Séance du vendredi 16 novembre 2012 à 15h
57e législature - 4e année - 1re session - 3e séance

P 1828-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Non au transfert d'élèves rive droite-rive gauche, Oui aux solutions d'urgence proposées par le DIP
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de minorité de M. Pascal Spuhler (MCG)

Débat

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Cela fait quelques mois maintenant que la commission des pétitions est saisie de pétitions à répétition sur le problème du logement des élèves par le DIP. En effet, cette pétition est la première d'une série et nous sommes actuellement en train d'étudier trois autres pétitions concernant le manque de locaux pour les élèves de l'école de commerce Ella-Maillart à Plan-les-Ouates.

Cette pétition, au fond, nous demande de prendre des mesures d'urgence, de ne pas transférer les élèves de la rive droite à la rive gauche, comme c'est le cas maintenant pour une cinquantaine d'entre eux, et en même temps de prendre des mesures d'urgence qui consisteraient à construire des locaux provisoires pour accueillir ces élèves sur la rive droite.

La commission a étudié avec beaucoup d'intérêt cette pétition, parce qu'effectivement le problème est sérieux, le problème est grave pour le DIP. Il y a des décisions qui devront être prises rapidement.

Toutefois, la majorité de la commission a décidé de demander le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et de ne pas la renvoyer au Conseil d'Etat. Pourquoi ? Parce qu'il est impossible de construire des locaux de façon rapide. Il faut des autorisations, il faut des crédits d'étude et il faut de l'argent, puisque même un local provisoire coûte presque aussi cher qu'un local définitif, pour des raisons de sécurité, de salles de gym, de laboratoires, etc. Donc la majorité de la commission a estimé que, en l'occurrence, le dépôt tenait compte de l'intérêt, enfin disons des préoccupations manifestées par les pétitionnaires, et qu'il n'était donc pas nécessaire de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, chers collègues, je vous demande de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Pascal Spuhler (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, le rapporteur de majorité l'a dit, la commission des pétitions traite maintenant, depuis environ une année et demie, plusieurs pétitions tous azimuts sur la problématique de la disponibilité des places dans les bâtiments scolaires, que ce soit au cycle d'orientation, dans les ECG ou dans d'autres bâtiments, tels que les collèges. Cette pétition est donc un bis repetita de deux pétitions que nous avions déjà traitées et renvoyées au Conseil d'Etat, à savoir les pétitions 1777 et 1780, pour lesquelles nous avons eu un rapport laconique qui ne répondait finalement pas à ce qui était demandé. Nous avons donc évidemment dû traiter cette pétition qui demande tout simplement la même chose, soit que des élèves de la rive droite, principalement de la zone des Pâquis, ne soient pas envoyés sur la rive gauche, au cycle de Grange-Canal. Quand nous avons étudié cette pétition, nous avons également compris que des élèves des Eaux-Vives étaient, eux, envoyés à la Seymaz. Quant à ceux de la Seymaz, je ne sais pas, ils sont peut-être envoyés à Annemasse, à tout hasard.

Effectivement, des propositions avaient été faites, des voies avaient été proposées par M. Eric Tamone, directeur du service de la scolarité du département de l'instruction publique, dans un quotidien de la place, où il envisageait éventuellement d'installer des locaux provisoires pour compenser cette cinquantaine de places. Plusieurs voies ont été étudiées mais nous n'avons toujours pas, à ce jour, de réponse du DIP. Or il n'est pas évident - Mesdames et Messieurs, il faut bien comprendre cela - pour des parents de se dire que leur enfant, qui devait en principe aller étudier à dix minutes à pied de son domicile, grosso modo, doit finalement prendre un bus et faire un trajet d'au minimum trente minutes quand cela se passe bien et qu'il n'y a pas trop de bouchons. Il faut quand même s'y prendre un peu à l'avance et laisser un peu de marge, c'est-à-dire partir dix minutes plus tôt de la maison pour prendre le bus, etc. Cela sous-entend également un planning familial bousculé, puisque l'enfant ne pourra de toute façon pas rentrer chez lui à midi pour manger; cela sous-entend donc des frais, ainsi qu'une réorganisation totale de la famille.

Evidemment, on pourrait croire que cela n'est pas très important puisqu'on parle de cinquante familles. Mesdames et Messieurs, je pense que, oui, c'est important, même si cela touche une cinquantaine de familles, même si on nous dit que, après avoir libéré des places en cours d'année, on a proposé à ces familles de revenir en arrière. Mais comment voulez-vous que ces familles reviennent à une situation qu'elles auraient préférée au départ, alors qu'elles ont tout installé et tout organisé pour s'adapter à leur nouvelle situation ? Il faut juste arrêter de prendre les gens pour des imbéciles et essayer d'être prévoyant.

Je pense que cette situation d'une cinquantaine d'élèves - encore une fois, je vous le répète, ce n'est pas énorme - aurait pu être...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le rapporteur.

M. Pascal Spuhler. Merci, Monsieur le président. Je pense que cette situation aurait pu être prise en main au départ et, surtout, que ces familles auraient pu être averties en amont et non pas se voir informées de la manière dont elles l'ont été, c'est-à-dire à la dernière minute, par un vague communiqué de la part de la direction de l'école. Elles n'ont pas du tout été consultées pour savoir si elles étaient d'accord de s'adapter à ces conditions de déplacement des enfants. Je vous rappelle que ce sont des enfants entre 12 et 14 ans, qu'on envoie traverser toute la ville, en bus peut-être, mais certains se déplacent également en deux-roues, or le deux-roues, aux heures de pointe, ce n'est pas évident, c'est dangereux. Je vous remercie d'en prendre note.

M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en train d'assister à un retournement de veste d'une majorité de ce Grand Conseil et à une incohérence entre deux pétitions. En effet, la première, comme cela a été dit, avait été renvoyée au Conseil d'Etat il y a déjà un petit moment, puisque la majorité de ce Grand Conseil avait effectivement jugé que la situation des élèves déplacés était inacceptable et avait donc voté le renvoi de ladite pétition au Conseil d'Etat.

Or, aujourd'hui, pour ce que j'appellerais de faux prétextes, la majorité de la commission a finalement décidé que, pour les mêmes élèves - puisqu'il s'agit quasiment des mêmes personnes qui nous ont renvoyé cette pétition - il n'y avait de toute façon rien à faire, que l'on n'avait qu'à déposer la pétition et que rien ne changerait. Effectivement, la situation n'a absolument pas changé ! C'est pourquoi, également par souci de cohérence, nous maintiendrons notre position par rapport à la première pétition, c'est-à-dire que nous demanderons le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Jean Romain (R). Chers collègues, j'aimerais seulement dire deux choses, mais deux choses qui me semblent assez importantes. C'est vrai, il manque de la place, on l'a dit, et cette place il faut la trouver. Les locaux, on ne peut pas les construire. C'est vrai, ce n'est pas l'idéal que de déplacer des élèves d'une rive à l'autre, mais enfin c'est une solution, c'est une solution du DIP qui, sans être parfaite, sans être géniale, est néanmoins, chers collègues, acceptable. On peut se résoudre à ce transfert de rive.

Le deuxième point - M. Spuhler l'a souligné et je ne peux qu'être d'accord avec lui - c'est le manque d'information de la part du DIP. De nouveau ! Une fois encore, nous déplorons ce manque d'information, une fois encore nous déplorons le fait qu'il y ait peut-être une certaine rapidité, voire, je ne sais pas, une certaine arrogance dans la manière d'agir. Et c'est dommage, parce qu'on réglerait bien des problèmes en allant un tout petit peu plus longtemps expliquer certaines choses.

Le DIP, je l'ai dit, compte 240 personnes dans son secrétariat central. On devrait quand même pouvoir trouver du monde, parmi ces 240 postes, pour aller expliquer gentiment aux parents ce qui se passe... Ou bien faudra-t-il prendre des conseillers en communication du DIME, réduire un petit peu l'armée mexicaine et les prêter au département de l'instruction publique ?

Quoi qu'il en soit, étant donné la situation, chers collègues, le bon sens, parce qu'on ne peut pas faire autrement, en tout cas momentanément et dans l'année qui vient, voudrait que l'on dépose cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, même si - et M. Florey nous l'a répété - la première fois, on l'avait transmise au Conseil d'Etat. Difficulté il y a, mais une solution a été trouvée. Elle n'est pas tout à fait acceptable, mais c'est une solution, et il faudra bien que les enfants aillent quelque part.

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, voilà, on en arrive encore à une pétition. Pourquoi ? Simplement parce que les membres du gouvernement n'ont pas su anticiper les problèmes: depuis de très nombreuses années déjà on peut constater que ces baraquements provisoires dans les préaux d'école fleurissent partout, mais cela ne leur a pas servi de leçon pour voir un petit peu plus loin que le bout de leur nez, puisqu'ils n'ont pas entrepris de grands travaux au niveau des écoles, que ce soit en primaire, au postobligatoire ou au cycle d'orientation.

Et aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe ? On est en train de balader des gamins dans toute la république ! Des enfants de 12 ans, qui doivent prendre le tram, qui en ont pour une heure de trajet à travers la ville, à se balader, au lieu de pouvoir rentrer normalement à la maison pendant les heures de repas, comme l'a dit le rapporteur de minorité, et faire leurs devoirs. Ils les font sur leurs genoux, dans les trams. C'est malheureux ! Tout cela parce que le gouvernement ne sait pas prendre ses responsabilités de ce côté-là.

Alors que, à l'époque, l'Etat de Genève avait les moyens de pouvoir construire des écoles, aujourd'hui vous connaissez la situation financière de l'Etat, et puisque vous avez souhaité en plus de cela le CEVA, eh bien il faudra vous résoudre aujourd'hui à comprendre que l'on n'aura plus du tout les moyens, pour bien des années, de construire des écoles ! On n'arrive plus à avoir maintenant les budgets nécessaires pour des travaux prioritaires, que certains souhaitent ici. De même pour les prisons. C'est là justement la politique désastreuse que vous avez voulue jusqu'à aujourd'hui et c'est regrettable. La faute revient au Conseil d'Etat qui ne sait pas anticiper les problèmes.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pascal Spuhler, qui peut prendre une minute vingt sur le temps de son groupe.

M. Pascal Spuhler (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Effectivement, je ne peux que regretter l'espèce de fatalisme exprimé par la majorité de la commission qui a traité la pétition en question, puisque nous estimons que, avec un peu de vision, le Conseil d'Etat aurait pu prévoir malgré tout des bâtiments provisoires, des constructions modulaires, annexes aux cycles d'orientation de la rive droite; cela afin de compenser le manque de places et éviter que les enfants ne soient jetés dans la rue et traversent toute la circulation pendant une heure à l'aller et au retour afin d'accéder aux écoles et de rentrer chez eux. C'est juste un peu regrettable, c'est dommageable, c'est de la perte de temps, c'est de l'angoisse pour les familles et des soucis organisationnels énormes.

Je ne peux donc que recommander à l'ensemble de ce parlement de renvoyer encore une fois cette pétition au Conseil d'Etat, afin que des mesures soient prises pour éviter que l'année prochaine on ne retombe de nouveau sur cette même manière de traiter ces enfants et que nous ne soyons saisis d'une nouvelle pétition.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole est à M. Guy Mettan, pour une minute.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. J'aimerais formuler trois courtes remarques. D'abord pour dire évidemment que c'est regrettable que des élèves doivent traverser le lac pour aller à l'école. Cela dit, ce n'est quand même pas une punition, ni un supplice.

Dans le canton du Valais ou le canton de Vaud, il y a beaucoup d'élèves qui prennent le train pendant quarante-cinq minutes pour se rendre à l'école, sans aucun problème, et je ne vois pas pourquoi ici, à Genève, on ne pourrait pas, hélas, prendre vingt minutes pour rejoindre une école, surtout qu'en plus les élèves sont défrayés pour le faire, car les familles sont remboursées.

Une voix. Ce n'est pas vrai !

M. Guy Mettan. Deuxième remarque: il s'agit de 50 élèves sur 70 000 ! C'est vrai qu'il est impossible de planifier à l'unité près, quand on a 70 000 élèves...

Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le rapporteur.

M. Guy Mettan. ...et aussi de trouver de la place pour tout le monde et, malheureusement, ces 50 élèves sont un peu victimes de cette impossibilité. Puis, enfin, il faut quand même aussi dire qu'on ne peut pas construire un cycle ou une nouvelle école, qui va coûter 50 millions, pour 50 élèves ! Un million par élève, malheureusement, ce n'est pas possible.

Le président. Vous avez épuisé votre temps !

M. Guy Mettan. Il faut donc trouver d'autres solutions et on s'y attelle.

Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, la commission des travaux, lassée par le saucissonnage qu'on nous impose en termes de bâtiments scolaires, a rédigé en janvier 2011 une motion de commission demandant aux départements concernés de planifier de manière rationnelle, à moyen et long termes, des bâtiments scolaires des secondaires I et II comprenant les pôles de formation professionnelle, des bâtiments du tertiaire, etc. Cette motion n'a toujours pas obtenu de réponse et nous constatons qu'effectivement, dans certains cas, nous arrivons à des situations qui paraissent totalement inacceptables. Mesdames et Messieurs les députés, il y a là un vrai problème en termes de bâtiments scolaires. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On le sait depuis longtemps. Des périmètres ont été déclassés pour les accueillir et je crois qu'il y a un souci au niveau des départements concernés.

Mesdames et Messieurs les députés, les Verts resteront par ailleurs sur leur position quant à la pétition, mais enjoignent les départements chargés de la construction et de l'instruction publique de travailler de concert et de faire avancer ces projets, qui devraient du reste être en train d'être construits.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Eric Leyvraz, à qui il reste une minute et demie.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci beaucoup, Monsieur le président, c'est bien suffisant ! Je suis bien entendu triste pour ces élèves, ces cinquante élèves qui doivent traverser le lac, mais je rappelle quand même que, s'agissant des enfants du Mandement qui doivent prendre le bus puis le train et parfois encore le bus pour se rendre soit au cycle, soit au collège, personne n'a l'air de s'en préoccuper beaucoup. Et puis ils ne se sont pas plaints non plus.

Je pense qu'à un moment donné, il faut aussi savoir qu'une grande majorité est gâtée dans ce canton et que, si une faible minorité a un trajet un peu plus long à parcourir, ma foi, c'est comme cela et il faut l'accepter.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Mauro Poggia, à qui il reste vingt-cinq secondes.

M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Monsieur le président, je serai bref. Je voudrais simplement dire à M. Mettan que les populistes ne sont pas ceux qu'on croit. Faire du populisme, c'est faire de la politique pour le grand nombre. M. Mettan nous dit que cinquante élèves, sur cette quantité d'élèves, c'est finalement peu de chose. Je crois que la justice sociale se calcule à l'unité près, Monsieur Mettan. C'est chaque élève qui nous importe et nous sommes étonnés, du côté du MCG, d'entendre un pareil discours de votre bouche.

Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, lorsque cette pétition nous a été présentée en commission, j'y siégeais et j'ai trouvé qu'elle était intéressante. C'est vrai, il y avait de quoi entrer en matière sur la demande des pétitionnaires. Mais franchement, réflexion faite, faire un trajet, comme on nous dit, de vingt-cinq minutes à l'aller et de vingt-cinq minutes au retour, ce n'est quand même pas la mer à boire, je m'excuse !

Dans notre vie d'aujourd'hui, on a tous des habitudes, mais on doit apprendre à les changer et à se mouvoir davantage. (Brouhaha.) Alors il n'y a pas le feu au lac, c'est peut-être une situation temporaire. Très franchement, je partage totalement l'avis du rapporteur de majorité, et je vous demande donc de le suivre dans ses conclusions.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1828 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 51 oui contre 22 non et 4 abstentions.