Séance du
jeudi 7 juin 2012 à
20h30
57e
législature -
3e
année -
9e
session -
48e
séance
R 699
Débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante. Il s'agit de la R 699, qui figure au point 57 bis. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole est à M. le premier résolutionnaire Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Depuis quelques mois, le parti démocrate-chrétien est préoccupé par le fait que les médecins mais aussi les hôpitaux rencontrent des problèmes pour s'approvisionner en médicaments. Si nous déposons cette résolution pour inviter le Conseil d'Etat à solliciter les Chambres fédérales, c'est parce que Genève a un hôpital universitaire - de même que le canton de Vaud - et que, dernièrement, les professeurs d'oncologie des hôpitaux universitaires des cantons de Vaud et de Genève ont tiré la sonnette d'alarme en disant que certains médicaments anticancéreux étaient en rupture de stock. Nous nous sommes rendu compte que cette rupture de stock ne concernait pas seulement certains médicaments anticancéreux, mais aussi des anesthésiques, des antidépresseurs et certaines formes de cortisone. Et nous nous sommes aperçus que ce problème touchait également les cabinets médicaux. Dans mon cabinet de rhumatologie, par exemple, nous avons plus de peine à obtenir certains dérivés de la cortisone et nous devons nous fournir sur certains «marchés gris» qui obligent à acheter des gros stocks de médicaments, à des prix qui n'ont plus rien à voir avec les tarifs habituels du marché.
Je vous donnerai un exemple qui est très préoccupant: il s'agit d'un monsieur qui est atteint d'un cancer et qui doit prendre un médicament qui s'appelle le Leukeran. Le mois dernier, il a acheté trois boîtes dans la même pharmacie à Carouge, et la première fois il a payé 19,80 F, la deuxième 30 F et la troisième 127 F. Et pourquoi 127 F la troisième fois? Parce qu'il n'y avait plus de stock en Suisse, que la pharmacie a dû se fournir sur le marché gris en Allemagne et que les intermédiaires prennent forcément une marge énorme. Le médicament a donc été acheté 127 F.
Le problème, c'est donc que l'on en arrive - et les pharmaciens des hôpitaux cantonaux le disent - à des situations où l'on n'a plus de stock pour réaliser certaines préparations anticancéreuses, ce qui met la santé des gens en danger. Il faut par conséquent absolument que ce problème-là soit pris en compte à Berne, parce que l'on a l'impression que Swissmedic et le Conseil fédéral passent complètement à côté de cette problématique. Or, lorsqu'on se rend à des congrès médicaux, on constate que ce problème y est discuté tous les jours, et les Américains ont déjà pris des mesures, de même que les Canadiens. C'est à l'échelle du monde entier que ce problème se pose et nous devons réagir en tant que canton qui possède un hôpital universitaire, parce que nous devons protéger les gens qui sont soignés. On ne peut pas continuer comme ça, car on risque de devoir arrêter certains traitements, ce qui peut être extrêmement préjudiciable pour les malades.
Pourquoi en arrive-t-on là ? Simplement parce que certaines substances sont devenues tellement bon marché que certaines industries n'ont plus intérêt à les produire. Et pourtant ces médicaments fonctionnent bien, on les connaît bien, on sait comment s'en servir, on en connaît bien les effets secondaires, et ce sont des médicaments qu'on utilise tous les jours. Or ces médicaments ont tendance à disparaître, ou alors...
Présidence de M. Gabriel Barrillier, premier vice-président
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Bertrand Buchs. Merci, Monsieur le président. Je conclus en vous disant ceci: vu l'urgence de la situation, et dans la mesure où les Chambres fédérales sont réunies maintenant, que des motions relatives à ce problème seront déposées auprès des Chambres fédérales et que les présidents de la santé de tous les cantons ont déjà alerté le Conseil fédéral à ce sujet, nous vous demandons de renvoyer directement cette résolution au Conseil d'Etat. Nous vous remercions.
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, la problématique que vient d'évoquer mon collègue est tout à fait vraie; elle est réelle, elle est dramatique, et il l'a bien exprimée. Il s'agit d'un problème mondial, qui se discute dans le Bureau ovale, dans les instances de l'ONU ainsi que dans les plus grosses instances intergouvernementales.
Or le problème que nous avons, nous autres des groupes libéral et radical, c'est que nous savons que notre parlement est omnipotent et qu'il est bourré de personnes dotées de nombreuses compétences, mais nous nous posons la question de savoir si cet hémicycle est vraiment fait pour traiter ce genre de problèmes. En effet, ces derniers sont dramatiques, très techniques, mais ils dépassent la réalité genevoise, tout simplement ! C'est pour cela que nous sommes un peu dubitatifs et que nous n'avons pas voté l'urgence. Mais nous ne nous opposerons pas à un renvoi en commission, d'autant moins que l'invite est juridiquement inexacte: «demander aux Chambres fédérales de proposer au Conseil fédéral» ne tient pas la route et, d'après nos experts en droit et nos juristes, cette résolution risquerait d'être shootée tout simplement pour cause de non-conformité. Nous vous proposons donc de la renvoyer à la commission de la santé pour qu'elle soit retravaillée.
Mme Christina Meissner (UDC). Je remercie le bon docteur Buchs d'avoir attiré notre attention sur la situation dramatique que nous sommes en train de vivre. On joue, au nom du fric, avec la vie des gens, et c'est intolérable. Entre l'obsolescence programmée des médicaments et les nouvelles pathologies qui sont inventées pour nous vendre de nouveaux médicaments alors que les anciens fonctionnent très bien, il y a effectivement un manque d'éthique dramatique au niveau de certaines entreprises pharmaceutiques, il faut le reconnaître. Alors nous devons évidemment soutenir les sociétés qui font preuve d'éthique, qui respectent l'environnement, leurs employés et surtout une manière d'être, mais par ailleurs nous devons aussi ne pas laisser d'autres jouer avec la vie des gens. Dans nos pays, surtout s'agissant de la Suisse, nous avons des entreprises pharmaceutiques magnifiques - Novartis notamment, dont on a parlé, mais il en existe tant d'autres - et ce serait quand même un comble que nous n'ayons plus de médicaments pour pouvoir nous soigner et vivre des jours heureux dans notre beau pays, en bonne santé et avec de bons médicaments.
C'est la raison pour laquelle il n'y a pas lieu de renvoyer une telle résolution en commission, car c'est clairement un signal, là aussi, que nous devons donner aux Chambres fédérales. Alors peut-être que l'invite n'a pas été rédigée dans les règles de l'art, mais je rappelle qu'il s'agit là d'une déclaration et que notre parlement a le droit de faire des déclarations quand il estime qu'il est question de sujets importants. Aux yeux de l'UDC, c'est un sujet important, et nous soutiendrons donc le renvoi de cette résolution au Conseil d'Etat.
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'étais il y a quelques heures encore aux Etats-Unis, et nous avons abordé ce problème qui est bien sûr très aigu dans cet autre continent, mais qui est exactement le même que celui que nous avons. Nous sommes face à un scandale et face à un dossier qui devient très chaud. Scandale, parce que d'une part il y a une pénurie programmée de médicaments, et que d'autre part nous assistons au développement de réseaux que nous appelons les «réseaux gris»: c'est un marché juteux qui permet à certains de bloquer les médicaments, de bloquer les productions, ou alors de faire des stocks et de les revendre à des prix abusifs.
Nous sommes donc face à un problème éthique, puisque les premiers à en souffrir sont les patients. Et je tiens à vous dire par exemple que les femmes qui sont atteintes d'un cancer de l'ovaire en Suisse et qui étaient soumises à un programme national sont dans l'incapacité de le poursuivre à cause d'un médicament qui a été retiré, à savoir le Caelyx, pour ceux qui auront eu le temps de voir ce qu'il en est. Je rappelle que cette molécule était impropre sur le plan chimique, et il s'avère que, derrière cette molécule, il y a d'énormes contrats juteux qui prennent le relais. Donc les femmes sont touchées, tout comme les hommes, la médecine privée est touchée, tout comme la médecine académique, et c'est tout à fait scandaleux.
Le deuxième point, c'est bien sûr le problème de l'augmentation des prix. Vous avez bien compris que nous partons du générique, et que ces génériques ont été l'objet d'énormes pressions par les hôpitaux également, il faut le dire, par les groupes qui achetaient, qui eux-mêmes ont fait d'énormes pressions sur certains groupes qui produisaient; parmi ces groupes, certains ont fait faillite, d'autres se sont regroupés, et certains ont adopté cette stratégie qui est tout à fait inhumaine et dans laquelle il y a bien sûr une concurrence dans le prix.
Il y a aussi - attention ! - des éléments que nous devons maintenir, et il faut éviter les amalgames; la chimie suisse n'est pas en cause, je tiens à le dire franchement ce soir. Nous avons entendu tout à l'heure M. Stauffer déclarer que Novartis recevait des subsides de la Confédération, mais c'est faux: je m'insurge contre ce principe totalement faux ! C'est fallacieux, c'est un mensonge.
Alors que se passe-t-il en Suisse ? Eh bien nos compagnies essaient de remonter la pente, essaient de revenir par leurs usines - qui se construisent malheureusement aussi en Europe, notamment en Autriche - mais la production de ces médicaments prend entre dix-huit et vingt-quatre mois. Il y a donc un hiatus qui va mettre du temps à être comblé et qui ne sera pas rapidement récupérable.
Pourquoi renvoyer ce texte d'abord au Conseil d'Etat, puis ensuite à Berne ? Parce qu'il y a en Suisse un baromètre, qui s'appelle la confiance politique, c'est-à-dire que nos institutions sont régulées et que l'on ne fait pas n'importe quoi tant au niveau de son cabinet qu'au niveau des achats de médicaments. Ensuite, il y a la confiance institutionnelle, parce qu'en Suisse les hôpitaux, comme les médecins, travaillent avec une certaine méthodologie, une certaine éthique, et les compagnies font de même. Il y a en outre un problème de confiance économique, parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, les mesures d'achats à prix cassé ou de reventes à prix usurpé aboutissent toujours à des contradictions, à des horreurs, et nous avons ce soir un bel exemple d'une riposte de l'industrie qui est tout à fait disproportionnée. Nous voulons également une confiance sociétale, parce que nos patientes et nos patients sont malheureusement les premiers touchés et que, comme cela a été dit, nous sommes face à un problème de responsabilité non seulement par rapport à l'avenir, mais aussi au temps présent. C'est la raison pour laquelle nous demandons au Conseil d'Etat d'intervenir et de faire en sorte que soit bien étudié ce problème d'approvisionnement et de régulation.
Le président. Monsieur le député, vous avez épuisé votre temps de parole !
M. Michel Forni. Merci, Monsieur le président. Je demande donc que nous puissions transmettre ce texte au Conseil d'Etat afin qu'il l'étudie et qu'il le fasse suivre ensuite à Berne. (Applaudissements.)
M. Melik Özden (S). Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution de M. Buchs met le doigt sur un problème réel, mais qui est créé, comme cela a été souligné, par des compagnies pharmaceutiques transnationales. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'à l'origine de ce problème se trouve le système de brevets. En effet, selon l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, connu sous le nom d'ADPIC, un brevet a une durée de vie de vingt ans; après, il tombe dans le domaine public. C'est pourquoi l'industrie pharmaceutique a pris la mauvaise habitude ces dernières années de sortir de prétendus nouveaux médicaments contenant des modifications mineures par rapport aux anciens médicaments déjà existants, le but étant de pouvoir étendre leur durée de vie et de continuer à engranger des bénéfices qu'ils ne méritent pas. C'est ce problème qui est à l'origine de la pénurie de médicaments et, je le répète, c'est une pénurie qui a été créée et entretenue par l'industrie pharmaceutique.
Les autorités fédérales devraient s'attaquer à l'origine du problème, elles devraient serrer la vis par rapport à l'attribution de brevets à tout-va, car de nombreux nouveaux médicaments sur le marché ne méritent pas d'obtenir le label de nouvelle découverte. Les autorités fédérales peuvent également, en invoquant la santé publique, obliger les fabricants à fournir les médicaments indispensables hors période de brevet pour approvisionner nos hôpitaux.
En conclusion, le groupe socialiste soutiendra l'adoption de cette résolution et s'opposera à son renvoi en commission, car c'est aux autorités fédérales de prendre les mesures qui s'imposent dans ce domaine. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de votre attention.
Présidence de M. Pierre Losio, président
M. Mauro Poggia (MCG). Avant toute chose et puisque mon intervention sera courte, j'aimerais faire une remarque concernant la manière dont les députés sont interrompus lorsqu'ils arrivent à l'approche de la fin de leur temps de parole. Pour fréquenter le Conseil national, je constate que jamais le président du Conseil national n'interrompt un député: il a le tact de tapoter sur sa petite cloche pour faire sentir à la personne qui s'exprime qu'elle arrive au bout de son temps. Je trouve cela beaucoup plus respectueux que d'interrompre quelqu'un qui est en train de parler et j'aimerais bien que cette pratique que j'apprécie beaucoup s'applique aussi dans notre parlement. Cela étant... (Commentaires.) Peut-être que vous appréciez d'être interrompus, mais moi pas, et quand on me fait signe que j'arrive au bout, j'ai la discipline de m'arrêter. (Commentaires.)
Maintenant concernant le texte qui nous occupe ici, je pense qu'il s'agit d'un sujet effectivement important, mais il faut avoir l'humilité de savoir que les vagues que nous faisons ici sont égales à celles que peut faire un poisson rouge dans un bocal. Donc nous pouvons manifester, mais cela aura évidemment un impact extrêmement restreint. Nous allons par conséquent évidemment soutenir cette démarche, parce que sur le principe elle est louable, mais il faut être conscient de son caractère limité.
Ce qui est particulièrement choquant, c'est que la Suisse est le pays de l'industrie pharmaceutique; la Suisse subventionne l'industrie pharmaceutique directement, mais aussi indirectement, puisque le prix de nos médicaments est supérieur à celui que paient nos voisins. Et l'on nous explique année après année que si nous payons plus cher, c'est parce que précisément la recherche coûte cher, que nous avons cette industrie chez nous - la chance de l'avoir chez nous ! - et qu'il faut donc indirectement la subventionner. Alors quand on entend que cette même industrie pharmaceutique joue finalement la récession des médicaments pour en tirer des profits financiers, je trouve cela indécent et totalement inacceptable. Mais il faut évidemment être conscient que le problème est complexe et qu'il sera difficile, par une simple intervention comme nous le faisons ici à l'intention de Berne, de faire changer cette situation lamentable.
M. Pierre Conne (R). Chers collègues, le problème est évidemment important, et il ne s'agit pas de le nier. Néanmoins, cette résolution m'irrite; elle m'irrite parce que, dans le fond, c'est comme si maintenant nous nous mettions à crier «Au feu ! Au feu !», alors que d'autres, bien avant nous, ont déjà appelé les pompiers et que ceux-ci sont à l'oeuvre pour tenter de résoudre le problème. Cela fait plus d'un an que ce processus de raréfaction de certains médicaments au plan mondial est connu, cela fait plus d'un an que le gouvernement fédéral s'est saisi de la question, et actuellement l'Office fédéral de la santé publique travaille d'arrache-pied pour trouver des solutions, en collaboration avec les directeurs de la santé cantonaux. Alors oui, nous pouvons nous agiter, nous pouvons chercher à nous faire de la publicité sur un problème extrêmement sensible et extrêmement important, mais s'il vous plaît ne nous ridiculisons pas et, pour le moins, rédigeons un objet qui soit correct en termes de droit, de manière que nous ne soyons pas, en plus de cela, tournés en ridicule sur ce plan-là. Nous avons donc déjà formulé la proposition de renvoyer cette résolution à la commission de la santé, et probablement qu'il sera beaucoup plus intéressant de retravailler la problématique de fond. Il n'est absolument pas nécessaire d'agir dans l'urgence puisque les instances fédérales sont déjà en train de traiter la question. Nous pourrions donc étudier cela au sein de la commission de la santé et proposer un texte bien mieux élaboré et plus correct sur le plan juridique. En conclusion, je réitère notre demande de renvoyer cette résolution à la commission de la santé.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). J'ai l'impression que, dans ce parlement, on découvre les mécanismes de l'économie de base, ceux qui ont - c'est très simple - créé la pénurie pour vendre plus cher un produit. Point barre ! Et quand on voit les choses comme ça, on se dit que l'industrie pharmaceutique n'a rien inventé, qu'elle fait simplement tourner une roue qui est très très connue et que l'on est en train de subir actuellement. On sait que les problèmes pharmaceutiques, les problèmes de pénurie de médicaments vont ou sont en train d'arriver, et qu'on doit acheter des médicaments à des prix plus élevés non pas parce qu'ils n'existent pas, mais simplement parce qu'on a créé une pénurie de façon artificielle. On vit ce que vivent les pays du tiers-monde tous les jours, et je pense que, pour une fois, eh bien c'est peut-être à nous de payer aussi ce genre de choses. C'est bien dommage, mais c'est une réalité.
Le fait que cette résolution soit parfaite ou non n'est donc pas la question. Cette résolution soulève un problème important et redit au Parlement fédéral qu'il faut peut-être remettre une couche et s'activer un peu plus pour résoudre cette problématique, et je pense par conséquent que notre parlement se doit de la renvoyer là où il doit, c'est-à-dire à Berne.
M. Claude Aubert (L). Monsieur le président, Mesdames les députées, Messieurs les députés, dès l'instant où l'on devient émotionnel et que l'on désigne des victimes - en l'occurrence les patients qui seraient victimes de ces pénuries - on désigne immédiatement le persécuteur, et le persécuteur c'est l'industrie pharmaceutique qui amasse des millions pour le profit de ses managers. On passe donc d'une caricature à une autre caricature.
Tout à l'heure nous avons parlé de Serono, eh bien cette entreprise a eu un énorme problème: elle a créé un médicament qui marchait très bien, elle a continué à le produire encore et encore et, tout d'un coup, les recherches ayant été extrêmement poussées dans d'autres pays et dans d'autres industries, elle a essayé de développer quelque chose; mais ça n'a pas marché et, comme il n'y avait qu'un seul médicament qui était vraiment porteur, eh bien voilà, ça s'arrête. Alors maintenant on se gausse des industries pharmaceutiques qui créent beaucoup de médicaments, mais elles ne le font pas simplement pour enrichir les actionnaires: ces médicaments nouveaux sont aussi utiles. Et je vous livre un rappel historique: quand il y a eu l'épidémie de sida, vous rendez-vous compte de la vitesse de réactivité des industries pour trouver des médicaments nouveaux pour un problème nouveau ? S'il avait fallu avoir une académie qui planifie la recherche en pharmacologie pour les cinq ans à venir, on aurait probablement mis dix ans pour s'occuper du sida. Il faut donc cesser de parler en termes de caricatures, de victimes et de persécuteurs, et se dire qu'il y a des moments où, s'il faut quasiment un milliard d'investissements pour développer un médicament, il faut être d'accord qu'il existe évidemment des questions d'argent, mais que l'objectif des industries pharmaceutiques n'est pas simplement de tondre les patients, mais aussi de produire des médicaments dont vous profitez tous.
M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez dit l'essentiel. Peut-être conviendrait-il de préciser ce que l'on veut réellement demander aux Chambres, respectivement au Conseil fédéral, et il est vrai que ce sujet va être traité par les Chambres lors de la session actuelle, mais je doute que votre texte serait agendé à cette session, même si on l'envoyait - ce qui serait probablement le cas - lundi ou mardi.
Ou alors on peut essayer de l'améliorer, parce que le problème de fond est réel et que les solutions ne sont pas innombrables. A l'heure actuelle, les maisons pharmaceutiques qui arrêtent de produire un médicament ou qui ne comptent pas renouveler leur stock ont l'obligation, en tout cas en Suisse, de prévenir l'autorité sanitaire deux mois à l'avance. C'est déjà très court, et en plus le délai n'est pas respecté. Alors il y aurait peut-être une réflexion à mener autour de ce délai, en disant que si une industrie pharmaceutique arrête de produire un médicament qui n'a pas d'alternative, il devrait être obligatoire de pouvoir le prolonger, quitte à ce que l'on trouve des clés de répartition sur le financement de la prolongation, etc. Là, il y a une vraie question que l'on pourrait probablement essayer de développer un peu en commission.
L'autre élément est celui de la gestion des stocks, parce que si le problème est mondial - et c'est vrai - il est moins grave pour les hôpitaux du bassin lémanique que pour les autres hôpitaux, puisque nous sommes regroupés en termes d'approvisionnement, ce qui fait que notre gestion du stock est un peu meilleure qu'elle ne l'est ailleurs. Et même dans les hôpitaux où la gestion du stock n'est pas idéale, elle est meilleure que ce qui se passe dans un cabinet médical, et c'est bien normal, parce qu'on ne parle pas des mêmes quantités.
Ce problème est un problème réel et, sans vouloir du tout être dilatoire, un petit détour en commission permettrait peut-être d'affiner le type de demande que l'on peut faire à la Confédération, dans l'espoir qu'elle puisse la faire appliquer, parce que la demande telle qu'elle est actuellement est tellement générale pour un problème mondial que j'ai peur que cela n'ait pas un impact suffisant, mais c'est votre décision qui l'emportera.
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous passons à présent au vote sur le renvoi de la R 699 à la commission de la santé. En cas de refus, nous nous prononcerons sur la proposition de résolution elle-même.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 699 à la commission de la santé est rejeté par 43 non contre 41 oui et 2 abstentions.
Mise aux voix, la résolution 699 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 56 oui contre 26 non et 2 abstentions.