Séance du
vendredi 20 décembre 2013 à
8h
1re
législature -
1re
année -
3e
session -
14e
séance
PL 11292-A
Suite du deuxième débat
Budget de fonctionnement (tome 1) (suite)
C - ACTION SOCIALE
Le président. Mesdames et Messieurs, un peu de silence et de calme, s'il vous plaît ! Tout va bien se passer. Nous reprenons donc nos travaux sur le PL 11292-A. Nous sommes toujours en deuxième débat et abordons maintenant la politique publique C «Action sociale». (Brouhaha. Commentaires.) S'il vous plaît ! (Le président agite la cloche.) Voilà qui va beaucoup mieux, merci. S'agissant du programme C04 «Protection des personnes adultes sous curatelle», la parole est à Mme Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, hier, nous avons passé passablement de temps, et à juste titre, à parler du service de protection des mineurs, le SPMi. Ici, il s'agit du service de protection de l'adulte, soit le SPAd. Même si ce n'est pas ressorti lors de nos travaux d'hier, ces personnes, en tout cas les assistants sociaux et leurs délégations, ont également été auditionnées à la commission des finances. Ils nous ont dit que ce n'était pas plus facile en termes de dotation, en termes de charge de travail et de responsabilités, que ce qui se passait au SPMi. La différence, c'est qu'on s'apitoie peut-être moins quand on a affaire à des adultes qui sont en situation de détresse... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît ! Pardon, Madame. Est-ce que les membres du MCG pourraient parler plus doucement ou aller à l'extérieur ? Merci. Poursuivez, Madame.
Mme Lydia Schneider Hausser. Oui, donc il est vrai qu'avec le SPMi, on parle d'enfants et de familles. Avec le service de protection de l'adulte, on parle d'adultes dans des situations de détresse et de marginalisation importantes, qui nécessitent soit des curatelles, soit des tutelles. D'une certaine façon, ils sont les plus faibles de notre société. En tout cas, il est très clair que ce service et ses assistants sociaux manquent de dotation. Monsieur le conseiller d'Etat, j'aurais voulu savoir ce qui est prévu dans ce service pour les prochains temps, soit en termes de dotation, soit en termes d'organisation et de suivi.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Madame la députée, j'ai bien entendu votre question. Votre préoccupation est également la mienne. Il est vrai que ce service, que j'ai d'ailleurs rencontré la semaine dernière, a des préoccupations assez similaires à celles du SPMi. Il est aussi quelque peu contrarié du fait que le SPMi ait obtenu un soutien financier, compte tenu d'une présence plus marquée, je dirais, auprès de notre parlement. Je pense qu'il est important de donner des signes clairs aux employés du service de protection de l'adulte sur le fait que nous allons les aider à renforcer leurs effectifs en cours d'année.
Mais au-delà de tout cela, je pense qu'il faut procéder à une analyse afin de déterminer les motifs pour lesquels ce service se trouve aujourd'hui submergé. Vous savez que la nouvelle loi sur la protection de l'adulte et de l'enfant est entrée en vigueur, ce qui a impliqué une réorganisation du tribunal: l'ancien Tribunal tutélaire est ainsi devenu le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant. Nous avons constaté, et j'ai moi-même constaté aussi en tant que praticien, une tendance que je considère regrettable, à savoir de vouloir systématiquement mettre sous curatelle toutes les personnes ayant des difficultés dans l'organisation de leur vie pratique. Il faudrait se demander si l'institution de la curatelle est véritablement la réponse adéquate à des problèmes qui ne relèvent pas du discernement de la personne concernée, mais uniquement de l'organisation de sa vie. Le débat est évidemment beaucoup plus vaste, puisqu'il concerne aussi le rôle que la famille doit jouer, notamment auprès des personnes âgées, parce que ce sont entre autres des personnes âgées qui occupent ces services.
Evidemment, certaines personnes devront indiscutablement toujours être placées sous curatelle, parce qu'elles ont des problèmes de déficience mentale ou intellectuelle qui exigent qu'on les protège par ce type de mesures. Mais il y a également des personnes âgées qui pourraient certainement - et la loi en fait une obligation vis-à-vis des tribunaux - être davantage aidées par leur famille. Je pense aussi organiser des entrevues avec la magistrature sur cette question pour qu'elle mette véritablement en pratique l'obligation d'impliquer la famille dans le soutien aux personnes âgées en difficulté. Tout cela est une vaste réflexion. Je pense qu'il est surtout important que les personnes travaillant dans ce service sachent que c'est une préoccupation et que nous n'avons pas deux poids, deux mesures pour les mineurs et les adultes. Mais il faudra peut-être augmenter les effectifs; nous le déciderons rapidement en cours d'année, cela fait évidemment partie de nos priorités.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous arrivons à la fin de la politique publique C «Action sociale», qui comprend les programmes C01 «Accès à l'assurance-maladie», C02 «Soutien à la famille», C03 «Mise en oeuvre et conduite des mesures d'action sociale», C04 «Protection des personnes adultes sous curatelle» et C05 «Actions en matière d'asile et de migration». Je soumets cette politique publique aux votes de l'assemblée.
Mise aux voix, la politique publique C «Action sociale» est adoptée par 43 oui et 17 abstentions.
D - PERSONNES AGEES
Le président. Nous passons maintenant à la politique publique D «Personnes âgées» et au programme D01 «Mise en oeuvre et conduite des actions en faveur des personnes âgées». La parole est à M. Jean Romain. (Remarque.) C'est une erreur. La parole est à Mme Magali Orsini.
Mme Magali Orsini (EAG). Merci, Monsieur le président. Il me semble constater qu'on n'a toujours pas respecté, dans ce projet de budget, l'initiative populaire pour une meilleure prise en charge des personnes âges en EMS, votée en mars 2011 et que le peuple avait approuvée à plus de 60%. Je vous rappelle que le nombre de personnes employées en EMS a été prévu par l'outil PLAISIR, qui signifie «planification informatisée des soins infirmiers requis». A l'époque, on avait constaté que seuls étaient assurés 80% des soins considérés comme convenables. Sur 70 postes exigés par la votation populaire, une dizaine seulement auraient été pourvus. Le coût de cette initiative a été évalué à 60 millions, et le projet de budget qui nous est proposé ne prévoit, semble-t-il, pas un centime supplémentaire. Les augmentations de lits prévues dans ce budget sont uniquement le fait du nombre de personnes supplémentaires qui entrent en EMS, ce qui est dû au vieillissement de la population. Il n'y a donc pas de prévision supplémentaire relative à cette initiative. Et ceci est d'autant plus regrettable qu'à notre avis, il faudrait une politique prospective en matière de soins palliatifs, qui commencent à s'exercer en EMS mais qui devraient être beaucoup plus développés.
Le président. Merci, Madame la députée. Nous arrivons au bout de la politique publique D «Personnes âgées», qui comprend les programmes D01 «Mise en oeuvre et conduite des actions en faveur des personnes âgées» et D02 «Soutien financier individuel aux personnes âgées». Je la soumets aux votes.
Mise aux voix, la politique publique D «Personnes âgées» est adoptée par 45 oui et 12 abstentions.
E - HANDICAP
Le président. Nous passons à la politique publique E «Handicap», qui comprend les programmes E01 «Mise en oeuvre et conduite des actions en faveur des personnes handicapées» et E02 «Soutien financier individuel aux personnes handicapées». Nous sommes saisis d'un amendement de M. Bläsi, à qui je cède la parole.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, j'ai pu discuter avec le conseiller d'Etat, M. Poggia, qui m'a expliqué la nouvelle clef de répartition qui conduisait finalement à une diminution de 5,12 millions. On peut en fait constater que ce n'est pas une vraie diminution. Mais j'aimerais quand même faire un constat sur ce poste: les revenus ont subi une augmentation de 4 millions et les charges une diminution de 3 millions. Cela signifie que nous avons un bonus de 8 millions, qui est essentiellement dû aux efforts et au travail des personnes handicapées. Nous avons pu constater hier que quasiment l'ensemble de l'assemblée s'était exprimée pour parler de ses inquiétudes sur la situation des personnes vulnérables que sont les personnes handicapées, comme les handicapés mentaux qui ne peuvent pas disposer d'assez de places en EMS. Le groupe UDC vous propose de rétablir les 5,12 millions en fonction des budgets disponibles et vous remercie de votre soutien. Merci, Monsieur le président.
M. Cyril Mizrahi (S). J'aimerais apporter quelques éléments au sujet de cette politique publique, notamment en réaction à l'amendement proposé par M. Thomas Bläsi. Sous réserve des explications qui nous seront peut-être fournies par le conseiller d'Etat chargé du département de l'action sociale, nous ne suivrons pas, pour notre part, cet amendement, tout simplement parce que des explications techniques sur le mode de calcul figurent dans le budget, et nous estimons donc que s'il y a de l'argent à mettre - effectivement, Monsieur Bläsi, vous avez raison de le dire: il y a un besoin d'argent par rapport à la politique du handicap - ce n'est pas à cet endroit-là.
J'en profite pour souligner que la politique du handicap n'est pas uniquement une politique d'action sociale. C'est également une politique de l'instruction publique - on en a parlé hier - à savoir les moyens qu'il convient d'allouer en ce qui concerne l'intégration scolaire, en particulier l'intégration dans tous les cursus de formation. C'est également une politique en faveur de l'accessibilité, ce qui touche d'autres départements, notamment en matière de construction. Il y a par exemple la question de la rénovation de ce bâtiment, en souffrance depuis plus d'une dizaine d'années. On voit qu'il y a des domaines où on peut mettre des moyens pour davantage d'égalité, car ce n'est pas qu'une question de politique sociale, Mesdames et Messieurs, c'est aussi une question d'égalité. J'invite plutôt le gouvernement, dans le cadre des moyens budgétaires, à mettre l'accent sur ces éléments-là. Si nous votions cet amendement, nous devrions trouver 5 millions d'économies ailleurs, alors qu'ici, le besoin n'est pas avéré. J'invite donc plutôt le gouvernement à mettre les moyens dans les domaines de l'éducation et de l'accessibilité notamment. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Avant de poursuivre le débat, je signale à M. Bläsi que la somme actuellement disponible pour cet amendement est de 4 642 362 F. Monsieur Bläsi, vous pouvez vous exprimer avant que je ne passe la parole à M. Gautier.
M. Thomas Bläsi (UDC). Oui, alors c'est le montant que nous demandons d'attribuer à cette politique. Merci, Monsieur le président.
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, par analogie avec ce que j'ai dit hier au sujet de l'instruction publique... (Un instant s'écoule.) Je m'excuse de vous réveiller, M. Deneys, je sais que vous n'aimez pas être ici tôt le matin, vous l'avez déjà fait savoir sur les réseaux sociaux.
Ce que je voulais dire, c'est que je crois que nous attendons tous ici une parole forte du conseiller d'Etat s'agissant de ce secteur qui, à mon sens, est un peu trop prétérité au sein des 8 milliards du budget cantonal. On doit effectivement se demander si Genève fait assez pour celles et ceux qui en ont le plus besoin, et en particulier les personnes handicapées. Je pense donc que l'amendement de M. Bläsi est intéressant, dans la mesure où il démontre que les services génèrent un flux financier positif. C'est vrai qu'on peut se poser la question du sens, essayer de déterminer si celui-ci ne devrait pas être directement réutilisé là où vraisemblablement il y en a le plus besoin. Mais par rapport au débat d'hier, un peu larmoyant, sur les conditions effroyablement difficiles des employés du SPMi, voilà bien un secteur où, objectivement, tout le monde dans ce parlement reconnaîtra que Genève peut et doit mieux faire.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez raison: le handicap fait partie des priorités de l'actuel gouvernement, même si je ne dis pas par là que ce n'était pas le cas pour l'ancien. Il va de soi que des structures adaptées doivent être renforcées, multipliées. Mais en ce qui concerne plus précisément l'amendement qui vous est proposé, je voudrais attirer votre attention sur une problématique évidente, à savoir le vieillissement de la population. J'enfonce des portes ouvertes en le rappelant, mais il va de soi que les personnes à la fois âgées et handicapées sont de plus en plus nombreuses. Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de personnes handicapées qui ne sont pas à l'âge de l'AVS, bien évidemment. Mais avec le vieillissement de la population, handicap et soutien aux personnes âgées sont des politiques publiques qui, de plus en plus, vont s'imbriquer l'une dans l'autre. C'est la raison pour laquelle - et je l'ai expliqué à M. Bläsi qui en a pris acte - il y a eu un rééquilibrage entre les postes D02 et E02. Je rappelle que le programme E02 est celui dont nous parlons maintenant, à savoir le soutien financier individuel aux personnes handicapées, tandis que le D02 est le soutien financier individuel aux personnes âgées. En ce qui concerne les personnes handicapées, la somme a été réduite de 5 millions, mais elle a été augmentée de plus de 11 millions pour les personnes âgées, ce qui veut dire que l'investissement de notre collectivité pour les individus rencontrant des problèmes liés au handicap et au vieillissement a été globalement augmenté de 6 millions. Il y a donc véritablement un effort entrepris dans ce sens. Je rappelle que la totalité des sommes investies dans ces politiques est supérieure à un demi-milliard, ce qui est évidemment considérable; nécessaire bien sûr, mais considérable, il faut en être conscient. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je soumets cet amendement de 4 642 362 F au vote de l'assemblée.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 18 oui et 7 abstentions.
Le président. Je vous soumets maintenant l'entier de la politique publique E telle que sortie de commission.
Mise aux voix, la politique publique E «Handicap» est adoptée par 47 oui et 25 abstentions.
F - ENVIRONNEMENT
Le président. Nous abordons la politique publique F «Environnement», en commençant avec le programme F01 «Protection de l'environnement». La parole est à Mme Lisa Mazzone.
Mme Lisa Mazzone (Ve). Merci, Monsieur le président. Une fois n'est pas coutume, il y a aujourd'hui de quoi se réjouir de la pluie qui nous tombe sur la tête. En effet, elle met fin à plus d'une semaine de dépassement des seuils de tolérance en matière de particules fines dans l'air, en ville comme en périphérie. Mais à Genève, les conditions requises pour agir sont particulièrement élevées, notamment en regard des normes françaises. Pourtant, la France n'est pas un pays qui s'illustre particulièrement en matière de respect de l'environnement. Les conséquences de cette pollution à répétition sont graves, en particulier pour les enfants et les personnes âgées. En vrac, citons les affections telles que les maladies cardio-vasculaires ou les altérations des fonctions pulmonaires qui se voient accentuées. Il s'agit donc, globalement, d'une diminution de l'espérance de vie. C'est un refrain récurrent que l'on entend chaque hiver. Pourtant, aucune mesure n'est prise pour éviter que cette pollution ne soit émise ou pour la faire baisser quand elle est constatée. Or cela revient à contrevenir à notre constitution, qui stipule que l'Etat lutte contre toutes les formes de pollution, prend des précautions et respecte le principe pollueur-payeur. On constate d'ailleurs que de l'autre côté de la frontière, en France voisine, cette pollution génère des actes responsables, notamment la modération de la circulation ou l'abaissement de la vitesse sur l'autoroute. Je m'interroge: l'air est-il arrêté par la frontière ? (Commentaires.) Ah oui ? Je demande à voir comment.
Une voix. Comme Tchernobyl !
Mme Lisa Mazzone. Comme Tchernobyl. Bien au contraire, nous avons la délicatesse de polluer l'air qui s'engouffre justement dans la vallée de l'Arve. Et c'est ensuite à nos voisins français de prendre des mesures pour diminuer la pollution sur leur territoire. Concrètement, les sources de cette pollution sont d'abord le trafic routier, mais aussi les installations de chauffage. Les mesures sont connues, il n'est même pas besoin de faire appel à la créativité. Il s'agit seulement de les appliquer dès que les limites sont dépassées. Parmi ces dispositions, citons notamment la circulation alternée, la gratuité des transports publics les jours de pics de pollution ou encore la limitation de la température à 20 degrés dans les bâtiments publics. Toutes ces considérations, qui suscitent de vives inquiétudes sanitaires chez les Verts, m'amènent à poser la question suivante: qu'est-ce que l'Etat compte entreprendre pour améliorer la qualité de l'air et quels moyens sont attribués à la mise en oeuvre de ces mesures ? Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Michel Ducommun (EAG). Je ne vais pas intervenir sur le détail du budget, ni proposer d'amendement. Mais j'ai quand même envie de voir un peu comment fonctionne cette politique publique sur l'environnement, parce que j'ai remarqué qu'une priorité était donnée à l'environnement direct, c'est-à-dire local: agrément de la nature pour les citoyens et citoyennes, nature en ville, qualité des paysages, biodiversité comme ressource... Et cette orientation a une certaine logique. Il est vrai qu'il est plus facile d'agir pour l'environnement au niveau local. Je ne remets donc pas vraiment en cause ces pratiques. Mais lorsqu'on utilise le mot «environnement», on ne peut pas ignorer les graves dangers écologiques qui, depuis vingt ans, menacent l'humanité. L'importance du réchauffement climatique, par exemple, ne peut plus être ignorée. Sécheresse dans le sud, tempêtes et inondations dans le nord ou au centre, élévation du niveau de la mer: ces éléments menacent la vie de centaines de millions d'êtres humains sur terre. On ne peut plus ignorer non plus l'épuisement des ressources, que ce soient les énergies fossiles - donc aussi les plastiques - les métaux, comme le fer, le zinc, le cuivre, le plomb, l'or et l'argent, ou encore les terres rares, indispensables à la production des nouvelles technologies. Je pense que cet épuisement des ressources va rendre impossible le mode de fonctionnement de notre société actuelle.
Je mentionnais aussi la pollution - et là, j'approuve vraiment l'intervention qui vient d'être faite: non seulement la pollution fait partie d'un élément fondamental, mais c'est peut-être sur cet élément qu'il y a le plus de réserves à avoir quant à la politique menée à Genève, qui résulte de la force des défenseurs du trafic privé en ville. Les menaces sur l'humanité doivent donc aussi être présentes dans une réflexion sur l'environnement. A ce sujet, je trouve significatif que la problématique de la croissance soit complètement absente des analyses faites à l'Etat de Genève. Il est pourtant facile de comprendre qu'une croissance infinie dans un monde fini est impossible. A partir de là, je trouve qu'au lieu de poser le problème de la croissance, qui est la véritable cause de la crise écologique, on se rabat sur de fausses solutions, on proclame que le développement durable et l'économie verte vont donner des solutions. Le développement durable, qui est très beau dans sa définition, peut faire rêver, mais c'est un remède qui a été proposé à Rio en 1992, et depuis qu'on l'applique, la situation ne fait qu'empirer. Je ne sais pas si, en médecine, lorsqu'on donne un remède à un malade et que celui-ci est de plus en plus malade, on se pose la question de changer de remède, mais je pense que c'est assez logique.
Si je prends l'autre élément, une autre manière de décrire le développement durable, qui est à la mode, ou essaie d'être à la mode, à savoir l'économie verte, je remarque que le Programme des Nations unies pour l'environnement a proposé un programme d'économie verte. Il était censé être au centre des débats à Rio+20, mais a été laissé de côté. Rien que les conditions pour réaliser cette économie verte ne sont manifestement pas remplies. Ce que j'aimerais demander, c'est que les objectifs qui sont définis dans les concepts de développement durable ou d'économie verte...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Michel Ducommun. Ça va me suffire, j'ai presque fini. Finalement, ces objectifs peuvent parfois être raisonnables et soutenus. Mais ce que je trouve important - et ce qui peut être défendu comme objectif - c'est de faire attention à ne pas créer l'illusion que ce sont ces concepts qui résoudront la crise écologique. Et de faire croire à cette illusion... Je pense même qu'elle est criminelle...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Michel Ducommun. ...dans la mesure où ces menaces pèsent sur l'humanité. Je pense donc que la politique publique F devrait prendre en compte ces éléments.
M. Bertrand Buchs (PDC). Je remercie beaucoup Mme Mazzone d'avoir fait son intervention sur les particules fines. Pour le parti démocrate-chrétien et pour les gens qui travaillent dans la santé, ce qui se passe actuellement est grave. Et on ne s'en rend pas compte, parce qu'on ne voit pas les particules fines, on les inhale sans s'en rendre compte. Mais il y a actuellement un problème de santé publique énorme, qui est négligé au niveau de notre canton, au niveau de la Suisse. Ma question au gouvernement est la suivante: est-ce que le canton peut faire quelque chose, a les moyens de faire quelque chose, ou les mesures connues sont-elles uniquement du ressort de la Confédération ? Je vous remercie.
Mme Christina Meissner (UDC). En matière de politique publique relative à l'environnement... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
Mme Christina Meissner. ...il est clair que les enjeux sont encore devant nous. Lors de la précédente législature, nous avons voté une loi sur la biodiversité. Nous avons juste oublié de lui octroyer les moyens financiers pour pouvoir développer des programmes importants, tels que la nature en ville. En effet, la ville est malheureusement le seul type de territoire qui croît, et il faut donc y veiller avec une particulière attention. En matière d'énergie et de logement - et on peut d'ailleurs féliciter le gouvernement d'avoir réuni ces deux politiques publiques - il y a des enjeux extrêmement forts et qu'il faudra aussi réussir à atteindre.
Maintenant, si je reviens sur ce que Mme Mazzone a mentionné avant, soit le problème des particules fines liées au trafic, il ne faut pas regarder cela seulement par le petit bout de la lorgnette. Le problème est toujours le même: c'est celui du nombre excessif, qu'il s'agisse de trafic ou des ressources en général. L'épuisement de nos ressources est dû à une consommation excessive. La consommation excessive est surtout due à un nombre excessif de consommateurs. Au niveau mondial comme au niveau local, on ne doit pas dépasser les limites de notre territoire ou de ce que la planète peut supporter. Comme nous le rappelait un préopinant, une croissance infinie dans un monde fini est impossible. Il s'agit aujourd'hui d'avoir une croissance mesurée. Je regrette que cette notion même soit complètement occultée dans toute cette politique publique. A ce propos, l'UDC arrive le 9 février avec une initiative qui concerne le problème de l'immigration de masse, qu'il faut pouvoir contrôler. Plus tard, il y aura une autre initiative, qui s'appelle Ecopop et concerne aussi ce problème-là. A un moment donné, il faudra bien nous rappeler que nous sommes dans un territoire limité avec des ressources limitées et veiller à se préoccuper du nombre de personnes qui l'occupent. (Quelques applaudissements.)
M. Bernhard Riedweg (UDC). Dans cette politique publique, il faut se poser la question suivante: jusqu'à quelles limites et pour quels coûts veut-on protéger l'environnement à titre préventif, réguler la gestion des eaux et préserver le patrimoine naturel genevois ? Le plus difficile, dans cette politique publique, est de définir le ratio «écologie» par rapport aux coûts engendrés. Par exemple: assainir les bâtiments publics et réduire les émissions de CO2 de l'Etat, améliorer la qualité de l'air et des cours d'eau, atteindre les objectifs de recyclage du plan de gestion des déchets ou encore réduire la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. La gauche ne cesse de demander des investissements éthiques qui font augmenter le prix de la facture. Merci, Monsieur le président.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste dire un mot sur la politique de l'environnement de l'Etat de Genève. Cette politique se traduit en quatre programmes, très importants les uns comme les autres: le programme de l'environnement, celui de la gestion des eaux, le programme de la nature et du paysage et enfin celui de la politique agricole.
Concernant le programme de protection de l'environnement, on peut citer la gestion et le tri des déchets, une politique très importante où Genève excelle aujourd'hui, et je crois que nous pouvons en être fiers. Comme cela a été dit, on peut également citer toute la politique de protection de l'air et de protection contre le bruit. Aujourd'hui, on sait que les normes de protection de l'air, notamment les particules fines, sont souvent, ou en tout cas régulièrement dépassées à Genève, du moins dans l'hypercentre, et c'est un vrai problème. Du coup, cette politique est importante. Même chose pour la protection contre le bruit: on sait qu'environ 80 000 personnes, notamment en ville de Genève, souffrent de nuisances sonores trop élevées.
Le deuxième programme concerne la gestion des eaux. Je crois qu'il est essentiel - et c'est mentionné - de mettre en place une gestion intégrée de l'eau dans une approche transfrontalière. Mesdames et Messieurs les députés, l'approche transfrontalière est vitale. Nous partageons le lac Léman avec la France, nous partageons la nappe phréatique avec la France. Il faut se rappeler qu'il y a quarante ans encore, le lac Léman était très pollué. C'est avec une mobilisation de la société civile, des milieux économiques, des autorités politiques du côté français comme du côté suisse, qu'on a réussi à le sauver et à le dépolluer. On doit continuer à suivre cet exemple aujourd'hui dans le cadre de la gestion des eaux. Je soulignerai également la renaturation des cours d'eau, une politique importante en termes de protection de l'environnement.
J'aimerais peut-être juste dire deux mots sur le programme de la nature et du paysage. Il est essentiel de pouvoir maintenir le cadre de vie qu'on a la chance d'avoir à Genève, et ce n'est pas M. Barthassat, conseiller d'Etat, qui va me contredire. On a la chance d'avoir une zone urbaine importante et dense, mais aussi toute une ceinture verte, comme on l'appelle, avec de magnifiques vignes, des maraîchers, des agriculteurs, etc., qui nous permettent, à quinze minutes de la ville, de pouvoir respirer, d'aller se promener et de déguster des produits du terroir. Et j'aimerais citer ici un nombre qui m'a marqué quand nous avons étudié le concept «Environnement 2030» en commission, à savoir celui de 20 000: il y a 20 000 espèces qui vivent encore dans le canton de Genève aujourd'hui, et je pense qu'il est vraiment vital de pouvoir les préserver.
Pour terminer, la politique agricole, également une politique importante qui touche de près M. le conseiller d'Etat: il faut promouvoir une agriculture productrice, rémunératrice et concurrentielle, mais aussi protectrice de l'environnement. Je crois qu'il faut mettre en avant cette agriculture de proximité. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir à la fois une agriculture et une viticulture de qualité dans notre canton, et c'est aussi à l'Etat de promouvoir cette politique agricole, cette agriculture, les produits du terroir, les produits de la région... Je crois que c'est vraiment essentiel par rapport à la consommation de produits qui viennent parfois de milliers de kilomètres de l'étranger. A l'heure qu'il est, on peut boire du vin genevois de qualité, avec plein de spécialités... (Remarque.) ...exactement, Monsieur Leyvraz ! Il n'y a pas besoin d'acheter du vin de Nouvelle-Zélande, d'Australie ou d'Afrique du Sud. C'est la même chose pour certains fruits et légumes. Il faut donc promouvoir le label GRTA et les produits du terroir.
Je veux en tout cas féliciter le département de l'environnement - anciennement le DIME sous Mme Künzler - qui a fait un travail exemplaire en termes de protection de l'environnement par rapport à ces quatre programmes. J'espère vraiment que le nouveau conseiller d'Etat, M. Barthassat, pourra continuer dans cette politique très positive. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Je pense qu'en matière de protection de l'environnement, il faut se méfier des grandes idéologies. Il faut d'abord avoir une politique pragmatique. Il y a des déceptions dont on peut se rendre compte quotidiennement à Genève, parce que l'on constate que certaines politiques ne sont pas correctement menées, notamment dans le domaine de la gestion des déchets. D'ailleurs, ce ne sont en général pas des communes de droite qui font mal le travail dans ce domaine; au contraire, c'est plutôt la gauche qui devrait balayer un peu devant sa porte, si je puis dire. Il y a donc un pragmatisme à adopter: mieux vaut agir plutôt que de parler. A mon sens, c'est l'élément le plus important.
De plus, il ne faut pas croire que Genève est le centre du monde et qu'on va pouvoir sauver la planète en réalisant quelques pistes cyclables, quelques petits aménagements écolos pour que la planète se porte mieux. Non, c'est un problème beaucoup plus global et qui, malheureusement, nous échappe. Comme il nous échappe par exemple dans le domaine de la renaturation des cours d'eaux. On se rend compte que Genève a fait un excellent travail. Et je crois qu'il faut en être reconnaissant au magistrat Robert Cramer, qui s'est vraiment engagé en la matière. Je pense que nous devons collectivement lui en être reconnaissants, comme bien sûr à tous les autres intervenants qui l'ont soutenu en la matière. Mais maintenant, la France devrait intervenir pour faire son travail qui est important, puisqu'elle se trouve souvent aux sources, comme par exemple dans le cas de l'Allondon ou d'autres rivières genevoises essentielles pour notre nature, pour notre petit coin de nature local.
Par ailleurs, j'abonde dans le sens de mon préopinant socialiste, qui a dit qu'il fallait défendre l'agriculture genevoise dans ce qu'elle a de plus dynamique, donc notamment la viticulture. Et vous transmettrez, Monsieur le président, M. Leyvraz peut en témoigner de manière tout à fait vivante. Il s'agit là d'un élément important qu'il faut défendre de manière pragmatique. Mieux vaut faire peu, mais bien. Je crois que c'est le sens de ce type de politique à mener. Merci, Monsieur le président.
M. Marc Falquet (UDC). Je m'excuse, mais je ne suis pas tout à fait d'accord avec M. Baertschi. En fait, rien ne nous échappe. Il appartient simplement à chacun de montrer l'exemple dans sa vie de tous les jours par des actions concrètes, c'est-à-dire acheter local et trier ses déchets. Voilà, il n'y a pas d'autres... C'est vraiment l'exemple qui fait avancer les choses. Merci beaucoup.
M. Thomas Wenger (S). C'est un peu difficile pour moi de laisser passer le commentaire de mon préopinant MCG, à savoir «il ne suffit pas». Vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Baertschi. Je trouve un peu fort de café de dire qu'il ne suffit pas de construire quelques pistes cyclables pour améliorer l'environnement, surtout de la part du parti qui, avec l'UDC, revendique tout à la fois une traversée de la rade, une traversée autoroutière du lac, l'autoroute de contournement à trois voies, la route des Nations... Des routes et encore des routes ! Franchement, je crois que quelques pistes cyclables supplémentaires et davantage de transports publics permettraient d'aller un peu dans le sens de l'environnement. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. François Baertschi (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez à mon préopinant que l'important, ce sont les politiques à mener... C'est l'abus de pistes cyclables, comme on est en train de le vivre actuellement, où l'on voit de véritables autoroutes dans certains cas, mais peu utilisées. On va détruire des espaces verts pour mettre des pistes cyclables, ce qui n'est pas tolérable... (Exclamations. Commentaires.) Ce n'est pas tolérable ! Oui, j'ai des exemples à vous présenter. Vous pouvez en douter, mais c'est le cas. Et je pense notamment, en tant qu'utilisateur, que la politique des déchets en ville de Genève est un véritable désastre. Elle est en effet très mal menée, en comparaison avec d'autres communes qui ont moins de moyens que la Ville de Genève. Merci, Monsieur le président.
M. Thierry Cerutti (MCG). Je ne peux rester silencieux sur ce sujet. J'aimerais simplement dire ceci à mon préopinant socialiste, président de l'ATE: lorsque les cyclistes commenceront à passer un permis de circulation au même titre que les automobilistes, afin d'apprendre et de respecter la loi sur la circulation routière, qui est malheureusement un gros problème aujourd'hui de la part des cyclistes, quand les cyclistes et les utilisateurs commenceront à payer des impôts au même titre que les automobilistes, on entrera peut-être en matière pour faire plus de pistes cyclables.
M. Thomas Wenger (S). Après, je vous promets que j'arrête ! (Exclamations. L'orateur rit.) Oui, je vous promets que j'arrête. C'est le matin, voilà tout ! (L'orateur rit.) Sérieusement, comment peut-on prétendre que quelques pistes cyclables pourraient détruire des espaces verts ? Quand on sait que la traversée de la rade passerait sur un bout du parc Mon Repos d'un côté et arriverait sur le parc des Eaux-Vives de l'autre, ou que la traversée autoroutière du lac arriverait, selon le projet du Conseil d'Etat, en plein sur la réserve naturelle de la Pointe à la Bise. Franchement, ce ne sont pas quelques centaines de mètres de pistes cyclables qui vont poser un problème à nos espaces verts, mais bien ces deux traversées autoroutière et routière que vous soutenez, sur les bancs d'en face. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, il est dommage que dans cette politique, on passe sur des problèmes de circulation. Aussi me permettrez-vous de rappeler que ce que vous racontez, Monsieur, est en fait un dogme pour maintenir ou avoir un transport collectiviste. La mobilité mobile est totalement écartée; c'est quelque chose dont vous ne voulez pas. Or prétendre que construire des traversées va augmenter la pollution, c'est simplement faire fi de tout ce qui est en train de se faire pour abandonner le moteur thermique et se tourner vers d'autres solutions où la mobilité privée sera maintenue en ayant un moins grand effet sur l'environnement.
Pour finir, si on veut aller jusqu'au bout du raisonnement, je m'étonne aussi - et je pense à ma préopinante Verte - du fait que vous êtes tous en train de dire: «Il faut mondialiser, il faut ouvrir, il faut amener des choses.» Et puis quand on lit un petit article... Oui, nous aurons des problèmes d'énergie, mais ces problèmes d'énergie sont en train d'être résolus. Et je n'entends personne sur vos bancs évoquer l'utilisation des ressources du charbon, puisqu'il paraît que nous en avons pour plus de 170 ans et que c'est actuellement, et ce sera, la pire cause d'augmentation de la pollution. Alors, Mesdames et Messieurs, comme disait une élue socialiste française, revenons un petit peu à la «suissitude», ce n'est peut-être pas si mauvais que ça.
Mme Lisa Mazzone (Ve). C'est amusant, parce que M. le député Patrick Lussi - vous transmettrez, Monsieur le président - a parlé de dogme. Or c'est exactement le terme que je souhaitais employer pour décrire les propos qui ont été tenus au sein des partis qui nous font face. Aujourd'hui, on est face à des faits, des faits réels, autant en termes de pollution de l'air qui s'accentue que de sédentarité. Mais quand on pense aux particules fines en particulier, qui sont dues d'abord au trafic motorisé qui se développe beaucoup trop abondamment dans le canton de Genève... Aujourd'hui, il faut reconnaître ces faits, il faut reconnaître les dommages qu'ils créent, en particulier sur la santé publique. Ne pas les reconnaître, c'est justement faire preuve de dogmatisme. Aujourd'hui, il faut prendre de réelles mesures pour lutter contre cette pollution et améliorer la santé de toutes et tous. Cela passe notamment par un encouragement à la mobilité douce, par l'aménagement de pistes cyclables ou de bandes cyclables pour engager la population à utiliser davantage le vélo, ou simplement par des mesures d'encouragement, telles que la gratuité des transports publics en cas de pics de pollution. Quand on est face à des faits, il s'agit de ne plus s'attacher à des croyances, mais bien de prendre de réelles mesures pour améliorer rapidement la qualité de l'air et la santé des citoyennes et citoyens. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Nous allons passer le reste des programmes en revue, puis je donnerai la parole à M. le conseiller d'Etat à la fin de la discussion sur cette politique publique, avant le vote. Il reste donc les programmes F03 «Gestion des eaux», F04 «Espèces, écosystèmes et paysages et loisirs de plein air» et F05 «Politique agricole». Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Luc Barthassat.
M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, à mon tour d'exprimer le plaisir que j'ai à parler devant vous pour la première fois dans cette enceinte. Je vais essayer de faire en sorte que tout le monde ait des réponses, puisque chacun s'exprime et a des interrogations assez similaires. On parlait de l'air qui n'a pas de frontières. Il est bien évident que l'air n'a pas de frontières. D'ailleurs, nous en usons beaucoup, nous en brassons même parfois un peu dans ce parlement. Mais on voit qu'il s'agit d'un problème qui touche vraiment tout le monde. Nous avons tous des soucis concernant notre environnement, concernant l'écologie. Et s'il est vrai qu'il y a des mesures à prendre - on a parlé de particules fines à propos de ces problèmes de climat, quand il y a plusieurs jours de brouillard d'affilée - nous nous sommes déjà posé la question, j'ai moi-même déjà posé la question au sein du département quant aux mesures qu'on pourrait prendre. On a des exemples de nos voisins français, qui font parfois simplement diminuer la vitesse sur les grands axes routiers. Au niveau local, je réfléchis à des solutions - je dis bien que je réfléchis, je ne fais pas de belles promesses qui pourraient rendre certains fous joyeux. Nous pourrions par exemple travailler avec les TPG sur des actions au niveau des prix, voire peut-être envisager la gratuité pendant certains jours où les pics de pollution dépasseraient vraiment trop largement les normes... (Applaudissements.) Je dis bien que ce sont des mesures sur lesquelles nous devrons réfléchir et travailler.
A ce sujet-là justement, à la commission de l'environnement et de l'agriculture, nous sommes en plein travail sur le projet «Environnement 2030» qui complétera, je l'espère, cette politique de l'environnement, laquelle, bien sûr, concerne la qualité de l'air, de l'eau et de notre agriculture, mais aussi les problèmes de santé publique. Je me soucie déjà de pouvoir auditionner des gens pendant nos travaux, car je crois qu'il serait également intéressant de rencontrer les personnes des milieux de la santé, afin qu'ils puissent partager leurs préoccupations, les chiffres, tout ce qu'ils ont à subir. En tout cas, il est vrai que le mieux pour notre canton, c'est déjà d'agir au niveau local. Au niveau international, c'est la Confédération qui agit avec des lois fédérales, faites en concertation avec notre canton et les autres. Il est bien évident - et c'est quelque chose que j'aimerais rappeler - que nous avons une délégation de conseillers nationaux à Berne. Il serait peut-être judicieux de les auditionner de temps en temps, de manière que nous sachions ce qui se passe à Berne et qu'ils nous rejoignent sur ces axes importants. Personnellement, j'ai passé neuf ans à Berne. Durant cette période, je crois que je n'ai été auditionné qu'une seule fois par les commissions du Grand Conseil, ce que je trouve un peu dommage. Profitez de demander l'avis de nos conseillers nationaux, histoire qu'on puisse se réunir. Vous savez aussi que nous avons maintenant des gens en relation à la fois avec le Conseil d'Etat et la délégation à Berne, qui font le lien entre les deux. Je pense qu'il serait bien que le Grand Conseil profite de temps en temps de cette délégation à Berne.
Je ne vais pas m'étaler davantage sur le sujet. C'est un souci du département, c'est un de mes soucis quant à l'environnement. Vous savez en effet que je suis proche de l'agriculture, je suis encore un petit peu agriculteur dans l'âme. Il y a beaucoup de choses qui se passent au niveau local, s'agissant des produits locaux et de la lutte locale. Or s'il y a bien un endroit où les problèmes peuvent se réunir et dépasser les clivages politiques, c'est celui-là. J'espère donc que vous vous rassemblerez pour le vote de ce budget équilibré - en tout cas dans ce département et aussi dans les autres - pour que nous puissions arriver à poursuivre cette politique ensemble. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je soumets la politique publique F aux suffrages de l'assemblée.
Mise aux voix, la politique publique F «Environnement» est adoptée par 60 oui et 19 abstentions.
G - AMENAGEMENT ET LOGEMENT
Le président. Nous abordons maintenant la politique publique G «Aménagement et logement». S'agissant du programme G01 «Accès au logement», la parole est à M. Rémy Pagani.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, j'ai été très étonné des objectifs de politique publique qui nous sont décrits dans ce document. On est loin des 2500 logements par année. On en est loin ! Il y a quand même quelques paradoxes assez étonnants. D'ailleurs, je m'étonne que les responsables de ce département ne soient pas présents, mais enfin... Quand même ! J'ai quelques petites interrogations, par exemple en ce qui concerne la politique d'achat des terrains. Parce que tout le monde comprendra bien que pour mener une politique active, pour fournir 2500 logements, et des logements correspondant aux besoins de la population, il va falloir se retrousser les manches et notamment acheter beaucoup de terrains. Il nous est dit que depuis 2008, 62 parcelles ont été achetées, représentant à peu près - j'ai fait le calcul - 1000 mètres carrés. Ce qui veut dire que nous ne sommes pas du tout dans la logique d'acheter et de construire beaucoup de logements, et de logements bon marché, puisque en fait, pour construire des logements bon marché aujourd'hui dans le canton de Genève, il faut que l'Etat s'investisse, mette de l'argent et achète des terrains. Malheureusement, on est loin, loin, loin du compte. On a acheté quasiment 12 parcelles par an depuis 2008, Mesdames et Messieurs. Si on ne prend pas de mesures extrêmement drastiques, nous n'arriverons pas, le gouvernement n'arrivera pas à fournir ces 2500 logements par année.
Une étude a été faite en son temps, qui indique que sur une centaine de transactions entre particuliers, notamment dans la zone villas ou dans la zone de développement - surtout dans la zone de développement - il y a 60 objets qui repartent pour quarante ans, que l'autorité laisse passer, puis 20 autres qui sont globalement achetés par les collectivités municipales, et enfin les 20 derniers par l'Etat de Genève. C'est dire le peu de transactions sur lesquelles l'autorité intervient pour acheter des terrains ! Ça, c'est un premier constat. J'ai bien l'impression que tout ce qui a été fait pour restructurer... On nous dit qu'on va mettre en place - ou on a mis en place - un service foncier qui va être très actif, j'attends de voir ! De manière générale, la proportion que je viens de vous donner est extrêmement basse, aujourd'hui encore.
Enfin, concernant les préemptions: dans la zone de développement, c'est-à-dire dans la zone qui est faite pour cela, les notaires nous informent par exemple sur la Ville de Genève, mais il y a peu de terrains qui sont préemptés par l'Etat de Genève, voire quasiment aucun aujourd'hui - enfin, ces derniers temps. Je le regrette; je le regrette d'autant plus qu'il y a un terrain en train d'être vendu en ce moment même à la Praille. Et je reviendrai sur la zone Praille-Acacias-Vernets, dont on nous disait il y a six, sept ou huit ans qu'on allait y construire: rien ne s'est encore construit aujourd'hui. Un terrain est à vendre, et j'attends de voir si l'Etat va le préempter pour mettre en oeuvre les grandes déclarations qui ont été faites ces dernières années. Malheureusement, rien ne se passe.
En ce qui concerne les autorisations de construire, il y a là quelque chose d'étonnant aussi, et c'est quand même paradoxal: on nous dit qu'on va délivrer des autorisations de construire. Mais ce qui se passe en réalité, c'est qu'on est en train d'organiser le travail pour délivrer les autorisations de construire plus rapidement. Comme je l'ai dit à la commission des travaux, je trouve extraordinaire qu'un gouvernement se mette à légiférer pour organiser le département et son fonctionnement, pour déterminer des délais. Il me semblait que c'était plutôt le rôle du magistrat en charge ou du président de département d'organiser et de faire en sorte que les délais soient respectés, et qu'il ne fallait pas simplement faire une loi. Vous serez nantis de cette loi. Ma foi, il faudra bien la voter, mais je trouve assez extraordinaire qu'on fasse passer des réglementations internes...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Rémy Pagani. ...par une loi. Je reprendrai la parole si c'est nécessaire, mais toujours est-il que... En tout cas, ce qu'il y a de certain, ce qu'il y a vraiment de certain - et je reviendrai là-dessus l'année prochaine et peut-être encore l'année suivante - c'est que bien qu'on ait décidé de construire 2500 logements, on ne s'en donne pas du tout, mais alors pas du tout les moyens au niveau de la structuration des départements, de l'action du gouvernement. Je le regrette, et nos concitoyens le regrettent, parce qu'ils continueront...
Le président. C'est fini, Monsieur le député.
M. Rémy Pagani. ...à s'expatrier pour aller se loger. Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S). Dans le présent projet de budget, mais également lors du discours de Saint-Pierre, il a été affirmé que l'augmentation du parc de logements d'utilité publique, à savoir les LUP, est une priorité pour le précédent comme pour le nouveau gouvernement; j'ai d'ailleurs été très heureuse de l'entendre, et j'attends avec impatience de voir le Conseil d'Etat mener une politique proactive en la matière. Mais on en n'est actuellement qu'au niveau des grandes intentions, qui sont très bonnes, selon moi, et le Conseil d'Etat doit maintenant se donner les moyens d'atteindre ces objectifs et la hauteur de ses ambitions. A ce titre, je souhaite rappeler que l'objectif du programme LUP est d'atteindre 20% du parc immobilier genevois. On peut constater également que le parc LUP n'a augmenté que de 0,4% en 2012. Vous comprendrez donc qu'on avance dans la bonne direction, mais malheureusement à pas de fourmis. Depuis la création du fonds LUP en 2007, moins de 1000 logements LUP ont été construits: ces résultats ne répondent malheureusement pas du tout aux attentes et aux ambitions qui émanent de ce programme.
Dans la situation de pénurie de logements qu'on connaît à Genève, tout le monde est d'accord ici sur le fait qu'il faut construire. Mais il est important de construire des logements accessibles à toutes les catégories sociales. Et de ce fait, l'augmentation du parc LUP correspond à un besoin urgent et prépondérant de la population genevoise. Avec plusieurs projets de déclassement de terrains en zone de développement qui sont en cours, le Conseil d'Etat a actuellement l'opportunité de mener une réelle politique proactive de construction de logements LUP. C'est entre autres par une politique d'acquisition foncière digne de ce nom qu'il pourra mener à bien cet objectif, et notamment par l'usage du droit de préemption qui, durant la précédente législature, a malheureusement été mis un peu au placard. Il serait à mon avis temps de ressortir cet outil pour élaborer une réelle politique d'acquisition foncière, car il s'agit de l'un des seuls moyens pour mener une politique ambitieuse en la matière, surtout à la hauteur de l'ambition des objectifs du Conseil d'Etat. Malheureusement, la politique menée par le précédent Conseil d'Etat et surtout le projet de budget 2014 que nous étudions actuellement ne donnent pas au Conseil d'Etat les outils nécessaires pour mener cette politique ambitieuse. J'espère qu'à l'avenir, il tiendra à coeur au nouveau gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour honorer ses engagements. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Mme Maria Casares (S), députée suppléante. Mon intervention ne va pas donner les lignes directrices du parti socialiste concernant ce département, puisque ma collègue Caroline Marti vient de le faire avec brio. Il s'agit plutôt d'une question au magistrat par rapport au service de l'urbanisme. Selon nos informations, ce service devrait être réorganisé. Nous voudrions donc connaître les termes de cette réorganisation. Nous avons aussi eu l'information qu'il y avait des postes qualifiés. Nous souhaitons savoir si ces postes vont être pourvus et ce qui va se passer par rapport à ces postes. Enfin, nous aimerions également connaître les critères pour le choix de la classe salariale.
Mme Christina Meissner (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, on n'a jamais réussi à atteindre l'objectif des 2500 logements. Croire qu'on y arrivera un jour, c'est tromper la population. On n'est plus dans les années 60, où le territoire offrait encore un certain nombre de possibilités. Aujourd'hui, les territoires sur lesquels on construit sont des territoires où il y a déjà des habitants. Dans ces zones de développement, on veut ajouter et entasser davantage de monde en oubliant qu'il y a déjà des habitants. Alors les déclassements, les préemptions... Il faudrait peut-être faire attention à prendre aussi en compte les résidents d'aujourd'hui.
Maintenant, vous savez que le corollaire de l'objectif de construire des LUP, c'est évidemment que pour assurer un certain rendement, il faut faire de la propriété par étages ou des loyers libres, qui, de par leurs prix élevés, ne sont pas plus accessibles que les LUP aux résidents et à leurs enfants. Et je rappelle encore un autre problème: aujourd'hui, cette construction de logements qu'on veut de plus en plus forte et déterminée, c'est pour répondre à quoi ? Ce n'est pas pour loger nos enfants - malheureusement, on ne se reproduit pas tant que ça à Genève - mais bien pour une immigration, une immigration de masse. En ce qui concerne l'UDC, la priorité va d'abord aux habitants de ce canton et à la mixité, une mixité d'habitats qui doit perdurer sur notre territoire. Certes, il faut penser à ceux qui ne peuvent pas accéder à la propriété, mais il faut penser aussi à la classe moyenne. Nous attendons donc de l'action dans ce sens-là du nouveau conseiller d'Etat qui, du fait d'être Vert, est attaché à la mixité, et surtout à la participation. Nous ne construirons dans ce canton qu'en tenant compte des besoins de ceux qui s'y trouvent déjà et en les associant pleinement. Cette construction doit être raisonnable, elle doit être mixte, et elle doit tenir compte des besoins des habitants d'abord.
M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs, je trouve quand même... Tout à l'heure, je me suis exprimé sur le fonctionnement de l'Etat. Mais quelques mots maintenant concernant la production de logements, à savoir quels types de logements nous avons produits ces trois dernières années. La politique qui a été menée a changé le paradigme, si j'ose dire, qui consistait à construire des logements à la fois locatifs et en propriété par étages. On a inversé le programme en disant qu'on allait construire des PPE afin de libérer des logements locatifs pour la population. Mais malheureusement, on s'est aperçu depuis trois ans - et c'est la réalité - qu'on produit beaucoup moins de logements sociaux - enfin, de logements à destination de la majorité de la population: sur environ 1000 logements, on n'en produit que 400 - et encore, il faut vraiment aller les chercher. Tout le reste, ce sont des logements qui restent inaccessibles, y compris à la classe moyenne que certains semblent - ou prétendent - défendre ici, à savoir des cinq-pièces à 2 500 000 F, Mesdames et Messieurs. Vous ouvrez votre journal et vous tombez sur une majorité d'appartements à vendre. C'est complètement paradoxal de la part de certains députés des bancs d'en face, qui ont mené cette politique avec M. Mark Muller, M. Longchamp et autres, alors que vous avez tous voté ici, ou du moins une grande majorité, pour prétendument mettre en place un système LUP, la paix du logement. En fait, on arrive à un «collapse» de la production de logements, parce que 1000 logements, ce n'est plus produire de logements, en tout cas pas par rapport aux besoins de la population. Et puis, quand on produit des logements chers, ils sont inaccessibles, y compris aux classes moyennes supérieures. Même en étant médecin et architecte, un couple ne peut pas accéder à un logement de cinq pièces à 2 500 000 F. C'est la réalité ! A moins de spéculer, d'acheter dix appartements et de se refaire en les vendant, ce qui revient à spéculer comme n'importe quel spéculateur.
De notre côté, nous pensons qu'il faut inverser cette loi. Il faut changer cette loi et revenir à des concepts beaucoup plus simples, qui ont d'ailleurs été expérimentés par les milieux de droite. Il ne s'agit pas de HLM, mais en tout cas de mettre de l'argent à disposition pour créer de la richesse, construire des logements et faire en sorte que les gens - ouvriers, employés, classe moyenne - puissent accéder aux logements locatifs. Parce que, malheureusement, le processus que vous avez mis en place démontre qu'on est allé à l'échec. Il faut permettre à tout un chacun de pouvoir se loger ici concrètement. Et cela a été démontré dans certaines communes: on peut le faire. Malheureusement, on n'en prend pas le chemin.
Pire encore, on en rajoute maintenant une couche en disant qu'il faut alléger les procédures, que les PLQ sont compliqués et qu'on va donc les simplifier. Je vous rappelle simplement qu'une soixantaine environ de plans localisés de quartier sont en rade. L'autorité devrait aller forcer les propriétaires récalcitrants, comme elle en a la possibilité, pour mettre en oeuvre les plans localisés de quartier qui donneraient des logements, qui permettraient de construire immédiatement des logements. Hélas, l'autorité n'agit pas en tant qu'autorité, elle se défausse en disant qu'il faut créer des PLQ, puis alléger les procédures de ces PLQ. On va se retrouver dans des situations inextricables, où les propriétaires n'auront même pas la sûreté d'avoir des droits à bâtir. Et ces PLQ ne donneront rien, Mesdames et Messieurs.
Je crois que là aussi, il y a une réflexion de fond à avoir. J'espère que le nouveau magistrat en charge se repenchera sur l'ensemble de ces procédures, parce que son défi à lui est de fournir 2500 logements par année. Or je ne pense pas que les conditions-cadres fixées par la majorité de droite ces quatre ou cinq dernières années lui donnent la possibilité de construire ces 2500 logements par année. Malheureusement, la population qui le demande instamment ne pourra pas être satisfaite.
Présidence de M. Antoine Barde, premier vice-président
M. Cyril Aellen (PLR). Je remercie M. Pagani d'intervenir. Cela me fait réaliser qu'en matière de politique du logement, il y a un réel conflit générationnel. J'aimerais quand même rappeler que quand les logements se construisaient sur territoire genevois, parfois pas à la satisfaction de tous, c'était dans les années 60 et 70, une époque où une politique de droite avait effectivement été menée, une politique de droite pour l'ensemble de la population. Or depuis les années 80, où d'autres sont venus à la tête du département, cette politique s'est enrayée. Personnellement, j'aimerais vous dire que j'ai pleine confiance en l'avenir s'agissant de la politique qui sera menée, parce qu'aujourd'hui, il y a effectivement une autre manière de voir comment on peut loger chacun de nos enfants. Et je fonde beaucoup d'espoirs sur le nouveau magistrat chargé de ce département, qui va poursuivre un travail déjà initié. Bientôt, on cessera probablement d'opposer locataires à propriétaires, riches à pauvres, petits logements à grands logements, logements en ville contre logements à la campagne, espaces agréables contre espaces avec des nuisances: je crois qu'on doit faire autrement.
Mais, Monsieur le président, vous transmettrez à ma collègue Caroline Marti que malheureusement, il ne faut pas commencer par dire que chacun veut construire; c'est précisément le problème. Chacun ne veut pas construire: il y a beaucoup de gens - y compris dans cet hémicycle - qui ne souhaitent pas construire. Ils viennent nous dire: «Je souhaite construire, mais... » et la liste des conditions est tellement longue qu'ils arrivent à leurs fins, à savoir qu'on ne construit pas. Aujourd'hui, le vrai enjeu politique est d'arriver à faire en sorte que chacun soit convaincu que pour loger nos propres enfants, il va falloir construire. Construire pour tous, et de façon concertée et appliquée. Le vrai problème, c'est la sur-réglementation. Voilà ce qui permet à chacun des camps d'empêcher les uns et les autres de construire ce qu'ils veulent, de faire ce qu'ils doivent faire pour les générations futures. Et c'est à cela qu'il va falloir s'atteler, à savoir comment faire pour que les choses puissent se réaliser plus facilement, mieux, correctement, et ceci pour chacun: pour les plus démunis, pour les moins démunis, pour les favorisés. Parce que chacun a des difficultés à se loger. Mais de nouveau, et c'est ce qui me choque ou ce qui me frappe plutôt dans ce débat budgétaire, ceux qui ont toujours le mot «argent, argent, argent» à la bouche, ce n'est pas la droite: c'est la gauche. C'est la gauche ! (Exclamations.)
Le président. Silence, s'il vous plaît !
M. Cyril Aellen. Parce qu'en matière de politique du logement, ce n'est précisément pas ça qui pose problème. Ce n'est pas ça qui pose problème ! Nous venons de verser des centaines de millions aux caisses de pension - oui, des centaines de millions ! - qui sont des acteurs importants dans la production de logements, et pas pour les particuliers avec des appartements à 2 millions et demi de francs. Ce n'est pas ça, la vraie problématique. La vraie problématique, c'est que beaucoup d'entre nous, et peut-être beaucoup sur les bancs de la gauche, ne souhaitent en réalité pas construire ou ne pas avoir de loyers suffisamment accessibles et diversifiés au sein de la population, afin de pouvoir entretenir leur fonds de commerce. Maintenant, il va falloir tous se mettre autour d'une table, oeuvrer dans la concertation et admettre que chacun doit pouvoir construire et habiter, qu'habiter à la campagne peut finalement être bien, tout comme habiter en ville. Etre locataire, c'est bien; être propriétaire aussi, c'est un droit légitime. Je crois que c'est de cette autre façon qu'il conviendra de faire de la politique, et pas de celle que j'ai entendue de la bouche du député M. Pagani.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il y a déjà passablement de choses qui ont été dites sur le logement. Je crois que la principale à retenir, c'est effectivement la lourdeur administrative pour construire quelque chose aujourd'hui. Il faudrait essayer de rénover un peu toutes les démarches auprès du DALE et de l'office du logement afin d'améliorer la cadence et de construire efficacement, puisque le canton de Genève est quand même à l'aube de compter un demi-million de personnes.
J'ai entendu parler des LUP tout à l'heure. Je pense qu'aujourd'hui, la solution des LUP est la bonne. C'est une bonne solution. Les LUP se sont montrés efficaces, du moins ceux qui ont été construits ces dernières années, à savoir de 2007 à ce jour. Il est vrai qu'il n'y en a malheureusement pas eu beaucoup, mais ils se sont quand même montrés efficaces, répondant à un besoin de la population. Or ces LUP ne peuvent pas être construits sans les PPE. Ils peuvent effectivement être construits, mais la mixité PPE et LUP prouve que l'on peut avoir des appartements de qualité, une qualité répondant à la demande. Aujourd'hui, construire uniquement du social n'est pas fonctionnel. Ça ne va pas ! On fait du petit, du rachitique. On fait des cuisines dans le salon qui ne ressemblent à rien, on compte des pièces comme la cuisine, alors qu'elle ne représente rien du tout, vu que c'est juste un carré dans un salon. Je suis désolé mais ce n'est pas ça, construire pour la population. Nous devons absolument appliquer cette mixité. La PPE s'adresse aussi à la classe moyenne, c'est une possibilité de se loger. Actuellement, il n'y a pas uniquement des gens dans le besoin avec de faibles revenus qui cherchent des logements, mais également des personnes de classe moyenne qui, ne trouvant malheureusement pas d'appartement, sont obligés de s'expatrier en France voisine.
Construire est donc effectivement le maître mot, mais comment construire ? Faut-il se contenter de construire des immeubles de quatre étages avec trois appartements par étage, de petites choses ? Je sais que du côté de la droite, on aimerait densifier à 2,... je ne sais plus combien... (Remarque.) 1,8, merci. Je ne suis pas sûr que construire à 1,8 de densification soit le critère de base minimum. Je pense qu'une densification variable est à appliquer selon les lieux, les quartiers et les endroits, et non pas un minimum applicable partout. Alors, construisons, oui. Plus vite, plus haut, oui. Construisons mieux. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). J'ai entendu tout à l'heure notre collègue M. Aellen dire que la gauche était toujours près de l'argent. Ma foi, cher ami, quand une personne en EdS gagne 2000 balles, il faut bien qu'elle ait du pognon pour payer un logement à 2500 F. Aujourd'hui, un quatre-pièces à moins de 2500 F, voire 3000 F, vous ne l'avez pas ! Or selon les normes cantonales, 20% du revenu doivent être attribués au loyer. C'est-à-dire que si une personne doit payer un loyer de 2500 F - en tenant compte de ce taux d'effort de 20% - elle devrait gagner 12 000 F par mois ! Je m'adresse maintenant aux députés des bancs d'en face, plus particulièrement aux directeurs de petites et moyennes entreprises, et non pas des grandes: est-ce que vous pouvez payer vos travailleurs, par exemple des ouvriers qualifiés, 12 000 F ou 13 000 F de sorte qu'ils puissent payer un appartement de quatre ou cinq pièces à raison de 2500 F ou 3000 F par mois ? Est-ce que vous pouvez payer les ouvriers, les travailleurs, à ce niveau-là ? Vous ne le pouvez pas ! Par conséquent, avec la spéculation qu'il y a aujourd'hui à Genève sur le logement, on assiste à une paupérisation de la population. Et c'est vous qui l'avez provoquée !
Par ailleurs, Monsieur Aellen, vous savez très bien que le rendement locatif à Genève est l'un des plus hauts de Suisse. Ce sont les normes fédérales, M. Dandrès pourra le confirmer: le rendement locatif à Genève est de 18%. Mais c'est abusif ! Franchement, quel investissement industriel vous rapporte 18% aujourd'hui ? Quand on table sur 5% ou 6%, c'est déjà très intéressant. A Genève, c'est 18%. Et qui paie ces 18% ? Les locataires, effectivement. Voilà le problème !
Ensuite, Madame Meissner, vous dites qu'il est impossible de construire 2300 logements. Je vais vous dire ceci, Madame: à l'époque, l'objectif n'était même pas de 2300, mais de 3000 ! On est descendu à 2300, et maintenant on parle de 1700. Mais quel est le problème ? C'est la politique foncière. C'est la politique foncière ! Les 35 millions qui sont affectés aujourd'hui aux LUP seront liquidés en six mois. En six mois ! Ça ne tient qu'à vous, Mesdames et Messieurs, d'augmenter ce fonds à 70 millions, et vous verrez qu'on aura beaucoup plus de terrains à disposition, ça ira beaucoup plus vite, et on construira plus rapidement. Mais je doute beaucoup - et vous êtes d'accord, Monsieur Aellen - qu'on augmente le montant de ce fonds à 70 millions. De notre côté, on serait d'accord ! Nous, c'est-à-dire ceux qui sont pour le pognon, on est d'accord. Nous qui parlons d'argent, on est d'accord de mettre 35 millions supplémentaires pour la politique foncière. Mais vous, vous n'êtes pas d'accord là-dessus. Voilà le problème, voyez-vous. Alors oui, je vous le dis sincèrement: moi, je parle d'argent. Parce que je trouve que dans le monde où on vit, dans le monde pratique, on a besoin d'argent. On a besoin d'argent pour se nourrir, pour payer le loyer, les impôts, les écoles, pour payer beaucoup de choses. Or quand l'argent manque chez les gens à petit budget, ils revendiquent, et c'est normal.
Parlons maintenant de la diversification. Vous avez parlé de la diversification, Monsieur Aellen. Je suis d'accord avec vous ! Mais attendez, il y a quand même un petit «mais».
Une voix. Ah !
M. Alberto Velasco. Voyez-vous, dans cette diversification, certains ont plus de besoins que d'autres. Il faut voir la proportion ! C'est pour ça qu'il y a la notion de prépondérance. Aujourd'hui, si vous avez des revenus conséquents, vous pouvez vous loger à Genève. C'est vrai ! Personnellement, si je peux mettre 5000 balles sur la table, je peux trouver un logement. Le problème concerne ceux qui n'ont pas ces moyens-là. C'est ça, le problème ! Voilà pourquoi il faut construire des HBM et même des logements à loyer plus bas encore. Monsieur Aellen, à la Fondation de la Ville de Genève pour le logement social, on fait des HBM. Vous savez qu'il y a des gens qui ne rentrent même pas dans les barèmes pour bénéficier des HBM ?
Le président. Monsieur le député, veuillez vous adresser au président.
M. Alberto Velasco. Monsieur le président, est-ce que vous savez qu'il y a des locataires... (Rires. Commentaires.) Est-ce que vous savez qu'il y a des locataires dans cette ville, enfin des citoyens, des habitants... (Brouhaha.) ...qui cherchent des logements, qui veulent avoir... (Brouhaha.) S'il vous plaît ! S'il vous plaît, chers collègues, calmons-nous ! ...qui veulent avoir un HBM mais ne peuvent même pas en bénéficier parce que leur revenu n'est pas suffisant ? Pour un HBM ! Alors, la Ville a inventé un système...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco. Oui, oui. Elle a inventé un système en fonction du revenu, c'est-à-dire qu'elle fixe les loyers en fonction du revenu. Et on doit loger ces gens à ce niveau-là, c'est-à-dire qu'ils paient 300 F ou 350 F. Voilà où on en est à Genève ! Effectivement, Mesdames et Messieurs, construisons et diversifions, mais surtout pour ceux qui en ont vraiment besoin, étant donné le contexte de précarisation que l'on vit. Voilà, Mesdames et Messieurs. Merci beaucoup, Monsieur le président, et excusez-moi, j'ai dû m'emporter.
Le président. Je vous en prie ! Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Patrick Lussi.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'essaierai de ne pas avoir de discours polémique et j'aimerais m'adresser directement au conseiller d'Etat. Il ne s'agit pas de stigmatiser, mais de présenter un problème, un souci qui va en augmentation vu le vieillissement de la population. Je parle de la catégorie à laquelle j'aime à m'apparenter, à savoir les SDA, acronyme qui signifie «sans domicile attribuable». On se trouve actuellement dans une situation avec des gens de 55 ans et plus face à des problèmes de travail. Comme on préfère aller choisir des cadres ailleurs, ces personnes se retrouvent sur le carreau et n'ont pas beaucoup d'argent. Bien sûr, nous sommes logés, bien sûr, de nombreuses mesures sont prises. Ma question va plutôt dans ce sens-ci, Monsieur le conseiller d'Etat, et je donnerai un petit exemple personnel: j'ai la chance d'avoir un immense appartement où nous ne vivons plus qu'à deux, puisque les enfants sont loin. Alors vous vous dites qu'on pourrait donner l'occasion à des jeunes de venir, mais rien n'est fait, rien n'est prévu, si ce n'est que je trouve des appartements avec moitié moins de surface pour 1000 F de plus par mois ! Je ne sais pas, je ne suis pas devin, je n'ai pas la solution, alors je vous demande la chose suivante: est-ce que le gouvernement commence à appréhender ce problème ? Y a-t-il des solutions envisageables ? Quelque chose à intégrer ? Il ne s'agit pas forcément d'attribuer de l'argent ou d'acheter, mais peut-être de changer des lois ou d'édicter de nouveaux principes. Je vous remercie de votre réponse.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, tout le monde semble être d'accord ici: il faut offrir plus de logements aux habitants de notre canton pour éviter un exode vers la périphérie, qui provoque des déplacements plus nombreux et l'engorgement qu'on connaît dans notre canton. Cependant, les recettes varient selon les partis. J'aimerais mettre l'accent aujourd'hui sur le fait de construire la ville en ville. La densification est quelque chose d'important pour préserver nos ressources naturelles, notre zone agricole, qui est une grande richesse pour notre canton. En février, nous allons d'ailleurs voter une loi qui a été adoptée par ce Grand Conseil et attaquée par référendum. Je pense que par rapport à la densification dans les zones de développement, il ne faut pas tomber dans un discours très manichéen consistant à dépeindre la campagne et la zone villas comme un paradis et la ville comme un enfer. Au contraire, la densité peut être synonyme de qualité de vie. Elle doit l'être plus souvent.
Dans ce but et pour mieux construire, nous avons besoin d'un dialogue avec les communes, nous avons également besoin d'une concertation avec les habitants qui permettra de diminuer le nombre de recours et d'avoir moins de retard dans les constructions. A Genève, nous avons de nombreux grands projets, mais qui tardent à avancer. Le projet «Les Vergers» à Meyrin est en train de commencer à se développer sur un modèle qui nous plaît, celui d'un quartier durable avec de nombreuses coopératives d'habitation qui vont s'y développer, avec une concertation autour des riverains mais aussi des futurs habitants. Je pense que c'est un modèle que nous devrions suivre un peu plus souvent. Et nous espérons que ces grands projets vont pouvoir se développer dans le même sens, avec concertation et dialogue avec les communes et les habitants.
En revanche, s'il y a un point de cette politique publique qui nous déçoit ou nous inquiète un peu, c'est peut-être la question des bonus à la rénovation et à l'énergie, qui ont connu une diminution dans ce budget. D'abord dans la première version du Conseil d'Etat, puis encore via un amendement au cours du processus budgétaire pour rester à l'équilibre. Certes, il nous a souvent été répondu que ces bonus connaissaient une part importante de non-dépensé chaque année dans les comptes, ce qui était effectivement le cas. Mais on peut se demander pourquoi. Une politique et une loi volontaristes ont été mises en place par ce Grand Conseil et par le Conseil d'Etat. Désormais, il s'agit de la mettre en oeuvre. Pensons à une politique d'information plus large, de communication aux acteurs des milieux immobiliers et aux propriétaires, pour qu'ils sachent que ces bonus existent et que des rénovations énergétiques peuvent se faire avec une aide de l'Etat. La communication doit être améliorée autour de ces projets pour que nous n'ayons plus de non-dépensé et que nous puissions faire véritablement avancer la question de la rénovation énergétique dans ce canton, car nous en avons besoin. A ce titre, les Verts se réjouissent que l'office du logement, l'office de l'urbanisme et l'office cantonal de l'énergie soient désormais réunis dans un même département.
Mme Martine Roset (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, contrairement à ce qui a pu se dire, je ne pense pas que la politique de logement actuelle soit totalement fausse ou négative. Mais elle nécessite certains réajustements, notamment liés aux défis de notre temps. J'aimerais citer le cas d'un défi à relever, à mon sens, que je vis dans ma commune: toutes les zones de développement à construire sont en zone primaire agricole, ce qui nécessite - je vous la fais simple - 50% de logements sociaux et 50% de logements libres. Dans les faits, que constate-t-on ? Dans le même immeuble - et il s'agit là d'un exemple tout à fait vrai - les deux cinq-pièces du rez-de-chaussée affectés au social sont à 1500 F par mois, tandis que les deux cinq-pièces à loyer libre de l'étage sont à 3500 F par mois. Inutile de vous dire que la classe moyenne de ma commune ne s'y retrouve pas. Elle ne peut même pas loger dans les immeubles qui se construisent ! Effectivement, je pense qu'il y a là des réajustements à apporter.
J'ai deux questions pour le conseiller d'Etat. La première concerne la politique quant aux immeubles avec encadrement social pour personnes âgées, anciennement D2. Expérience toujours à l'appui, quand on établit un plan financier pour ce genre d'immeubles, quid des surcoûts liés à ces appartements ? Quid de l'affectation logement en termes d'utilité publique ? Voilà des interrogations auxquelles nous n'avons pas de réponses pour l'instant. Ma deuxième question concerne la politique quant aux coopératives. Je souhaiterais vous entendre là-dessus, merci.
Mme Christina Meissner (UDC). Finalement, je crois que nous avons tout dit. On veut à la fois des LUP et de la propriété par étages, mais aussi des HBM pour la classe moyenne. On veut de la propriété collective, mais aussi individuelle. On veut de la complémentarité, de la mixité, de la concertation, du dialogue, de la qualité plutôt que de la quantité, des appartements habités et non thésaurisés à but spéculatif. On veut de la rénovation énergétique, tout en n'oubliant pas la nécessité du rendement. Finalement - Monsieur Velasco, nous avons participé ensemble à trois journées de réflexion sur ce sujet - nous sommes capables de dialoguer tous ensemble. Seulement, quand on est arrivé avec des solutions qui étaient extrêmement bonnes - et vous l'admettrez - personne n'a voulu communiquer. Voilà ce qui est dommage. Parce qu'on a trouvé des possibilités pour discuter ensemble, entre locataires et propriétaires, entre petits et grands propriétaires, de rendement énergétique et de rendement financier, mais on n'ose pas dire qu'on est capable de dialoguer ensemble. J'en appelle ainsi à notre nouveau conseiller d'Etat: allons-y, ayons cette franchise, reconnaissons qu'on peut faire quelque chose, mais qu'il faut le faire ensemble et en toute transparence sans oublier les habitants. Car c'est surtout ça le plus important, et pas juste le rendement et l'argent - excusez-moi de revenir sur le problème de l'argent ! Mais il est clair qu'il nous faut d'abord trouver des solutions ensemble, et non pas les uns contre les autres. On mène cette guerre depuis trop longtemps à travers diverses lois, on la mène depuis très longtemps, et c'est ce qui explique la situation actuelle à Genève. Alors cessons-la ! C'est peut-être par un système participatif qu'on y arrivera. Nous comptons sur vous, Monsieur Hodgers. Comme on dit en anglais, «the stakes are high». Mais je crois que vous pouvez y parvenir. (Quelques applaudissements.)
M. Serge Hiltpold (PLR). Chers collègues, je crois qu'il y a quelques interventions qui méritent d'être précisées. Tout d'abord, l'intervention de M. Pagani sur la volonté de construire et notamment sur la problématique des surélévations. C'est assez piquant de constater que la Ville de Genève s'oppose à tout projet de surélévation en ville, alors que les loyers en surélévation sont des loyers LDTR à 3000 F la pièce. J'entends le misérabilisme de M. Velasco avec une certaine compassion, mais lorsque la Ville de Genève s'oppose aux surélévations, vous vous opposez à des loyers LDTR ! Ce ne sont pas des loyers destinés à des personnes extrêmement riches, mais des loyers contrôlés. Il s'agit là d'une première problématique dans laquelle la Ville de Genève a aussi sa part de responsabilité, tous partis confondus. Je crois que si on veut construire à Genève, il faut que chacun y mette du sien.
Ensuite, les surélévations vont un peu dans l'optique des propos de Mme Flamand, qui parlait des bonus à la rénovation. Effectivement, les bonus à la rénovation peuvent être utilisés pour l'aménagement de combles. Mais quand tout projet d'aménagement est refusé, vous n'utilisez pas le bonus ! Parce que vous n'avez simplement pas la possibilité de construire, c'est une réalité que je vis dans mon entreprise ! La moitié des projets sont bloqués parce qu'il y a des oppositions. Voilà qui est bien, on crée un fonds de rénovation, mais on ne l'utilise pas parce qu'il n'y a pas la possibilité de construire. Là, on arrive à un paradoxe. Je pense qu'il faut sortir des fronts gauche-droite et traiter projet par projet en essayant d'être constructif.
Enfin, un autre élément va bientôt arriver, une prochaine échéance, à savoir la votation sur la densification. Je laisserai mon collègue Cyril Aellen s'exprimer là-dessus, parce qu'il y a aussi une part de responsabilité qui est prise de l'autre côté de l'échiquier politique. Cyril vous en parlera donc tout à l'heure. Je vous remercie.
M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, c'est au pied du mur qu'on voit le maçon. Bon courage au nouveau conseiller d'Etat en charge de la construction ! On l'a élu à ce poste, et il y a une grosse attente de la population pour que le logement, et notamment la construction pour le logement, puisse avancer au cours de cette législature. La construction est l'affaire de tous, pas seulement de la Ville de Genève, des communes ou du canton; c'est l'affaire de tous. D'ailleurs, nous considérons que les communes sont largement sollicitées pour pouvoir s'engager dans la voie de la construction. Il y a des communes suburbaines - je pense en priorité à Onex, qui a beaucoup donné pour le logement - qui, parce qu'elles ont donné pour la construction, ont été pénalisées dans le passé et le sont encore aujourd'hui au niveau fiscal. Il doit donc y avoir une politique incitative et promotionnelle du gouvernement auprès des communes, notamment des communes qui ont fait cet effort ou vont le faire dans le futur, pour améliorer la situation, soit par la fiscalité, soit par les soutiens à la construction. Je pense que ces constructions doivent aboutir. Il doit non seulement y avoir des mesures incitatives, mais également un soutien, qui doit s'appuyer sur un dialogue préalable quant aux PLQ. De fait, les PLQ doivent être conçus de concert avec la population. Il est prioritaire, dès l'origine, d'être à l'écoute de cette population pour améliorer les conditions dans lesquelles les écoquartiers sont construits - puisque c'est la mode ! Or il ne s'agit pas seulement d'une mode, mais d'une volonté populaire de construire des quartiers à valeur ajoutée, notamment s'agissant de l'environnement, des finances, mais aussi du plaisir d'y habiter et d'y vivre. Pour toutes ces raisons, nous vous encourageons, Monsieur le conseiller d'Etat, à aller dans cette direction et à promouvoir le logement, pas seulement au niveau du canton, mais aussi via une aide efficace au niveau des communes. Je vous remercie.
M. Cyril Aellen (PLR). Je vais encore ajouter deux petites choses après tout ce qui vient d'être dit. La première, c'est qu'on ne peut pas - je persiste à le dire - résumer la politique du logement au nombre de millions qui sont investis le cas échéant, même dans l'investissement des fonds LUP. Je vous donnerai à ce sujet deux éléments: le premier, c'est qu'une partie des fonds publics investis ne sert pas à la construction, mais - et vous le verrez lorsqu'on abordera les politiques d'investissement - à l'achat de logements déjà construits, des loyers déjà modérés avec des problématiques déjà réglées. Cet argent est dépensé ainsi pour accroître le patrimoine de l'Etat ou des collectivités avec des logements, dans un certain souci de pérennité de la situation, je le reconnais volontiers. Tout ne va donc pas à la construction de logements. En revanche, j'invite M. Velasco - vous lui transmettrez, Monsieur le président - à se rendre dans certaines autres communes que celle qu'il connaît particulièrement bien, à savoir la Ville de Genève, et en particulier dans les communes où il y a des magistrats socialistes, afin de discuter avec eux. Il saura précisément pourquoi, notamment en périphérie, même s'il faut également et surtout construire la ville en ville... Vos magistrats socialistes, Monsieur Velasco, pourront vous renseigner sur la situation, et en particulier sur les entraves financières - alors là, j'y reviens: pour les communes, il s'agit surtout d'avoir des moyens financiers suffisants pour pouvoir équiper les terrains. Allez voir vos magistrats communaux, par exemple à Confignon, allez voir vos magistrats municipaux, à Bernex par exemple. Vous verrez alors que vous tiendrez peut-être un discours plus nuancé sur la problématique des fonds qu'il faut affecter. Il ne suffit pas d'acheter, comme le disait votre collègue M. Pagani, un certain nombre de parcelles sans même savoir comment construire avec l'argent public que nous n'aurons manifestement pas.
Maintenant, j'aimerais dire une seconde chose s'agissant de la nouvelle manière de faire de la politique. Effectivement, nous aurons une campagne de votations au mois de février. Et je reconnais avec plaisir que les fronts sont un peu plus larges et que nous pourrons, avec les milieux agricoles, écologistes, immobiliers, même locataires - qui, je l'espère, mouilleront leur chemise - militer pour un peu plus de densité dans certains endroits qui ont été destinés à cela. Je vous remercie, partenaires et partis de la gauche, de vous joindre à cette campagne. En effet, il est vrai que sur ce point-là, et je le reconnais volontiers, les réticences sont plutôt sur les bancs d'en face... (Remarque.) C'est vrai, mais j'ai toujours dit que je voulais faire de la politique différemment et m'ouvrir. En effet, sur les bancs d'en face, ils défendent parfois, beaucoup trop à mon goût, leur pré carré, parfois même à leur propre détriment. Personnellement, c'est dans cet esprit-là que je souhaiterais faire de la politique. Et je ne répondrai pas, Monsieur Alberto Velasco - Monsieur le président, vous lui transmettrez - à vos affirmations sur la problématique des loyers pour les plus démunis, parce que je partage votre point de vue. Ce que je ne partage pas, c'est le fait d'opposer ces problèmes-là aux autres qui concernent aussi d'autres catégories de la population.
Une voix. Très bien !
Présidence de M. Antoine Droin, président
M. Florian Gander (MCG), député suppléant. Chers collègues, je voudrais juste vous donner une piste, une piste déjà connue par certains d'entre nous. J'ai la chance d'habiter la commune de Bernex - nous avons d'ailleurs un ancien conseiller administratif de la commune de Bernex - et il y a un plan qui prévoit le développement de 5700 logements. Et 5700 logements, ce n'est pas négligeable au jour d'aujourd'hui. Le problème que nous rencontrons est simplement lié à une question de mobilité. Normalement, le tram devrait arriver jusqu'à la commune de Bernex, à Vailly. Or nous n'avons plus de mobilité aujourd'hui, puisque le tram s'arrête à Confignon. Le développement de ces 5700 logements pourrait simplement commencer sur une impulsion politique du nouveau gouvernement, qui dirait: «Lançons les travaux du tram, lançons le développement de 5700 nouveaux logements, qui ne seraient franchement pas négligeables au jour d'aujourd'hui.» Il est vrai que l'objectif est de les avoir d'ici 2030. Ce qu'il ne faudra pas oublier non plus, c'est qu'il y aura une infrastructure à mettre en place: des écoles, des cycles d'orientation, des commerces. La seule commune de Bernex ne pourra pas le faire. J'invite donc le nouveau gouvernement et vous, chers collègues députés, à soutenir massivement le développement de cette commune, ainsi que de toutes les autres qui amèneront des projets de développement aussi importants. Je vous remercie.
M. Alberto Velasco (S). J'en aurai juste pour quelques secondes. Monsieur le président, vous direz à M. Aellen que je me suis adressé aux magistrats socialistes, notamment à Mme Salerno, pour qu'elle recapitalise encore plus la Fondation de la Ville de Genève pour le logement social. Au Conseil municipal, il y a d'ailleurs justement un projet d'arrêté du MCG pour doter la fondation de 50 millions supplémentaires. C'est donc dire... (Remarque.) Oui, de temps en temps, le MCG fait des choses pas mal. Là, on vous soutient. (Commentaires.) Mais oui ! Quand vous faites des choses logiques, quand vous êtes à nos côtés, on vous soutient. C'est donc dire s'il y a des communes qui agissent !
Par contre - et vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Aellen - la commune de Cologny a décidé - Monsieur le conseiller d'Etat, vous verrez qu'on va travailler sur un projet prochainement - de supprimer sa fondation pour le logement, parce qu'elle considère qu'elle n'en a pas besoin. Il y a donc des communes auxquelles on demande de construire, de faire un effort, c'est vrai, et vous l'avez dit tout à l'heure, Monsieur; mais il y en a d'autres qui disent: «Nous, on n'a pas besoin d'une fondation, on construit pour nos gens, puis on les choisit.» Dans cette république, suivant où vous habitez, vous êtes bien loti. Voilà le problème.
Concernant la densification, Mesdames et Messieurs, évitons le problème de La Tulette. A l'époque - j'étais ici - ce Grand Conseil avait décidé d'une certaine densification mais ensuite, chers collègues, les bancs d'en face ont décidé de la réduire. Eh bien non ! Je suis d'accord avec vous: aujourd'hui, il faut effectivement densifier. Mais densifier avec qualité; avec qualité et pour tout le monde. Monsieur le président, je m'arrête là, merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais passer la parole à M. le rapporteur Eric Stauffer, puis nous entendrons M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers et enfin nous voterons. Monsieur Stauffer, c'est à vous.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai entendu beaucoup de choses dans ce tour d'horizon politique sur le logement. Mais je dois corriger M. Pagani, même s'il est parti - je pense qu'il avait d'autres obligations communales. Quand M. Pagani affirme qu'il faut que l'Etat fasse usage de son droit de préemption de manière beaucoup plus soutenue, je m'inquiète pour la République et canton de Genève ! Car l'idéologie prônée, c'est finalement de nationaliser le terrain. Et ça, c'est une catastrophe, c'est l'échec d'une politique soviétique socialiste... (Exclamations.) ...qu'on doit absolument bannir de la République et canton de Genève. Mais rassurez-vous, chers collègues de gauche, j'en ai autant pour la droite, surtout lorsque je l'entends dire qu'il faut de la liberté. Aujourd'hui, il est vrai que lorsque des promoteurs construisent des logements, trouver un quatre-pièces en dessous de 2500 ou 2800 F, ça devient compliqué. Mais alors un cinq-pièces, ça devient un rêve inaccessible pour les Genevois. Ça ne marche donc pas non plus. Finalement, tout ce système se complaît.
Or il existe une voie du milieu, une voie qui fonctionne et qui a été testée. J'invite ainsi le nouveau magistrat en charge du département de l'urbanisme à étudier certaines fondations immobilières - je sens déjà les huées - notamment celle d'Onex, la Fondation immobilière de la Ville d'Onex. Je me suis fait envoyer à l'instant l'état locatif de cette fondation immobilière. Figurez-vous qu'au travers d'une fondation qui gagne de l'argent, qui capitalise et est capable d'investir pour acheter de nouveaux immeubles, nous sommes en mesure de louer des quatre-pièces à 1125 F par mois et à un maximum de 1616 F par mois, tout comme des cinq-pièces à 1407 F par mois et à un maximum de 2020 F par mois ! Cela veut dire, Mesdames et Messieurs les députés, que cette voie du milieu existe, et sans subventions. Je dis bien sans subventions... (Commentaires.) Mais c'est votre magistrate socialiste Carole-Anne Kast ! (Remarque.)
Le président. Monsieur de Sainte Marie, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Je le dis avec d'autant plus de fierté qu'on fait un excellent travail à Onex. Nous menons une politique sociale non subventionnée et qui fonctionne ! Alors expliquez-moi pourquoi et par quel miracle à l'Etat, au Grand Conseil, nous ne sommes pas capables de faire des logements au travers de fondations. Pas uniquement, évidemment. Mais pour toute une partie de la population qui ne peut pas payer 3500 F pour un cinq-pièces, pourquoi ne sommes-nous pas capables de le faire ? J'invite réellement le nouveau magistrat à se pencher sur les modèles économiques développés par certaines communes ingénieuses, qui arrivent à faire du logement social sans que ça coûte à la collectivité. La voie, c'est celle-là, Mesdames et Messieurs. Ce n'est pas une autre ! Ce n'est pas de subventionner, de préempter des terrains et de se la jouer - encore une fois - extrême socialiste en voulant nationaliser tout le territoire genevois, ou alors ultra-libéral en prônant la richesse de quelques promoteurs qu'on peut compter sur les doigts de la main à Genève, ce sont d'ailleurs toujours les mêmes. Il y a cette voie du milieu. Monsieur Hodgers, allez réellement regarder comment ça se passe, faites une fondation qui acquiert des terrains, des immeubles, et qui pratique une politique cohérente, des marges bénéficiaires avec les réserves pour les investissements. Vous verrez alors que Genève a une chance, dans les dix prochaines années, d'endiguer ou du moins d'inverser cette tendance haussière des loyers. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Avant de passer la parole à M. le conseiller d'Etat, passons en revue les autres programmes de cette politique publique: G02 «Aménagement du territoire», G03 «Conformité des constructions et des chantiers» et G04 «Géodonnées de référence et garantie des droits réels». Monsieur le conseiller d'Etat Antonio Hodgers, vous avez la parole.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, s'agissant des questions de politique d'aménagement et de logement, nous sommes tous face à deux constats, qui pourraient être considérés comme deux paradoxes. Le premier est que, comme vous le savez, notre région et notre canton plus particulièrement ont connu ces dernières années un développement économique sans précédent, une croissance soutenue; de manière globale, notre Etat et nos concitoyens bénéficient largement des bienfaits qui en découlent. Mais dans certains domaines, on relève aussi des effets pervers. Il est clair qu'en matière de construction de logements, ces dernières années, les collectivités mais aussi les particuliers n'ont pas pu fournir les logements correspondant à la croissance démographique elle-même liée à la croissance économique. La réalité est l'expatriation que vous connaissez bien, soit dans le canton de Vaud, soit en France, de nombreux travailleurs et travailleuses qui officient dans notre canton. Ceux-ci auraient naturellement été amenés à se loger dans les limites cantonales, mais ont décidé, pour des raisons de faible disponibilité, d'emménager à l'extérieur. Voilà le premier constat qu'il nous faut faire ensemble, car une politique foncière, une politique de construction ne pourra jamais aller aussi vite qu'une politique économique. Un décalage s'est créé, et il nous appartient de le compenser au mieux. Mais cela prend du temps et doit être acté en tant que tel, même si les objectifs du plan directeur cantonal sont évidemment là pour nous rappeler qu'on ne doit pas rester inactif.
Voici le deuxième paradoxe: depuis des années, et j'ai vérifié dans chaque programme politique des partis ici représentés, chacun dit qu'il faut construire. Or une fois que l'on arrive à des projets précis et concrets, chacun trouve des raisons pour dire que ce n'est pas le bon moment, que ce n'est pas la bonne forme, que ce n'est pas le bon projet. Cela est valable pour tous, comme il a été dit: la Ville de Genève s'oppose à la surélévation des immeubles, certaines communes ont lancé des référendums sur la construction d'immeubles pourtant en cohérence avec le plan directeur cantonal, j'en passe et des meilleures. Il faut prendre acte de ce deuxième paradoxe, Mesdames et Messieurs les députés, parce que nous devons le surmonter ensemble. Et je remercie les députés qui ont fait part de leurs attentes à mon égard - des attentes d'ailleurs parfois contradictoires - et qui, par là même, m'ont mis sous pression pour ces prochaines années. Sachez que je ferai au mieux, mais je ne pourrai pas agir sans vous. Je ne pourrai pas agir sans vous, le Grand Conseil, tout comme je ne pourrai pas agir sans les autres principaux acteurs du marché du logement et de la politique du logement et de l'aménagement. Je parle ici des communes mais aussi des autres acteurs, que ce soient les promoteurs immobiliers, les milieux immobiliers ou les organisations de défense des locataires, qui ont chacun leur légitimité mais qui, s'ils restent butés dans une logique de guerre des tranchées, ne nous permettront pas d'avancer.
Le seul moyen d'arriver à avancer dans ce dossier est la concertation. Apparemment, la concertation est une manière plus lente d'avancer. C'est lent, de concerter. Nous, Suisses, le savons bien: il y a beaucoup de démocratie directe; dans les communes, on parle, on vote; l'ensemble est plus lent. Mais c'est aussi plus certain ! C'est plus certain parce qu'avec la concertation, on s'évite d'arriver dans des situations où on force le passage et où tout s'effondre en bout de course, parce que nous n'arrivons pas à réunir les majorités. La logique de concertation va être au coeur de ma politique pour pouvoir débloquer ou surmonter les contradictions qu'on a évoquées.
Ce matin, il a beaucoup été question d'une part des logements d'utilité publique, importants aux yeux du Conseil d'Etat. Comme vous l'avez entendu lors du discours de Saint-Pierre, ils font partie, avec les coopératives et les PPE, des trois domaines dans lesquels nous souhaitons être actifs. D'autre part, il a aussi beaucoup été question des PPE. Mais on a peu évoqué les coopératives. Et finalement, les destinataires des LUP... C'est un parc qui doit augmenter, car il est clair que nous sommes sous-dotés en LUP. Mais vous comprenez que pour un canton avec un équilibre socio-économique comme Genève, à savoir essentiellement constitué de personnes appartenant à la classe moyenne, il n'est pas logique de dire que l'essentiel des habitants sont destinés à des logements subventionnés. Cela n'est pas cohérent sur le long terme, même si je reconnais qu'il y a aujourd'hui un déficit au niveau des LUP. A l'inverse et s'agissant des PPE, si on regarde les capacités financières de la population, l'acquisition d'une PPE peut aujourd'hui être faite par 10% à 15% de la population. Les LUP et la PPE représentent donc des politiques importantes. Mais vous comprenez qu'au milieu, il y a une énorme classe moyenne qui doit aussi pouvoir se loger. Cela peut se faire à travers des fondations de droit public ainsi qu'évoqué par le rapporteur, des fondations maîtrisées par les communes que je souhaite accompagner et encourager, ou à travers les coopératives d'habitation. En effet, il s'agit là d'un mode d'habitat encore peu connu dans notre canton, mais qui permet par exemple à un canton comme Zurich, dont le taux de coopératives atteint les 20% à 30%, d'avoir des loyers non subventionnés mais maîtrisés, parce que sortis de la spéculation immobilière sur le long terme. Voilà un moyen vraiment intéressant d'arriver à ces objectifs.
S'agissant de la maîtrise et de la tenue du budget, Mesdames et Messieurs, permettez-moi tout d'abord de vous dire ceci: vous constatez qu'au-delà des reports de charges liés à l'aménagement des politiques publiques, la politique publique G baisse globalement ses charges. Et je tiens à remercier ici mon prédécesseur qui a fait un excellent travail de maîtrise à ce niveau-là et qui me permet d'arriver aujourd'hui de manière très confortable devant vous. Malgré ces légères baisses, l'Etat a renforcé sa politique foncière, sa politique d'acquisition foncière; malgré le contexte d'un marché difficile, il a acquis 62 parcelles depuis 2008, soit un total de près de 73 000 mètres carrés. Cette politique foncière, j'entends la poursuivre. Mais j'entends aussi rappeler que si l'Etat a un droit de préemption, les communes aussi ! Par là même, elles sont aussi impliquées dans cette logique de politique foncière.
Enfin, je souhaite répondre à certaines interrogations plus particulières qui ont été faites, notamment celle de Mme Casares sur la réforme au sein de l'office de l'urbanisme. Effectivement, une réforme est arrivée à son terme, qui se trouve maintenant en communication auprès des communes. L'objectif est que toutes les procédures, qui vont de la planification jusqu'à l'accompagnement du projet, procédures qui, jusqu'à maintenant, passaient par trois services différents et obligeaient les communes, acteurs et constructeurs à changer d'interlocuteurs, soient aujourd'hui redécoupées selon une logique territoriale. C'est-à-dire qu'il y aura une direction pour la rive gauche, une autre pour la rive droite et une dernière pour le PAV et la construction autour des gares du CEVA, puisque ce sont des chantiers extrêmement importants. Ainsi, les communes et les autres interlocuteurs auront un répondant qui les accompagnera de A à Z. Vous voyez qu'on reste donc sur le même volume d'activité, il n'y a pas de changements en termes de personnel. C'est un redécoupage différent qui nous a semblé plus pertinent pour accompagner ces projets. Ensuite, pour répondre à M. Lussi qui a évoqué à juste titre le fait que malgré la crise du logement, beaucoup d'appartements demeurent sous-occupés: c'est vrai. Les enfants partent, on se retrouve dans des cinq ou six-pièces des années 70 et 80 pas trop chers, et si ces parents qui deviennent grands-parents veulent quitter ces logements, ils se retrouvent face à un choix de trois-pièces bien plus chers que leur grand logement. Il s'agit là de l'un des paradoxes dans lesquels nous nous retrouvons avec la construction légale qui est la nôtre. Malheureusement, l'Etat n'a pas les moyens d'obliger... Mais j'attire votre attention sur le fait que le conseiller national Carlo Sommaruga a déposé une motion parlementaire à Berne sur ce sujet, très pertinente, vu qu'il s'agit de droit fédéral, de droit du bail pour permettre des échanges: il s'agirait de créer une bourse d'échange où les propriétaires ne seraient ni lésés, ni avantagés par l'échange. Ainsi, de jeunes familles pourraient se loger dans des cinq ou six-pièces, tandis que les personnes aînées, elles, pourraient revenir dans des deux ou trois-pièces. Voilà une politique intéressante. Elle doit maintenant se déployer à Berne pour que nous puissions l'avoir ici.
Je suis conscient de ne pas répondre à toutes les interrogations précises qui m'ont été faites. Je le regrette, mais je n'ai pas tous les chiffres ici. J'invite les députés qui ont encore des questions à s'adresser directement à moi après le débat, et je transmettrai à mes services pour que vous ayez une réponse bien plus précise. Mesdames et Messieurs, vous l'avez compris: les défis en la matière sont énormes, les attentes aussi. Je le répète: nous n'y parviendrons qu'ensemble. Dans ce dossier, la somme des intérêts particuliers ne fait pas le bien-être collectif. Il faudra que chacun y mette du sien. Nous y parviendrons donc ensemble, ou nous n'y parviendrons pas. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur la politique publique G «Aménagement et logement».
Mise aux voix, la politique publique G «Aménagement et logement» est adoptée par 68 oui contre 7 non et 15 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous faisons quinze minutes de pause et reprenons nos travaux à 10h10.