Séance du
vendredi 18 juin 2010 à
17h15
57e
législature -
1re
année -
9e
session -
44e
séance
La séance est ouverte à 17h15, sous la présidence de M. Guy Mettan, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger et Isabel Rochat, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Mark Muller, Charles Beer, David Hiler et Michèle Künzler, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Marcel Borloz, Mathilde Captyn, Prunella Carrard, Thierry Cerutti, Michel Forni, Florian Gander, Pierre Losio et Guillaume Sauty, députés.
Communications de la présidence
Le président. Comme nous sommes le 18 juin, je vais vous proposer une citation du général de Gaulle...
Des voix. Ah !
Le président. ...qui a dit ceci dans son discours du 12 septembre 1944: «Les grandes sources de la richesse commune doivent être dirigées et exploitées, non point pour le profit de quelques-uns mais pour l'avantage de tous. Il importe que les coalitions d'intérêts, qui ont tant pesé sur la condition des hommes et sur la politique même de l'Etat, soient abolies une fois pour toutes.» (Commentaires.)
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Nous passons au point 23... (Brouhaha. Remarque. Rire du président.) ...soit aux interpellations urgentes écrites.
Interpellations urgentes écrites
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Antoine Bertschy : Absence totale d'information sur le volume des transactions des enlèvements de véhicules (IUE-1006)
Interpellation urgente écrite de M. François Gillet : Compromis sur le stationnement et la mobilité à Genève : le Conseil d'Etat doit s'engager ! (IUE-1007)
Interpellation urgente écrite de M. Fabiano Forte : Nouvelle grille horaire du CO : comment le DIP entend-il préserver la qualité de l'enseignement de l'histoire et de la géographie ? (IUE-1008)
Interpellation urgente écrite de M. Ivan Slatkine : Fermeture de l'école des Minoteries. Rumeur ou réalité? (IUE-1009)
Interpellation urgente écrite de M. Michel Ducret : Stop aux escrocs du bonneteau (IUE-1010)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Charbonnier : Participation des résidents d'EMS et des patients à domicile aux soins de longue durée (IUE-1011)
Interpellation urgente écrite de M. Guillaume Barazzone : Nouvelle grille-horaire du CO : en finir avec le tabou des 32 heures ! (IUE-1012)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : Comment endiguer efficacement les "vagues symboliques" de grève de la fonction publique genevoise contre la fusion des caisses de pension ? (IUE-1013)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Charbonnier : Prolongation des 120 jours d'indemnités financières pour les chômeurs-euses genevois-es (IUE-1014)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Recrutement à la police : quelle organisation pour quels résultats ? (IUE-1015)
IUE 1006 IUE 1007 IUE 1008 IUE 1009 IUE 1010 IUE 1011 IUE 1012 IUE 1013 IUE 1014 IUE 1015
Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante.
Nous passons au point 32 de l'ordre du jour: proposition de motion 1925.
Débat
Le président. Je donne la parole à M. Hohl.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti radical, la sécurité doit rester une tâche régalienne de l'Etat - on est absolument d'accord avec cela. Je vous rappelle qu'il n'y a pas très longtemps nous avons appuyé une proposition de motion afin d'encourager, après le départ de l'armée qui s'occupait de la sécurité des ambassades, l'appel à des entreprises de sécurité privées pour effectuer cette tâche, sous la houlette et le contrôle de la police. Cette motion radicale va exactement dans le même sens. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, après l'opération Figaro - qui a un grand succès et qu'on remarque depuis quelques semaines dans les rues de Genève - nous savons également qu'il y a un bon recrutement au sein de la police genevoise. Mais elle a encore besoin d'effectifs, donc on aimerait pouvoir laisser cette possibilité-ci à notre conseillère d'Etat chargée de ce département: pouvoir, dans des cas spécifiques, faire appel à des sociétés de sécurité privées, sous la houlette et le contrôle de la police. Il s'agit de pouvoir décharger la police de certaines tâches, on va dire «administratives» ou autres, afin qu'elle puisse faire son travail dans la rue. C'est la raison principale de cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, que nous vous encourageons à renvoyer au Conseil d'Etat.
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le groupe démocrate-chrétien votera le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Notre groupe avait déjà soutenu une motion du groupe libéral, elle allait un peu dans le même sens, concernant les ambassades et les consulats, les représentations internationales présentes sur notre canton, suite à la défection de notre armée dans les tâches de surveillance.
Toutefois, nous aimerions donner un message très clair au gouvernement ce soir. Cela a été dit par mon collègue Frédéric Hohl, la sécurité fait partie des tâches régaliennes de l'Etat. Nous connaissons, nous savons et nous tenons à souligner les efforts qui sont faits actuellement en matière de recrutement, et je crois qu'ils commencent à porter leurs fruits. Mais dans cette période transitoire, il faut effectivement trouver des solutions, elles ne sont pas forcément satisfaisantes dans la conception qu'ont les démocrates-chrétiens des tâches de l'Etat.
Le message qu'on voudrait donner, c'est qu'il faut que l'encadrement qui sera donné à ces entreprises pour ces missions soit absolument clair, parce que nous ne voulons pas revivre ce qu'il s'est passé voilà quelques années lors d'une intervention au cours d'une manifestation sportive. C'était au stade de la Fontenette, à l'occasion d'un match durant lequel un agent de sécurité privé - d'une agence dont je tairai le nom - était intervenu sur un supporter d'une manière totalement inadéquate - et dieu sait si nous sommes attachés à la proportionnalité des interventions ! Le message que l'on veut donner au gouvernement, c'est qu'il faudra un encadrement très strict, faute de quoi on risque des débordements.
Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, dans la motion 1821, que mes préopinants ont évoquée tout à l'heure, le recours à des agents de sécurité privés a été autorisé pour assurer des tâches de planton devant les ambassades, ce seulement à titre provisoire, et jusqu'à ce que suffisamment d'assistants de sécurité soient engagés. Les auteurs de la motion 1925 entendent élargir cette exception aux interventions dans la rue, en prenant exemple sur l'engagement d'agents privés par des commerçants des Pâquis en 2009. Cela n'est pas acceptable pour les socialistes, malgré les déclarations des motionnaires sur le caractère exceptionnel que cette mesure doit avoir.
L'exercice de la force publique ne doit, par principe, être exercé que par des agents publics. Il est vrai que les effectifs de police sont insuffisants à l'heure actuelle et qu'il faut les renforcer au plus vite, notamment pour développer la police de proximité, créer des postes d'îlotiers dans tous les quartiers et maintenir ouverts 24h/24 les principaux postes de police, ces mesures étant les seules qui permettent d'assurer une meilleure sécurité. (Brouhaha.)
Toutefois, la seule solution acceptable pour pallier l'insuffisance actuelle des effectifs de police est la formation et l'engagement massif de nouveaux policiers et d'assistants de sécurité. Tous les efforts de l'Etat doivent donc aller dans ce sens, et non pas vers l'engagement d'agents privés.
Les socialistes s'opposent ainsi à cette motion et vous invitent à la refuser. (Brouhaha.) J'aimerais enfin ajouter que, afin de faciliter le recrutement de policiers et d'assistants de sécurité, les socialistes sont aujourd'hui favorables à l'engagement de détenteurs de permis C dans la police.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, le groupe MCG ne va pas soutenir les deux premières invites et va déposer un amendement concernant la troisième. Je m'explique: garantir la sécurité à nos concitoyens est une tâche de l'Etat, qui ne saurait la déléguer à des entreprises privées. Il faut être titulaire de la puissance publique pour assurer la sécurité et, une fois encore, il n'est pas question de donner à des agences privées - qui doivent intervenir sur la base de mandats privés - le droit d'agir pour assurer la sécurité de nos concitoyens. Il est donc impératif que cette tâche soit laissée à la police et que, pour qu'elle puisse effectivement l'assumer, tous les moyens soient mis en oeuvre. Les deux premières invites ne seront donc pas soutenues.
En ce qui concerne la troisième invite, vous savez que le groupe MCG a déposé un projet de loi actuellement à l'étude au sein de la commission judiciaire et de police. Ce projet demande que, pour les tâches qui requièrent l'exercice de la puissance publique, les personnes soient titulaires de la nationalité suisse. Cela a fait bondir certains, qui seraient bien inspirés d'aller voir ce qui se passe chez nos voisins. Vous pourrez constater qu'en France voisine - qui est un pays tout aussi civilisé que le nôtre et, sans doute, tout aussi ouvert à l'immigration que nous le sommes - eh bien, même les agents municipaux doivent être de nationalité française. Nous estimons - encore une fois - que, pour exercer des tâches de puissance publique, il faut être titulaire de la nationalité suisse.
Alors oui pour des permis C à l'engagement, mais, lorsqu'il y aura l'assermentation, il faut que ces personnes soient de nationalité suisse. Il faut donc qu'une demande de naturalisation soit en cours au moment de leur engagement. Un amendement a été déposé dans ce sens.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, ayons le courage de ne pas nous voiler la face au lieu de trouver de mauvaises solutions à des problèmes existants ! L'Union démocratique du centre sera toujours attachée à ce que l'exercice de la force publique sur les personnes ne se fasse que par de agents assermentés et agrémentés par l'Etat. Ne confondons pas les interventions et interpellations de personnes avec la protection des biens, la protection des stades, la protection des bijouteries, j'en passe et des meilleures.
Le problème, Mesdames et Messieurs, consiste à résoudre une délinquance dont l'amplitude est galopante, et pas simplement en disant qu'on va donner ces tâches «subalternes» - même si elles sont bien encadrées - à des organismes privés. Je rappelle que, quand cela va mal, c'est vous, c'est moi, c'est peut-être Mme la conseillère d'Etat qui doit en répondre devant le peuple. Un propriétaire ou le directeur d'une officine de sécurité privée pourra toujours vous rétorquer qu'avec l'aumône que vous donnez pour les prestations de ses hommes, il ne peut rien faire de mieux.
D'autre part, j'aimerais quand même aussi qu'on ait le courage, Mesdames et Messieurs les députés - et je regarde M. Hohl d'un air sceptique... Rappelons quand même que la police et les sécurités municipales sont très sélectives pour leurs agents, dans bien des domaines. Malheureusement, tous les gens qui sont recalés aux services de police finissent bien souvent dans ces officines. Est-ce là la garantie de qualité que vous entendez donner à nos citoyens, en permettant à ces officines de les interpeller ? Le groupe de l'UDC vous demande de rejeter purement et simplement cette motion.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, parfois, enfoncer les portes ouvertes est un sport dangereux, surtout quand on prend son élan... (Rires.) ...ce qui était un peu le cas ici, puisque cette motion date de novembre 2009 et qu'elle nous demande, d'une part, de confirmer une motion déjà votée - ce qui donne l'occasion à ceux qui sont contre l'entrée des permis C dans la police de le répéter - et, d'autre part, d'envisager le recours à des services de sécurité privés alors que l'Etat fait ça du matin au soir pour réaliser, précisément, les tâches prévues dans cette motion - qui n'ont rien à voir avec les interpellations de délinquants dans la rue ou que sais-je encore.
Evidemment, nous autres, libéraux, accueillions avec satisfaction et faveur le fait que l'on reconnaisse, en dépit du monopole dont l'Etat dispose en matière de sécurité publique, qu'il y a une place pour l'engagement de la sécurité privée, tout simplement parce que l'Etat, dans un très grand nombre de cas, agit exactement comme le ferait un propriétaire privé. On ne va pas utiliser des gendarmes pour s'assurer, la nuit, que personne n'entre dans un bâtiment de l'Etat; on ne va pas gaspiller des forces de police pour des tâches qui sont parfaitement remplies par des entreprises de sécurité privées - comme elles le sont dans un grand nombre de cas dans ce canton - que ce soit pour des propriétaires privés ou publics de bâtiments et d'installations.
En quelque sorte, cette motion nous demande de reconnaître cela, ce qui est déjà bien. Car parfois, dans ce parlement, on a l'impression qu'on nie même le fait que l'Etat est un grand consommateur de prestations de sécurité privée. Cette motion nous demande également d'encourager cela, et nous autres, libéraux, y sommes favorables, parce que, chaque fois que l'on peut effectivement relever un policier d'une tâche pouvant parfaitement être assumée par un organisme de sécurité privée - par exemple une tâche de planton - eh bien, ça fait un fonctionnaire de police de plus dans la rue pour assurer la sécurité des Genevois. Cette délégation de tâche, me semble-t-il, était perçue comme favorable par l'UDC, moins par le parti socialiste, j'en suis parfaitement conscient. Parti socialiste dont je relève avec satisfaction que son aile nationaliste semble avoir été minorisée. En effet, le groupe nous annonce désormais qu'il est favorable à l'engagement des permis C, ce qui n'était jusqu'à présent pas tout à fait le cas.
Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît, ne nous gargarisons pas du discours sur les tâches régaliennes - c'est un poncif éculé - parlons de la façon dont nous voulons engager la police pour lutter contre la criminalité et de la façon dont nous voulons engager d'autres moyens pour des tâches pouvant parfaitement être assumées par des tiers. Nous vous recommandons donc d'approuver cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Forte, à qui il reste une minute et quelques secondes.
M. Fabiano Forte (PDC). C'est amplement suffisant, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il est écrit noir sur blanc qu'il s'agit «d'envisager» l'engagement d'entreprises privées pour les charger d'un certain nombre de tâches que notre gendarmerie ne pourrait pas assumer.
Permettez-moi de soulever le piquant de la déclaration du groupe socialiste. En effet, le groupe radical n'a fait que reprendre une idée d'un conseiller d'Etat qui s'appelait, et qui s'appelle toujours, Laurent Moutinot. Il avait autorisé l'«utilisation» d'entreprises de sécurité privées. Je dirai donc: les bras m'en tombent, et, à essayer de vous suivre, j'en perds mon latin. (Commentaire.) J'en perds d'autant plus mon latin qu'en commission judiciaire et de la police le groupe socialiste avait proposé un amendement sur la motion libérale, qui demandait qu'on puisse provisoirement - provisoirement ! - faire appel à des entreprises privées pour la surveillance d'ambassades et de consulats. Et là, ce soir, vous nous faites un grand exercice dans lequel plus personne n'arrive à vous suivre. Je tenais quand même à souligner votre inconsistance, Madame Buche, vous qui avez déclaré ce genre de choses au nom du groupe socialiste. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer, à qui il reste... (Remarque.) ...une minute.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, une seule question pour cette motion PDC...
Une voix. Radicale !
M. Eric Stauffer. «Radicale», pardon, excusez-moi ! Au temps pour moi ! (Commentaires. Brouhaha. Rire de l'orateur.) C'est pire encore ! (Exclamation. Rires. Brouhaha.) Laissez-moi juste vous poser une seule question - vous transmettrez, Monsieur le président: police privée, sécurité privée, quand ils doivent interpeller quelqu'un, ils font quoi ? Ils lui passent les bracelets, ils le plaquent par terre et l'amènent directement en prison ? Evidemment que non ! Ils vont devoir faire appel à la police, donc c'est un double emploi et ça ne sert strictement à rien ! Et ça permettrait d'autres dérapages dont Genève n'a pas besoin !
Les tâches de sécurité sont des tâches régaliennes de l'Etat, point, terminé, à la ligne ! Ce n'est pas négociable, nous ne déléguerons pas la sécurité à des entreprises privées ! Ces tâches appartiennent à l'Etat !
La position du MCG: nous allons refuser l'entrée en matière sur cette motion...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je conclus. Et... Et voilà, et puis...
Le président. Merci, c'est parfait !
M. Eric Stauffer. ...et nous avons des amendements. Merci ! (Rires.)
Le président. Je passe la parole à M. Hohl, à qui il reste... (Un instant s'écoule.) ...vingt secondes. (Remarque.)
M. Frédéric Hohl (R). Vingt secondes ? (Remarque.)
Le président. Oui, parce que vous pouvez parler pour le groupe.
M. Frédéric Hohl. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je m'étonne...
Le président. Vous avez donc trois minutes et vingt secondes.
M. Frédéric Hohl. ...que le MCG ne s'intéresse pas à la sécurité à Genève. Franchement, je ne comprends pas ! (Commentaires.) Je ne comprends pas ! Ce que nous proposons dans cette motion, c'est justement d'alléger le travail de la police ! Pour que les policiers puissent aller sur le terrain s'occuper de la sécurité des Genevoises et des Genevois ! (Commentaires.) Je ne comprends pas pourquoi vous voulez supprimer ces deux premières invites... Là, franchement, je ne comprends pas !
Ensuite, pour rassurer le parti socialiste, nous avons bien écrit «à envisager» une situation «provisoire» ! C'est provisoire ! C'est au Conseil d'Etat de décider si, en fonction des effectifs de la police, ils ont besoin, oui ou non, de faire appel à des sociétés privées. On ne le souhaite pas, on préfère que ça soit des policiers. Quand les effectifs seront atteints, on n'aura pas besoin de ce genre de motions. Merci de renvoyer ce texte tel quel au Conseil d'Etat.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous vous en doutez, les Verts vont refuser cette motion...
Une voix. Oh !
M. Christian Bavarel. ...pour plusieurs raisons.
Des voix. Ah !
M. Christian Bavarel. Tout d'abord, nous pensons, comme vous, que la sécurité est un droit inaliénable de nos concitoyens et qu'il est essentiel pour la qualité de la vie dans notre canton. Néanmoins, nous pensons que c'est à l'Etat d'assumer la sécurité dans la rue.
Nous avons vu ce qui s'est passé d'un point de vue privé: on a supprimé les concierges, on les a remplacés d'un côté par des entreprises de nettoyage, puis on s'est dit: «Oh là là ! Malheur ! Il y a plein de déprédations sur les immeubles où ça s'est passé, et on a rajouté une entreprise de sécurité... Mon brave Monsieur, vous le savez bien, il n'y a plus de jeunesse !» Si l'on avait simplement gardé de la proximité et des gens présents, les choses se seraient certainement passées différemment.
Nous avons aussi supprimé les îlotiers. Vous avez vu il y a quinze jours, sur Arte, une émission comparant les deux types de polices française et allemande, et l'on a constaté - oh stupeur ! - que les Allemands, qui étaient pourtant réputés avoir une police extrêmement ferme, ont des îlotiers dans les quartiers les plus difficiles. Ces agents mettent leur photo, leur numéro de téléphone et leur nom sur les devantures des magasins et disent: «Nous sommes présents, nous sommes là, nous sommes au service des concitoyens et nous travaillons avec eux.» Et ils résolvent réellement des problèmes d'insécurité dans ces quartiers ! Ils ne font pas des travaux d'assistant social, mais bel et bien des travaux de proximité, en étant présents, et au plus proche des citoyens.
Ce sont bel et bien des tâches de l'Etat, ce sont bel et bien des tâches d'arbitrage qui appartiennent à l'Etat, et ce n'est pas à des privés de le faire. Si des commerçants désirent avoir un agent de sécurité à l'entrée de leur magasin, libre à eux ! Aujourd'hui, à mon avis, ils en ont le droit, et je ne vois pas pourquoi on devrait changer les choses.
Visiblement, ce que propose la motion, c'est de déléguer des forces privées dans la rue. (Brouhaha.) Et ça, nous ne l'avons jamais accepté. Nous vous disons aujourd'hui que nous avons des forces de police municipale qui doivent pouvoir continuer à faire leur travail, et cela en partenariat avec la gendarmerie. Nous avons des forces de gendarmerie dotées de gens de qualité qui doivent être déchargés de tâches administratives, et nous l'avons toujours soutenu.
Aujourd'hui, ce que nous voulons, c'est que l'Etat soit dans la rue. Il ne s'agit pas de «marchandiser» notre rue, et il s'agit aussi de dire que, oui, l'Etat doit être présent; oui, l'Etat doit assurer la sécurité de nos concitoyens.
Mme Loly Bolay (S). Si je prends la parole, Monsieur le président, c'est pour répondre à M. Forte qui, je crois, n'a pas écouté ou n'a pas bien entendu quelle est la position du parti socialiste. Il me semble qu'en commission judiciaire nous avons été clairs sur la motion libérale. Et c'est nous qui sommes à l'origine de l'amendement «à titre provisoire». Qu'avons-nous dit ? La chose suivante: le parti socialiste est d'accord, à titre provisoire, pour les plantons dans les missions diplomatiques, parce que l'armée s'est retirée. Et nous avons dit que, pour sauvegarder les intérêts de la Genève internationale, nous voulions bien, en attendant l'engagement des auxiliaires de police, que cela se fasse de cette manière-là: à titre provisoire !
Cette motion ne dit pas cela ! Elle mentionne tous les commerçants de la planète... Enfin, de Genève ! Pâquis et environs. (Commentaires. Brouhaha.) Non ! Alors là on n'est pas d'accord ! Et je confirme ce qu'a dit ma collègue: nous y sommes totalement opposés, parce que, pour nous, ce sont des tâches régaliennes de l'Etat. Et ce que nous avons accepté, c'est, une fois encore, uniquement parce que nous voulons sauvegarder les intérêts de la Genève internationale ! Or cette proposition-ci va beaucoup trop loin. Monsieur Forte, le parti socialiste confirme sa position, et il n'a pas deux discours: il a toujours le même ! S'il vous plaît, merci d'écouter de temps en temps !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Forte, je ne sais pas de quel temps de parole vous disposez encore... (Brouhaha. Commentaires.)
M. Fabiano Forte (hors micro). J'ai un amendement ! (Brouhaha. Rires.) (Remarque.)
Le président. Vous n'avez plus de temps de parole.
M. Fabiano Forte. J'ai un amendement, Monsieur le président !
Le président. Cela n'a aucune importance, vous pouvez distribuer votre amendement.
M. Fabiano Forte. Ah bon ? (Rires. Brouhaha.) Très bien, je le distribue.
Le président. Concernant les motions, le temps de parole est limité. Ce n'est pas un projet de loi, donc on ne rediscute pas. (Commentaires. Le président est interpellé par M. Fabiano Forte.) Il fallait déposer votre amendement avant, durant votre temps de parole... (Remarque.) Pas du tout, pas du tout ! (Brouhaha. Rires. Remarque.) Non, non, non ! (Brouhaha.) Non, Monsieur Forte, ça ne marche pas cette fois-ci, désolé ! (Brouhaha.) Vous pouvez nous remettre votre amendement. Je passe la parole à Mme Rochat. (Exclamations. Brouhaha. Un instant s'écoule.) Veuillez déposer l'amendement ! Maintenant, la parole est à Mme Rochat.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je crois que je vais surtout essayer de mettre tout le monde d'accord: oui, effectivement, c'est à l'Etat d'assurer la sécurité - cela a été dit par à peu près tout le monde. Deuxièmement, oui, l'amélioration de la sécurité passe indubitablement par une augmentation des effectifs, je crois qu'on est tous d'accord.
Maintenant, de quoi s'agit-il exactement ? Il s'agit d'alléger la tâche du policier et d'arriver à récupérer des places occupées par des gendarmes formés, brevetés, alors qu'ils ne sont visiblement pas au bon poste. Je vais citer deux exemples: tout d'abord, les gardes à l'hôpital. La nuit, lorsque nous devons accompagner un détenu, il s'agit de garder la porte, trois brigades tournent par deux devant une chambre d'hôpital... Je suis désolée, mais c'est typiquement une tâche de garde. Il n'est pas question d'exercer de l'autorité, il est question d'avoir une garde, de sécuriser cette porte. Cette tâche est très clairement dévolue à des privés. Lorsqu'il s'agit de gardes d'ambassade, Mesdames et Messieurs, on se trouve devant le même cas de figure: il s'agit de prévention. On est loin de la tâche de l'Etat d'assurer la sécurité: c'est une tâche de prévention. Donc, à ce titre-là - et je crois que c'est votre demande de façon unanime - tout ce qui peut être fait pour dégager du monde breveté et formé, afin de l'employer dans la rue, est bon à prendre.
Concernant les îlotiers, j'aimerais rassurer M. Bavarel: les îlotiers existent toujours ! Ils existent tant et si bien que les Vaudois viennent faire des stages chez nous pour voir comment ça marche. Donc, les îlotiers existent. Et il serait même peut-être envisageable, à mon avis, que tous les gendarmes du poste soient îlotiers, de façon qu'ils puissent tous assurer cette tâche de proximité avec les commerçants. Voilà une des missions qu'on pourrait envisager, étendre - je veux dire: supprimer cette tâche d'îlotier et imaginer que tous les gendarmes d'un poste puissent remplir ce rôle et avoir ce contact. Aujourd'hui, on en détache un ou deux par poste; c'est une nouvelle mesure, mais je pense qu'on pourrait considérer qu'ils soient tous chargés de cette tâche de proximité. C'est en tout cas mon voeu.
Je crois que tout le monde est d'accord, l'Etat signe avec la plus grande prudence ces octrois d'autorisations à des privés. Toutes les semaines, des signataires déposent des demandes d'autorisations de privés, et je peux vous assurer que ces dernières sont examinées avec le plus grand sérieux. Il n'est pas question de confier cette tâche directe d'autorité à des privés.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter d'abord les amendements et ensuite la motion. Nous sommes saisis de deux amendements, dont un du MCG, qui nous propose de supprimer les deux premières invites, de conserver la troisième et d'en rajouter une quatrième. Voilà le premier amendement. S'il est refusé, nous pourrons voter le deuxième, proposé par le PDC. S'il est accepté, il n'y aura pas lieu de voter l'amendement démocrate-chrétien.
Je vous lis l'amendement du PDC. Il consiste simplement à ajouter la mention «à titre provisoire» à la première invite, pour dire ceci: «à envisager, à titre provisoire, le recours direct aux services d'entreprises de sécurité privées pour assurer provisoirement et à titre subsidiaire des tâches de gardiennage et de surveillance dans un périmètre limité en raison du manque d'effectifs policiers;». Il y aura donc deux fois le mot «provisoire».
Je vous soumets le premier amendement, celui du MCG, lequel abroge les deux premières invites et en ajoute une nouvelle dont voici la teneur: «Les candidats engagés titulaires d'un permis d'établissement de type C, doivent avoir fait leur demande de naturalisation et devront, le jour de l'assermentation, être de nationalité Suisse.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 23 oui.
Le président. Cet amendement étant refusé, je vous soumets celui du PDC, consistant à rajouter l'expression «à titre provisoire» dans la première invite.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 15 oui et 3 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 1925 est rejetée par 45 non contre 32 oui et 1 abstention.
Débat
Le président. Nous sommes au point 33 de notre ordre du jour. Je passe la parole à M. Falquet. (Brouhaha.)
M. Marc Falquet (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés... Allô ? Ça marche ? (Commentaires. Brouhaha.) Ça fait plaisir de... Allô ? Ça fait plaisir d'entendre que tout le monde est pour la sécurité. En théorie, c'est exact; dans la réalité des faits, c'est tout à fait différent, les victimes pourront vous le confirmer - il y en a de plus en plus à Genève. Et lorsqu'on veut voter des motions pour renforcer les contrôles aux frontières, il n'y a plus personne pour la sécurité ! Je trouve cela un peu dommage.
En ce qui concerne cette motion, elle est consécutive à la suppression des contrôles aux frontières et, également, à la non-application de la loi sur les étrangers. A Genève, les étrangers en situation irrégulière sont comme chez eux... Je vous rappelle que, lorsque nous nous rendons dans un pays étranger, nous avons l'honneur de respecter ses lois. Je pense que nous devons exiger la réciprocité de la part des gens qui viennent chez nous, c'est la moindre des choses. C'est une question de respect de nous-mêmes: charité bien ordonnée commence par soi-même.
Je ne vais pas m'étendre plus longuement concernant cette motion, parce qu'apparemment elle a du succès - j'ai vu qu'il n'y en a plus un exemplaire dans les cases, là-bas, donc chacun a le texte sur son bureau. Je suggère donc que cette motion soit renvoyée à la commission judiciaire. Je n'ajouterai rien, sinon que c'est à nouveau une action pour renforcer la sécurité des citoyens.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Au départ, le groupe démocrate-chrétien était assez réticent à l'idée d'étudier ce texte, dans la mesure où nous avons déjà parlé à plusieurs reprises, dans ce parlement, de la détention administrative. Les radicaux demandent depuis un certain temps, avec d'autres, une augmentation de la capacité de détention administrative - cette thématique-là a déjà été traitée à de nombreuses reprises.
La motion demande - et mélange, je dirai - deux choses: la question de l'application de l'accord et celle de la capacité en locaux permettant d'accueillir des détenus administratifs. Je crois que cette motion a un mérite: elle nous permettra, en commission, de déterminer avec plus de précision la pratique actuelle du département et du Conseil d'Etat, et éventuellement des autorités fédérales, s'agissant de l'accord précis entre la France et la Suisse mentionné en annexe de la motion.
Cette motion nous permettra aussi et plus particulièrement de faire un point de situation sur les accords de réadmission, tout en précisant ce qu'on a déjà dit depuis longtemps: la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral nous laisse une marge de manoeuvre réduite quant à notre possibilité de détenir administrativement des gens en vue de l'expulsion. Comme vous le savez, la jurisprudence précise qu'il faut que l'expulsion soit envisageable pour pouvoir détenir des ressortissants illégaux dans un centre de détention administrative.
Je crois donc qu'il est important d'étudier ce texte, mais il s'agira véritablement, en commission, de déblayer les thématiques qui sont mélangées dans les invites ainsi que dans l'exposé des motifs. Je vous demanderai donc, au nom du parti démocrate-chrétien, un renvoi à la commission judiciaire. Je vous remercie.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, le groupe MCG, comme le PDC, soutiendra cette proposition de motion, qui entre évidemment dans un sujet plus large, celui de la détention administrative des personnes devant être renvoyées de Suisse mais dont on ne sait pas encore si elle pourront l'être, ni dans quelle direction. En fait, il s'agit de personnes qui viendraient dans notre pays à travers la frontière que nous avons avec la France et qui ne seraient évidemment pas titulaires d'un visa Schengen. Il s'agit donc d'établir que ces personnes ont traversé la France avant de venir chez nous, pour pouvoir les renvoyer en France dans le cadre de cet accord entre la Suisse et cette dernière. Et pendant cette période d'examen, nous devons évidemment pouvoir retenir ces personnes quelque part, et non pas les lâcher dans la nature.
Nous considérons qu'effectivement cette motion touche un sujet méritant d'être abordé, puisqu'il s'inscrit dans un cadre plus large auquel le MCG est évidemment sensible. Nous soutenons cette proposition de motion, et il conviendra de la renvoyer à la commission judiciaire et de police. Je vous remercie.
M. Eric Bertinat (UDC). J'aimerais compléter, par un exemple pratique, la rapide explication que vous a donnée mon collègue Falquet. Vous avez peut-être lu récemment dans «Le Temps», c'était le 14 juin, donc il y a quelques jours, le problème que nous posent les Nigérians. Voilà un cas pratique dans lequel un centre de rétention serait utile. Le directeur de l'ODM explique lui-même, je cite: «Deux tiers des Nigérians refoulés peuvent l'être vers d'autres pays de l'espace Schengen où ils ont déposé une première demande d'asile, mais le faire n'est pas simple en pratique.» Pourquoi est-ce que ce n'est pas simple en pratique ? Eh bien, prenons l'exemple de Genève, sans centre de rétention: les Nigérians, une fois arrêtés, on ne sait pas trop quoi en faire; ils sont relâchés dans la nature et disparaissent. Et ils disparaissent où ? Le plus souvent, ils restent ici, en Suisse, et continuent à commettre des délits.
Genève a véritablement besoin de ce centre sur notre territoire, centre qui sera très utile et permettra de donner un signal clair. Et, contrairement à ceux... Peut-être pas contrairement à ce qu'a dit M. Barazzone, mais en complément de ce qu'il a dit: l'expulsion n'est envisageable qu'une fois que nous avons la personne entre les mains. Si elle disparaît, eh bien, elle disparaît, elle se balade, elle vagabonde. Ce centre est justement bienvenu pour avoir un lieu où l'on sait que ces personnes se trouvent. Elles sont quand même coupables d'infractions très claires et elles ont un délai pour repartir. Durant ce délai, il nous faut absolument pouvoir, géographiquement, les situer.
Je vous invite donc à soutenir cette motion et à l'étudier en commission. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Falquet.
M. Marc Falquet. Je renonce.
Le président. Merci. Je donne la parole à M. Lefort.
Des voix. La cravate ! (Commentaires. Un député fait signe à M. François Lefort de rajuster sa cravate.)
M. François Lefort (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, être sans documents d'identité, vous le savez, n'est pas un délit pénal. Pour les Verts, ce n'en est pas un. Ce n'est donc pas un motif d'emprisonnement. Avouez que cette rétention administrative ressemble beaucoup à de la prison ! Et sans motif valable. Cela étant dit, les Verts vous demandent raisonnablement de rejeter cette motion. Et ils la refuseront !
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes heureux de voir qu'aujourd'hui de nombreux partis rejoignent les idées du parti radical - je vous rappelle que ça fait plus de quatre ans que nous parlons de la détention administrative. Tous les partis nous rejoignent, donc on voit bien que c'est une solution.
Bien évidemment, nous allons soutenir la demande de renvoi à la commission judiciaire. Je rappelle à nos amis Verts que la détention administrative, ce n'est pas de la prison, c'est une préparation au départ. (Rire.) Eh oui ! Et l'on se réjouit, en commission judiciaire, de traiter de ce sujet.
M. Gabriel Barrillier. Excellent !
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le sentiment qu'on a un peu organisé un concours de celui qui crache le noyau de cerise le plus loin en matière de sécurité: «Je suis plus sécuritaire que toi !», «Je suis plus régalien que toi !», etc., j'en passe et des meilleures.
Mesdames et Messieurs, il existe à Genève un centre de rétention administrative, il s'appelle Frambois. Il est trop petit, tout le monde le sait, mais il existe, alors ne venez pas nous dire qu'il est indispensable de créer un centre de rétention. La rétention administrative n'est d'ailleurs pas seulement prévue dans l'accord que vous avez évoqué avec érudition, elle l'est également dans la loi fédérale sur les étrangers et dans la loi cantonale d'application que ce parlement a votée il y a un peu plus d'une année. Il n'y a donc strictement rien de nouveau sous le soleil.
Ce qui intéressant, d'un point de vue politique, c'est qu'il faudra bien, à un moment donné, que ce parlement décide ce qu'il pense de la détention administrative ! Jusqu'à présent, il y a eu énormément de propositions dans tous les sens - si on les avait empilées, on aurait probablement pu créer des milliers de places, d'ailleurs. Et il serait temps, un beau jour, que l'on décide quelle est notre position. Est-ce que nous sommes, comme certains, partisans de construire des centaines de places, dans l'idée que cela va résoudre l'ensemble des problèmes de délinquance à Genève ? Est-ce que, comme d'autres, nous considérons que c'est en soi totalement intolérable que d'enfermer des gens n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation pénale ? Est-ce que, comme d'autres encore, on considère que le centre de détention de Frambois est suffisant et qu'il répond à toutes sortes de normes de qualité de détention ? Est-ce que, comme les libéraux, on estime qu'il est nécessaire d'augmenter la capacité, qu'il est nécessaire d'améliorer la qualité de la détention à Frambois, qu'il est nécessaire d'avoir un centre dans le périmètre de l'aéroport ? Parce que c'est là que se situe la problématique. Il est nécessaire de convaincre nos partenaires au concordat de la nécessité d'augmenter le nombre de places; en revanche, on est convaincus qu'il n'est en effet pas sérieux, dans un Etat de droit, de prétendre que l'ensemble des délinquants doit être en permanence en détention administrative et qu'il convient par conséquent de manipuler avec beaucoup de précaution ce concept et ne l'utiliser que lorsque c'est absolument indispensable.
Tout à l'heure, en entendant l'UDC plaider pour sa motion, je me demandais bien comment j'arriverais à la soutenir. En définitive, les intervenants qui ont suivi m'ont convaincu que le renvoi en commission était un bon moyen d'avoir ce premier débat autour de la détention administrative. Avec, ensuite, les autres textes qui seront renvoyés dans cette perspective, nous accepterons de renvoyer cette motion en commission.
Mme Loly Bolay (S). Je partage l'avis de M. Jornot: effectivement, on a oublié qu'il y a Frambois sur notre territoire, même si on peut s'accorder à dire que cet établissement est déjà plein. Cela étant, que dit cette motion ? Elle met en relief que, depuis qu'il y a Schengen, eh bien, les frontières sont des passoires.
Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de revenir sur certains points. Tout d'abord, l'entrée dans Schengen - que le peuple suisse a acceptée - et l'accord qui va avec favorisent la mobilité des citoyens européens en abolissant les contrôles systématiques des personnes aux frontières. Les contrôles mobiles à l'intérieur des Etats partenaires pour lutter contre le terrorisme et la criminalité sont maintenus, voire renforcés. Comment ? Il y a tout d'abord le système SIS. Quand on a parlé, l'autre jour, d'une motion PDC, nous avons évoqué ce système SIS, qui est d'ailleurs salué comme étant un outil performant, et par les douanes et par la police. En effet, le SIS est l'une des mesures les plus importantes qui viennent compenser l'abandon des contrôles aux frontières. Il a été conçu pour lutter contre la criminalité transfrontalière dans toute l'Europe. Le SIS est un système électronique d'information et de recherche pour les polices, valable dans tous les Etats membres de Schengen. Toutes les polices, à Genève, ont reçu une formation SIS dans le domaine de la coopération. En Suisse, le bureau appelé SIRENE - eh oui, SIRENE - a été constitué, il est l'interlocuteur, l'interface humaine entre les policiers de terrain et le système d'information Schengen.
Il y a un autre système mis en place par l'Union européenne et la Suisse, c'est Eurodac. C'est quoi, Eurodac ? C'est une base de données européenne d'empreintes digitales, un système automatisé d'identification des empreintes digitales. Ce système prévoit des mesures visant à protéger les droits humains et les libertés civiles. Les procédures ont été mises en conformité avec la Convention européenne des droits de l'homme et avec la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Les empreintes sont conservées pendant dix ans puis détruites. Et je rappelle que ces empreintes sont recueillies dans le cadre d'une demande d'asile. C'est suite à la Convention de Dublin que les ministres européens ont mis en place le système Eurodac.
Enfin, pour conclure, en Suisse, il y a encore un garde-fou supplémentaire: le Centre de coopération policière et douanière. Vous le voyez bien, Mesdames et Messieurs les députés, il existe un dispositif performant qui est en place et prévoit tous ces cas de figure. Raison pour laquelle le parti socialiste ne va pas vous suivre sur cette motion et, bien évidemment, la refusera.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Bertinat, à qui il reste une minute.
M. Eric Bertinat (UDC). Merci, Monsieur le président. Permettez-moi d'apporter une petite précision. Je crois que, pour certains députés, vous mélangez centre de détention administrative avec centre de rétention administrative. Ce que demande l'UDC par le biais de sa motion, c'est un centre de rétention, qui découle directement des accords de Schengen. Ce qu'a dit Mme Bolay est tout à fait juste, il n'empêche que les personnes ayant déposé une demande d'asile et dont on sait qu'elles l'ont déjà fait préalablement dans un autre pays doivent, selon les accords de Schengen et Dublin, retourner dans le pays où elles ont déposé leur première demande. Eh bien, pour ces personnes-là, nous demandons un centre de rétention, comme il en existe un à l'aéroport de Zurich et comme il devrait en exister un à l'aéroport de Cointrin. Il n'existe pas, ce qui fait que, alors que l'on devrait remettre ces gens au pays dans lequel ils ont déposé leur première demande d'asile, eh bien, on ne le peut pas, parce qu'ils disparaissent dans la nature. Alors, j'attire simplement votre attention sur cette chose: centre de rétention n'est pas centre de détention administrative, il y a un distinguo à faire. Je vous remercie.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Il y a non seulement une confusion de thématiques, mais il m'a bien semblé qu'il y avait également une confusion de genres, dans la mesure où, effectivement, l'article 73, alinéa 1, de la loi fédérale sur les étrangers parle de centre de rétention. Ce dernier est très précisément conçu pour ne pas excéder trois jours ! Il faut donc bien préciser cette différentiation telle qu'elle vient d'être exposée. S'agissant de la rétention, puisqu'on parle de «rétention administrative» et pas de «détention» - ce n'est pas le même régime, ce n'est pas le même article qui s'applique - j'aimerais quand même saluer la plateforme de coopération CCPD qui existe entre la France, la Suisse, le canton de Vaud et les gardes-frontières, et qui est extrêmement performante s'agissant de renvois de citoyens illégaux vers la France. Voilà la précision que je voulais apporter, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur le renvoi de cette motion à la commission judiciaire et de la police.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1927 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 50 oui contre 22 non.
Débat
Le président. Nous sommes au point 38 de notre ordre du jour. Je passe la parole à M. Sauty.
M. Olivier Sauty (MCG). Merci, Monsieur le président, mais un Sauty peut en cacher un autre... L'autonomie de déplacement, aujourd'hui, est quelque chose d'indiscutablement obligatoire si l'on veut réussir professionnellement quand on est jeune. C'est très difficile de trouver un emploi, c'est encore plus difficile d'en trouver un quand on n'a pas de permis de conduire, et on ne peut pas seulement dire qu'il faut utiliser les transports publics. Il faut réellement faciliter l'accès des jeunes au permis de conduire, et c'est pour ça, Mesdames et Messieurs les députés, que je vous engage et vous demande, s'il vous plaît, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le groupe démocrate-chrétien a accueilli assez favorablement cette motion, car il y a effectivement un problème pour notre jeunesse par rapport aux coûts qu'engendre l'obtention d'un permis de conduire. Pour certaines fonctions, certaines professions, le permis de conduire est requis. Il se trouve que de nombreux jeunes font partie de familles n'étant pas forcément aisées, donc il y a lieu de trouver quelques solutions. Or il y a des éléments qu'on ne pourra pas modifier, puisque nous entrons là dans des questions de droit fédéral. Mais nous croyons que nous pouvons trouver des pistes au niveau des émoluments administratifs qui sont perçus par l'office cantonal des automobiles et de la navigation.
Nous pensons que cette motion mérite d'être étudiée en commission des transports, raison pour laquelle nous serons certainement saisis d'un amendement qui a été déposé sur nos places. Alors, pour notre collègue Jean-Louis Fazio - si vous me permettez, Monsieur le président - il serait peut-être bon que ce genre d'amendement puisse être débattu et discuté à fond en commission des transports, afin que nous puissions voir ce qu'il est possible de faire pour notre jeunesse. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Olivier Norer (Ve). Le groupe des Verts n'accueille pas avec un tel enthousiasme cette proposition de motion - vous n'en douterez pas une seule seconde - pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'il existe bien une certaine catégorie de population ayant un besoin professionnel d'une voiture, donc d'un permis de conduire. Cette catégorie est peut-être sensibilisée à la problématique, laquelle doit cependant être bien ciblée. Si l'on veut régler ce problème pour une certaine catégorie de la population, autant le faire dans le cadre des relations contractuelles professionnelles entre employeurs et employés de cette catégorie, par exemple pour les chauffeurs-livreurs, les jardiniers, et toutes ces professions qui doivent manutentionner des objets lourds, donc faire usage d'un véhicule.
Par contre, vis-à-vis de l'ensemble de la population, cette proposition est même contradictoire et malvenue. En effet, l'acquisition d'un permis de conduire est, je dirai, un cap, un test, un passage. Il est important qu'il soit valorisé à juste titre, notamment par son coût. Si le permis de conduire est aussi accessible que la première console de jeu, on en fera un usage totalement malvenu... (Remarque.) ...donc de la voiture elle-même. Le permis de conduire n'est pas aussi cher qu'on veut le prétendre, et il y a plusieurs manières d'éviter des coûts très importants. Les calculs sont assez faciles à faire: il y a des exigences fédérales, il y a des frais cantonaux. Les exigences fédérales se basent sur des frais d'opticien et des frais de cours de samaritains, de théorie et de sensibilisation - ceux-ci coûtent 390 F - à payer une fois. Les frais cantonaux, ce sont, bien sûr, ceux d'examens de théorie et de pratique et la délivrance du permis; le tout fait 260 F. Dans l'ensemble, nous payons 650 F. Actuellement, les frais de téléphonie mobile coûtent souvent largement plus cher que 650 F à l'année... Et encore, ce sont des frais annuels, tandis que le passage d'un permis de conduire, c'est une fois.
Pourquoi devrait-on payer à l'ensemble de la population la totalité des frais du permis de conduire, alors qu'on ne lui paie pas, par exemple, les frais de téléphonie mobile ? Pourtant, un téléphone mobile est bien plus important pour obtenir un travail, ceci pour n'importe quel type de travail, et il est aussi essentiel pour d'autres usages.
Le groupe des Verts n'est pas du tout enthousiaste vis-à-vis de ce texte. Il se peut effectivement que des propositions nouvelles, sur l'objet bien plus ciblé et limité au cadre professionnel, soient plus intéressantes; à ce moment-là, nous aurons un autre regard sur cette proposition de motion. Mais, en l'état, nous la refuserons.
M. Antoine Barde (L). Est-ce vraiment une priorité de réduire les coûts du permis pour les jeunes entre 16 et 25 ans ? Le parti libéral ne le pense pas. C'est une motion démagogique qui fait appel à l'Etat providence, et nous ne pensons pas qu'il est nécessaire... (Remarque.) ...d'entrer en matière.
D'autre part, je pense que nous sommes libres de choisir notre mode de transport et j'estime que nous devons en assumer le coût, du moment où nous faisons ce choix librement - choix qui parfois nous est contesté, c'est vrai, mais que nous avons encore pour l'instant. Mesdames et Messieurs, le parti libéral refusera cette motion. Je vous remercie.
M. Jean-Louis Fazio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste a déposé un amendement - il vous a été distribué hier soir - tendant à l'annulation de l'invite originale, qui serait remplacée par celle-ci: «invite le Conseil d'Etat à présenter un projet visant à réduire le coût d'un permis de conduire de catégorie A ou B, pour les jeunes en apprentissage ou personnes en mesures d'insertion professionnelle âgés de 18 à 25 ans.»
Nous pensons, dans un premier temps, avec cet amendement, viser directement les jeunes gens se destinant à une formation professionnelle ou étant mesure d'insertion, qui ont besoin d'un permis de conduire pour décrocher un emploi, tel celui de carreleur, de maçon ou de menuisier. En effet, si un jeune cherche un emploi dans le secteur primaire ou secondaire et qu'il n'a pas de permis de conduire, il n'a aucune chance, à l'heure actuelle, de décrocher un poste.
Dans un deuxième temps, une prise en charge de l'abonnement de transports publics pourrait également être étudiée pour les autres jeunes gens dont parle le MCG dans sa motion initiale - d'où notre amendement. Cette aide devrait être accordée après examen des revenus familiaux ou de la personne elle-même. C'est pourquoi nous demandons, pour le cas où notre amendement serait accepté, le renvoi de cette motion à la commission de l'économie, pour étude.
M. Patrick Lussi (UDC). L'Union démocratique du centre, contrairement à ce qu'a déclaré notre préopinant Vert, a une position quand même très tranchée sur la question, avec quelques nuances dont je parlerai à la fin. Non Monsieur, le permis de conduire n'est pas une phase ludique d'une jeunesse délurée voulant faire le «Grand Prix des Rues-Basses» ou des quais. Non Monsieur, le permis de conduire est devenu un objet cher, il commence à être réservé à une certaine élite, et nos jeunes ne peuvent pas forcément en profiter - je pense surtout aux jeunes que vous êtes censés défendre.
Actuellement, comme l'a dit mon préopinant socialiste, le permis de conduire peut aussi être considéré comme un ascenseur social pour bien des professions exercées à l'extérieur. Alors, que faut-il faire ? Il est certain que le groupe UDC n'est pas pour qu'il y ait une tâche régalienne de l'Etat et que nos deniers publics prennent en charge les surcoûts, que nous avons par ailleurs tous acceptés et jugés nécessaires à la sécurité mais qui ont tant renchéri ce permis de conduire...
Nous sommes pour le renvoi en commission, car il nous semble qu'à l'issue des discussions qui prévaudront on pourrait peut-être revoir certaines exigences financières relatives aux heures de présence, aux heures de cours imposées à nos jeunes, qui ne peuvent plus se les payer. L'Union démocratique du centre ne voit pas comment on pourrait modifier les tarifs des privés qui pratiquent cela. Simplement, peut-être qu'au cours des années vous avez voulu - vous avez mis, je dirai, le permis de conduire presque au niveau de ces fameux... Comment est-ce que vous les appelez, ceux qui font deux fois le tour du monde ? Les A380 ! Restons sérieux: avec un permis de conduire, beaucoup de choses se passent, mais on ne pilote pas un avion !
Essayons de faire quelque chose pour nos jeunes. L'UDC favorisera le renvoi en commission de cette motion.
Le président. Dans quelle commission ? Il y en a deux qui ont été évoquées, celle des transports et celle de l'économie. Ou en proposez-vous une autre ? (Commentaires. Brouhaha. M. Patrick Lussi est interpellé.)
M. Patrick Lussi. Toi, t'es pas d'accord...
Le président. Monsieur Lussi, quelle commission ? (Brouhaha.)
Des voix. Quelle commission ?
M. Patrick Lussi. Quelqu'un a dit: «commission des transports», il me semble que c'est une bonne chose.
Le président. Très bien, merci ! Je passe la parole à M. Jeannerat.
M. Jacques Jeannerat (R). Merci, Monsieur le président. Là, on est dans le populisme à l'état pur: on veut aider les jeunes sur le dos de la collectivité ! En fait, avec cette motion, on n'aide pas à la prise de conscience que la formation technique et en matière de sécurité est quelque chose de sérieux, qui n'est pas gratuit, qui a une valeur. On a voulu, au fil des années, plus de cours pour améliorer la sécurité des conducteurs... Il s'agit donc simplement de revenir en arrière ! Alors supprimons ces cours ! Et comme ça, ce sera moins cher ! (Commentaires.)
Quant à l'argument selon lequel le permis de conduire est lié aux emplois, moi j'aimerais bien avoir quelques chiffres pour pouvoir entrer en matière. Je pense que ça concerne une infime partie de la population. (Brouhaha.) C'est plus qu'une fausse bonne idée: c'est une vraie mauvaise idée ! (Commentaires. L'orateur est interpellé par M. Fabiano Forte.)
M. Roger Golay (MCG). En entendant M. Barde, qui dit que ce sujet n'est pas prioritaire et qu'il est même démagogique... Ce genre d'arguments me laisse un peu pantois. Il faut savoir que le permis de conduire est, de nos jours, un document indispensable pour entrer dans la vie active. C'est quelque chose de nécessaire pour l'accès à certaines professions, cela fait partie de la formation des jeunes - comme je l'ai dit - en vue d'accéder à certains postes.
D'autre part, quand vous dites que ce n'est pas prioritaire, je pense qu'aujourd'hui ça l'est plus qu'hier. Et l'on peut constater que beaucoup de jeunes circulent sans permis de conduire, simplement parce qu'ils n'ont pas les moyens de se le payer. On en a l'exemple en France, où c'est par millions que les automobilistes circulent sous dépôt du permis de conduire, sous retrait du permis, etc. On voit le danger que cela peut causer.
Pour protéger notre jeunesse, il est indispensable de l'aider, de l'inciter aussi à passer ce permis de conduire en vue d'accéder à certaines professions, comme on a pu le dire auparavant. Je pense que, là, le sujet est surtout la protection de nos jeunes par rapport à ce qui se passe actuellement. Des centaines de francs, ce n'est pas accessible à tout le monde ! C'est clair, ce ne sont peut-être pas vos milieux qui sont confrontés à ce problème, mais il y a beaucoup de jeunes qui sont aujourd'hui privés de moyens pour passer le permis de conduire. Je pense qu'il est de notre responsabilité d'intervenir et de modifier cette chose, en tout cas - comme cela a été dit - au niveau des émoluments.
Je pense également que la proposition d'amendement socialiste est intéressante, on peut en discuter en commission et, justement, trouver les possibilités d'aider ces jeunes à pouvoir entrer dans la vie active.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Poggia, mais je crois que le temps... (Remarque.) Il lui reste encore quinze secondes, vingt secondes...
Une voix. Non non, ils ont plus de temps, ils sont motionnaires.
Le président. Ah oui, vous êtes motionnaires ! Vous avez donc un peu plus de temps, Monsieur Poggia.
M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Monsieur le président. Je voulais brièvement répondre à l'argument des Verts, qui semblent faire un amalgame entre titulaire du permis de conduire et pollueur. Je serais très intéressé de savoir ici si les députés Verts sont tous sans permis de conduire dans la poche ou si, au contraire, ils ont considéré que... Encore faut-il savoir, ceux qui ne l'ont pas, si c'est parce qu'ils ont été recalés trop souvent... (Rires.) ...ou si c'est véritablement un choix personnel.
Je crois que, avoir un permis de conduire aujourd'hui, c'est simplement pouvoir répondre à certains besoins de l'économie. Sans parler des besoins individuels, on peut très bien être passager d'un véhicule avec un conducteur faisant un malaise; il faut alors être en mesure de prendre immédiatement sa place. Avoir le permis de conduire aujourd'hui, c'est évidemment un fait extrêmement important, et nombreux sont les employeurs qui l'exigent de nos jeunes.
Alors, s'il fallait que l'accès à ce permis de conduire soit encore plus cher, pour qu'on se rende compte à ce point de l'importance qu'il y a à accéder à un volant, excusez-moi, il y a d'autres actes de la vie qui sont beaucoup plus importants et dont l'accès devrait être encore plus coûteux ! Imaginons le mariage, qui devrait peut-être être taxé 50 000 F, ou le fait de vouloir un enfant, qui devrait être taxé 100 000 F. Imaginez la responsabilité d'avoir un enfant aujourd'hui et de l'amener jusqu'à l'âge adulte !
Non, soyons sérieux ! Il y a deux parties dans ces coûts d'accès au permis de conduire: une partie étatique, ce sont les coûts administratifs de l'ordre de 650 F, et des coûts obligatoires indirects, ceux directement liés à l'obligation de suivre des cours de conduite.
Ce que nous demandons dans cette motion, c'est d'alléger ces coûts, simplement pour rendre accessible à nos jeunes l'obtention d'un permis de conduire - de nos jours, pour un jeune, 2000 F est une somme considérable - donc, nous devons les aider à aller dans ce sens. Je propose, comme ceux qui sont intervenus avant moi, que cette motion soit renvoyée à la commission des transports.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Norer, à qui il reste trente secondes.
M. Olivier Norer (Ve). Merci, ça va être bref. Je souhaite juste préciser à mon préopinant de l'UDC que la législation pour l'obtention d'un permis de conduire est établie au niveau fédéral. C'est donc la Confédération qui fixe ces exigences, notamment celle d'un cours de samaritains obligatoire, d'un cours de théorie et d'un cours de sensibilisation. Ces coûts-là, on peut les voir sur le site internet des différentes auto-écoles du canton, on ne les voit malheureusement pas assez clairement sur le site de l'office cantonal des automobiles et de la navigation. On pense que, par la suite, dans un souci de transparence...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Olivier Norer. ...la chose sera peut-être mieux faite. En l'état, le permis de conduire reste pas très cher.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Forte, à qui il reste une minute quarante.
M. Fabiano Forte (PDC). Merci, Monsieur le président. Je crois que les chiffres qui nous sont donnés ce soir - puisque j'ai également pris la peine de me renseigner - sont très parcellaires. Entre tous ces cours fédéraux et autres - ce sont des chiffres qui me viennent de l'OCAN - un permis de conduire, de nos jours, c'est 2000 F. C'est 2000 F, Monsieur Norer, donc vous articulez un chiffre de 630-650 F qui est totalement faux. Mais il est normal, venant des Verts, que, dès lors que nous parlions de voitures, il y ait des crises d'urticaire ! (Commentaire.)
J'aimerais revenir sur l'amendement du groupe socialiste, pour enjoindre ce dernier de le retirer et de faire ce travail en commission. Parce que, dans votre proposition, il manque aussi une catégorie ! Vous parlez des apprentis: ceux-ci gagnent un peu leur vie quand même. Un étudiant à l'Université, sauf à faire des petits jobs ici et là, ne gagne pas sa vie ! Donc, si vous voulez ouvrir le débat ce soir, cela peut durer jusqu'à 23 h, et puis, allonger la liste de votre amendement... De grâce, retirez cet amendement, et faisons ce travail en commission des transports, calmement et en bonne intelligence ! Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Weiss, à qui il reste deux minutes et dix secondes.
M. Pierre Weiss (L). Merci, Monsieur le président, ce sera amplement suffisant. Je suis surpris de voir que, par cet amendement, le groupe qui a déposé cette motion entend en fait subventionner des écoles privées. Et je voulais rendre simplement attentif ce Grand Conseil à cet élément. Chacun se prononcera évidemment pour ou contre, en fonction de ses options sur la subvention aux écoles privées - c'est le premier point.
Le deuxième point, c'est de prendre en considération l'évolution du coût de la vie depuis une vingtaine d'années. Si le montant de 2000 F était déjà tel à l'époque, de fait, le coût réel pour l'individu a baissé depuis lors.
Et puis, troisième point: tout simplement, il s'agit de savoir si le fait d'obtenir son permis de conduire relève des droits de l'Homme... Là aussi, on peut avoir des conceptions un peu différentes. Personnellement, je pense que le droit à l'éducation est prioritaire sur le droit à obtenir son permis de conduire. Il s'agit là d'un choix individuel, et non pas de ce qui doit être offert nécessairement par l'Etat - je dis bien: «par l'Etat» - de façon indiscriminée, de façon arrosoir, à tout le monde et à tous les jeunes en particulier.
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe encore la parole à M. Poggia, à qui il reste une bonne minute.
M. Mauro Poggia (MCG). Oui, Monsieur le président. Juste pour répondre à la personne qui vient de prendre la parole, M. le député Weiss: quand on prépare une intervention sans écouter ceux qui parlent juste avant soi, on en vient effectivement à dire des contrevérités. Il n'est pas question, pour le groupe MCG, de subventionner des écoles privées, nous l'avons dit clairement. (Commentaires.) Il y a deux parties qui sont nettes: il y a des taxes administratives requises par le service des automobiles et il y a des frais réclamés pour des cours aux écoles privées. Nous demandons que la partie des taxes administratives soit allégée voire supprimée, pour rendre accessible le permis de conduire à nos jeunes.
Le président. Je passe la parole à M. Weiss, à qui il reste un peu moins d'une minute.
M. Pierre Weiss (L). M. le député Poggia a certainement mal compris ce que j'ai dit. Mais cela ne m'étonne pas, il devait mal écouter. (Rires.) Je voulais simplement relever qu'il s'agit d'une subvention indirecte aux écoles privées, par le fait que l'on verse un montant à des jeunes qui n'en n'ont pas tous nécessairement besoin - il ne s'agit pas d'un droit de l'Homme - et qu'au surplus, dans cette opération, il y a probablement, pour la gestion des deniers de l'Etat, des tâches prioritaires.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais donc faire voter le renvoi de cette motion à la commission des transports. (Commentaires.) Nous voterons l'amendement après, il y a d'abord le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1934 à la commission des transports est rejeté par 43 non contre 38 oui et 1 abstention.
Le président. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'amendement socialiste présenté par M. Fazio. Il donne à la première invite la teneur suivante: «à présenter un projet visant à réduire le coût d'un permis de conduire de catégorie A ou B, pour les jeunes en apprentissage ou personnes en mesure d'insertion professionnelle âgés de 18 à 25 ans.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 27 oui et 4 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 1934 est rejetée par 52 non contre 25 oui et 5 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 39 de notre ordre du jour. Je passe la parole à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Que n'a-t-on pas entendu sur cette motion ? Laissez-moi peut-être juste vous expliquer deux ou trois petites choses, pour - à l'attention de ceux qui l'auraient oubliée - refaire un peu d'histoire. On va pour cela revenir sur la campagne électorale 2009. Certains partis ont fait de l'insécurité leur thème de campagne, les radicaux en tête: «Il nous faut plus de places de détention administrative !» Les libéraux: «Construisons des prisons !» - outre le fait de construire des logements... Le conseiller d'Etat radical: «Nous allons endiguer le chômage !» Et puis tout ça n'a été qu'un leurre pour la population, les ténors du gouvernement se sont tous défilés lorsqu'il s'est agi de reprendre le département de la police et ils ont laissé cette lourde charge à Mme la conseillère d'Etat Isabel Rochat. Résultat des courses: nous sommes aujourd'hui en juin, et, à ce jour, qu'y a-t-il eu de concret en termes de sécurité ? Cento Rapido, que nous avons rebaptisé «Cento pas rapido», puisque la seule réponse qu'a été capable de nous donner ce gouvernement, c'est 100 places de détention supplémentaires à une échéance de treize mois ! Voilà comment nous traitons la sécurité, ou l'insécurité, à Genève ! Voilà comment ceux qui ont fait des promesses aux électeurs, pour drainer des bulletins de vote, ont répondu par leur absence dans les décisions responsables.
Au MCG, nous avions envisagé plusieurs solutions et dit qu'il ne serait pas possible d'endiguer le problème de l'insécurité à Genève aussi longtemps que nous n'atteindrions pas 750 à 800 places de détention, toutes places confondues entre détention administrative, préventive et autres exécutions de peine en semi-liberté. Pour cette raison, nous avions pris quelques contacts dans différents cantons pendant la campagne électorale, notamment avec Vaud, Fribourg et Valais. Quelle ne fut pas notre surprise de voir Mme la conseillère d'Etat, ou l'un des membres du parti libéral, venir dire: «C'est à cause de vous, parce que vous avez parlé, que le deal a foiré !» Excusez-nous, on ne savait pas qu'il y avait beaucoup de clients pour acheter une prison en Valais ! On est vraiment désolés ! Non mais... Je crois qu'il faut arrêter de se moquer des citoyens. Mesdames et Messieurs, aujourd'hui, nous aimerions savoir...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Oui, évidemment, la sécurité, ça n'intéresse pas ce parlement qui limite la parole !
Le président. Alors...
M. Eric Stauffer. Alors voilà, je conclus...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Eric Stauffer. ...donc on n'a rien pu dire ! Maintenant, donnez-vous-en à coeur joie et...
Le président. Il n'y a pas de problème.
M. Eric Stauffer. ...venez critiquer encore une fois un texte parlementaire MCG, la population vous regarde et... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Bolay.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de dire tout d'abord que cette motion m'a choquée. Elle m'a choquée en tant que présidente de la commission des visiteurs. Pourquoi ? Parce que, lors de la première séance durant laquelle Mme la conseillère d'Etat est venue dans cette commission et a émis l'idée, justement, de trouver des solutions, notamment en Valais - non pas pour la préventive, j'y reviendrai, mais pour la prison ferme - voilà que, dans la demi-heure, eh bien, M. le virtuose de la «recuperaciòn»... (Rires.) ...est parti... (Applaudissements.) ...il est parti préparer sa motion: «C'est mon idée !» Non, Mesdames et Messieurs les députés, l'idée est de Mme Rochat ! Elle est venue nous parler. Et ce qui me choque, c'est la violation du secret de fonction, encore une fois ! (Applaudissements.)
L'autre hérésie de cette motion, c'est de vouloir - c'est l'idée de M. Stauffer - créer ce lieu de détention: pour la préventive ! Mais imaginez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, une prison préventive genevoise en Valais ? Vous imaginez les juges d'instruction prenant le train, la voiture, pour aller en Valais, pour aller voir... Mais c'est une hérésie des plus totales ! (Brouhaha.) Et ce qui me choque le plus, c'est que M. le député Stauffer, qui est vice-président de la commission, veut en devenir le président ! Mais je rigole tous les soirs quand je pense à ça ! (Rires.) Ecoutez, franchement, quand on connaît la commission des visiteurs, quand on connaît comment ça se passe...
Pour terminer, je vais dire ceci, Monsieur le président...
Le président. Mais je vous en prie !
Mme Loly Bolay. A Champ-Dollon, prison préventive, il y a 275 personnes en exécution de peine ! C'est pour cela que Mme la conseillère d'Etat voulait trouver des solutions ! Pour les exécutions de peines ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser - des deux mains ! - cette motion. (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Les orateurs changent, les groupes politiques changent, et pourtant la réponse va être la même. Mais certainement avec une argumentation totalement différente. C'est vrai que cela peut surprendre, or l'Union démocratique du centre n'est pas pour cette motion. Mais pour de tout autres raisons. Quand on regarde ce qui se passe - et vous avez dit, Madame la préopinante, qu'à Champ-Dollon il y a des gens en exécution de peine - j'ose rappeler, quitte à entendre des «hululements», que l'UDC est pour le renvoi des criminels étrangers. Car, si ceux d'entre eux qui sont en train de purger leur peine n'étaient pas dans nos prisons, nous aurions la place suffisante pour gérer les cas courant ! N'en déplaise à certains, cela est démontré dans bien des statistiques, par rapport... (L'orateur est interpellé.) Non, on ne mélange rien du tout, cher Monsieur !
L'UDC est aussi très constante en ce qui concerne les deniers publics. La faiblesse politique, la faiblesse de vouloir affirmer de choses fortes dans notre canton, voire dans notre pays, ne doit pas ruiner les gens en leur faisant faire des dépenses pharaoniques pour des centres carcéraux qui, quand on voit ce qu'on nous demande - dernièrement, notre collègue UDC a osé dire ce que le projet de Champ-Dollon allait coûter par place de détenu... Eh bien, l'UDC n'est pas d'accord avec ceci ! Nous pensons que si la demande en cellules augmente, nous ne devons pas la résoudre en augmentant l'offre carcérale, mais en faisant simplement le vide et la place nécessaires pour les résidents qui se conduisent mal, mais en n'incarcérant pas et en ne retenant pas tous ceux qui n'ont rien à faire dans notre pays. Pour cette raison, l'Union démocratique du centre vous demande - sans les deux mains, mais simplement en fonction des explications qui précèdent - de refuser cette motion.
M. Michel Ducret (R). Eh bien, écoutez, puisque l'UDC vient de donner sa position, j'aimerais juste rappeler que, alors que ce parti avait les clés des expulsions - une responsabilité fédérale s'il en est une - on ne peut pas dire que ses représentants au Conseil fédéral aient fait beaucoup de fleurs en matière d'expulsions de criminels étrangers, bien au contraire. Il n'y a eu aucun progrès, ils n'ont pas fait mieux que d'autres. (Commentaires.) Je ne pense donc pas que ce parti-là ait plus de leçons à donner aux autres en cette matière, bien que, sur le fond de la problématique, il ait parfaitement raison.
Cela étant, le parti radical constate à nouveau que certains, ici, qui se vantaient de pouvoir, en quarante-cinq jours, remettre de l'ordre à Genève et qui, en termes de solutions, ne savent que répliquer ce qui est suggéré par les magistrats d'autres partis - qui, eux, ont réussi à se faire élire - ne peuvent apporter aucune solution sinon des récriminations. Et la solution qui est proposée, si elle a été envisagée un temps, se heurte effectivement à de simples problèmes de fonctionnalité. Et puis, de toute façon, toute négociation devient effectivement impossible au moment où l'on parasite, Mesdames et Messieurs, les contacts entre gouvernements, en s'emparant des idées émises en toute liberté et en toute franchise par un magistrat devant une commission parlementaire, et que l'on rompt le secret de fonction pour en faire son beurre et sa publicité.
Ne serait-ce que pour cette raison, Mesdames et Messieurs, le parti radical vous recommande vivement de rejeter cette proposition qui n'est qu'un sombre calque d'une idée exploratoire auparavant exprimée devant la commission des visiteurs par la magistrate chargée de ces dossiers. Nous n'entrerons pas en matière plus avant dans cette affaire.
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion nous pose quelques problèmes. Le premier, c'est le serment, c'est d'être parjure. (Brouhaha.) Tous les députés font un serment. Alors, ce dont nous nous rendons compte, c'est qu'avant les députés respectaient la parole de leur serment; aujourd'hui, comme il n'y a pas de sanction, en fait, le serment, on s'en fout, on peut y aller... On prête serment devant le peuple, et certains partis, qui disent être plus élus que les autres par le peuple, se moquent de lui ! Ils sont parjures.
Cette proposition est une imposture: ça sert à agiter, ça sert à faire du show, ça sert à nous faire croire qu'on règle les problèmes de sécurité. Il y a une confusion des pouvoirs; il y a une confusion des rôles; il y a, en s'agitant, en faisant des sorties de tous les côtés, une volonté de confisquer le travail que pourrait faire le gouvernement. Pendant ce temps-là, on ne pourra pas résoudre les problèmes de sécurité !
Ce qui se passe dans ce parlement, Mesdames et Messieurs les députés, est grave ! Nous ne sommes plus en train de faire de la politique correctement, nous ne sommes pas en train de confronter des idées gauche/droite. Certains font un show et empêchent de régler les vrais problèmes des Genevois. Mesdames et Messieurs les députés, nous devons nous poser des questions extrêmement claires à propos des difficultés que nous avons. C'est une dérive, c'est une dérive de notre vie parlementaire.
Pour ces différentes raisons, les Verts vous invitent à refuser très fermement cette motion. Et puis, après cela, une petite note d'humour. J'ai été surpris d'entendre le député UDC me dire que ce parti était pour l'expulsion des criminels avant qu'ils ne purgent leur peine - ça, ça commence à devenir fort de café ! Pour nous, quand vous dites que les prisons sont pleines et qu'il suffirait d'expulser ces criminels pour faire de la place, il s'agit bien de les expulser avant qu'ils aient exécuté leur peine. Les Verts ne sont pas pour l'expulsion des criminels étrangers, mais ils sont en tout cas pour que tous les criminels purgent leur peine, et de manière égale pour tous, en proportion des délits qu'ils ont commis.
M. Eric Stauffer (MCG). Je vous rassure, Mesdames et Messieurs, quand vous parlez de parjure, ça me fait ni chaud ni froid, parce que le parjure, il vient... (Brouhaha.) ...il vient de chez vous ! Parce que vous vous moquez des électeurs ! Vous vous moquez des gens ! (Remarque.) Non, absolument pas ! Encore une fois: moi, je n'ai pas évoqué les travaux de commission. Mais puisque la présidente de la commission a parlé, je me sens également libre du secret de fonction. Que dire, quand une conseillère d'Etat vient, ne connaît pas ses dossiers, ne connaît pas le nombre d'établissements concordataires, ne sait pas de quoi elle nous parle ?! (Commentaires.) Ça, c'est un scandale ! (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Monsieur le député, revenez à la motion !
M. Eric Stauffer. Mais, Monsieur le président, il n'y a pas deux poids et deux mesures dans ce parlement !
Le président. Revenez à la motion, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Mais c'est vrai que Mme...
Le président. Et n'accusez pas les uns et les autres de propos qui ne sont pas vérifiés !
M. Eric Stauffer. Mme la députée socialiste Loly Bolay l'avait dit à la radio: «Il faut laisser le temps à Mme Rochat, elle fait son apprentissage.» C'est bien ce que vous aviez déclaré sur les ondes de Radio Cité un certain matin ! Effectivement ! Mais, en attendant, la sécurité ne se règle pas à Genève ! Alors oui, le MCG a eu des idées, oui... (Commentaires. Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît ! (Commentaires.) Monsieur Bavarel....
M. Eric Stauffer. Il y avait plusieurs clients pour la prison dans le Valais ?! Vous me faites rigoler ! (Commentaires.) Vous, vous voyez uniquement Genève ! Moi je suis en train de vous parler de sécurité au niveau de la Suisse romande ! (Exclamations. Brouhaha. Rires.) «Suisse» ! Vous savez, le passeport suisse qui nous relie tous ici aujourd'hui !
Le président. Monsieur Stauffer, adressez-vous à la présidence !
M. Eric Stauffer. Vous transmettrez, Monsieur le président: la sécurité doit être un enjeu romand ! Dans quel pays avons-nous, à 30 kilomètres de distance, trois prisons préventives et cinq établissements d'exécution de peine ? Il faut commencer à voir un peu plus loin en termes de sécurité sur la région ! Prison préventive dans le Valais: «Mon dieu ! On va devoir faire 80 kilomètres !» Dans quel pays - par exemple, aux Etats-Unis ou en France - ne fait-on pas 80 kilomètres pour aller de la prison préventive voir un juge d'instruction ou pour faire les enquêtes ? Il n'y a qu'en Suisse qu'on voit ça, où on fait de la multiplicité ! Regardez: à Genève, nous avons cinq établissements d'exécution de peine où il y a un maximum de 22 détenus. Et il y a 23 personnes qui travaillent là-bas - entre le directeur, les sous-directeurs, les comptables... Voilà comment on fait la sécurité à Genève ! Tout cela est à balayer, Mesdames et Messieurs ! On ne peut plus, aujourd'hui, se payer le luxe de faire des petites villas avec 23 détenus et 23 gardiens pour les surveiller ! Et c'est là où j'en veux à ce gouvernement, qui est incapable d'avoir une vision à moyen et à long terme - on ne parle même pas du court terme, ça n'existe pas dans son vocabulaire !
Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs, vous pouvez critiquer encore une fois les textes parlementaires du MCG, mais, en attendant, nous apportons des solutions ! (Commentaires.) Et cette motion donnait au moins le champ libre au Conseil d'Etat pour aller investiguer. Je vous demande de soutenir le texte MCG. (Remarque.)
Le président. On essaie de retrouver un tout petit peu de sérénité... Y compris sur les bancs du MCG. Je passe maintenant la parole à M. Jornot.
M. Olivier Jornot (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suis heureux que le calme soit revenu pour pouvoir vous dire qu'en effet cette motion est absolument intolérable. Elle ne l'est pas seulement parce que son auteur en a obtenu le contenu à la faveur d'une violation du secret de fonction - même si je partage l'indignation de M. Bavarel à cet égard. Elle l'est surtout parce qu'elle manifeste une attitude, à l'égard des détenus eux-mêmes, qui est parfaitement inacceptable. Lorsque l'on lit, Mesdames et messieurs, que «l'air du Valais ne leur fera que du bien», je suppose que ce n'est pas par mépris envers les Valaisans, et je peux donc en déduire que c'est parce que le MCG considère la population carcérale comme un troupeau de bovins qu'on peut mener paître sur les alpages... (Commentaires.) ...c'est-à-dire d'une manière parfaitement irrespectueuse de la personne humaine. Rien que cela, Mesdames et Messieurs, fait qu'on n'a pas besoin d'aller plus loin... On n'aurait pas besoin d'aller plus loin dans l'étude de cette motion.
M. Stauffer, il y a un instant, a visiblement perdu ses moyens. Je me demandais d'ailleurs, Monsieur le président, si, dans les cas de ce genre, quand un député perd ses moyens et se met à injurier l'une ou l'autre personne - le règlement ne prévoyant pas la possibilité de faire appel à une assistance médicale - il ne serait pas nécessaire ou utile de faire appel à d'autres dispositions du règlement, permettant à ce parlement de délibérer tranquillement - j'aimerais que vous y pensiez à l'occasion.
M. Stauffer ne comprend strictement rien à la problématique carcérale. Strictement rien, parce qu'il confond totalement tout ce qui concerne les différents types d'exécution. Tout ce qui est préventive d'un côté, exécution de l'autre, établissements spécialisés - ceux où il y a une vingtaine de détenus - il ne connaît rien à tout ça. Et cela donne, du coup, ces espèces de textes dans lesquels on nous dit que, dans le fond, on peut envoyer les détenus à Martigny ou à Pétaouchnock, que ça n'a aucune importance, que, de toute façon, on a qu'à envoyer des juges d'instruction en train pour aller les interroger. C'est une méconnaissance du domaine carcéral qui est fascinante et qui fait que personne ne peut accorder la moindre once de crédibilité au discours du MCG sur la politique en la matière.
Pendant cette législature, Mesdames et Messieurs - pendant que M. Stauffer nous fera des crises du type de celle qu'il nous a faite il y a un instant - on va mettre à disposition 100 places pour la détention préventive à Champ-Dollon, 150 places pour l'exécution de peine par le biais de la Brenaz II, à peu près une centaine de place par le fait que les unités sanitaires vont être sorties de Champ-Dollon, respectivement l'établissement de sociothérapie de la Pâquerette déplacé dans Curabilis. Plus de 350 places de détention seront donc mises à disposition. Ça, c'est de la politique carcérale, ça, c'est de la mise sur pied de places de détention utiles... (Remarque.) ...pour emprisonner les détenus ! Tout le reste, c'est du vent, et c'est du vent mauvais. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Meissner, à qui il reste une minute.
Mme Christina Meissner (UDC). L'idée de trouver de la place ailleurs que dans la rue, pour la criminalité, est, au demeurant, bonne. Mais la prison est-elle encore à vendre ? Personne n'a posé cette question. Il y a des doutes, vu le foin qu'on a fait pour vendre la mèche à tous vents. Et c'est cela qui est regrettable. Parce que je crois que, là, il y avait peut-être de bonnes pistes. Il reste cependant quelques forteresses à vendre en montagne - l'air frais de la montagne, paraît-il, fait du bien. Il y en a un, effectivement, qui, assigné à résidence à la montagne, démontre ainsi qu'on peut purger sa peine ailleurs.
Le scandale, dans tout cela, c'est de ne pas avoir laissé, à un moment donné, l'Etat - qui était bien parti pour faire des négociations - faire son travail. Et là, on doit savoir parfois ne pas vendre la mèche. C'est la raison pour laquelle nous refuserons également cette motion.
Le président. Merci, madame la députée. La parole est à M. Poggia, à qui il reste quinze secondes.
M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Monsieur le président. Je pense qu'au lieu de prendre des airs inspirés de premiers de classe, certains seraient bien inspirés de poser les problèmes et de trouver les solutions: nous avons plus de 600 personnes à la prison de Champ-Dollon, pour 270 places ! On nous dit: «Absurde, d'acheter la prison en Valais !» Mais si c'est si absurde, Monsieur Jornot, pourquoi votre représentante au Conseil d'Etat, Mme Rochat, l'avait-elle envisagé ? Pourquoi reproche-t-on à M. Stauffer...
Le président. Merci... (Le micro de M. Mauro Poggia est coupé.) Merci, Monsieur le député ! La parole est à M. Pétroz.
M. Pascal Pétroz (PDC). Au nom du groupe démocrate-chrétien, je vous informe de ce que nous refuserons cette motion, pour toute une série de raisons évoquées avec brio par Mme Bolay dont l'intervention était parfaite.
J'aimerais juste revenir sur trois points. Le premier concerne M. Lussi. Pour lui dire qu'en réalité, s'il s'agit, pour des étrangers, de ne pas purger leur peine, ça va rendre la Suisse extrêmement attractive pour les ressortissants d'autres pays. En effet, il suffira d'être étranger, de venir en Suisse, de commettre une infraction, et puis on n'ira même pas en prison - on est mis dans un avion et l'on retourne chez soi... Fantastique ! Alors si c'est comme ça que vous voulez lutter contre la criminalité, bravo ! Le but, c'est que - et le droit fédéral le prévoit expressément - quand on commet une infraction, on va en prison; et quand on a purgé sa peine, on sort de prison et on est mis dehors si l'on est étranger. Voilà, ce n'est pas plus compliqué que ça - première chose que je voulais dire... (Remarque.) ...à l'intention de l'UDC.
Autre chose, dont il n'a pas été fait beaucoup état dans le débat, c'est la troisième invite de cette motion: elle nous demande d'évaluer le coût du transfert des prévenus ou du déplacement de juges d'instruction à Martigny. Bon, on est déjà en train d'essayer de se débrouiller avec Justice 2011 pour caser les juges d'instruction où l'on peut... Alors s'il faut, en plus, après, les faire déplacer à Martigny, puis faire revenir des détenus en détention préventive - après sept jours en prison - pour qu'ils passent devant la Chambre d'accusation, franchement, ça va être du joli ! Il faudra bien m'expliquer comment on pourrait faire ça !
S'agissant de l'air de la montagne, je pense qu'on peut s'accorder sur le fait qu'une étude mérite d'être effectuée quant à l'exécution de peine, mais, s'agissant de détention préventive, je vous rappelle qu'on parle quand même de personnes qui n'ont pas été condamnées ! Cela arrive souvent - quoi que l'on puisse en dire - que l'on soit mis en détention préventive, pour être acquitté après; ce qui signifie qu'on a été mis en détention à tort. Donc, excusez-moi, Madame la préopinante de l'UDC, mais vouloir mettre des innocents dans des bunkers, parce que l'air de la montagne leur fait du bien, je trouve que c'est totalement hors de propos.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Je crois qu'il est effectivement temps, bien au-delà de cette motion, de dire que la sanction, Mesdames et Messieurs, est venue d'elle-même. La sanction n'est pas venue par le rejet éventuel d'une telle motion; la sanction n'est pas venue par le fait que je n'ai même pas pu entrer en matière sur l'achat d'une prison - je n'ai même pas voulu entrer en matière, dans la mesure où il n'a jamais été question une seule fois d'acheter une prison en Valais ! Mes propos ont été non seulement déformés, galvaudés, mais l'objet n'était absolument pas d'acheter une prison.
Il se trouve que nous avons actuellement dix détenus en fin d'exécution de peine à la prison des Iles. Mesdames et Messieurs, la sanction, elle est venue de là. Il était prévu, par une convention, qu'une trentaine de nos détenus puissent être pris en charge par la prison des Iles; non seulement nous n'en avons pas trente, non seulement nous n'en avons que dix, mais la priorité est donnée maintenant au canton de Vaud. Si ce n'est pas une mesure de rétorsion, il faudra m'expliquer comment cela s'appelle.
L'enjeu n'est pas romand comme cela a été dit, il est national, Mesdames et Messieurs ! Il est international ! Cette problématique, sortons-la un peu de notre frontière étroite du canton, de la région. La problématique est internationale, elle ne peut pas se régler en quelques jours ni en quelques mois, vous le savez très bien.
«Gardons nos prisons pour nos résidents»... Les résidents de Champ-Dollon - pour ceux qui connaissent un tout petit peu cet établissement - c'est moins de 10% de la population actuellement dans cette prison. Cela, il faut également le savoir.
Je crois qu'il est temps, maintenant, sereinement, d'étudier toutes les possibilités. Chaque jour, l'office pénitentiaire est à la recherche de places: il n'y a pas un jour sans qu'une place dans une prison en Suisse ne soit prise par un autre détenu. Un travail fantastique est fait, tant par les gardiens - que je salue encore une fois - et par le directeur de la prison, que par l'office pénitentiaire qui s'assure d'un renouvellement au niveau national. Il n'y a pas une place de prison de libre à ce jour en Suisse, je peux vous le garantir !
Heureusement, malgré l'émotion, malgré ce tapage médiatique qui a été bien contraire à une action sereine et construite telle qu'elle était prévue, malgré cela, le travail se fait. Il se trouve que la situation est totalement inextricable, et il se trouve - comme cela a été rappelé par certain députés - que la planification est maintenant en train de se mettre en place. Les solutions existent ! Les solutions en termes d'accords de réadmission sont en train de se mettre en place, exactement en ce moment, entre le canton de Genève et la Confédération. Laissez-nous travailler tranquilles, c'est tout ce que nous demandons. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je vais faire voter cette proposition de motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 1936 est rejetée par 68 non contre 13 oui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de vos travaux et vous souhaite un excellent appétit. Nous nous retrouvons ce soir à 20h30.
La séance est levée à 19h.