Séance du
vendredi 12 mai 2017 à
16h05
1re
législature -
4e
année -
3e
session -
15e
séance
La séance est ouverte à 16h05, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.
Assistent à la séance: MM. Mauro Poggia, Serge Dal Busco, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet et Anne Emery-Torracinta, conseillers d'Etat, ainsi que MM. Cyril Aellen, Jean-Louis Fazio, Florian Gander, Pierre Gauthier, Lionel Halpérin, Carlos Medeiros, Eric Stauffer et Ronald Zacharias, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Marko Bandler, Patrick Dimier, Jean Fontaine, Pascal Uehlinger et Céline Zuber-Roy.
Annonces et dépôts
Le président. Monsieur Florey, vous avez la parole.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC annonce le retrait du PL 11422 intitulé «Des commerces vivants le 31 décembre», actuellement en suspens devant la commission de l'économie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Il en est pris note. Madame Klopmann ?
Mme Sarah Klopmann (Ve). Merci, Monsieur le président. Les Verts retirent la M 2353 concernant le label «Genève région-terre avenir» actuellement en suspens devant la commission de l'environnement. Nous en déposerons une autre.
Le président. Merci, Madame la députée. Il a déjà été pris acte de ce retrait hier à 17h. Monsieur de Sainte Marie, c'est à vous.
M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste retire le PL 11556 concernant les personnes handicapées.
Le président. Merci, Monsieur le député, il est pris note de votre demande.
La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:
Pétition en faveur de Laetitia, jeune femme genevoise en situation de handicap (P-2008)
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Christophe Aumeunier : Pourquoi le surcoût que paie un propriétaire de PPE en zone de développement au bénéfice des immeubles subventionnés voisins est-il occulte ? (QUE-631)
Question écrite urgente de Mme Salika Wenger : Selon quels critères le Conseil d'Etat nomme-t-il les administrateurs-trices des fondations de droit public ? (QUE-632)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Scandale aux HUG - Des dizaines de millions de pertes à cause des créances laissées prescrites pour les assureurs (QUE-633)
Question écrite urgente de M. Christophe Aumeunier : La Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif est-elle un promoteur de PPE ? (QUE-634)
Question écrite urgente de M. Marc Falquet : Hôpital cantonal de Genève : pourquoi le silence n'est-il pas respecté en salle de réveil (Opéra et Hôpital des enfants) ? (QUE-635)
Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Le directeur de l'office des poursuites a-t-il le droit de dénigrer le travail d'une commission du Grand Conseil ? (QUE-636)
Question écrite urgente de Mme Magali Orsini : Campagnes électorales de partis étrangers sur le sol suisse (QUE-637)
Question écrite urgente de M. Jean Romain : Suite que le DIP compte donner à son rapport incomplet sur la motion 2104 qui demandait une révision de l'application genevoise de l'ordonnance fédérale sur les certificats de maturité (ORM) (QUE-638)
Question écrite urgente de Mme Sarah Klopmann : Pourquoi les conditions de demande d'organisation d'un événement contredisent-elles la loi ? (QUE-639)
Question écrite urgente de M. Roger Deneys : Office cantonal de la détention (OCD) et caisse(s) de pension : conditions d'affiliation des cadres supérieurs et des directeurs d'établissements pénitentiaires (QUE-640)
Question écrite urgente de M. Roger Deneys : Office cantonal de la détention (OCD) : direction provisoire ou définitive ? (QUE-641)
Question écrite urgente de Mme Salima Moyard : Munitions dans le Léman : « circulez, il n'y a rien à voir ! » Vraiment ? (QUE-642)
Question écrite urgente de M. Marc Falquet : Comment l'office des faillites et la caisse cantonale genevoise de chômage luttent-ils contre les fraudes ? (QUE-643)
Question écrite urgente de M. Roger Deneys : Cyclistes et pont du Mont-Blanc : après la désignation publique de boucs émissaires, bientôt l'organisation de pogroms par le conseiller d'Etat Luc Barthassat ? (QUE-644)
Question écrite urgente de M. Roger Deneys : Office cantonal de la détention : situation des établissements pénitentiaires genevois au 31 décembre 2016 (bis), suite et fin ? (QUE-645)
Question écrite urgente de Mme Nicole Valiquer Grecuccio : Le Conseil d'Etat soutient-il résolument une politique de la petite enfance en sa qualité d'employeur ? (QUE-646)
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Quels sont les effets concrets de la réforme de l'évaluation du primaire de 2007 (maintien des notes), notamment en termes de lutte contre l'échec scolaire ? (QUE-647)
QUE 631 QUE 632 QUE 633 QUE 634 QUE 635 QUE 636 QUE 637 QUE 638 QUE 639 QUE 640 QUE 641 QUE 642 QUE 643 QUE 644 QUE 645 QUE 646 QUE 647
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également trouvé sur vos places la question écrite suivante:
Question écrite de M. Boris Calame : Quel bilan tirer de la collecte des déchets plastiques recyclables à Genève, notamment en matière de qualité du tri et de sensibilisation de la population ? (Q-3795)
Le président. Cette question écrite est renvoyée au Conseil d'Etat.
Premier débat
Le président. Nous allons reprendre nos urgences; nous en avons encore cinq. Nous abordons le PL 11923-A en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Olivier Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, la commission des finances s'est réunie à plusieurs reprises pour traiter ce sujet. Nous sommes effectivement...
Le président. Veuillez m'excuser, Monsieur Cerutti, mais nous avons une lettre à lire, le courrier 3654. Je donne la parole à Mme Moyard pour cette lecture.
Le président. Merci, Madame Moyard. Merci, Monsieur Cerutti, d'avoir patienté; il fallait lire cette lettre au préalable. C'est à nouveau à vous.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président, de me redonner la parole. Il s'agit d'un contrat de prestations entre la Fondation des parkings et l'Etat de Genève. La commission a procédé à l'audition du département et de la Fondation des parkings, qui a présenté les grands axes de ce nouveau contrat de prestations où cinq modifications sont à relever par rapport à l'ancien. J'en citerai deux, qui sont les plus importantes. D'abord, l'ajout d'un article sur l'homogénéité en matière de contrôle entre les intervenants potentiels: chaque zone doit être contrôlée au moins un jour par semaine. Puis la modification de l'article 20 relatif aux objectifs, suite à l'audit du service d'audit interne, qui demandait qu'un objectif quantitatif et mesurable soit mis en place. En ce qui concerne les indemnités, depuis 2014, celles-ci sont réduites progressivement, au titre d'économies à réaliser par le biais d'une amélioration de la productivité. Ainsi, l'indemnité versée à la fondation diminuera de quelque 6% entre 2017 et 2019. Sur les trois années, elle se compose comme suit: en 2017, 9 575 501 F; en 2018, 9 378 068 F; en 2019, 9 378 068 F. Ce résultat sera obtenu grâce à la mise en place d'outils visant à faire augmenter le taux de productivité des agents de la fondation par le biais d'indicateurs mesurables. Il permettra d'assurer le maintien des prestations de la fondation, tout en permettant à l'Etat de réaliser des économies non négligeables.
Comme bien souvent à la commission des finances, des éléments périphériques s'invitent autour de la table. On en a eu un tout à l'heure, celui représenté par la Ville de Genève, manifesté par une lettre. Cela est relativement bien relaté dans le rapport, que je vous invite à relire. Le deuxième, ce sont les Services industriels. A ce titre, le seul bémol qu'on pourrait évoquer est que les Services industriels n'ont pas été auditionnés, pour leur part, quand bien même votre serviteur en avait fait la demande en commission. En ce qui concerne la Ville de Genève, elle a été largement auditionnée; nous avons pu lui poser toutes les questions qui semblaient nécessaires. Avant de m'arrêter pour l'instant, j'aimerais souligner encore que la Ville de Genève a été invitée, sous l'angle institutionnel, financier et judiciaire; je crois donc que les choses sont relativement claires pour l'ensemble des membres de ce parlement.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'admets volontiers que ce rapport de minorité est un peu particulier, en ce sens qu'il ne s'agit pas de dénoncer ou de défaire ce contrat de prestations avec la Fondation des parkings, contrat qui a été réglé. Comme vient de le dire et comme l'a très bien écrit notre rapporteur de majorité, bien des obstacles ont été éclaircis, notamment avec la Ville de Genève. Non, Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit d'intervenir pour se demander, puisque nous avons affaire à des institutions publiques, qui fonctionnent malgré tout, dès le début, avec les deniers de l'Etat, et qui ont besoin de subventions, qui plus est, si elles ont le droit réellement de faire comme elles veulent, quand elles veulent, etc. Or, la Fondation des parkings a commis une faute, grave à nos yeux: cette faute ne consiste pas simplement à avoir décidé au dernier moment de changer d'adjudicataire pour ces fameuses bornes électriques dans les parkings en faveur d'une société basée de l'autre côté de la frontière du canton, mais surtout à avoir choisi une société reposant sur des capitaux qui proviennent de très loin, de Chine, pour ne pas citer le pays. Mesdames et Messieurs les députés, au début, on mène des négociations, comme il est normal. On demande aux SIG de s'investir, de voir ce qu'ils peuvent faire pour agrémenter les parkings de ces fameuses bornes pour véhicules électriques dont personne ne conteste le bien-fondé - ce n'est donc pas le but de ce rapport; le but est de dire que quand on commence, qu'il y a un investissement... Parce que ce qui est passé comme chat sur braise dans cette affaire, c'est qu'au début, quand on a décidé une standardisation des bornes, d'avoir un matériel adaptable aux différentes marques de voitures, eh bien, les SIG ont investi environ un million de francs avec la société MOVE pour justement régler, préparer tout ceci à l'avance. On a entendu M. le conseiller d'Etat, je crois, durant son audition, dire que la Fondation des parkings avait demandé aux SIG de concevoir deux bornes pour les parkings extérieurs, que c'est un marché tout différent pour les parkings intérieurs, les ouvrages en intérieur. Vous me permettrez d'en douter: l'électricité est la même, les voitures sont les mêmes; l'emplacement à couvert ne justifie pas qu'on puisse dire: «Là, on n'a pas le même contrôle.» Bref, Mesdames et Messieurs les députés, le but n'est pas de vous seriner quoi que ce soit, mais de vous dire que nous avons affaire à de l'argent de l'Etat, que c'est le contribuable qui paie, malgré tout, et que, bon an, mal an, la subvention offerte à la Fondation des parkings est non négligeable. En fonction de cela, nous estimons logique que sur les trois ans du contrat de prestations, la Fondation des parkings non pas rembourse, puisqu'elle ne le peut pas, mais que l'Etat ne lui donne pas l'argent que les SIG ont dépensé indûment. Vous le verrez dans nos amendements, nous demandons une diminution sur les trois ans d'environ 300 000 F. Il restera à la fondation tout de même 9 242 000 F et quelques pour gérer ses affaires. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il y a des questions de fond; nous devons quand même essayer... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...dans un moment où les conditions économiques sont difficiles - et je ne parle pas pour le secteur privé - de ne pas nous disperser, nous, en permettant à des fondations dépendant de l'Etat de prendre des décisions comme celle-là pour aller chercher une prétendue meilleure affaire ailleurs alors que toutes les discussions étaient possibles. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a été étudié à la commission des finances. Il concerne une convention entre la Fondation des parkings et le canton pour le contrôle du stationnement sur le territoire de la Ville de Genève. On peut s'interroger quant à la pertinence de renvoyer de tels objets à la commission des finances plutôt qu'à la commission spécialisée, celle des transports. Certes, il y a des enjeux financiers, mais il y a bien entendu aussi, et principalement, la question du contrôle du stationnement sur le territoire de la Ville de Genève. En l'occurrence, ce ne sont pas seulement les questions de sous - qui aujourd'hui fâchent - qui devraient être abordées dans ce Grand Conseil et au sein de la commission, mais aussi, évidemment, la manière dont on contrôle le stationnement. Du coup, on ne va pas en parler ou presque pas, malheureusement, parce qu'en réalité, il y a aussi des évolutions négatives en la matière, je pense qu'il faut le souligner. Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que les questions financières sont importantes: il est écrit à plusieurs endroits dans le rapport que 40% seulement des montants dus pour les places à parcomètre en Ville de Genève sont encaissés, simplement parce qu'il n'y a pas de contrôle, parce que les gens ne paient pas, ou pas toujours. Il y a donc, sur le territoire de la Ville de Genève, seulement 40% de l'ensemble des recettes potentielles qui sont perçus ! Et évidemment, quand toutes les collectivités publiques, le canton bien sûr, mais aussi la Ville de Genève, cherchent de nouvelles recettes - pas forcément fiscales - eh bien, le fait d'aller vers un taux de contrôle du stationnement qui permettrait d'obtenir le 100% des recettes est intéressant pour tout le monde.
Mesdames et Messieurs les députés, nous étions assez surpris de constater qu'il n'était pas fait mention d'un recours de la Ville de Genève; indépendamment du fond, on peut quand même se dire qu'il est curieux que dans le projet de loi du Conseil d'Etat, il n'en soit pas fait mention, alors qu'il était déjà déposé. L'autre chose, c'est que de façon générale, il est normal que la question de la répartition des recettes sur le contrôle du stationnement dans une commune, quelle qu'elle soit, fasse l'objet de négociations entre le canton et la commune en question. La demande de la Ville de Genève est donc tout à fait légitime; c'est une revendication de pouvoir négocier une répartition d'éventuels revenus générés par le contrôle du stationnement. Si ce n'est pas le cas dans le présent projet de loi, nous avons simplement proposé un amendement qui spécifie que la convention avec la Ville de Genève soit renégociée avant l'échéance du présent contrat de prestations; c'est un nouvel article 10A qui vise à ce qu'on puisse envisager une future convention sur de nouvelles bases de répartition des bénéfices.
S'agissant du contrôle du stationnement, j'aimerais quand même prendre l'exemple d'un cas particulier que je trouve extrêmement choquant; on le trouve à la page 6 notamment. C'est le fait que le présent contrat de prestations ne prévoie tout simplement plus de contrôler le stationnement des motos sur les cases vélos. Evidemment, il y aura une majorité dans ce Grand Conseil pour s'en féliciter, et je n'en suis pas surpris, mais réellement, aujourd'hui... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...on voit que la politique du Conseil d'Etat est une fois de plus en faveur de la mobilité motorisée. L'argument consiste à dire: «On est dans une nouvelle phase de cohabitation avec les vélos.» Drôle de façon de cohabiter que de mettre les motos sur les cases vélos ! Et puis, c'est simplement indiqué que les motos ont besoin de davantage de place, on ne va donc pas créer de nouvelles places, mais on les invitera à se démerder et à se garer sur les places vélos, ça ne posera pas de problème. Mesdames et Messieurs les députés, ce sont là des enjeux de mobilité et de transports qui n'ont pas été abordés au sein de la commission des finances...
Le président. C'est terminé, Monsieur, merci !
M. Roger Deneys. ...ce qui est un vrai problème. Merci, Monsieur le président.
M. Bernhard Riedweg (UDC). La Fondation des parkings est impliquée dans certaines contestations et certains litiges entre la Ville de Genève et 17 communes, notamment en ce qui concerne la gestion des horodateurs et les parcomètres, cette tâche ayant été enlevée aux communes. Le service cantonal des contraventions est aussi épinglé concernant une provision de 14 millions dont la Ville de Genève revendique un retour financier.
L'utilité des contrôles de la Fondation des parkings s'avère très nette puisqu'en Ville de Genève - où on compte un taux d'occupation de 98% des places de stationnement - on note un dépassement du temps autorisé de 21% et du stationnement hors case pour 7%. Mais ce qui est sidérant, c'est de constater qu'en Ville de Genève, seuls 40% des usagers paient leur stationnement, ce qui correspond à 10 millions de recettes. Il est assez facile de passer entre les mailles du filet des contrôles du stationnement, puisque l'objectif est de fixer 120 inspections par jour et par agent, ce qui permet de contrôler chaque place seulement cinq fois par mois en moyenne. Il est à relever que la Fondation des parkings rétrocédera à l'Etat 75% des bénéfices qu'elle réalise sur le contrôle des stationnements.
Sachez que dans l'opération Artamis - qui s'appelle parking du Gazomètre - ce parking va coûter entre 400 000 F et 450 000 F par année à la Fondation des parkings, et que, selon son président, ce parking sera le plus cher du monde, avec un coût de 352 000 F la place. 80 millions ont été payés par l'Etat et la Confédération pour la dépollution de ce site. La décision prise dans le cadre d'un appel d'offres pour 90 bornes pour la recharge électrique des voitures dans les parkings de la fondation - pour lequel les SIG n'ont pas obtenu le marché - a fortement dérangé l'Union démocratique du centre. L'installation de ces bornes a été confiée à la société MOVE, dans laquelle les SIG ont investi 1 million. Les SIG, qui ont pris du retard pour la formulation de leur offre, auraient pu éviter cette dépense de 1 million si la décision de la Fondation des parkings avait été plus rationnelle et plus objective, car elle aurait pu s'abstenir de faire un appel d'offres. C'est cela qui amène l'UDC à déposer deux amendements demandant de diminuer la subvention de 1 million sur trois ans pour exprimer sa désapprobation et son mécontentement. D'un côté, la subvention de l'Etat à la Fondation des parkings a été réduite progressivement de 6% depuis 2014, et ceci jusqu'en 2019, à titre d'économies à réaliser par le biais d'une amélioration de la productivité des agents de la fondation, ce qui peut être défini par des indicateurs mesurables, et de l'autre côté on fait subir une dépense inutile de 1 million aux SIG.
L'Union démocratique du centre vous invite à entrer en matière et à accepter les deux amendements que vous soumettra le rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président.
M. Edouard Cuendet (PLR). Je vais essayer d'élever le débat... (Commentaires. Rires.) Pourquoi tout le monde rigole bêtement ? Je vais essayer d'élever le débat et rappeler que la Constituante a réalisé de grandes choses...
Une voix. Oui !
M. Edouard Cuendet. ...notamment l'instauration de la médiation administrative, qui nous occupe depuis des années à la commission législative. En revanche, en ce qui concerne les relations entre la Ville et le canton, je ne peux pas dire que le même succès ait été au rendez-vous, et ce projet de loi en est un exemple criant.
Une voix. Oui !
M. Edouard Cuendet. A la commission des finances, nous avons auditionné la Ville de Genève, et c'était absolument surréaliste: la Ville de Genève a accusé le canton de tous les maux, allant jusqu'à insinuer - je ne veux pas formuler des accusations relevant du pénal, sinon ça va se retourner contre moi - que dans le calcul de la rétrocession, le canton se comportait de manière moyennement honnête, alors qu'il était prouvé - et je remercie M. Barthassat qui a rétabli la vérité sur la méthode de calcul... On a tout entendu; la Ville de Genève ne se préoccupait pas du tout des parkings, puisque à cette occasion, elle a au fond pris le risque qu'on coupe les vivres à la Fondation des parkings qui ne pourrait plus effectuer son travail, tout ça pour des histoires de gros sous qui sous-tendent ce dossier. C'est donc absolument irresponsable, et de multiples procédures judiciaires ont été lancées dans cette affaire, avec avocats interposés, tout cela aux frais du contribuable, tant du côté de la Ville que du côté de l'Etat; c'est absolument lamentable. La Ville s'est donc lancée dans des arguties juridiques; je suis désolé, mais elle poursuit sa guérilla urbaine - c'est le cas de le dire - à travers le courrier qu'elle nous a adressé ici, en disant que la jurisprudence rendue n'a rien à voir avec le cas d'espèce. Je suis un modeste juriste, avocat défroqué, mais je vous lirai quand même un extrait de l'arrêt en question, qui dit très clairement que «le montant recouvré des amendes d'ordre infligées [...] n'ouvre aucune voie de droit aux communes à l'encontre de l'Etat en exécution de ce transfert puisque la tâche exercée par celles-ci est une tâche cantonale déléguée, qu'elles ont l'obligation d'exécuter, d'une part et, d'autre part, que les questions relatives à la répartition des charges financières n'entrent pas dans le champ de l'autonomie communale». Cet arrêt est absolument clair, limpide, et je trouve que la Ville de Genève joue un rôle absolument scandaleux dans cette affaire, au risque de paralyser, comme je l'ai dit, le fonctionnement de la fondation. M. Deneys, lui, se préoccupe plus du contrôle des motos sur les parkings à vélo: il ferait mieux de se préoccuper du fonctionnement même de la fondation... (Remarque.)
Le président. Madame Magnin, s'il vous plaît !
M. Edouard Cuendet. ...qui risque d'être paralysé. Je vous invite donc, chers collègues, à suivre l'excellent rapport de majorité de M. Cerutti.
M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien votera ce contrat de prestations qui prévoit une indemnité de plus de 28 millions à la Fondation des parkings sur trois ans, soit de 2017 à 2019, pour la prestation du contrôle du stationnement en Ville de Genève. En effet, la Fondation des parkings assume depuis 2010 pour le compte de l'Etat le contrôle du stationnement en Ville de Genève, suite à un transfert de compétences intervenu en 2009. Certaines améliorations décrites par le rapporteur de majorité ont été apportées à ce contrat de prestations pour en améliorer l'efficacité en utilisant en particulier de nouvelles technologies ou en clarifiant certaines situations. Il faut aussi rappeler que l'objectif d'un tel contrôle n'est pas de s'enrichir sur le dos des automobilistes, mais bien de faire respecter la loi et surtout, surtout... (Remarque.)
Le président. Monsieur Zaugg, s'il vous plaît !
M. François Lance. ...d'assurer une certaine rotation dans l'utilisation des places. Malgré les interrogations soulevées à la commission des finances concernant des litiges avec la Ville de Genève en regard des flux comptables entre les trois entités, et, enfin, cet appel d'offres de la Fondation des parkings pour l'installation de 90 bornes électriques au profit d'un autre partenaire que les SIG, le groupe démocrate-chrétien estime que la priorité est de voter ce contrat de prestations et de régler en commission, parallèlement, les problèmes soulevés.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, à chaque fois qu'une indemnité à la Fondation des parkings est discutée, il y a toujours un débat, toujours une bonne raison de contester cette indemnité, parce qu'évidemment, la Fondation des parkings exerce une tâche qui ne plaît pas à tout le monde: celle du contrôle du stationnement. Personne n'aime se voir infliger une amende parce qu'il a dépassé son temps de stationnement ou parce qu'il s'est garé sur une ligne jaune. Il y a donc toujours une petite tension dans la salle au moment où l'on parle de la Fondation des parkings. Je rappellerai d'abord qu'il ne s'agit pas d'une subvention à fonds perdu, mais bien d'une indemnité, qui rapporte à l'Etat le double en montant des amendes. Diminuer cette indemnité, c'est donc en quelque sorte se tirer une balle dans le pied, puisque ça signifie qu'on recevra moins ensuite en produit des amendes.
Ensuite, par rapport aux polémiques évoquées, les Verts ont un petit défaut, un péché mignon, un côté conservateur que peut-être vous ne leur connaissez pas: ils aiment bien que les lois soient respectées et appliquées. Par exemple, nous aimons bien que les lois concernant le contrôle du stationnement soient respectées et appliquées, que les gens qui sont mal garés reçoivent une amende, que les gens qui restent trop longtemps dans une place à temps limité reçoivent une amende. Nous considérons qu'il est normal que les lois soient appliquées. De même, il existe des AIMP: nous souhaitons que l'attribution des marchés se fasse de manière indépendante. Ensuite, quand un résultat ne nous satisfait pas, on vient le contester. Nous, les Verts, nous aimons bien que les lois soient respectées, que les AIMP soient respectés; ma foi, si les SIG n'ont pas obtenu un marché, bien sûr qu'on peut le regretter pour eux, mais on peut aussi se réjouir que l'attribution du marché se soit faite dans le respect de l'indépendance la plus totale.
Pour ces raisons, nous vous encourageons à voter sans hésitation le contrat de prestations qui nous est soumis. Quant à l'affaire qui oppose la Ville de Genève à l'Etat, elle est actuellement devant les tribunaux; il n'appartient pas au parlement d'arbitrer cette affaire, je pense que la justice le fera. Nous serions favorables à ce que l'Etat négocie une solution avec la Ville, car il est dommage de se retrouver avec un conflit en la matière. Nous soutiendrons donc l'amendement proposé par M. Deneys. Mais quoi qu'il en soit, nous voterons ce contrat de prestations et vous invitons à en faire autant.
Mme Françoise Sapin (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit donc du contrat de prestations 2017-2019 conclu entre l'Etat et la Fondation des parkings. La politique des parkings dans le canton de Genève, d'une manière générale, ne satisfait pas le MCG. Il existe notamment des contestations sur la gestion des horodateurs et la convention qui lie l'Etat et la Ville de Genève. C'est d'ailleurs la raison de l'amendement déposé par MM. Deneys, Sormanni, Velasco et Baertschi, qui concerne essentiellement de la Ville. Cependant, nous parlons ici du contrat de prestations qui lie l'Etat à la Fondation des parkings, celle-ci agissant en tant que prestataire de services. A notre avis, il ne faut pas tout mélanger, il faut donner des moyens à cette fondation; c'est la raison pour laquelle le MCG acceptera ce projet de loi.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je tenais à préciser que dans le droit fil des dispositions visées par l'article 24 de la LRGC, je ne participerai pas à ce vote. Je vous remercie.
Une voix. Ça, c'est noble !
M. François Baertschi (MCG). J'aimerais insister sur un élément très important pour le MCG et qui concerne la Fondation des parkings: c'est le nombre de travailleurs frontaliers, permis G... (Vives exclamations.) C'est important. Il faut souligner le travail fait par cette fondation sous l'impulsion, j'imagine, de MM. Barthassat et Poggia - enfin, je n'en sais rien, mais j'imagine, je fais quelques déductions. On est passé d'environ 25% à 15%, plus ou moins, on a réduit de moitié le pourcentage de travailleurs pourvus d'un permis G. Cela signifie quoi ? Que beaucoup de résidents genevois qui pourraient se retrouver au chômage ou en difficulté économique à cause de postes très précaires ont un véritable travail, payé convenablement. Je m'en réjouis pour eux, je m'en réjouis pour Genève. En général, j'ai tendance à formuler des critiques; dans ce cas précis, je formule un compliment. Je crois qu'il faut le dire, car quand les choses sont bien faites, il faut aussi avoir le courage de l'indiquer. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Sormanni pour une minute trente-neuf.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président, ce sera plus court. Je voudrais rappeler un point cité dans le rapport, qui a trait à cette fameuse convention entre l'Etat et la Ville. L'article 4 spécifie: «La présente convention entre en vigueur le 1er juillet 2003 pour une durée indéterminée», ce qui ne veut pas dire ad vitam aeternam. «En cas de volonté de dénonciation de la convention par une des parties» - il suffit donc qu'une des parties veuille la dénoncer - «la décision doit être portée à la connaissance de l'autre partie selon les procédures usuelles avant la fin d'une année civile». La Ville de Genève a donc parfaitement le droit de vouloir dénoncer cette convention. Evidemment, ce n'est pas directement lié au contrat de prestations, mais je pense que c'est quand même bien de le dire. J'ai lu attentivement ce rapport qui dit que cette délégation a été conclue ad vitam aeternam, ce que je conteste également en ce qui me concerne. La Ville de Genève a dénoncé cette convention pour le 31 décembre 2016, par conséquent, nous soutenons l'amendement invitant le Conseil d'Etat à négocier avec la Ville de Genève une nouvelle convention.
Une voix. Bravo !
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de majorité. Par rapport à la demande d'amendement consistant en la création d'un article 10A, je comprends parfaitement qu'aujourd'hui la Ville de Genève ne soit pas d'accord. Nous sommes en procédure juridique. Mais je rappelle quand même que nos institutions fonctionnent: la Ville de Genève nous écrit, on lit sa lettre, on la reçoit en audition à la commission des finances. A ce stade, il me semble que le Conseil d'Etat a reçu le message, celui qui lui demande de discuter avec la Ville de Genève. Alors pourquoi faut-il, Mesdames et Messieurs, insérer un article spécifique pour une invite au Conseil d'Etat ? Je crois, Mesdames et Messieurs, qu'il faut un peu de rigueur, de courage et de confiance. A ce stade, je vous demanderai donc de ne pas voter cet article 10A qui n'apporte rien à ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Sormanni pour vingt-neuf secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez au rapporteur, M. Cerutti, dont le rapport est excellent au demeurant, que la problématique est bel et bien - c'est écrit dans ce rapport, il s'agit de propos de M. Maudet - que la convention a été signée ad vitam aeternam et qu'il n'y a pas lieu de la remettre en cause. C'est donc bel et bien pour cette raison que cet amendement a été déposé; visiblement, il y a un problème entre l'Etat et la Ville de Genève, l'Etat estimant que cette convention ne peut pas être dénoncée, ce qui est contraire à ce que je vous ai lu tout à l'heure. C'est pour cette raison que je vous invite à voter cet amendement.
M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, comme on l'a dit, le présent projet de loi permet la poursuite de l'activité de contrôle du stationnement en Ville de Genève par la Fondation des parkings à travers un contrat de prestations pour les années 2017 à 2019. Ce contrat de prestations prend le relais du contrat conclu entre les mêmes parties pour la période 2014-2016. Si ce projet de loi est accepté, Mesdames et Messieurs les députés, il nous permettra tout simplement de disposer d'un outil de mise en oeuvre du plan directeur du stationnement et de son plan d'action, votés par le Grand Conseil, je vous le rappelle, respectivement le 22 mars 2012 et le 28 janvier 2016. Il nous permettra de faire respecter les règles en matière de stationnement dans un territoire soumis à de fortes pressions, mais aussi d'assurer un meilleur paiement des places munies d'horodateurs: comme certains l'ont souligné, aujourd'hui, près de 60% des usagers ne paient pas. Comme certains l'ont aussi dit, il y a là des sources de revenus normaux, je dirais, qui sont encore à activer. Il s'agit enfin d'assortir l'activité de la fondation d'objectifs quantitatifs, mesurables, permettant en outre de la mettre au défi de recourir à des évolutions technologiques et à une meilleure organisation pour qu'elle améliore sa productivité.
En commission, on a beaucoup parlé de ces fameuses bornes électriques: il faut rappeler qu'au cours de ces débats, les commissaires ont évoqué le choix opéré par la fondation dans l'appel d'offres lancé pour l'équipement des futures bornes électriques dans ces parkings en ouvrage, choix qui l'a conduite à choisir un autre partenaire que les SIG, comme il a été rappelé. Ce sujet, qui n'a pourtant aucun lien avec le projet de loi, a quand même, il faut le souligner, terni l'image de la fondation. Cependant, les explications données lors des auditions, qui sont les mêmes que celles que je vous donne aujourd'hui, ont permis de montrer que l'appel d'offres avait eu l'avantage de réduire les coûts de ces équipements, équipements assemblés en Suisse de surcroît, je tiens à le rappeler; que l'électricité consommée par ces bornes serait un courant vert produit par les SIG, et qu'enfin, Mesdames et Messieurs, le système choisi par la fondation resterait bien entendu compatible avec celui des SIG. Ainsi, le partenariat entre les établissements publics autonomes peut reprendre et être relancé. La plupart des personnes de ce Grand Conseil nous demandent de faire des économies: s'il vous plaît, quand on essaie d'en faire et qu'on y arrive, ne venez pas nous le reprocher, ce serait bien gentil.
Concernant le commentaire de M. Baertschi: oui, Monsieur, vous faites bien de souligner cela. Cela a un peu défrayé la chronique concernant nos chômeurs. Nous avons eu dernièrement quelques remarques concernant les TPG, entre autres de M. Vielliard, qui représente, je dirais, le côté français aux TPG, qui nous reprochent de ne pas respecter certains accords. Sachez que tout est fait en bonne et due forme, en collaboration étroite avec les services de M. Poggia, mon collègue assis à ma gauche - même s'il n'est ni à droite ni à gauche. (L'orateur rit. Rires.) A travers les TPG et la Fondation des parkings, nous privilégions le fait d'aller chercher au service du chômage les personnes qui pourraient nous manquer. J'ai encore eu certains commentaires, entre autres des TPG et de la Fondation des parkings, qui trouvent au sein de l'office cantonal de l'emploi autant de compétences qui pourraient leur venir de l'extérieur. M. Poggia participe entre autres à la formation des chauffeurs TPG, ce qui permet de supprimer des chômeurs et en plus de pouvoir économiser de l'argent en les formant sur place. Ce n'est pas tout à fait le sujet, mais je crois que cela valait la peine de montrer les efforts que fait la Fondation des parkings à ce niveau-là.
Quant à nos contacts un peu houleux, parfois, avec la Ville de Genève, M. Cuendet l'a rappelé, un certain travail n'a pas été effectué au sein de la Constituante, qui a mené du bon travail sur d'autres thèmes. Il faudra peut-être une fois se pencher sur le problème, qui, il faut le dire, occasionne passablement de doublons entre ce qui se fait à la Ville de Genève et à l'Etat et nous coûte non pas des centaines de milliers de francs, mais des centaines de millions. M. Cuendet a relevé le fait que j'avais rétabli la vérité, ce qui nous permettra peut-être de sous-entendre que la Ville de Genève ne la dit pas toujours, et je terminerai là-dessus, en vous demandant, Mesdames et Messieurs, de soutenir ce projet de loi. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11923 est adopté en premier débat par 92 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement sur le titre. Il se trouve dans le rapport de minorité à la page 129 et consiste à remplacer l'indemnité mentionnée dans le titre originel du projet de loi - soit 28 331 637 F - par l'indemnité de 27 331 637 F.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 78 non contre 9 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1.
Le président. Monsieur Lussi, comme votre amendement sur le titre n'a pas été accepté, est-ce que vous voulez bien retirer votre amendement sur l'article 2, qui correspond à la même chose que votre amendement sur le titre ?
M. Patrick Lussi. Oui, Monsieur le président, c'est logique.
Le président. Très bien, je vous remercie. Il n'y a donc plus d'amendement à l'article 2.
Mis aux voix, l'art. 2 est adopté, de même que les art. 3 à 10.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de MM. Deneys, Velasco, Sormanni et Baertschi visant à créer un article 10A. Monsieur Deneys, je vous laisse une minute.
M. Roger Deneys (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Je vous lis cette proposition de nouvel article 10A:
«Art. 10A Convention avec la Ville de Genève (nouveau)
Selon le principe de l'égalité de traitement, et pour autant que la Ville de Genève ait contesté la convention de 2009, le Conseil d'Etat veille à ce qu'une nouvelle convention soit négociée avant l'échéance du présent contrat de prestations.»
Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit de permettre à la Ville de Genève de mener une négociation conforme aux intérêts des deux parties; je crois que tout le monde a à gagner à ce que le contrôle du stationnement se fasse en parfaite harmonie et à ce que chacun puisse tirer les éventuels bénéfices d'un tel contrôle en fonction des intérêts des uns et des autres. C'est simplement raisonnable, et on a beaucoup de peine à imaginer au sein de ce Grand Conseil qu'on puisse assister à une guéguerre entre deux collectivités publiques. C'est donc normal de mentionner ici qu'une nouvelle convention doit voir le jour qui ménage les intérêts de chacun.
M. Edouard Cuendet (PLR). Comme je l'ai dit, je ne suis qu'un modeste juriste, mais dans le cours d'introduction au droit, me semble-t-il, on m'a appris qu'une loi est un texte général et abstrait. Pour la Ville, on fait un texte spécifique et concret. Ça m'a l'air totalement contraire aux principes de la légistique. Au fond, on pourrait faire la liste des 44 autres communes ! On parle d'égalité de traitement, or c'est une violation crasse de l'égalité de traitement; en plus, c'est contraire au droit supérieur... (Remarque.) ...c'est-à-dire au droit cantonal applicable en l'espèce, qui prévoit... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...que c'est une compétence du canton et non des communes. Cet amendement n'a donc aucun sens et viole de manière crasse l'égalité de traitement qui règne entre les 45 communes du canton. On voit une fois de plus que la Ville de Genève s'arroge une espèce de droit supérieur... (Remarque.) ...et serait au-dessus de toutes les autres communes. (Remarque.) Je vous invite donc à refuser sèchement cet amendement.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Sormanni, le temps de parole de votre parti est épuisé. Je passe la parole à M. Velasco.
M. Alberto Velasco (S). Monsieur le président, je vous remercie beaucoup. C'est un texte qui concerne la Ville de Genève et c'est pour cette raison que, d'un point de vue légistique, cet article se réfère à elle. Deuxièmement, sur l'égalité de traitement: toutes les autres communes, Mesdames et Messieurs, ont un accord entre elles et l'Etat pour ce genre d'activité. La seule qui ne l'a pas est la Ville de Genève, et pour cause: c'est l'ancien magistrat, M. Maudet, qui avait négocié cet accord et qui...
Le président. Je suis désolé, Monsieur, c'est terminé.
M. Alberto Velasco. Pardon ?
Le président. Vous n'avez plus de temps de parole. Madame Flamand-Lew, c'est à vous.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Pour enchaîner avec M. Velasco, puisqu'il me reste quelques secondes, je pense qu'on ne peut pas qualifier une loi accordant une indemnité de 28 331 637 F à une entité pour les années 2017 à 2019 de générale et abstraite ! Il me semble donc que l'amendement socialiste, même s'il est déclaratoire, montre la volonté de ce Grand Conseil qu'une solution soit trouvée à l'amiable entre deux collectivités publiques plutôt que devant les tribunaux, ce qui est toujours souhaitable selon nous. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Lussi, vous voulez prendre la parole ?
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Oui, merci, Monsieur le président. C'est au sujet de l'amendement.
Le président. Il vous reste une minute quatorze.
M. Patrick Lussi. J'aimerais simplement dire que cet amendement nous paraît redondant. Si on regarde le projet de loi, il est clairement dit à l'article 1 qu'un contrat de prestations est négocié à chaque fois. Cet accord fait partie de ce contrat de prestations. Ainsi, de toute façon, il y aura une nouvelle négociation dans trois ans. Cela nous paraît donc superfétatoire, et en ce qui concerne la minorité, nous ne voterons pas cet amendement.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons voter sur l'amendement présenté par M. Deneys et consorts, dont je vous rappelle la teneur:
«Art. 10A Convention avec la Ville de Genève (nouveau)
Selon le principe de l'égalité de traitement, et pour autant que la Ville de Genève ait contesté la convention de 2009, le Conseil d'Etat veille à ce qu'une nouvelle convention soit négociée avant l'échéance du présent contrat de prestations.»
Mis aux voix, cet amendement (nouvel art. 10A) est adopté par 46 oui contre 45 non. (Exclamations à l'annonce du résultat.)
Mis aux voix, l'art. 11 est adopté.
Troisième débat
La loi 11923 est adoptée article par article en troisième débat.
Le président. Monsieur Lussi, il vous reste quarante-neuf secondes.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. C'était simplement pour dire, Monsieur le président, qu'il faut parfois des symboles forts: notre minorité ne votera pas ce texte.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite l'assemblée à se prononcer sur l'objet dans son ensemble.
Mise aux voix, la loi 11923 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 82 oui contre 10 non.
Premier débat
Le président. Nous continuons nos urgences. Nous arrivons au PL 12074-A, que nous traiterons en catégorie II, cinquante minutes. Le rapporteur de majorité est remplacé par Mme Nathalie Fontanet, à qui je passe la parole.
Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, chers collègues, je reprends l'excellent rapport de majorité rédigé par le député Cyril Aellen, excusé pour cette session. Ce projet de loi déposé par le député Christophe Aumeunier vise à proroger l'article 4A de la loi générale sur les zones de développement. Cet article définit les catégories de logements, dont les logements d'utilité publique, respectivement leur répartition et les proportions à respecter dans la construction en zone de développement. Il avait été adopté le 24 mai 2007 dans le cadre d'un processus de concertation large et de la conclusion de l'accord sur le logement. L'alinéa 4 de cette disposition fixait une validité de dix ans à cet article; à partir du 31 juillet 2017, il ne sera donc plus applicable. Le but de ce projet de loi est de pallier le vide juridique que créerait l'absence de disposition dans le domaine. En effet, si l'initiative 161 «Construisons des logements pour toutes et tous: davantage de coopératives et de logements bon marché !», qui vise à modifier l'article 4A LGZD, est actuellement devant la commission du logement, elle fait toutefois l'objet d'un recours et ne sera pas traitée immédiatement. Le PL 12093 déposé par le Conseil d'Etat, qui traite lui aussi de cette question, ne pourra pas non plus être adopté d'ici le 31 juillet 2017. Il y a ainsi, dans cette attente, un intérêt à ne rien changer au fond et à maintenir l'article 4A LGZD en vigueur jusqu'au débat sur l'initiative, respectivement un éventuel contreprojet qui pourrait être formé ou non sur la base du PL 12093. La majorité de la commission est consciente du fait que l'absence de norme légale n'empêcherait pas la construction de logements et que l'Etat pourrait délivrer des autorisations sur la base de l'article 5 LGZD, se référant à la notion de besoin prépondérant de la population. Il s'agirait néanmoins d'une régression, les proportions étant clairement définies dans l'article 4A. La mise en place d'une pratique administrative ne convainc pas non plus la majorité, qui estime qu'une base légale, même d'une durée transitoire, est indispensable. Il est en effet essentiel pour les acteurs de la construction, notamment au regard de l'équilibre des plans financiers, de connaître de façon certaine les proportions de catégories de logements, sans la moindre place au pouvoir d'appréciation ou à l'interprétation de l'autorité. Seul un article de loi en vigueur permet de donner cette assurance et ainsi de ne pas risquer de ralentir la construction pendant une période.
En quelques mots, vous me permettrez, Monsieur le président, chers collègues, de revenir sur le refus de la minorité de proroger cet article. Il est clair et avoué; dans son rapport de minorité, celle-ci plaide en effet pour une modification immédiate de la pratique administrative concernant les proportions de logements à construire. Pour la majorité, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une tentative de violation des droits démocratiques, et nous ne pouvons y souscrire. Si l'initiative a effectivement réuni les signatures nécessaires, elle n'a pour l'heure pas été adoptée par le Grand Conseil et fait l'objet d'un recours, notamment sur la compatibilité au droit supérieur. Quant au PL 12093, déposé par le Conseil d'Etat, il n'a pas non plus été encore adopté. Monsieur le président, chers collègues, vous l'aurez compris, je vous encourage à accepter le rapport de majorité invitant à proroger l'article 4A LGZD pour une durée de deux ans, afin de ne pas laisser une place à l'incertitude et de permettre aux acteurs de la construction de continuer à construire des logements pour notre population. Merci, Monsieur le président.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le débat que nous avons aujourd'hui est issu d'un rendez-vous pris en 2007 suite à l'adoption de l'article 4A LGZD et de la loi sur les logements d'utilité publique, dans le cadre de la nouvelle politique du logement menée sous les auspices de Mark Muller. Il faut mettre à l'actif de cette politique un certain nombre de points très positifs, comme la création d'un fonds LUP de 35 millions de francs par année, limité dans le temps, au départ, puis pérennisé suite à un accord politique entre l'ASLOCA et M. Muller, grâce au dépôt et à l'aboutissement de l'initiative 133 qui prévoyait que 30% du produit de la Banque nationale suisse et 50% des dividendes de celle-ci soient attribués au logement. Cet accord a permis la constitution de ces 35 millions par année sur la durée. L'autre aspect positif est l'objectif de 20% de LUP, aussi prévu dans la loi sur les logements d'utilité publique, de manière à permettre une pérennisation des logements, parce que cette loi partait d'un constat: passablement de logements constitués en HLM sortaient du contrôle de l'Etat; on avait donc une diminution du nombre de logements d'utilité publique. Quelques chiffres avaient été donnés; malheureusement, la situation est toujours aussi problématique aujourd'hui. Les statistiques montrent qu'entre 2007 et 2015, il y a à peu près 2300 logements d'utilité publique en moins malgré la politique menée. C'est là qu'on arrive au bilan plus négatif de cette politique: on est encore très loin des 20% prévus en 2007; il nous faudrait pas loin d'un siècle pour atteindre ces objectifs, tandis que la population continue à souffrir de la crise du logement et aussi du fait que le marché immobilier construit d'abord des logements qui répondent aux besoins des personnes disposant des revenus les plus élevés, parce que c'est là qu'on obtient les rendements les plus importants.
La fin de cet article 4A LGZD permet de modifier, de corriger cette politique sur l'aspect problématique qu'est la question des ratios: l'article 5 de la loi, qui prévoit que les logements doivent répondre au besoin prépondérant et à l'intérêt général, permet au Conseil d'Etat de mener une politique. Ce dernier l'a fait durant plusieurs décennies, avant l'adoption de l'article 4A. L'article 5 permettrait aujourd'hui encore de répondre à l'impérieuse nécessité de construire des logements qui soient adaptés aux besoins de la population, ce qui représenterait 80% de logements locatifs, comme cela a pu être le cas par le passé. Naturellement, le problème est que si cette politique était menée aujourd'hui, elle ne plairait pas à tout le monde, et notamment aux milieux immobiliers, qui d'une part ont attaqué l'initiative 161 - le recourant est l'auteur du projet de loi dont nous traitons ce soir. Du coup, cela va repousser aux calendes grecques la mise en oeuvre d'une véritable politique du logement, laisser passer aussi un certain nombre de déclassements, ce qui est problématique. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste appelle à ne pas accepter ce projet de loi et à permettre ainsi au Conseil d'Etat de pouvoir mener au plus vite une politique qui serait enfin adaptée à la situation des gens - il faut tout de même rappeler que si la propriété par étage a certaines vertus, elle a en tout cas un inconvénient majeur: elle coûte très cher. Si vous regardez les données de l'office cantonal de la statistique, il s'agit de 7800 F par mètre carré, ce qui fait pas loin de 800 000 F pour un appartement conventionnel. Ce n'est pas à la portée de tout le monde; cela correspond aux besoins de 15% à 20% de la population. Je ne parle même pas des villas: le prix médian est de 1,5 million de francs, alors que la population a d'abord besoin de logements locatifs. C'est pourquoi il faut permettre au Conseil d'Etat de mener au plus vite cette politique, politique que le Conseil d'Etat veut moins ambitieuse que l'initiative 161 qui fera l'objet d'un débat populaire une fois qu'elle sera sortie des tracas juridiques et des chausse-trapes qu'on met sur sa route. Je vous remercie.
M. Pierre Vanek (EAG). Monsieur le président, je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos de Christian Dandrès. Mme la cheffe de groupe du PLR, qui remplace Christophe Aumeunier à la table des rapporteurs, a dit que ce projet de loi s'inscrivait - les mots m'ont frappé - dans l'intérêt qu'il y aurait à ne rien changer au fond, ne fût-ce que pour un certain temps. Pour nous, il y a évidemment nécessité de changer les choses au fond. Mesdames et Messieurs, ce projet de loi du secrétaire général de la Chambre immobilière - c'est bien ça - c'est le service après-vente des recours dilatoires qui ont été mis en travers du chemin des initiatives déposées par la gauche, mais aussi les Verts, mais aussi l'ASLOCA, mais aussi toute une série de forces syndicales, qui répondent à la nécessité non pas de ne rien changer au fond, mais de changer en effet, et de changer en menant une politique qui aboutisse à fournir des logements répondant aux besoins de la population. M. Dandrès a évoqué le taux de progression de cette réponse avec le dispositif actuel comme devant aboutir dans cinquante ou cent ans, je ne sais pas...
Une voix. En 2080 !
M. Pierre Vanek. En 2080 ! Alors j'exagère, comme toujours. En 2080, la population serait en droit d'attendre que ses besoins en matière de logement soient reconnus et qu'on y réponde du point de vue de... (Remarque de M. Roger Deneys.) M. Deneys me dit qu'à ce moment-là il faut prévoir des places dans les cimetières. Non, Mesdames et Messieurs, sérieusement, le signal qu'on donnera probablement, que la droite, la majorité de ce parlement donnera en acceptant ce projet de loi, est un signal de refus de faire évoluer de manière radicale une politique du logement tout à fait insatisfaisante; refus par des mesures dilatoires, parce qu'en dernière instance, bien sûr qu'il y a un droit démocratique de plaider pour le refus des initiatives de l'ASLOCA et du rassemblement des associations de locataires, du Groupement des coopératives d'habitation genevoises, de la gauche, des syndicats, mais enfin, par un débat qui devrait se passer dans ce parlement et dans les urnes plutôt que devant les tribunaux. Or, les textes que nous avons déposés et qui ont recueilli... Bien sûr qu'ils n'ont pas été votés, Madame Fontanet, c'est tout à fait juste, mais quand même, plus de dix mille citoyens pour chacune des initiatives ont signé ces textes qui corrigent une situation tout à fait insatisfaisante. Ces textes prévoient non pas des solutions radicales ou extrémistes, mais proposent de calquer la proportion de logements construits sur les besoins réels de la population alors qu'aujourd'hui, on construit 50% de PPE: ça ne va pas du tout, il n'y a pas une proportion de 50% d'habitants de ce canton qui sont en mesure de s'offrir les logements qui sont effectivement produits. L'initiative propose des taux qui correspondent aux besoins et aux moyens réels de la population. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, nous nous refusons à participer au service après-vente de cette obstruction mise d'abord au débat politique et à la démocratie, puisque l'on confisque le sujet pour un certain nombre d'années pour permettre à un certain nombre de promoteurs et de spéculateurs de continuer à faire leur business juteux et à engranger des millions en ne répondant pas aux besoins de la population.
Mme Bénédicte Montant (PLR). Cette révision de l'article 4A LGZD est une équation qui comporte quelques certitudes, des invariables, mais aussi un grand nombre d'inconnues. Dans le langage mathématique, c'est une équation polynomiale. Je pensais qu'après l'école, je n'aurais plus à en résoudre, j'imagine que vous aussi.
Je voulais vous parler des inconnues. Elles appartiennent à différents registres. Elles sont, d'une part, législatives: les initiatives 160 et 161, qui ont fait l'objet de recours et seront très probablement étudiées par la commission du logement après décision des tribunaux. La deuxième inconnue législative est le projet de loi déposé par le Conseil d'Etat, en discussion devant cette même commission, mais dont le traitement ne fait que commencer. D'autre part, les inconnues sont aussi statistiques: même si cela déplaît à certains, il n'existe pas aujourd'hui de base de données fiable ni mise à jour régulièrement qui donnerait les chiffres exacts, détaillés et consolidés des besoins de la population en matière de logement.
Face à ces inconnues existent des certitudes invariables: la première est la péremption de cet article de loi en juillet 2017. C'est demain; comme après l'expiration de Migros-Data, il n'y aura plus rien dans le rayon. La deuxième est le besoin de construction de logements, et la troisième est le besoin de construction de logements pour tous. Vous l'aurez compris, les délais imposés par la fin de vie annoncée de l'article 4A sont trop courts, ils ne donnent pas l'espace temps permettant de rechercher sérieusement les inconnues de cette équation, c'est-à-dire pas assez de temps pour attendre les conclusions des tribunaux saisis pour les initiatives, pas assez de temps pour compléter l'inventaire exact de la demande, inventaire qui d'ailleurs a régulièrement été demandé au service concerné de l'Etat par le biais d'un certain nombre d'objets parlementaires et qui est aujourd'hui attendu à la commission du logement. Pas assez de temps, enfin, pour rendre une réponse adéquate aux besoins, réponse qui doit être articulée sur la base de cette demande réelle et précise. C'est pourquoi il faut prolonger le délai inscrit dans cet article 4A. Il est issu d'un accord, et vous le savez. Cela limitera l'insécurité pour les acteurs de la construction - et par acteurs, on entend les acteurs publics, institutionnels ou privés, tous. Cela permettra de continuer l'effort de construction des environ deux mille logements annuels atteints ces dernières années, car l'article 4A porte ses fruits aujourd'hui. Cela évitera au département de devoir arbitrer au sein d'un vide juridique et d'être par là même soumis à des tensions; car dans ce cas, le département devrait naturellement justifier et défendre, face aux différents groupes politiques que nous représentons, les nouvelles pratiques qui n'auraient évidemment pas fait l'objet d'une concertation. J'imagine que vous imaginez le résultat que cela donnerait.
Enfin, est-il nécessaire de vous rappeler que la très grande majorité des logements construits dans le canton est située en zone de développement ? L'enjeu majeur de notre développement est donc la répartition de ces types de logements dans cette zone. Prolonger l'article en vigueur aujourd'hui, sans réinventer la roue, le prolonger de manière temporaire pour une durée maximale de deux ans - et non jusqu'en 2080 comme l'a exprimé le député Vanek - c'est ce que demande ce projet de loi. C'est évidemment la meilleure solution qui s'offre à nous pour trouver une réponse adéquate à la révision de cet article. C'est pourquoi le PLR vous demande, chers collègues, de voter le PL 12074 tel qu'il vous est soumis.
M. Christo Ivanov (UDC). Ce projet de loi propose de proroger de deux ans, soit jusqu'en juillet 2019, l'article 4A LGZD afin d'éviter une incertitude juridique et donc d'apporter la sécurité à tous les acteurs du marché du logement, que ce soient les fondations, l'Etat ou des privés. Le magistrat Antonio Hodgers nous a indiqué, à la commission du logement, que ce projet de loi ne lui posait pas de problème. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous recommande d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti démocrate-chrétien, les aspects techniques ont été magnifiquement décrits par Mmes Fontanet et Montant; nous adhérons totalement à leurs propos. Vous savez, Monsieur le président, dans ce domaine, il faut de la souplesse, encore de la souplesse, toujours de la souplesse et rien que de la souplesse. La prolongation de l'article 4A de la LGZD donne enfin un peu de cette souplesse à cette loi. Nous avons besoin de cette souplesse, Monsieur le président, en sus du rapport demandé pour le 31 juillet 2019, bien sûr; nous en avons besoin pour relancer la construction de logements à Genève: il est de plus en plus inacceptable que des jeunes doivent s'expatrier en France voisine, que de jeunes familles doivent partir dans le canton de Vaud pour simplement pouvoir se loger. C'est absolument insupportable, c'est inacceptable. Le parti démocrate-chrétien s'engage depuis très longtemps, mais là plus que jamais, pour défendre, dans le cadre de ce projet de loi, avec les cautèles garanties contrôlant les risques, la construction de logements. Monsieur le président, c'est oui, bien évidemment, et encore oui, à cette souplesse en matière de logement. Nous vous remercions de voter ce projet de loi.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, il n'est peut-être pas inutile de rappeler l'article 38 de la constitution cantonale, qui consacre le droit au logement en ces termes: «Le droit au logement est garanti.» Il n'est pas non plus inutile de rappeler la loi sur les logements d'utilité publique, qui prévoit un objectif de 20% de telles habitations sur l'ensemble de notre parc de logements. Il n'est enfin pas inutile de rappeler l'article 5 LGZD, qui prévoit le principe général que la construction de logements doit répondre au besoin prépondérant de la population. Or, cet article 4A LGZD dont nous parlons aujourd'hui est un dispositif introduit en 2007, qui a pour but de réaliser tous ces objectifs formulés dans les lois que je viens de citer. Ce dispositif doit permettre de concrétiser cet impératif de construire du logement répondant aux besoins de l'ensemble de la population. Mais ce que l'on constate aujourd'hui, c'est qu'après dix ans d'introduction de cet article 4A LGZD, le bilan est loin d'être satisfaisant, dans la mesure où actuellement moins de 10% du parc de logements correspond aux critères du logement d'utilité publique et que ce pourcentage n'augmente que de quelques petits dixièmes de pourcentage chaque année. Globalement, nous ne construisons absolument pas assez d'habitations de type locatif pour loger la classe moyenne, et finalement, près de 50% des logements construits ces dernières années ont été destinés à la vente d'appartements, alors que - les statistiques le montrent - seuls 15% à 20% de la population ont les moyens financiers d'acquérir ce type de logement. Mesdames et Messieurs les députés, 50% des logements construits sont destinés aux 20% les plus riches de notre canton ! Aujourd'hui, cet article 4A LGZD ne nous permet pas d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés ni de construire des logements pour l'ensemble de la population. Or, c'est précisément ce dispositif-là, dont je viens de prouver l'inefficacité, que le PLR souhaite prolonger. Ce projet de loi a une visée purement dilatoire, et très concrètement, il fait obstacle au développement d'une politique sociale du logement.
Mesdames et Messieurs les députés, faisons nôtre aujourd'hui cette phrase comprise dans le préambule de notre Constitution nationale: «[...] la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres [...]» Arrêtons de construire pour les plus fortunés, construisons maintenant pour l'ensemble de la population, avec un regard attentif et un accent mis sur le logement pour les plus précaires d'entre nous. C'est d'ailleurs ce que nous avons proposé dans le cadre des initiatives - notamment de l'initiative 161 - que nous avons déposées et que les milieux immobiliers s'acharnent à combattre par tous les moyens et en particulier les moyens judiciaires. Le parti socialiste et les partis de gauche vous demandent de refuser ce projet de loi. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Mathias Buschbeck (Ve). S'il y a un domaine qui a besoin de stabilité, de prévisibilité et de sécurité, c'est bien celui du logement, pour que les investisseurs puissent s'engager à long terme dans les projets. Il ne faut pas changer constamment les conditions-cadres de la politique du logement. Cet article 4A arrive en effet à échéance, mais comme nous l'a garanti le magistrat en commission, on pourrait très bien le garder quelques mois, le temps de trouver une autre variante, puisque, d'un commun accord, on peut dire que l'article n'est pas satisfaisant. Simplement le prolonger de deux ans, ça ne crée pas la sécurité dont on a besoin pour le long terme et ça ne règle pas le problème à court terme non plus. Il est dommage que la commission ait souhaité voter dans l'urgence ce texte qui lui a été renvoyé il n'y a même pas deux mois; on aurait pu traiter ce projet de loi en parallèle avec le projet de loi déposé entre-temps par le Conseil d'Etat: cela permettrait de travailler de façon plus cohérente et plus intelligente en faveur de la politique du logement à Genève. C'est pourquoi je vous demande de renvoyer ce projet de loi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. Les rapporteurs peuvent s'exprimer sur la demande de renvoi en commission. Madame Fontanet ?
Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. La majorité s'oppose au renvoi en commission. Ce projet de loi a été étudié, l'accord du magistrat a été donné pendant les débats, l'auteur et la majorité de la commission ont accepté de limiter cette prorogation à une durée de deux ans. Il s'agit d'une prorogation transitoire. Il nous faut maintenant adopter ce projet de loi et rendre la sérénité et surtout la stabilité aux milieux de la construction. Merci, Monsieur le président.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Je suis favorable à un renvoi en commission, puisque ce projet de loi représente un blocage aux solutions qui permettraient de créer plus de logements pour toutes les catégories de la population. Naturellement, nous accepterons ce renvoi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite l'assemblée à se prononcer sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12074 à la commission du logement est rejeté par 62 non contre 32 oui.
Le président. Nous continuons notre débat. La parole est à M. Dimier.
M. Patrick Dimier (MCG), député suppléant. Merci, Monsieur le président. En quelques mots, quand on dit que les logements sont pour tout le monde, ils sont effectivement pour tout le monde. Or, aujourd'hui, que constate-t-on ? Un asséchement assez dramatique de l'offre de logements pour la classe moyenne. Tout à l'heure, notre collègue parlait de la classe moyenne et parlait très justement du texte constitutionnel selon lequel le droit au logement est général: c'est juste, mais s'il est général, il concerne aussi la classe moyenne dite supérieure - et encore, il faut savoir comment on calcule les revenus qui caractérisent cette classe. Ce projet de loi est donc bien évidemment un bon texte que nous devons soutenir.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Très brièvement, j'ai entendu le mot «blocage»: mais justement, c'est le contraire, ce projet de loi consiste à apporter un peu de déblocage. Je vous remercie.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Je voulais répondre à M. Dimier qui s'inquiète pour la classe moyenne: justement, Monsieur Dimier, le projet de loi du Conseil d'Etat prévoit de réserver 50% à la classe moyenne, et encore les 25% restants à la classe moyenne supérieure, comme vous le souhaitez. Je pense que la classe moyenne serait bien mieux traitée avec le projet de loi du Conseil d'Etat.
M. Patrick Dimier (MCG), député suppléant. En deux secondes: j'ai bien précisé tout à l'heure que c'est une question de calcul: comment détermine-t-on la classe moyenne ? Votre façon de la déterminer n'est pas la nôtre.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. J'aimerais répondre à Mme von Arx: je veux bien que vous souhaitiez de la souplesse en toute circonstance, mais là, vous vous trompez de débat. En somme, sans l'article 4A LGZD, ce sont des pratiques administratives qui vont s'appliquer, et les pratiques administratives offrent un maximum de souplesse. L'article 4A prévoit une contrainte administrative qui malheureusement montre aujourd'hui ses faiblesses et nécessite un correctif. Nous appelons aujourd'hui à ce correctif-là, en passant à une pratique qui permettrait de répondre aux divers besoins de la population, et notamment de la classe moyenne, qui, pour l'essentiel des personnes qui la composent, ne peut pas accéder à des appartements en propriété par étage, dont les prix sont surfaits.
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame von Arx, exceptionnellement, je vous donne la parole.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Vous êtes trop bon, Monsieur le président !
Le président. Oui, je sais !
Mme Anne Marie von Arx-Vernon. Je voulais juste faire remarquer que nous n'avons pas les mêmes considérations pour la notion de souplesse. Pour moi, la souplesse, c'est de garder les familles à Genève. Merci beaucoup.
Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Il faut faire attention à ne pas se laisser piéger par l'art oratoire du rapporteur de minorité. La prévisibilité ne sera pas au rendez-vous dans le cadre d'une pratique administrative, parce que la pratique administrative est justement laissée à l'appréciation du département du magistrat. Ce n'est pas bon et c'est ce que nous voulons éviter par le vote de cette disposition pour une durée de deux ans au maximum. Cela n'empêche pas que si la commission, respectivement les intervenants, se mettent d'accord avant cela avec un projet de loi, celui-ci pourra être adopté. Merci, Monsieur le président.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, comme vous le savez, cet article 4A de la loi générale sur les zones de développement définit pour qui l'on construit; pas tant la quantité, qui est l'affaire du plan directeur cantonal, mais pour qui. C'est très important d'avoir à Genève une loi-cadre qui définit à qui l'on destine les logements construits: en effet, sans la zone de développement et l'outil qui permet de la réguler, la demande est telle à Genève, il y a tellement d'investisseurs, tellement de grandes fortunes que notre canton pourrait très facilement se transformer en un Monaco-sur-Léman. Ce serait le cas si les autorités, depuis 1957, n'avaient pas développé à travers cette zone une capacité à maîtriser les prix du logement et par conséquent à répartir les proportions pour la classe populaire, pour la classe moyenne et pour la classe moyenne haute, la classe plus aisée.
Le bilan de l'article 4A LGZD voté en 2007 sur l'impulsion de Mark Muller est le suivant: 50% des logements construits l'ont été en PPE et en villas; un logement sur deux, donc, l'a été en propriété individuelle. De l'autre côté, 33% des logements construits ont été des logements subventionnés; enfin, seuls 17% des logements locatifs non subventionnés ont été réalisés pour cette classe moyenne qui se situe, avec son revenu, hors des barèmes de l'office du logement - elle ne peut pas bénéficier de logements subventionnés, mais n'a pas assez de revenus ou de fortune pour accéder à la propriété. Cette classe moyenne, que nous avons définie statistiquement de manière précise, gagne entre 70% et 150% du revenu genevois médian. Cette classe moyenne, pour sa part haute, peut accéder à la propriété, notamment à celle en zone de développement, puisque la propriété en zone ordinaire est de 29% plus chère que la PPE en zone de développement, mais une grande partie - surtout avec les mesures fédérales - ne peut pas accéder à la propriété. Mesdames et Messieurs, telle est la conclusion de ces dix années de politique du logement: la classe moyenne a été la grande oubliée. Elle s'est expatriée en France voisine ou est partie dans le canton de Vaud, elle est étranglée par des charges d'assurance-maladie extrêmement importantes, par un coût du loyer ou de l'habitat extrêmement important à Genève; c'est peut-être elle qui souffre le plus de l'évolution de notre canton, puisqu'une partie de la classe plus fragilisée a accès aux aides sociales, à l'aide à l'assurance-maladie, à l'aide au logement, alors que cette classe moyenne, elle, ne vit que par ses propres moyens, et elle est étranglée par les charges mensuelles, dont évidemment l'habitat représente une part très importante. Le Conseil d'Etat entend corriger ces prochaines années la politique du logement en faveur des classes moyennes, c'est pourquoi il a déposé un projet de loi qui introduit cette notion dans l'article 4A LGZD, puisque l'article actuel part d'une proportion de logements subventionnés et que le reste est à la libre appréciation du promoteur. Ainsi, Mesdames et Messieurs, avec le dispositif actuel, notamment en zone de fond villa, nous pourrions avoir de nouveaux quartiers avec 70% de PPE et 30% de logements subventionnés. Vous voyez le problème pour la classe moyenne: si elle ne rentre pas dans les barèmes des logements subventionnés et n'a pas assez d'argent pour accéder à la PPE, elle peut se retrouver, avec l'article 4A LGZD actuel, avec des quartiers où il ne se construit pas un seul logement pour elle. Ceci est effectivement inacceptable et doit être corrigé.
Maintenant, j'entends que la majorité parlementaire veut se donner le temps du débat. Les rencontres du logement n'ont pas permis d'obtenir un consensus entre les acteurs; j'espère pouvoir trouver avec vous ce consensus en commission, autour de la proposition du Conseil d'Etat, je l'espère, ou d'une proposition dérivée, et dès lors, j'ai effectivement accepté le projet de loi corrigé, puisque le texte tel que déposé n'introduisait pas cette limite des deux ans. Avec cette limite, la majorité rend crédible le fait qu'il s'agit d'un projet de loi de transition pour permettre un espace de discussion. Mon seul souhait est que cette discussion ne dure pas deux ans: peut-être que le parlement peut aussi être plus rapide, plus efficace - si vous me permettez, Monsieur le président - de sorte que nous aboutissions assez rapidement à un article 4A LGZD qui, lui, sera de longue durée, car les milieux immobiliers savent que durant ces deux ans, l'article 4A LGZD actuel reste, alors que leurs projets, vous le savez, prennent généralement deux, trois, quatre ans: ils ne savent donc pas non plus exactement ce qui va se passer ensuite. Je crois qu'une clarification la plus rapide possible est vraiment dans l'intérêt de tous les acteurs de la construction, et évidemment des futurs locataires. C'est dans ce sens-là que le Conseil d'Etat ne s'oppose pas à ce projet de loi et peut vivre avec; mais il invite aussi les parlementaires membres de la commission du logement à rapidement avancer sur les travaux inhérents à l'article 4A LGZD. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12074 est adopté en premier débat par 62 oui contre 32 non.
La loi 12074 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 12074 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 33 non.
Débat
Le président. Nous abordons maintenant le RD 1067-B et la R 776-B; nous sommes en catégorie II, quarante minutes. La parole est au rapporteur de majorité, M. Gabriel Barrillier.
M. Gabriel Barrillier (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'observe d'emblée que cet objet déposé par le Conseil d'Etat en novembre 2014 a été renvoyé à notre commission il y a plus d'une année, alors que la requête pour pouvoir exploiter une gravière a été déposée il y a treize ans, en conformité avec le plan cantonal d'extraction des gravières ! Suite au renvoi, la commission a repris en détail - en les vérifiant soigneusement - les points du dossier qui motivent l'opposition de la commune de Cartigny et qui ont été présentés une nouvelle fois dans une note remise lors d'une visite des lieux. Il a par ailleurs été procédé à l'audition de l'exploitant et de Pro Natura. Une note détaillée du département, répondant point par point à la commune, et les engagements fermes de l'exploitant ont convaincu une majorité de la commission d'accepter la résolution, puisque les mesures prises pour garantir la protection de la nappe phréatique et surtout la sauvegarde de ce joyau de la nature que constitue le Moulin-de-Vert seraient assurées et dûment contrôlées.
En résumé, voici les constatations et les mesures qui en découlent: les étangs du Moulin-de-Vert sont essentiellement alimentés par le Rhône et sa nappe d'accompagnement; l'écoulement des eaux depuis les falaises, qui alimente très partiellement le site, ne sera pas affecté; des bandes graveleuses d'infiltration seront en outre conservées tout autour de chaque périmètre d'exploitation de la gravière, et d'importantes épaisseurs de gravier seront conservées sous le niveau maximum d'exploitation, garantissant que la gravière et le remblayage ne touchent pas la nappe phréatique. Les matériaux de chantier qui combleront le trou seront surveillés en permanence par le GESDEC et l'on ne pourra pas enfouir n'importe quoi avant de restituer les 18 hectares exclusivement à l'agriculture; la commission a par ailleurs enjoint au département - et c'est important; il y a eu un vote à ce sujet - d'inclure dans l'autorisation d'exploiter une charge supplémentaire sous la forme d'une modélisation hydrogéologique permettant de contrôler en permanence le site. Et enfin, le projet d'extraction ne prévoit pas la mise en place d'installations de traitement de matériaux de façon à ne pas répéter des situations très problématiques - pour ne pas dire plus - qui ont fâché à juste titre les communes concernées, et qui expliquent en grande partie leur méfiance et leur opposition à l'ouverture des gravières. D'autres nuisances possibles concernant la qualité de l'air, le bruit, la poussière et la circulation ont fait l'objet d'un engagement ferme de la part de l'exploitant et des autorités.
Chers collègues, cette gravière sera mise sous haute surveillance, placée dans un véritable corset, encadrée par des mesures de contrôle serrées des autorités et observée de près par une commission locale d'information et de suivi dans laquelle siégeront - s'ils le souhaitent - des représentants de toutes les parties concernées, dont bien sûr la commune de Cartigny ! Que pouvons-nous faire de plus ? Notre canton a besoin de gravières, non pas pour alimenter une croissance débridée qui inquiète de plus en plus la population, mais pour au minimum permettre d'entretenir et de réaliser les infrastructures nécessaires au maintien de notre confort et de notre niveau de vie, infrastructures dont profitent aussi les habitants de Cartigny. Pour cela, chacun doit faire un effort et accepter quelques inconvénients passagers. A ceux qui prônent la priorité au local en toutes circonstances et dans tous les domaines, j'indique que notre canton ne peut pas continuer à se reposer sur nos voisins pour son gravier ni à déverser chez eux ses matériaux d'excavation, et qu'il faut réduire les transports frontaliers que cela génère. C'est la raison pour laquelle la majorité vous invite à prendre vos responsabilités et à accepter cette proposition de résolution. Je vous remercie.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, après un deuxième passage en commission et de nouvelles auditions, les éléments ayant motivé notre premier refus sont malheureusement à déplorer une seconde fois: l'impact sur la réserve naturelle du Moulin-de-Vert, l'impact sur le paysage et les habitantes et habitants de la région et la réelle utilité du projet. L'élément principal est sans aucun doute l'impact sur la réserve naturelle du Moulin-de-Vert. C'est ici la bonne occasion de rappeler que la réserve du Moulin-de-Vert est un espace protégé et classé site naturel d'importance nationale depuis 1956. Elle représente l'une des plus riches réserves du canton de Genève à tous les niveaux, que ce soit en matière de nature, flore, reptiles, amphibiens, mammifères et insectes. Le projet d'exploitation de la gravière qui nous intéresse se situe à 500 mètres de la réserve naturelle du Moulin-de-Vert. Cette proximité est d'autant plus inquiétante que l'étude d'impact réalisée dans le cadre de ce projet évoque un risque sur la réserve du Moulin-de-Vert lors de l'exploitation de la gravière. Une donne qui inquiète également l'association Pro Natura: les nappes des cours d'eau qui alimentent en partie le Moulin-de-Vert se situent à l'endroit même de la gravière. L'exploitation du gravier puis le remblayage des fosses avec une terre plus argileuse et limoneuse vont produire des modifications sur le sol et le sous-sol, interférant directement avec l'infiltration des eaux de pluie. Ces sources d'eau, vitales à l'activité de la réserve, peuvent être modifiées, voire disparaître, sans même aborder le risque de pollution des eaux. Le principe de précaution - mais aussi de cohérence - devrait à ce stade prévaloir afin de ne pas risquer de mettre en péril un patrimoine naturel important.
La deuxième raison de notre refus a trait aux nuisances imposées à la population et à l'atteinte au paysage. La modification du terrain dédié à la gravière a un impact sur la qualité du paysage, mais aussi sur la perception et l'appréciation du paysage par les habitantes et habitants de la commune et des communes avoisinantes. A cela s'ajoutent évidemment les nuisances directes du trafic de camions transportant du gravier, avec des allers-retours réguliers, chargeant l'air de particules fines et portant atteinte à la sécurité des routes en particulier pour les piétons et pour les cyclistes. On parle ici de 12 500 mouvements globaux par année, c'est-à-dire exactement 110 mouvements par jour de travail de neuf heures, autrement dit douze mouvements par heure. Je terminerai par la question de la réelle utilité du projet, en évoquant d'abord l'énorme gravière à proximité - à Bernex - qui répond parfaitement aux besoins de la région, et en rappelant ensuite une chose importante: si elles produisent effectivement du gravier local, ces gravières servent avant tout de remblayage. Aujourd'hui, on produit en une année deux fois plus de matériaux d'excavation que l'on n'extrait de gravier !
Il faut bien sûr creuser pour construire des logements dont on a assurément besoin. Mais on peut toutefois se poser la question des quantités de matériaux d'excavation liées aux énormes forages; ceux-ci sont toujours plus profonds puisque l'on assortit presque systématiquement toute nouvelle construction d'un gigantesque parking souterrain, très souvent surdimensionné. S'il est évidemment essentiel de construire du logement, il faut aussi repenser les quartiers et leur aménagement, réfléchir à la mobilité qui en découle sans flanquer par principe à chaque immeuble son lot de places de parc. La gravière est l'un des moyens d'épancher le trop-plein de nos constructions, et il s'agit aujourd'hui de repenser cette question-là. L'agriculture et la nature ont déjà subi de nombreux dommages dans la région, comme les sites de la Petite-Grave et du Cannelet; l'impact de ce projet de gravière sur l'environnement n'est pas à sous-estimer, surtout quand il est à proximité immédiate de la plus grande réserve naturelle de Genève. Les Verts et la minorité de la commission vous invitent donc à refuser une nouvelle fois la résolution du Conseil d'Etat et à soutenir la commune de Cartigny qui s'oppose à ce projet de gravière. Je vous remercie.
M. Norbert Maendly (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC est sensible à la problématique de l'approvisionnement du canton en matériaux de construction et ne voit pas d'inconvénient à ce que notre sous-sol soit mis à contribution dans la mesure où les terres qui le recouvrent sont restituées à l'agriculture. Nous avons la chance d'avoir du gravier à proximité, cet élément a toujours été associé au développement de Genève. L'UDC souhaite également pouvoir pérenniser l'activité d'une entreprise locale qui par le passé a toujours respecté les normes et les critères légaux en matière d'exploitation de gravières. La protection de l'environnement in situ a fait l'objet d'études coûteuses qui ont permis l'établissement d'un cahier des charges très élaboré. Le GESDEC ayant répondu à toutes les questions des pétitionnaires et fourni des explications détaillées de nature à rassurer les autorités communales, l'UDC vous invite à suivre la majorité de la commission.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le Moulin-de-Vert est en danger. Le Moulin-de-Vert tel que nous le connaissons est issu de la correction du Rhône intervenue lors de la construction du barrage de Verbois dans les années 1940. Il a été classé réserve naturelle en 1970 et fait l'objet de différents niveaux de protection: cantonal, national et européen dans le cadre notamment de la Convention de Ramsar relative à la protection des zones humides. Il serait judicieux que cette protection englobe également les sources qui l'alimentent. Ce site, qui offre la plus riche diversité biologique de notre canton, a été renaturé à grands frais durant la fin du siècle dernier. Il me semble qu'il y a même eu un appel à souscription nationale. Or, l'objet qui nous intéresse aujourd'hui vise à autoriser l'exploitation accessoire de gravier, mais surtout l'enfouissement de déchets de construction au-dessus de la poche phréatique qui alimente cette réserve. Il s'agit en substance de donner un petit mandat - presque insignifiant - à une entreprise qui n'a pu bénéficier du partage du gâteau que sont les nouvelles gravières de Bernex, et de maintenir ainsi un nombre d'acteurs suffisant dans ce domaine d'activité. Relevons au passage que l'entreprise en question exerce à cheval sur la Suisse et sur la France, et que le gros de son chiffre d'affaires est fait en France voisine.
Toute pollution des eaux de cette nappe ou atteinte à son fonctionnement auraient des répercussions irrémédiables sur la réserve du Moulin-de-Vert et sa biodiversité. Les autorités de Cartigny, parmi lesquelles une mairesse et deux adjointes, s'opposent à la création de cette nouvelle gravière: leurs communiers n'ont que trop longtemps souffert de la présence et des nuisances de gravières dont l'exploitation a subsisté, pour certaines, après que les autorités cantonales ont ordonné leur fermeture. Il convient également de s'étonner que l'entreprise d'ingénierie environnementale sollicitée travaille dans le sens de ses mandataires: rendant d'abord un rapport favorable à la création d'une réserve naturelle, elle rend plus tard un rapport favorable à l'exploitation de gravier sur la nappe alimentant le Moulin-de-Vert après avoir changé de mandataire et donc d'épaule son fusil. Quant aux prétendues économies, la rumeur nous rapporte le montant que pourrait toucher l'agriculteur pour mettre à disposition son terrain pour exploiter un peu de gravier et enfouir des déchets de construction; un montant qui permettrait certainement l'exportation de ces déchets de construction hors de notre canton. Pro Natura et les milieux de défense de l'environnement, fortement engagés au profit de cette réserve dans le passé, s'opposent maintenant à la création de cette gravière. Le respect du principe de précaution voudrait enfin qu'on exclue soigneusement tout risque de pollution ou d'atteinte au fonctionnement d'une nappe phréatique alimentant une réserve naturelle d'importance européenne.
Pour conclure, Mesdames et Messieurs, nous sommes confrontés à Cartigny à la même approche méthodique de l'Etat que dans le problème de densification de Vailly-Sud dont nous avons parlé hier: l'Etat agit à sa guise, la commune n'est pas écoutée. Mesdames et Messieurs les députés... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...le Mouvement Citoyens Genevois, ni à gauche ni à droite, mais avec toutefois une sensibilité écologique, vous invite à écouter les habitants et les autorités de Cartigny ainsi que les défenseurs de l'environnement. Préservons le site du Moulin-de-Vert, renvoyons le RD 1067 au Conseil d'Etat et acceptons la résolution 776 des autorités genevoises. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à Mme Christina Meissner pour deux minutes.
Mme Christina Meissner (HP). Merci, Monsieur le président. Le rapporteur de majorité a dit: «Le canton a besoin de gravières.» Je prétends que le canton a aussi besoin de biodiversité pour son équilibre ! Le Moulin-de-Vert, on l'a dit, a déjà subi - et a mis plus d'un demi-siècle à s'en remettre - la correction du Rhône qui a suivi la construction du barrage de Verbois. C'est aujourd'hui un joyau. Un joyau unique ! Unique ! Je ne suis pas prête à mettre en péril ce joyau unique pour une poignée de gravier. Le risque zéro n'existe pas, il dépend des contrôles, de la fréquence de ces contrôles et évidemment de la capacité à intervenir rapidement, qui sera de la responsabilité unique de l'entreprise exploitant le site. Or, on sait que notre capacité de contrôle des entreprises et de leur exploitation pèche toujours et dans tous les domaines; je ne vois pas pourquoi on pourrait prendre le risque de parier qu'il sera exemplaire dans celui-ci. Non, Mesdames et Messieurs, il n'y a rien de plus important que de garder un joyau, quand il est unique, sans prendre un risque inconsidéré. Je voterai non à ce projet d'exploitation ! (Applaudissements.)
M. Bernhard Riedweg (UDC). Après treize ans de controverses, les craintes et les demandes de la commune de Cartigny ont été prises en considération puisqu'une commission locale d'information et de suivi avec toutes les parties concernées a été mise en place. Dans ce rapport, il y a lieu de relever que ce gravier, extrait sur territoire genevois, est utile au développement économique du canton, que ce soit pour assurer la construction d'immeubles ou d'infrastructures. On préserve ainsi les acteurs économiques genevois actifs dans le domaine du bâtiment et la construction dans sa généralité. Ce terrain sera remis en état par un remblayage qui permettra de retrouver la plaine agricole d'origine dix ans après le début de son exploitation. Ouvrir une gravière sur le territoire du lieu-dit Moulin-de-Vert diminuera sensiblement les nuisances dues au transport de ce matériau primaire de construction, évalué à 600 000 mètres cubes exploitables sur 17 hectares sur dix ans à Cartigny, alors que les besoins du canton sont de 700 000 mètres cubes par année. L'hydrogéologie, les eaux de surface et les sols ne seront pas significativement affectés par ce projet de gravière défini comme de petites dimensions. Les réserves de remblai sont assurées et ce projet, qui occupera une pelle mécanique et un bulldozer, tient compte des limites fixées quant aux nuisances liées au bruit, à la pollution de l'air et à la protection de la nature soulevées par les opposants à ce projet. Les eaux souterraines ainsi que les eaux de surface ne subiront en outre aucun impact significatif. L'UDC vous demande de voter la résolution 776 et de prendre acte du rapport divers 1067, car la préservation de l'environnement, la qualité de la vie ainsi que la sécurisation des chemins sont assurées, les mesures de suivi ont été prises. Merci, Monsieur le président. (Quelques huées. Rires.)
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, la lecture des rapports successifs issus de la commission de l'environnement et de l'agriculture sur ces deux objets appelle au moins une question: pourquoi faut-il faire opposition à un projet pour obtenir une réduction des risques ? Comme si ces réductions, ces efforts, ces sacrifices n'étaient consentis que sous la contrainte. Pour nous, c'est du moins ce qui apparaît au travers de la lecture de ces deux différents rapports. C'est navrant et, je vous l'avoue, rédhibitoire. Comment accorder du crédit aux assurances de ceux qui se sont montrés dans un premier temps si peu respectueux des intérêts de la collectivité, de la préservation du site ? Puis qui ont diminué les risques pour faire taire les résistances et qui enfin, pour faire allégeance, ont avancé toute une série de cautèles dont rien ne dit finalement qu'elles seront suivies d'effet quand bien même elles seront étroitement surveillées ! L'expression est claire: minimiser les risques ne veut pas dire supprimer les risques. Aussi, notre groupe est opposé à la perspective de prendre le moindre risque susceptible de mettre en péril la biodiversité des sites de Fin de Vallière, la Toenaise et la Bergerie. Il refuse que le site du Moulin-de-Vert, classé réserve naturelle d'importance nationale, soit affecté de quelconque manière par l'exploitation d'une gravière. C'est pourquoi, en vertu du principe de précaution et surtout au nom de ceux qui un jour pourraient nous reprocher d'avoir fait un pari hasardeux, nous refuserons comme d'autres ici le rapport et la résolution du Conseil d'Etat, et nous vous invitons à en faire autant, Mesdames et Messieurs les députés. Je vous remercie de votre attention. (Quelques applaudissements.)
Mme Geneviève Arnold (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, une visite à Cartigny nous a permis de mieux comprendre la position des autorités communales, réfractaires au projet du plan d'extraction. Les différentes auditions nous ont pourtant assuré de la sauvegarde du site reconnu du Moulin-de-Vert, dans le respect de sa biodiversité. Des mesures sont prises pour éviter les nuisances sur ce site et le protéger; nous avons été assurés de la mise en place d'éléments de préservation avec des garde-fous. L'ouverture de la gravière se fera sous surveillance et l'extraction de gravier est nécessaire aux travaux de notre canton pour éviter d'aller chercher ce matériau en France voisine. Notre méfiance préalable a également été atténuée en matière de sécurité, notamment en ce qui concerne le trafic des camions et la sécurisation du fameux chemin des écoliers. Malgré l'attention et l'intérêt portés aux revendications des autorités communales, le PDC suivra les recommandations cantonales pour répondre aux besoins locaux et votera ce rapport. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Georges Vuillod (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, voici quelques réflexions concernant ces textes qui ne devraient en fait servir, si j'ai bien compris, qu'à mettre en oeuvre le plan directeur révisé en 2011. L'ouverture de cette gravière est-elle prévue dans le plan cantonal d'exploitation des gravières ? La réponse est oui. Est-ce que les protocoles préalables ont été respectés par l'entreprise et contrôlés par le département - et c'est un sacré investissement qui a été fait ? La réponse est oui. Est-ce que des mesures spécifiques dues à la proximité du Moulin-de-Vert - une surveillance hydrologique accrue - ont été décidées ? La réponse est oui. Est-ce que l'entreprise souhaite collaborer et communiquer de manière volontaire avec les habitants de Cartigny pour les tenir au courant de l'évolution des travaux ? La réponse est oui. Est-ce que des études d'impact relatives aux transports ont été réalisées pour diminuer les nuisances dans le village de Cartigny ? La réponse est oui. Est-ce que les conditions de retour à l'agriculture, tant dans la durée que concernant la qualité des remblais, sont définies ? La réponse est oui. Est-ce que l'ouverture d'une gravière, quelle que soit sa situation dans le canton, provoquera inévitablement des inquiétudes et des oppositions dans son voisinage parce qu'elle créera inéluctablement des perturbations ? La réponse est oui. En acceptant la révision du plan directeur des gravières en 2011 - et en reconnaissant donc implicitement que notre canton a l'obligation d'assumer lui-même les nuisances générées par son développement - nous savions que nous aurions à trancher sur ce genre d'affaires. Ne pas le faire reviendrait à remettre en cause l'ensemble du plan d'exploitation des gravières, avec comme conséquence un report des nuisances chez nos voisins. Alors assumons notre rôle et votons ces textes. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
M. François Lefort (Ve). Je souhaiterais apporter une dernière perspective sur ce débat, parce que tout a évidemment été dit ! Tout a été dit sur le besoin de gravier, sur le fait que le gravier local est plus écologique que le gravier qui vient de loin - et j'étais assurément heureux de l'entendre ce soir. Cela nous rappelle les débats que nous avons menés il y a cinq ans lorsque nous avons modifié la loi sur les déchets et la loi sur les gravières. Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi avons-nous modifié ces deux lois ? Vous vous le rappelez ? Nous les avons principalement modifiées pour organiser le recyclage des remblais et déchets de chantier, pour produire de la grave recyclée, pour réduire les volumes à mettre en décharge et pour réduire l'importation des graviers. Ces modifications devaient initier un véritable cycle d'écologie industrielle où les déchets redevenaient des produits, et nous avons à Genève des entreprises exemplaires dans cette activité de recyclage. Nous avons des entreprises pionnières dans ce cycle d'écologie industrielle et nous disposons maintenant de dizaines de milliers de mètres cubes des divers types de graves recyclées que le marché demande, mais que le marché genevois n'achète pas pour différentes raisons économiques ! La principale étant que le gravier neuf - surtout s'il est moins cher - est préféré, même s'il vient de loin. Le gravier neuf et local est aussi préféré à la grave recyclée. Pourquoi ? Parce qu'il crée du vide ! Il crée du volume vide dans les gravières, qui se vend de 25 F à 35 F le mètre cube pour le remplir de remblai. Tout est cher à Genève, même le vide ! Voilà la situation, et l'exemple le plus récent est d'ailleurs un véritable scandale: la voie verte sur la couverture du CEVA a été réalisée avec 9000 mètres cubes de gravier neuf contre 3000 mètres cubes de gravier recyclé ! C'est la vérité, bien qu'on ait évidemment demandé maintes fois à l'Etat d'être exemplaire sur l'utilisation de ces graviers recyclés. Le vide devenant rare à Genève, comment voulez-vous pérenniser cette activité essentielle de recyclage si même les chantiers publics n'utilisent pas les graves recyclées !
Ce soir, certains veulent nous pousser à exploiter des gravières partout où le plan directeur cantonal relatif nous dit qu'il y a des graves; et pourquoi ? Pour fabriquer du vide qui se vend à prix d'or ! Une gigantesque gravière qui va continuer son activité pendant trente ans vient d'ouvrir à Bernex, à deux kilomètres du site dont nous parlons ce soir. Et nous considérons que cette gigantesque gravière, exploitée par trois entreprises, est largement suffisante pour les besoins régionaux dans cette partie du canton. Cette gravière va d'ailleurs créer suffisamment de nuisances, il n'y a nul besoin d'en ouvrir une deuxième à côté au bénéfice d'une entreprise qui exploite la plus grande gravière de toute la région: celle du Salève, en France, qui nourrit aussi nos chantiers. Nous vous demandons donc de refuser la résolution du Conseil d'Etat, c'est-à-dire d'accepter l'opposition de la commune. Pour les motifs expliqués, qui s'ajoutent aux autres, il n'y a aucune raison d'accepter ce soir la création de cette gravière !
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Flury, il vous reste une poignée de secondes; vous n'avez pas le temps de prendre la parole, mais je les mets au crédit du MCG. Je vous remercie. La parole est à M. Gabriel Barrillier.
M. Gabriel Barrillier (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais préciser que l'entreprise intéressée par l'exploitation de cette gravière - vous transmettrez à M. Lefort, Monsieur le président - est l'une des plus anciennes de Suisse active dans ce secteur d'activité: Sasso SA. Elle est donc véritablement une entreprise indigène. Les camions qui seront par ailleurs utilisés appartiennent également à une firme dont le siège social est en Suisse, à Genève; donc de ce point de vue là, je ne vois pas quel est le rapport avec les entreprises françaises.
Maintenant, chers collègues, juste encore une précision sur le besoin de gravier à Genève. J'ai les chiffres suivants: bon an mal an, on utilise 700 mètres cubes de gravier par année à Genève, soit en gros 25 kilos par habitant et par jour ! Il faut savoir qu'un mètre cube de gravier pèse 1500 kilos ! C'est donc très pondéreux. Et ceci, comme je l'ai dit tout à l'heure, seulement pour répondre à une demande normale qui permet à ce canton de se doter des infrastructures nécessaires, et non pas pour développer davantage, pour tout bétonner - ce qui fait peur aux gens, on le conçoit très bien. L'ouverture de cette gravière est donc limitée à huit ans; si elle ouvre, elle sera rendue à l'agriculture dans huit ans ! Mesdames et Messieurs, je crois que c'est un projet maîtrisé, et je vous invite une nouvelle fois à accepter cette résolution.
Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Flury, il paraît que vous vous êtes trompé dans votre recommandation de vote; vous voulez peut-être vous corriger ? (Remarque.) Vous avez la parole.
M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. En effet, je me suis trompé dans les recommandations de vote: le groupe MCG refusera les deux textes, et je profite de l'occasion pour demander le vote nominal sur les deux objets. Je vous remercie.
Le président. Très bien, êtes-vous soutenu pour le vote nominal ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très clairement. Merci d'avoir précisé votre position. (Remarque.) Alors rapidement, Monsieur Lefort, parce que c'est en principe le tour des rapporteurs maintenant.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président; vous transmettrez au rapporteur de majorité que je n'ai pas parlé d'entreprise française. J'ai dit que cette entreprise exploite la plus grande gravière de la région, qui se trouve en France, et qu'évidemment elle exporte journellement - ou plutôt importe - du gravier en provenance de cette grande gravière. Et donc la priver de cette toute petite gravière - comme on l'a qualifiée - pour huit ans n'affectera absolument pas cette gigantesque entreprise du point de vue économique.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve), rapporteuse de minorité. On voit ici que le vide vaut bien plus d'or que le gravier local; au fond, on est bien en train de se disputer un trou et non du gravier local. On voit qu'entre l'écologie industrielle, entre la possibilité d'avoir du gravier recyclé directement sur les chantiers - qui représente évidemment une technique extrêmement écologique - et le fait de repenser également nos quartiers, il y a un énorme potentiel pour équilibrer la demande de gravier aujourd'hui à Genève. Je voudrais aussi rappeler encore une fois la présence de cette énorme gravière à proximité de Cartigny - à Bernex - qui répond directement aux besoins de gravier. Et puis bien sûr - et je tiens vraiment à marteler cet élément-là - les principes de précaution et de cohérence doivent absolument prévaloir ici par respect pour cette réserve naturelle du Moulin-de-Vert. Je vous invite donc très chaleureusement à refuser cette résolution du Conseil d'Etat et à soutenir la commune de Cartigny qui s'oppose au projet de gravière. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame. J'ai le plaisir de saluer à la tribune notre ancien collègue, M. Fabiano Forte. (Applaudissements.) La parole est à M. le conseiller d'Etat Luc Barthassat.
M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, au vu de ce plan d'extraction, je voudrais simplement faire remarquer, puisqu'on parlait avant de quantités, qu'il offre la possibilité d'exploiter 600 000 mètres cubes de gravier, soit l'équivalent de la consommation moyenne annuelle du canton. Ce n'est donc pas rien ! Tant pour une petite entreprise que pour une grande, ce n'est pas rien et c'est important. Je vous rappelle que nous avons passablement de projets à Genève pour les années à venir et nous devons aussi prévoir ce genre d'extraction. Ce projet a fait l'objet de plusieurs enquêtes techniques de la part de différents services de l'Etat qui ont justement permis de confirmer sa compatibilité avec la législation, notamment en matière de protection de l'environnement. Je vous rappelle le côté presque tatillon, je dirais, de mes services par rapport à ça; on ne donne pas un aval pour le plaisir d'ouvrir une gravière de plus ou une exploitation de plus. On est vraiment figé, je dirais, par rapport à tout ce qui relève de mesures assez fortes concernant notre environnement. L'opposition de la commune de Cartigny - qui a bien entendu pour but d'empêcher cette exploitation - fait état de craintes du Conseil municipal quant aux nuisances potentielles induites par l'exploitation du gravier. Le projet, tel que présenté et accepté par l'ensemble des services ayant justement préavisé positivement sous certaines conditions, permet de réduire au maximum tous les impacts; ce sont encore une fois les services qui le certifient. Je dirais aussi que la volonté de Cartigny d'éviter toute nuisance sur son territoire et ailleurs - c'est malheureusement un petit peu ce que cherchent toutes les communes - est bien entendu compréhensible et légitime. Mais elle doit être aussi mise en balance avec l'intérêt général du canton à exploiter justement ce genre de ressource, comme j'essayais de vous le dire tout à l'heure. En cas d'acceptation du recours de la commune de Cartigny, cette gravière risque bien entendu de ne pas être exploitée. Je tiens par ailleurs à souligner que l'entreprise porteuse du projet arrive actuellement en fin d'exploitation des gisements dont elle dispose; l'abandon de ce projet peut donc également conduire à une diminution du nombre d'acteurs cantonaux opérant dans l'exploitation des gravières - et ce sont encore une fois mes services qui me le disent. Nous courrons donc un certain risque si nous mettons en péril la ressource économique que constitue cette entreprise. Mesdames et Messieurs, la direction générale de l'eau préavise en faveur du rejet de l'opposition de cette commune. Je vous rappelle que le directeur général de l'eau est M. Mulhauser; il était auparavant directeur général de la nature, ce qui lui permet d'avoir un regard suffisamment large et compétent sur la question, de sorte qu'aujourd'hui la majorité de ce Grand Conseil devrait le suivre ! Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes donc maintenant en phase de vote. Je vous explique comment ça se passe. Nous allons d'abord voter sur la résolution 776. Si vous l'acceptez, cela veut dire que nous prenons acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1067. Si vous refusez cette résolution 776, alors nous voterons sur le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport RD 1067. Est-ce que c'est clair ? Bien, alors nous allons voter sur la R 776.
Mise aux voix, la proposition de résolution 776 recueille 42 oui, 42 non et 5 abstentions (vote nominal).
Le président. Je me prononce en faveur de cette résolution.
La résolution 776 est donc adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 43 oui contre 42 non et 5 abstentions (vote nominal).
Des voix. Bravo ! (Exclamations. Quelques applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1067.
Le projet de loi 11422 est retiré par ses auteurs.
Le projet de loi 11556 est retiré par ses auteurs.
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous accorde un quart d'heure de pause. Je lève la séance, nous reprendrons à 18h20.
La séance est levée à 18h05.