Séance du vendredi 15 avril 2011 à 20h30
57e législature - 2e année - 7e session - 43e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Renaud Gautier, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Pierre-François Unger, Charles Beer, David Hiler, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Mark Muller, président du Conseil d'Etat, et François Longchamp, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. David Amsler, Antoine Bertschy, Alain Charbonnier, Pierre Conne, Antoine Droin, Vincent Maitre et Christine Serdaly Morgan, députés.

Annonces et dépôts

Le président. Monsieur Jornot, vous avez la parole.

M. Olivier Jornot (L). Monsieur le président, le groupe libéral vous annonce le retrait, au point 49 de l'ordre du jour, du projet de loi 7552. (Exclamations.)

Le président. Qu'il en soit remercié ! Monsieur le député Jeannerat, vous avez la parole.

M. Jacques Jeannerat (R). Merci, Monsieur le président. Au point 49 également, le groupe radical vous annonce le retrait de la proposition de motion 786. (Commentaires.)

Le président. Qu'il en soit également remercié.

Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle le traitement du point 44, la proposition de motion 1942.

M 1942
Proposition de motion de Mmes et MM. Eric Stauffer, Roger Golay, Mauro Poggia, Thierry Cerutti, Claude Jeanneret, Jean-François Girardet, Pascal Spuhler, Sandro Pistis, Henry Rappaz, Dominique Rolle, André Python, Jean-Marie Voumard, Florian Gander, Marie-Thérèse Engelberts : Frontaliers: la bombe fiscale qui va exploser et ravager les finances du canton de Genève. Renégocions l'accord de 1973 !

Débat

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, comme vous le savez, il y a un accord qui régit l'imposition des travailleurs frontaliers sur le canton de Genève. Cet accord date de 1973 et prévoit que 3,5% du salaire brut est reversé à la France chaque année. Résultat des courses, il faut savoir que, quand cet accord a été négocié - je vous dis cela de mémoire - ça concernait environ une dizaine de millions de francs. Pourquoi ? Parce que, avant d'engager un frontalier, eh bien l'employeur devait justifier de trois recherches sur le marché local, passer par une commission tripartite et ensuite justifier d'un besoin particulier d'une main-d'oeuvre qu'il ne trouverait pas sur le canton de Genève. Evidemment, depuis l'entrée en vigueur des accords de libre circulation le 1er janvier 2002, eh bien toutes ces restrictions sont tombées, et nous avons effectivement connu une explosion du nombre de frontaliers et bien sûr de la masse salariale. Aujourd'hui - toujours de mémoire - cela représente, à la louche, quelque chose comme 200 millions par année.

Alors, ce n'est pas tellement sur le montant qui est payé par année aux départements de l'Ain et de la Haute-Savoie, puisque c'est surtout ces deux départements qui sont concernés... En effet, un accord a été signé, et donc pour l'instant il est en vigueur et on doit le respecter; et Genève a pour habitude de respecter les accords qu'elle signe. En revanche, du côté français, le respect n'a peut-être pas la même signification que pour nous autres, Genevois. L'utilisation qui est faite de cette manne providentielle - c'est-à-dire à peu près 200 millions de francs par année - a été quelque peu, au fil des années, détournée de ce qui avait été signé dans l'accord. J'en veux pour preuve que l'accord - et je vous dis toujours cela de mémoire - prévoyait que cet argent devait servir à la construction d'infrastructures sur le territoire français. Alors c'est vrai que, aujourd'hui, les 52 communes qui bordent le canton de Genève et la frontière suisse se sont toutes dotées - enfin, la majorité - d'une piscine municipale, d'une bibliothèque municipale au moyen de cette manne qui tombait du ciel. (Commentaires.) Et puis, au fur et à mesure que les années sont passées, eh bien cela a été détourné par les conseils régionaux, et les communes ne voient finalement plus beaucoup d'argent de cette manne.

J'ajouterai l'élément suivant concernant le manque de respect des autorités françaises par rapport à la convention signée. Une fois par année - et ce n'est pas M. le conseiller d'Etat qui va me contredire - les autorités françaises, représentées par les préfets respectifs, doivent justifier de l'utilisation de ces fonds auprès du Conseil d'Etat genevois. Or figurez-vous que, lorsque le MCG a commencé à mettre le doigt dessus, il y a déjà quelques années - et M. le conseiller d'Etat l'avait admis, c'est dans le Mémorial du Grand Conseil - ça faisait des années que les Français ne donnaient plus la justification de l'utilisation de ces fonds. Ça a été quelque peu rétabli, mais nous aimerions aujourd'hui renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Elle n'a pas d'effet contraignant vis-à-vis de ce dernier, mais elle va peut-être l'aider à faire quelque peu pression sur la France au motif que, par exemple, les parcs et relais - les P+R, comme on les appelle communément à Genève - en France, il n'y en a pas ou très peu. Alors on nous dit qu'il y en a qui sont prévus, mais enfin, vous savez, les promesses rendent joyeux les fous ou fous les joyeux, c'est selon ! (Commentaires.)

Nous aimerions par là mettre l'accent de manière très particulière sur l'utilisation de ces fonds, encore une fois, pour que le Conseil d'Etat puisse affirmer la position des Genevois et dire qu'une région - comme on l'a indiqué ces deux derniers jours - se construit ensemble et pas de manière unilatérale, et que ces fonds doivent réellement servir les collectivités locales auxquelles ils sont destinés et ne pas être détournés par des conseils régionaux; Rhône-Alpes par exemple, qui se prend la grosse part du gâteau et ne réalise pas les infrastructures locales.

On pourrait imaginer qu'ils ont utilisé cela pour construire l'autoroute A 41 qui relie Annecy à Bardonnex. Mais, évidemment, ça va à l'encontre de ce que les Genevois ont voulu. En effet, nous autres, Genevois, nous avons voulu privilégier le transport collectif en faisant et en votant un CEVA, alors que les Français ont investi pas loin d'un demi-milliard d'euros pour construire cette autoroute qui est la plus chère de France aujourd'hui.

Alors il faut aujourd'hui que le gouvernement...

Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président. Il faut que le gouvernement s'affirme, avec une volonté du parlement claire et déterminée, afin que les Français utilisent de manière efficace et constructive pour la région ces fonds que Genève leur donne. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

Mme Loly Bolay (S). M. Stauffer n'a pas fait mention de la problématique de ce frontalier suisse qui a fait recours au Tribunal fédéral en demandant que ses frais de transport lui soient déduits. Vous n'en avez pas parlé, c'est pour cela que moi, j'en parle ! Votre motion dit que, selon une fiduciaire, la perte se situerait entre 100 et 200 millions si tous les frontaliers - je rappelle qu'il y en a environ 90 000 - demandaient à chaque fois une déduction de leurs frais de transport.

J'aimerais juste dire que, selon les chiffres que j'ai - et M. le président du département pourra les confirmer ou non - à l'heure actuelle, la somme de 100-200 millions n'apparaît absolument pas puisque, dans les chiffres de 2010 ou de 2009, par exemple, environ 5400 frontaliers ont effectivement demandé à revoir leur imposition suite à cette décision du Tribunal fédéral; 5400 frontaliers dont environ la moitié - 2900 - ont décidé de retirer leur demande. Pourquoi ? Parce qu'un frontalier ne peut pas dire: «Ecoutez, je suis frontalier, et suite à cette décision du Tribunal fédéral, j'aimerais déduire mes frais de transport.» Il ne peut pas le faire, parce qu'il faut d'abord qu'il prouve que ses revenus proviennent à 90% de Suisse. A partir du moment où il veut être traité comme un Suisse, c'est-à-dire avoir droit à ces déductions des frais de transport, il faut aussi qu'il déclare tout le reste. Or, pour beaucoup de frontaliers, ça ne les intéresse pas de déclarer tout le reste, parce qu'ils ne seraient pas gagnants, ils seraient plutôt perdants.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste ne peut pas accepter cette motion. En effet, s'agissant de certaines invites, notamment concernant les P+R - on en a souvent parlé ici - il n'y a pas de différence qui est faite entre les frontaliers et les Suisses. Les frontaliers ne paient pas moins pour un parking, un P+R, qu'un Suisse. C'est totalement faux, nous l'avions déjà prouvé.

En plus de cela, les chiffres pour cette année sont les mêmes que l'année dernière: il y a 5700 frontaliers qui ont demandé à déduire leurs frais de transport mais, comme l'année dernière, il y en a 3000 qui ont décidé de se retirer parce qu'ils seraient plutôt perdants que gagnants.

J'imagine, Monsieur le conseiller d'Etat, que vous pouvez peut-être confirmer ou non ce chiffre et nous dire si la perte pour les rentrées fiscales - comme l'indique la motion - serait de 100 à 200 millions. Peut-être pouvez-vous nous dire si, évidemment, c'est loin d'être la vérité et que les chiffres sont vraiment bien inférieurs à ces montants-là.

C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, le groupe socialiste refusera cette motion.

M. Charles Selleger (R). La position du parti radical concernant cette motion ne sera pas de la soutenir, en l'état en tout cas. Effectivement, déjà, la première invite, qui fixe les montants de 3,5% et de 2,5%, est loin d'être claire pour nous. Elle mériterait une analyse soigneuse en commission.

Et puis cette motion contient également des invites tout à fait stigmatisantes, anti-frontaliers, auxquelles notre parti ne souscrit pas.

En l'état, cette motion ne sera donc pas votée par notre groupe. Par contre, nous ne nous opposerons pas à une éventuelle demande de renvoi, si elle est formulée, à la commission fiscale.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion est une liste à la Prévert rassemblant un nombre considérable d'invites hétéroclites. Elle aborde des aspects fiscaux, de mobilité et d'emploi.

Pour ce qui est des aspects fiscaux, notre parlement s'est déjà prononcé hier sur la rétrocession accordée aux entreprises au titre de l'impôt à la source. Nous estimons qu'il n'est donc pas nécessaire d'y revenir.

Ensuite, renégocier l'accord de 1973 est selon nous une mauvaise idée pour le moment. En effet, le projet d'agglomération qui nous a été présenté aujourd'hui prévoit justement que nos voisins français participent financièrement, notamment en ce qui concerne la construction du CEVA. (Brouhaha.) Il serait donc complètement contre-productif, à l'heure actuelle, de diminuer la rétrocession qui est faite à la France sur la masse salariale des travailleurs frontaliers.

Pour ce qui est de l'emploi, les Verts pensent en effet que l'économie genevoise devrait faire un effort plus important dans l'engagement de chômeurs de longue durée. Mais nous ne pouvons accepter la politique de stigmatisation du MCG envers une partie des travailleurs qui participent à la prospérité de notre canton.

Enfin, l'idée d'augmenter massivement le prix des abonnements P+R est totalement farfelue, puisque ce serait autant de voitures qui entreraient au centre-ville, l'encombrant encore davantage.

Pour toutes ces raisons, les Verts refuseront de voter cette motion.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est certain que le groupe UDC, sur bien des aspects, souvent, rejoint ou du moins apprécie les propositions du MCG, qui peuvent revêtir, par certains côtés, un intérêt.

En ce qui concerne cette motion - je vous le dis d'emblée - nous ne l'aurions pas rédigée de cette façon, en ce sens que, comme l'a dit ma préopinante, on fait appel à plein d'objets. Peut-être qu'ils mériteraient d'autres interventions mais, en tout cas, ils ne doivent pas être amalgamés dans le même objet.

Ainsi, après réflexion, le groupe UDC vous a proposé un amendement. Il est clair que nous ne pourrons pas modifier la nature d'un texte qui est proposé, mais nous aurions préféré une résolution. Il nous semble en tout cas intéressant de demander à Berne d'examiner la première invite visant à renégocier l'accord, en ce sens qu'elle dit simplement: «Est-ce qu'on ne doit pas calculer ces 3,5% sur la masse salariale nette au lieu de la masse brute ?» Ceci nous semble une piste intéressante, vu ce qui se passe. C'est pour cette raison que le groupe UDC vous propose cet amendement visant à ne garder que la première invite de cette motion et à écarter toutes les autres.

Avec cela, le groupe UDC votera cette motion; autrement, il s'abstiendra.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Mauro Poggia, à qui il reste une minute.

M. Mauro Poggia (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. J'ai entendu certains intervenants, du côté de la gauche, qui ont considéré que cette motion était anti-frontaliers. C'est vrai qu'on aime bien - lorsque le MCG propose quelque chose - stigmatiser, toujours taper sur le même clou, quitte à ne pas lire les textes qu'on a sous les yeux, parce que ça fait bien de dire que le MCG est anti-frontaliers. Alors, prenez vos plus belles lunettes, chers collègues, et regardez les invites. Vous verrez que ces invites n'ont rien d'anti-frontaliers. On demande simplement au Conseil fédéral de renégocier les accords de 1973, par lesquels - je rappelle - nous versons 200 millions par année aux communes limitrophes de la Suisse; 200 millions qui seraient censés permettre auxdites communes de créer des infrastructures destinées notamment à favoriser la diminution du trafic pendulaire. Vous le savez, il n'y a pas de park and ride qui se constitue en France. Vous le savez aussi, la France est incapable de réunir les malheureux 100 millions d'euros qu'il faut pour faire arriver ce CEVA depuis la frontière suisse jusqu'à la gare d'Annemasse - gare d'Annemasse dans laquelle on ne prévoit absolument rien pour attirer les travailleurs frontaliers et les inciter à prendre les transports publics.

Ces 200 millions ne servent donc qu'à embellir les communes françaises avoisinantes. Tant mieux, sans doute, mais cette somme ne devrait pas servir à garnir les bacs à fleurs pour faire réélire les maires desdites communes. Elle devrait servir précisément à favoriser ces travailleurs frontaliers qui apportent de la richesse non seulement à Genève - et le MCG le reconnaît - mais également dans lesdites communes.

Je ne parle même pas des 90 millions par année, dans la péréquation fiscale au niveau de la Confédération, que Genève doit verser compte tenu des masses salariales qui sont réalisées par les frontaliers à Genève. C'est une somme particulièrement importante qui est à charge de Genève, et ce que demande...

Le président. Il vous faut songer à conclure, Monsieur le député !

M. Mauro Poggia. Je termine tout de suite, Monsieur le président. Ce que demande simplement cette motion, c'est que l'on remette l'ouvrage sur le métier. Dans ce sens, nous demanderons le renvoi de cette motion à la commission fiscale. Je vous remercie.

M. Guy Mettan (PDC). En l'état, le parti démocrate-chrétien refusera cette motion, d'abord parce que - ça a déjà été dit - elle ressemble à un curieux bric-à-brac et mélange à la fois des considérations internationales, de mobilité, de parking, fiscales, etc. Il n'y a pas de cohérence dans cette motion.

Cela dit, c'est vrai qu'il faut reconnaître qu'il y a quand même des invites intéressantes, notamment l'invite numéro 2 qui consiste à encourager l'engagement de personnel résidant sur le canton. C'est vrai que la pression des frontaliers a créé et crée un certain malaise à Genève, parce que la population genevoise a l'impression qu'on engage trop de frontaliers. Nous avons eu l'occasion, à la sous-commission des finances, d'auditionner M. Longchamp mercredi ou mardi dernier et, effectivement, nous avons abordé ce problème. M. Longchamp nous a dit qu'il écrivait à chaque entreprise et à chaque service public, lorsqu'il y a un engagement, pour les encourager à d'abord faire appel aux chômeurs genevois avant d'engager un frontalier. Je pense que c'est une mesure qui doit être soutenue et peut-être encore plus généralisée.

Voilà pour un point, mais ça n'est pas l'objet de cette motion. On nous promet, dans les considérants, d'aborder le problème du Tribunal administratif concernant les déductions des frais de transport. Or ce n'est pas du tout abordé dans les invites. Et qu'est-ce qu'on nous propose ? D'ouvrir la boîte de Pandore en révisant le traité de 1973.

Là, je crois qu'il y a une profonde incompréhension de ce qui se passe au niveau de la région, parce que, si vous allez voir les communes françaises... Nous avons l'impression que celles-ci - d'après ce que j'ai entendu - construisent des bacs à fleurs, des piscines, etc. C'est entièrement faux. Pourquoi ? Parce que les communes frontalières qui accueillent, justement, beaucoup de constructions et de frontaliers sur leur territoire, eh bien elles ont l'impression d'avoir tous les coûts pour elles et pas de recettes. En effet, qu'est-ce qui coûte cher quand on doit loger des gens ? Et les communes genevoises le savent bien, qui, elles, hésitent de leur côté à accueillir des logements parce qu'elles savent que cela engendre des frais... Ce sont des frais d'écoles, des frais de routes, des frais de voirie, ce sont toutes sortes de frais de cette nature qu'elles doivent prendre en charge pour accueillir ces nouveaux habitants. Et ces frais ne sont pas du tout couverts par les 3,5% que nous leur accordons.

Donc, si nous renégocions ces accords, ce n'est pas 3,5% qu'elles nous demanderont, mais 15%, 20% ou 30%. Et je pense que, pour le moment, nous avons autre chose à faire que cela; sans compter - et ça a été aussi dit - que cet argent, 200 millions, est peut-être une somme qui paraît importante, mais elle est faible par rapport à la masse de salaires que cela représente. Elle est quand même réinvestie dans la région parce que, même si c'est la région qui prend sa part, c'est la région qui finance aussi une partie du CEVA, c'est la région qui financera - si c'est accepté - toute la rénovation des voies de chemin de fer qui est prévue en France voisine...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Guy Mettan. Donc la région apporte aussi cette contribution au développement de notre propre agglomération.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter cette motion.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous donner quelques informations qui vous permettront sans doute de vous faire une idée plus précise. D'abord, l'arrêt du Tribunal fédéral n'a effectivement pas été suivi - contrairement à ce que nous redoutions, à vrai dire - d'un nombre très important de demandes de révision. Cette année encore, les demandes de révision sont moins importantes que nous pouvions le croire. Pour quelles raisons ? En premier lieu parce que les choses, comme l'ont dit Mme Bolay et d'autres, sont relativement compliquées.

D'abord, pour pouvoir faire ces déductions, il faut avoir le statut de quasi-résident. Un quasi-résident doit avoir 90% de ses revenus qui viennent d'une activité dans le canton de Genève. Il suffit donc qu'il y ait deux salaires - l'un sur France, l'un sur Suisse - il suffit qu'il y ait une valeur locative en France et qu'elle soit relativement importante pour que le contribuable ne puisse pas prétendre au statut de quasi-résident.

Par ailleurs, comme c'est l'ensemble des revenus - à ce moment-là - qui sont pris en compte dans l'assiette suisse, qui seront taxés, eh bien, pour un certain nombre de cas, l'opération n'est pas du tout favorable au contribuable. En fait, il a avantage à profiter du barème. Un certain nombre de gens se sont adressés au Groupement transfrontalier européen et, effectivement, dans bien des cas, il n'était pas avantageux pour les contribuables d'avoir un statut de quasi-résident.

En plus, comme vous le savez, notre déclaration n'est pas d'une simplicité enfantine et est par ailleurs assez différente de celle des Français. Elle n'est nullement remplie d'avance, contrairement à une partie de la déclaration française, de sorte que finalement, cette année encore, on peut s'imaginer que les pertes fiscales ne seront pas extrêmement importantes. Il est par contre possible qu'avec le temps elles s'élèvent. En effet, on dira que c'est plus un problème culturel et de rapport qualité-prix entre le fait de payer une fiduciaire - parce que, vous le savez, il y a une fiduciaire qui s'appelle «Quasi-Résident» à Genève - et l'économie que réalisent les gens, qui est somme toute relativement modeste. De plus, nous avons une fiscalité qui est très avantageuse pour les personnes les plus modestes; la fiscalité la plus avantageuse de Suisse, en tout cas, pour les personnes les plus modestes. Ces éléments-là sont donc de nature à freiner le mouvement.

En revanche - et nous en parlerons plus tard - l'impôt à la source en tant que tel est remis en cause, vraisemblablement, à long terme. Et il devra vraisemblablement être remplacé par un simple impôt de garantie. Ça, c'est pour dans dix ans, et la décision interviendra au niveau fédéral. Je n'ai pas senti l'administration fédérale et mes collègues directeurs des finances vouloir une autre solution.

Pour le moment, il n'y a donc pas péril en la demeure. En revanche, il y a danger, grave danger, à essayer de renégocier l'accord. Cela pour deux raisons. D'abord parce que les Français pourraient nous dire: «Ecoutez, puisque vous voulez renégocier l'accord, prenez celui que tous les autres cantons suisses ont avec la France. Nous prenons l'impôt, nous vous laissons un pourcentage de la masse salariale.» Avec la France, c'est cela. Alors il est vrai que, avec la RPT et cet accord, l'écart entre les deux est en train de se réduire, mais - tout de même - il reste de 200 millions.

Maintenant, j'aimerais quand même rappeler deux ou trois choses. Effectivement, ce sont les conseils généraux des départements - ce n'est pas la région Rhône-Alpes - qui prennent les 40% du tout. Mais la situation actuelle en France n'est pas très confortable pour les collectivités publiques. Sauf si vous avez fait une grève de la lecture des journaux depuis un ou deux ans, vous n'êtes pas sans savoir que la situation financière de l'Etat français est désastreuse - désastreuse ! Et comme le système français est un système de cascade - où l'argent remonte à Bercy et redescend - évidemment, les flux sont en train de se tarir. Et les collectivités locales sont aujourd'hui en difficulté. Or notre avantage est plutôt que des transports en commun puissent être développés dans la région, quel que soit le financeur - parce qu'en France il y a plusieurs financeurs. Notre avantage est que nous puissions assurer un bon fonctionnement de l'agglomération et non subir une tension permanente.

D'autre part, j'aimerais rappeler que nous sommes dans notre tort par rapport à nos amis français. Nous avons promis 2500 logements par année, nous ne les avons pas construits. Nos voisins se plaignent, à raison, du fait que nous n'avons pas... (Remarque.) Ah, nous n'avons pas respecté nos engagements.

Je finirai, Mesdames et Messieurs, sur la stigmatisation, pour dire deux choses. Monsieur Poggia, on ne peut pas se plaindre d'être accusé de stigmatisation quand on a une affiche où il est écrit: «Plus jamais ça !», et qu'en dessous il est inscrit: «Frontaliers». Disons, si ce n'est pas stigmatiser, je ne sais pas ce que stigmatiser veut dire ! Non, Monsieur Poggia, vous n'êtes certainement pas une oie blanche, ni même un jars blanc, en ce domaine ! (Rires.) Donc, là... Franchement !

En revanche - dans la lancée de ce que j'ai pu dire hier soir, et de ce qu'a pu indiquer M. Longchamp à la commission - vous n'êtes pas les seuls à stigmatiser. Et notre république irait sans doute mieux si on ne stigmatisait pas, dans une partie des entreprises publiques et privées - une partie - les personnes âgées de plus de cinquante ans et les jeunes sans expérience professionnelle. Très certainement, le ressentiment à l'égard des frontaliers serait moins grand si nous étions capables d'une plus grande solidarité. (Commentaires.) Seul contre tous s'il le faut, le Conseil d'Etat continuera à dire que ce n'est pas en opposant les gens les uns contre les autres qu'on construira cette région, mais que ce n'est pas non plus sans responsabilité sociale des entreprises publiques et privées que nous parviendrons à sortir de cette sorte d'enfer où chacun harcèle l'autre et qui n'est pas la société pour laquelle nous nous sommes engagés, en tout cas pour la plupart des partis qui siègent dans ce Grand Conseil. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Il y a une demande de renvoi à la commission fiscale, sur laquelle nous allons maintenant voter. (Commentaires. Le président agite la cloche.)

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1942 à la commission fiscale est rejeté par 42 non contre 36 oui.

Le président. Nous sommes saisis, Mesdames et Messieurs, d'un amendement déposé par le groupe UDC, que vous devez sauf erreur avoir reçu. La parole n'est pas demandée, je vais donc vous faire voter cet amendement qui consiste à conserver la première invite et à supprimer toutes les autres.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 45 non contre 21 oui et 13 abstentions.

Le président. Nous nous prononçons maintenant sur la proposition de motion elle-même.

Mise aux voix, la proposition de motion 1942 est rejetée par 59 non contre 14 oui et 7 abstentions.

M 1945
Proposition de motion de Mme et MM. Eric Bertinat, Céline Amaudruz, Antoine Bertschy, Stéphane Florey, Fabiano Forte, Patrick Lussi, Christo Ivanov, Marc Falquet pour mettre fin au harcèlement du département des finances contre les contribuables qui sollicitent un délai par le biais de leur fiduciaire

Débat

M. Eric Bertinat (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, il était une fois des fiduciaires auxquelles leurs clients demandaient de solliciter auprès du département des finances un délai. En effet, arrivés à fin mars, nous tous devons donner notre déclaration d'impôt. Jusqu'à l'année passée, il suffisait aux fiduciaires d'une simple liste Excel envoyée par e-mail pour obtenir un délai supplémentaire. Mais, depuis l'année passée, les choses se sont terriblement compliquées - vous en trouverez l'explication détaillée en page 3 de notre motion - avec pour conséquence qu'après avoir reçu par la poste un troisième mot de passe - alors qu'avant un simple e-mail suffisait - les fiduciaires pouvaient enfin accéder à l'administration en ligne. Ce qui veut dire que, d'une année à l'autre, alors que l'informatique, que les progrès technologiques auraient dû aller vers encore un peu plus de simplification... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...l'administration fiscale a pris exactement le chemin inverse et a compliqué, par dix, cette simple procédure administrative.

C'est la raison pour laquelle, le 31 mars 2010 - il y a un peu plus d'une année - le groupe UDC a déposé cette motion comprenant trois invites. (Brouhaha.)

Evidemment, l'ordre du jour aidant, nous nous penchons seulement aujourd'hui sur cette motion. Cela nous oblige à vous présenter des amendements sur les deux premières invites, que vous avez reçus sur vos tables. Ce sont des amendements que j'ai préparés avec l'aide de mon collègue M. Jeanneret et qui simplement réactualisent cette motion, parce que, sur le fond, la difficulté qui est causée aux entreprises demeure.

C'est la raison pour laquelle je vous prierai d'accueillir favorablement cette motion et de la renvoyer en commission fiscale.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous savez tous que, lorsque l'on étudie les comptes en commission des finances, on part en sous-commission dans les départements. Nous avons eu l'immense chance, avec ma collègue Anne-Marie von Arx-Vernon, d'aller voir le département des finances. Nous avons posé la question que vous vous posiez et nous avons eu des réponses. (Brouhaha.) C'est pas mal du tout ! Les réponses sont relativement simples, et ça va vous expliquer pourquoi les Verts ne voteront pas cette motion et ne la renverront pas non plus en commission - en même temps, si elle doit y aller, ce n'est pas plus grave que cela.

Les réponses qu'on nous a données sont assez simples: oui, il y a eu un problème informatique, oui, la procédure était trop compliquée, et les choses sont en train de se régler.

L'autre problème qui s'est posé et qui était très clair, c'est que les fiduciaires renvoyaient par feuille Excel la liste de tous leurs clients. Mais ces derniers avaient pu, pour certains, déjà faire leur déclaration d'impôt, pour d'autres, changer de fiduciaire et, pour d'autres encore, connaître d'autres types de situations. Et comme il n'y avait pas d'identification des personnes qui étaient bien clientes des fiduciaires, eh bien cela donnait un travail en surplus à l'administration. En effet, un certain nombre de contribuables se retrouvaient à double ou à triple, en étant déclarés à la fois en attente de déclaration et comme ayant eux-mêmes renvoyé leur déclaration à temps.

Vous imaginez donc bien qu'il a fallu un peu clarifier tout cela et que, effectivement, le problème existe, a existé et a été compliqué. Mais tous ces gens ont pris la peine de discuter entre eux, et les réponses sont déjà apportées. Monsieur Bertinat, nous vous fournissons cette réponse directement avec ma collègue Anne-Marie von Arx-Vernon. Dès que le rapport sera rédigé, vous aurez toutes les informations qu'il vous faut.

M. Claude Jeanneret (MCG). Chers collègues, voilà encore une demande qui paraît peut-être bizarre, mais il faut situer le problème là où il est. Il y a une question d'égalité de traitement entre tous les citoyens. Certains citoyens disposent de biens qui ne sont pas des biens exceptionnels - c'est un petit appartement, c'est un studio ou c'est une copropriété. Et dans le cas d'une copropriété, on n'a jamais les comptes avant la fin du premier semestre, ce qui fait qu'on ne peut pas faire la déclaration avant.

Il y a deux ans, l'administration fiscale a pris une initiative - extrêmement sympathique pour elle, mais pas pour le contribuable - c'est de taxer toutes les demandes de prolongation de délai. Or il faut vous dire une chose, c'est qu'on reçoit la déclaration fin janvier, si tout va bien, et qu'on doit la rendre pour le 31 mars.

Déjà, si on veut condamner les fiduciaires, qui ne sont quand même pas seulement des gens qui gagnent de l'argent sur les déclarations, mais qui constituent quand même - Monsieur Hiler, j'espère que vous l'approuvez - une aide vis-à-vis de l'administration fiscale... Parce qu'en général ce qui est fait dans une fiduciaire est effectué de manière professionnelle, et la déclaration est complète. Mais surtout - surtout - c'est la question de l'iniquité de traitement vis-à-vis de quelqu'un qui ne peut pas déclarer et qui est condamné à payer un droit de prolongation de délai. C'est totalement inadmissible. Evidemment, ça rapporte un petit peu d'argent, mais il n'est pas normal d'avoir des délais aussi courts et de taxer - en fait, d'une manière un peu arbitraire et inique - ces pauvres contribuables qui ont eu le malheur d'économiser pour acheter un petit appartement.

Le deuxième point que j'aimerais relever - et là, M. Bavarel me fait sourire, quand il raconte des choses invraisemblables - c'est que, lorsque l'on envoie une liste à l'administration, qui est de toute façon une liste tenue dans un certain ordre et qui peut être lue, disons, de manière informatique... Eh bien, lorsqu'une déclaration est rentrée, on vous renvoie la liste en disant: «Déclaration rentrée», etc. C'est fait automatiquement, ce n'est pas un travail. Ce n'est pas de la correspondance, et quand on me parle de travail à ce propos... Non, ce n'est pas du travail, c'est simplement un service normal d'une administration vis-à-vis d'un citoyen honnête !

En plus de cela, je dois dire qu'on ne peut pas imposer aux fiduciaires de travailler deux mois par année. Les six premiers mois de l'année représenteraient un délai normal, quitte à ce que, à ce moment-là, les délais demandés plus tard pour des raisons différentes soient peut-être, eux, taxés d'une manière un peu plus lourde. Mais donner deux mois pour remplir une déclaration et récupérer toutes les informations, ce n'est pas normal ! Là, je dois dire que l'administration commet un rapt sur le citoyen. Et je m'élève en faux quand on dit que c'est pour une rationalisation. Pas du tout !

Monsieur Bavarel, je vais vous dire une chose, c'est simplement l'histoire qui s'est passée. Il y a eu des demandes par des fiduciaires, effectivement; il y a eu deux ou trois citoyens, qui étaient peut-être un peu sportifs, qui ont dit: «On n'a jamais demandé de délai pour la déclaration, on ne veut pas payer les frais !»

Le président. Il vous reste dix secondes, Monsieur le député !

M. Claude Jeanneret. Et, dans le fond, ils avaient raison de ne pas vouloir payer les frais.

Alors, s'il vous plaît, vis-à-vis de l'équité, de l'équité de tous les citoyens par rapport à une administration, je vous demanderai, chers collègues, de bien vouloir accepter cette motion.

Une voix. Bravo !

M. Philippe Morel (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, renseignements pris auprès des fiduciaires, il apparaît que la demande de report d'une déclaration fiscale est acceptée assez facilement. Il semble même que les déclarations fiscales qui sont envoyées par les fiduciaires sont contrôlées de manière moins rigoureuse que les autres. Donc, du point de vue de la pratique et des fiduciaires, ça semble facile.

Par contre, il persiste un doute sur les coûts engendrés par ce report, coûts qui pourraient effectivement être additionnels par rapport à ceux qui remplissent leur déclaration rapidement. Nous attendons donc une réponse sur le problème des coûts. Mais sur la facilité pratique de le faire, il semble, d'après les fiduciaires qui ont été contactées, que cela soit relativement aisé.

En l'état, et sous réserve de la discussion concernant les coûts, le groupe PDC propose donc de refuser cette motion.

Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, personnellement, j'ai aussi étudié la question avec des fiduciaires. J'ai demandé à plusieurs d'entre elles s'il y avait un problème avec les délais. Toutes m'ont répondu que non. Et puis je suis allée sur le site de l'Etat. Et sur le site de l'Etat, qu'est-ce qu'on me dit ? On me dit qu'il y a un délai initial au 31 mars - inscrit sur la déclaration - c'est-à-dire deux mois après la date d'envoi de la déclaration. Il y a une première prolongation au 30 juin, cinq mois après l'envoi de la déclaration. Puis il y a une prolongation exceptionnelle au 30 septembre. Beaucoup de fiduciaires ont justement cette possibilité-là. En plus, qu'est-ce qui est marqué ? «Prolongation pour cas particuliers» au-delà du 30 septembre, c'est-à-dire au-delà de huit mois après la date d'envoi de la déclaration.

Alors moi, je suis un peu surprise d'entendre qu'il y a ce problème-là. Si vous allez sur le site de l'administration fiscale, il y a tout, vous êtes renseignés sur tout. (Remarque.) Certaines fiduciaires m'ont dit que, chaque fois qu'on demande un délai supplémentaire, ça coûte dix francs. Je ne sais pas si c'est vrai, mais, en tout cas en ce qui concerne le délai, il n'y a absolument pas de problème puisque - je peux vous faire une copie, ou vous pouvez aller sur le site - vous avez trois ou quatre possibilités, même au-delà du 30 septembre.

J'aimerais que M. le conseiller d'Etat en charge des finances nous confirme si c'est la pratique. Moi, en tout cas, c'est ce que j'ai cru comprendre et ce que certaines fiduciaires m'ont effectivement confirmé. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, le groupe socialiste refusera cette motion.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il y a effectivement eu, à l'introduction du système, un problème - il faut le dire. Et son origine est la suivante: dès lors qu'on facturait le délai, il fallait qu'on le facture à la bonne personne. Or je suis désolé de vous dire qu'effectivement les listes qui étaient envoyées comportaient un taux d'erreur trop important, pas de toutes les fiduciaires mais de bon nombre d'entre elles. Vous savez pertinemment, Monsieur Jeanneret, que la qualité des fiduciaires est inégale à Genève, et même très inégale. A un moment donné - et c'est ce qui a occasionné un certain travail - il a donc fallu, si elles voulaient utiliser l'administration en ligne, qu'elles s'identifient, et cela voulait dire déposer un code. Ça a été une première chose. Deuxièmement, il fallait également qu'elles réfèrent spécifiquement au code de déclaration, ce qui exigeait sa saisie.

Alors elles ont été informées en décembre par la newsletter du département, et elles ont été encore informées en janvier. Mais vous savez très bien comment les choses se passent: c'est au moment où le problème se pose que les gens le voient. Et beaucoup de fiduciaires, quand elles l'ont réalisé, ont eu une crainte sur le délai, raison pour laquelle l'AFC, l'année passée, avait consenti un délai supplémentaire. Le fait est qu'à l'introduction il y a eu un problème, que ce problème a été réglé et que, maintenant, nous sommes revenus à une situation normale.

Reste l'émolument de dix francs. Mesdames et Messieurs les députés, je dois quand même vous dire que, dans beaucoup de cantons suisses, les délais ne sont pas aussi généreusement accordés. Il y a même des cantons où il n'y a pas de délais, à vrai dire. (Brouhaha.) Donc, entre pas de délais et le fait de tenir compte du travail des fiduciaires et de prévoir un échelonnement, il y a une balance que nous avons faite. En effet, Mesdames et Messieurs les députés, gérer un délai implique un coût, un double coût, il faut le gérer. Ce n'est pas cher si c'est par informatique, c'est un peu plus cher si c'est par courrier.

Et il y a un deuxième coût, c'est un coût d'organisation, parce qu'effectivement nous nous devons d'avoir suffisamment de travail les premiers mois de l'année. L'administration a relativement peu de travail en janvier-février, elle fait les formations. Mais il y a un moment où il faut quand même que les déclarations s'échelonnent; parce que, si tel n'est pas le cas, qui va nous tomber dessus pour nous dire que c'est invraisemblable que l'on n'ait pas fait 95% des déclarations à la fin de l'année ? C'est votre parlement ! C'est l'aimable M. Jeanneret ! Qui va nous dire: «Mais comment c'est possible ?!» (Remarque.) Eh bien non ! Evidemment ! Si on veut que ce soit fini à la fin de l'année, c'est comme le lièvre et la tortue, vous savez: il faut partir à temps ! (Rires.) Et si on veut partir à temps, il faut prévoir une petite incitation économique - selon les bonnes théories en vigueur aujourd'hui - afin de stimuler l'un ou l'autre contribuable.

Il y a eu une tempête dans un verre d'eau, et le verre d'eau a beaucoup souffert. (Exclamations.) Maintenant, nous sommes revenus à la normale, de sorte que vous pouvez paisiblement refuser cette motion, sans souffrance énorme de la part des contribuables qui, par ailleurs - je vous le signale quand même - ont bénéficié d'une baisse d'impôt se chiffrant tout de même à 400 millions pour l'année 2010.

Une voix. Grâce à qui ?

M. David Hiler. Il est navrant qu'il ait fallu, comme dans toute nouveauté, essuyer les plâtres. L'affaire est close. Votre parlement n'a pas donné l'urgence, et nous pouvons maintenant passer à des choses sérieuses, si vous le voulez bien ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission fiscale.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1945 à la commission fiscale est rejeté par 59 non contre 23 oui et 1 abstention.

Le président. Nous avons reçu un amendement qui a été annoncé par l'un des auteurs. Cet amendement modifie le texte des deux premières invites, la troisième restant inchangée. Nous allons le voter globalement, si vous êtes d'accord.

La première invite devient: «à renoncer aux exigences nouvelles de l'AFC depuis 2010, s'agissant des demandes de délais par l'intermédiaire de fiduciaires». Et la deuxième invite acquiert la teneur suivante: «à accepter jusqu'au 30 juin de chaque année les demandes qui lui seront présentées par les fiduciaires selon la procédure ancienne (numéro de contribuables)».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 56 non contre 23 oui et 3 abstentions.

Le président. Nous nous prononçons maintenant sur la proposition de motion elle-même.

Mise aux voix, la proposition de motion 1945 est rejetée par 59 non contre 22 oui.

M 1969
Proposition de motion de Mmes et MM. Eric Bertinat, Christina Meissner, Céline Amaudruz, Patrick Lussi, Stéphane Florey, Christo Ivanov, Marc Falquet demandant l'octroi de subventions aux particuliers qui équipent leur logement de systèmes de sécurité

Débat

M. Eric Bertinat (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, d'après les statistiques de janvier 2011, Genève a vu 700 cambriolages être commis sur son territoire. Les mois précédents, il y a eu des pics jusqu'à 40 cambriolages par jour - villas, appartements, commerces, caves, bref, tout y passe. Merci la libre circulation et les accords de Schengen !

Aujourd'hui, la police ne peut pas faire face de manière suffisante à ces multiples cambriolages, puisqu'en fin d'année on parle de milliers de cambriolages. A noter que 60% de ces cambriolages sont commis entre 12h et 18h, et si ces infractions sont au demeurant légères, pour certaines - c'est une porte fracassée et peut-être quelque chose de volé, comme un ordinateur, ce ne sont pas forcément des valeurs importantes qui sont volées - il n'en reste pas moins que les victimes, souvent, souffrent de ces cambriolages.

Encore aujourd'hui, ou hier, le GHI - dont on sait pour quel parti penche son coeur - relatait le cambriolage d'une personne qui, rentrant chez elle, a vu que sa porte avait été forcée. Prise de panique, elle a été se réfugier dans sa voiture où elle a passé la nuit en attendant que la police puisse intervenir, certainement déjà occupée par d'autres cambriolages.

Tout cela pour vous dire que Genève souffre de tous ces cambriolages, de tous ces malfrats qui viennent sur notre territoire se servir, et qu'il serait de bon aloi de réfléchir à ce que l'Etat puisse aider les gens à prendre la décision de se munir de systèmes de sécurité; des systèmes de sécurité qui sont relativement simples: on pense à ces doubles barres qu'on peut installer derrière une porte d'entrée et qui suffisent bien souvent à éviter un cambriolage. La réflexion pourrait être identique à celle qu'a menée la Confédération, où il a été décidé de subventionner des doubles vitrages pour économiser le chauffage dans les maisons, idée qui paraissait peut-être un peu curieuse comme dépense au début, mais qui s'est avérée par la suite extrêmement positive. Et cette idée a permis d'éviter non seulement de gaspiller, mais aussi de dépenser beaucoup d'argent en chauffage. De la même manière, nous pourrions avoir...

Le président. Il vous faut songer à conclure, Monsieur le député.

M. Eric Bertinat. Merci, Monsieur le président. De la même manière, nous pourrions avoir ce genre de réflexion en se disant: «Aidons nos concitoyens à se prémunir contre les cambriolages et évitons ainsi une multitude de frais, y compris les multiples interventions de la police.»

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous venons de découvrir une nouvelle UDC. On est assez contents, parce que c'est la première fois qu'on propose de financer les portes et fenêtres par l'Etat, par l'impôt ! (Rires.)

Nous, nous sommes pour plus de sécurité, nous souhaitons qu'il y ait des policiers dans la rue, nous souhaitons qu'on soit dans un Etat sûr. Mais de là à dire que c'est à l'Etat de payer les portes et fenêtres... A 1000 balles la porte et 2000 balles la fenêtre, ça va commencer à faire cher. (Rires.) Alors moi je veux bien ! C'est une vision du monde ! Chez les Verts, honnêtement, on pense encore que c'est la responsabilité de l'individu d'avoir une porte à sa maison et d'avoir une fenêtre... (Rires.) ...que ça relève du domaine privé. Et puis on n'entend pas encore que l'on subventionne les portes et les fenêtres !

Aujourd'hui, dans ce parlement, on a déjà entendu qu'il fallait subventionner les parkings parce qu'il faut les rendre pas chers, donc on est prêts à mettre 2000 F pour les parkings; maintenant, on nous propose de financer les portes et fenêtres... Mais par contre, alors, les enfants qui ont des difficultés, les aides familiales, les allocations familiales, les différentes personnes qui sont handicapées... J'ai entendu l'UDC dire: «Ouh là là ! Les gens qui ont un handicap, s'il est asymptomatique, il faut leur supprimer les subventions !» Mais là, maintenant, les portes et fenêtres, on subventionne !

Vous voyez donc à peu près ce que les Verts vont pouvoir vous dire sur cette motion. (Rires.) Eh bien, on va laisser du travail aux menuisiers ! Ça, c'est bien mais, je veux dire, on va continuer à payer nous-mêmes nos portes et fenêtres ! (Applaudissements.)

Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président

Mme Christina Meissner (UDC). Je suis quand même choquée qu'on réduise ce problème à une histoire de menuisiers et de portes et fenêtres lorsqu'on constate que c'est clairement la réputation de la Suisse dont il est question - l'oasis de sécurité de la Suisse qui n'en est plus une - et surtout qu'un cambriolage n'est pas qu'un préjudice matériel mais atteint celui qui en est victime dans son intimité même. C'est un traumatisme, un traumatisme sérieux qui peut même parfois être assimilé à un viol pour celui qui en a subi les conséquences. Monsieur Bavarel, ce n'est pas quelque chose de banal, c'est très sérieux ! En ce qui concerne ce préjudice, on peut clairement dire que sécurité et qualité de vie sont intimement liées, et c'est ce qui fait que nous devons nous en préoccuper.

Il y a vingt ans, il est vrai, seules les villas cossues étaient visées. Aujourd'hui, le profil des cambrioleurs a changé et leur calcul est différent: chacun possède chez soi quelques bijoux, un peu d'argent et surtout du petit matériel électronique aisément transportable. Le gain par casse est moindre mais, cumulé, il est considérable et franc d'impôts. Toute habitation, de fait, est devenue une cible potentielle, mais tous les habitants n'ont pas forcément les moyens de doter leur logement de mesures de sécurité qui permettraient de diminuer grandement la survenance du délit comme de son impact.

Ces mesures coûtent cher, et une aide de l'Etat pour leur mise en place serait bienvenue. En comparaison du coût de la mobilisation des moyens et des forces de police qui interviennent après coup, ces mesures préventives permettront au final à tous de faire des économies bienvenues, mais également de gagner en qualité de vie. Aussi, je vous remercie de suivre notre groupe UDC et de soutenir cette motion.

M. Philippe Morel (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas question de nier la gravité de la criminalité à Genève, l'augmentation des cambriolages, l'augmentation du nombre des agressions personnelles, individuelles ou collectives. C'est un fait, ça a été une préoccupation de ce parlement et de nos autorités exécutives. Et lutter par tous les moyens possibles contre ces crimes est évidemment un devoir.

Par contre, j'ai envie de vous dire: lorsqu'un appartement est cambriolé ou lorsqu'un appartement n'est pas cambriolé, à qui ne profite pas le crime ? Eh bien, le plus souvent, heureusement, les appartements ou les commerces sont cambriolés en l'absence de leurs habitants ou de leur propriétaire. Et, dans le fond, les dommages occasionnés - qui sont fort regrettables, évidemment, causant un traumatisme psychologique aux personnes - sont remboursés par les assurances.

Finalement, l'absence de crime, l'absence de pénétration dans un logement va bénéficier aux assurances, elles le savent bien. Elles le savent bien puisqu'elles offrent déjà aujourd'hui des réductions de primes chez les personnes qui ont mis, d'une manière ou d'une autre, une protection à l'entrée de leur commerce ou de leur appartement - une porte fortifiée, une sécurité spéciale ou même la présence, pour certains, d'un coffre-fort.

L'assurance s'est donc bien rendu compte que cette prévention lui était bénéfique, et c'est finalement elle qui rembourse le propriétaire et qui le décharge des frais qu'il aurait et qu'il aura pour protéger son domicile ou son commerce.

S'il est donc important de diminuer la criminalité et de la prévenir jusqu'aux portes de l'individu, la porte franchie, le bénéfice sera à l'assurance. C'est donc à l'assurance qu'il appartient - et elle le fait déjà - d'indemniser ceux qui augmentent leur degré de protection individuelle. Pour cette raison, le PDC vous recommande de refuser cette motion.

Mme Christiane Favre (L). Mesdames et Messieurs les députés, que les cambriolages - comme on l'a dit - soient une atteinte intolérable à la sphère privée et que leur diminution soit de nature à soulager la police sont évidemment des constats qu'on ne peut pas mettre en doute. Qu'il faille essayer de s'en prémunir paraît très raisonnable aussi. Mais que l'Etat subventionne les dispositifs de sécurité des particuliers pour simplifier le travail de la police, c'est une idée qui m'ennuie un peu, d'abord parce qu'il existe des systèmes extrêmement simples qui sont à la portée de tout un chacun.

Dans l'émission de la TSR «A bon entendeur», le chef de presse de la police cantonale vaudoise indiquait que la plus simple des préventions, c'est une lumière ou une radio qui s'enclenche à intervalles réguliers avec une minuterie. Ces minuteries, Mesdames et Messieurs, on les trouve partout, elles coûtent 12,50 F. (Exclamations.) Ensuite, Mme Bonfanti - que vous citez aussi dans cette motion - préconisait la pose d'une barre de sécurité derrière la porte. Elle coûte entre 500 et 1000 F, toujours d'après «A bon entendeur», donc à peine plus cher que la franchise de l'assurance-ménage que l'on active pour couvrir les dommages du cambriolage.

Honnêtement, je crois que ce type de préventions simples est à la portée de tout le monde. Et, s'il en faut à certains de plus sophistiqués, ils ont sans doute les moyens de se les offrir.

Ensuite, l'idée de subventionner le comportement des citoyens qui économisent des prestations de la police m'ennuie un peu aussi parce que, si on admet ce principe, il n'y a pas de raison de s'arrêter aux cambriolages. Le vol de vélos, de motos, de voitures, les détroussements, les excès de vitesse sont des délits qui mobilisent la police à journées faites. On pourrait donc subventionner les cadenas de vélos, les parkings fermés, les dispositifs régulateurs de vitesse sur les véhicules... On pourrait même octroyer des bonus aux gens qui n'ont ni montre ni bijoux à promener dans la rue ! (Rires. Exclamations. Applaudissements.) Mais pourquoi s'arrêter au travail de la police ? L'enseignement est une prestation de l'Etat qui coûte extrêmement cher aussi. Alors, pourquoi ne pas subventionner les parents qui prennent un répétiteur pour éviter que leurs enfants ne redoublent ou - encore mieux - qui les mettent dans une école privée ? (Exclamations. Commentaires.)

Une voix. Tout arrive, enfin !

Mme Christiane Favre. Quand on fait le compte du nombre de subventions qu'on peut imaginer pour soulager le travail des fonctionnaires, on a le vertige ! On entre dans un système d'assistance à grande échelle ! La sécurité du territoire, Mesdames et Messieurs les députés, c'est l'affaire de l'Etat, l'information et les conseils de prévention aussi. Le reste - la mise en pratique de ces bons conseils - c'est l'affaire du citoyen, ça relève de sa responsabilité. Pour toutes ces raisons, nous refuserons cette motion. (Applaudissements.)

Le président. Décidément, Madame la députée, vous cumulez les succès ! La parole est à M. le député Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, on peut évidemment ironiser, mais lorsqu'on est victime d'un cambriolage, on a vraiment moins envie de rigoler. Genève et la Suisse en général sont un paradis pour les cambrioleurs. Pourquoi ? Parce qu'on a une classe moyenne qui a un niveau de vie assez élevé et, surtout, nous n'avons pas la culture de la protection. Si vous allez ailleurs, même dans les pays qui nous entourent, vous verrez que ceux qui ont quelques moyens se protègent et se protègent efficacement. Je ne parle même pas de pays au-delà de la Méditerranée où, là, effectivement, les gens sont soit très riches soit très pauvres. Et je peux vous dire que ceux qui sont très riches ne lésinent sur aucun moyen pour leur protection.

La question qui se pose est celle de savoir combien coûtent les cambriolages, non pas aux assureurs - pour répondre à l'intervenant du PDC - mais à la collectivité que nous sommes ici pour représenter. Au-delà du simple dommage psychologique - je dis «simple» non pas pour le minimiser - de la personne qui en est la victime, le fait de savoir que des étrangers sont venus chez vous, ont mis tout sens dessus dessous... (Commentaires.) ...est effectivement particulièrement traumatisant.

Alors, combien cela coûte - et je ne parle pas ici de devoir remplacer la police, qui doit faire son travail - combien coûte à la société le fait de devoir faire des constats de cambriolages, de rechercher les cambrioleurs, de faire des fichiers ? Evidemment, on ne pourra pas s'en passer, mais si on peut diminuer ce nombre, tout le monde s'en portera mieux.

Si vous lisez cette proposition qui vous est soumise par l'UDC, vous verrez qu'elle ne consiste pas à rembourser portes et fenêtres, à rembourser des barres de protection. Evidemment, si l'on avait proposé de rembourser des cadenas de vélos, les Verts auraient plébiscité cette proposition... Ici, on demande simplement d'apporter peut-être une contribution - il faut y réfléchir - à ceux qui n'ont pas les moyens de se protéger efficacement. Lorsque vous êtes cambriolé, vous êtes suffisamment motivé, vous n'avez pas besoin d'incitation de l'Etat. Mais lorsque vous ne l'avez pas encore été, c'est vrai que l'on réfléchit, on se dit: «Est-ce que, finalement, le risque est suffisamment sérieux pour que je doive investir ?» Même 500 F, c'est beaucoup pour certaines personnes.

On peut donc se poser sérieusement la question de savoir si l'Etat n'aurait pas intérêt à participer, même modestement, aux coûts de sécurité. Si l'on disait que nous participions à 20% - jusqu'à un plafond, évidemment - cela voudrait dire que la personne qui ferait appel à cette subvention devrait, de sa poche, en mettre le 80%. Est-ce que c'est véritablement farfelu ? Je ne le pense pas.

Je crois que tout le monde aurait à gagner à cette culture de la protection... Nous serions tous heureux de pouvoir nous en passer, mais elle est devenue malheureusement une réalité, d'autant plus que nos frontières ne sont plus protégées comme elles devraient l'être... Nous avons donc intérêt à peut-être donner cette incitation.

En conclusion, je proposerai le renvoi de cette motion à la commission judiciaire et de la police. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme certains de mes préopinants, le groupe socialiste ne va pas minimiser la problématique des cambriolages et de l'insécurité qu'il y a aujourd'hui à Genève. C'est vrai, les cambriolages traumatisent énormément de gens, et les personnes qui ont vécu cela vivent des mois, des semaines d'angoisse, parce que pour elles - tout le monde le dit - c'est un véritable viol. Alors, c'est vrai, c'est un véritable phénomène.

Cela dit, moi quand je lis la motion, qui parle d'octroyer des «subventions cantonales aux particuliers, qu'ils soient propriétaires ou locataires», les bras m'en tombent ! Je veux dire, quand on est propriétaire dans ce pays, on a les moyens, excusez-moi ! (Commentaires.) On a les moyens de se payer une protection digne de ce nom.

En revanche, je ne suis pas d'accord avec l'excellent discours de ma collègue Christiane Favre quand elle dit que tout le monde peut se payer une barre de protection. Non, pas tout le monde le peut, parce qu'elle coûte entre 600 et 1000 F. Les personnes à revenus modestes ont énormément de peine à se payer cela.

Par contre, je partage l'avis de M. Morel quand il dit que ce sont les assurances qui doivent jouer le jeu. Les assurances sont les principales concernées, et intervenir en amont, c'est justement accorder cette diminution des primes d'assurance aux gens qui ont pris des mesures pour s'équiper d'un moyen de sécurité. Les assurances ne le font pas, et aujourd'hui, elles dépensent... (Remarque.) Pas toutes les assurances le font, elles le font pour les commerçants, mais pas pour les petits locataires; ça, il y en a très peu qui le font.

Alors, moi, je regrette, je trouve que l'Etat ne peut pas se substituer aux assurances. Les assurances doivent donc faire un effort de ce côté-là et aider les gens qui ont envie de se protéger.

Le groupe socialiste bien évidemment sait que c'est un problème qui touche beaucoup de personnes, mais il ne peut pas souscrire à cette proposition parce qu'on ne peut pas subventionner de tels équipements. Monsieur le président, nous allons donc refuser cette motion.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Patrick Lussi, à qui il reste cinquante secondes.

M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Cinquante secondes seront suffisantes. Mesdames et Messieurs, j'ai presque honte quand j'entends ma préopinante socialiste, parce qu'elle oublie quelque chose d'essentiel actuellement: dans les quartiers populaires, dans des petits appartements, des gens qui ont trois fois rien se font cambrioler.

Que vise cette motion ? Bien sûr qu'elle est peut-être, dans son libellé, encore trop large. Renvoyer cette motion à la commission judiciaire afin de traiter la demande principale qui tend à ce que le Conseil d'Etat statue, c'est rappeler, Madame... Et je précise aux Verts, à M. Bavarel et aux autres qu'ils oublient une chose, dans tous ces grands débats, quand notre préopinante libérale se moque de nous: et la dissuasion ? Que faites-vous de la dissuasion ? Et ceci, si vous avez des bons systèmes sur vos portes, dans les appartements HLM voire économiquement faibles... Sans cela, Madame, nous ferons une grande perte.

Quant aux assurances, bien sûr que c'est à elles de payer ! J'adore ! Une socialiste ! Alors que vous vous battez sans arrêt contre l'augmentation des primes ! Si on fait payer les assurances, nous aurons une augmentation de primes ! Non, Madame ! Essayons de trouver un système pragmatique. Ne soyons pas généreux mais soyons courageux envers les gens qui n'ont pas les moyens, qui habitent dans des HLM, qui sont votre clientèle et que vous refusez de protéger ce soir !

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Voilà, voilà... La parole est à M. le député Pierre Weiss, à qui il reste quinze secondes.

M. Pierre Weiss (L). C'est simplement pour rappeler à M. Poggia que cette motion ne vise pas les personnes qui ont de faibles moyens, comme il l'a dit par erreur. Elle vise tout le monde, c'est donc une motion arrosoir. Il conviendrait par conséquent d'être un petit peu plus proche du texte, quand on le défend. Même si on le défend bien, il ne faut pas le défendre avec erreur. (Commentaires. Rires.)

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, ce qui est en tout cas certain, c'est que, si je regardais plus attentivement mes ordres du jour, je ne me retrouverais pas à traiter d'un sujet qui n'a manifestement rien à voir avec mon département. (Rires.) Ce qui prouve bien - puisqu'on en est aux proverbes - que l'on est toujours puni par là où l'on a péché et que, comme on fait son lit, on se couche. (Rires.)

Cela étant dit, comme chacun des préopinants, je crois qu'il est évident que personne ne sous-estime le fléau des cambriolages, qui a pris une ampleur incroyable. Le problème, c'est que, en dehors de tous les éléments qui ont été développés, est-ce que c'est à l'assurance de payer - ce qui paraît assez logique - ou, du moins, de subventionner ? Est-ce que, dans un locatif, et particulièrement dans un locatif HLM, HM ou HBM, ce n'est pas finalement au propriétaire, y compris s'il est institutionnel, d'équiper les portes correctement ?

En tout cas, je pense qu'il doit y avoir un peu plus de 200 000 logements à Genève. Evidemment, si on met 1000 F, ça fait 200 millions. Donc ça me paraît une somme assez conséquente par rapport à l'effort qui est demandé aux personnes pour leur propre sauvegarde, en réalité. Et c'est vrai que cette extension particulière de l'Etat providence - venant non pas, Monsieur Poggia, de votre parti mais de l'UDC, dont le credo est en principe «Moins d'Etat, moins d'impôts» - apparaît surprenante.

Cela étant, Mesdames et Messieurs les députés... (Commentaires.) ...je dois quand même vous dire que ce n'est pas parce que, par extraordinaire, cette motion serait adoptée qu'il y aurait une quelconque subvention. Il s'agit d'une allocation à des tiers, ce qui exige un projet de loi avec une base légale. Je suggère donc à l'UDC, après avoir fait ce tour de piste et entendu les critiques - si elle compte, ce qui paraît être le cas, réduire la portée de ce projet à des groupes manquant de moyens, des groupes sociaux et n'étant pas par ailleurs d'ores et déjà soutenus par l'Etat - de rédiger un projet de loi. En effet, le système institutionnel ne permet pas au Conseil d'Etat d'allouer une quelconque allocation à des tiers sans une base légale en bonne et due forme, de sorte qu'il ne sert à rien de demander au Conseil d'Etat de faire quelque chose que vous êtes seuls dans ce parlement à pouvoir mettre en oeuvre. Ces renseignements, je l'espère, seront utiles aux motionnaires. Pour le reste, le Conseil d'Etat attend avec confiance votre vote.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons passer au vote de la motion 1969. Mais auparavant, nous allons nous prononcer sur la demande de renvoi à la commission judiciaire qui a été formulée.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1969 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 61 non contre 19 oui.

Mise aux voix, la proposition de motion 1969 est rejetée par 59 non contre 19 oui et 1 abstention.

R 608
Proposition de résolution de Mme et MM. Frédéric Hohl, Pierre Conne, Michel Ducret, François Haldemann, Patrick Saudan, Charles Selleger, Nathalie Schneuwly pour une nouvelle convention de remboursement entre l'Etat de Genève et la Banque cantonale de Genève

Débat

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, le 1er janvier 2015 entrera en vigueur une nouvelle convention signée entre l'Etat et la Banque cantonale genevoise. Par cette résolution, le parti radical - vous l'avez compris - ne demande pas à la Banque cantonale de rembourser les 2 milliards, mais demande au Conseil d'Etat d'obtenir, dans ces renégociations, un remboursement, on va dire, un peu plus accéléré des frais, qui se situent aux alentours de 365 millions.

Il y a deux solutions pour ce remboursement de frais. La première, comme aujourd'hui: un pourcentage sur le bénéfice. Alors on pourrait imaginer un pourcentage plus haut sur le bénéfice ou, comme demandé dans notre résolution, un taux fixe avec une somme fixe annuelle de 20 millions sur dix-huit ans. A cela s'ajoute une demande d'un pourcentage sur les intérêts de la dette.

On comprend que cette proposition de résolution mérite un tour de chauffe à la commission des finances pour qu'on ait le temps d'en parler entre nous, de peser le pour et le contre, et pour qu'on puisse s'armer et armer le Conseil d'Etat - pour autant qu'il en ait besoin - à entrer dans cette nouvelle négociation.

C'est pour cette raison que le parti libéral-radical vous demande de renvoyer cette proposition de résolution à la commission des finances. Je vous remercie.

Présidence de M. Renaud Gautier, président

Mme Loly Bolay (S). L'accord entre la Banque cantonale et l'Etat de Genève arrive à échéance en 2015. (Remarque.) Non, il n'entre pas en vigueur: il arrive à échéance en 2015. Cet accord, faut-il le rappeler, a reçu l'aval de la Commission fédérale des banques - la FINMA - et respecte les exigences de celle-ci. Il faut savoir que, depuis 2000, la banque a remboursé à raison d'environ 40 millions - plus ou moins - et que cet accord, effectivement, doit être renégocié à partir de 2015.

Le parti socialiste ne peut pas accepter la proposition de résolution, dans la mesure où il est stipulé dans la première invite que l'on demande à la banque de rembourser les frais de la fondation à hauteur de 20 millions par an. On ne peut pas décider comme cela, c'est une négociation !

C'est vrai que la Banque cantonale a connu des difficultés. Aujourd'hui, cette banque a une situation beaucoup plus saine, mais le parlement ne peut pas décider comme cela qu'elle doit rembourser 20 millions. C'est une négociation entre la banque et l'Etat, avec la situation qui sera - au moment de la négociation, en 2013-2014 - la nouvelle situation de la Banque cantonale. La Banque cantonale est quand même liée par l'Etat de Genève, liée par les communes et liée aussi par le tissu économique, à l'essor duquel elle participe pleinement.

Le groupe socialiste ne peut donc pas accepter cette résolution, parce qu'elle met un verrou dans la négociation en disant qu'il faut que l'on négocie à partir de 20 millions. Et ces exigences, nous, parlement, nous ne pouvons pas les décider à l'avance. Encore une fois, c'est une négociation entre la banque et le gouvernement. Par voie de conséquence, nous refuserons, Monsieur le président, cette résolution radicale.

M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, pour reprendre la balle au bond par rapport à l'intervention de ma préopinante socialiste, je dirai que la question est un peu plus compliquée qu'une question de simple négociation entre l'Etat de Genève et la Banque cantonale de Genève. Pourquoi ? Il y a eu un accord, c'est vrai, le 11 mars 2005, qui arrivera à échéance en 2015. Et, effectivement, les accords doivent être respectés, même lorsque c'est l'Etat qui les signe.

Vous savez à quel point le MCG est particulièrement chatouilleux sur la question de la Banque cantonale de Genève. Vous savez aussi à quel point le MCG considère que l'Etat de Genève et, à travers lui, les contribuables doivent rentrer dans leurs fonds le mieux possible, parce que le sacrifice qui a été fait - et qui continue d'être fait par les contribuables de ce canton - est particulièrement important.

Mais il a été décidé, par une loi adoptée dans ce parlement, que la Banque cantonale de Genève devait vivre, survivre. Pour cela, cet accord de 2005 a été passé.

Pourquoi a-t-on fixé 20% du dividende ? Précisément pour laisser à la banque et à l'assemblée générale la possibilité de décider si un dividende devait être distribué et, le cas échéant, lequel, pour que cette Banque cantonale puisse rester compétitive, pour qu'elle puisse rester attractive, aussi, pour les autres actionnaires que l'Etat de Genève. Si demain nous mettons une obligation de remboursement fixe, cela impliquera en contrepartie la reconnaissance d'une dette de la Banque cantonale de Genève envers l'Etat de Genève. Alors, effectivement, nous considérons tous qu'il y a une dette, mais de là à dire qu'ils nous doivent de l'argent, à aller jusqu'au bout du raisonnement et à faire mettre dans le bilan de la banque une dette correspondante, il y a un pas que l'on ne peut pas faire sans peser, soupeser les conséquences juridiques et comptables.

Si cet accord a été approuvé par la Commission fédérale des banques - aujourd'hui, la FINMA - c'est précisément parce qu'il n'y a pas eu de dette inscrite au bilan à concurrence de ce que la banque devrait à l'Etat. Car s'il y avait eu une dette correspondante, il aurait fallu que les fonds propres de la banque puissent la garantir; sinon, il aurait fallu liquider la banque.

Donc, réfléchissons bien. La proposition de renvoyer cette résolution à la commission des finances est tout à fait sensée. Je pense qu'il ne faut pas faire des pas plus longs que nos jambes ou plus longs que les jambes de la Banque cantonale de Genève. Sur le principe, nous sommes d'accord: il faut que le remboursement aille plus vite, d'autant plus que nous étions là pour ouvrir le parapluie lorsqu'il pleuvait. Maintenant qu'il semble faire meilleur, nous souhaiterions effectivement qu'on nous rende le parapluie le mieux possible et dans le meilleur état possible.

Le président. Monsieur le député, il vous reste quinze secondes.

M. Mauro Poggia. J'en ai terminé, Monsieur le président. Voilà pourquoi le groupe MCG - tout en étant convaincu qu'il faut effectivement améliorer la situation - propose que cet objet soit renvoyé à la commission des finances, pour qu'en 2015 l'Etat sache dans quelle direction notre parlement veut aller. Je vous remercie.

M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien se rendra à l'avis de M. Poggia et appuiera effectivement le renvoi de cette résolution à la commission des finances. Il faut dire que la première version qui nous avait été soumise ne nous a pas du tout emballés, pour une raison notamment... Plusieurs arguments ont été avancés ce soir, mais un argument n'a pas encore été cité, à savoir que l'Etat, le canton de Genève et les communes sont les actionnaires principaux de la Banque cantonale, et que si nous péjorons le cours de l'action de la Banque cantonale, dont les collectivités publiques sont propriétaires, eh bien, au bilan de l'Etat, c'est tout ça de fortune qui disparaît. Il faut faire attention à ce que l'on fait. Le cours de l'action de la Banque cantonale est déjà fort bas par rapport à sa valeur réelle, et il faut prendre garde, justement, à ne pas péjorer davantage ce cours. En effet, si le cours remonte, ce sont toutes les collectivités publiques qui s'en trouveront enrichies.

Des mesures telles qu'elles ont été proposées, si elles sont appliquées trop abruptement, sont précisément de nature à peser sur le cours et donc sur notre propre fortune en tant que contribuables genevois.

Pour toutes ces raisons, avant de prendre des décisions, il importe d'étudier soigneusement en commission les conséquences de ce qui nous est proposé.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, brièvement, je confirme que la créance ne peut être que conditionnelle. Donc, si jamais il y avait remboursement sur une somme fixe, il devrait de toute façon y avoir un mécanisme pour qu'elle ne soit pas payée si la situation de la banque ne le permettait pas. Le dispositif a évidemment l'inconvénient de ne pas permettre à la banque de faire passer ce remboursement dans ses affaires ordinaires. Donc, au fond, l'argent avec lequel elle va nous rembourser - elle le fait déjà - est imposé au préalable, si je puis m'exprimer ainsi, puisqu'il est dans la distribution. C'est le premier point.

Le deuxième point c'est que, si vous avez des regrets sur le fait que l'on ne puisse pas lancer la discussion plus vite, n'en ayez aucun. Aujourd'hui, la priorité de la Banque cantonale est d'augmenter ses fonds propres. Elle doit elle aussi répondre à des exigences nouvelles, et raisonnables, de la FINMA, des exigences qui protègent les actionnaires de la BCGe - dont l'Etat, dont les collectivités publiques, dont les 10 000 particuliers - contre d'éventuelles erreurs dans le futur.

D'autre part, les épargnants sont aujourd'hui protégés à raison de 100 000 F par la Confédération. Cela nous permettra de nous retirer de cet engagement puisqu'il est aujourd'hui repris, pour des fortunes modestes, par la Confédération de façon stable.

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, la première priorité est donc de réduire le risque du futur. Et la deuxième est d'obtenir, si possible, un remboursement d'environ 370 millions dans les meilleures conditions possibles. Aujourd'hui, je ne vous cache pas que «les meilleures conditions possibles» ne serait pas l'expression que j'utiliserais pour décrire l'économie mondiale et les certitudes qu'elle peut nous inspirer, même à court terme.

Le Conseil d'Etat accueille donc favorablement la proposition faite d'un renvoi en commission et, pour le reste, peut vous assurer en tout cas que, lorsque l'on aura mis un mur pour empêcher les frontaliers d'entrer, comme certains ici le voudraient... (Exclamations. Commentaires.) ...et que l'on aura chassé tout ce qui ressemble à une multinationale, on ne s'occupera pas de ça, parce que, de toute façon, la Banque cantonale disparaîtra !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote et sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 608 à la commission des finances est adopté par 53 oui contre 23 non et 1 abstention.

R 618
Proposition de résolution de Mmes et MM. Frédéric Hohl, Patricia Läser, Jean Romain, Patrick Saudan, Nathalie Schneuwly du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonal à propos de la modification de la législation fiscale fédérale (Application de l'impôt à la source (IS) à l'ensemble des salariés et rentiers en Suisse)

Débat

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition radicale est à l'intention - vous l'avez compris - du Parlement fédéral pour obtenir un rapport sur l'impôt à la source.

En Suisse, ce n'est pas un scoop, le système fiscal est extrêmement compliqué. En revanche, l'impôt à la source est d'une simplicité étonnante. Les entreprises, à Genève - on en a l'habitude - sont également rémunérées pour ce travail. En août dernier, l'Assemblée s'est penchée sur la question et elle va continuer ses travaux l'automne prochain.

Mesdames et Messieurs, je vous invite à renvoyer cette proposition de résolution à la commission fiscale, qui pourra travailler autour de celle-ci pour que l'on puisse, ensemble, la renvoyer à l'Assemblée fédérale.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de résolution, effectivement, mérite d'être étudiée. (Rires.) Je pense que, lorsqu'elle sera examinée, les conclusions de l'étude seront évidentes à ceux qui l'ont déposée et qui la soutiennent aujourd'hui. Elles montreront en particulier que ce fardeau qui est mis sur les entreprises - visant à les charger davantage de tâches administratives - ne devrait pas être accueilli avec un enthousiasme débordant par celles-ci. Et, au fond, tout bien considéré, le PLR - dans sa volonté de décharger les entreprises de charges excessives - devrait arriver à la conclusion que c'était une excellente idée à étudier ! Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...je vous rappelle qu'hier la droite, avec le soutien inespéré de la gauche unanime, s'est opposée à ce que la commission de perception pour l'impôt à la source en faveur des entreprises soit ramenée de 3 à 2%.

Dans la suite logique du mouvement, la droite vous propose maintenant d'augmenter l'assiette sur laquelle ce 3% va être perçu. En effet, ce sont l'ensemble des salariés qui seront désormais prélevés à la source par leur employeur, qui pourra ainsi prélever 3% pour cette activité.

Nul doute, Mesdames et Messieurs de la gauche, que vous allez accourir pour soutenir ce patronat besogneux qui, grâce à ce travail minutieux, va pouvoir s'enrichir davantage ! Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

M. Serge Dal Busco (PDC). Ce projet de résolution vise un objectif légitime: simplifier la vie des citoyens contribuables.

Nous avons un gros doute sur la possibilité de généraliser le système de l'imposition à la source. Pour certains contribuables, on peut imaginer que ce soit relativement simple. Mais, pour la majorité d'entre eux, vu le régime des déductions que le système fiscal, tant sur le plan fédéral que cantonal, permet - je citerai, parmi les plus simples, les charges de famille, très différentes d'un contribuable à l'autre, qui suscitent des déductions fiscales, ou encore la situation hypothécaire ou les dettes qui permettent justement la défalcation des intérêts débiteurs - eh bien, tout cela fait que, pour chaque contribuable, en tout cas dans le système actuel, il y a un taux d'imposition réel différent.

On lit dans l'exposé des motifs que l'on pourrait adapter le taux d'imposition à la situation particulière de chaque contribuable. Je ne vois pas très bien là où il pourrait y avoir une simplification. Et comme cela a été dit - n'en déplaise à M. Poggia par rapport à ce qu'il vient de déclarer - je ne pense pas que les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises, voient arriver une telle proposition avec beaucoup d'enthousiasme. En effet - ça, il faut vraiment l'affirmer - c'est une charge qui est reportée ou qui serait reportée sur les entreprises.

Néanmoins, c'est un vaste sujet, qui mérite d'être étudié de manière un peu plus approfondie, de surcroît si c'est un texte qui est destiné à l'Assemblée fédérale. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons quand même le renvoi de cette résolution à la commission fiscale.

Mme Mathilde Captyn (Ve). Notre groupe voit plutôt d'un bon oeil cette proposition d'imposition à la source. Maintenant, elle nécessite un certain nombre d'études. C'est pour cela que nous irons dans le sens de la demande de renvoi en commission, pas vraiment pour l'argument que M. Poggia a avancé - vouloir enrichir les entreprises et la place - mais plutôt par principe de praticité ou, disons, pour rendre la procédure plus pratique pour les citoyens. Enfin, à voir... En tout cas, nous accepterons cette demande de renvoi en commission.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, à la lecture de cette résolution, nous pouvons nous poser la question de savoir si elle demande une externalisation de l'administration fiscale ou bien si c'est le premier pas vers l'abolition de l'impôt sur la fortune. (Exclamations.) En effet, pour chaque contribuable, il est vrai que la déclaration d'impôt et son remplissage ne sont pas une sinécure, mais de là à accepter comme solution cette résolution, qui propose un impôt à la source pour tous les salariés et les rentiers... Tel qu'il est proposé dans cette résolution, cet outil reste relativement partiel, incomplet. Et il est même proposé que l'imposition à la source soit libératoire, alors que, dans les pays qui la pratiquent - prenons l'Allemagne, qui pourrait être assez proche - on a une double contrainte, c'est-à-dire qu'il y a une imposition à la source et, en plus, une déclaration sur la fortune et les déductions.

Compte tenu des expériences, il s'avère qu'il y a très peu de pays ou très peu de systèmes qui permettent une vraie et unique imposition à la source et libératoire. Souvent, l'imposition reste tout de même un travail à double. Que cela devienne plus simple pour le contribuable ou que nous adoptions des façons de faire plus simples pour le contribuable, ça, le parti socialiste peut l'entendre.

Monsieur Poggia, je crois que vous confondez quand vous intervenez en disant que les socialistes ont accepté de subventionner les patrons et qu'ils vont continuer... Non, nous sommes dans deux domaines différents. Hier, nous parlions d'un type de contribuables bien particulier, aujourd'hui, nous sommes avec des contribuables genevois ou, en tout cas, qui habitent le canton.

Nous ne pourrons pas accepter cette résolution comme telle, parce qu'elle réduit et simplifie à l'extrême un sujet complexe qui demande de changer en profondeur non seulement un système fiscal cantonal, mais aussi un système fiscal fédéral - pour que ce ne soient pas nos genevoiseries.

Nous ne comprenons pas pourquoi c'est une proposition qui est faite ici à Genève pour le niveau fédéral. C'est pour toutes ces raisons que, en l'état, nous la refuserons.

M. Stéphane Florey (UDC). Le groupe UDC ne soutiendra pas cette résolution pour deux raisons. Premièrement, parce qu'elle infantilise le citoyen face à ses devoirs. A mon sens, elle lui ferait de plus perdre un certain sens de la réalité de ce qu'il paie vraiment, puisqu'il ne s'occuperait plus de rien. Tous les mois, il verrait un certain montant retiré de son salaire, ce qui lui ferait perdre tout sens des réalités. Pour ces deux raisons, nous refuserons cette résolution.

Une voix. Très bien !

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous demande de renvoyer cette résolution en commission, ce qui permettra de faire un point de situation sur les différents aspects du dossier. Il y a eu, à ce jour, une consultation qui a été réalisée, en fait, à l'initiative du canton de Neuchâtel. Le canton de Neuchâtel, le canton de Vaud, le canton de Genève ont pris position, à priori, pour la généralisation de l'impôt à la source. Nous ne sommes en Suisse que sept cantons de cet avis.

Vous devez prendre le temps, sans doute, de voir cette résolution, à cause de la problématique de l'impôt des quasi-résidents. Il y a aujourd'hui - j'aimerais quand même attirer votre attention sur ce fait - 270 000 contribuables au barème ordinaire, mais on va maintenant fêter les cent millièmes imposés à la source - résidents ou habitant de l'autre côté de la frontière. Et il est possible que, au niveau fédéral - sous la pression des cantons qui sont moins proches de la frontière que nous - on arrive à l'abolition pure et simple de l'impôt à la source au profit d'un impôt de garantie qui nous obligerait par ailleurs à faire une déclaration. Et boum: 100 000 déclarations de plus à faire ! Pas 5000, 100 000 !

Cette question est donc suffisamment complexe pour que vous ayez peut-être l'ensemble de l'information avant de vous déterminer.

Maintenant, il est vrai que les obstacles qui ont été relevés ne peuvent pas être niés. Il n'est pas possible d'avoir seulement une imposition à la source. Il y a forcément une déclaration pour les gens qui ont une fortune ou un bien immobilier, quelle que soit la forme. Et il faut aussi convenir que le système d'imposition à la source exige une simplification: il est moins individuel. S'il est moins compliqué, c'est qu'il est moins individuel; il est plus forfaitaire. Et je pense qu'il vaut la peine que vous voyiez les avantages et les inconvénients de cela.

Il y a un immense avantage - qu'on a aussi bien avec l'impôt de garantie, à vrai dire, qu'avec l'impôt à la source - c'est de ne pas mettre 50 000 personnes aux poursuites chaque année; enfin, de «faire» 50 000 poursuites, parce qu'en réalité c'est généralement plutôt deux fois 25 000. Ce problème est réel. Et je me rappelle - vous voyez, je me souviens très très bien des affiches du MCG - que c'était l'un des thèmes de la campagne en 2005 sur les bus. Il y avait le nombre de gens poursuivis par les impôts, c'était tout en haut de la grande affiche sur les bus. (Remarque. Le président agite la cloche.)

Beaucoup de gens souhaiteraient même aujourd'hui, dans les milieux modestes - des gens qui n'ont pas une extraordinaire maîtrise des choses compliquées ou du français, à voir - qu'on les protège contre eux-mêmes, si on veut. (Remarque.) C'est vrai. Je pense aussi qu'il vaut la peine d'avoir un système, le cas échéant, qui rapporterait 60 millions à l'Etat, parce que nous avons en permanence 2 milliards dehors. Nous avons 2 milliards de créances fiscales, et il y a cinq ans c'était 4 milliards, mais nous arrivons maintenant aux limites de l'amélioration du système de perception et des interventions plus rapides et plus dures.

Voilà pourquoi je pense qu'il n'est pas absurde que vous preniez le temps de voir, à l'occasion d'une commission fiscale, cette proposition d'initiative.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission fiscale. Je vous la soumets.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 618 à la commission fiscale est adopté par 60 oui contre 19 non.

PL 10171-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier le projet de loi de MM. Eric Stauffer, Henry Rappaz, Roger Golay modifiant la loi sur l'instruction publique (C 1 10)
Rapport de majorité de Mme Esther Hartmann (Ve)
Rapport de minorité de M. Jean-François Girardet (MCG)
PL 10262-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'instruction publique (C 1 10) (adaptation à l'évolution de certaines fonctions dans l'enseignement primaire)
Rapport de Mme Esther Hartmann (Ve)

Premier débat

Le président. Nous continuons notre ordre du jour avec le département de l'instruction publique, de la culture et du sport. Nous avons à traiter de manière conjointe les rapports PL 10171-A et PL 10262-A. Je prie les rapporteurs de bien vouloir venir à la table. Le rapporteur de minorité entend-il ? (Commentaires. Un instant s'écoule.) La table des rapporteurs, en général, c'est celle qui est au milieu, Monsieur Girardet ! La parole est à Mme le rapporteur de majorité Esther Hartmann.

Mme Esther Hartmann (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. L'objet que nous allons traiter - le projet de loi 10171, proposé par le Mouvement Citoyens Genevois - avait le mérite d'exister en 2007 mais point celui d'exister actuellement, vu que la situation, depuis le dépôt de ce projet de loi, a grandement évolué.

Pour faire un résumé des buts de ce projet de loi, il proposait à l'époque, en 2007, une réorganisation du système scolaire. Il demandait que les différents établissements... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...soient réunis en circonscriptions scolaires et que des inspecteurs - qui existaient déjà à l'époque - soient responsables de la gestion du personnel, de l'administration et des moyens pédagogiques mis en oeuvre, avec comme soutien pour ces inspecteurs des maîtres adjoints pour s'occuper uniquement de l'aspect administratif des écoles.

Depuis, les choses ont bien changé, et il existe actuellement 91 directeurs d'établissements. Les inspecteurs ont disparu, la fonction de maître adjoint a également été supprimée, à la grande satisfaction des parents qui, enfin, ont des interlocuteurs beaucoup plus facilement accessibles. Cela a aussi le mérite d'avoir une hiérarchie clairement établie et un suivi beaucoup plus précis des situations.

C'est pour cela que la majorité de la commission de l'enseignement a décidé de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, car elle le considère comme dépassé et plus adapté à la réalité actuelle. Nous vous enjoignons donc de ne pas entrer en matière. Merci beaucoup.

Le président. Merci, Madame le rapporteur de majorité. La parole est à M. Jean-François Girardet, rapporteur de minorité.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, si le MCG a déposé un projet de loi en 2007, c'était parce qu'il répondait à une situation qui devenait urgente. Et si je me suis inquiété tout à l'heure du point 49 qui a été, semble-t-il, retiré de l'ordre du jour - j'avais sauté cette étape - c'est que le rapport de Mme Marie Salima Moyard concernait précisément un projet de loi libéral et une motion qui nous parlaient de l'autonomie des écoles, de l'autonomie des établissements primaires mais également de l'autonomie des établissements secondaires. Et c'est dans le cadre de cette discussion sur ces projets de lois libéraux que le chef du département a saisi l'occasion pour informer sur l'avancée des travaux concernant la réorganisation du primaire. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) M. le député Weiss a déposé une interpellation urgente écrite le 3 mai 2007, qui s'inquiétait quant aux montants qui seraient octroyés pour cette réorganisation du primaire. Il posait également la question de savoir quand le Conseil d'Etat entendait mettre en oeuvre par une loi les modifications légales qui s'imposaient.

Le Conseil d'Etat répond à ce propos, le 24 mai 2007, que la LIP - la loi sur l'instruction publique - devra seulement être adaptée par un simple toilettage. Alors la commission ne s'inquiète pas de cette rénovation, de cette réforme, de cette modification de l'organisation du primaire. Et elle ne réagit pas, alors qu'il semble que des frais, des coûts induits, vont être engagés.

La commission est informée les 21 et 28 novembre 2007 par mail, et elle reçoit ensuite tous les documents pour savoir que le processus de rénovation - enfin, de reconstruction - de l'organisation du primaire est en cours. Il y a même un appel d'offres qui est lancé le 23 novembre 2007 pour que les cent directeurs puissent être engagés.

Il n'y a aucune base légale à cela, il n'y a aucun cahier des charges qui a été soumis. Il y a simplement l'affirmation péremptoire du Conseil d'Etat qui dit que la réorganisation est de sa compétence. Or l'article constitutionnel...

Le président. Il vous reste quinze secondes, Monsieur le député !

M. Jean-François Girardet. Oui, je vous remercie. L'article 161 de la constitution nous dit ceci pour l'instruction publique: «La loi règle l'organisation des établissements d'instruction publique qui sont en tout ou en partie à la charge de l'Etat. Ces établissements forment un ensemble qui comprend: a) l'enseignement primaire», etc. Donc c'est bien une loi...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Jean-François Girardet. Et la loi, elle est faite par ce Grand Conseil. C'est ce sur quoi les députés n'ont jamais voulu entrer en matière.

Mme Marie Salima Moyard (S). Une loi de toilettage ou de mise en conformité avec la réalité et un projet de loi n'ayant pratiquement plus d'objet, voilà les objets liés de ce nouveau point à l'ordre du jour.

Le projet de loi 10262 du Conseil d'Etat permet l'ancrage légal, dans la loi sur l'instruction publique, d'une pratique établie depuis presque trois ans. Les inspecteurs seraient maintenant supprimés de la LIP, alors qu'ils n'existent plus dans la réalité depuis 2008, et entreraient à leur place les directeurs d'établissements primaires. Pourquoi ce changement ? Pour une meilleure gestion, ce qui était l'un des buts du précédent PL 7552 qui a été finalement retiré.

Tout se fait au rythme institutionnel, et c'est peut-être un peu lent, effectivement. Mais c'était nécessaire dans le cadre de l'harmonisation et du PER notamment. Le PL 10262 est donc une excellente chose.

A l'inverse, le projet de loi 10171 du MCG proposait ou propose toujours une autre solution que les directeurs d'établissements pour résoudre la question de la gestion des établissements primaires. Il propose de conserver les inspecteurs, mais en les déchargeant avec de petites circonscriptions et des maîtres adjoints. C'est un projet de loi qui est obsolète à ce jour et incompatible avec le projet du Conseil d'Etat.

Dans la présentation de ce projet de loi, une remontrance a été faite - qui était assez bien argumentée - sur les relations peut-être un peu chaotiques entre le Grand Conseil et le Conseil d'Etat quant à la chronologie de la prise de décision dans le processus de nomination de ces directeurs.

Mais la vraie question n'est pas là. La vraie question, c'est maintenir les inspecteurs ou mettre en place des directeurs d'établissements primaires. Et là, il n'y a absolument aucun doute possible.

C'est pour cela que le groupe socialiste vous propose d'accepter le projet de loi du Conseil d'Etat tel que ressorti des travaux de commission et de refuser l'entrée en matière sur le PL 10171. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme la rapporteure de majorité Esther Hartmann, à qui il reste une minute dix.

Mme Esther Hartmann (Ve), rapporteuse de majorité. Merci beaucoup, Monsieur le président. J'interviens juste pour vous dire que nous vous recommandons évidemment d'entrer en matière et d'accepter le projet de loi 10262, ce que j'ai oublié de signaler, je m'en excuse. C'est aussi pour remercier le Conseil d'Etat d'avoir fait son travail, c'est-à-dire permettre que les écoles fonctionnent efficacement, permettre de faire face aux grandes réformes qui se profilent et au programme d'enseignement romand - HarmoS, si jamais le rapporteur de minorité s'en souvient - et puis pouvoir aussi être à l'écoute des différents courants, syndicats, associations de parents, avec en plus les différents résultats de recherches, pour arriver à proposer que des directeurs d'établissements existent.

Quand on entend que ce Conseil d'Etat n'a pas respecté la constitution, on ne peut que s'inquiéter de la compréhension des personnes qui souhaitent être à l'exécutif et qui ne se rendent pas compte que le Conseil d'Etat, comme tout siège exécutif, a précisément pour rôle de rendre les lois opérationnelles.

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !

Mme Esther Hartmann. C'est pour cela que je vous réitère notre proposition de ne pas entrer en matière sur le projet de loi 10171.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de minorité. Alors, quels sont les reproches que fait le MCG à cette nouvelle organisation ? Tout d'abord, qu'elle coûte très cher: de 27 inspecteurs, on est passé à une centaine, 93 exactement, qui ont passé eux-mêmes de la classe 21 à la classe 25. On a encadré les enseignants alors que, comme le disait un député Vert, on a surtout voulu raccourcir la laisse - selon cette expression utilisée par le député Vert.

L'autonomie des écoles a été réduite, dans la mesure où les inspecteurs pouvaient, auparavant, gérer un plus grand effectif qui était dans leur juridiction. Les tâches exercées par le maître principal ne sont plus assumées autrement que par des gens qui ont été désignés mais dont la rétribution n'est pas à la hauteur de leur charge. Il y a également un échelon de direction qui a été rajouté avec les directeurs de région, ce qui induit aussi des découragements dans les équipes d'enseignants parce qu'on ne leur fait plus confiance, tout est contrôlé. La proximité des directeurs fait qu'on a toujours quelqu'un sur le dos, et ce n'est jamais bien agréable de sentir qu'on ne nous fait plus confiance. On ne fait plus confiance aux enseignants, dans la mesure où ils n'ont plus cette liberté qu'ils avaient auparavant.

Le MCG regrette que la demande d'audition des membres de l'ARLE ait été refusée par la commission. En effet, l'ARLE avait également de grandes idées à faire partager à la commission. La commission a refusé cette audition, ce que je trouve absolument inadmissible.

Par fair-play, ce soir, le MCG ne s'opposera pas au projet de loi du Conseil d'Etat, parce qu'il estime également qu'il faut répondre par l'adoption d'une loi afin que ces directeurs qui ont été nommés depuis juin 2008 puissent fonctionner dans la parfaite légalité. En effet, jusqu'à présent, Madame la rapporteure de majorité, ils étaient dans la parfaite illégalité. Je vous remercie.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite d'abord remercier la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport pour le travail qui a été réalisé autour de la question de la gestion des établissements publics de l'enseignement obligatoire et particulièrement de l'enseignement primaire.

J'aimerais, si vous me le permettez, peut-être préciser un certain nombre de points qui me semblent être relativement importants. Monsieur le rapporteur de minorité, je souhaite juste corriger quelque chose que vous avez dit - qui est factuellement erroné, approximatif - puisque, tout simplement, les inspecteurs et inspectrices de l'enseignement primaire n'étaient pas en classe 21 mais bien en classe 22, et les directions d'établissements ne sont pas en classe 25 mais en classe 24. Cela fait que, au lieu de quatre différences de classe, il y en a deux. Mais, évidemment, le sens de l'exagération vous a sans doute dépassé, et bien entendu je ne vous en fais pas grief.

Maintenant, ce que j'aimerais néanmoins pouvoir affirmer tout à fait solennellement et clairement, c'est que le Conseil d'Etat n'a pas violé la constitution, il a usé d'une de ses libertés. En effet, il s'agit, selon la constitution, de rendre le gouvernement responsable de l'organisation de l'administration. Alors, vous avez raison, la loi devait être modifiée, c'est une loi qui mérite d'être toilettée. Elle l'est ce soir, et je tiens à saluer le fair-play dont vous affirmez être aujourd'hui le témoin pour le groupe MCG.

J'aimerais en même temps, sur le fond, vous dire que les directions d'établissements, aujourd'hui, sont pratiquement soutenues par l'ensemble des enseignantes et enseignants, tant il est évident - du point de vue de la gestion, de la proximité, de la rapidité de réaction, du point de vue, également, de la capacité à prendre en charge un certain nombre de problèmes qui touchent à la fois aux relations avec les parents mais aussi à la gestion de parcours difficiles d'élèves - qu'ils sont là et qu'ils assument pleinement leurs responsabilités. Et je tiens à leur rendre hommage: ils sont de véritables petits David Hiler dans chaque établissement... (Exclamations.) ...rappelant la raison, rappelant l'équilibre, sachant rassembler les conseils d'établissements autour d'un certain nombre de points qui relèvent très exactement de l'autonomie, de la capacité de vivre ensemble et de prendre des décisions. En conclusion, je vous remercie de faire bon accueil à ce projet de loi. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes en procédure de vote sur le PL 10171.

Mis aux voix, le projet de loi 10171 est rejeté en premier débat par 61 non contre 15 oui.

Le président. Nous sommes toujours... (Exclamations.) Si, si, nous sommes toujours en procédure de vote, cette fois concernant le PL 10262.

Mis aux voix, le projet de loi 10262 est adopté en premier débat par 64 oui et 14 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 3B, alinéa 2, lettre b (nouvelle teneur).

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat à l'article 7D «Personne morale» (nouveau), par lequel cet article 7D devient l'article 7E «Personne morale» (nouveau). Je vous en rappelle la teneur: «Chaque établissement scolaire constitue une personne morale capable de recevoir des dons ou des legs, avec l'autorisation du Conseil d'Etat.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 61 oui et 18 abstentions.

Mis aux voix, l'article 7E (nouveau) est adopté, de même que l'article 46 (abrogé).

Le président. Nous sommes maintenant saisis d'un amendement du Conseil d'Etat consistant à biffer l'article 139 «Commission de nomination» (nouveau), lettres b et d (nouvelle teneur).

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui et 20 abstentions.

Mis aux voix, l'article 143 (nouvelle teneur) est adopté, de même que l'article 144 (nouvelle teneur).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 10262 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10262 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 1 non et 16 abstentions.

Loi 10262

PL 10434-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Jacques Follonier, Frédéric Hohl, Gabriel Barrillier, Michel Ducret, Claudine Gachet, Patricia Läser, Charles Selleger, Louis Serex modifiant la loi sur l'instruction publique (C 1 10) (Pour le respect, l'intégration et la sérénité à l'école publique)
Rapport de majorité de Mme Marie Salima Moyard (S)
Rapport de minorité de M. Charles Selleger (R)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes au point 52. La température est très agréable dans la salle... (Exclamations.) ...nous allons donc faire tourner l'horloge, comme ça vous ne pourrez pas vous plaindre. (Rires. Remarque.) Je vous en prie, Madame, bon retour chez vous !

Madame le rapporteur de majorité Marie Salima Moyard, vous avez la parole.

Mme Marie Salima Moyard (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. De fausses solutions à de vraies problématiques qui sont déjà bien prises en main par le département, voilà comment on pourrait résumer le PL 10434, qui va nous occuper - je l'espère - très rapidement et dans la sérénité la plus complète.

Ce projet de loi modifie trois articles de la LIP sur trois thématiques fort différentes, et ça lui a été amplement reproché en commission. Il contient des propositions d'une part pour une meilleure intégration des élèves étrangers, et d'autre part pour améliorer le rôle et l'attitude des parents face à l'école. Enfin, il y a des propositions pour instaurer un cadre plus strict pour les élèves à l'école. Ce sont évidemment des buts louables, mais les moyens pèchent et ne résolvent en fait rien du tout. C'est ce que d'amples discussions avec le département et l'audition de toutes les associations professionnelles et parentales ont montré.

Brièvement, sur ces différents points, au niveau de l'intégration des élèves étrangers... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Merci, Monsieur le président ! ...beaucoup de choses sont déjà faites, certains cours gratuits de langue maternelle sont payés par le DIP si cela est possible. Le projet de loi demande de généraliser cela comme une garantie ou comme une possibilité - ce n'est pas clair; il existe déjà un certain nombre de possibilités, et on ne sait pas très bien comment le projet de loi se situe par rapport à cela.

D'autre part, il y a une proposition de cours sur le fonctionnement de l'institution scolaire pour les parents migrants. On pourrait se demander pourquoi eux seulement. Cela a été évoqué comme quelque chose de discriminant par la commission, avec une corrélation possible avec les questions d'incivilités, ce qui nous paraissait assez douteux. Ce ne sont en général pas les parents les plus problématiques. Il faudrait faire cela pour tout le monde ou alors pour personne, et le mémento qui existe déjà actuellement à l'usage des parents est fort bien fait et très utile.

Il y a une proposition de formation des enseignants à l'interculturalité, mais cela fait déjà partie de la formation de base.

En ce qui concerne l'amélioration du rôle et de l'attitude, ou de la compréhension du rôle des parents face à l'école, l'article en question du projet de loi relève du voeu pieux; et s'agissant de savoir comment ensuite on le met en oeuvre, cela reste fort vague.

La formation des enseignants à la gestion des conflits, voilà encore une chose qui est déjà abordée en formation initiale des enseignants et qui peut être améliorée, renforcée dans l'offre de formation continue.

Enfin, sur le cadre plus strict supposément mis en place pour les élèves à l'école, avec un code vestimentaire minimal édicté par le Conseil d'Etat, on se demande bien comment ce dernier fera et selon quels critères. Cela paraît extrêmement compliqué. Il y a déjà des choses au niveau des règlements des différentes écoles, une certaine souplesse est peut-être à garder, et les enseignants - ne l'oublions pas - ont valeur de modèle sur ce point-là.

Le projet de loi mentionne aussi les appareils électroniques, qui devraient être interdits. L'interdiction de leur utilisation est déjà effective, même si leur détention est toujours autorisée. En plus, c'est extrêmement difficile à faire respecter, et ce projet de loi ne changera absolument rien à la chose.

Des travaux de remise en état sont également proposés en cas de déprédations. Ce sont des mesures qui sont déjà en cours. C'est une excellente chose en théorie, il faut juste savoir qu'au niveau de la mise en place c'est extrêmement lourd, en termes d'investissement humain, et compliqué. Dans ce sens-là, une modification récente du règlement sur les sanctions vient d'être faite et va renforcer cet aspect.

Il y a également le retour de la note de comportement, qui avait été exclue dans le projet de loi 10176 dont on a eu l'occasion d'évoquer l'existence pas plus tard qu'au dernier point des urgences ce soir. Il est donc étonnant de revenir avec cela sur un projet que les radicaux, pourtant, soutenaient. La note de comportement est prise en compte pour les redoublements, tant au CO qu'au PO, c'est donc un aspect...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !

Mme Marie Salima Moyard. Je conclurai, Monsieur le président, en disant que toutes les auditions ont concouru à la même appréciation que celle de la commission: les problèmes soulevés sont bien réels, les réponses apportées sont mauvaises, peu adaptées et ne règlent rien. Le DIP a déjà l'affaire bien en main, il y a besoin de souplesse sur le terrain, il faut agir selon les différents niveaux. Et la meilleure méthode pour cela, c'est encore d'allouer des moyens supplémentaires pour un meilleur suivi et un meilleur encadrement des élèves, c'est ce qui a été dit par plusieurs auditionnés.

C'est dans ces conditions que la majorité de la commission...

Le président. Il vous faut vraiment finir, Madame la députée !

Mme Marie Salima Moyard. ...vous propose de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi...

Le président. Madame la députée !

Mme Marie Salima Moyard. Et je vous propose de le faire maintenant, en refusant l'entrée en matière de ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à M. le rapporteur de minorité Charles Selleger.

M. Charles Selleger (R), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Quand on a un chien dont on veut se débarrasser, on prétend qu'il a la rage. Les propos de la rapporteuse de majorité sont vraiment exemplaires de la démission d'une enseignante face aux réels problèmes qu'elle reconnaît elle-même être soulevés par le thème de ce projet de loi.

J'aimerais rappeler qu'il est vrai que nous avons reçu le reproche que ce projet de loi était hétéroclite, et Mme la rapporteuse l'a signalé en tout premier. C'est vrai, il est hétéroclite, et l'auteur principal de ce projet de loi s'en explique dans son exposé des motifs auquel je vous renvoie. Mais tout cela ne constitue que des questions de forme. Il est plus intéressant de s'attacher au fond.

Ce projet de loi se décline en trois axes. Il concerne l'intégration des étrangers - en particulier des allophones - les relations entre les enseignants et les parents et, enfin, il s'occupe du comportement et de la discipline. Nos préoccupations répondent à une vraie problématique qui a bien été mise en évidence, par exemple, dans le rapport Papart sur la santé des enseignants, rapport qui est cité dans l'exposé des motifs et qui date de 2003 déjà, mais aussi - c'est plus important, et c'est en tout cas plus récent - par les milieux enseignants, que ce soit du primaire ou du secondaire, qui ont été auditionnés et qui tous ont relevé la pertinence de renforcer les règles de discipline et de comportement.

L'entrée en matière a été refusée par l'ensemble des autres formations politiques. Cela traduit à mon avis une manière de démission par rapport à des problèmes difficiles à résoudre. Notre projet de loi est peut-être maladroit, j'en conviens, il n'est peut-être pas assez élaboré. Mais le rôle d'une commission parlementaire n'est-il pas justement de se saisir des vrais problèmes et de les résoudre avec l'aide du département ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Et c'est particulièrement normal, dans le sens où nous sommes des miliciens - nous ne sommes pas des professionnels - et que nous avons besoin d'un appui légistique.

Nous vous proposons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer ce projet de loi en commission afin d'étudier - comme nous l'avons demandé déjà - un amendement général et de rendre ce projet de loi pertinent par rapport aux vrais problèmes qu'il aborde. (Applaudissements.)

Le président. Monsieur le rapporteur de minorité, souhaitez-vous que l'on vote tout de suite le renvoi en commission ?

M. Charles Selleger. Ce sera à vous de décider, Monsieur le président. (Commentaires.)

Le président. Courageux mais pas téméraire ! Très bien, dans ce cas-là, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10434 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 35 non contre 29 oui et 2 abstentions.

M. Jean Romain (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis assez soufflé d'entendre la logorrhée de la rapporteuse de majorité - car on a bien fait de l'arrêter... En effet, elle était d'accord pratiquement sur tout, et la conclusion était que, en fait, puisque le projet de loi était morcelé - ce qui est vrai - il fallait, sans autre forme de procès, ne pas entrer en matière ! Je rêve, Mesdames et Messieurs les députés ! (Exclamations.) Je suis en plein délire !

Ecoutez... (Commentaires.) Lorsqu'un projet de loi nous dit tout simplement que les parents ne font pas ce qu'ils doivent à l'école, pour l'école, avec leurs enfants, lorsqu'un projet de loi parle d'un code vestimentaire, lorsqu'un projet de loi parle de la déprédation des bâtiments... C'est hallucinant, parce que c'est évidemment ce qui se passe ! Et, sous prétexte que c'est hétéroclite et qu'il y a plusieurs points à traiter, on pense que ce côté-là doit être, du revers de la main, rejeté. Je vous mets au défi d'entrer dans n'importe quelle école, de voir les graffitis qu'il y a... (Commentaires.) Je vous mets au défi, Mesdames et Messieurs, de vouloir travailler dans des locaux comme les nôtres ! (Remarque.) C'est une horreur et... Je peux continuer, Monsieur le député, ou bien je vais être en butte à vos lazzis encore longtemps ? (Le président agite la cloche.) Ce que je veux dire, c'est qu'il y a bel et bien quelque chose qui ne va pas à l'école. Et évidemment qu'on fait un travail...

Une voix. Tout fout le camp !

M. Jean Romain. Mais non, ce n'est pas que tout fout le camp... Lorsque vous allez dans un autre canton et que vous allez voir comment sont traités les meubles - ne serait-ce que les meubles, je ne parle pas des murs - vous avez le sentiment que quelque chose se passe et que ce n'est pas exagéré d'oser demander à ces pauvres petits de respecter ce que l'Etat met à leur disposition. (Remarque.)

«Les profs crient au secours.» Voilà ce que nous a dit le président du syndicat de la FAMCO. «Les profs crient au secours.» Je pense qu'une note de comportement, ce n'est pas le monde à l'envers. Une note de comportement, c'est simplement demander à quelqu'un d'être noté... (Remarque.) Si, c'est l'objet ! Il y a un comportement, et une note de comportement est nécessaire.

Qu'est-ce qu'on nous dit ? On nous dit qu'il faut des moyens supplémentaires, c'est le leitmotiv. Bien sûr qu'il faut des moyens supplémentaires ! Mais le moyen dont nous avons besoin, c'est de reprendre le risque de déplaire à toute une jeunesse qui s'est installée chez nous et à qui on a appris, peu à peu, l'impunité.

Je suis d'accord avec le rapporteur de minorité et je demande que ce projet de loi soit renvoyé en commission, si c'est encore possible.

Mme Christina Meissner (UDC). Je lis l'article 4D, alinéa 1: «Dans la mesure du possible, le département garantit aux élèves allophones la possibilité de bénéficier d'un enseignement gratuit de leur langue maternelle en dehors des heures de cours.» Il faudrait déjà qu'ils apprennent le français, et qu'on laisse aux parents le soin de s'occuper effectivement d'enseigner à leurs enfants ce qui est pertinent, leur culture. C'est ce que mes parents ont fait, et j'ose espérer que ça ne se perdra pas.

Certes, il y a de bonnes choses dans ce projet de loi - le respect mutuel, le code vestimentaire minimal à respecter - mais il mélange ce qui relève de la vie en société, du code de conduite dans un établissement public, et ce qui relève de la sphère privée. Il mélange tout, il est maladroit. Et je ne peux que suivre ce que propose le rapport de majorité, à savoir le refus de ce projet de loi.

Ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire, bien au contraire. Vous avez raison, il y a fort à faire... (Exclamations.) ...mais ne mélangez pas tout, de grâce ! Refaites quelque chose de sensé, proposez quelque chose qui ne mélange pas la sphère publique, l'éducation... Ça n'est pas possible !

Nous ne pouvons pas accepter un projet de loi aussi mal ficelé, et nous le refuserons.

Une voix. Bravo Christina !

Mme Esther Hartmann (Ve). Ce projet de loi est vraiment un patchwork. Et si nous sommes tout à fait conscients qu'il y a parfois des situations de violence et que des enseignants peuvent se sentir dépassés et pas suffisamment soutenus lorsque ces situations de violence se mettent en route, nous ne sommes pas convaincus que ce projet de loi puisse réellement répondre à ces problématiques.

Nous sommes également assez surpris, parce que ce projet de loi, qui se veut aussi généreux, propose une meilleure intégration des élèves allophones avec justement des cours gratuits afin d'améliorer leur propre connaissance de la langue... Nous sommes convaincus de la pertinence de cette mesure, mais nous sommes très étonnés de la position de ces groupes quand des propositions très concrètes viennent du Conseil d'Etat dans le but de rendre ces mesures existantes. Ces dernières sont en effet déjà proposées en partie.

Nous sommes aussi un peu surpris par rapport au code vestimentaire. Le code vestimentaire décent, comment allez-vous le définir, Mesdames et Messieurs les députés ? Est-ce qu'avoir une cravate rouge ou une cravate jaune va être mesurable ?

Une voix. Orange !

Mme Esther Hartmann. Ou orange, oui. Ce sont effectivement des questions fondamentales, mais je doute que nous puissions vraiment déterminer ce qui est décent et indécent selon les valeurs que nous pourrions avoir. Effectivement, quelqu'un qui se promène très dénudé en ville va peut-être avoir un problème, mais quelqu'un qui, par exemple dans un pays voisin, est un peu trop habillé rencontre le même problème. Comment juger effectivement de la tenue vestimentaire des gens ? C'est un très grand point d'interrogation, qui explique aussi pourquoi les Verts vont refuser d'entrer en matière sur ce projet de loi. Merci beaucoup, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a eu au moins un mérite, celui de permettre de discuter en commission de la réalité concrète du terrain, aujourd'hui dans l'école genevoise, en lien avec les différents aspects évoqués par ce projet de loi. Et je crois que, pour tous ceux qui ont participé à ces discussions, il a été possible de prendre conscience que, si certains problèmes sont bien réels, des réponses ont d'ores et déjà été apportées; et à satisfaction, contrairement à ce qui a été dit, d'une bonne partie du corps enseignant, notamment du cycle d'orientation, que l'on stigmatise souvent par rapport à un certain nombre de problèmes évoqués dans ce projet de loi.

Ce travail nous a également permis de voir que certains aspects doivent, certes, trouver des réponses, mais pas forcément au niveau de la législation, plutôt sur le plan réglementaire. Et un certain nombre de dispositions doivent être affinées à ce niveau-là, c'est vrai.

Maintenant, je crois que - il faut aussi le dire et le rappeler, et ça a été relevé - ce projet de loi pose un problème fondamental, c'est son manque, et c'est le moins que l'on puisse dire, d'unité de matière. Effectivement, il part dans toutes les directions, et il n'est donc pas possible aujourd'hui d'aller de l'avant avec un tel projet de loi, ni même de le renvoyer en commission.

Certains parlent de la note de comportement. Je rappelle que - si j'ai bien compris et bien lu un certain nombre d'articles sur ce sujet - aujourd'hui une initiative a été lancée sur la réintroduction de la note de comportement. Je crois que le débat mérite d'être mené sur cette question, mais nous n'avons nul besoin de ce projet de loi pour le faire puisque cette initiative, j'imagine, aboutira et relancera le débat.

Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a donc permis de clarifier un certain nombre de points sur les questions de comportements, d'attitudes des élèves, certes inacceptables pour une minorité d'entre elles. Des réponses ont été apportées, des conseils de discipline ont été institués et fonctionnent à satisfaction, cela a été démontré récemment. Je crois qu'il n'y a donc pas matière aujourd'hui à crier à la destruction de l'école genevoise, je dirai, ou à jeter le discrédit sur celle-ci.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien vous recommande de rejeter ce projet de loi.

M. Jean-François Girardet (MCG). Le groupe MCG aurait aimé pouvoir voter pour chacune des propositions de ce projet de loi. En effet, il en est qui sont peut-être désuètes, peut-être dépassées, mais par contre - comme vient de le rappeler le député Gillet - la problématique concernant la note de comportement n'est absolument pas résolue. On aurait pu la résoudre en renvoyant ce projet de loi en commission, avec un amendement général, et en reprenant éventuellement uniquement la question de la note de comportement. Cette question fait actuellement l'objet d'une initiative qui est en pleine période de récolte de signatures.

On peut redemander le renvoi en commission, mais je crois qu'on a voté contre ce renvoi... Si c'est une proposition qui peut être faite, je la soutiendrai comme vient de le faire le député Romain. (Commentaires.) Je fais donc cette proposition de renvoi en commission. (Brouhaha.)

M. Charles Selleger (R), rapporteur de minorité. Tout à l'heure, j'ai dit en préambule que, quand on veut se débarrasser de son chien, on prétend qu'il a la rage. C'est exactement ce que vient de faire Mme Hartmann en prétendant qu'on ne pouvait pas décider si les cravates jaunes étaient plus appropriées que les cravates rouges. Je crois qu'elle n'a jamais vu les enfants qui se promènent dans les préaux d'école avec des blue-jeans qui leur tombent sur la fente des fesses... (Exclamations.) ...avec des soutiens-gorge qui dépassent du tee-shirt, etc. (Brouhaha.) Donc, c'est vrai, si on ramène cela à la couleur des cravates, je comprends qu'elle soit un peu ahurie face à nos propositions !

Maintenant, il ne s'agit pas de savoir si l'école est détruite, Monsieur Gillet, si elle est détruite par le manque de comportement. Il s'agit de relire - peut-être ne l'avez-vous pas relu - le rapport Papart qui date de 2003, je l'ai dit, et qui relève l'excès de consommation de tranquillisants, l'excès d'alcoolisme dans les milieux des enseignants, et je passe sur les autres pathologies qui y sont décrites. On est face à un réel problème. Maintenant, si personne ne veut le voir, ça rejoindra ce que je disais: quand on veut se débarrasser de son chien, on prétend qu'il a la rage.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, d'abord - si vous me le permettez - j'aimerais une fois de plus remercier la commission pour son travail. Le travail a été - je pense pouvoir le dire - sérieux, d'après l'ensemble des informations, et je crois que le rapport de majorité est là pour le relever. J'aimerais du reste féliciter la rapporteuse de majorité.

Je souhaite préciser également que le travail qui a été engagé au sein du département de l'instruction publique depuis des années consiste, comme vous le savez, à travailler sur de multiples axes. En l'occurrence, le projet de loi souligne tout un certain nombre d'axes sur lesquels le travail est important aujourd'hui, axes sur lesquels tout un certain nombre de décisions ont été prises et ont permis évidemment d'avancer dans le bon sens.

Si vous le permettez, j'aimerais notamment signaler le fait - cela a été relevé par M. le député Gillet, et je tiens à l'en remercier - que votre Grand Conseil a décidé, pour les cas les plus graves de comportement, de mettre sur pied, par une loi et maintenant par un règlement du Conseil d'Etat, un conseil de discipline qui a d'ores et déjà statué. Il a d'ores et déjà statué par rapport à des cas qui ont défrayé la chronique, et il a été tout à fait à la hauteur de la tâche; il n'a pas été cassé - exploit - par le Tribunal administratif et en plus n'a pas été remis en cause par les médias ou l'ensemble des commentateurs qui ont eu l'occasion de s'exprimer sur les différentes sanctions prises par le conseil de discipline.

Mesdames et Messieurs les députés, ne faisons pas comme si le travail n'avait pas été engagé, comme si vous n'aviez pas non plus d'ores et déjà pris le taureau par les cornes, notamment en adoptant tout un certain nombre de lois, de règlements. Ils sont importants mais ne changent pas la vie, ils délèguent au contraire la responsabilité à nombre d'acteurs de la fonction publique pour l'incarner, pour lui permettre de vivre dans le concret, dans le quotidien des relations.

Monsieur le député rapporteur de minorité, j'aimerais vous préciser, puisque vous l'avez bien lu, que le rapport Papart de 2003 auquel vous faites allusion met en évidence, tout particulièrement en ce qui concerne les solutions - et je tiens à vous remercier également du vote de votre groupe tout à l'heure - la nécessité de pouvoir compter sur des directions de proximité. Le principal point d'arrivée du rapport Papart était justement de proposer des directions d'établissements, et je pense que, dans ce sens, nous avons également progressé. Et nous avons progressé ensemble: encore une fois, je tiens à vous en remercier puisque nous venons de le faire tout à l'heure à travers le vote qui concernait les directions d'établissements.

Enfin, vous me permettrez de conclure en disant que, non seulement la question de la tenue correcte est importante, mais elle doit en même temps mettre en évidence le fait que la tenue correcte ne relève pas que du débat de l'absurde. Elle relève très directement d'un travail important au quotidien... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des directions d'établissements, des enseignantes, des enseignants, qui prennent des décisions sur la base des règlements, sur la base des directives qui, justement, réclament - à l'instar de l'interdiction des téléphones portables dans les établissements - que l'on se tienne correctement avec des tenues appropriées.

Tout un certain nombre de décisions sont prises, et je tiens aussi à relever la sagesse, également, des propositions qui ont été faites à travers le projet de loi. A défaut de représenter une unité de matière, ce projet de loi représente des champs investis, sans pour autant sombrer dans le populisme, par exemple en voulant instituer une laïcité à bon marché qui se règle à coups de décimètres, de centimètres, pour mieux mesurer, tout simplement, telle ou telle tenue vestimentaire.

Faisons confiance à l'autorité, elle en a besoin, à tous les niveaux. Je pense bien entendu aux directions générales et aux directions d'établissements. Mais je pense principalement aux enseignantes et aux enseignants qui sont mieux soutenus aujourd'hui parce que nous avons institué, dans chaque cas d'agression, dans chaque difficulté, un soutien permanent du département.

Dernier élément - Monsieur le président, je vous ai promis d'être bref - une phrase pour dire que ce dont nous avons besoin également, c'est de plus de régularité dans l'école et dans les horaires scolaires. Et je pense que c'est aussi un excellent moment pour nous dire que nous aurons besoin prochainement de voter également dans le même sens, c'est-à-dire pour un mercredi matin à l'école... (Exclamations. Applaudissements.) ...qui est une véritable mesure pour l'école et la discipline !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes en procédure de vote. Le premier vote concerne la demande, faite par plusieurs d'entre vous, d'un renvoi à la commission de l'enseignement.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10434 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 41 non contre 28 oui et 2 abstentions.

Le président. Cette demande étant refusée, nous nous prononçons sur l'entrée en matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10434 est rejeté en premier débat par 46 non contre 10 oui et 12 abstentions.

PL 7552-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Janine Hagmann, Bernard Lescaze, Armand Lombard modifiant la loi sur l'instruction publique et portant sur l'autonomie des établissements scolaires et leur mise en réseau (C 1 1)
Rapport de Mme Marie Salima Moyard (S)
M 786-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Roger Beer, Yvonne Humbert, Armand Lombard sur l'autonomie des établissements scolaires de l'enseignement secondaire
Rapport de Mme Marie Salima Moyard (S)
Proposition de motion, débat et renvoi en commission: Mémorial 1992, p. 1953

Le projet de loi 7552 est retiré par ses auteurs.

La proposition de motion 786 est retirée par ses auteurs.

Le président. Nous allons donc maintenant passer au point suivant... (Exclamations. Un instant s'écoule.) Mesdames et Messieurs, bon retour chez vous et à bientôt !

Une voix. Monsieur Gautier, vous êtes un farceur !

La séance est levée à 22h55.