de familles suisses établies en France, qui ont un bac, qui s'inscrivent en première année de médecine: ils réussissent et font partie de nos meilleurs étudiants ! Le système français n'est donc pas aussi mauvais que vous le pensez ! Et comme j'ai un conflit d'intérêts, je le dévoile: je suis binational, cela remonte à quatre générations et j'en suis très fier ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Valentin ?
M. Francisco Valentin. C'est juste pour demander le vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, très bien. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, un tout petit peu de rationalité pour commencer cette intervention, puisque beaucoup de chiffres ont été donnés. D'abord, le département respecte parfaitement la directive transversale de l'office du personnel de l'Etat: lorsqu'un poste d'enseignant est ouvert, il est d'abord entre les mains, pendant une quinzaine de jours, de l'office cantonal de l'emploi, avant d'être publié dans le bulletin des places vacantes. Quant aux chiffres, vous savez très bien que lorsqu'on engage un enseignant avec un permis G, en règle générale, c'est qu'on n'a pas trouvé de personne qualifiée dans le canton. (Commentaires.)
Je vais vous donner les derniers chiffres puisque vous ne les aviez pas en commission. Ce sont ceux de la rentrée 2017: nous avons engagé dix-sept enseignants avec un permis G. Nous en avions deux dans l'enseignement primaire, zéro dans l'enseignement spécialisé, cinq au cycle d'orientation dont trois profs de maths, un prof d'éducation physique, un prof de français et latin, et onze au secondaire II. Pour ces onze au secondaire II, cinq dans l'enseignement général, deux en allemand, les autres se répartissant entre les mathématiques, l'éducation physique et la géographie. Enfin, et c'est là qu'on a eu un problème très pratique, six dans l'enseignement professionnel dont cinq pour la construction. Vous voyez bien que la construction est un domaine dans lequel il est extrêmement difficile de trouver des Suisses, aussi comme employés. Forcément, les maîtres professionnels sont aussi souvent d'origine étrangère. Donc, dix-sept personnes !
D'un autre côté, vous me dites qu'il y a des centaines d'enseignants au chômage et inscrits à l'OCE. Les chiffres sont dans le rapport, il s'agissait de ceux d'avril 2016. Il y a effectivement 206 personnes, mais lorsque nous avons demandé à l'OCE quelles étaient ces personnes, il a été incapable de nous en donner les titres. Ces gens se déclarent eux-mêmes enseignants. En l'occurrence, il y en a 153 pour le primaire - 153 personnes d'un côté, que vous pouvez mettre en rapport avec, de l'autre, deux enseignants engagés au DIP avec un permis G. Parmi ces 153 personnes, certaines n'ont pas les titres, d'autres ont peut-être dû quitter leur poste d'enseignant parce qu'elles ne convenaient pas. A un moment donné, on ne peut pas mettre les deux choses en rapport. Voilà pour les faits.
Un autre fait par rapport au bac français. Pourquoi demande-t-on une mention pour les jeunes qui l'ont passé ? Pour une raison bien simple: c'est que le bac français peut se faire avec une orientation très littéraire ou une orientation très mathématique. On peut faire un bac sans mathématiques la dernière année, par exemple. Or, la particularité de la maturité suisse - c'est ce qui la rend d'ailleurs extrêmement difficile - est qu'elle est très généraliste; elle demande d'être à peu près bon partout, ou en tout cas pas trop mauvais dans une discipline, sinon vous ne passez pas le cap. Ce sont des accords qui ont déterminé qu'on demande une mention au bac - qui est d'ailleurs passé un an plus tôt qu'à Genève - pour assurer un niveau minimal afin que les élèves ne soient pas prétérités par la suite. Je vous rappelle qu'en France, on peut avoir un bac sans forcément pouvoir entrer à l'université. Il y a souvent des écoles préparatoires alors qu'en Suisse, on peut entrer partout.
Après cet aspect rationnel, je ne peux pas terminer sans dire que je suis horrifiée par les propos que j'ai entendus, ceux que j'ai aussi lus. Monsieur le député Baertschi, je suis désolée, mais ce n'est pas la première fois: on ne gouverne pas de cette manière-là, avec des «j'ai entendu dire», «il y a des témoignages qui...» ! Ça, ça rappelle des périodes honteuses, comme l'a très bien dit M. de Senarclens ! (Vifs commentaires.) Soit on a des faits précis et on les examine... (Commentaires.)
Le président. Monsieur Baertschi, vous n'avez pas la parole ! S'il vous plaît ! (Remarque de M. François Baertschi.)
Mme Anne Emery-Torracinta. Un peu de respect, Monsieur Baertschi ! (Vifs commentaires.)
Le président. Ayez la politesse d'écouter Mme Torracinta ! Elle ne vous a pas interrompu, faites de même ! C'est de la politesse, Monsieur !
Mme Anne Emery-Torracinta. Je n'admets pas qu'on dise que le DIP a des pratiques qui sont des pratiques des années 30 ! (Vifs commentaires.)
Le président. Monsieur Baertschi, je vous rappelle à l'ordre !
Mme Anne Emery-Torracinta. Monsieur Baertschi, vous avez raison de vous inquiéter du gouvernement ! Effectivement, avec un Conseil d'Etat dans lequel il y a un fils de réfugié, un Conseil d'Etat avec deux fils d'immigrés italiens, un Conseil d'Etat avec un double national, un Conseil d'Etat avec une conseillère d'Etat aux origines corses, alors oui, vous avez raison de vous méfier, Monsieur Baertschi ! (Rires. Applaudissements.)
Le président. Monsieur Baertschi, vous n'avez pas à interrompre Mme la conseillère d'Etat de cette manière ! Je ne suis pas d'accord ! Et vous n'avez pas la parole ! (Remarque de M. François Baertschi.) Maintenant, vous vous taisez, merci ! Nous allons voter sur cette proposition de motion 2288. Le vote est lancé. (Remarque de M. François Baertschi. Vifs commentaires, exclamations.) Mais continuez comme ça, Monsieur Baertschi, et je vous ferai sortir de la salle ! C'est tout ce que vous cherchez ! Ça suffit maintenant, je demande un minimum de politesse, c'est tout !
Une voix. Sortez-le !
Mise aux voix, la proposition de motion 2288 est rejetée par 64 non contre 11 oui et 8 abstentions (vote nominal).
Le président. J'attends un peu de calme, parce que franchement... Je suis très déçu de l'image que nous donnons. (Brouhaha. Un moment s'écoule.) J'attends le calme, sinon je ne reprends pas.