Séance du jeudi 9 juin 2011 à 20h30
57e législature - 2e année - 9e session - 50e séance

PL 10765-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 14'000'000F pour l'acquisition des parcelles N° 958 et 4296 de la commune de Vernier
Rapport de majorité de M. Frédéric Hohl (R)
Rapport de minorité de M. Eric Bertinat (UDC)

Premier débat

M. Frédéric Hohl (R), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je sais que chacun d'entre vous a pris la peine de lire les rapports de majorité et de minorité, mais je tiens tout de même à vous rappeler - je crois très important que tout le monde s'en souvienne durant toute la durée de nos débats - qu'il ne s'agit pas là de l'achat d'une boîte de nuit qui s'appelle le Moa, d'une surface de 500 m2, mais nous parlons bien d'un terrain d'environ 20 000 m2. Donc toutes les réflexions et toute la discussion que nous allons avoir ce soir à ce sujet concernent bien ces deux parcelles.

De quel genre de parcelle s'agit-il ? La première parcelle, qui s'étend sur 13 635 m2... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...abrite deux immeubles de bureaux, des ateliers, des entrepôts, des locaux loués. La deuxième parcelle mesure 6004 m2; elle est occupée par un petit restaurant, et elle a beaucoup de place pour accueillir, à partir du moment où l'Etat en sera acquéreur, d'autres entreprises.

L'achat de ces terrains et de ces bâtiments représente 14 millions. Mesdames et Messieurs, l'état locatif, le 5 novembre 2010, était de 814 500 F, soit un rendement de 5,82%. Un rendement de 5,82%, en novembre, n'est quand même pas si mal au niveau de l'immobilier genevois; peu d'acquisitions ont aujourd'hui un rendement locatif de cette envergure. Je vous l'expliquais en préambule, il ne s'agit pas d'un seul commerce, le Moa, mais il s'agit bien de 24 commerces, 28 bureaux et 250 places de parc. C'est l'ensemble. Ensuite, après l'acquisition, dans le cas où le Grand Conseil suit le rapport de majorité, si le Conseil d'Etat achète cette parcelle, l'état locatif sera monté à 1 050 000, soit à 7,5%, ce qui est - et là, vous pourrez me l'accorder - un excellent rendement.

En ce qui concerne les objectifs du Conseil d'Etat, il y avait deux actions du parlement. D'abord, le Grand Conseil a adopté en septembre 2010 la loi 10655, qui modifie les limites de zones de la parcelle de ce périmètre. Deuxièmement, vous vous souvenez de la résolution 639, adoptée en octobre 2010, sur la réouverture du Moa. Voici les objectifs à long terme et à moyen terme. En premier lieu, je crois qu'il y a quelque chose de très important que vous devez tous bien imprimer dans la réflexion de ce soir, c'est l'accès par le rail à ces deux parcelles. Or l'accès au rail est très important. En outre, la deuxième parcelle, de 6000 m2, pourra accueillir très rapidement des entreprises, par exemple venant du PAV - le secteur Praille-Acacias-Vernets.

En commission, je ne vous cache pas que les grandes discussions, forcément, ont tourné autour du prix. Le prix des terrains, quand vous achetez des terrains en zone industrielle, avoisine - on le sait - les 250 F le mètre carré. Dans ce projet de loi, le terrain est effectivement acheté à 250 F le mètre carré, ce qui représente 5 millions. Ensuite, il y a une expertise, d'ailleurs à l'Etat, qui a monté le prix des bâtiments à 9,6 millions, ce qui amène le prix de cette transaction à 500 F le mètre carré. Donc l'ensemble, qui représente tous les commerces, les parkings et les immeubles - c'est-à-dire le terrain et les bâtiments - revient à 750 F le mètre carré, soit 14 millions pour la réalisation de cette transaction.

Certains ont trouvé que c'était cher. Certains ont trouvé - on l'a lu dans le rapport de minorité - que, somme toute, le vendeur faisait une excellente affaire. Je vous rappelle que le vendeur va bien évidemment payer des taxes sur cette plus-value immobilière, des taxes qui reviendront également à l'Etat. Donc l'Etat va bénéficier de ce paiement d'impôts.

Ensuite, les nouvelles constructions et l'augmentation de la densité vont forcément augmenter le prix de cette parcelle...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Frédéric Hohl. J'arrive au bout ! Et le rendement locatif, qui avoisine les 7,5%, est excellent. Je me permettrai, Mesdames et Messieurs, de revenir un peu plus tard. Je rappelle simplement le résultat du vote final en commission: 8 oui contre 3 non et 3 abstentions.

M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je veux bien éviter une discussion qui pourrait être pénible sur le Moa et les différentes personnalités qui ont gravité autour de cette affaire, et accepter de me concentrer uniquement sur le prix. En effet, le fond du problème n'est pas tellement le Moa, le loyer que l'on va fixer pour le Moa ou la question de savoir si sa survie est assurée par le simple achat de cette parcelle, mais c'est réellement la somme que je juge anormale et prohibitive pour acheter du terrain en zone industrielle.

Acheter ces deux parcelles à une valeur de 14 millions, Mesdames et Messieurs, c'est fixer le prix du mètre carré pour la zone industrielle à 750 F. Alors j'entends bien, évidemment, M. Muller essayer de justifier cette dépense en nous expliquant que l'état locatif permet de rentrer dans le calcul de cet achat, que la valeur immobilière est relativement importante, qu'elle a lieu de paraître dans le calcul également. Dans le même élan, ne craignant pas la contradiction, il nous expliquera que, de toute manière, les immeubles qui sont aujourd'hui sur ces deux parcelles seront certainement rasés parce qu'ils ne valent rien du tout. Mais malgré toutes ces explications, qui restent compliquées, le prix de 14 millions est maintenu.

Ce prix est prohibitif, comme je l'ai dit, pour la zone industrielle. Il est prohibitif si l'on regarde, par exemple, les dix dernières acquisitions de la FTI. Du 26 mars 2010 au 17 décembre 2010, il y a eu une dizaine d'achats de la part de la FTI en zone industrielle qui, au mètre carré, s'échelonnent entre 80 F et - pour une parcelle, la dernière achetée - 250 F le mètre carré. Donc on est en train de faire une véritable spéculation immobilière. On est en train de créer un précédent extrêmement dangereux en acceptant d'acheter à un prix pareil en zone industrielle. Cela nous pose d'infinis problèmes et posera d'infinis problèmes à l'avenir pour tout achat en zone industrielle, puisque l'on aura créé ce précédent, on aura mis 750 F pour acheter un terrain. On peut également se poser la question suivante: qu'en sera-t-il à l'avenir pour les communes qui, quand elles devront acheter du terrain, se verront proposer des prix qui ont été acceptés par ce parlement ?

Enfin, dernière remarque, je n'arrive pas à comprendre M. Muller, chef du département, qui est tout de même responsable de l'argent des citoyens, lorsqu'il s'agit d'accepter une pareille opération sans autres explications que celles qu'il a données en commission. Malgré le vote signalé par mon collègue Hohl, quand on nous a présenté le coût de ce projet, je crois bien que tous les partis ont sursauté, et même ceux qui auraient eu le moins de mouvements perceptibles en entendant ce prix se sont posé beaucoup de questions.

Pour l'UDC...

Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le député.

M. Eric Bertinat. Merci, Monsieur le président. Pour l'UDC, il n'y a pas beaucoup de solutions. La plus simple nous semblerait de renvoyer ce projet de loi à M. Muller et qu'il retraite la question du prix qu'il a fixé préalablement. On pourrait éventuellement le renvoyer en commission pour rediscuter de l'ensemble, parce que c'est vrai que certaines données ne nous ont pas été fournies. Enfin, on pourrait aussi accepter l'amendement que nous soumettront les Verts. Pour l'instant, j'en reste là, et je laisse bien évidemment la parole à mes camarades députés pour écouter ce qu'ils auront à dire sur ce sujet.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG a été scandalisé plus d'une fois avec ce dossier. J'aimerais tout d'abord, avant d'émettre quelques critiques au nom du Mouvement Citoyens Genevois, féliciter - cela n'arrive pas souvent, c'est pourquoi nous le soulignons - un magistrat du gouvernement, qui a eu le courage de faire fermer ce club qui ne répondait pas aux normes légales de sécurité, j'ai cité M. Pierre-François Unger. Je salue son courage, parce que c'était évidemment explosif au niveau médiatique; or il a eu ce courage de faire juste respecter la loi.

Maintenant que les éloges sont faits, nous allons parler de ce qui ne fonctionne pas. (Remarque. Rires.) J'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs, et chers concitoyens qui nous regardez... (Commentaires.) ...que si le magistrat des constructions mettait autant de rapidité et d'efficience à construire des logements qu'à racheter des boîtes de nuit, nous serions tous logés à des prix décents ! Mais évidemment, quand il s'agit de racheter une discothèque, finalement, on va beaucoup plus vite que lorsqu'il faut construire des logements.

Alors non, le MCG ne soutiendra pas ce projet de loi, tant il est scandaleux par sa forme et par son fond. On vient d'entendre le rapporteur de majorité nous dire qu'il y a un rendement de 5% et des poussières, que c'est bien et qu'en plus l'état locatif va augmenter. Business, business ! Et on fait des loyers chers. C'est comme cela qu'on a fait des loyers, aujourd'hui, à 3000 F ou 4000 F par mois pour des quatre-pièces, parce qu'il y avait des taux de rendement exceptionnels. Maintenant, l'Etat participe à cette spéculation immobilière ! Bravo, Monsieur le rapporteur de majorité ! La population saura s'en souvenir.

Alors je vous dirai, Mesdames et Messieurs, que la population vous regarde. Si aujourd'hui vous votez ce projet de loi à 14 millions - on sait bien que, en arrière-fond, M. le conseiller d'Etat Mark Muller a fait marquer une opposition dans le procès-verbal du gouvernement, en marquant son opposition sur la fermeture du Moa, qui avait été décidée à la majorité du Conseil d'Etat, et c'était ressorti des débats dans notre parlement - si aujourd'hui vous votez ces 14 millions, voici le signal que vous allez donner à la population: magouilles, opacité, réseau des petits copains. Est-ce cela que vous voulez ? Eh bien alors votez ce projet de 14 millions. Finalement, aux prochaines élections, comme aux dernières, les deux seuls partis qui montent, ce sont le MCG et les Verts !

Or les Verts, aujourd'hui, marchent avec le MCG sur ce projet... (Exclamations. Applaudissements.) ...puisqu'ils s'opposent... (Exclamations.) ...puisqu'ils s'opposent au rachat à 14 millions et qu'ils veulent réduire par trois le prix, amendement que nous soutiendrons.

Et si, Mesdames et Messieurs, ce n'est qu'une question de discothèque pour des bouteilles gratuites, VIP, pour le conseiller d'Etat, laissez-moi, Monsieur le conseiller d'Etat, vous offrir cette bouteille. Vous êtes en zone VIP... (L'orateur quitte sa place et remet une bouteille à M. Mark Muller. Sa dernière phrase est inaudible. Exclamations. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Florian Gander, à qui il reste quarante-cinq secondes.

M. Florian Gander (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. J'en aurai peut-être pour moins longtemps. Depuis le début de la législature, nous entendons parler de motions populistes, de projets de lois populistes, populaires. On en sert à toutes les sauces. Eh bien permettez-moi de vous dire ce soir que ce projet de loi est purement et simplement électoraliste et populiste. Il date du mois d'octobre et de la fermeture du Moa. Il y a eu 5000 électeurs - s'ils étaient des électeurs - qui sont descendus dans la rue et qui ont rouspété contre la fermeture du Moa. On ne peut pas dissocier cet achat de terrain et la fermeture du Moa. Ces deux textes sont liés, et le MCG va s'y opposer...

Le président. Il vous reste dix secondes, Monsieur le député.

M. Florian Gander. En conclusion, le MCG s'opposera fortement à l'achat de ce terrain.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Je m'exprimerai peut-être plus calmement et posément. Les Verts soutiennent l'acquisition de ces parcelles en zone industrielle et artisanale. Nous sommes en effet convaincus que, pour mener une politique économique et industrielle efficace, il est bon que l'Etat acquière du terrain, afin de permettre aux entreprises, du secteur secondaire en particulier, de s'y installer. Il est à souligner en plus, comme l'a fait M. Hohl, que ces parcelles sont extrêmement bien placées puisqu'elles sont desservies par le train. Cette acquisition permettra aussi de déplacer plus tard des entreprises situées dans la zone du PAV. Pour toutes ces raisons, il est donc extrêmement intéressant que l'Etat acquière ce terrain.

Néanmoins, à ce stade, les Verts ont deux bémols à présenter. Le premier est que, si l'Etat acquiert ce terrain, il faudra veiller à ce que cette zone industrielle soit justement densifiée. Car, à Genève, les zones industrielles sont malheureusement souvent sous-exploitées du point de vue de l'aménagement. Il faut construire plus, plus haut. Il n'est plus acceptable d'avoir des terrains d'un seul étage ou de grands parkings en zone industrielle.

Le second bémol - il est de taille - concerne le prix d'achat de ces parcelles, comme l'a souligné le rapporteur de minorité. Malgré les explications du Conseil d'Etat, les Verts ne sont toujours pas prêts à accepter cet achat au prix annoncé. Nous estimons que ce prix est trop élevé, en particulier pour un bâtiment qui est à rénover voire à détruire. Les Verts vont donc proposer un amendement, qui vous sera détaillé plus tard par ma collègue. Si notre amendement est refusé, nous ne pourrons donc pas voter ce projet de loi et l'achat de ces parcelles. (Applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Ce sujet est difficile pour le groupe PDC, parce qu'il y a un point important: l'avenir et le développement de Genève, ainsi que la relocalisation des entreprises du PAV. On discute en commission depuis des semaines pour savoir où l'on va mettre les entreprises du PAV, et on a très peu de solutions. Là, on a une parcelle qui est idéalement située, à côté du rail, qui peut être raccordée au rail... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et c'est l'une des bonnes solutions que l'on a afin de pouvoir établir de nouvelles entreprises.

Il est vrai que le prix est élevé, mais le rendement est intéressant, donc l'Etat ne va pas perdre de l'argent. Il faut par conséquent regarder l'avenir et se dire qu'il faut parfois oser acheter des terrains pour développer Genève. Je vous rappellerai que la parcelle Holcim, qui a été achetée par l'Etat, a coûté aussi cher à l'Etat, et personne n'en a fait un problème, alors que l'on va discuter de la relocalisation de l'entreprise Jaeger & Bosshard.

Il est donc important pour le groupe PDC de voir l'avenir, d'accepter l'achat du terrain, non pas pour le Moa, mais pour la relocalisation des entreprises du PAV. Voilà pourquoi nous voterons ce projet.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont évidemment accueilli ce projet de loi avec satisfaction, puisqu'ils avaient soutenu la résolution 639, qui a été traitée dans ce parlement en octobre dernier et qui demandait justement de trouver une solution pour garantir la pérennité d'un lieu pour les jeunes qui s'appelle le Moa. Je crois que, pour les socialistes, c'était vraiment le point de départ de cette discussion et de cette proposition que nous traitons aujourd'hui: actuellement, à Genève, les jeunes manquent de lieux pour faire la fête, pour sortir, et notamment de lieux bon marché. La diversité des lieux est indispensable. On l'a bien vu avec la fermeture du Moa, cela met la pression sur les autres lieux, qui subsistent tant bien que mal avec la politique du conseiller d'Etat Mark Muller et du procureur Zappelli, où tous les lieux vaguement alternatifs, vaguement intéressants, ferment les uns après les autres. (Brouhaha.) Résultat des courses, il n'y a plus aucun lieu qui existe pour la jeunesse, à part les boîtes de nuit hors de prix. Je pense que nous ne devons pas l'oublier. Aujourd'hui, à Genève, les jeunes sont en manque de lieux à prix abordables; et il ne faut pas avoir de jugement de valeur sur le contenu des activités de ces lieux, parce que chaque génération a la façon de s'amuser qui lui est propre.

Donc pour cette raison, la solution proposée par ce projet de loi, qui consiste à racheter ce périmètre pour en faire une zone industrielle, est particulièrement opportune, comme l'a rappelé ma collègue Verte tout à l'heure. C'est vrai que Genève a besoin de zones industrielles, notamment pour permettre le développement du PAV. Dans ce sens, c'est particulièrement opportun.

Maintenant, c'est vrai qu'il y a peut-être une question concernant le prix. Le rapporteur de minorité l'a évoquée. Est-ce justifié de payer 14 millions pour une parcelle de 20 000 m2 qui contient un certain nombre d'entreprises ? En tout cas, il est certain que dire que c'est 750 F ou 500 F le mètre carré est une faute de calcul majeure. Je suis désolé. Nous achetons le terrain 250 F le mètre carré dans ce projet de loi. Alors j'espère que le Conseil d'Etat pourra aussi nous expliquer pourquoi il l'achète à ce prix et pourquoi c'est conforme à ses pratiques actuelles.

De plus, nous achetons l'immeuble, pour 9 millions. Ce prix est-il justifié, oui ou non ? M. Bertinat a évoqué le fait, comme rapporteur de minorité, que c'était un prix trop élevé, parce que les bâtiments seraient dans un état déplorable et ne vaudraient plus rien. Peut-on ignorer le fait que l'état locatif actuel est de l'ordre de 900 000 F ?! Donc le rendement d'une telle parcelle, d'un tel immeuble, est quand même non négligeable. Le propriétaire actuel, qui a payé ces parcelles moins de 2 millions, a un rendement de l'ordre de 40% aujourd'hui. Donc s'il y a bien une crapule dans cette affaire, ce n'est pas le Moa, c'est sûr, mais bien le propriétaire actuel. Ce dernier, d'ailleurs, a mis la pression depuis le début pour maximiser ses gains et met la pression sur notre Grand Conseil pour que nous achetions à un prix qui lui permettra d'encore augmenter ses bénéfices. C'est bien cela, le problème principal; c'est le propriétaire. Ce ne sont pas les exploitants du Moa. C'est le propriétaire qui se comporte comme une crapule, qui n'a pas le sens de l'intérêt général. (Remarque.) Et cela, nous ne pouvons pas l'accepter. (Commentaires.)

Maintenant, c'est vrai que le résultat des courses... (Commentaires.) Oui, il ne faudrait pas l'enrichir. J'entends divers échos sur ce propriétaire. Mais alors, si vous êtes tout à coup offusqués par cette situation, je vous rappelle que, il n'y a pas très longtemps, vous avez accepté le déclassement des Cherpines-Charrotons, achetés 10 F le mètre carré en zone agricole, revendus 450 F le mètre carré pour de la zone de développement 3... (Commentaires.) Multipliés par 45 ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Cela ne vous a pas gênés; donc je ne vois pas pourquoi, aujourd'hui, cela vous poserait un problème.

On paie effectivement trop cher, mais ce n'est pas un problème, en fait, dans la mesure où il y a un état locatif de près d'un million par année. Franchement, entre un... (Commentaires.) Eh bien moi, je ne suis pas pour les propriétaires ! (Remarque.) Je ne suis pas pour les propriétaires, je suis pour les exploitants. En réalité, les exploitants, aujourd'hui...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Roger Deneys. ...devraient demander des baisses de loyer massives. (Commentaires. Le président agite la cloche.) Donc les socialistes sont en faveur de ce projet de loi et inviteraient évidemment le Conseil d'Etat à trouver une solution moins chère, si c'était possible, mais c'est la seule chose que nous pouvons demander. Le but n'est pas de faire les Ponce Pilate et de couler ce projet. Donc nous vous invitons, à ce stade, à soutenir ce projet de loi.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, M. Bertinat, qui est opposé - en l'état, mais il peut encore changer d'avis, car je connais sa capacité de réflexion quand il entend des arguments pertinents... (Remarque.) - a dit tout à l'heure que le fond du problème était le prix. Je crois qu'il se trompe. Le prix, dans l'absolu, n'a pas d'importance. (Exclamations. Applaudissements. Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Ce qui est important, c'est ce que vient de dire M. Deneys... (Exclamations.) Il vient de faire preuve d'un pragmatisme... (Brouhaha.) ...dont je lui suis reconnaissant, parce qu'il a souligné l'importance de l'état locatif pour cet achat, pour l'Etat et donc pour les contribuables. Je le dis aux contribuables qui nous écoutent, et pas seulement à ceux qui sont dans la salle, une rentabilité de 7,5%, allez la trouver aujourd'hui, allez la trouver ! Regardez où vous la trouvez ! Il s'agit là d'une rentabilité assurée grâce à des fonds étatiques qui sont mis en faveur du développement économique du canton, notamment dans le domaine des parcelles à vocation industrielle, des parcelles qui nous manquent.

Il est vrai - elle l'a rappelé avec le talent dont elle est coutumière - notre collègue Forster Carbonnier a regretté la densification insuffisante. Je la rejoins sur ce point. On peut regretter que la hauteur des bâtiments ne soit au maximum que de 10 mètres. On pourrait imaginer que, dans cette zone, comme dans d'autres zones industrielles, la hauteur maximale soit de 15 ou 20 mètres, et j'en serais très heureux. A l'exception... (Remarque.) J'ai dit 20 mètres, je n'ai pas dit 200 mètres; nous ne sommes pas encore dans le PAV. Je ne pense pas que 15 ou 20 mètres empêcheraient les avions, petits ou gros porteurs, d'atterrir dans notre aéroport, que les Verts soutiennent et dont ils soutiennent le développement, je le sais, au fond de leur coeur. (Rires.)

Cela étant, concernant le prix, il s'agit de le décomposer. C'est là que je ne vous suis pas. Vous avez dit que le prix était exagéré. Il a été justement rappelé que le prix du terrain est de 250 F au mètre carré. C'est tout à fait usuel dans les zones économiques de payer ce type de prix. Le seul prix sur lequel on peut se disputer est celui auquel se monte le bâtiment. Mais la question est de savoir, d'abord, si le propriétaire accepte de vendre à un autre prix. La réponse est non. (Remarque.) M. Deneys - j'aurai une différence de langage avec lui - l'appelle à deux reprises «crapule»; je crois que c'est le nom du chien d'un militant libéral, mais ce n'est pas le nom dont il convient d'affubler le propriétaire d'un terrain qui, finalement, permet de faire à la collectivité une affaire. En effet, à 7,5% de rentabilité, c'est une affaire qui nous est proposée.

J'aimerais terminer, Monsieur le président, par l'opposition qui a été faite par un représentant du MCG. Si le représentant du MCG en question avait à espérer un quelconque avantage personnel - comme hier à la commission des finances d'un représentant d'une fondation culturelle qui est venue nous trouver - alors il se mettrait en quatre devant cette affaire du Moa. Mais non ! Mais non ! Il a été vexé parce qu'il a été expulsé du Moa. Alors ayant été expulsé du Moa, il considère maintenant que l'affaire du Moa doit être refusée, et il la poursuivra de sa vindicte, comme il poursuit de sa vindicte moult affaires qui sont personnelles.

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. Alors je conclurai en disant que nous devons nous dégager des affects et de ce qui est personnel pour penser à l'intérêt général. Et j'adjure M. Bertinat de penser à l'intérêt général et non pas à Malthus, en acceptant l'achat de ce terrain.

Mme Christina Meissner (UDC). «Le prix, dans l'absolu, n'a pas d'importance.» Ce n'est pas le conseiller d'Etat Mark Muller qui a dit cela, mais mon préopinant, libéral également, Pierre Weiss. J'aimerais bien que le prix, dans l'absolu, n'ait pas d'importance, si nos finances étaient effectivement si magnanimes que cela ! Allez dire cela aussi aux propriétaires de villas. Mais aujourd'hui, quand l'Etat exerce son droit de préemption, on ne leur dit pas: «Le prix, dans l'absolu, n'a pas d'importance.» On le limite, ce prix ! Et en zone industrielle... (Brouhaha.) ...et en zone industrielle, on fait l'inverse !

Une voix. Bravo !

Mme Christina Meissner. On fait l'inverse ! (Applaudissements. Exclamations. Le président agite la cloche.) Alors ceux qui se trouvent aujourd'hui dans les zones industrielles vont se frotter les mains, parce que, comme mon collègue UDC Bertinat l'a dit, oui, cela va effectivement créer un précédent. Et tous ceux qui se trouvent en zone industrielle aujourd'hui vont pouvoir vendre, faire une bonne affaire, comme vous dites. Je pense notamment aux Cherpines, où l'Etat n'a pas encore acquis les terrains et qui vont se trouver en zone industrielle. Certains maraîchers doivent se réjouir... (Remarque.) Mais quid de ceux qui souhaitent être en zone industrielle et qui n'y sont pas encore ? Je pense notamment à nos PME. Comment vont-elles ensuite faire quand le prix sera à 750 F le mètre carré ? Elles ne pourront pas régater avec d'autres industries. De plus, ces zones ne sont pas des zones industrielles, artisanales et commerciales, mais seulement industrielles et artisanales.

Les Verts l'ont dit précédemment, il faut d'abord rationaliser, densifier, mettre de l'ordre dans les zones industrielles existantes et créer des règles claires par rapport à leur utilisation, notamment pour que, demain, nos PME aient encore de la place dans ces zones industrielles, ce qui n'est pas garanti quand on fait juste des choses pour arranger un propriétaire ou l'autre, au gré des occasions ou des nécessités.

Alors je suis désolée, mais là, en ce qui concerne ce projet de loi, cela me paraît être franchement de l'arbitraire. J'aimerais bien que l'on fasse d'abord le ménage dans les zones industrielles, dans la manière dont on les gère, avant de voter n'importe quel prix pour n'importe quelle zone à n'importe quel endroit. Quand il s'agit de Vernier, évidemment, les Verniolans font attention. Il y a anguille sous roche sans doute. A mon avis, on n'a pas tort de se méfier. Ce sera non à ce projet et à ce prix, qui doit être révisé à la baisse pour être convenable et normal pour tous.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Mark Muller, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, l'acquisition de ces terrains par l'Etat de Genève s'inscrit avant tout dans le cadre d'une politique économique, une politique économique menée d'habitude par la Fondation pour les terrains industriels, dont M. Unger est le président, qui, très couramment - je dirais presque chaque mois - se traduit par l'acquisition de terrains en zone industrielle et artisanale. M. Bertinat l'a rappelé tout à l'heure en évoquant un certain nombre de statistiques, en admettant d'ailleurs que le prix auquel nous vous proposons aujourd'hui d'acheter ces terrains est un prix que la FTI pratique dans d'autres cas.

Alors pourquoi venons-nous devant le Grand Conseil ? En effet, vous n'avez pas souvent eu à vous prononcer sur l'acquisition de terrains en zone industrielle et artisanale, puisque c'est la FTI qui le fait pour l'Etat. Eh bien vous êtes appelés à vous prononcer parce que le Conseil d'Etat a considéré que, suite à l'adoption par votre Grand Conseil d'une résolution nous demandant de faire tout ce qui était en notre pouvoir pour «sauver» - entre guillemets - le Moa, il était légitime que nous vous soumettions notre solution.

Alors oui, cette solution permet de répondre à votre résolution et de résoudre la problématique du Moa, de répondre à un certain nombre de besoins qui existent à Genève dans le domaine des loisirs pour les jeunes et des loisirs nocturnes. Mais c'est avant tout une acquisition qui s'inscrit dans cette politique économique que nous menons pour développer le secteur secondaire et permettre à un certain nombre d'entreprises de s'installer à Genève, de créer des emplois, et à des entreprises existantes à Genève de se développer.

Il y a un contexte supplémentaire dont vous devez avoir conscience, Mesdames et Messieurs les députés: le projet Praille-Acacias-Vernets. En effet, ce projet - soutenu unanimement, ou presque, en commission - dépendra de la possibilité de délocaliser un certain nombre d'entreprises industrielles et artisanales qui se trouvent aujourd'hui dans le périmètre du PAV. Pour le faire, il est important que l'Etat maîtrise un certain nombre de terrains en zone industrielle et artisanale. Or ce terrain-là est tout particulièrement intéressant pour deux raisons.

Première raison: il est largement non bâti. Environ la moitié du périmètre que nous vous proposons d'acheter est encore constructible et pourra accueillir des entreprises qui, aujourd'hui, se trouvent dans le PAV.

Deuxième élément, Mesdames et Messieurs les députés: c'est un terrain qui est relié au rail. Cela a été rappelé tout à l'heure par le rapporteur de majorité. Et c'est quelque chose de précieux, à Genève. Nous avons un réseau ferré relativement limité, avec notamment un accès au rail dans le PAV. Mais comme le PAV, à terme, n'est plus destiné aux entreprises industrielles, nous devons trouver d'autres endroits qui offrent cette facilité. Or nous avons là cette opportunité, cette chance. Nous vous proposons de la saisir.

Qu'en est-il du prix ? Le débat sur le prix est parfaitement légitime. Je rappelle que le prix est de 250 F le mètre carré, et non pas de 750 F le mètre carré, vous l'aurez compris, puisque les 750 F incluent des bâtiments pour environ 9 millions. (Remarque.) Donc nous parlons bien de 250 F le mètre carré. C'est un prix qui est pratiqué en zone industrielle et artisanale. Ce n'est pas un prix abusif. Ce n'est pas un prix particulièrement modéré, je crois qu'il faut le reconnaître, mais c'est un prix qui se justifie par l'ensemble des éléments que je vous ai indiqués, une politique étatique qui se développe sur le très long terme. Ces terrains, l'Etat les achète pour les garder pendant des dizaines d'années, voire de manière infinie. C'est donc un investissement rentable aujourd'hui, avec une rentabilité à très court terme de l'ordre de 7% et une rentabilité sur le long terme qui est bien plus importante. Donc c'est un prix qui se justifie déjà pour cette raison.

Un deuxième élément aussi joue un rôle lorsque l'on examine le prix: la question de la densité. La densité ou l'augmentation de la densité en zone industrielle et artisanale est un objectif du Conseil d'Etat, et ces terrains se situent dans la zone industrielle des Batailles. Or nous révisons actuellement le plan directeur de la zone industrielle des Batailles, avec l'inscription, dans ce plan, d'une volonté de densification forte. Donc, si nous achetons ces terrains, si l'Etat devient propriétaire de ces terrains, c'est l'Etat qui bénéficiera directement de ce potentiel d'augmentation de la densité autorisée sur ces terrains. C'est donc une raison supplémentaire qui me permet de vous dire très sereinement que le prix qui vous est proposé ici, qui est le fruit d'une transaction, est un prix parfaitement correct, très intéressant sur le long terme pour l'Etat de Genève.

Dernier élément, puisque c'est une question qui a été posée dans le cadre des travaux de la commission, qui m'a encore été posée ultérieurement et qui est une question parfaitement légitime: qui va s'occuper de ces terrains, qui va les gérer ? Eh bien c'est la FTI. C'est la FTI qui, de manière très ordinaire, gère non seulement les terrains dont elle est propriétaire - et j'en remercie mon collègue Unger - mais également les terrains en zone industrielle et artisanale dont l'Etat est propriétaire, ce qui sera le cas pour ces terrains. Donc nous ne sommes pas dans une configuration particulièrement originale.

Qu'en est-il du Moa ? Parce que nous n'allons quand même pas oublier le Moa dans cette affaire. Le mécanisme qui est prévu s'agissant de la gestion du Moa est le suivant. L'Etat - comme c'est le cas déjà aujourd'hui, vous devez le savoir - sera locataire des locaux du Moa, qui occupe 500 m2 sur les 20 000, et sous-louera ces locaux à l'exploitant du Moa, de manière que, entre la FTI, qui n'a pas pour vocation de gérer des discothèques - on est bien d'accord - et l'exploitant de la discothèque, il y ait cet intermédiaire qui s'occupera de gérer d'éventuels problèmes qui pourraient se poser avec l'exploitation du Moa.

Reste enfin la question du loyer payé par le Moa, Mesdames et Messieurs, puisque l'on parle d'argent, et c'est parfaitement normal. Aujourd'hui, le loyer payé par le Moa est de 100 000 F par année. Si l'Etat achète ce terrain ce soir, il est d'ores et déjà convenu que le loyer triplera, passera à 300 000 F par année, et rejoindra un niveau normal pour la location de ce type de locaux.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur l'entrée en matière du projet de loi 10765.

Mis aux voix, le projet de loi 10765 est adopté en premier débat par 49 oui contre 24 non et 4 abstentions.

Deuxième débat

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement Vert qui concerne non seulement le titre, mais aussi les articles 1 et 2. J'imagine que vous avez cet amendement sur vos tables. Il s'agit de modifier le titre de la manière suivante: «Projet de loi ouvrant un crédit d'investissement de 5 200 000 F pour l'acquisition des parcelles no 958 et 4296 de la commune de Vernier». Et voici les modifications qui en découlent à l'article 1 et à l'article 2, alinéa 2. Article 1: «Un crédit d'investissement de 5 200 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition des parcelles no 958 et 4296 de la commune de Vernier.» Article 2, alinéa 2: «Il se décompose de la manière suivante:

- Construction (rubrique 05.04.08.00 5040): 1 730 000 F

- Equipement (rubrique 05.04.08.00 5000): 3 470 000 F

Total: 5 200 000 F»

Mesdames et Messieurs, au sujet de cet amendement, la parole est à Mme la députée Emilie Flamand.

Mme Emilie Flamand (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ma collègue Sophie Forster Carbonnier a donné tout à l'heure la position des Verts. Oui, nous sommes favorables à ce que l'Etat reprenne la main dans les zones industrielles. Aujourd'hui, nous sommes un peu surpris que cet argument soit tellement développé, parce que je rappelle que, quand le Conseil d'Etat est venu lors de nos travaux sur le budget, il a déposé cet amendement pour le Moa dans la rubrique concernant la culture et le divertissement. Puis on a posé la question: «Mais alors, c'est pour sauver le Moa ?» Réponse: «Non non, c'est la politique de zone industrielle du canton. En fait, on s'est trompé de rubrique.» C'est le genre d'erreur qui arrive assez rarement. On avait trouvé cela un peu étrange, mais enfin, soit, donnons l'excuse de la bonne foi.

M. le conseiller d'Etat, tout à l'heure, maniait fort bien l'euphémisme en disant que le prix était peu modéré. Pour nous, ce prix est totalement exagéré. Nous avons regardé le prix de ventes récentes de terrains comparables à Vernier, avec des bâtiments. En effet, l'argument est de nous dire que les 250 F au mètre carré sont seulement pour le terrain, et qu'il faut ensuite ajouter les bâtiments. Eh bien pas du tout. Nous avons regardé le prix de ventes récentes, comme je le disais. Or le prix est bien de 250 F à 260 F par mètre carré, y compris des bâtiments.

Nous avons donc fait une règle de trois. Je vous explique comment nous avons calculé la somme qui se trouve dans notre amendement: en multipliant 19 639 mètres carrés par 260 F, on obtenait 5 106 140 F. On a décidé de laisser un peu de marge de manoeuvre au Conseil d'Etat pour négocier... (Rires. Remarque.) ...et nous avons déposé cet amendement à 5 200 000 F, que je vous remercie d'accepter, pour que nos concitoyens voient que nous ne jetons pas l'argent par les fenêtres et que nous avons une politique concertée et raisonnable. (Applaudissements.)

Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je serai très bref. Voici simplement quelques chiffres éloquents. Le propriétaire actuel, en 1998, achète ce terrain 1 800 000 F. Depuis cette date, si l'on fait le calcul, la plus-value est de 678%. Alors si cela n'est pas favoriser la spéculation immobilière, on n'y comprend rien, ou alors c'est éventuellement servir certains petits copains.

Une voix. Bravo !

M. Mauro Poggia (MCG). Rendement: on nous dit que l'Etat ferait finalement une bonne affaire, puisqu'il ferait un rendement de 5,5%... (Remarque.) ...7,5%, même; merveilleux ! Donc je me pose la question. Si en achetant à 14 millions, on fait 7,5% de rendement, quel est le rendement que fait le propriétaire actuel en ayant acheté à 1,8 million ? Entre 35% et 40% de rendement ! Alors vous allez peut-être me dire que le Moa va augmenter son loyer dès le moment où le terrain sera acheté par l'Etat de Genève. Mais pourquoi le Moa ne propose-t-il pas cette augmentation de loyer déjà maintenant, à l'actuel propriétaire ? J'aimerais bien que l'on nous explique ce mystère.

Voici une autre question. Au niveau de la concurrence, n'a-t-on pas le sentiment, voire la conviction, qu'en intervenant dans ce dossier, en acquérant à ce prix un terrain, en le mettant à disposition d'une discothèque comme le Moa, on est en train de distordre les règles de la concurrence ? C'est-à-dire que l'Etat de Genève entre dans le marché de la discothèque. Vous avez dit, Monsieur Muller, que ce n'est pas la vocation de la FTI de gérer des discothèques. Je veux bien le croire. Mais si vous nous dites que la discothèque est finalement louée à l'Etat de Genève qui la sous-loue au Moa, vous en déduisez que c'est la vocation de l'Etat de Genève de louer des discothèques, ce qui me paraît quand même poser quelques petits problèmes de principe. L'Etat de Genève entre ici dans des règles de concurrence, ce qui me semble inadmissible également.

J'aimerais répondre à M. le député Weiss, qui nous dit - et il a raison - que finalement personne n'oblige le propriétaire à vendre moins cher. Alors soit on l'achète 14 millions, soit personne ne l'achète. Il faut croire que cela ne vaut pas beaucoup d'argent, puisque l'on ne se presse pas au portillon. (Rires.) Mais enfin, si personne ne l'achète, eh bien il se le garde, son terrain ! (Rires.) Puis il négocie un nouveau bail avec le Moa, qui va proposer un loyer tellement faramineux, qui sera égal à celui qu'il proposerait à l'Etat de Genève, que le propriétaire va encore faire exploser son rendement. Donc finalement, pourquoi veut-on priver ce propriétaire de faire un bénéfice pareil sur ce terrain ?!

Alors le MCG va évidemment soutenir l'amendement qui vous est proposé; 5,2 millions, c'est beaucoup, c'est déjà beaucoup pour distordre la concurrence dans ce domaine. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Roger Deneys (S). Je ne vous cacherai pas qu'une partie des socialistes sont sensibles aux arguments concernant le prix d'achat de ces parcelles, parce que, bien entendu, encourager des promoteurs et des propriétaires qui se font... des «couilles en or» - allez, on va le dire comme cela... (Rires.) - nous pose problème. Il est vrai que ce qui vient aussi un peu perturber le problème dans ce dossier est évidemment que des personnalités ont été impliquées dès l'origine du dossier, comme MM. Chevrolet et Jornot. Cela vient gêner les réflexions des socialistes, parce que l'on ne peut pas s'empêcher, à Genève, de se dire: «Tiens, n'y a-t-il pas de la magouille, n'y a-t-il pas de petits arrangements entre amis dans un petit cercle fermé ? Cela fait monter les prix.» Evidemment, on ne peut qu'avoir ce genre de réflexions si l'on réfléchit en termes de prix.

Maintenant, on peut penser en termes de prix et revenir à la question quand même essentielle, il me semble, de la valeur de ce terrain. En ce qui me concerne, je pense que le raisonnement de M. Poggia est à l'envers du bon sens. En fait, aujourd'hui, le propriétaire fait 40% de rendement. Il a payé moins de 2 millions son terrain et il gagne 900 000 F de loyer par année. C'est la situation actuelle qui est anormale. (Commentaires.) Aujourd'hui, les locataires devraient demander des baisses de loyer massives, parce que ce n'est pas normal qu'un propriétaire ait 40% de rendement, ce qui est quatre fois du Madoff, je vous le rappelle. Ce n'est pas normal d'avoir un rendement pareil ! C'est tout à fait scandaleux pour les petites entreprises, pour les indépendants qui exercent sur ces terrains. Nous ne pouvons pas accepter cela.

Alors 14 millions versus l'amendement des Verts, qui propose 5 millions, est-ce raisonnable ? En fait, le problème est que cela revient, en réalité, à couler le projet actuel. Donc si le but est de pérenniser l'existence d'une zone industrielle supplémentaire, le but n'est pas atteint. Certes, on pourrait envisager une baisse de prix. J'avais fait un calcul différent. Typiquement, au sujet des Cherpines, vous vous êtes moins offusqués du prix de 150 F le mètre carré. Ici, on est à 250 F. La différence, sur 20 000 m2, fait 2 millions. Cela fait 2 millions de différence. On pourrait dire qu'il y a 2 millions de plus par rapport à un achat de zone agricole transformée en zone industrielle. Mais ici, on est de zone industrielle à zone industrielle. Donc on pourrait dire ici que, oui, on paie trop cher, que le prix est exagéré. Ce propriétaire a évidemment tout pour tenir le couteau par le manche.

Certes, on pourrait inviter le Conseil d'Etat à essayer de négocier à la baisse ce prix. Cela n'a d'ailleurs pas été exprimé à la commission des finances, ce qui est regrettable, parce que l'on aurait peut-être pu aller plus vite. Mais fondamentalement, en ce qui me concerne, je pense qu'empêcher l'existence de cette zone industrielle, ne pas garantir l'existence de ce lieu, c'est un très mauvais service que nous rendons à la jeunesse genevoise, aux jeunes en général, à Genève en général, et aux exploitants qui se trouvent en zone industrielle aujourd'hui.

Donc s'il doit y avoir un retour en commission, cela doit se faire dans des délais très rapides et avec des explications complémentaires, peut-être. Mais dans des délais extrêmement rapides, afin de pouvoir revoter rapidement sur ce projet de loi, avec un autre montant éventuellement.

Le président. Merci, Monsieur le député. MM. les rapporteurs Bertinat et Hohl ont demandé la parole. Je la leur donnerai à la fin du débat. C'est M. le député Jacques Béné qui a la parole.

M. Jacques Béné (L). Merci, Monsieur le président. Cet amendement est une grande farce; on rigole bien ! Un tel amendement n'a absolument aucun intérêt. Soit on est pour l'acquisition, soit on est contre. Soit on estime qu'il y a un intérêt public à l'acquisition de ces 2 hectares... Ce n'est quand même pas une surface qui se trouve sous le pied du conseiller d'Etat tous les jours; 2 hectares, c'est important. Donc soit il y a un intérêt général à acquérir ce terrain, soit il n'y a pas d'intérêt général. L'amendement des Verts est un amendement dilatoire. Vous ne voulez simplement pas admettre que vous êtes contre l'acquisition de ces terrains, un point c'est tout.

J'en viens maintenant au prix. Je crois qu'il y a des propriétaires aussi chez les Verts. J'aimerais bien vous voir le jour où, éventuellement, vous voulez vendre votre terrain avec votre maison... (Exclamations.) ...et que l'on vous dit... (Commentaires.) J'ai des noms, j'ai des noms ! (Commentaires.) Ceux qui disent non en ce moment, je veux bien croire qu'ils n'en ont pas. Mais il y en a d'autres qui sont propriétaires. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Si l'on vous dit que votre bâtiment ne vaut rien et que l'on va seulement acquérir votre terrain à un prix dérisoire, j'aimerais bien voir la tête que vous ferez.

Mais au-delà de cela, Mesdames et Messieurs les Verts - cela vaut aussi pour M. Poggia - le jour où le Conseil d'Etat ou vous-mêmes allez nous proposer, pour mettre en vigueur l'Initiative des villes, des pistes cyclables qui coûtent en gros 1000 F le mètre...

Une voix. Hors sujet !

M. Jacques Béné. En gros, c'est 1 million le kilomètre de piste cyclable. (Commentaires.) Donc cela fait 1000 F le mètre. On va venir vous dire: «Eh bien écoutez, non, nous ne sommes pas d'accord avec 1000 F; nous proposons 400 F.» Que direz-vous ? Vous direz: «Il n'y a pas d'entreprise qui accepte de travailler à ce prix-là.» Nous vous répondrons alors: «Eh bien tant pis ! On ne fait pas les travaux !» De même que, là, on n'achète pas ! C'est valable aussi pour M. Poggia. Si l'un d'entre vous ici peut vendre son véhicule à un prix supérieur à l'argus de 20%, va-t-il s'en priver ? Non !

On est dans un marché. (Brouhaha.) Il faut un acquéreur et un vendeur. Le vendeur n'est absolument pas obligé de vendre à ce prix-là. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, l'une des alternatives est d'estimer que l'Etat a effectivement intérêt à acheter ce terrain-là, pour faire des rotations avec le PAV, le PAV dans lequel on veut tous voir des logements être construits. Mais, à un moment donné, il va falloir se donner les moyens. Ce soir, on peut se donner les moyens de faire avancer aussi la cause du PAV.

Pour terminer, je pense que, effectivement, cela a beaucoup été médiatisé, parce que c'est le Moa et que certaines personnalités avaient l'habitude de s'y rendre ou continuent à s'y rendre. Si l'on était dans un autre cas de figure, on ne se poserait pas la question. Mesdames et Messieurs, il y a une expertise qui a été effectuée. Comme l'a dit le conseiller d'Etat, ce n'est peut-être pas un prix génial. Mais, dans une transaction, il y a un vendeur et un acheteur...

Le président. Vous avez épuisé votre temps de parole, Monsieur le député.

M. Jacques Béné. Il faut arriver à se mettre d'accord. Si, aujourd'hui, le prix est de 14 millions... (Remarque.) ...il est totalement ridicule de proposer 5 millions.

Mme Christina Meissner (UDC). Monsieur le président, vous direz à mon préopinant que l'on n'oblige pas ce propriétaire à vendre, en l'occurrence. On ne l'oblige pas à vendre. On ne l'exproprie pas. On lui propose un prix surfait. Mais c'est le rêve pour n'importe quel propriétaire !

Alors allez déjà expliquer cela aux contribuables, que l'Etat, à l'évidence, a vraiment de l'argent à ficher par les fenêtres. Allez expliquer cela aux propriétaires à qui on n'offre pas des prix surfaits. Une fois de plus, je me permets de le répéter, parce que je trouve inadmissible de traiter des gens d'une manière arbitraire; cela fait penser un peu à la politique des petits copains.

A part cela, j'aimerais simplement souligner une fois de plus que M. le conseiller d'Etat a justifié ce prix ainsi - ce sont ses mots: le prix est justifié parce que l'Etat achète pour des années. Je vais lui ressortir cela, et plus d'une fois, soyez-en sûrs. (Rires.)

L'amendement des Verts, bien entendu, a le soutien de l'UDC. (Applaudissements.)

Présidence de M. Renaud Gautier, président

Le président. Mesdames et Messieurs les députés qui êtes encore inscrits, à l'exception des deux rapporteurs, vous avez les uns et les autres épuisé votre temps de parole... (Remarque.) Sauf M. Mettan, qui vient de se réveiller et qui dispose encore de trois minutes. Monsieur Mettan, vous avez la parole.

M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. J'écoutais avec attention, c'est pourquoi je n'ai pas voulu répéter ni dire des sottises, comme cela a été le cas tout à l'heure. J'aimerais indiquer à Mme Meissner que le prix du terrain correspond tout à fait aux prix en vigueur à Genève. (Commentaires. Le président agite la cloche.) Le prix proposé correspond tout à fait à la valeur des prix pour un tel terrain. Il suffit de se renseigner plutôt que de dire des sottises.

J'aimerais simplement dire à celles et ceux qui proposent cet amendement et qui sont opposés à l'achat de ce terrain que, s'il n'y avait pas le Moa sur ce dernier, vous auriez accepté ce projet de loi sans discussion. Cela veut dire... (Protestations.) Cela veut dire... (Protestations. Le président agite la cloche.) Cela veut simplement dire qu'il s'agit d'un règlement de comptes qui n'a rien à voir avec l'intérêt général. Je vous en prie, Mesdames et Messieurs, pensez à l'intérêt général et non pas à des aspects particuliers dans cette affaire.

M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de minorité. Chers collègues, je note ce soir que les socialistes entrent dans l'ère du capitalisme... (Remarque.) ...où le prix de l'immobilier n'a pas d'importance. Or l'idée selon laquelle ce prix n'a pas d'importance est évidemment défendue par M. Weiss et ses troupes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à moins que ce ne soit l'inverse. Finalement, on retiendra que les libéraux trouvent très bien d'attribuer de nouveaux rôles pour l'Etat tels que celui de s'occuper d'une discothèque. Voilà où est l'intérêt général de ce soir: il faut sauver le Moa ! M. Muller a été très clair - il l'a reconnu - et nous a dit que le prix à mettre pour le sauver était de 14 millions.

J'aimerais bien savoir comment s'est déroulée cette transaction pour fixer ce prix. Quel était le prix de départ pour que, d'octobre 1998 à juin 2011, il passe de 1,8 million, bâtiments y compris, à 14 millions... On parle de bâtiments parce que l'on est très gentils; tout le monde sait que ce sont des hangars et, encore une fois, M. Muller l'a reconnu lui-même, ils seront destinés à la destruction. Comment le prix de 1,8 million a-t-il pu se multiplier par 7 ? Que s'est-il passé entre-temps ? Je ne sais toujours pas. J'attends des justifications un peu plus sérieuses de la part du chef du DCTI pour nous expliquer pourquoi l'Etat doit dépenser une telle somme et pourquoi l'argent des citoyens doit servir à sauver le Moa, à engraisser le propriétaire du terrain, qui fait une plus-value extraordinaire, et à fausser le marché du terrain immobilier. En effet, 750 F le mètre carré, je maintiens que c'est bel et bien le prix que l'on va mettre pour cette zone agricole. (Commentaires.) Donc je suis vraiment très opposé à ce projet.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Bavarel, vous êtes presque aussi lent que le préopinant. Pour autant que le rapporteur de majorité soit d'accord, je veux bien vous passer la parole. Est-ce que vous autorisez M. Bavarel à parler, Monsieur Hohl ? (Remarque.) Vous êtes d'une grande élégance. Monsieur Bavarel, qui arrivez tels les renforts de Sézegnin, vous avez donc la parole !

M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Je tenais simplement à dire que les Verts ne s'opposent pas à l'achat du terrain; nous pensons que cet achat de terrain est d'utilité publique. Ce qui ne nous va pas, c'est le prix. Ce qui ne nous va pas c'est que, avec l'argent du contribuable, avec les impôts, on paie une spéculation d'un individu et que l'on sorte un club privé, une entreprise privée, d'une situation difficile. Voilà ce qui ne va pas. Si c'était une opération entre privés, elle ne nous poserait pas de problème. Il n'y a pas d'expropriation de ce terrain. Il y a une offre qui est faite de gré à gré, et nous disons que le prix qui nous est proposé aujourd'hui ne nous convient pas.

Nous avons dit que nous trouvons intelligent d'acheter ce terrain-là; nous pensons qu'il est d'utilité publique. Nous avons dit qu'il est bien situé; nous pensons simplement que le prix n'est pas le bon. Aujourd'hui, la zone industrielle, normalement, est à 200 F le mètre carré. On vous fait un amendement dans lequel on vous propose 260 F, parce qu'un bâtiment y est construit. Nous avons examiné les prix de ce qui se vendait à Vernier. On ne les a pas inventés, ceux-là. Nous avons regardé quels étaient les prix du marché. On est exactement sur ces prix-là.

Alors, bien évidemment, une fois que vous avez eu une manifestation, que du monde est sorti, etc., on profite de la situation pour faire monter le prix. Soit ! Puis on se dit que de toute façon c'est bon, que l'Etat peut payer. J'ai entendu des discussions dans cette salle pour 20 000 balles ou pour 200 000 F. Ce n'est pas de cela que l'on est en train de vous parler ! Là, quelqu'un - dans un système libéral, c'est son droit le plus strict - fait une culbute: six fois le prix d'achat en plus sur le terrain qu'il détient. Très bien ! Mais que ce soit le contribuable qui paie cette culbute, c'est un peu compliqué pour nous. C'était tout ce que je voulais dire.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Frédéric Hohl (R), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je tiens d'abord à remercier Emilie Flamand pour son excellent amendement. Effectivement, elle a absolument raison: 5,2 millions est le prix qu'il faudrait payer pour le terrain. Elle a juste oublié qu'il y a 52 commerces, 250 places de parc, que la moitié de ce terrain peut accueillir immédiatement d'autres entreprises et qu'il y a l'accès au rail. Donc voilà déjà, pour commencer, l'explication à Mme Flamand sur son amendement, qui ne tient absolument pas la route.

Ensuite, le MCG est un parti, je le sais, qui aime faire la fête. Vous l'avez prouvé avec votre démonstration de bouteille de vin, qui a d'ailleurs, je crois, choqué pas mal de téléspectateurs. C'était peu fin. Vous avez parlé, Monsieur Stauffer, du Moa. Le Moa représente 2,5% de l'ensemble du terrain et des parcelles dont on parle. N'oubliez pas de mentionner le reste: les 52 commerces, les 250 places de parc. (Remarque de M. Eric Stauffer.)

Alors l'UDC, le MCG et les Verts, vous nous faites un cours sur le prix d'acquisition des terrains. Mais donnez-nous les fameuses adresses où l'on peut trouver 20 000 m2 proches du rail, demain, où l'on peut accueillir sur la moitié des parcelles des nouvelles entreprises, pour 5 millions ! Mais donnez-nous ces adresses, Mesdames et Messieurs !

Donc je crois qu'il faut arrêter. Il faut arrêter de plaisanter. Mesdames et Messieurs, il est important de faire comme la majorité de la commission vous l'a proposé, d'accepter ce projet de loi et d'autoriser l'Etat à acquérir ces parcelles.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le conseiller d'Etat, je dois ce soir - qui est la soirée de toutes les spécialités - vous demander d'attendre quelques instants, car les socialistes entendent tout à coup nous proposer quelque chose. Je cède donc la parole à Mme Lydia Schneider Hausser. (Exclamations.)

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout le monde ne siège pas à la commission des finances. C'est vrai que nous avons eu un rapport. Mes collègues de la commission des finances nous ont dit que des informations n'ont quand même pas pu être fournies en commission. On voit maintenant un amendement des Verts qui met en évidence une différence, que certains connaissaient peut-être, que nous apprenons ce soir, qui est en partie dans le rapport... On voit que ce dossier - je ne sais pas comment il a été traité ni combien de séances il a valu à la commission - n'est pas abouti.

Mesdames et Messieurs les députés, je crois que la diligence existe, qu'elle peut exister à la commission des finances. C'est pourquoi les socialistes vous demandent instamment un renvoi en commission... (Exclamations. Commentaires.) ...afin de pouvoir étudier et mettre au clair ce projet de loi, pour que l'on puisse en discuter clairement.

Le président. Madame la députée, vous voulez le renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur, j'imagine ?! (Rires.)

Mme Lydia Schneider Hausser. J'ai parlé de la commission des finances, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission. Peuvent s'exprimer les rapporteurs et M. le conseiller d'Etat, s'ils le souhaitent. La parole est à M. le conseiller d'Etat Mark Muller. (Exclamations.)

M. Mark Muller, président du Conseil d'Etat. Ce que je souhaiterais, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que l'on vote ce projet de loi ce soir. Cela étant, voici quelques mots sur le prix, puisque c'était le débat, pour corriger un certain nombre de choses.

Tout d'abord, j'aimerais rappeler à M. le rapporteur de minorité que nous ne parlons pas d'une zone agricole, mais bien d'une zone industrielle et artisanale. Le lapsus que vous avez commis explique probablement les quelques errances qui ont marqué votre intervention sur le prix, qui se justifie pour ce terrain.

Voici d'autres éléments importants s'agissant de l'évaluation de ce prix. Je ne vais pas répéter ce qui a très bien été dit par le rapporteur de majorité ou par M. Béné qui, en sa qualité de professionnel, a pu vous indiquer ce qu'il en était de ce prix. (Commentaires.)

D'abord, j'aimerais parler de la différence que vous faites entre le prix d'acquisition de ce terrain par l'actuel propriétaire et le prix auquel nous souhaitons le racheter. Pendant la durée de propriété de ces terrains, le propriétaire a investi. Il a investi entre 3 et 4 millions de francs dans les installations, dans les constructions, ce qui vient évidemment réduire sensiblement le bénéfice qu'il va réaliser.

Voici un autre élément à prendre en compte. Comme vous le savez - et comme dans beaucoup de dossiers, d'ailleurs - l'Etat de Genève a plusieurs casquettes. Ici, nous en avons au moins deux: d'abord la casquette d'acheteur, de futur acquéreur, je le souhaite, mais également la casquette de percepteur d'impôts. Or le propriétaire de ce terrain, qui est une société immobilière, va devoir payer des impôts sur le bénéfice qu'il va réaliser dans le cadre de cette opération. (Remarque.) Comme vous le savez, le bénéfice sera quand même relativement conséquent. La recette fiscale qui a été estimée pour cette acquisition se monte à environ 3 millions. Donc ce sont également des éléments que vous devez prendre en compte lorsque vous jugez, lorsque vous vous faites une opinion sur le prix de vente qui vous est ici proposé.

Maintenant, une chose est sûre: l'amendement des Verts, comme cela a été dit, s'il était accepté, reviendrait purement et simplement à ce que nous ne puissions pas acheter ce terrain, ne serait-ce que pour la valeur des bâtiments. La valeur des bâtiments a été expertisée à 9 millions. Ici, vous en proposez 1 730 000 F, si je lis correctement votre amendement, ce qui n'est évidemment pas sérieux et ne nous permettrait pas d'aller de l'avant avec ce projet.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur le renvoi de cet objet à la commission des finances. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10765 à la commission des finances est adopté par 41 oui contre 33 non et 8 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)