Séance du jeudi 24 novembre 2016 à 20h30
1re législature - 3e année - 10e session - 54e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Pierre Maudet et Mauro Poggia, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Murat Julian Alder, Bertrand Buchs, Edouard Cuendet, Philippe Morel et Salima Moyard, députés.

Députés suppléants présents: Mme et MM. Marko Bandler, Patrick Malek-Asghar et Céline Zuber-Roy.

Annonces et dépôts

Néant.

E 2370-A
Prestation de serment de Mme Francesca SPINUCCI, élue Juge au Tribunal des mineurs

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'une magistrate du pouvoir judiciaire. Je prie M. le secrétaire général adjoint de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (La magistrate entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)

Madame, vous êtes appelée à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyenne et comme juge;

- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;

- de me conformer strictement aux lois;

- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;

- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;

- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»

A prêté serment: Mme Francesca Spinucci.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une longue et heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)

R 817
Proposition de résolution de Mme et MM. Vincent Maitre, Mathias Buschbeck, Jacques Béné, Pierre Conne, Patrick-Etienne Dimier, Jocelyne Haller, Cyril Mizrahi, André Pfeffer, Sandro Pistis concernant une rectification matérielle apportée à la loi modifiant la loi générale sur les zones de développement (LGZD) (Taxe d'équipement) (11783)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 24 et 25 novembre 2016.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous entamons nos travaux avec la première urgence, à savoir la proposition de résolution 817 émanant de la commission législative, visant une rectification matérielle apportée à la loi 11783 modifiant la loi générale sur les zones de développement. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je cède la parole à M. le député Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Je vous prie de m'excuser d'avoir raté le point «Annonces et dépôts» de notre ordre du jour. C'était pour annoncer le retrait de deux objets actuellement en commission: le PL 11759 à la commission judiciaire et de la police et la M 2257 à la commission des affaires sociales. Je vous remercie, et toutes mes excuses encore une fois !

Le président. Vous êtes tout excusé, Monsieur le député. Nous en prenons acte. Je donne la parole au premier signataire du texte, M. le député Vincent Maitre.

M. Vincent Maitre (PDC). Merci, Monsieur le président. Vous l'avez dit vous-même, il s'agit seulement et simplement de corriger une erreur matérielle, une erreur de vocabulaire. Cela n'a aucune portée politique quelconque. Je vous encourage donc, Mesdames et Messieurs, à accepter cet objet.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant pas demandée, nous passons directement au vote.

Mise aux voix, la résolution 817 est adoptée par 58 oui (unanimité des votants).

Résolution 817

M 2265-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Caroline Marti, Alberto Velasco, Roger Deneys, Cyril Mizrahi, Romain de Sainte Marie, Lydia Schneider Hausser, Salima Moyard, Irène Buche pour des logements à la place d'un golf
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIII des 28, 29 janvier et 4 février 2016.
Rapport de majorité de Mme Bénédicte Montant (PLR)
Rapport de minorité de Mme Caroline Marti (S)

Débat

Le président. Nous passons à la deuxième urgence de ce soir, la M 2265-A, classée en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole à Mme le rapporteur de majorité, Bénédicte Montant.

Mme Bénédicte Montant (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il ne se passera rien ! Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, si cette motion est votée, il ne se passera rien, comme il ne s'est rien passé depuis 1973, depuis plus de quarante ans, depuis le déclassement des Evaux qui a fait justement déménager le Golf Club à Cologny. C'est le même refrain que cette motion nous chante aujourd'hui. Nous le savons, et cela ferait de nous des responsables: nous savons qu'il ne se passera rien, car la commune est fermement opposée à ce déclassement. Il ne se passera rien, parce que les propriétaires ne veulent pas vendre. Il ne se passera rien, parce que l'Etat, dont nous connaissons les finances, n'a pas le premier sou pour envisager une expropriation dans un périmètre qui n'est pas prioritaire et qui ne figure pas dans la planification cantonale, ni dans son second temps. Ce serait donc un gaspillage de terres à déclasser pour notre plan directeur. En déclassant ici, nous nous priverions de la possibilité de le faire ailleurs et nous risquons, à l'avenir, au vu des prescriptions fédérales, un reclassement de la zone en zone agricole lorsque justement rien n'aura été fait. En fait de gaspillage, nous aurons perdu de l'énergie et du temps, et nous le savons déjà aujourd'hui.

La majorité de la commission vous recommande de refuser cette motion et il faut le faire, parce qu'elle porte une question d'aménagement du territoire et qu'elle deviendrait contraignante. Elle obligerait le Conseil d'Etat à agir dans un périmètre qui n'est pas inscrit au plan directeur cantonal 2030 et, je le répète, dans un périmètre qui ne fait pas partie des grands projets prioritaires. Nous ferions mieux de nous concentrer sur la réalisation de ce plan directeur cantonal, et ce sans perdre de temps. Le rapport de majorité détaille dans sa conclusion, thème par thème, toutes les raisons qui ont mené au refus net de la motion en commission. Je ne vais pas les énumérer ici un à un; le débat qui nous attend les abordera certainement et je sais que je peux compter sur vous sur ce sujet.

Je souhaiterais néanmoins insister sur un aspect important, qui est probablement le plus méconnu, mais qui est fondamental: il s'agit, Mesdames et Messieurs les députés, du rôle clef que le Golf Club de Genève joue pour la Genève internationale. Il y a quelques mois, nous avons voté comme un seul homme plus de 89 millions pour la rénovation des bâtiments des organisations internationales, tous ensemble, tous autant que nous sommes, conscients de l'importance que ces institutions ont pour Genève. Nous avons reconnu les besoins en termes de positionnement et de lieux d'échanges diplomatiques. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Aujourd'hui, cette même Genève internationale... (Remarque.) ...par la voix de la Fondation pour Genève, exprime avec force que le Golf Club de Genève est, et je cite, «une institution d'intérêt prépondérant, tant pour le canton que pour la Genève internationale». Et c'est cela, c'est cela que nous voudrions sacrifier sur l'autel de cette motion ? Alors, chers collègues, il faut construire, oui, oui et oui ! Mais il faut le faire dans les périmètres identifiés par un plan que nous avons soutenu et voté. Cette motion, hormis tous ses autres aspects néfastes, nous demande d'infliger un camouflet méprisant à la Genève internationale...

Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée, ou vous prenez sur le temps du groupe.

Mme Bénédicte Montant. ...et par là même, à la Confédération suisse, car on s'attaque aussi aux institutions qui font la Suisse. (Commentaires.)

Je veux rappeler enfin que la rive gauche porte d'importants projets d'urbanisation; parmi eux, les Communaux d'Ambilly, la Gradelle, Mon-Idée, Puplinge, ou encore les Grands-Esserts. Constatons que ceux qui demandent une urbanisation renforcée de cette rive sont les mêmes qui s'opposent aux infrastructures de transport nécessaires pour accompagner ces projets. Des logements sur le golf, mais pas de traversée du lac, nous dit le parti socialiste: je vous laisse apprécier cette contradiction. Alors, Mesdames et Messieurs, refusons cette motion, refusons cette proposition irréaliste. (Applaudissements.)

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, quand cette proposition de motion du parti socialiste a été déposée, il faut reconnaître qu'elle a été accueillie avec le sourire, voire avec un rire jaune et a été considérée comme une provocation ou un simple coup politique. Le parti socialiste le regrette, parce que ce texte propose un projet concret qui répondait à une question prépondérante dans ce canton: où construire à Genève ? Dénigrer cette question et les réponses qu'on peut y apporter, c'est extrêmement dommage.

Parce que oui, effectivement, Mesdames et Messieurs les députés, où construire à Genève ? Est-ce qu'on construit en zone agricole ? Vous connaissez toutes et tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés pour la sauvegarde des SDA; nous atteindrons prochainement le quota minimal autorisé par la Confédération et donc, nous ne pourrons plus à l'avenir, au-delà de 2030, construire par extension sur les SDA. Et puis, est-ce que nous pourrons construire en zone villas ? Oui, évidemment, il faudra le faire et nous le faisons déjà actuellement, mais il faut reconnaître la lenteur de ce processus et également la cherté de cette opération, dans la mesure où les prix des villas préexistantes sur les terrains renchérissent le foncier et donc les futurs loyers des appartements construits.

Ce texte est extrêmement simple et a surtout plusieurs vertus: d'abord, on propose de prendre du terrain sur de la zone agricole, mais des terrains qui ne sont pas des SDA; mais en plus, c'est un terrain agricole qui n'est pas dévolu à l'agriculture. Par conséquent, en déclassant ce terrain-là, on ne rogne pas notre quota de SDA et on ne retire aucune terre à l'agriculture genevoise.

Le deuxième point positif de cette motion, c'est la construction de logements bon marché. Comme je l'ai dit, étant donné que ce terrain ne comprend aucune villa préexistante, le foncier ne se renchérit pas, et on assiste également à l'application de l'article 4A de la LGZD qui oblige la construction d'au moins 50% de logements d'utilité publique; si l'initiative déposée par l'Alternative est acceptée, ce que j'espère, ce sont 80% des logements construits qui pourront être des logements locatifs et répondre aux besoins prépondérants de la population.

De plus, Mesdames et Messieurs les députés, il faut aussi reconnaître que ce terrain se localise à moins de 3,5 kilomètres du centre-ville de Genève. Il est par ailleurs très vaste - 44 hectares - et, en ce sens, c'est une opportunité extrêmement importante pour la construction de logements à Genève. Ce projet propose également un rééquilibrage de l'effort de construction entre les différentes régions de notre canton, notamment s'agissant de la région Arve et Lac qui a relativement peu construit au regard d'autres parties de notre canton ces dernières années. (Brouhaha.)

Cette motion propose aussi une répartition plus équitable de l'espace et du territoire entre nos concitoyens. Aujourd'hui, on observe qu'une majorité de la population s'entasse dans des appartements qui souvent sont petits et ne suffisent pas à répondre à leurs besoins, dans des quartiers fortement densifiés, alors qu'une infime minorité bénéficie de l'utilisation de ce golf pour ses loisirs.

Puis, Mesdames et Messieurs les députés, notre plan directeur cantonal 2030 a effectivement été accepté par Berne, mais avec de très sérieuses réserves, portant notamment sur la préservation des SDA, et ces réserves fédérales sur le plan directeur cantonal risquent de prétériter la réalisation des logements prévus. (Brouhaha.)

Le président. Vous prenez sur le temps du groupe.

Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. Alors effectivement, le département de l'aménagement et du logement effectue un travail d'envergure pour que ces projets du plan directeur cantonal puissent se concrétiser d'ici 2030, mais après ? Que ferons-nous après 2030 ? Les besoins en logement vont perdurer, il faudra continuer à construire du logement. Cela ne va pas s'arrêter en 2030, et comme on aura gratté absolument tout ce qu'on aura pu concernant les SDA, on ne pourra plus du tout construire en zone agricole. Donc, où construire du logement à Genève après 2030 ? C'est une question que nous devons nous poser parce que, comme la «Tribune de Genève» le corrobore dans un article publié ce jour... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et c'est un état de fait que nous connaissions par ailleurs déjà, le manque de constructions de logements préoccupe très fortement nos concitoyennes et concitoyens, et à juste titre: la pénurie de logements crée une situation où beaucoup de familles n'arrivent pas à trouver où se loger sur le canton et souffrent également de l'explosion des loyers ces dernières années. (Remarque.) Cette motion apporte des solutions concrètes pour répondre à ces préoccupations et pour concrétiser la réalisation de logements à Genève.

C'est pour cette raison que le parti socialiste considère qu'il serait outrancier vis-à-vis des préoccupations de la population que de simplement balayer d'un revers de main cette proposition, en se cachant derrière le seul argument qu'il s'agirait d'une provocation politique. Ainsi, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous encourageons à accepter cette motion. Je vous remercie. (Quelques applaudissements. Commentaires.)

M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est un gag ! Nos amis socialistes veulent visiblement mordre dans leur main nourricière ! (Remarque.)

Une voix. Chut !

M. André Pfeffer. Cette main nourricière leur offre l'assistance et les prestations sociales les plus élevées de Suisse et probablement de toute l'Europe. Cette motion est une pure plaisanterie doctrinaire ! Notre canton a le devoir et l'obligation de maintenir les infrastructures et les facilités pour celles et ceux qui paient l'immense majorité de nos impôts et qui permettent à notre Etat de fonctionner. Le golf de Cologny fait partie de ces infrastructures. Quelle ville ou région ne souhaiterait pas accueillir le siège européen des Nations Unies, l'une des plus importantes places financières, une grande quantité de multinationales et une multitude d'acteurs économiques qui, pour beaucoup d'entre eux, possèdent une activité et une réputation mondiales ? Il faut rappeler ce que représente cette prospérité et quels en sont les immenses avantages pour notre population. A Genève, il y a deux postes de travail pour trois habitants; le revenu médian, notamment de la fonction publique, est de 112 000 F par an. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nos voisins français rêveraient d'une telle situation: embourbée dans son chômage, la France a trois fois moins de postes de travail par rapport à sa population. La situation des revenus n'est pas plus enviable en France et y compris en France voisine, située à deux ou trois arrêts TPG, où un instituteur gagne quatre fois moins que son collègue genevois. Cette motion, en plus d'être une attaque contre les ressources de notre population, que le parti socialiste prétend défendre, n'apporterait très probablement pas un seul logement ! (Commentaires.) Non seulement les principaux concernés - la commune est propriétaire du terrain - s'y opposeraient et bloqueraient tout développement, mais en plus les faiblesses du projet, comme l'absence de moyens de l'Etat, l'utilité écologique du site actuel, l'insuffisance des transports et surtout l'impossibilité absolue de déménager le golf sur une autre zone agricole, rendent ce projet totalement utopique. De plus, si cette motion était acceptée, notre plan directeur cantonal 2030 serait remis en question. Ce plan directeur concerne tout de même 55 000 logements. Cette motion, ou encore une fois, ce gag socialiste, serait un autogoal et pénaliserait surtout celles et ceux que le parti socialiste prétend défendre. (Remarque.) Le groupe UDC, par bon sens, et par souci de défendre les intérêts de notre population, refuse cette motion. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. La rapporteure de minorité a posé la question en préambule: «Où construire à Genève ?» Vaste question.

Le président. Pour une minute, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. Mais le message que j'aimerais faire passer aux motionnaires - Monsieur le président, vous leur transmettrez - c'est qu'il faut juste arrêter de s'opposer systématiquement aux surélévations qui constituent une bonne réponse à la crise du logement, et on le verra encore demain au travers de deux pétitions, pour lesquelles le parti socialiste a produit des rapports de minorité, pour justement s'opposer à des surélévations. Alors arrêtez avec vos projets utopiques qui ne servent à rien et arrêtez de vous opposer aux surélévations ! Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, j'ai le plaisir de saluer à la tribune M. Biram Dah Abeid, lauréat du prix 2013 des droits de l'homme des Nations Unies. (Applaudissements.) Nous reprenons notre débat et je cède le micro à Mme la députée Delphine Klopfenstein Broggini.

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a d'une part le golf et d'autre part la rive gauche. Alors que la densification bat son plein sur la rive droite, en particulier à Vernier, une commune qui par ailleurs déguste les nuisances de l'aéroport, vouloir densifier la rive gauche semble ici un juste équilibre. Le territoire genevois est exigu. Chercher à densifier là où l'espace le permet paraît légitime. Oui, le golf de Cologny est idéal, avec ses 44 hectares à proximité immédiate de la ville - pour rappel, le golf ne se situe qu'à 3 kilomètres de la cathédrale, ce qui veut dire à 3 kilomètres de là où nous nous trouvons ce soir. (Commentaires.) A moins de céder une autre parcelle sur cette même rive, c'est-à-dire dans cette même commune ou dans une commune voisine, une parcelle de même taille qui permettrait tout autant de construire des milliers de logements... A cette condition-là, les Verts seraient prêts à troquer le golf. Oui, les Verts veulent densifier la rive gauche, rétablir un juste équilibre entre les rives sur le terrain du golf ou sur toute autre parcelle que vous seriez prêts, ce soir, à nous céder. (Remarque.)

Ensuite, au-delà de la densification, au-delà aussi de la forte symbolique sociale du golf, il convient de rappeler ici l'impact environnemental du golf: il faut savoir que le golf fait partie des sports les plus polluants de la planète. Eh oui ! Placé en tête, juste après le tir ! Polluant, parce que pour entretenir 40, 50, 100 hectares, il faut d'énormes quantités d'eau, d'énormes quantités de pesticides, des engrais, etc., toutes sortes de choses qui font que l'herbe est vert fluo, que les fleurs n'y poussent pas et qu'il n'y a pas l'once d'une mauvaise herbe ou d'une motte de terre. Si vous additionnez tous les golfs de la planète, parce qu'ils sont nombreux, vous aurez besoin de près de 10 milliards de litres d'eau par jour pour les arroser. 10 milliards de litres d'eau par jour, c'est l'équivalent de ce que boit l'ensemble de l'humanité. Bref, face à l'absurdité, face aux dégâts environnementaux et face à ce déséquilibre dans la densification genevoise, les Verts vous invitent à soutenir la motion.

Des voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)

Mme Geneviève Arnold (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion doit être perçue comme une réaction peu raisonnable déposée dans un esprit fâcheux et ne peut pas être prise au sérieux. A l'heure où l'on relève l'importance de la construction de logements, on doit s'intéresser aux bons sites. De nombreuses zones déclassées pour un développement urbanistique privilégiant le logement sont actuellement en attente. Ne pouvons-nous pas veiller plutôt à concrétiser ces projets et à accélérer le mouvement ? Où construire à Genève ? On s'est posé la question. Avant tout en des lieux qui sont prédestinés à ces logements attendus. Doit-on rappeler que les grands projets urbanistiques sont en attente des premiers coups de pioche, alors que les communes ont la volonté d'offrir des logements tant espérés et y travaillent actuellement ? La construction de ces logements-là doit être accélérée. Je citerai bien sûr les Communaux d'Ambilly, les Cherpines, à 5 kilomètres du centre de Genève, si l'on doit parler de proximité - une proximité qui doit aussi être encouragée avec une amélioration de l'offre... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des transports publics - Les Sciers, un quartier qui se situe également à Plan-les-Ouates et qui s'étend sur la commune de Lancy, mais qui attend aussi un développement sur la commune de Plan-les-Ouates. On s'attend en effet à ces développements au cours des prochaines années. Mais revenons aussi à d'autres projets en discussion: les Corbillettes, où on attend aussi des logements, ainsi que dans les communes, où de nombreux sites sont annoncés comme étant en développement. Ne courons pas de multiples lièvres à la fois, mais concrétisons des logements sur les vrais sites. La ville s'étend, certes; le plan directeur cantonal, dans sa version révisée, nous ouvrira d'ailleurs de nouvelles zones.

N'en déplaise au parti socialiste, les terrains du Golf Club de Genève situés sur la commune de Vandoeuvres ne sont pas à vendre et ne sont pas voués à accueillir des logements. Il y a aussi une volonté de démocratisation dans le golf, ce sport qui semble décrié. On a d'ailleurs assisté à l'émergence d'une jeune Genevoise qui s'est distinguée lors des derniers Jeux olympiques de Rio. Notre canton doit aussi reconnaître cela et encourager les nouveaux sports et les nouvelles performances. Le parti démocrate-chrétien vous encourage donc sincèrement à rejeter cette motion et à envisager d'autres solutions.

Une voix. Bravo !

M. Ronald Zacharias (MCG). Chers collègues, les socialistes ont déposé cette motion visant à déclasser le golf de Cologny en terrain à bâtir, zone de développement 3, par pure démagogie, afin de plaire à un électorat fort heureusement en déclin. En s'attaquant au symbole - le golf - la gauche souhaite masquer, cacher le fait que sa politique du logement, qui est celle du Conseil d'Etat par ailleurs... (Commentaires.) ...n'a produit aucun effet positif ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Car, Mesdames et Messieurs les députés, si d'aventure, si seulement, la politique du logement avait amené quelque chose de positif, il n'y aurait eu nul besoin de s'attaquer au symbole. En réalité, les socialistes savent pertinemment que leur proposition de motion n'avait aucune chance d'aboutir et que si, par impossible, elle devait aboutir néanmoins, aucun logement ne serait construit ! Et ce pour cinq raisons essentiellement.

La première, c'est que le plan directeur cantonal 2030 ne prévoit aucune densification. La densification du golf ne fait même pas partie des vingt projets considérés comme prioritaires. (Commentaires.) Deuxièmement, toutes les personnes auditionnées ont mis l'accent sur l'importance du golf pour le rayonnement international de Genève sur les plans politique, économique et financier. Cela constitue un intérêt public, un intérêt général majeur, prépondérant pour le canton. Troisièmement, et en cela, la position des Verts est assez étonnante, les couloirs biologiques... Une ville, ce n'est pas que du béton ! Ce ne sont pas que des barres d'immeubles monotonement alignées, ce sont également des zones vertes, des corridors biologiques, et les collectivités publiques ont précisément signé des accords à cet effet, pour préserver faune et flore. (Commentaires.) Le quatrième argument, et c'est probablement le plus convaincant, c'est que, Mesdames et Messieurs les députés, il y a plus de 3 millions de mètres carrés d'ores et déjà déclassés en zone de développement à Genève, et ce depuis des décennies ! (Remarque.) Des centaines et des centaines de petits propriétaires ont été expropriés d'une partie de leur épargne sans que rien ne soit construit ! Alors, par décence, commençons par construire sur ce qui est déjà déclassé. Enfin, et c'est peut-être également un argument fort, la société immobilière du Golf de Bessinge, propriétaire des deux parcelles de 44 hectares en zone agricole, ne vendra jamais ! Dès lors, il ne restera à l'Etat que la possibilité de l'expropriation, pour la modique somme de 273 millions de francs suisses.

Mesdames et Messieurs les députés, chaque fois que l'Etat est intervenu pour planifier - loi générale sur les zones de développement - et pour contrôler - LGL, LDTR - cela a produit deux effets: d'une part, l'aggravation de la crise du logement, d'autre part, une dégradation des finances publiques. Mesdames et Messieurs, pour que Genève puisse continuer à rayonner, je vous demande de rejeter cette proposition de motion et je vous en remercie. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Christian Dandrès.

M. Christian Dandrès (S). Je vous remercie, Monsieur le président. Je serai assez bref.

Le président. Pour trois minutes, Monsieur le député.

M. Christian Dandrès. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on peut s'étonner d'un tel déferlement de haine à l'égard d'un projet. On l'a rarement vu depuis, je pense, un certain nombre d'années; peut-être qu'on le verra prochainement autour du projet de loi sur les Corbillettes, qui soulève également un certain nombre d'enjeux, j'y reviendrai tout à l'heure.

Mais avant tout, j'aimerais quand même répondre aux arguments avancés. Le PLR et le MCG mobilisent le ban et l'arrière-ban de l'argumentaire, en parlant d'une pratique sportive - parce que c'est cela dont on parle - le golf, comme étant un des piliers de la Genève internationale. (Remarque. Rires.) Le parti socialiste, Mesdames et Messieurs les députés, a une plus haute estime de la Genève internationale ! La Genève internationale, c'est quoi ? Ce sont les Conventions de Genève, les négociations internationales, le travail très important mené par la Confédération et les autorités cantonales, entre autres, pour développer ce secteur autour d'aspects d'aménagement notamment - on a voté encore récemment des projets de lois et des crédits importants à cet effet. Cela, c'est le travail, l'effort fait pour la Genève internationale, pas le golf ! Il faut remettre l'église au milieu du village; il y a une dimension grotesque, je pense, à soutenir un argumentaire aussi ridicule que celui-ci. (Remarque.)

Avec l'UDC, on va encore un pas plus loin: on nous explique que le golf est une pratique relevant quasiment d'un droit fondamental. On s'étonne de ne pas le voir figurer dans la constitution genevoise ! (Rire.) Le golf pour tous, le golf comme étant le pilier de notre Etat républicain ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Très honnêtement, je pense que vous avez dépassé une certaine limite. Il faut vraiment raison garder autour de cette proposition de motion, qui comporte une valeur symbolique très importante, parce qu'elle permet de mettre en avant un certain nombre de problèmes qui traversent ce parlement sur la question du logement. C'est tout d'abord le fait que l'on veut construire et densifier, mais sur des quartiers qui ne sont pas classés en zone villas - c'est le débat sur les Corbillettes: vous allez en effet prochainement en être saisis - on l'a déjà été notamment par une proposition de motion MCG soutenue par le PLR, à travers laquelle on refuse de déclasser un terrain qui pourtant figure au plan directeur cantonal... On a perdu les deux tiers des logements et, à mon avis, le tiers qui reste a du plomb dans l'aile. Ensuite, on écoute l'UDC et le MCG soutenir aujourd'hui le plan directeur cantonal, qu'ils craignent de voir torpillé par cette proposition de motion: vous avez refusé le plan directeur cantonal ! Et même, M. Zacharias, qui a fait preuve d'honnêteté, explique qu'il ne faut pas construire - lisez son blog ! Vous indiquez qu'il ne faut pas davantage de logements, qu'il n'y a pas de crise du logement. Très honnêtement, Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion met en lumière ces paradoxes, et met aussi en lumière le fait que l'on ne construit pas suffisamment sur la rive gauche. C'est la raison pour laquelle le parti socialiste vous invite naturellement à la soutenir.

Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)

M. Pierre Vanek (EAG). Mesdames et Messieurs, je serai bref. Christian Dandrès et d'autres orateurs ont dit avec plus d'intelligence que je ne suis capable d'en mobiliser les choses qu'il fallait dire sur le fond. Bon, j'ajouterai deux ou trois éléments quand même. D'abord, le golf de Cologny comme clef de voûte de la Genève internationale, c'est une plaisanterie, c'est ridicule, elle mérite d'être répétée pour renvoyer ce ridicule à l'auteur de cette absurdité ! Evidemment qu'il faut voter cette motion du parti socialiste, évidemment que c'est une bonne idée de déclasser ce terrain et d'y prévoir la construction de logements. (Commentaires.)

Maintenant, M. Zacharias, qui, comme on le sait, est un modeste locataire... (Le président agite la cloche.) ...avec des revenus et des fortunes modestes et qui est un représentant légitime des milieux populaires, est venu s'exprimer ici en disant que ce vote ne va pas, en évoquant toutes sortes de choses. (Commentaires.) La véhémence avec laquelle il a combattu ce projet m'interpelle, comme m'interpelle aussi le fait que ce projet, qui était au point, je ne sais pas, 50 de l'ordre du jour, soit tout à coup une question urgente: il fallait à tout prix en discuter ! Le PLR, je crois, invité par M. Zacharias à le faire, a proposé l'urgence ! (Remarque.) C'est bien le cas ? (Remarque.) Ou pas - en tout cas, vous avez incité votre parti à voter cette urgence pour faire le procès de cette idée qui est simple: il y a là un terrain qui pourrait être mis au service de la construction de logements répondant aux besoins essentiels de la population.

M. Zacharias a fait le procès, mais un procès un peu incongru, de cette motion, en disant... (Commentaires.) ...d'abord que la politique du logement de ce canton est une politique de gauche menée par un conseiller d'Etat de gauche. On peut constater que ce fait-là n'est strictement pas vrai ! Ce n'est pas vrai ! Il n'y a pas de majorité de gauche dans ce parlement ! Il n'y a pas de majorité de gauche au Conseil d'Etat et il n'y a pas un seul conseiller d'Etat de gauche ! Euh... (L'orateur rit et marque une pause en parcourant du regard le banc du Conseil d'Etat, où seul M. Pierre Maudet siège. Rires. Commentaires.) Bon, le jeune homme qui est assis là peut éventuellement, parce qu'il y a du mouvement sur les rangs de l'Alliance de gauche - on en a vu d'autres qui votaient des choses avec le PLR, etc. - peut venir s'asseoir sur nos bancs, mais enfin, ce n'est pas encore fait, et il n'est pas certain que, même s'il le demande, nous l'acceptions, parce que s'il a des qualités, il a aussi des défauts ! (Rires. Commentaires.) Ensuite, M. Zacharias est venu dire...

Le président. Adressez-vous à la présidence.

M. Pierre Vanek. Monsieur le président...

Le président. Merci !

M. Pierre Vanek. ...M. Zacharias est venu dire... Je m'adressais à l'assemblée, au président ou à l'assemblée, mais je vais m'adresser à vous, parce que je vous aime bien ! (Commentaires.) M. Zacharias est venu faire le procès de cette motion en disant: «Mais elle n'a aucune chance d'être votée !» Enfin bref, il a fait un procès en populisme à cette motion.

Des voix. Ooh ! Non !

M. Pierre Vanek. Vrai ou faux ? Evidemment, vrai ! Alors quand même, Mesdames et Messieurs du MCG - Monsieur le président, vous leur direz de ma part ! - Mesdames et Messieurs du MCG - Monsieur le président, vous leur direz de ma part ! - c'est quand même un peu incongru que vous ayez un multimillionnaire sur vos bancs... (Exclamation.) ...qui entend appuyer le PLR sur toutes sortes de choses et qui a réussi à se faire appuyer pour demander l'urgence sur cette motion, et qui vient faire des procès en populisme à une motion. On peut le dire, mais quand même ! (Commentaires.) C'est une motion qui s'inscrit comme une volonté de donner une réponse...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Pierre Vanek. Oui, j'ai fini ! (Rires. Commentaires.) En trente secondes ! ...comme une volonté de réponse à un besoin prépondérant de la majorité de cet électorat populaire, Mesdames et Messieurs du MCG - Monsieur le président, vous leur transmettrez - que vous prétendez représenter ! (Commentaires.) Alors, avec enthousiasme, contre l'avis de ce parti qui se prétend représentant des citoyens genevois... (Commentaires.)

Le président. C'est terminé, Monsieur le député !

M. Pierre Vanek. ...nous voterons cette motion du parti socialiste. J'en ai fini, Monsieur le président. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

M. Christophe Aumeunier (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, en fait, mon préopinant est tout à fait dans la ligne du dépôt de ce texte: une ligne d'agitation électoraliste, peu sérieuse, provocatrice, qui est l'expression d'une méconnaissance du caractère obligatoire de cette motion, puisque, je le rappelle, contrairement à d'autres, elle a un caractère obligatoire. Le golf est un sport olympique; le golf compte 60 millions de licenciés et, en effet, on vous l'a dit, il y avait une représentante du Golf Club de Genève, Albane Valenzuela, aux Jeux olympiques à Rio. C'est en 1922 que le Golf Club de Genève a été créé par le directeur des Intérêts de Genève et par un cercle de diplomates de la Société des Nations. On trouve là le lien encore existant entre la Genève internationale et le Golf Club de Genève. Actuellement, il est situé à Bessinge et compte 1400 membres, plus les visiteurs, qui jouent au golf. Il est donc très occupé. L'Etat a autorisé il y a deux ans des travaux pour les quarante prochaines années. Ce sont des travaux de rénovation, de réfection du golf qui arrivent à leur terme pour un investissement privé de 9 millions. Cet investissement privé a également fait l'objet de collaborations avec la direction générale de la nature et du paysage pour inventorier les arbres, établir un corridor biologique et renaturer le nant de Bessinge. (Commentaires.)

En définitive, cette motion procède d'un mouvement sectaire. Elle dit: le golf, hors de Genève ! Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, si l'on doit établir la nécessité d'avoir un golf à Genève, on peut dire que c'est utile, parce que cela développe le sport. En outre, et n'en déplaise à certains, on fait des affaires au golf - eh oui, je sais, c'est très méconnu pour la gauche, mais c'est essentiel. On développe aussi du mécénat: le Golf Club est trop modeste à cet égard, il ne voulait pas nous en parler, mais il y a un mécénat très important qui se développe au golf. (Commentaires.) De plus, la Genève internationale, Mesdames et Messieurs les députés, est un secteur anticyclique: aujourd'hui, l'économie ralentit, elle va être obligée de supprimer des emplois, et la Genève internationale a besoin d'un golf. Lorsqu'on se trouve dans une situation de concurrence internationale, regardons un tout petit peu ce qu'il en est: Londres comporte des centaines de golfs, New York comporte des centaines de golfs, Vienne, qui concurrence Genève au niveau international, comporte quatre golfs, La Haye comporte onze golfs, Luxembourg comporte cinq golfs et Songdo... Songdo, cela ne vous rappelle rien ! Songdo, c'est l'électrochoc de la Genève internationale, c'est la ville qui a accueilli le Fonds vert pour le climat et qui comporte un golf pour 65 000 habitants seulement.

Que nous dit AgriGenève face aux tergiversations de l'Alliance de gauche qui soutient que les golfs ne sont pas utiles ? AgriGenève nous dit qu'il y a deux législatures, nous avons adopté une motion pour identifier les zones agricoles enclavées... (Commentaires.) ...et que l'Etat a identifié 1500 hectares de terres agricoles qui ne sont pas cultivées. Non pas 44 hectares ! 1500 hectares de terres agricoles non cultivées qui ne sont pas des SDA, que nous devrions pouvoir déclasser !

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Christophe Aumeunier. Qu'est-ce qui est fait ? Rien n'est fait. Alors le parti libéral vous demande - le parti... (Remarque. Rires. Exclamations.) ...le parti libéral-radical vous demande... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Le parti libéral-radical vous demande de respecter... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Le parti libéral-radical vous demande de respecter le bien-vivre ensemble, de respecter le bon sens et de refuser cette motion. Mais je ne terminerai pas sans ajouter un P.S. bienveillant - un P.S. bienveillant, c'est un peu rêver ici. Un P.S., c'est un post-scriptum: si vous vibrez, Mesdames et Messieurs de gauche, au nom de Manchester, Liverpool, Arsenal, Chelsea, parce que vous aimez le foot... (Commentaires.) ...sachez que c'est la même nation dont font partie ces clubs qui est la nation du golf...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Christophe Aumeunier. ...et vous y viendrez ! (Commentaires.)

Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député François Lefort pour une minute cinquante.

M. François Lefort (Ve). ...six ! Merci, Monsieur le président. J'entends... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le député. (Un instant s'écoule.) Merci. Poursuivez, Monsieur le député.

M. François Lefort. Merci, Monsieur le président. J'entends un promoteur MCG parler de l'aggravation de la crise du logement. Oui, constat partagé ! Je l'entends avec intérêt, alors qu'il a été un artisan du blocage du déclassement des Corbillettes, soit 1200 logements. (Commentaires.) J'entends la liste des projets situés sur les zones déclassées qui sont en attente de construction: les Grands-Esserts, 1200 logements, bloqués par le PLR de Veyrier; MICA, 6000 logements - 6000 logements ! - bloqués par le PLR de Thônex; les Corbillettes, dont je viens de parler, 1200 logements, projet détruit en commission la semaine dernière par le PLR, l'UDC et le MCG ! (Commentaires.) Aujourd'hui, un article dans la «Tribune de Genève» rapportait que le principal désir des Genevois était de se loger... (Commentaires.) ...et que leur principal regret... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...était que cela n'aille pas plus vite ! (Remarque.) Mais, Mesdames et Messieurs, cela ne va pas plus vite, parce que nous avons dans cette enceinte, dans ce parlement, et dans certaines communes, une majorité pour bloquer tous les projets de construction ! Vous transmettrez, Monsieur le président, à cette majorité que ses leçons ce soir sur cette motion sont malvenues, parce que c'est le même outil - une motion impérative - qu'elle a utilisé il y a deux semaines à la commission de l'aménagement pour détruire 1200 logements aux Corbillettes. Voilà ce qu'il faut retenir, Mesdames et Messieurs qui nous écoutez et qui lisez la «Tribune de Genève» comme aujourd'hui ! (Commentaires.) C'est ce qu'il faut retenir ! Ce n'est donc pas du golf que nous parlons ce soir !

Le président. Trente secondes, Monsieur le député.

M. François Lefort. C'est de votre double discours que nous parlons ! Ce double discours contre lequel nous allons voter en acceptant cette motion.

Une voix. Bravo ! (Commentaires continus. Un instant s'écoule.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande un petit peu de calme. Si vous ne vous disciplinez pas, nous n'arriverons pas à 23h. Je passe la parole à M. le député Roger Deneys pour cinquante secondes. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne pense pas que cette motion mérite des propos pareils. Je demande simplement deux choses: d'une part, le vote nominal... (Vifs commentaires.) ...et, d'autre part, que les personnes qui sont touchées par l'article 24 de la LRGC, parce qu'elles ont des liens d'intérêts... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ou qu'elles sont membres du Golf Club, ne participent pas au vote. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Pour le vote nominal, êtes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent. Commentaires.) Très bien, le vote se fera donc à l'appel nominal. Monsieur le député Jean-François Girardet, votre groupe n'a plus de temps de parole. (Commentaires.) C'est valable pour M. Zacharias aussi. (Remarque.) Ah bon, OK ! Je cède le micro à M. le député Eric Stauffer pour deux minutes.

Des voix. Ah ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suis assez horrifié... (Remarque.) Oui, Monsieur Deneys, si vous voulez, je donne quelques cours d'élocution; en ce qui vous concerne, ce sera nécessaire ! (Rire. Commentaires.) Je suis un petit peu horrifié de voir de nouveau le projet de société que nous présente la gauche. (Commentaires.) Donc, évidemment, vous avez comme thème de campagne de faire fuir tous ceux qui paient des impôts, mais moi j'ai la question d'après: quand plus personne ne paiera d'impôts...

Une voix. RIE III ! (Commentaires.)

M. Eric Stauffer. ...à qui allez-vous prendre de l'argent pour faire fonctionner...

Une voix. RIE III ! (Commentaires.)

M. Eric Stauffer. ...tout votre système électoral ? (Remarque.) C'est la vraie question qui se pose ! Parce que, Mesdames et Messieurs, encore une fois, Genève est un pôle d'attraction, Genève attire des gens fortunés, et tant mieux ! Moi, en tant que député, je leur dis merci de venir à Genève, de dépenser à Genève et d'y créer autant d'emplois ! (Commentaires.) Mais à vous écouter, un golf, c'est pour les riches ! Faisons des LUP ! Eh bien, écoutez, moi je vous propose qu'on fasse un amendement et on met tout Genève en LUP, on vire toutes les multinationales, on fixe les impôts à 45% pour les sociétés et 60% pour les privés, comme en France, et ça devient confiscatoire... (Commentaires.)

Le président. Trente secondes, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. Je conclurai dans les trente secondes. ...et finalement, vous aurez une Genève pauvre, qui ne fera que du social, et les gens partiront ! Voilà le modèle de société que nous présente la gauche aujourd'hui ! (Vive remarque.) Mais, Mesdames et Messieurs, vous êtes simplement pitoyables... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...devant les citoyens ! Laissez faire ceux qui arrivent à faire de Genève un canton d'excellence avec une renommée internationale ! (Commentaires.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à Mme le rapporteur de minorité Caroline Marti pour une minute.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Très rapidement, je vais répondre à deux points soulevés par les opposants à cette motion. En premier lieu, je vais simplement répondre à M. Zacharias, qui vantait le corridor biologique que constitue ce golf - vous lui transmettrez, Monsieur le président - par ce que nous a dit le directeur général de la nature et du paysage en commission, et je reprends ses termes: s'il devait effectuer une comparaison, le golf de Cologny est moins intéressant sur le plan de la faune et de la flore que l'aéroport de Genève. (Commentaires.) Ensuite, je répondrai à MM. Stauffer et Pfeffer qui voient déjà une fuite... (Commentaires. Un instant s'écoule. Le président agite la cloche.)

Le président. Poursuivez, Madame la rapporteure.

Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. Pour ceux qui voient déjà une fuite des excellents contribuables suite à la fermeture du golf, j'aimerais simplement leur signifier que leur argument ne tient pas la route: si on pousse la logique un peu plus loin, il faudrait construire des pistes de ski sur le territoire cantonal pour éviter que les grands contribuables ne partent s'établir en Valais, ou qu'on chauffe le Léman à 32 degrés pour éviter qu'ils ne partent aux Bahamas. Cela n'a absolument aucun sens ! Votre argumentation ne tient pas la route et n'a qu'un seul but: protéger les privilèges de quelques-uns... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...au détriment des besoins de l'immense majorité de la population, c'est-à-dire les besoins en logement. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur le député Stauffer, vous n'avez plus la parole, je suis désolé !

M. Eric Stauffer. Il me restait cinq secondes !

Le président. Non, vous étiez au bout quand j'ai coupé. Bien, Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous fais maintenant voter sur cette proposition de motion 2265.

Une voix. Faut sonner !

Le président.  Ça a été fait ! Le vote est lancé.

Mise aux voix, la proposition de motion 2265 est rejetée par 61 non contre 28 oui et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Vote nominal

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de reprendre notre ordre du jour ordinaire, je suspends la séance dix minutes. Je demande aux huissiers d'ouvrir les fenêtres.

La séance est suspendue à 21h20.

La séance est reprise à 21h29.

PL 11733-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Cyril Mizrahi, Jocelyne Haller, Jean-Marie Voumard, Emilie Flamand-Lew, Bernhard Riedweg, Sophie Forster Carbonnier, Lydia Schneider Hausser, Salima Moyard, Jean-Charles Rielle, Sandro Pistis, Christian Frey, Henry Rappaz, Alberto Velasco, Daniel Sormanni, Jean-François Girardet, Christian Flury, Pascal Spuhler, Thierry Cerutti, Florian Gander, Magali Orsini, François Lefort, Francisco Valentin, Frédérique Perler, Boris Calame, Jean-Michel Bugnion, Lisa Mazzone, Nicole Valiquer Grecuccio, Roger Deneys, François Baertschi modifiant la loi d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile (LaCC) (E 1 05) (Pour un accès facilité des consommatrices et consommateurs à la justice)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 2 et 3 juin 2016.
Rapport de majorité de Mme Irène Buche (S)
Rapport de première minorité de M. Murat Julian Alder (PLR)
Rapport de deuxième minorité de M. Bernhard Riedweg (UDC)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha. Commentaires.) Monsieur Vanek ! Monsieur Vanek, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) Merci. Mesdames et Messieurs, nous reprenons notre ordre du jour ordinaire avec le PL 11733-A que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de Mme Irène Buche, celui de première minorité de M. Murat Julian Alder, remplacé par Mme Nathalie Fontanet, et le rapporteur de seconde minorité est M. Bernhard Riedweg. Madame Buche, je vous passe la parole.

Mme Irène Buche (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, qui a été déposé par des députés de cinq groupes de ce parlement, vise à faciliter l'accès à la justice pour les consommateurs dans le cadre des litiges de consommation visés à l'article 32 du code de procédure civile. Qu'est-ce qu'un contrat de consommation ? Il s'agit d'un contrat «portant sur une prestation de consommation courante destinée aux besoins personnels ou familiaux du consommateur et qui a été offerte par l'autre partie dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale». On voit que la notion de litige de consommation est clairement définie par la loi et, de surcroît, précisée par la jurisprudence. En ce qui concerne la valeur litigieuse - c'est-à-dire la valeur litigieuse maximale pour qu'on parle d'un contrat de consommation ou d'un litige de consommation - il est admis par la jurisprudence qu'elle se situe en principe à 30 000 F, ce qui correspond d'ailleurs à la valeur maximale dans la procédure simplifiée.

Le premier but de ce projet de loi est de ne plus exiger du justiciable le paiement des frais judiciaires ni de condamner la partie qui perd à payer les honoraires d'avocat de l'autre partie, à l'instar de ce qui se pratique de longue date au Tribunal des baux et loyers. Le second but, qui est le pendant du premier, est de faire office de levier pour rééquilibrer les rapports entre les entreprises et les consommateurs, ceux-ci étant très généralement la partie faible au contrat. Il s'agit ainsi de faciliter le règlement des différends en amont. En effet, si une entreprise sait que le consommateur a les moyens de saisir la justice parce que l'accès en est facilité, elle acceptera plus facilement de discuter et d'essayer de trouver une solution négociée. Actuellement, une telle entreprise n'est pas incitée à le faire car elle sait que le consommateur avec lequel elle est en litige ne saisira en principe pas la justice faute de moyens.

Durant les débats en commission, plusieurs questions ont été discutées, notamment la notion de litige de consommation, dont je viens de vous parler, la nature des frais faisant l'objet de l'exemption - frais judiciaires et/ou dépens - et la question de la valeur litigieuse. Certains commissaires ont relevé que le consommateur serait davantage dissuadé par les honoraires de son propre avocat que par les frais de justice, d'autres se sont inquiétés de l'augmentation possible du nombre de procédures après l'adoption de cette loi et du coût supplémentaire que cela représenterait pour la justice. Différents amendements ont été proposés, mais qui ont tous été refusés; finalement, le projet de loi a été voté dans sa forme initiale.

Lors des auditions, tant la FRC que l'Ordre des avocats et l'Association des juristes progressistes se sont déclarés favorables à ce projet de loi car il permet de faciliter l'accès à la justice tout en favorisant la négociation et la médiation en amont. Ils ont tous déclaré que ce projet de loi ne devrait pas surcharger les tribunaux puisqu'il s'agit justement de renforcer la position du consommateur pour lui donner les moyens de négocier avec l'entreprise avant une procédure, qui doit être l'ultima ratio. Quant au pouvoir judiciaire, il a certes exprimé sa crainte de voir le nombre de procédures augmenter, mais a également reconnu que les litiges actuels ne représentent qu'une infime minorité de l'ensemble des litiges pendants devant le pouvoir judiciaire. A cet égard, il a d'ailleurs été relevé par d'autres auditionnés que la juridiction des baux et loyers n'avait pas connu de hausse du nombre de procédures après l'introduction de la gratuité.

A plusieurs reprises, la minorité a déclaré que ce projet de loi manquait sa cible, notamment...

Le président. Il vous reste trente secondes, Madame le rapporteur, ou vous prenez sur le temps de votre groupe.

Mme Irène Buche. Merci. ...parce que les honoraires d'avocat à la charge du consommateur sont la principale entrave à l'accès à la justice. Or il faut rappeler que tout justiciable peut saisir la justice sans être assisté d'un avocat pour autant qu'il dispose de formulaires ad hoc fournis par le pouvoir judiciaire et puisse bénéficier de conseils d'un organisme tel que la FRC. Ce n'est donc pas un obstacle, et la majorité vous invite à voter ce projet de loi tel que sorti de commission. Je vous remercie.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de première minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, j'excuse une fois encore l'absence de M. Alder, retenu pour son devoir militaire, et reprends son excellent rapport de minorité. La première minorité n'est pas favorable à ce projet de loi pour les motifs suivants: le but de ce texte est de soumettre les litiges qui concernent le droit de la consommation aux mêmes règles, en matière de frais de justice, que celles applicables aux causes soumises à la juridiction des baux et loyers, soit la gratuité totale. Or les causes en matière de baux et loyers sont facilement identifiables; il n'en va malheureusement pas de même des contrats à la consommation qui, contrairement aux autres contrats, ne sont pas réglés par le code des obligations. Il s'agit d'une notion sans cesse en évolution et dont la jurisprudence est mouvante. Ainsi, la question de savoir si un cas soumis au tribunal pourra être considéré comme un contrat à la consommation devra sans aucun doute être tranchée au préalable par le tribunal, avant même qu'il ne puisse se déterminer sur le fond. Cela ne manquera pas de surcharger inutilement le Tribunal de première instance, et cette crainte a d'ailleurs été confirmée par la présidente dudit tribunal.

Par ailleurs, ce projet n'améliorera en rien l'accès des consommateurs à la justice. En effet, en cas de litige entre un consommateur et sa partie adverse, ce n'est en règle générale pas l'avance de frais judiciaires qui décourage le consommateur, mais plutôt les honoraires d'avocat. Dans la plupart des cas, ceux-ci sont plus élevés que les frais de justice, et comme la question de savoir si le litige concerne bien un contrat de consommation devra être tranchée au préalable et nécessitera sans aucun doute une prestation supplémentaire de l'avocat, cela ne manquera pas de les augmenter encore.

Troisièmement, il n'est pas soutenable de mettre sur le même pied les litiges à la consommation et ceux en matière de baux et loyers ou des prud'hommes, qui nécessitent une défense accrue et impliquent une protection sociale. L'exemption des frais doit être réservée à ces litiges particuliers; comparer les conséquences d'un licenciement avec effet immédiat ou la résiliation d'un bail d'une famille avec celle d'un litige à la consommation n'est pas défendable. Partant, leur appliquer la même gratuité n'a pas de sens. Au vu de ce qui précède, la première minorité vous invite à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi qui rate sa cible, qui aura pour effet d'encombrer les tribunaux, qui ne remédiera en rien à la question centrale des honoraires d'avocat et qui vise à traiter de la même façon des causes qui n'ont rien de semblable et qui ne sont en aucun cas touchées... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...par les mêmes besoins de protection sociale.

Cela étant, Mesdames et Messieurs, si la majorité de ce parlement devait accepter l'entrée en matière, la première minorité vous soumettra un amendement visant à clarifier le montant de la valeur litigieuse, lequel n'est pas prévu expressément à l'article 22, alinéa 5, ce qui a d'ailleurs été relevé et regretté par l'Ordre des avocats. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) La minorité souhaite en effet limiter à 10 000 F le montant de la valeur litigieuse prise en compte pour l'exemption des frais. Il est notoire que les consommateurs qui hésitent le plus à agir en justice sont ceux qui ont des litiges portant sur de très faibles montants. Ce sont ces derniers qu'il convient de défendre davantage, si nous devons décider de protéger les consommateurs. Mesdames et Messieurs...

Le président. Vous prenez sur le temps du groupe, Madame.

Mme Nathalie Fontanet. Eh bien non, j'ai terminé ! ...la minorité vous recommande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi.

M. Bernhard Riedweg (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Après les rapporteurs de majorité et de première minorité, que peut-on encore dire pour intéresser les députés ? Ce projet de loi a fait l'objet d'un débat essentiellement entre avocats - qui sont au nombre de cinq au sein de la commission judiciaire et de la police - mais les autres commissaires n'ont pas démérité pour autant. La question de l'accès à la justice est avant tout politique. En 2014, le nombre de procédures ayant trait à un contrat de consommation à Genève s'élevait à environ 250. Les représentants du pouvoir judiciaire nous ont dit qu'en règle générale, les tarifs appliqués dans le canton de Genève étaient reconnus comme favorables pour celui ou celle qui intente l'action, si on compare les tarifs entre cantons. A ce jour, aucun canton n'a introduit la gratuité des litiges en matière de consommation.

En ce qui concerne le projet de loi, la conciliation ou la médiation seraient un bon remède avant le dépôt d'une demande en paiement devant le tribunal, et en cas d'échec d'une médiation, le requérant pourrait s'adresser à un tribunal lui assurant l'accessibilité au système judiciaire. Rendre gratuit le traitement judiciaire des litiges de consommation représente une discrimination vis-à-vis des autres utilisateurs de la justice car c'est le contribuable qui sera sollicité pour payer les frais de justice du consommateur lésé, ce qui n'est pas correct. Il faut savoir que la gratuité des frais de justice entraînera des interpellations de la justice... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...plus fréquentes pour les litiges de consommation et augmentera ainsi le nombre de procédures, ce qui impliquera une dotation financière supplémentaire pour les tribunaux. Il n'y a pas lieu de banaliser les recours à la justice, qui sont déjà excessifs dans certains domaines.

Si le consommateur lésé est impécunieux, il peut toujours bénéficier de l'assistance juridique civile, laquelle est d'ailleurs sollicitée à hauteur de 10 millions par année dans notre canton. La conception prévalant en Suisse est que le coût d'un procès doit en principe être assumé par les parties en présence et non collectivisé dans le cadre de procédures gratuites financées par le contribuable. Intenter une action en justice est un choix qui doit être financé à l'entrée de la procédure par la personne ayant pris la décision d'agir. Notre parti estime que les frais de justice doivent être une aide à la réflexion avant d'agir devant un tribunal. Enfin, pour que le consommateur s'autoprotège, il y a une solution toute prête, à savoir les assurances de protection juridique, qui peuvent aussi faciliter l'accès à la justice. Sur la base de ces arguments, l'Union démocratique du centre vous demande de ne pas accepter ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, chers députés, le groupe Ensemble à Gauche soutient résolument l'idée que l'accès à la justice pour les consommatrices et les consommateurs, une catégorie dont nous faisons toutes et tous partie, doit être libre de toute entrave. Il est en effet très difficile aujourd'hui d'obtenir justice contre une société ou une entreprise dans les cas où un contrat n'est pas respecté. En effet, les frais de procédure judiciaire et les honoraires d'avocat en vue d'introduire une cause puis d'aller ensuite en conciliation représentent une dépense qui dissuade généralement les consommatrices et les consommateurs de déposer plainte.

Nous avons écouté et entendu les observations et les recommandations de la Fédération romande des consommateurs, de l'Ordre des avocats et de l'Association des juristes progressistes, qui ont tous préconisé la procédure simplifiée pour des litiges qui ne dépasseraient pas un montant de 30 000 F, voire l'introduction de la gratuité. A contrario, le pouvoir judiciaire, qui considère que la gratuité occasionnerait des frais de procédure supplémentaires et un encombrement administratif au Tribunal de première instance, a quant à lui manifesté quelques réticences - pour ne pas dire une opposition - vis-à-vis de ce projet de loi.

Cela étant, après avoir bien débattu notamment de la procédure simplifiée et risqué quelques amendements proposés par notre collègue Cyril Mizrahi, nous en sommes revenus au projet initial qui nous apparaît comme plus simple et plus explicite. Ce projet, je vous le rappelle, consiste à introduire un nouvel article 22, alinéa 5, de la loi d'application du code civil suisse stipulant: «Il n'est pas prélevé de frais pour les litiges concernant les contrats conclus avec les consommateurs.» On ne saurait être plus clair, et je vous invite par conséquent à le soutenir.

M. Vincent Maitre (PDC). Ce projet de loi part d'un bon sentiment mais rate malheureusement sa cible parce qu'il heurte foncièrement le sentiment de justice et d'équité, et je m'adresse à cet égard plus particulièrement aux membres d'Ensemble à Gauche et du MCG, que je sais sensibles à cette problématique, à ce sentiment de justice. Pourquoi est-ce qu'il heurte la justice et le sentiment d'équité ? Tout simplement parce que le code de procédure civile permet aujourd'hui à un justiciable qui se serait fait flouer et qui obtient gain de cause devant les tribunaux de mettre à charge de sa partie adverse - la partie dite succombante - l'entier de ses frais judiciaires et d'avocat.

Avec ce projet de loi, ce ne serait plus possible. Résultat des courses: le consommateur qui saisirait... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...la justice pour un montant relativement modique, quand bien même il obtiendrait gain de cause, se verrait malgré tout contraint de payer ses honoraires d'avocat qui, eux, pourraient se révéler largement supérieurs à la valeur litigieuse. Ainsi, il n'aura probablement que faire d'avoir gagné devant les juridictions civiles si cela lui coûte au final plus cher que s'il n'avait pas engagé d'action en justice. C'est en ce sens-là que ce projet de loi est mauvais et qu'il prétérite la situation des consommateurs à la faveur de commerçants qui, eux, auront financièrement les reins bien plus solides pour supporter un procès et ses coûts. Pour cette simple raison et au-delà de celles éminemment justes et pertinentes évoquées par les deux rapporteurs de minorité, je vous encourage à refuser ce projet de loi.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et donne la parole à M. Eric Stauffer pour deux minutes.

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut pas se voiler la face: si ce projet de loi était accepté aujourd'hui, il créerait un engorgement voire une explosion des procédures par-devant les tribunaux. J'aimerais vous rappeler qu'il existe déjà un office de l'Etat, soit le greffe de l'assistance juridique, qui peut être sollicité quand un contribuable n'a pas les moyens de payer les frais d'introduction et de procédure; l'Etat se substitue alors à ce contribuable qui n'a pas suffisamment de moyens... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il y a donc déjà un filtre.

Imaginez, par impossible, qu'une majorité de ce parlement vienne à voter ce projet de loi ce soir: on va se retrouver avec des centaines de procédures ! M. Dupont des Eaux-Vives, par exemple, aura acheté une machine à laver à crédit - c'est un contrat à la consommation - puis provoqué une inondation mais il va dire: «Non, ce n'est pas ma faute, ce n'est pas moi qui ai mal branché le tuyau, c'est la faute de celui qui me l'a vendue.» Avec la procédure simplifiée, ça va arriver au tribunal et il n'y aura évidemment personne pour lui dire, comme le fait aujourd'hui l'assistance juridique, qu'il ne gagnera pas en procédure. Voilà ce que vous êtes en train de proposer aujourd'hui.

Je vous le dis: le greffe de l'assistance juridique reçoit des centaines de cas par année de contribuables qui n'ont pas les moyens de payer les frais d'introduction. A quoi jouez-vous ce soir, Mesdames et Messieurs ? A être plus royalistes que le roi en voulant augmenter le nombre de procédures ? Et quand il faudra voter les augmentations de budget pour la justice, vous direz: «Non, non, surtout pas !»

M. Cyril Mizrahi. On les votera !

M. Eric Stauffer. Oui, vous les voterez ! Je vous prends au mot, Monsieur Mizrahi, parce que vous avez déjà failli à votre parole bien des fois depuis que je siège dans ce parlement, mais évidemment... (Remarque.)

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. Je vais conclure ! ...c'est évidemment l'apanage de la gauche de raconter tout et son contraire.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons entendu plein d'experts, vous savez ce que l'UDC votera. Comme l'a dit notre rapporteur de deuxième minorité, c'était un débat vraiment technique, un débat d'avocats - M. Maitre vient de nous en faire une brillante démonstration. En ce qui me concerne, j'aimerais ramener la discussion sur quelque chose qui est en définitive l'un des fondements essentiels de la politique de l'UDC, à savoir la responsabilité personnelle. Mesdames et Messieurs, doit-on toujours donner à d'autres la responsabilité de résoudre nos problèmes parce que nous n'avons pas été capables de nous en occuper suffisamment tôt ? C'est sur cet aspect que j'aimerais insister. L'excellent rapport de première minorité de M. Murat, avocat, cite l'article 22 qui contient déjà toute une liste de gratuités, de cas où on ne paie pas de frais. On est un peu dans cette dynamique maintenant: faites n'importe quoi, achetez n'importe comment, ce n'est pas grave car la justice viendra derrière pour rectifier votre erreur, votre omission ou votre manque d'attention; et là, on entre dans le problème des frais.

Vous connaissez tous la problématique, l'engorgement des tribunaux; en commission, ceux qui jugent les premiers, soit les présidents de tribunaux, nous ont dit que ce projet n'était pas forcément nécessaire parce qu'il existe plein d'autres moyens pour engager une procédure et surtout parce que ça les surchargerait de travail. Mesdames et Messieurs les députés, il y a un moment où il faut arrêter de dire: «Demain, on rase gratis.» Non, on ne rase pas gratis ! La première chose à faire, avant d'en arriver à ces frais, c'est de nous montrer responsables et de déterminer si nous faisons le bon choix, si nous nous sommes assurés d'un minimum de précautions avant d'acheter - parce qu'on est bien en train de parler de petits biens de consommation, on n'est pas en train de jouer à la bourse, pour autant qu'on le puisse. Mesdames et Messieurs les députés, très sincèrement, en raison de la responsabilité individuelle, le groupe UDC vous demande de refuser ce projet de loi.

M. Pierre Conne (PLR). J'aimerais juste revenir au libellé de la loi. Que propose-t-elle ? «Il n'est pas prélevé de frais pour les litiges concernant les contrats conclus avec les consommateurs.» Et de quoi s'agit-il en fait ? «Sont réputés contrats conclus avec des consommateurs les contrats portant sur une prestation de consommation courante destinée aux besoins personnels ou familiaux [...]». On parle là vraiment de prestations, d'échanges de biens et de services qui ne sont pas essentiels. Voilà, c'était pour recadrer le contenu.

Maintenant, j'aimerais vous citer une phrase de la juriste de la FRC qui, dans le cadre de son audition relatée dans le rapport de majorité, «signale que la plupart des plaintes liées aux télécoms sont effectivement résolues par l'ombudsman, qui se nomme ombudscom. Une grande majorité des plaintes sont de cette nature. Elle confirme que la plupart des personnes n'iront pas en justice, même si certains frais ne seront plus à payer grâce au PL». Je pense qu'on ne peut pas être plus clair. D'entrée de cause, la FRC soutenait ce PL pour des raisons théoriques ou idéologiques et nous disait qu'il s'agissait d'une bonne idée. Or quand on pousse la problématique jusqu'au bout, on s'aperçoit que ce projet de loi concerne des prestations précises, essentiellement liées à des conflits avec les opérateurs téléphoniques et réglées par médiation avec l'ombudscom. Il n'y a donc aucune opportunité de légiférer sur ce point, je pense qu'il faut en être bien conscient.

Partant, est-ce qu'il vaut la peine de faire des lois qui ne servent à rien ? Parce qu'à partir du moment où une nouvelle loi existe, elle sera peut-être médiatisée, et on dira aux gens: «Allez en justice, c'est gratuit, vous pourrez attaquer le vendeur ou le prestataire !» A ce moment-là, on va tomber dans la situation qui nous a été bien décrite par la présidente du Tribunal de première instance, à savoir que ça va encombrer le tribunal et retarder les procédures. Et, à la sortie, l'intéressé qui aura confondu frais de justice et honoraires d'avocat se rendra compte que ce sera le même prix pour sa poche ! C'est donc de l'esbroufe, pour ne pas dire de l'escroquerie, alors ne vous laissez pas avoir et refusez ce PL. Je vous remercie.

Une voix. Très bien, bravo !

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, au nom du groupe socialiste, j'aimerais revenir sur quelques contrevérités qu'on a entendues ainsi que sur certains arguments qui ont été énoncés mais qui n'en sont pas, et je commencerai par la fin. Tout d'abord, de manière générale, on ne peut pas nous dire que ce projet va entraîner un total engorgement des tribunaux et, en même temps, qu'il est complètement inutile, que personne ne va utiliser cette voie mais que les personnes qui n'utiliseront pas cette voie vont quand même se faire gruger. Tout ça est passablement contradictoire ! M. Conne nous cite de manière un peu tronquée les propos de la représentante de la FRC qui, je me plais d'ailleurs à le souligner, est issue de vos rangs - on voit donc que des gens du PLR très raisonnables soutiennent en réalité ce projet de loi ! Vous nous citez uniquement, Monsieur Conne - vous transmettrez, Monsieur le président - l'exemple du téléphone alors que de nombreux autres exemples ont été cités en commission - je vous invite à relire le rapport - et qu'il n'existe pas d'ombudsman dans toutes les branches ! Il y en a un pour le téléphone, oui, mais pas pour d'autres domaines.

Ce qu'on veut faire, c'est précisément encourager les grandes entreprises peu scrupuleuses - je ne dis pas que toutes les entreprises sont peu scrupuleuses, mais certaines le sont - à l'être un peu plus grâce à cet instrument qui permettra de rendre réellement accessible au consommateur la menace sérieuse d'une action en justice. Aujourd'hui, on nous dit que le système qu'on essaie de mettre en place sera quasiment au désavantage du consommateur alors qu'en réalité, ce système fonctionne très bien au Tribunal des baux et loyers. Pourquoi ? Parce qu'il protège à la fois les locataires s'agissant des frais d'introduction mais également contre le risque. Or c'est justement ça qui décourage le plus les personnes à agir en justice, c'est le risque de devoir payer les frais d'avocat astronomiques de la partie adverse qui a bien évidemment beaucoup plus de moyens.

Mais les avocats n'ont pas le monopole de la justice et, ainsi que l'a souligné Mme Buche, des formulaires sont mis à disposition au TBL, le droit fédéral le permet et donc on peut tout à fait mettre à disposition ces formulaires qui permettront aux gens d'agir par eux-mêmes, le cas échéant avec les conseils de la Fédération romande des consommateurs. Contrairement à ce qui a été dit, il s'agit d'une définition extrêmement claire qui fait référence à la consommation courante, on n'est pas en train de parler de caprices de bobo ou de je ne sais quoi, de biens de luxe; on est en train de parler de la consommation courante qui nous concerne tous. Certes, il y a l'assistance juridique, à la bonne heure ! Mais les conditions sont de plus en plus restrictives...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Cyril Mizrahi. Merci, Monsieur le président. ...et ceux qui trinquent sont évidemment ceux qui ont de petits revenus, qui gagnent juste un petit peu trop pour bénéficier de l'assistance juridique mais certainement pas assez pour faire le poids face à de grandes entreprises peu scrupuleuses. Finalement, les entreprises en général ont tout à gagner avec ce projet de loi qui rétablit une concurrence saine en sanctionnant celles qui ne jouent pas le jeu. Enfin...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Cyril Mizrahi. D'accord, Monsieur le président. Je vous encourage, Mesdames et Messieurs, à voter ce projet de loi.

M. François Baertschi (MCG). Je rencontre fréquemment des justiciables qui dépensent des sommes considérables pour des procédures en justice, qu'il s'agisse de frais de justice, de frais de greffe, de frais d'avocat - il faut bien que les avocats soient payés pour leur travail. Tout ce qu'on peut faire en faveur des personnes modestes qui n'ont pas beaucoup de moyens et qui se trouvent confrontées à la justice doit être fait. En effet, quand on se place du côté du justiciable, on se rend compte qu'il n'est pas toujours dans une position favorable.

Parlons des consommateurs: eux aussi se retrouvent face à des intérêts gigantesques, face à des entreprises aux moyens considérables, qui ont des lobbys présents au niveau politique, particulièrement dans la Berne fédérale - on sait le poids de certains lobbys, je ne vais pas revenir là-dessus. Quand on connaît la faiblesse des consommateurs, je pense qu'il est juste de leur donner des droits et donc de leur assurer la gratuité des frais de justice, comme ça a été fait pour les locataires, à raison, comme ça a été fait aussi pour les bénéficiaires d'assurances sociales.

Ce n'est que justice, ce n'est qu'intelligence de ne pas vouloir alourdir le budget des Genevois, qui sont déjà dépouillés au quotidien par l'assurance-maladie... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...par les émoluments des amendes, par le montant scandaleux des amendes. (Commentaires.) Les gens se retrouvent dans des situations où ils n'arrivent plus à boucler leurs fins de mois et, en plus, on veut les empêcher de défendre leurs droits légitimes en agissant sur leur porte-monnaie ? C'est particulièrement lâche et scandaleux, je vous demande donc de soutenir cette loi. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Les rapporteurs souhaitent-ils encore s'exprimer ? (Remarques.) Ce n'est pas le cas, alors je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet. (Brouhaha.) Un instant, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) Merci. Vous avez la parole, Monsieur le conseiller d'Etat.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat s'est montré particulièrement circonspect dans l'étude de ce projet de loi. Il n'a d'ailleurs pas été auditionné, considérant que la question de l'accès à la justice est fondamentalement politique - je reprends ici les propos du représentant du pouvoir judiciaire qui, lui, a été auditionné - et qu'il appartient au législateur de se prononcer là-dessus. Nous sommes restés en retrait, nous avons écouté avec attention le débat de ce soir mais il nous importe, à nous, le Conseil d'Etat, d'attirer votre attention sur trois éléments.

Tout d'abord, sachez que nous avons comme vous à coeur de faire en sorte que l'accès à la justice soit un droit, mais un droit fondé sur des critères. Si l'on se réfère, comme le veut le projet de loi, à la nature de la procédure et que l'on octroie la gratuité à son accès indifféremment du revenu, nous pensons que nous allons très loin et que cela aura, Mesdames et Messieurs, des conséquences financières. Si, en revanche, on se penche sur la situation personnelle du requérant et que l'on consacre l'idée que l'on ne doit pas entraver quelqu'un qui n'en a pas les moyens dans sa capacité à recourir en justice, alors là nous pensons que cela en vaut la peine, mais ce n'est pas ce que propose ce projet de loi; ce projet de loi est profondément lié à la nature de la demande, et tout litige dans le domaine de la consommation se verrait ainsi octroyer une forme de gratuité.

S'agissant des baux et loyers - puisque c'est ce qui apparaît en arrière-fond du débat - la situation est totalement différente. En effet, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation de pénurie d'appartements; on peut tout à fait imaginer qu'une pression s'exerce sur le requérant et que, dans ce cas-là, oui, la gratuité soit fondée - il ne s'agit évidemment pas de la remettre en cause à travers ce projet de loi. Mais nous ne pouvons pas comparer des litiges dans le domaine de la consommation avec des litiges dans le domaine des baux et loyers.

La troisième considération, celle qui fonde principalement cette intervention, est relative aux finances publiques. Tout comme vous, nous sommes soucieux de ne pas voir les frais d'assistance judiciaire augmenter par trop, ils vont déjà s'accroître sensiblement l'année prochaine en raison de l'expulsion judiciaire, une nouveauté introduite en droit fédéral, consacrée par la population lors du vote d'une initiative en 2010, qui a trouvé un écho dans l'initiative dite de mise en oeuvre de 2016. L'année prochaine déjà, nous allons donc connaître une hausse substantielle des frais d'assistance juridique; nous ne pouvons pas cautionner, Mesdames et Messieurs les députés - il appartient en principe au Conseil d'Etat de fixer les montants et les tarifs - cette augmentation supplémentaire.

C'est la raison pour laquelle, malgré la circonspection de circonstance sur ce projet de loi, nous vous invitons vivement à le rejeter ou à tout le moins à le renvoyer en commission pour l'amender et l'adapter non pas en fonction de la nature du litige mais en fonction de la situation du requérant, comme c'est le cas par ailleurs dans le domaine des baux et loyers. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir vous prononcer sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11733 est adopté en premier débat par 48 oui contre 44 non.

Deuxième débat

Le président. Monsieur Stauffer, vous avez la parole.

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Au vu de la demande émise par M. le conseiller d'Etat, je sollicite le renvoi en commission.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et ouvre le scrutin sur cette requête.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11733 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 48 non contre 46 oui.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article 22, nous sommes saisis d'un amendement présenté par Mme Nathalie Fontanet, consistant à modifier l'alinéa 5 comme suit:

«Art. 22, al. 5 (nouvelle teneur)

5 Il n'est pas prélevé de frais pour les litiges concernant les contrats conclus avec les consommateurs dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 10 000 F.»

Madame Fontanet, c'est à vous.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de première minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Ainsi que je l'ai indiqué tout à l'heure, l'Ordre des avocats a déploré le manque de clarté s'agissant de la valeur litigieuse, c'est-à-dire le montant sur lequel se rapportent les litiges à la consommation. Nous avons également entendu le fait que, bien souvent, les litiges en question portaient sur des marchandises de faible valeur, et ce sont donc ces personnes concernées qui doivent pouvoir aller devant la justice parce qu'elles se trouvent généralement face à de très grosses entreprises ou entités professionnelles. Aussi, nous proposons un amendement visant à limiter la valeur litigieuse à 10 000 F. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Mizrahi, je suis désolé mais vous n'avez plus de temps de parole. Je passe le micro à Mme Irène Buche.

Mme Irène Buche (S), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Pour notre part, nous vous invitons à refuser cet amendement qui n'est pas conforme à l'esprit de la loi ni à la notion de litige de consommation. Comme je vous l'ai expliqué tout à l'heure, l'article 32 CPC définit bien ce qu'est un contrat de consommation tandis que la jurisprudence a fixé une limite maximum à la valeur litigieuse pour la procédure simplifiée, il n'y a donc aucune raison que nous acceptions une valeur litigieuse inférieure à 30 000 F. Je vous remercie.

M. Bernhard Riedweg (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Une courte intervention, Mesdames et Messieurs: le rapporteur de deuxième minorité vous demande d'accepter cet amendement du PLR. Merci.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur... (Remarque.) Monsieur Deneys, s'il vous plaît ! J'invite maintenant l'assemblée à voter sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 45 oui.

Mis aux voix, l'art. 22, al. 5 (nouveau) est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Le président. Madame Buche, souhaitez-vous vous exprimer ?

Mme Irène Buche. Non, je me suis trompée, Monsieur le président, excusez-moi.

Le président. D'accord. Et vous, Monsieur Romain ?

M. Jean Romain (PLR). Oui, Monsieur le président, merci. Etant donné que notre amendement n'a pas passé la rampe, le PLR sollicite à son tour le renvoi en commission.

Des voix. Non !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix votre demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11733 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 50 non contre 45 oui.

Troisième débat

La loi 11733 est adoptée article par article en troisième débat.

Le président. Pour terminer, je lance le vote d'ensemble...

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, c'est le cas.

Mise aux voix, la loi 11733 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 49 oui contre 45 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Loi 11733 Vote nominal

PL 11873-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ) (E 2 05) (Composition du conseil supérieur de la magistrature)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 3 et 4 novembre 2016.
Rapport de majorité de M. Murat Julian Alder (PLR)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons le point suivant de l'ordre du jour en catégorie II, quarante minutes. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Le rapporteur de majorité, M. Murat Julian Alder, est remplacé par Mme la députée Nathalie Fontanet. Madame le rapporteur de majorité, vous avez la parole. Mesdames et Messieurs, un peu de silence, s'il vous plaît !

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je pense que M. Alder a choisi la bonne session pour être absent ! Je le remplace une nouvelle fois pour son excellent rapport de majorité. Le présent projet de loi vise à adapter la composition du CSM, le Conseil supérieur de la magistrature, à l'article 126 de la constitution genevoise, qui prévoit qu'il doit être composé de sept à neuf membres, qu'il peut comprendre des membres suppléants et que seule une minorité de ses membres peut être issue du pouvoir judiciaire. Cette adaptation implique notamment de réduire de quatre à deux le nombre de magistrats titulaires élus par les magistrats titulaires en fonction.

Les discussions sur la composition du Conseil supérieur de la magistrature, dont le rôle est de surveiller les magistrats du pouvoir judiciaire, se sont avérées guidées par des considérations politiques, partisanes, voire par des combats internes au pouvoir judiciaire. Elles ont en particulier porté sur: l'interprétation de l'article 126 de la constitution et la notion de «minorité issue du pouvoir judiciaire», dont il a été retenu que n'étaient considérés comme issus du pouvoir judiciaire que les magistrats titulaires en exercice, à l'exclusion des anciens magistrats. Il a aussi été question de l'importance qu'aucune profession ne soit représentée de manière dominante dans le Conseil, notamment la profession d'avocat, ce qui pourrait être le cas si les restrictions concernant les professions des membres désignés par le Conseil d'Etat n'étaient pas maintenues. La nécessité de faire coïncider l'article 126 de la constitution, qui vise à limiter la présence des magistrats en exercice dans le Conseil, et la recommandation n° CM / Rec (2010) 12 du comité des ministres aux Etats membres du Conseil de l'Europe à propos de l'indépendance, de l'efficacité et des responsabilités des juges, selon laquelle au moins la moitié des membres des conseils de la justice doivent être des juges choisis par leurs pairs... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...a également été abordée; le maintien du procureur général comme membre de droit du Conseil supérieur de la magistrature, certains estimant... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qu'un même magistrat ne devrait pas être à la fois membre de la commission de gestion du pouvoir judiciaire et du Conseil supérieur de la magistrature, par opposé à l'opportunité qu'en lieu et place du procureur général, le ministère public soit représenté par un membre élu par les magistrats du pouvoir judiciaire; également l'opportunité qu'un des sièges dont le pouvoir de désignation appartient au Conseil d'Etat soit réservé à un ancien magistrat ou à un magistrat hors canton; enfin, la possibilité pour le président de la juridiction à laquelle appartient le magistrat visé par une procédure disciplinaire de participer aux débats avec une voix consultative.

La majorité de la commission a estimé important que le procureur général reste membre du Conseil supérieur de la magistrature à ce stade, dès lors que ni le CSM, ni la commission de gestion du pouvoir judiciaire, ni le procureur général lui-même n'avaient été entendus à cet égard lors des travaux. Elle a été sensible à l'équilibre des professions dans la composition du Conseil supérieur de la magistrature et a donc réintroduit les restrictions afin que les membres désignés par le Conseil d'Etat ne puissent être ni magistrats ni avocats, la présence des magistrats et des avocats étant prévue par des dispositions topiques. La majorité a en revanche refusé de prévoir expressément la désignation d'un ancien magistrat ou d'un magistrat hors canton, considérant que cette disposition laisse déjà cette possibilité. Enfin, la majorité a accepté de prévoir la participation avec voix consultative du président de la juridiction à laquelle appartient le magistrat mis en cause.

Sur cette base, la majorité de la commission vous invite à entrer en matière sur le projet de loi tel que sorti des travaux de commission...

Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.

Mme Nathalie Fontanet. ...qui rend la composition du Conseil supérieur de la magistrature conforme aux exigences de la constitution genevoise et permet une représentation équilibrée, également conforme à la recommandation du Conseil de l'Europe. Partant, nous vous recommandons d'entrer en matière sur ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Le Conseil supérieur de la magistrature est un point central de nos institutions: c'est une sorte de clef de voûte qui permet au pouvoir judiciaire de bien fonctionner. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) La nouvelle constitution a été très sage en indiquant qu'une majorité des membres dudit Conseil ne doivent pas être des magistrats. Pourquoi ? Parce qu'il est difficile d'être à la fois juge et partie. C'est d'une grande sagesse. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons déposé en commission un amendement, que nous redéposerons ici, demandant que ce principe constitutionnel figure expressément dans la loi, afin qu'il soit appliqué. Même si peut-être il n'est pas nécessaire de le dire, cela va mieux en le disant, comme le disait fort justement Talleyrand.

Il y a deux problèmes essentiels s'agissant du Conseil supérieur de la magistrature: d'abord - nous l'avons abordé - le nombre de magistrats, qui est trop important; et un autre problème, une genevoiserie - une nouvelle - le rôle trop important du procureur général, qui a un pouvoir excessif à Genève, et qui se retrouve ici aussi, à cet emplacement clef du contrôle du pouvoir judiciaire, alors qu'il figure déjà à beaucoup d'échelons. Ce n'est pas bon d'avoir une telle confusion des pouvoirs, qu'on ne trouve pas dans les autres cantons. Il convient donc de réduire le rôle du procureur général au sein du Conseil supérieur de la magistrature, comme nous le proposons dans un amendement, et comme cela était indiqué.

Je pense que certains éléments intéressants sont aussi sortis au cours du débat, qu'il convient de relever, notamment l'indépendance de la justice face aux deux autres pouvoirs, qui n'est pas aussi grande qu'on le dit, du fait que, notamment, le pouvoir judiciaire prête serment dans cette salle, face aux pouvoirs législatif et exécutif: il n'y a pas une indépendance totale, mais plutôt une sorte d'interconnexion, ou de contrôle réciproque, comme le voulait Montesquieu. Quant à l'indépendance face aux partis politiques, on l'attend, on l'attendra encore un certain temps, je pense, mais au MCG, nous sommes têtus, et nous continuerons avec détermination de faire en sorte qu'on aille dans cette direction.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Ce projet de loi est très technique; il a pour objectif de modifier la composition du Conseil supérieur de la magistrature de manière à le rendre conforme à la nouvelle constitution. Il s'agit de faire des ajustements dans le cadre du pouvoir judiciaire qui est bien balisé par la constitution. Les magistrats de l'ordre judiciaire que sont les juges titulaires, les assesseurs et les suppléants sont soumis à la surveillance du Conseil supérieur de la magistrature. La constitution genevoise prévoit aussi qu'une minorité des membres du Conseil supérieur de la magistrature soit issue du pouvoir judiciaire. Il faut savoir que le Conseil supérieur de la magistrature veille au bon fonctionnement des juridictions et s'assure que les magistrats du pouvoir judiciaire exercent leur charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité. Le rôle du Conseil supérieur de la magistrature a été renforcé, étant donné qu'il exerce deux fonctions essentielles: d'une part, celle de sanctionner le pouvoir judiciaire; d'autre part, ce Conseil émet des préavis pour l'évaluation des compétences des candidats aux élections judiciaires générales et de leur aptitude à devenir magistrats, à être élus ou réélus. Les sanctions disciplinaires prononcées par le CSM - dont les membres doivent pouvoir refléter correctement la société civile - vont de l'avertissement à la destitution en passant par le blâme et l'amende; un juge peut être relevé de ses fonctions s'il devient incapable d'exercer sa charge. Dans le cadre d'une procédure disciplinaire contre un juge, celui-ci peut être assisté d'un avocat et dispose de voies de droit contre les sanctions prononcées. Le Conseil supérieur de la magistrature délibère lorsque sept de ses membres au moins sont présents ou remplacés. La nouvelle constitution permet que le Conseil supérieur de la magistrature comporte des membres suppléants, car ce Conseil siège beaucoup plus régulièrement que par le passé. C'est la nouveauté de ce projet de loi. Ces suppléants vont permettre d'atteindre le quorum en cas d'absence de titulaires ou en cas de récusation. L'Union démocratique du centre ne peut qu'approuver ce projet de loi et vous demande d'en faire de même. Merci, Monsieur le président.

M. Christian Zaugg (EAG). Chers collègues, une fois n'est pas coutume, notre groupe incline en faveur d'un rapport de majorité. Il le fait pour deux raisons essentielles: d'une part afin de se conformer à la nouvelle constitution - et vous voyez que nous sommes beaux joueurs, car nous l'avions refusée - constitution qui préconisait une réduction du nombre des magistrats au sein du Conseil supérieur de la magistrature en ramenant de quatre à deux le nombre de ses membres élus par des magistrats titulaires en exercice, et d'autre part parce qu'il nous a semblé qu'il était important que toutes les parties du corps judiciaire et de la société civile y soient représentées; ce qui est le cas. Nous avons pris note du satisfecit de l'Association des juristes progressistes qui n'a pas souhaité être auditionnée et qui nous a écrit, à titre préventif, qu'elle était opposée à la disparition des personnes non professionnelles dans les instances de décision. Dont acte. Au surplus, nous n'avons pas voulu entrer dans les tentatives de quelques députés d'exclure le procureur général du Conseil supérieur de la magistrature, et ce d'autant qu'il s'agit d'un magistrat élu par le peuple. L'amendement présenté par l'Association des magistrats du pouvoir judiciaire qui a été voté par la commission a du sens. Il est en effet tout à fait opportun que le président d'une juridiction à laquelle appartient un magistrat mis en cause puisse participer à la délibération avec une voix consultative même lorsqu'il est par ailleurs membre de ce Conseil. Il en va de l'instruction de la plainte ou de la sanction, voire de la défense des droits du justiciable.

Ce sont les raisons pour lesquelles notre groupe votera le projet de loi amendé tel qu'il ressort des travaux de la commission, et il vous invite, chers collègues, à en faire de même en le renforçant et, dans ce sens, en acceptant l'amendement qui vous sera présenté.

Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts ont été sensibles, dans les débats en commission, à la revendication de l'Association des magistrats du pouvoir judiciaire, qui nous ont dit qu'une instance de surveillance, en général, se compose des pairs des personnes qui doivent être surveillées. Par exemple, au sein de la commission de surveillance des professions de la santé, ce sont majoritairement des médecins qu'on retrouve et non des gens issus de la société civile, de tous les horizons. Il ne s'agit pas d'un parlement mais bien d'une commission de surveillance d'une profession. Cela dit, la nouvelle formule de la loi, selon la volonté de l'Assemblée constituante et du peuple qui a accepté la nouvelle constitution, ne prévoit plus automatiquement une majorité de magistrats au sein du Conseil supérieur de la magistrature, ce qui posait problème. Nous avions déposé un amendement en ce sens qui n'a pas été accepté. Au final, la formulation à laquelle la commission est arrivée ne ferme pas la porte, parmi les trois personnes désignées par le Conseil d'Etat, à la nomination de magistrats retraités ou venant d'autres cantons. De tels magistrats pourraient apporter leur expertise tout en ayant le recul nécessaire puisque n'étant plus ou pas directement impliqués. Nous appelons de nos voeux une composition équilibrée du CSM, qui permette aux magistrats mis en cause d'être surveillés par leurs pairs. Nous accepterons donc le texte tel qu'issu des travaux de commission.

Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste est globalement satisfait des mesures prises pour adapter la composition du CSM aux exigences de la nouvelle constitution tout en tenant compte des recommandations du Conseil de l'Europe, notamment, sur l'indépendance des juges. La possibilité pour le Conseil d'Etat de nommer un ancien magistrat du pouvoir judiciaire ou un magistrat extérieur au canton permet de trouver cet équilibre entre l'exigence de la constitution et les exigences en matière d'indépendance des juges. De même, le fait qu'on limite le nombre d'avocats est une bonne chose: dans le cas contraire, on pourrait se retrouver avec plus d'avocats que de magistrats, ce qui n'est vraiment pas souhaité. L'instauration du système des suppléants est aussi très positive: cela permet au CSM d'avoir toujours le quorum et de pouvoir siéger aussi fréquemment que nécessaire - il faut rappeler que le volume de son travail a beaucoup augmenté.

Concernant le siège du procureur général lui revenant de droit, nous nous posons de sérieuses questions sur le cumul des casquettes de ce magistrat. Il est clair qu'on peut vraiment se demander s'il ne faudrait pas réorganiser la justice et réfléchir à son rôle au sein du pouvoir judiciaire. Cela étant, cette question est arrivée à la fin du débat; il est vrai que le procureur général n'a pas été auditionné, et que, surtout, nous n'avons pas mené une réflexion plus générale sur l'organisation de la justice. Pour ces raisons, même si nous nous posons de sérieuses questions et que nous souhaitons reprendre ce thème, notre groupe, dans sa grande majorité, s'abstiendra sur l'amendement du MCG à ce sujet. Pour le reste, nous vous invitons simplement à voter ce projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme la députée Danièle Magnin... (Remarque.) ...qui n'est pas là. C'est donc le tour de M. le député Vincent Maitre.

M. Vincent Maitre (PDC). Merci, Monsieur le président. On l'a dit, ce projet de loi répond aux exigences constitutionnelles, qui imposent, pour la composition du CSM, que les magistrats y siègent en minorité. Irène Buche l'a dit de manière tout à fait opportune, ce n'est pas pour autant qu'il faut accorder à une profession ou à une autre un poids prépondérant au sein du CSM, raison pour laquelle il convient, notamment par cette loi, d'équilibrer les forces et de ne pas voir une profession - en particulier celle des avocats - y prédominer. Il s'agit d'un projet de loi globalement équilibré, même si, du point de vue du groupe PDC, quelques détails sont à relever, des aspects qui ne nous paraissent pas idéalement réglés ni parfaits ou totalement équitables. On a cité le cas du procureur général qui siège au CSM: il n'y a pas d'opposition de principe à cela du point de vue du PDC, mais il se pose néanmoins la question de sa présence lorsqu'un procureur de son propre ministère public est dénoncé au CSM. Il ne nous paraît pas opportun - cela nous paraît même peut-être incongru - que le procureur général puisse à la fois délibérer et trancher sur le sort d'un de ses magistrats, si l'on peut s'exprimer ainsi. Il en va exactement de même pour les présidents de juridictions, qui ont le droit, à teneur de ce projet de loi, d'assister les magistrats de leur juridiction qui auraient été dénoncés. Ce n'est pas idéal, toujours de notre point de vue. Ma foi, une majorité de ce plénum semble penser le contraire; nous nous en accommoderons tant bien que mal.

En revanche, je me permettrai, Monsieur le président, de déposer un amendement signé par l'ensemble des groupes, qui vise à remédier à une certaine lacune de ce projet de loi, à savoir le fait que le plaignant n'ait pas droit au chapitre, c'est-à-dire le droit d'être entendu par le CSM. La loi actuelle prévoit bien entendu que le magistrat dénoncé et le plaignant soient entendus; le projet de loi qui nous est présenté prévoit que le magistrat dénoncé soit entendu, mais pas le plaignant. Il s'agit bien évidemment de pallier cette carence. C'est un principe fondamental qu'on retrouve dans bien d'autres domaines du droit judiciaire; c'est le débat contradictoire, c'est finalement l'égalité des armes; c'est le droit d'être confronté à la personne qui vous accuse ou qui au contraire se défend et présente des arguments. Vous avez donc reçu cet amendement que je vous encourage à soutenir, qui donne le droit au plaignant d'être entendu au même titre que le magistrat qu'il dénonce. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Je voulais d'abord mentionner une phrase illustrative qui figure dans le rapport de minorité et qu'il me semble bon de rappeler: «Il est dans la nature humaine que tout homme qui a trop de pouvoir est porté à en abuser. Un partage est dans tous les cas une nécessité.» Il me semble que cela devrait tous nous inspirer d'une manière ou d'une autre dans le partage du pouvoir.

Nous voterons l'entrée en matière et nous réserverons pour le vote final: en effet, nous allons déposer trois amendements, qui figurent dans mon rapport de minorité; nous voterons le projet de loi suivant leur adoption ou non. Nous soutiendrons aussi l'amendement déposé par Vincent Maitre et signé par l'ensemble des groupes, qui donne une place nécessaire au plaignant.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Monsieur le président, la majorité refusera l'ensemble des amendements déposés par la minorité, mais acceptera l'amendement déposé par M. Vincent Maitre et les représentants des différents groupes à l'article 19, alinéa 4. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, j'invite l'assemblée à se prononcer sur l'entrée en matière. (Le système de vote électronique ne s'enclenche pas.)

Une voix. Vote par assis et levé !

Une autre voix. Appel nominal ! (Le système de vote électronique s'enclenche. Exclamations et applaudissements.)

Le président. Vous pouvez voter !

Mis aux voix, le projet de loi 11873 est adopté en premier débat par 88 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article 17, alinéa 1, nous sommes saisis d'un amendement qui avait été déposé en commission et qui figure dans le rapport de minorité, à la page 36. Il s'agit d'abroger la lettre a et de donner une nouvelle teneur à la lettre c, que je vous lis: «de 3 magistrats titulaires élus par les magistrats titulaires en fonction, dont 1 procureur». Monsieur Baertschi, sur l'amendement ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Juste une petite explication: par cet amendement, nous avons enlevé le procureur général. En revanche, nous laissons la place pour un procureur, qui peut siéger dans ce Conseil supérieur de la magistrature. Il est préférable d'en retirer les anciens magistrats titulaires. Je vous encourage à suivre cet amendement qui permet un meilleur équilibre des pouvoirs.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. La majorité vous encourage à refuser cet amendement. Il entraîne une modification importante de la position du procureur général, qui n'a pas fait l'objet d'un examen dans le cadre des travaux de commission. Par ailleurs, si des questions se posent sur le pouvoir que le procureur général peut avoir, sur ses différentes casquettes dans les différentes institutions, une réforme doit être examinée de façon plus globale et non à la va-vite, sans interroger les personnes concernées. Je vous invite donc à refuser cet amendement. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs, je vous prie de vous prononcer sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 44 non contre 23 oui et 22 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 17, al. 1, lettre c, et al. 2 (nouvelle teneur), al. 5 (abrogé), est adopté, de même que les art. 17A (nouveau) à 17C (nouveau).

Le président. A l'article 18, le MCG a déposé un amendement que vous trouverez à la même page du rapport de minorité. Je vous le lis:

«Art. 18, al. 3 (nouveau)

3 Le conseil ne peut délibérer valablement dans une composition qui ne serait pas conforme à l'exigence constitutionnelle établie à l'article 126, alinéa 2 de la constitution genevoise.»

Monsieur le député François Baertschi, vous avez la parole.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Il s'agit de préciser le fait qu'il doit y avoir une majorité de non-magistrats au sein du Conseil supérieur de la magistrature.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. La majorité de la commission vous invite à refuser cet amendement. Il n'est pas nécessaire de rappeler que la loi ne peut être violée; la constitution prévoit la possibilité des suppléants, cet amendement est donc parfaitement inutile. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame le rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous pouvons passer au vote sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 70 non contre 15 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, l'art. 18, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté.

Le président. A l'article 19, alinéa 3, le MCG propose un autre amendement. Je vous le lis:

«Art. 19, al. 3 (nouvelle teneur)

3 Le conseil peut déléguer l'instruction d'un dossier à un ou plusieurs de ses membres. Si la délégation est confiée à un seul membre, celui-ci ne peut pas être issu du pouvoir judiciaire. Si la délégation comporte deux membres, il peut y avoir un membre du pouvoir judiciaire, à l'exception des présidents de juridiction. Au-delà de deux membres, la majorité de la délégation doit être choisie, hors les membres issus du pouvoir judiciaire.»

Monsieur le député François Baertschi, sur l'amendement ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. C'est toujours le même principe: il ne faut pas qu'il y ait une majorité de magistrats, ou un magistrat seul, qui se prononcent sur les cas d'autres magistrats; il faut vraiment un regard extérieur à la magistrature pour évaluer les éventuels problèmes ou toute décision en rapport avec le Conseil supérieur de la magistrature, dans le cadre de délégations. C'est ce principe-là qu'il faut à tout prix ancrer dans la loi, selon la minorité, pour que cela soit appliqué de manière ferme et déterminée.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. La majorité de la commission vous invite à refuser cet amendement. On s'immisce très clairement dans l'organisation interne du CSM, ce qui n'est pas du ressort du parlement. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame le rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 68 non contre 15 oui et 1 abstention.

Le président. Nous sommes saisis d'un dernier amendement à l'article 19, alinéa 4, déposé par M. Vincent Maitre et des représentants de tous les groupes. Je vous le lis:

«Art. 19, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Le conseil ne peut prononcer une sanction disciplinaire sans avoir auparavant entendu le magistrat mis en cause, ainsi que le plaignant, lesquels peuvent se faire assister d'un avocat.»

Monsieur François Baertschi, voulez-vous vous exprimer ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Oui, merci, Monsieur le président. Je soulignerai la pertinence de cet amendement et le côté consensuel de cet apport. Il ne faut pas uniquement penser en termes de magistrats, mais aussi de plaignants. Mon collègue a été bien avisé de faire cette proposition et je l'en remercie.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. La majorité de la commission soutient évidemment cet amendement frappé au coin du bon sens: il n'y a absolument aucune raison que la partie plaignante ne puisse pas être entendue. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, nous pouvons passer au vote sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 84 oui et 1 abstention.

Le président. Je vous invite à présent à voter sur l'article 19 ainsi amendé.

Mis aux voix, l'art. 19 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté par 82 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, l'art. 22, al. 2 (nouvelle teneur), al. 3 (abrogé, l'al. 4 ancien devenant l'al. 3), est adopté, de même que les art. 134, al. 3, lettre g (abrogée), à 139, al. 2 (nouvelle teneur).

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que les art. 2 et 3 (soulignés).

Troisième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement déposé par M. François Baertschi à l'article 17, alinéa 1. Il s'agit encore une fois d'abroger la lettre a - soit de biffer le procureur général - et de donner la nouvelle teneur suivante à la lettre c: «de 3 magistrats titulaires élus par les magistrats titulaires en fonction, dont 1 procureur». Monsieur François Baertschi, je vous donnerai la parole après les autres intervenants. Monsieur Roger Deneys ? (Remarque.) Bien, merci. Je passe la parole à M. Jacques Béné. (Remarque.) Non ? Très bien, je vous remercie. Monsieur François Baertschi ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je redépose l'amendement qui remplace le procureur général par un procureur, car cela améliore l'équilibre des pouvoirs, comme je l'ai indiqué précédemment. Cela permet aussi une clarification de cette autorité, le CSM, qui est vraiment la clef de voûte de notre système judiciaire.

Mme Nathalie Fontanet (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Je rappelle que ni le procureur général, ni le CSM, ni la commission de gestion du pouvoir judiciaire n'ont été entendus à ce sujet; il me paraît pour le moins particulier de déposer un tel amendement sans entendre les personnes concernées. Si l'on souhaite revoir le pouvoir du procureur général, il faut le faire dans le cadre d'une réforme complète, et il faut se poser les bonnes questions. Je vous invite donc, dans le contexte de ce jour, à refuser cet amendement. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame le rapporteur de majorité. La parole n'étant plus demandée, Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'amendement. Le vote est lancé.

Des voix. Votez oui !

D'autres voix. Mais c'est pas vrai !

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 24 oui et 21 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 17, al. 1, lettre c, et al. 2 (nouvelle teneur), al. 5 (abrogé), est adopté, de même que les art. 17A (nouveau) à 139, al. 2 (nouvelle teneur).

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que les art. 2 et 3 (soulignés).

Mise aux voix, la loi 11873 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui contre 15 non et 1 abstention.

Loi 11873

PL 11759
Projet de loi de MM. Stéphane Florey, Patrick Lussi, Bernhard Riedweg, Eric Leyvraz, Michel Baud, Michel Amaudruz, Norbert Maendly, Christo Ivanov, Thomas Bläsi modifiant la loi sur la police (LPol) (F 1 05) (Police de l'immigration)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 12 et 13 novembre 2015.

Le projet de loi 11759 est retiré par ses auteurs.

M 2257
Proposition de motion de MM. Stéphane Florey, Eric Leyvraz, Christo Ivanov, Thomas Bläsi, Norbert Maendly, Patrick Lussi, Michel Amaudruz, Marc Falquet, Bernhard Riedweg : Pas d'aide sociale pour les propriétaires de biens immobiliers à l'étranger !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 12, 13 et 19 mars 2015.

La proposition de motion 2257 est retirée par ses auteurs.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous libère en vous souhaitant une bonne soirée. Je vous retrouve demain à 14h.

La séance est levée à 22h45.