Séance du
vendredi 26 avril 2013 à
20h30
57e
législature -
4e
année -
7e
session -
44e
séance
M 2088
Débat
Le président. Nous passons au point 36 de notre ordre du jour, la motion 2088. Je vous annonce juste, chers collègues - parce que je l'ai calculé - qu'il y a eu dix renvois ! Cela fait dix sessions que nous renvoyons cette motion, ce qui vous donne une idée du rythme de nos travaux. Débat de catégorie II, trente minutes, la parole est à M. Pierre Weiss, premier signataire.
M. Pierre Weiss (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je remercie donc dix fois les signataires des trois groupes libéral, radical et UDC, puisque ce sont d'eux que proviennent les nombreux soutiens à cette motion. Le fait qu'elle ait été renvoyée dix fois est, au fond, un bon signe de la providence puisqu'elle tombe aujourd'hui, le lendemain du vote du budget ! Et, précisément, que veut cette motion ? Elle veut des mesures structurelles sur les dépenses afin de réduire les déficits et de définir des priorités. C'est exactement ce que l'on demandait hier soir, et c'est ce que nous proposons aujourd'hui avec cette motion. Cependant, puisqu'il a fallu attendre une année pour la traiter, cela a évidemment comme première conséquence que la deuxième invite ne traitera pas du projet de budget 2013 mais du projet de budget 2014, dès lors que cette motion sera approuvée par une majorité raisonnable de ce Grand Conseil.
La deuxième chose, c'est que je peux apporter quelques petits compléments. Je disais l'an passé, au mois de mai, quand cette motion a été déposée, que le taux de croissance genevoise en 2012 serait de 1%. Dans les faits, il a été de 1.1%. Vous voyez qu'on en n'est pas loin, c'est un delta assez faible. On peut ajouter que le Groupe de perspectives économiques, selon sa dernière livraison de perspectives pour le printemps 2013, attend une croissance de 1.7% pour 2013 et de 2% pour 2014. Voilà les quelques chiffres que j'ajouterai, pour ceux qui les apprécient comme mon collègue Riedweg, à ce qui figure dans cette motion. (Brouhaha.) Il n'y en a qu'un autre que je mentionnerai au passage: cette motion a pour but d'obtenir sur la durée, en tout cas sur quatre ans, une réduction de 1% des charges du personnel. Chaque année, 1% de réduction. Nous sommes à un peu plus de 2 milliards pour le petit Etat, 1% cela signifie donc 20 millions; 20 millions qui nous auraient fait du bien hier soir, et qui nous ferons encore plus de bien pour le prochain budget et pour les suivants puisqu'il s'agit de 1% cumulatif: 20 plus 20, 20 plus 20 plus 20 la troisième année, 20 plus 20 plus 20 plus 20 la quatrième. Evidemment, ce ne sont pas des réductions linéaires qui sont proposées, c'est une réduction moyenne de 1%. Il est donc tout à fait possible pour le Conseil d'Etat, à qui s'adresse cette motion, d'avoir des politiques publiques pour lesquelles il n'y ait pas de réduction de 1% des dépenses de personnel, mais pour lesquelles il y ait au contraire une augmentation, compensée par une réduction dans d'autres politiques publiques.
Je crois qu'il y a trois points par lesquels je vais conclure, Monsieur le président... (Remarque.) Je vous remercie. La première chose, c'est que cette motion permettra de faire des choix. C'est exactement ce que nous voulons. La deuxième, c'est qu'elle est modérée, nous l'avons voulue ainsi: 1% c'est peu, on l'a vu, il suffit d'avoir la volonté pour y arriver. Et puis la troisième chose, c'est qu'elle veut s'inscrire dans une politique durable. Le choix, la modération, la durabilité, voilà donc des critères qui sont à la base de cette motion, des critères qui devraient, je crois, convaincre les députés de ce Grand Conseil de lui prêter un regard favorable et de voter en sa faveur pour qu'elle aille au Conseil d'Etat. Je dirai enfin, Monsieur le président, d'une phrase, que lorsque nous avons débattu de la fusion des caisses de pension, la croissance des effectifs de l'Etat faisait partie des paramètres qui ont été pris en considération. Et nous avons précisément abordé ce point en parlant d'une croissance nulle pendant X années. Si la croissance est nulle, on peut espérer une réduction des dépenses de 1%. J'appelle de mes voeux, pour le prochain budget, que le Conseil d'Etat se convertisse à cette sagesse. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Il restera une minute pour votre groupe. La parole est à Mme la députée Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Bien entendu, le groupe UDC a signé et soutiendra cette motion de M. Weiss. Nous sommes fidèles à nous-mêmes, nous avons toujours dit qu'il fallait être raisonnables dans la croissance et qu'il fallait surtout l'être pour des raisons de responsabilité dans le futur. Nous avons une administration qui a la possibilité de maigrir, il suffit de faire preuve d'un peu de bon sens et de responsabilité. Responsabilité politique... (Brouhaha.) ...dont une part nous revient à nous, Grand Conseil, puisque nous sommes à l'origine de charges de personnel supplémentaires quand nous demandons d'avoir des contrôles, puis ensuite des contrôleurs qui contrôlent ce que les contrôleurs ont fait, en ajoutant des couches au niveau des différentes commissions qui doivent effectivement donner des indicateurs sur le bon travail qui se fait en matière de politiques publiques, de gestion de deniers publics, etc. Quelque part, nous ajoutons donc des charges de personnel. Et nous déresponsabilisons probablement ceux qui ont la capacité, aujourd'hui, de pouvoir véritablement faire des réductions non pas linéaires, mais des réductions ciblées et censées, c'est-à-dire les services de chaque administration. C'est là qu'on peut agir, il suffit de faire confiance aux responsables de services, aux directeurs de service. Ils doivent pouvoir gérer leur service comme une véritable entreprise et faire des arbitrages par eux-mêmes, au lieu de subir des diktats du Grand Conseil, qui impose 1.06% linéaire ou autre - parce que c'est le seul choix que nous avons - ou que ce soit leur directeur général, leur secrétaire général, qui prenne ces arbitrages à leur place. Il y a aussi des économies en matière de personnel à faire, il y a de l'efficience à gagner, à voir dans quelle mesure les services pourraient travailler mieux ensemble dans un objectif commun...
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.
Mme Christina Meissner. ...plutôt que chacun dans leur bureau. Ces choix il faut les faire et ils peuvent être faits, mais il est clair que ce ne sera pas à nous, Grand Conseil, de nous charger de ce travail. Nous souhaitons que ce soit un travail interne à l'administration, qu'il soit fait, et ce avec sagesse, responsabilité et bon sens. Nous vous remercions de soutenir cette motion comme nous le faisons avec l'UDC.
Le président. Merci, Madame la députée. Malheureusement, Monsieur le député Bernhard Riedweg, nous ne pourrons pas bénéficier de vos chiffres précis ! (Rires.) La parole est à Mme la députée Anne Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Merci, Monsieur le président. C'est assez amusant parce que, quand j'entendais Mme Meissner, je buvais presque ses paroles ! Je me disais, mais j'adhère ! Par contre, pas du tout aux conclusions. J'adhérais à vos paroles quand vous disiez qu'il fallait que ce soit chaque service et que ce soit les gens de terrain, qui savent très bien quels sont les besoins, qui puissent dire, au niveau de l'Etat, où ils peuvent et où ils ne peuvent pas faire d'économies. Jusque-là je vous rejoins, mais pas sur l'ensemble de vos propos, ni sur l'adhésion à cette motion.
Pourquoi cette motion pose-t-elle quelques problèmes au groupe socialiste ? Hier je vous ai dit - c'est un peu dommage, on recommence presque la discussion du budget mais enfin - que l'un des enjeux de la prochaine législature serait l'équilibre des finances publiques, surtout avec la question de la fiscalité des entreprises, et qu'on devrait examiner les choses sans tabou. Je l'ai toujours dit: en politique il n'y a pas de tabou, mais il faut aussi faire les choses honnêtement. Alors, Monsieur le président, vous direz à M. Weiss que faire les choses honnêtement, c'est se dire qu'au fond... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...quand on parle de budget, on doit parler des charges, bien sûr, mais on doit aussi parler des recettes. Et j'aurais souhaité que dans votre motion, vous abordiez le paquet global. (Protestations. Commentaires.) Si on veut équilibrer les finances de l'Etat, on doit, sans tabou et avec honnêteté, réfléchir aussi bien aux recettes qu'aux dépenses. Et puis quand on parle des dépenses, il n'y a pas que les dépenses de personnel: il y a l'ensemble des dépenses de l'Etat. Donc je trouve le contenu de cette motion un petit peu réducteur - pour ne pas dire autre chose - d'autant plus que cette motion a, comment dirais-je, un discours un peu sous-jacent qui est celui de nous dire que l'Etat augmente régulièrement ses charges, et que donc pour revenir à l'équilibre il faut les diminuer. Ce qu'on oublie de rappeler, c'est que si l'Etat augmente ses charges, c'est en bonne partie dû à l'augmentation de la population ! Vous parliez, en gros, de croissance de 1%, d'augmentation des charges de peut-être 1%. Eh bien entre 2011 et 2012, on a aussi une croissance démographique d'à peu près 1%. Donc il n'y a pas de miracle ! Si on augmente la population de 1% on aura des élèves en plus, on aura des classes en plus, etc. Donc en tout cas une partie de l'augmentation des charges de l'Etat est inévitable et normale, sinon cela veut dire qu'on est en train de baisser les prestations. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à ne pas écouter les sirènes PLR et à renvoyer la motion à son expéditeur, c'est-à-dire à lui dire non.
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts, comme les motionnaires, sont inquiets de la situation des finances de l'Etat de Genève sur le long terme. Nous avons effectivement une dette importante, et le service de la dette, ces dernières années, avoisine les 200 à 300 millions. On est dans cette fourchette-là ces temps-ci, ce qui équivaut à 2000 ou 3000 postes de travail. Le service de la dette est donc important, et nous avons vu que l'Etat le gérait extrêmement bien. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs les députés, le gouvernement nous a proposé une méthode qui s'appelait le plan financier quadriennal, que vous avez refusé pour moitié. Ce plan financier quadriennal et la méthode utilisée ces dernières années revenaient à dire que la croissance des charges de l'Etat de Genève devait être inférieure à l'inflation et à l'augmentation de la population cumulée. Cela permet, en francs constants, d'être sur une logique de décroissance des charges. C'est ce qui a été fait, et ce qui a permis de pouvoir supporter les différentes crises que nous avons vécues, car c'est une méthode à long terme. Nous entendons, nous, continuer à faire des réformes avec notre administration, avec la fonction publique, au profit de la population, et en gardant le même type de prestations de très haute qualité que nous avons dans ce canton. Mesdames et Messieurs les députés, nous craignions que la méthode proposée ne soit pas adaptée, et qu'elle fasse quelques dégâts au sein de l'administration cantonale. Malgré la préoccupation que nous partageons, nous pensons que la méthode qui est proposée ici n'est pas la bonne, et nous vous proposons simplement de refuser cette motion. Merci.
M. Bertrand Buchs (PDC). C'est marrant, tout le monde semble d'accord mais les conclusions diffèrent; on veut parler sans tabou de tout, mais on est quand même contre la motion. Je pense que toute discussion doit être ouverte, c'est pour cela que le parti démocrate-chrétien va demander le renvoi de cette motion à la commission ad-hoc du personnel de l'Etat... (Commentaires.) ...parce qu'après... (Remarque.) Oui voilà, tout à fait, mais après ce long débat sur le budget, on s'est quand même rendu compte qu'il y avait une chose à faire, c'est de discuter sans tabou - comme l'a très bien dit Mme Anne Emery-Torracinta - de la situation de l'Etat et de la grandeur de l'Etat. Je crois qu'il y a des tas de questions dont le nouveau Conseil d'Etat devra se saisir, et ça c'est un début de discussion. On ne dit pas que c'est la solution magnifique et mirifique, mais je ne pense pas que l'augmentation des charges est inéluctable, et je crois que se dire qu'elle l'est revient à refuser d'envisager des solutions au niveau de l'Etat. Mais il faut en discuter au niveau d'une commission, c'est pourquoi nous vous demandons de renvoyer cette motion à la commission ad hoc du personnel de l'Etat. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Marie-Thérèse Engelberts, avec le sourire !
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, je voudrais dire que notre groupe est tout à fait d'accord avec cette proposition de motion et suivra les arguments qui ont été présentés par M. Weiss. Lorsqu'on regarde le rapport de gestion du Conseil d'Etat qui nous a été remis ces jours, il est intéressant, à la page 125, de regarder les chapitres sur l'autorité et la gouvernance. En effet, on peut se rendre compte de l'ensemble des stratégies mises en place par ce gouvernement, ainsi que d'un certain nombre de résultats. J'ai voulu mettre en parallèle cette demande de diminution de 1% par rapport au personnel pour souligner une ou deux choses, et à ce sujet vous pouvez simplement relire ce rapport. Hier, il a été dit et bien explicité que les mesures à prendre par rapport à la gestion étaient principalement des mesures structurelles, avec l'établissement de priorités dans les stratégies. Il y en a vraiment énormément, et je crois qu'on va être obligés, à moyen et long terme, de faire des choix par rapport à ces stratégies qui impliquent une très grande quantité de personnel.
Je me suis aussi posé la question de l'effet de la transversalité et demandé si ce principe avait été bien mis en place au cours de ces quatre dernières années, puisque développer cette transversalité était l'un des objectifs prioritaires. 1%, cela ne paraît pas énorme mais c'est quand même important. D'ailleurs, on peut s'interroger sur la manière dont, à l'Etat, on forme le personnel pour anticiper les besoins par rapport à de nouvelles stratégies en termes de compétences, mais aussi sur les plans du développement et de la formation pour le personnel qui est en place. Et on peut se demander pourquoi il faut faire si souvent appel à des coachs ou à des consultants dans différents domaines. On a vu cette semaine, à la commission de la santé, que juste pour aligner des prestations pour des ouvriers agricoles, pour introduire un module informatique, c'était 80 000 F et une demi-personne pour l'ensemble et la durée de cette mise en place. Pour une ligne dans un programme ! Ça nous parait tellement excessif qu'on a de la peine à voir de quelle manière cela fonctionne. Aussi, peut-être que l'Etat pourrait appliquer à lui-même les exigences qu'il a par rapport aux institutions subventionnées, qui sont à la limite des possibilités dans la gestion du personnel, la réduction des effectifs et donc des charges, et on pourrait essayer de comparer l'ensemble du système. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la députée. Vous avez juste utilisé votre temps de parole, c'est impeccable. (Rires.) La parole est à Mme la députée Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Au niveau de la Confédération, quand on diminue des impositions ou des taxes, on reporte les charges sur les cantons. Au niveau du canton, quand on diminue les charges, voire le personnel, on reporte les charges sur la population - peut-être les communes au passage, mais très souvent sur la population. (Remarque.) 2009-2010, 6294 personnes...
Le président. Il vous reste vingt secondes, Madame la députée.
Mme Lydia Schneider Hausser. D'accord. Je disais, 6294 personnes en plus, 1.4% de population en plus, et cela continue jusqu'à 2012. Ce que demande cette motion, c'est moins de prestations pour les citoyens genevois. Alors on peut essayer, mais je crois que ce n'est pas le moment de le faire. On a baissé les investissements, est-ce que maintenant on va baisser les prestations aux habitants de ce canton ? Nous ne sommes pas d'accord avec cela. Merci.
M. Jacques Jeannerat (R). Comme l'a dit M. Weiss tout à l'heure, le budget 2013 est sous toit, mais il y a quand même des éléments dont on a déjà parlé hier et qu'il faut répéter aujourd'hui: ce sont les considérants de cette motion, Mesdames et Messieurs. Plus de 11 milliards de dette, on ne peut pas continuer comme ça. La fusion, l'assainissement des caisses de pension... (Remarque.) ...va nous coûter très cher dans les deux prochaines décennies, les charges du personnel de l'Etat - je parle du petit Etat - représentent un peu plus de 25% des dépenses, et puis Genève est l'avant-dernier canton en ce qui concerne le nombre de fonctionnaires par habitant. Donc...
Une voix. Le deuxième, pas l'avant-dernier ! Le deuxième.
M. Jacques Jeannerat. Oui mais... Je prends le classement dans l'autre sens, Monsieur le député ! (Rires.) Il y a donc des mesures structurelles à prendre. 1% sur cette masse salariale du petit Etat, on l'a dit, c'est 20 millions par année, c'est relativement raisonnable; il s'agit bien de fixer des priorités. Nous ne demandons pas qu'il y ait un effet sur les salaires ! Nous cherchons à avoir un effet sur le nombre de fonctionnaires ! Loin de nous l'idée de diminuer ou de bloquer les annuités telles que prévues par la loi pour la rémunération des fonctionnaires. Il s'agit de payer correctement les gens, simplement d'en payer un petit peu moins. Alors bien sûr, cette motion demande que cet effort soit fait sur quatre ans. M. Bavarel a parlé du plan quadriennal, que je considère - parce que depuis douze ans que je suis là, j'en ai déjà vécu trois - comme des catalogues d'intentions, qui s'arrêtent justement à ce stade. Et nous, nous voulons fixer véritablement, dans ce plan financier quadriennal, une mesure prioritaire. C'est pourquoi nous demandons directement le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Je crois que ça ne sert à rien, Monsieur Buchs, d'aller en commission pour discuter et disserter pendant des siècles et des siècles... (Remarque.) ...et ressortir cette motion l'année prochaine, pour devoir l'amender pour le budget 2015. Il faut l'envoyer directement au Conseil d'Etat, elle est claire, elle est nette, elle ne demande pas de discussion, on est pour, on est contre, je vous invite à être tous pour !
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député indépendant Didier Bonny, auquel j'accorde trois minutes.
M. Didier Bonny (HP). Merci, Monsieur le président.
Une voix. C'est fini ! (Rires.)
M. Didier Bonny. Celles et ceux qui sont prêts à voter cette motion ont une attitude que je qualifierai de schizophrène. (Protestations.) Ce parlement ne peut pas décider de l'accueil continu pour les élèves, ne peut pas décider de la réforme du cycle d'orientation, ne peut pas décider du mercredi matin d'école, ne peut pas décider de faire des nouvelles prisons, ne peut pas décider de mettre encore plus de policiers dans la rue, ne peut pas décider que, malgré le fait que la population augmente, il faut moins de fonctionnaires. Cette attitude n'est absolument pas envisageable. On a déjà vu par rapport au budget, ces derniers jours, ce que représentait une diminution de 0.6% en termes de nombre de personnes. Donc on ne peut pas d'un côté réclamer toujours plus de prestations pour toujours plus de personnes, et d'un autre demander une diminution de 1% des fonctionnaires. Cela n'est pas réalisable, c'est peut-être un discours qui peut porter en période électorale, mais c'est un discours que je ne partage pas, et je voterai contre cette motion. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député indépendant. La parole est à M. le conseiller d'Etat David Hiler.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Ayant longuement parlé hier soir je vais être relativement court. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) D'abord, je voudrais quand même vous signaler que si vous choisissez de viser la masse salariale de l'Etat, soit sauf erreur, de tête, 2,3 milliards, vous avez déjà décidé que vous visiez l'instruction publique et non la santé - puisque ce sont des subventions - que vous visiez l'instruction publique et non des allocations à des personnes physiques - quand même 1 milliard 100 millions - mais que vous visiez aussi, forcément, le personnel de police, qui fait partie des emplois payés directement par l'Etat au même titre que les gardiens de prison. Et là, une fois de plus, je me permets quand même de vous renvoyer à l'importance de ces effectifs dans le total de ceux de ce qu'on appelait le petit Etat, l'Etat.
Donc évidemment, si on diminue à cet endroit, on a déjà fait le choix de toucher à certaines politiques publiques et pas d'autres. On n'aura pas touché aux TPG, on n'aura pas touché à l'Université, mais on aura touché à l'école primaire. Ce sont des choix un peu artificiels, me semble-t-il, parce qu'on part d'une nature budgétaire plus que du fond. Alors peut-être expliquerez-vous en commission que c'est la masse salariale du grand Etat qui vous intéressait, et que peu importe le 31 et le 36. Evidemment, c'est une demande que vous pouvez faire, mais je ne vois pas très bien, honnêtement, comment nous allons introduire l'école le mercredi matin en enlevant des millions, alors qu'en même temps ça coûte plus cher... Ou plus exactement si, je vois, il faudra augmenter le nombre d'élèves par classe, voilà.
En revanche, je ne vois carrément pas du tout comment on va ouvrir une nouvelle prison s'il faut baisser le nombre de fonctionnaires, et je vous rappelle que ce sont les deux grands corps dans le petit Etat. Le reste du personnel du grand Etat, c'est évidemment le personnel soignant. Maintenant, moi je vous dis franchement, le problème ce n'est pas ça: le problème c'est qu'on est à 30 millions de déficits à ce stade - nous suivrons cela assez attentivement - et que j'ai cru comprendre que le but était de présenter un budget à l'équilibre pour les plus durs, le plus proche de l'équilibre possible pour les plus laxistes. Et qu'en conséquence, parmi les moyens que nous pourrions être amenés à utiliser, il se pourrait que nous ayons en effet, ici ou là, dans certains secteurs, à réduire qui les subventions, qui le personnel du petit Etat, qui les dépenses fédérales, enfin peu importe.
Mais, Mesdames et Messieurs, nous nous tiendrons à notre ligne ! Notre ligne n'est pas de procéder de cette façon, je vous le redis, oui, il faut des mesures réfléchies d'économies. Et c'est d'ailleurs ce qui est fait au niveau du DIP, au niveau du postobligatoire, la réflexion actuelle c'est de se demander comment on peut éviter deux choses: la première, c'est d'avoir des effectifs minuscules au collège de Genève dans certaines branches, au motif qu'on veut offrir ces branches partout, ce que nous sommes évidemment les seuls à faire parce que nous avons trop d'options. La deuxième, c'est de se demander comment on peut éviter ce désastreux tourisme de l'échec scolaire, qui fait que des gens entrent au collège, échouent la première année, en refont une deuxième, échouent également, vont à l'Ecole de commerce et finiront à l'Ecole de culture générale. Ils auront donc trois années d'échec, qui vont les marquer durant leur vie, et nous trois années à vide en termes de dépenses publiques. Ça, c'est ce qu'on appelle des réformes structurelles. Vous vous rappelez peut-être que celle du collège était basée sur celle du cycle d'orientation, car le but était bien que le cycle d'orientation oriente, et qu'on cesse le jeu de massacre à l'entrée du collège, où on n'a plus beaucoup de possibilités pour remettre les gens dans la bonne direction parce que, précisément, ils sont dans une dynamique d'échec. (Brouhaha.)
Un jour, peut-être, aurons-nous un nouveau palais de justice - j'espère relativement rapidement, ça permettra certainement d'économiser 10 millions de masse salariale pour le transport des prisonniers puisqu'il y aura des cellules sur place. Tout cela peut se faire et nous le ferons. En revanche, il n'est pas dans notre intention de fixer comme but un 1% quelles que soient les circonstances, c'est-à-dire que le budget soit correct ou pas, et de cette manière-là de décider d'avance quels sont les secteurs qui seront épargnés et ceux qui ne le seront pas. Maintenant, Mesdames et Messieurs, nous pouvons poursuivre ce débat en commission bien volontiers, nous pourrons d'ailleurs peut-être remettre quelques chiffres en perspective, mais si tel n'est pas le cas, c'est avec un plaisir non dissimulé que, dans un délai rapide, c'est-à-dire en même temps que la présentation du plan financier quadriennal, notre Conseil d'Etat présentera un rapport sur cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix la demande de renvoi de cette motion à la commission ad hoc du personnel de l'Etat.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2088 à la commission ad hoc du personnel de l'Etat est rejeté par 45 non contre 36 oui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais maintenant voter la prise en considération de cette motion 2088. Je demande au député Weiss si, à la deuxième invite, il faut remplacer «budget 2013» par «budget 2014». Monsieur le député ?
M. Pierre Weiss. Evidemment, Monsieur le président, je vous remercie.
Le président. Très bien, donc tout le monde a bien compris qu'on repoussait à l'année 2014... (Remarque.) C'est un amendement et je vais le mettre aux voix, que ce soit clair et net, Monsieur le député Deneys. Donc il s'agit du budget 2014 en lieu et place de 2013.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 52 oui contre 26 non et 6 abstentions.
Mise aux voix, la motion 2088 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 36 oui contre 31 non et 17 abstentions.