Séance du
jeudi 7 novembre 2013 à
20h30
1re
législature -
1re
année -
1re
session -
2e
séance
PL 11029-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous passons à notre deuxième urgence du jour, le point 99, qui est lié au point 122. Le rapporteur de majorité est M. Ivan Slatkine, le rapporteur de minorité est M. Miguel Limpo, remplacé par Mme Emilie Flamand-Lew. Nous sommes en catégorie II, soit quarante minutes. Je passe la parole à M. Ivan Slatkine, rapporteur de majorité.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi 11029 demande la validation du plan du réseau sur rail à l'horizon 2020 ainsi que le financement de l'ensemble des mesures concernant les transports publics jusqu'en 2022, ce qui correspond à la tranche B du projet d'agglomération. Précédemment, la loi H 1 50 ne finançait que les mesures liées au tram, tandis que les autres mesures de transports publics du projet d'agglomération 1 étaient financées par la loi sur le projet d'agglomération, la H 1 70. Un des premiers objectifs de ce projet de loi est d'ancrer toutes les mesures dans une seule loi, celle sur le réseau des transports publics. Il est aussi important de rappeler qu'en 2010 notre Grand Conseil a amendé l'article 9, alinéa 3 de la loi actuelle, demandant au Conseil d'Etat de venir nous présenter au moins un an avant l'échéance de la loi les nouvelles mesures concernant les transports publics.
La commission des travaux a passé plus de cinq mois à étudier ce projet de loi, elle a entendu durant seize séances de nombreuses personnes s'exprimer à son propos, et il faut relever que dans le fond, il n'a pas été fortement modifié par rapport à la proposition du Conseil d'Etat, puisque les principales mesures présentées dans le projet initial sont maintenues, à savoir la validation de trois lignes de tram principales, la première qui va au Grand-Saconnex, la deuxième à Bernex-Vailly, la troisième qui doit se rendre à Saint-Julien par le quartier des Cherpines. Sur ces trois objectifs, la commission a validé les propositions du Conseil d'Etat, quelques amendements ont été apportés: par exemple, pour le tram de Saint-Julien, on a demandé que la réalisation se fasse en deux étapes. Pourquoi ? Parce que nous nous sommes rendu compte que la commune de Perly n'était pas vraiment d'accord avec le tracé tel qu'il était initialement proposé par le Conseil d'Etat, et puis aussi parce que celui-ci, conscient qu'il y a un problème à Perly, nous a annoncé que l'étude d'une route de contournement du village était sur le point de se concrétiser et qu'un projet de loi allait nous être présenté. Pour cette raison, la commission des travaux a estimé qu'il était normal, par exemple, d'amender cette proposition en insistant sur la réalisation rapide d'une ligne de tram jusqu'au quartier des Cherpines et, pour sa deuxième phase, de pouvoir voir se réaliser la route de contournement de Perly afin que ce village ne se retrouve pas étouffé par un tram qui bloquerait le seul accès actuel, celui des véhicules privés.
Je crois que ce qui est essentiel, s'agissant de ce projet de loi, c'est de bien comprendre que la majorité de la commission souhaite soutenir le développement des transports publics - d'ailleurs le projet de loi tel qu'il vous est présenté en est la preuve - mais c'est aussi d'indiquer qu'il faut aujourd'hui trouver les moyens de séparer les différents types de trafic: placer d'un côté les transports publics pour que ceux-ci soient de qualité et offrent une vitesse commerciale efficace, qui apporte vraiment une plus-value; de l'autre, proposer une solution aux automobilistes en les faisant passer par d'autres axes. Trop souvent, on nous soumet la construction de lignes de transports publics sur le même axe que les routes qui servent au transport privé ou professionnel: résultat des courses, tout le monde se retrouve dans des bouchons, que ce soient les transports privés ou professionnels, ou les transports publics. La preuve: il suffit de se rendre aujourd'hui tous les matins à la rue du Rhône pour voir des bouchons de bus - vous avez jusqu'à six véhicules qui se suivent. La volonté de la majorité...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Ivan Slatkine. Tout à fait ! Ce que la majorité de la commission a voulu à travers ce projet de loi, c'est confirmer la volonté de développer les transports publics, mais aussi apporter certains gages pour qu'on aille vraiment vers une séparation des différents types de trafic; raison pour laquelle quelques amendements sont proposés de sorte que les projets en étude, c'est-à-dire qui devraient être réalisés dans le projet d'agglomération 3 ou suivants, soient liés à la réalisation, par exemple, d'une traversée du lac, afin que le jour où l'on offrira une solution aux automobilistes pour qu'ils ne doivent pas rentrer en ville pour passer d'une rive à l'autre, on puisse alors développer des lignes de tram, des lignes de trolleybus ou des lignes de bus performantes...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Ivan Slatkine. ...qui auront une vitesse commerciale satisfaisante. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur Slatkine, vous êtes pile dans le temps. Madame Emilie Flamand-Lew, remplaçante du rapporteur de majorité, M. Limpo, je vous cède la parole.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve), rapporteuse de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, au départ, les Verts sont bien sûr très favorables à un projet de loi qui développe les transports publics au niveau urbain, régional et transfrontalier: c'est un projet indispensable pour rattraper le retard pris par Genève et pour développer enfin les transports publics à l'échelle de l'agglomération. En effet, le document «Mobilités 2030» exprime clairement la nécessité de réduire le trafic individuel motorisé au centre de l'agglomération et donc de renforcer la desserte en transports publics et la mobilité douce.
Hélas, au terme de débats interminables, la commission des travaux a amendé ce projet de loi de façon totalement absurde en ajoutant dans un texte traitant du réseau des transports publics toutes sortes de clauses et conditions liées à des réalisations routières. C'est la raison pour laquelle je suis aujourd'hui à la table des rapporteurs. Mon collègue Miguel Limpo s'était opposé en commission des travaux non pas pour empêcher le développement des transports publics, mais pour avoir l'occasion de dire ici toute l'absurdité des amendements apportés à ce projet de loi. Cette absurdité illustre bien la politique bloquante de la mobilité menée depuis des lustres par la majorité de droite de ce Grand Conseil, qui consiste à ne faire aucun choix et à vouloir faire passer tous les modes de transport partout, tout le temps. Le prétendu libre choix est en fait un non-choix créateur de chaos. Je cite le rapport de mon collègue Miguel Limpo pour lui rendre hommage: «Cette absence de choix lèse l'ensemble des usagères et des usagers de l'espace public: les bus sont bloqués dans la circulation, les trajets inutiles en voiture congestionnent le réseau routier, les transports professionnels sont pris au piège des bouchons, les piétons subissent le trafic de transit dans leur quartier, les vélos sont systématiquement repoussés vers des trajets sinueux.»
Les modifications votées par la majorité de la commission signifient en gros qu'on ne pourra pas créer de nouvelle ligne de transports publics - tram, bus, trolleybus - en site propre, ce qui est une aberration complète et va à l'encontre de ce que vient de dire le rapporteur de majorité réclamant une séparation des flux pour les rendre plus efficaces. En effet, l'Etat met chaque année des moyens très importants dans les transports publics, mais payer des véhicules et des chauffeurs pour les envoyer dans les bouchons revient à peu près à se mettre sur le pont de la Coulouvrenière et à jeter des pièces de cinq francs dans le Rhône. Il y a quelques jours, les Verts ont déposé - munie de onze mille signatures - leur initiative pour donner la priorité aux transports publics et les rendre plus efficaces et plus rapides. Cette priorité se concrétise notamment par l'aménagement de voies en site propre partout où c'est possible, donc typiquement sur les nouveaux axes. Or, les amendements apportés en commission, qui précisent que les nouvelles lignes de transports publics doivent être construites sans réduire la capacité routière, empêchent de fait d'aménager des sites propres, puisqu'on sait que la traversée du lac sera construite au plus tôt à l'horizon 2030-2040, pour autant que la rive gauche soit urbanisée de manière importante d'ici là, et des projets immobiliers comme les Communaux d'Ambilly seront construits bien avant cette échéance. On va ainsi se priver des meilleurs moyens de désengorger notre canton. On se prive également, avec ces modifications apportées en commission, de la possibilité de créer de nouvelles liaisons de tram, par exemple sur le pont du Mont-Blanc ou sur le pont Butin. A ce dernier endroit, on aurait besoin d'une ligne tangentielle qui manque cruellement à notre réseau de transports publics...
Le président. Il vous faut conclure, Madame, s'il vous plaît.
Mme Emilie Flamand-Lew. ...totalement saturé en son centre, centre par lequel - et je vais conclure - la plupart des usagers du réseau doivent passer, ce qui le rend complètement surchargé. Nous soutiendrons donc les amendements déposés par le groupe socialiste, mais je pense que j'y reviendrai en deuxième débat.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai eu l'honneur et le plaisir de présider la commission des travaux sur ce sujet qui nous a occupés durant seize séances. Je tiens à féliciter le rapporteur de majorité, M. Slatkine, pour son excellent rapport, complet, qui nous laisse peu de compléments à faire par rapport à tout ce qu'il a dit. Je tiens aussi à remercier les nombreux collaborateurs aussi bien du DIME, du DU que d'autres départements, qui nous ont appuyés pour cette étude. Le travail a été fait avec un grand sérieux de la part de tous les députés, on peut en tout cas se féliciter de l'issue de ces travaux. Nous n'avons qu'à regarder le vote final: à part un député socialiste et un Vert, sauf erreur, qui ont refusé ce projet, l'ensemble s'est prononcé favorablement, dont la majorité du groupe des Verts, je tiens à le préciser - car je suis quand même surpris qu'un rapport de minorité ait suivi ce vote.
Pour ce qui concerne le MCG, nous l'avons toujours affirmé: nous sommes totalement favorables au développement du réseau des transports publics au niveau du canton, sur le territoire cantonal, je tiens à le préciser, sans sortie de celui-ci pour des voies de tram vers Saint-Julien ou Annemasse ou vers d'autres villes voisines de notre canton. Nous comptons bien poursuivre ce développement du réseau des transports publics, mais avec la complémentarité de tous les modes de transports, qu'ils soient automobiles ou commerciaux: c'est une nécessité à Genève, nous nous en sommes rendu compte depuis de nombreuses années. Nous avons développé des lignes de transports publics en site propre pour améliorer la vitesse commerciale, pour essayer d'atteindre ces fameux 18 km/h; en revanche, comme l'a dit le rapporteur de majorité, nous avons créé de véritables bouchons, voire des entonnoirs suivant la fin de certains axes lorsqu'ils arrivent en bordure de la ville de Genève. Nous comptons bien remplir aussi notre mission, c'est-à-dire faire appliquer la constitution au sujet de la complémentarité des transports, et ce projet de loi amendé répond à cette demande de la Constituante qui, encore une fois, a décidé de créer une disposition pour améliorer le trafic à tous les niveaux et pour tous les modes de transport, comme on peut l'imaginer. Nous sommes en faveur de ce projet de loi, et je tiens encore une fois à remercier tous les participants de la commission qui ont largement contribué à ce rapport.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Comme les électeurs ont décidé l'acceptation de la multiculturalité et que l'accent jurassien persiste dans ce parlement, je vais vous dire quelques mots sur ce projet de loi. (L'oratrice est interpellée.) Pas tout de suite !
Dans une étude que l'EPFL et l'Université de Genève ont publiée en 2012, il est dit que 30% des Genevois utilisent les transports publics tous les jours pour aller au travail et que 48% ont un abonnement TPG, à quoi il faut ajouter 14% de personnes qui prennent leur vélo tous les jours: la mobilité douce n'est pas l'apanage des habitants du centre-ville, mais aussi le fait des cités périphériques de ce canton. Face à cela, on voit - c'est ressorti des travaux de la commission s'agissant de ce projet de loi modifiant la loi sur le réseau des transports publics - qu'il y a un «bug» ou alors un problème de représentativité quant à la priorisation des modes de transport.
Nous devons voter en urgence ce projet de loi, il est important parce qu'il fait partie des négociations sur le plan d'agglomération 2 qui sont en train de se tenir avec Berne quant au financement fédéral. Mais avant de commencer par présenter les amendements, je tenais quand même à féliciter ce soir Mme Künzler d'être parmi nous pour défendre ce projet de loi, parce qu'il est vrai que ce qui est sorti de commission et de ces seize séances représente un peu, aussi, ce qui s'est produit avec l'ancien parlement: il y a quand même eu un travail de longue date visant à dire que la politique proposée pour les transports et d'autres thèmes n'est pas la bonne. Dont acte.
Cependant, dès décembre 2013 - très bientôt - un autre ou une autre conseiller ou conseillère d'Etat va devoir reprendre le département de la mobilité. Malheureusement, avec un projet de loi tel que celui qui est sorti de la commission, quel que soit le bord politique de cet élu, il ne pourra rien faire en matière de transports publics. Il convient donc de changer certaines dispositions de la loi modifiée en commission, en particulier les points proposés dans les amendements socialistes. Ainsi, en commission, pour prolonger le tram de Bernex jusqu'à Vailly - soit quelque cinq cents mètres - il a été dit qu'il ne faudra pas retarder la réalisation du barreau routier nord de Bernex: par conséquent, si l'on n'a pas d'argent pour la route, on n'a pas d'argent pour le tram. Pour la création de trolleybus, il ne faudra pas réduire les chaussées dévolues au trafic automobile: peut-être que nous devrons raser quelques immeubles pour permettre aux trolleybus de passer ! Ceux-ci ne sont donc pas près de passer à certains endroits. En gros, en plus de ce qui a été dit là, toute amélioration des transports publics est liée à la traversée lacustre. Magnifique ! La liste n'est malheureusement pas un inventaire à la Prévert, mais amène au blocage du développement des transports publics à Genève.
Mesdames et Messieurs, la campagne électorale est passée, je vous propose de libérer l'otage transports publics pour qu'il puisse évoluer durant ces cinq prochaines années. Le parti socialiste appelle de ses voeux une autre politique des transports. C'est pourquoi il vous demande instamment, en signe de renouveau d'une politique de ces transports et en particulier des transports publics, de voter les amendements proposés afin que le prochain conseiller d'Etat...
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...puisse travailler à leur amélioration. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le problème avec la H 1 50, c'est que chaque fois qu'on vient nous proposer une modification de cette loi, on nous dit: «C'est pour préparer l'avenir, c'est un projet de loi qui prévoit l'évolution des transports en gros.» Or, quand on creuse un peu sur ce genre de projet de loi, on s'aperçoit que la réalité est tout autre, puisqu'il nous a fallu seize semaines pour travailler dessus correctement. Et si, comme cela a été indiqué par le rapporteur, nous l'avons finalement quelque peu modifié, ces modifications restent quand même importantes, et qu'on ne vienne pas nous accuser de vouloir bloquer les transports, comme les rangs d'en face l'ont dit: ce n'est absolument pas vrai. Je vous donne juste un exemple, à la page 97, la lettre b), qui concerne les tramways: ce point faisait partie d'une précédente adaptation de cette loi sur le tram allant à Palexpo. Il passe par la «place des Nations jusqu'au Grand-Saconnex, avec desserte de Palexpo, puis Ferney-Voltaire et l'Aéroport, dès que la route des Nations sera construite». Imaginez aujourd'hui un tram qui passe sur la route de Ferney, sans la construction de la route des Nations. (Commentaire.) C'est tout simplement impossible, ce serait le chaos dans cette partie du canton, et même les trams ne circuleraient pas tellement il y aurait de bouchons ! La commission a finalement proposé d'autres projets comme conditions, par exemple la traversée de Lully, et ce sont ces petites adaptations qu'on a établies. On a en effet conditionné cette révision de loi au fait que nous voulons des adaptations aussi pour le transport privé, de sorte finalement à améliorer la situation des transports publics.
Il y a aussi quelque chose de dangereux avec ce projet de loi, et nous nous en sommes aperçus il y a à peine trois ou quatre semaines, d'où mon amendement - je reviendrai dessus plus tard; c'est là qu'on se rend compte qu'il y a quand même des problèmes. Nous avons auditionné toutes les communes concernées, et elles nous ont dit: «On nous a présenté des graphiques avec des lignes: le tram va passer là», etc. Mais dans la réalité, ils n'ont rien de concret. Par exemple, à Lancy, que je connais très bien, on leur a présenté les aménagements il y a seulement trois semaines. Quand vous voyez ce qui se dessine ne serait-ce que pour cette commune, et si l'on ne prend pas justement ce genre de précautions, mais vous partez en courant, à voir ce qu'on vous propose ! C'est à chaque fois pareil, c'est le chaos.
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. Je vous remercie. Je reviendrai tout à l'heure pour présenter mon amendement.
M. Frédéric Hohl (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, on a un peu le sentiment que la philosophie de ce projet de loi est clairement de chasser les voitures du centre-ville. L'ensemble du groupe PLR ne s'est jamais opposé à ce projet des trois lignes de tram et l'a même trouvé très intéressant et utile. Mais c'est tout le reste qui nous pose un problème, toutes ces études au sujet des bus, des trolleybus, et j'ai par exemple posé une question qui est toujours restée sans réponse: quid d'un bus en site propre qui partirait du pont du Mont-Blanc et irait par le quai Gustave-Ador à Vésenaz puis Corsier ? Qu'est-ce qui se passerait alors ? Où mettrait-on les voitures ? Cela causerait un immense bouchon. Or, on ne nous a pas donné les réponses à ces questions-là. En réalité, Mesdames et Messieurs, si l'on applique le projet de loi tel qu'il est devant vous aujourd'hui, on aboutit à une perte de 35% de la circulation routière des véhicules privés en ville. Alors il fallait bien trouver quelque chose pour essayer d'apporter un équilibre; et à long terme - ce n'est pas du tout un caprice du groupe PLR - qu'est-ce qui peut équilibrer ? C'est la traversée du lac. Il n'y a pas d'autre chose à faire. On parle d'une vision à vingt ou trente ans, mais il faut qu'on s'y prépare.
Mesdames et Messieurs, pour limiter cette perte du transport privé et commercial au centre-ville, nous devons voter ce projet de loi tel qu'il a été présenté par le rapporteur de majorité avec cette opportunité de noter un acte fort, la traversée du lac. (Applaudissements.)
M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien a toujours défendu deux principes: premièrement, celui de la complémentarité des transports, qui a été approuvé par les Genevois à 56% lors de la votation de 2002. Cette complémentarité ne doit pas rester un mot, mais doit constituer une réalité: les infrastructures servant à tous les moyens de transports, collectifs et privés, essentiellement, doivent pouvoir être réalisées en complément dans ce canton.
Deuxième principe: nous avons toujours soutenu le développement des transports publics. Pourquoi ? Parce qu'il y avait un rattrapage énorme à faire en la matière. On a sous-investi dans ce domaine pendant une vingtaine d'années, il était absolument logique qu'on devait faire tout ce qui était possible pour développer les infrastructures de transports. Nous avons systématiquement appuyé toutes les extensions des transports publics et nous continuerons à le faire. Mais il faut prendre conscience dans cette république, Mesdames et Messieurs, qu'on ne peut pas aller contre la complémentarité des transports; cela doit entrer dans nos crânes ! On ne peut pas continuer à vouloir d'un côté uniquement des transports collectifs au détriment du transport privé; et ça nous paraît tout à fait logique de lier les deux choses. Mme Flamand dit là... Nous, nous avons toujours soutenu vos projets: vous devez quand même vous rendre compte que si l'on veut ancrer cette complémentarité dans les faits, il faut pouvoir les lier. Ce n'est pas du tout incongru de voter en même temps des projets d'extension d'infrastructures pour les transports publics comme c'est le cas avec ce projet de loi, et de les lier, quand c'est nécessaire, au développement des transports privés - traversée du lac ou contournement de certains villages, ou route des Nations; on l'avait déjà fait en votant la première tranche du projet de transports d'agglomération concernant la partie nord du canton. Et c'est logique, c'est ainsi qu'on doit travailler ! J'aimerais qu'on puisse enfin mettre fin à cette stupide guerre des transports - parce que pour ma part en tout cas, je suis convaincu qu'on doit fermer le plus possible le centre-ville au transport privé: c'est logique, nous devons le faire, mais pour cela, il faut quand même offrir des compensations pour qu'on puisse au moins contourner la ville. Si l'on ne comprend pas cet enjeu-là, jamais on ne pourra s'en sortir. Raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter ce projet de loi tel quel ce soir.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Michel Ducret, pour deux minutes trente.
M. Michel Ducret (PLR). Eh bien, on s'en contentera ! Merci, Monsieur le président. L'enjeu de ce projet de loi, ce sont en effet de meilleures performances pour les transports publics. Nous sommes aujourd'hui aux limites du possible sans augmentation des espaces dévolus en général à la mobilité. Je vous rappelle les paroles de l'ancien conseiller d'Etat Robert Cramer: la croissance de la demande en mobilité dans notre canton ne pourra être entièrement assumée par les seuls transports collectifs, même avec le CEVA, même avec tous les efforts qu'on peut faire. Oui, nous avons une responsabilité: par rapport à l'efficience de l'usage des transports en commun que l'on préconise et par rapport à la région qui se construit.
Les voiries qui servent de nos jours à aller du centre de Genève vers la région sont pour la plupart celles qui ont été réalisées peu avant 1900 pour faire passer les tramways. Mesdames et Messieurs, il nous faut maintenant changer de dimensions ! Nous devons réaliser des voies qui sont indispensables pour le trafic d'aujourd'hui et de demain. La lecture faite par les Verts du projet de loi tel qu'amendé par la commission est fallacieuse: très clairement, le but est de réaliser des chaussées pour qu'on puisse faire circuler les transports publics ! Aujourd'hui, quand il y a une voie dans chaque sens, on ne peut dire qu'on va en supprimer une afin de faire passer les transports collectifs ! De toute façon, il en manque une dans chaque sens pour qu'ils passent, car, maintenant, les problèmes ne se situent pas seulement à l'entrée en ville, mais aussi à la sortie. Il est donc très clair qu'on ne peut plus développer le système si l'on ne crée pas d'espace destiné aux transports. Alors peu importe qu'on fasse passer les voitures pour laisser la voirie existante aux transports en commun ou qu'on crée de nouvelles voies pour les transports collectifs: ce qui est indispensable, c'est de réaliser cette séparation des flux de déplacements. Très clairement, si l'on veut créer des voies de tram sur le pont du Mont-Blanc ou sur le pont Butin - ce qui est parfaitement envisageable - sans construire de voirie supplémentaire, on crée un «collapse» général du trafic dans le canton, et que sera alors le résultat de tout cela ?
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Michel Ducret. Oui, Monsieur le président. L'ensemble des modes de déplacement sera bloqué et plus rien ne fonctionnera, y compris les transports en commun. Il est donc temps de changer de dimension, de se mettre dans les faits à l'échelle de l'agglomération dont nous sommes le centre. C'est pour cela qu'il convient d'accepter ce projet de loi avec les amendements qui vont dans le sens que Genève puisse réellement vivre son avenir...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Michel Ducret. ...et le construire. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous l'avez vu, il s'agit là d'un projet de loi majeur durant le développement des transports publics pour les dix-sept prochaines années. Ce projet de loi, qui sera raisonnablement mis en oeuvre sur cette longue période, prévoit des lignes de tramway, de trolleybus et de bus qui toutes concrétiseront la stratégie de mobilité 2030 élaborée par le département de l'intérieur et de la mobilité en cohérence avec le plan directeur cantonal. Ce projet de loi contient les transports vers tous les nouveaux quartiers urbains de Genève. Il mettra en oeuvre 350 millions de francs d'investissements dans les transports publics pendant cette période de dix-sept ans. Mais surtout, Mesdames et Messieurs, n'oublions pas qu'il sera complété par 578 millions de subventions fédérales, un chiffre absolument énorme. Ce projet de loi représente donc un acte majeur pour le développement des transports publics à l'horizon 2030, mais surtout, ce sera certainement le dernier avant longtemps. Alors, Mesdames et Messieurs, refuser ce genre de projet de loi, c'est en rester à la réalité, celle des encombrements d'aujourd'hui qui ne feront, comme le rappelait le député Ducret, que s'aggraver. Le refuser, c'est donc priver les projets d'urbanisation du plan directeur cantonal des moyens de transports nécessaires à la population de ces nouveaux quartiers.
La rapporteure de minorité a eu raison de témoigner de toutes les tentatives d'une partie de la majorité de réduire son ampleur, tentatives qui se retrouvent dans ce projet de loi. Elle a eu raison d'en témoigner, et les amendements du groupe socialiste vont proposer de remédier aux erreurs de la commission qui s'est un peu égarée pendant ces seize semaines, afin de revenir au plus près du projet original. Les Verts soutiendront bien sûr ces amendements, mais surtout, une majorité du groupe Vert acceptera ce projet de loi pour des transports publics dont nous espérons bien en plus qu'ils obtiendront rapidement la priorité, avec l'initiative déposée lundi. Mesdames et Messieurs, je vous en conjure, votez ce projet de loi.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe Ensemble à Gauche votera bien évidemment ce projet de loi, parce qu'il va dans le bon sens. Cependant, ce qui a été dit et qui ressort du travail de la commission, c'est ce qu'on a l'habitude de faire à Genève pour tout bloquer, à savoir mettre des conditions: ce projet de loi est destiné à améliorer les transports en commun, et en fait, on pose des conditions pour le réaliser, notamment un certain nombre déjà énumérées sur lesquelles je ne reviendrai pas.
Deuxièmement, certains ne voient pas en quoi construire une ligne de tram est structurant, y compris pour créer des logements. Je me suis rendu à plusieurs reprises - et j'espère que certains d'entre vous y sont allés comme moi - à Fribourg-en-Brisgau, où, il y a une dizaine d'années, on a fait prolonger les lignes de tram à l'extérieur: aujourd'hui, grâce à cela - comme nous pourrions le faire rapidement aux Cherpines, par exemple, ou aux Communaux d'Ambilly - la ville se développe et l'on crée des logements que toute la population réclame.
Cette structuration, cette logique d'imposer des lignes de transports - que ce soient des trams ou des trains - non seulement modèle la ville, mais permet de construire des logements, et des logements bon marché, puisque les terrains à l'extérieur sont moins chers, en tout cas jusqu'à maintenant - malheureusement le terrain à l'intérieur de la couronne urbaine nous coûte extrêmement cher.
Je m'étonne donc que la droite, enfin, la majorité, par ces amendements, lance deux coups de canif qui remettent en cause, d'une part, la logique de ce projet de loi et, d'autre part, la structuration que ces lignes de tram pourraient amener dans notre ville, notamment pour y construire très rapidement, pour inviter les promoteurs à construire très rapidement en bout de ligne, si j'ose dire, les logements, notamment les logements bon marché qui font défaut. Je tenais à faire cette déclaration très solennellement, car j'estime, et nous estimons ici, qu'il faut arrêter avec l'idéologie qui vise, comme cela a été démontré ce soir, à faire un débat dogmatique sur les transports sans connaître les conditions qui le structurent. Ce débat sur les transports n'est pas simplement une histoire de mobilité, c'est aussi et principalement une histoire de développement et de logements bon marché. Merci de votre attention.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je suis surpris des propos de certains groupes dans ce parlement. On dirait qu'ils n'ont pas constaté qu'il y avait eu des élections entre-temps, et qu'une des raisons des modifications intervenues...
Le président. Excusez-moi, Monsieur le député, vous avez une minute, j'ai oublié de vous le dire.
M. Daniel Sormanni. Merci, Monsieur le président. (Remarque.) On va y arriver ! ...et qu'ils n'ont finalement pas tiré la leçon du vote de la population qui a notamment donné une leçon politique à certains, parce que le développement qui a été fait des transports publics a abouti à une seule chose: on a dépensé 800 millions, on a modifié nos voies de tram, on les a prolongées - c'est le seul point positif - mais pour le reste, ça fonctionne mal et on a réussi l'exploit de bloquer toute la ville. Par conséquent, je crois qu'il faut changer de vision, il faut changer de politique tout en développant les transports en commun, mais en respectant bien la complémentarité des transports inscrite dans la loi, faute de quoi...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Daniel Sormanni. ...je ne sais pas dans quelle direction nous allons. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à soutenir les amendements du rapport de majorité.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Cyril Mizrahi, à qui il reste trente secondes.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais intervenir sur un point. J'ai écouté l'intervention de M. Golay qui se prévaut des travaux de la Constituante et de la nouvelle constitution. Je ne compte pas jouer le gardien du temple pendant quatre ans et demi, mais mes anciens collègues constituants m'en seront témoins: ce qui a été entendu par «complémentarité», ce n'est pas ce que vous entendez vous, Monsieur Golay, une complémentarité de blocage, une complémentarité de non-choix. C'est une complémentarité qui consiste à ne pas pouvoir faire passer, comme vous le souhaitez, tous les modes de transport partout. Ça, ce n'est pas possible ! Aujourd'hui, tout le monde est satisfait par l'exemple du pont du Mont-Blanc - je crois sauf erreur que c'était une réalisation de Michèle Künzler - où l'on a supprimé une voie de trafic automobile pour la consacrer aux bus: c'est ça, une complémentarité bien pensée, Mesdames et Messieurs, c'était là le sens des travaux de la Constituante, et non de vouloir absolument tout lier, comme vous voulez le faire...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Cyril Mizrahi. Oui, je vais conclure, Monsieur le président. ...et à chaque fois qu'on développe les transports publics, de vouloir développer la route en miroir. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Stéphane Florey, à qui il reste trente secondes.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Cela suffira pour que je m'exprime un petit moment sur la résolution 743, qui est liée, je vous le rappelle, à ce projet de loi. Le groupe UDC ne soutiendra malheureusement pas cette résolution, puisque, premièrement, elle demande une étude de faisabilité d'un prolongement en voie unique. (Brouhaha.) A l'heure actuelle, une voie unique est tout simplement illogique et impensable. Nous n'allons pas refaire les erreurs que nous avons faites au début du siècle passé.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur.
M. Stéphane Florey. Deux secondes encore. La seconde raison est que la Confédération vient de déclarer - un article dans «La Tribune de Genève» a paru hier à ce sujet - qu'elle n'envisageait pas, à court terme, de subventionner ce prolongement: il faut donc le remettre aux calendes grecques tant qu'il n'y a pas de suroccupation du bus.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Ducret, je ne peux pas vous passer la parole, parce que vous avez épuisé le temps de parole.
M. Michel Ducret. Alors quand est-ce que je présente la résolution ?
Le président. Tout à l'heure. La parole est à Mme Michèle Künzler.
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, il s'agit en effet d'un projet majeur qui a été étudié très soigneusement en commission, on l'a dit. Je remercie le rapporteur de majorité d'avoir composé son rapport de manière fouillée, avec tous les détails. Je crois que les personnes qui s'intéressent au développement de notre région peuvent s'y référer. Il est extrêmement important, comme l'a dit aussi M. Pagani, de pouvoir viser un développement des transports publics et des transports en général en lien avec l'urbanisation. C'est pour cette raison que, dans le plan directeur, tous ces projets sont liés, et ce projet de loi est un complément à ce qui a déjà été indiqué dans ce plan directeur concernant le développement des différents modes de transport.
Nous avons à la clef pour le canton de Genève - vous avez pu le voir - un résultat extrêmement satisfaisant pour le deuxième projet d'agglomération, puisque nous avons obtenu plus d'argent que la dernière fois et un subventionnement à 40% des projets alors qu'il y avait plus de projets en lice et moins d'argent. On ne peut donc que se féliciter de ce travail qui vise à une planification à la fois de l'urbanisme et de la mobilité. Ces projets-là doivent être étudiés, on a maintenant des années devant nous pour les réaliser au fur et à mesure, les plus urgents étant évidemment... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
Mme Michèle Künzler. ...de terminer le tram de Bernex, de construire celui du Grand-Saconnex que nous attendons depuis très longtemps, et d'aller jusqu'aux Cherpines: voilà les projets majeurs. Pour les trolleybus, évidemment, cette proposition a largement été discutée en commission: la ligne allant jusqu'au nouveau quartier MICA - Communaux d'Ambilly. Il est donc important d'avoir maintenant cette planification, sans oublier que les députés pourront chaque année voter des tranches de crédit supplémentaires afin de réaliser ces objectifs. Ce projet-là n'est que la planification, l'étude... Et la mise en oeuvre viendra au fur et à mesure des années, et vous voterez les crédits au niveau du budget d'investissement. Je vous remercie de faire bon accueil à ce projet de loi, je crois qu'il en va du développement de notre canton.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes maintenant en procédure de vote, après quoi, comme il y a beaucoup d'amendements et que l'heure avance, je lèverai la séance.
Mis aux voix, le projet de loi 11029 est adopté en premier débat par 85 oui et 3 abstentions.
Fin du débat: Session 01 (novembre 2013) - Séance 4 du 08.11.2013
Le président. Je vous retrouve demain à 17h. Bonne soirée !