Séance du vendredi 14 décembre 2012 à 17h
57e législature - 4e année - 3e session - 16e séance

P 1803-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Jonction : mort d'un quartier
Rapport de majorité de M. Ivan Slatkine (L)
Rapport de minorité de M. Roberto Broggini (Ve)

Débat

Le président. Point 51. Nous passons de Château-Banquet à la Jonction. Les rapporteurs sont MM. Yvan Slatkine, pour la majorité, et Roberto Broggini pour la minorité. (Applaudissements.) Catégorie II, 30 minutes. Monsieur le rapporteur de majorité vous avez la parole.

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, voilà une pétition de plus sur des problèmes de circulation dans les quartiers de la ville de Genève. La commission des pétitions, qui s'est penchée sur cet objet, a pu constater durant ses travaux qu'à chaque audition chacun de ses interlocuteurs faisait correctement son travail, la Ville de Genève expliquant que c'était la DGM, la DGM expliquant que c'était le DCTI - le DCTI de l'époque puisque aujourd'hui le génie civile a été incorporé au DIME - mais enfin, si tous les services donnent l'impression de bien travailler, on se rend compte qu'il n'y a pas de vision globale... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...sur la modification de la circulation dans les quartiers, qu'il n'y a pas de leadership. Et alors qu'on serait en droit d'attendre de la part de la DGM d'avoir ce leadership quant aux mesures de circulation, d'avoir ce leadership au niveau de la coordination des travaux, eh bien on s'aperçoit que ce n'est pas le cas, que chaque service se renvoie le bébé et qu'au final se sont les habitants et les commerçants qui trinquent et qui doivent subir des situations pour le moins compliquées.

En plus, cette pétition nous a permis de creuser un petit peu le problème du bruit dans le canton, puisque l'argument premier de la ville de Genève...

Le président. Monsieur le rapporteur, je m'excuse, il n'y a pas seulement du bruit dans le canton mais il y en a dans cette salle... (Rires.) ...donc je prie ceux qui discutent entre eux de sortir et de discuter ailleurs. Veuillez continuer, Monsieur le rapporteur.

M. Ivan Slatkine. Je reprends, Monsieur le président. Donc comme je vous le disais, la Ville de Genève, et principalement M. Pagani, vient chaque fois à la commission des pétitions quand on traite ce type d'objet pour nous expliquer que les mesures qu'il prend pour réduire le trafic sont liées à celles qu'il doit prendre par rapport aux problèmes de bruit, et que la loi fédérale impose que d'ici 2018 il n'y ait plus de poche de bruit dans la ville. Alors cela nous a permis de demander l'audition de M. Philippe Royer, président de la commission interdépartementale pour le suivi des projets d'assainissement du bruit routier, et qu'est-ce qu'on a pu constater ? Que nous avions voté, voilà dix ans, la loi 8644 qui ouvrait un crédit de 85 millions pour l'assainissement du réseau routier cantonal par rapport à ces mesures antibruit. Et cette loi nous disait que le Conseil d'Etat devait, tous les deux ans, nous rendre rapport des travaux effectués et de l'utilisation du crédit voté. Force est de constater que, dix ans après, le Conseil d'Etat n'a jamais déposé le moindre rapport de suivi de l'utilisation de ce crédit. Alors cela a été ressorti par la CEPP dans son rapport d'évaluation sur la politique de protection contre le bruit dans le canton de Genève, mais il n'empêche que nous sommes toujours dans l'attente du rapport du Conseil d'Etat sur l'utilisation de ces 85 millions...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Ivan Slatkine. Je conclus, je conclus, et sur un état de situation du bruit dans notre canton. Rien que pour cette raison, nous vous proposons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, non seulement pour qu'il nous dise qui a le leadership dans les mesures qui sont prises pour les réductions de trafic dans les quartiers en ville de Genève, mais aussi pour qu'il nous présente rapidement le rapport qu'il doit nous soumettre selon la loi que nous avons votée il y a dix ans. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de minorité. Le quartier de la Jonction est soumis à une très forte pollution... (Brouhaha.) ...sonore et aux nuisances de CO2. Nous devons absolument assainir tout cela selon les normes fédérales qui entreront en vigueur d'ici quelques années, autrement on sera punis ! On sera punis par Berne, car ces obligations fédérales doivent être appliquées impérativement. Les habitants de la Jonction se battent depuis des années pour l'assainissement de leur quartier, il convient de respecter cette volonté. Nous ne pouvons pas nous permettre d'ignorer leur sentiment et nous savons très bien que les quartiers qui sont bien desservis par les transports publics ou les autres transports favorisent le commerce. Et que les voitures ne font pas marcher les commerces, comme le disait tout à l'heure notre collègue Mme Gautier qui se prétend être la représentante de tous les commerçants. Cela est totalement faux... (Protestations.) ...parce qu'étant moi-même commerçant, je peux le dire. Donc nous devons instamment - et ça plusieurs me l'ont dit une fois qu'on avait voté la troisième voie de l'autoroute de contournement à l'unanimité de ce conseil - favoriser un centre-ville plus piéton. Plusieurs députés de droite sont venus me voir pour m'assurer de leur soutien dans ce sens-là, alors maintenant, si vous ne faites pas ce geste, je comprendrai que vous ne respectez pas vos engagements.

M. Roger Deneys (S). Très rapidement, une remarque: c'est que le fameux rapport du Conseil d'Etat... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...je me demande s'il n'aurait pas dû être rendu par un ancien conseiller d'Etat libéral qui s'appelle Mark Muller. Mais il l'a peut-être perdu dans les toilettes d'une boîte de nuit l'an dernier... (Vives protestations.)

Le président. Monsieur le député !

M. Roger Deneys. On aura l'occasion d'en reparler. Sinon j'ai bien entendu le rapporteur de majorité pour lequel les commerçants trinquent, mais j'ai envie de vous dire que c'est normal, c'est le point 51 de l'ordre du jour ! (Brouhaha.)

Le président. Bien, la parole est à Mme la députée Mathilde Chaix. J'aimerais bien qu'on l'écoute.

Mme Mathilde Chaix (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, de quoi sont venus nous parler les pétitionnaires ? Ils sont venus nous parler de la dégradation ordinaire de la qualité de vie et de la vie économique dans un quartier ordinaire de Genève. Nous assistons en direct à sa mise à mort. Comment est-il mis à mort ? Eh bien à petit feu, sans aucune concertation avec ses habitants. Vous me direz, avec un tel but c'est bien normal. On ferme l'extrémité d'une rue, on installe une zone 30, on réorganise complètement le trafic voiture et bus, on supprime des places de parc en surface et, évidemment, on fait des travaux, beaucoup de travaux, pendant très longtemps. En somme, les ingrédients d'une tragédie que beaucoup de quartiers connaissent à Genève. Et qui y a-t-il derrière tous ces «on» ? Eh bien la Ville, la DGM, le DU et aussi un peu les TPG, bien sûr. Conséquences concrètes: les habitants n'arrivent plus à accéder à leur logement, ils n'arrivent plus à se garer - ils n'ont pas tous les moyens de s'offrir des places de parc dans les parkings actuels et les futurs parkings qu'on leur promet - et les camions de livraison ne peuvent plus livrer, car des places de livraison sont supprimées. Vous me direz, ce n'est pas si grave que ça puisque de toute manière les clients, eux non plus, n'accèdent plus à ces nombreux commerces de proximité. Le chiffre d'affaire des commerçants baisse drastiquement, la circulation, tant piétonne que motorisée, est dangereuse... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, chers collègues, on arrive bientôt au bout, un peu de discipline, serrez les dents ! Je vous remercie. Continuez, Madame.

Mme Mathilde Chaix. Et enfin, autre conséquence, du bruit, encore du bruit, toujours du bruit. En un mot, les commerçants et les habitants n'en peuvent plus. Et quand la commission a commencé à poser des questions, les réponses ont toutes été calquées sur le mode «ce n'est pas moi, c'est l'autre.» La Ville nous a renvoyés à la DGM pour les plans de circulation, la DGM nous a renvoyés au DCTI - ex DCTI - pour les travaux et l'information. Nous n'avons eu droit qu'à des réponses de technocrates bien éloignés de la réalité de la vie, la vie de tous les jours dans nos quartiers, la vie des gens et des commerçants ordinaires. Mesdames et Messieurs les députés, nous voulons des réponses; nous voulons savoir pourquoi il semble n'y avoir aucun capitaine à bord du paquebot de la mobilité. La DGM doit nous expliquer comment elle fonctionne, et pourquoi on en arrive à des situations où, sous prétexte d'améliorer la mobilité globale, des quartiers entiers se meurent. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande donc de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

M. Jean Romain (R). En commission, nous avons évidemment eu droit, pour parler de cette pétition, à une sorte de technocratie processionnaire... (Rires.) ... qui est venue nous dire: «Ce n'est pas moi, c'est l'autre». Cette pétition, si elle avait été seule, n'aurait peut-être pas eu l'importance qu'elle a. Mais elle fait écho à la motion 2111, que nous avons renvoyée à la commission de l'économie, aux motions 2114, 2122, etc. Au fond, c'est vrai, l'organisation des travaux est problématique à Genève. Et les gens qui sont venus nous parler ne sont pas des revendicateurs ni des quérulents; c'est par exemple un petit commerçant qui vend des spécialités portugaises, et qui dit qu'il ne peut plus vivre dans ce quartier, parce qu'on ne peut plus le livrer comme il faut. Les commerçants ont pâti des travaux du TCOB, eh bien c'est bien normal, mais aujourd'hui, par toute une série de difficultés, ces petits commerçants ne peuvent tout simplement plus vivre, parce qu'ils font les frais d'une volonté sottement anti-voitures. On ne peut plus se garer, on ne peut plus livrer, il faut se garer au diable vauvert et puis ensuite pousser, je ne sais pas, des palettes sur une sorte de charriot qui ne fonctionne pas. Non, je crois qu'aujourd'hui nous devrions permettre à ces petits commerçants d'être livrés dans des conditions normales, et l'invite numéro quatre de cette pétition semble tout à fait pertinente. Je crois que, finalement, pour que nous n'ayons pas de livreurs processionnaires, eh bien il faut leur permettre de se garer à proximité des endroits et des échoppes où ils livrent. C'est pourquoi la fraction radicale du PLR demande de transmettre cela, Monsieur le président, au Conseil d'Etat.

M. Guy Mettan (PDC). Vous aurez constaté qu'en commission le parti démocrate-chrétien s'est abstenu. Finalement au caucus, nous avons décidé, vraiment sans enthousiasme, d'accepter le renvoi au Conseil d'Etat. Pourquoi ? Parce que c'est vrai que dans le quartier de la Jonction il y a des problèmes, que les problèmes qui ont été exprimés à travers cette pétition existent et qu'il vaut la peine qu'on se penche un peu sur la circulation dans ce quartier. Ça, c'est la raison pour laquelle nous avons finalement accepté de renvoyer ce projet au Conseil d'Etat. Mais j'aimerais dire, à l'attention du rapporteur de majorité, M. Ivan Slatkine, qui ne m'écoute pas, et puis aussi à l'attention de M. Jean Romain, qui ne m'écoute pas non plus et qui a souligné l'importance de l'invite numéro quatre, la chose suivante: que dit cette invite ? Elle invite les autorités à compenser toutes les places de parking supprimées et déplacées. Or, ce matin même, Monsieur Slatkine, vous avez demandé le renvoi de l'éco-parking de la Jonction et d'Artamis qui aurait précisément permis de compenser ces places. Vous avez demandé le renvoi en commission. (Remarque.) Donc il faut aussi être logique, là je le dis pour le rapporteur de majorité, on ne peut pas renvoyer un projet le matin et le soir voter une invite qui demande sa réalisation en appuyant fortement sur ce point. Donc finalement, constatant l'ensemble des problèmes, nous voterons le renvoi au Conseil d'Etat, mais en lui demandant d'intégrer ce parking et en demandant au PLR de prendre conscience que cet éco-parking de ce matin fait partie intégrante de la solution au problème à la Jonction, et qu'il faut donc avoir une vision d'ensemble et pas seulement parcellaire si on veut aider les citoyens de ce quartier à vivre mieux.

Mme Catherine Baud (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le titre de cette pétition c'est «mort d'un quartier». Alors je vous le demande, réaménager un quartier qui était asphyxié par la circulation, augmenter la desserte TPG, permettre aux habitants de se réapproprier leur quartier, est-ce sa mort ? Non, pour moi c'est plutôt sa renaissance. C'est vrai que cela engendre des nuisances, de faire des travaux... C'est vrai que toutes ces mises en place gênent les gens, gênent les habitudes, j'en conviens totalement. Mais fait-on des omelettes sans casser des oeufs ? Alors les Verts comprennent tout à fait que les riverains aient pu éprouver de la lassitude pendant ces travaux, aient eu des difficultés à accéder à leur commerce, c'est une évidence. Pourtant il est vrai que lors des travaux, les gens ont été prévenus des différents problèmes qui allaient intervenir, donc ils avaient aussi la possibilité de s'organiser. Mais ils voulaient avoir les travaux, avoir des avantages et puis en même temps conserver leurs habitudes ce qui n'est pas vraiment tout à fait compatible. (Brouhaha.)

Donc si nous comprenons tout à fait la lassitude des habitants, nous ne pouvons pas accepter que cette pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat parce qu'elle est tout simplement caduque. Les travaux sont terminés, les choses sont maintenant rentrées dans l'ordre, donc cette pétition n'a plus raison d'être. Et puis si vous lisez vraiment les invites de cette pétition, ça n'a plus aucun sens, parce que ça voudrait dire refaire des travaux pour tout remettre comme c'était avant, ce qui serait vraiment complètement ridicule. En conséquence, nous demandons de suivre le rapport de minorité et de classer cette pétition, je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Mauro Poggia (MCG). J'hésitais à prendre la parole, puisque de toute façon tous ces discours sont vains, le 21 décembre c'est la fin du monde. (Rires.) Mais quand même, essayons d'être optimistes et essayons de faire avancer le problème des Genevois. Mme Künzler doit avoir les oreilles qui sifflent du matin au soir, tant les habitants de cette ville, les usagers de la route, doivent penser à elle constamment. C'est en particulier mon cas; quand je suis au guidon ou au volant, je pense à Mme Künzler.(Commentaires.) Puis ensuite je me dis... (Brouhaha.) ...que je suis injuste parce que finalement elle n'est pas seule responsable de ce qu'on endure. Il y en a d'autres avant elle qui ont commencé l'ouvrage, elle n'a fait que le reprendre - il y en a d'autres qui le feront après sans doute, espérons qu'ils le feront un peu mieux, enfin on y contribuera modestement. Mais, quoi qu'il en soit, Mme Künzler n'est pas seule responsable, il faut le dire. Il faut que les habitants comprennent que ce sont eux qui doivent s'adapter à la ville et pas le contraire. Comme la chaussure doit s'adapter au pied, vous savez avec les chaussures militaires c'était le pied qui devait prendre la forme de la chaussure et pas le contraire. Ici c'est tout à fait ce que l'on vit. Mais j'aimerais bien que Mme Künzler nous rassure: c'est au moins volontaire, ce que vous nous faites vivre ? Ce n'est pas de la négligence ? C'est vraiment une politique que vous avez décidé de mettre en place ? Comme ça on peut l'attaquer, parce que si c'est par hasard, ou si c'est par délégation à des personnes que vous ne contrôlez pas, alors là ça devient inquiétant ! La RATP a déjà fait de Paris un enfer, donc maintenant qu'elle essaie d'en faire un de Genève il faut peut-être dire stop. Je plaisante à peine, je crois qu'aujourd'hui on a atteint un stade de ras le bol général. Pas plus tard qu'il y a une heure j'étais encore sur mon scooter à la rue de l'Athénée, je m'arrête au feu rouge et je vois que le feu d'après devient vert. Je me dis zut ! Ensuite, celui d'après devient rouge... (Rires.) ...et ça devient vert pour moi. Et quand j'arrive au feu suivant je dois évidemment attendre parce qu'il y a les autres qui viennent dans l'autre sens. (Commentaires.) Alors c'est vrai que c'est compliqué parce qu'il y a beaucoup de routes aux carrefours, vous comprenez, il y en a en tout cas deux qui se croisent donc c'est quand même difficile. Il faut des programmes que même les Français, qui nous enseignent tout, n'ont pas encore réussi à maîtriser, car il faut trouver des cycles de feux qui permettent des coïncidences dans les deux sens. Donc il faut quelques décennies pour maîtriser l'instrument. Mais j'aimerais bien qu'on finisse un jour par le maîtriser, parce que nous nous en avons véritablement assez.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Melik Özden (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'essentiel des invites de la pétition 1803 a été déjà réalisé ou est en train de l'être, sauf une: la compensation en surface des places de parking supprimées ou déplacées, comme cela a été revendiqué par des pétitionnaires lors de leur audition en commission. Cette demande est à la fois absurde, irréalisable et non souhaitable.

Elle est absurde, car cela revient à remettre en cause tous les aménagements qui ont été faits jusqu'ici dans le quartier, en particulier pour la nouvelle ligne de tram Cornavin-Onex-Bernex.

Elle est irréalisable, car, comme chacun le sait, il ne reste presque plus de terrain en Ville de Genève pour construire des logements, encore moins pour des parkings.

Elle n'est pas souhaitable non plus, car la circulation motorisée en Ville de Genève devrait être limitée pour favoriser les transports publics. La nouvelle ligne de tram répond justement à ce besoin. Quand nous disons limitée, nous ne prônons pas l'interdiction. D'ailleurs, la construction des parkings en sous-sol...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Melik Özden. ...prévus sur le site d'Artamis devrait compenser largement les places de parkings supprimées en surface.

Cela dit, il faut reconnaître que la pétition 1803 a des mérites. Elle a permis par exemple, une fois de plus, de constater le manque de coordination entre les services de l'Etat d'une part, et entre ces derniers et la Ville de Genève d'autre part.

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député, je suis désolé.

M. Melik Özden. J'arrive, j'arrive, Monsieur le président. Cette pétition a permis également de constater... (Brouhaha.) ...le manquement du Conseil d'Etat à son devoir d'information envers notre parlement concernant l'application de la loi 8644, à savoir l'évolution des projets d'assainissements du bruit routier, comme souligné par le rapporteur de la majorité.

Pour ces raisons, le groupe socialiste votera en faveur du renvoi de la pétition 1803 au Conseil d'Etat.

M. Pascal Spuhler (MCG). Déjà beaucoup de choses ont été dites sur cette pétition, mais je voudrais quand même relever quelques points.

On a parlé de l'éco-parking; l'éco-parking n'est pas une solution, Mesdames et Messieurs, puisque les pétitionnaires ne parlent pas seulement des places de stationnement pour les habitants mais bien des places de livraison pour les commerçants ! Ce n'est pas dans l'éco-parking que les livraisons vont se faire ! Soyez juste un tout petit peu raisonnables, comparez ce qui est comparable ! Quand on nous dit que les habitants doivent aller à l'éco-parking, soit ! Mais il faut leur donner les moyens ! Parce que les places de stationnement dans les parkings souterrains, ça coûte bonbon ! Et les habitants de la Jonction n'auront pas forcément les moyens de les payer. Donc qu'est-ce qu'ils demandent ? Ils demandent simplement de pouvoir vivre. Le concept qui a été proposé à la Jonction, et qui est maintenant mis en place, a tout bouché. Les habitants ont dû subir la longueur et la nuisance des travaux, avec de la poussière et du bruit, et maintenant les commerçants n'ont plus de clients, les habitants doivent tourner en rond, faire des tours et des détours pour accéder chez eux quand ils sont en voiture. Evidemment ceux qui sont en vélo en profitent bien, on est d'accord, Monsieur Broggini, je vois votre sourire...

Le président. Il faut déjà conclure, je suis désolé.

M. Pascal Spuhler. ...Je vais conclure, Monsieur le président, je vous remercie, je vais conclure. Donc en fin de compte, qu'est-ce que vous voulez avec ce genre de concept ? Une ville morte, il n'y a que les centres commerciaux périphériques qui en profiteront, finalement les brigands et les dealers resteront dans les rues et puis tout le monde sera à sa place !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député René Desbaillets, pour vingt secondes.

M. René Desbaillets (L). Merci, Monsieur le président, en vingt secondes... Moi je suis complètement déboussolé. Là on a une pétition pour la mort d'un quartier, et à la commission des pétitions on a « trop de vie dans le quartier!» Le problème, c'est que le quartier il est mort la journée mais il vit la nuit entre minuit... (Protestations.) ...et 3h du matin, quand les agents municipaux ont congé. Donc le vrai problème il est là. D'ailleurs, des pétitionnaires nous ont dit que la rue de l'Ecole-de-Médecine était bien plus tranquille et silencieuse quand il y avait les voitures que maintenant, où il y a une quinzaine de bars et qu'on n'arrive pas à maîtriser les gens. Et il y a une petite proposition qui peut être intéressante, ouvrez vos oreilles: on a enterré beaucoup trop vite la passerelle de la rue de la Gravière, parce que si vous prenez le plan, que vous regardez, avec cette passerelle on pourrait entrer dans le quartier de la Jonction du côté d'Aligros...

Le président. Voilà...

M. René Desbaillets. ...ce qui permettrait d'éviter de couper, ce qui est reproché, la ligne du tram qui vient sur le...

Le président. Nous sommes arrivés, Monsieur le député.

M. René Desbaillets. Alors réfléchissez-y et vous verrez que ça ira bien mieux.

Mme Christina Meissner (UDC). Je crois que tout a été dit, simplement j'aimerais revenir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...sur les paroles des Verts qui ont dit que les travaux étaient terminés et donc que cette pétition pouvait être classée. Au-delà du fait qu'il a été relevé qu'effectivement ce quartier était mort, mort pour les commerçants la journée mais trop vivant la nuit, au-delà de ça, le simple respect de ces habitants qui subissent des nuisances serait de leur donner une réponse, de ne pas juste classer la pétition. Classer la pétition, je suis désolée, c'est un irrespect total des habitants qui attendent qu'on se soucie un tout petit peu de leur sort. Nous sommes le parlement qui est censé s'occuper des Genevois, alors faisons un effort, renvoyons le rapport au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le rapporteur de minorité Roberto Broggini, pour cinquante secondes (Le président prononce «Broghini».)

M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de minorité. Broghini ou Broggini ?

Le président. Broggini, excusez-moi.

M. Roberto Broggini. Ah voilà, c'est ça ! Cinquante secondes. Cette pétition fleure bon le populisme de bas quartier et... (Protestations.) Eh bien oui, il suffit de voir qui l'a initiée, car le quartier ne se meurt absolument pas ! (Protestations.) Le quartier de la Jonction... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...est extrêmement prospère, il y a plein de commerces et il y en a assez, ça je le dis à M. Poggia, il y en a assez de cette volonté populiste de dire que tout un chacun doit pouvoir rentrer avec sa voiture dans son salon. Le Salon de l'auto c'est une fois par année, mais le salon de l'auto ce n'est pas chaque jour chez soi ! Toutes les villes d'Europe ont réussi à changer leur paradigme, justement, tous les centres-villes d'Europe sont extrêmement prospères économiquement... (Remarque.) Oui je voyage beaucoup...

Le président. Poursuivez, Monsieur le rapporteur.

M. Roberto Broggini. Et vous en restez à un paradigme qui est complètement dépassé. Quant à la personne qui a dit que...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Roberto Broggini. Oui oui je conclus. Quand on dit qu'il faudrait que ce soient les chaussures militaires qui s'adaptent au pied des gens, je suis désolé, Mme la conseillère d'Etat ne peut pas vu qu'elle est femme et que le service militaire ne s'intéresse pas aux femmes ! (Protestations.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le rapporteur de majorité Ivan Slatkine, à qui il reste trente secondes.

M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Alors très rapidement, puisqu'il me reste trente secondes, j'aimerais réagir à certains propos qui ont été tenus et rappeler à M. Deneys - vous transmettrez - que le conseiller d'Etat en charge du DCTI quand on a voté la loi 8644 c'était M. Moutinot, non pas M. Muller, et deux ans après c'était toujours M. Moutinot. Donc voilà, ils sont tous dans le même bateau si vous me permettez l'expression.

Ensuite, pour répondre à M. Mettan - et vous transmettrez également - ce matin le projet Carré Vert a été renvoyé en commission non pas parce qu'on s'oppose à la compensation des places de parking, mais parce qu'on ne va pas accepter n'importe quoi à n'importe quel prix et faire supporter à la Fondation des parkings des coûts qui sont totalement démesurés, tout ça pour subventionner des immeubles qui seraient construits au-dessus. Donc il ne faut pas mélanger les choses, et la vision globale nous l'avons.

Et puis pour conclure, quand j'entends Les Verts nous lancer que c'était une volonté des habitants, que le quartier leur a été rendu - ça a été dit lors de quelques interventions - j'aimerais répondre qu'à la commission des pétitions nous avons actuellement la pétition 1840 et la pétition 1841, dans lesquelles les habitants disent qu'ils sont exaspérés par les nuisances dues aux bars...

Le président. Monsieur le rapporteur on arrive au bout.

M. Ivan Slatkine. Et ils nous ont clairement expliqué que c'était plus agréable avant, quand il n'y avait pas de bars mais plus de voitures. (Remarque.) Donc ça, c'est pour remettre l'église au milieu du village. Mesdames et Messieurs, renvoyons cette pétition au Conseil d'Etat et qu'il vienne nous dire qui a la vision globale des choses et qui a le leadership...

Le président. Merci...

M. Ivan Slatkine. ...quand il s'agit de modifier la circulation dans un quartier.

Le président. Bien, Monsieur le rapporteur, vous avez largement utilisé vos trente secondes. (Commentaires.) Madame la conseillère d'Etat, je vous passe la parole.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Alors c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai appris que Mauro Poggia pensait toutes les secondes à moi, vu qu'il est tout le temps au volant... (Rires.) ...ça me fait plaisir. Plaisanterie mise à part, effectivement la Jonction a connu énormément de travaux. Des travaux liés au musée d'ethnographie, à la rénovation de la tour RTS - ils ne sont d'ailleurs pas totalement terminés - mais aussi ceux du pont Wilsdorf, du tram, et c'est vrai que cette conjonction de travaux était extrêmement pénible à vivre.

Mais en fait il y a aussi des améliorations. Beaucoup d'habitants de ce quartier pensent que c'est le plus beau quartier du monde, évidemment c'est le leur, ils apprécient d'y habiter et sont d'avis qu'il faut réduire la circulation. D'autres prétendent qu'il y a des problèmes pour se déplacer en voiture. Les gens ne sont pas d'accord. Et c'est pour ça qu'on va organiser un forum; parce qu'il faut trouver un moyen de vivre avec toutes les injonctions contradictoires des parents d'élèves, des habitants qui ont envie d'avoir moins de bruit, de ceux qui veulent avoir plus d'animation et des autres qui aimeraient pouvoir circuler. (Commentaires.) Toutes ces injonctions contradictoires existent à la Jonction. Et si je peux me permettre, Monsieur Slatkine, oui j'ai une vision de la mobilité et je l'ai maintenant exprimée dans Mobilité 2030.

De plus, le Conseil d'Etat a regroupé toute la problématique de la mobilité. Car une partie des problèmes dénoncés là-dedans c'est effectivement qu'il y avait, d'un côté, la conception de la mobilité, de l'autre la construction, et encore, en ce qui concerne les transports publics - et ça ce n'est pas encore résolu - l'action des communes. Chaque jour, on voit des lettres de lecteurs. Je prends l'exemple cette semaine de Confignon, comme ça il y a un magistrat qui pourra entendre: il n'y a pas de banc ni d'abribus à Confignon. (Protestations.) Ce ne sont pas les TPG, ce n'est pas la DGM, c'est la commune. Mais c'est vrai qu'il y eu... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des problèmes de coordination. Nous essayons de pallier ce problème et d'y remédier maintenant, en ayant cette vision globale, comme vous l'aviez demandé ! Nous avons élaboré tous les plans directeurs sectoriels, nous avons présenté des plans directeurs qui offrent une vision globale. Maintenant il faut que cela se concrétise au sein des quartiers, en adéquation avec les habitants, mais en prenant en compte leur diversité.

Quant à la question du parking... (Brouhaha.) ...non, le parking de Carré Vert ne subventionne pas les habitations. C'est simplement faux. Bien sûr il est déficitaire, comme beaucoup de parkings ! Tous les parkings habitants sont déficitaires. Oui, les parkings habitants ça coûte ! Mais il faut quand même rappeler que la proposition qui a été faite par l'Etat de Genève aux habitants de la Jonction qui se plaignaient de n'avoir pas de parking, c'était de pouvoir garer à David-Dufour. Pour 180 F par mois et deux mois gratuits. C'était vraiment une aubaine ! Eh bien il y a eu 17 personnes. 17. Bon. Ce n'est pas énorme au vu de toutes les demandes, soi-disant, de parking. Il faut simplement, maintenant, se rendre à l'évidence: d'un côté il y a des parkings existants, donc il faut que les gens qui habitent ces quartiers les utilisent. Vous pouvez éventuellement proposer des subventions, moi je ne le ferai pas. Et pour le reste, on doit organiser la circulation de manière totalement intelligente, et c'est ce qu'on fait. Effectivement... (Brouhaha.) ...ça rend les choses difficiles pour certains qui avaient des habitudes, mais il y a vraiment une vision et une stratégie qui se sont améliorées.

Et pour le dernier point qui concerne l'assainissement du bruit routier, Monsieur Slatkine, vous le savez... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ce rapport qui n'a pas été rendu pendant dix ans je vous l'amènerai au mois de février. Parce que quand je prends les choses en main je le fais sérieusement, contrairement à certains. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je vais vous faire voter... (Brouhaha.) ...les conclusions du rapport de majorité. S'il vous plaît.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1803 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 50 oui contre 24 non et 4 abstentions.