Séance du
vendredi 28 mai 2010 à
20h30
57e
législature -
1re
année -
8e
session -
40e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Guy Mettan, président.
Assistent à la séance: Mmes et M. Mark Muller, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger, Charles Beer et David Hiler, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Gabriel Barrillier, Antoine Bertschy, Nathalie Fontanet, Aurélie Gavillet, Pierre Losio, Philippe Morel, Philippe Schaller, Charles Selleger et Manuel Tornare, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos travaux sur le PL 10668-A, point 144 ter de notre ordre du jour.
Deuxième débat
Le président. Je vous rappelle que la prise en considération a été votée tout à l'heure et que nous sommes maintenant en deuxième débat. (M. Eric Stauffer interpelle le président.) C'est trop tard, c'est passé ! Il n'y a pas de modification de l'ordre du jour à ce stade ! (M. Eric Stauffer insiste.) J'ai dit: «Point 4, pas d'intervention, nous passons au PL 10668-A» ! (Remarque de M. Eric Stauffer.) Vous pouvez prendre la parole sur le projet de loi 10668. Je le répète: nous sommes en deuxième débat.
Le président. A l'article 1, nous sommes saisis d'un amendement général qui modifie le montant total du crédit. Cet amendement est proposé par M. Stauffer, à qui je passe la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés... (L'orateur s'interrompt.) Enfin, ceux qui sont revenus de leur pause, car, apparemment, à voir le nombre de députés, la sécurité n'est pas un sujet qui passionne la gauche ! (Commentaires.) Oui, c'est vrai, vous avez raison, Monsieur le député, la sécurité, c'est pas leur truc !
Soyons un peu sérieux... (Exclamations.) On va essayer ! (Commentaires.) Le gouvernement nous propose une solution pour réaliser 100 places dans un délai de treize mois. Je vous ai expliqué tout à l'heure que, si nous avions une machine à remonter le temps, nous verrions qu'il y avait 500 détenus à Champ-Dollon l'année dernière et que ce nombre est passé à 600 en un an... Donc, si le Conseil d'Etat avait proposé le même projet que celui qui nous est soumis ce soir et s'il avait été réalisé, nous nous retrouverions dans la même situation de surpopulation carcérale. Le problème ne serait toujours pas résolu. Cela signifie que si l'évolution progresse de la même manière, nous aurons 100 places de plus dans un an, mais, dans le même temps, le nombre des détenus atteindra probablement les 700. Par conséquent, les mesures envisagées actuellement par le gouvernement - et il le dit clairement - ne vont pas résoudre à court terme la problématique de la détention à Genève. Je ne vous parle pas du long terme...
Au MCG, constatant que quelques procédures légales ont été supprimées pour gagner du temps dans la réalisation de ce projet de loi, notamment la mise à l'enquête et quelques autres spécialités qu'il n'est pas relevant de divulguer ici, nous partons du principe que nous pouvons faire confiance au Conseil d'Etat pour construire ce bâtiment en un an. Ce n'est pas tout à fait ce que nous avions demandé, parce qu'il fallait régler une situation d'urgence, mais, dont acte, voilà au moins un projet qui va se réaliser ! Alors, acceptons que ce projet se fasse !
Toutefois, ces 100 places ne suffiront pas. Il faudrait, étant donné que l'on va construire deux étages, envisager d'en construire un troisième, de containers, et, pourquoi pas, un quatrième. Cela ne doublerait pas le prix, puisque les fondations sont les mêmes, mais cela permettrait d'augmenter sensiblement le nombre de places: 50 ou 100 places de plus.
Mais il faut savoir que nous, parlementaires de milice, ne sommes pas équipés pour mandater à grands frais des architectes, pour établir des études de projets: nous sommes limités par nos moyens d'action.
Le MCG va donc vous faire une proposition relativement simple, qui découle du bon sens. (Commentaires.) Notre amendement préconise de doubler le montant initial de ce crédit extraordinaire, c'est-à-dire de le faire passer de 24 millions et quelques à 49 millions et quelques, dans la mesure où une autorisation de crédit n'est pas une obligation de dépense. Vous le savez aussi bien que nous, lorsque nous octroyons un crédit de 10 millions, la somme n'est pas forcément dépensée par le Conseil d'Etat. S'il peut construire avec moins, par exemple, 4 millions, il reste un boni de 6 millions, qui revient, évidemment, dans le giron de l'Etat, qui pourra en disposer pour un autre usage. En fait, c'est une façon de donner carte blanche - ce qui nous changera des cartons rouges ! - au gouvernement...
Le président. Vous devez conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je pourrai reprendre la parole plus tard ?
Le président. Non, chaque groupe a droit à trois minutes ! Les trois minutes sont écoulées. Vous devez par conséquent conclure tout de suite.
M. Eric Stauffer. Ah, c'est super ! Vous voyez, Mesdames et Messieurs, je ne vais pas pouvoir terminer mon intervention sur un sujet pourtant important. Cela montre bien, une fois de plus, que ce parlement se fout de la gueule des citoyens ! (Exclamations.) Alors, je me tais ! (Exclamations.) C'est comme ça: on ne peut pas débattre !
Le président. Merci !
M. Eric Stauffer. On ne peut rien faire ! (Exclamations.)
Le président. La parole est...
M. Eric Stauffer (hors micro). C'est un véritable scandale ! Vous ne voulez pas assumer les problèmes importants ! Continuez comme ça ! Cela ne va rien résoudre ! Je vous encourage quand même à lire l'amendement et à le voter ! (Exclamations.)
Le président. Monsieur le député, calmez-vous ! Nous avons déjà débattu de ce sujet pendant une heure et dix minutes ! (M. Eric Stauffer interpelle à nouveau le président.) Monsieur Stauffer, vous vous calmez, s'il vous plaît ! Je passe la parole à Mme Bolay.
Mme Loly Bolay (S). Merci, Monsieur le président. C'est vrai qu'il faut parfois rappeler à M. Stauffer qu'il doit quand même, c'est important, montrer un certain respect à l'égard de ses collègues et qu'il n'a pas à vociférer ainsi.
Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste n'approuvera pas l'amendement du MCG, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, j'aimerais quand même revenir sur les chiffres qui ont été donnés tout à l'heure. Certes, il y a 600 détenus, Mesdames et Messieurs, mais 275 seulement pour une exécution de peine. Champ-Dollon est une prison préventive ! Cela veut dire que ce que Genève n'a pas vu pendant des années, le concordat ne l'a pas vu non plus ! Et ce qui fait aussi défaut dans le concordat, ce sont des places d'exécution de peine ! Le concordat latin s'est engagé à construire environ 300 places, avec, notamment - cela a été dit tout à l'heure - les 60 nouvelles places de Curabilis. Cet établissement, je le rappelle, compte 92 places: soit 62 nouvelles places, puisqu'on ne compte pas celles de la Pâquerette - qui, elle, quittera Champ-Dollon. Par rapport à cela, il me semble important de préciser que Curabilis sera fonctionnel à l'horizon 2012, c'est-à-dire dans deux ans, ce qui dégagera de la place à Champ-Dollon, de même que le feront, en sortant de l'enceinte de Champ-Dollon, la Pâquerette - comme, je l'ai dit - et, aussi, «New Medico». Cela signifie que l'on pourra compter sur 150 nouvelles places: les 100 places de ce projet - tout de suite - et environ 50 à 60 places de plus avec Curabilis et «New Medico».
Mais il faut savoir qu'encore davantage de places seront créées au niveau du concordat. En effet, Curabilis étant un établissement concordataire, les places qui vont se libérer dans d'autres lieux concordataires de détention cèderont des places pour le concordat. Qui plus est - et je vous rappelle, Monsieur le président, que la commission des travaux et celle des visiteurs ont siégé ensemble sur ce projet de loi - 100 autres places pourront être envisagées, ce qui fera le double.
Mesdames et Messieurs les députés, je pense que le groupe MCG, qui a déjà critiqué le Cento Rapido, ne fait, tout bonnement, que retarder la réalisation de ces 100 places prévues dans ce projet de loi ! En effet, il n'est pas possible de construire un tel bâtiment en quelques semaines ou en quelques mois, et ajouter des étages ne ferait qu'augmenter la durée de cette construction ! M. le député Stauffer le sait très bien, mais, comme d'habitude, il veut faire la morale à tout le monde: c'est «Monsieur-je-sais-tout» ! (Commentaire de M. Eric Stauffer.) Si les 175 détenus en exécution de peine étaient incarcérés ailleurs qu'à Champ-Dollon, il y aurait... (L'oratrice est interpellée par M. Eric Stauffer.) Monsieur Stauffer, vous n'avez pas la parole, vous avez utilisé vos trois minutes ! Vous...
Le président. Il va falloir conclure, Madame Bolay !
Mme Loly Bolay. ...vous nous avez insultés hier toute la soirée: ça suffit ! Je réponds à votre proposition d'amendement !
Monsieur le président, le groupe socialiste - presque tout le groupe - votera... (M. Eric Stauffer interpelle à nouveau l'oratrice.) ...ce projet de loi qui prévoit la réalisation de 100 places...
Le président. Madame Bolay, vous avez parlé une minute de plus !
Mme Loly Bolay. ...mais nous n'accepterons pas l'amendement de M. Stauffer, lequel ne fera que retarder, je le répète, les travaux de cette construction ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame Bolay.
M. Renaud Gautier (L). Nous avons, à Genève, deux types de blaireaux... (Rires.) Le blaireau vulgaris et le blaireau carceris. Le blaireau vulgaris, comme l'a indiqué M. le conseiller d'Etat Mark Muller, a été traité de la manière dont il doit être traité: il a été exproprié ! Nous devons nous occuper ici du blaireau carceris et, plus particulièrement, d'un problème de physique: quel est le taux de compression maximum du blaireau carceris ? Sachant qu'actuellement le taux est d'un peu plus de deux pour un, c'est objectivement un maximum.
Notre collègue du MCG fait une proposition selon laquelle il serait possible de multiplier le taux de compression du blaireau par trois ou quatre... C'est une erreur de physique fondamentale ! Car le blaireau, une fois compressé, dépassé un certain stade, explose ! Ce qui peut générer des maladies. Par exemple, la «blaireauragie»... (Rires.)
Il n'est pas raisonnable aujourd'hui d'imaginer qu'en multipliant le nombre de blaireaux au mètre carré on arrivera à résoudre le problème des blaireaux ! En effet, vous n'augmentez pas la surface disponible: vous densifiez le blaireau ! (Rires.) Or, le blaireau ne se densifie pas !
La proposition de M. Stauffer, en tant que telle, est intellectuellement intéressante, mais elle est totalement impraticable ! Nous avons mis du temps à traiter le problème du blaireau carceris, certes, mais ce n'est pas une raison pour aggraver la situation en les compressant plus qu'il n'est possible ! C'est pourquoi il vous faudra, Mesdames et Messieurs - hélas ! - accepter ce crédit dans sa version initiale, et non pas dans sa version modifiée. (Applaudissements.)
M. Fabiano Forte (PDC). Les démocrates-chrétiens soutiendront l'amendement du groupe MCG... (L'orateur est interpellé par M. Jean-Michel Gros.) On me demande de répéter...
Le président. Poursuivez, Monsieur le député, s'il vous plaît !
M. Fabiano Forte. Je veux bien, mais je suis interrompu ! Les démocrates-chrétiens - je le répète pour M. Gros qui semble avoir quelques problèmes d'audition ce soir - accepteront l'amendement du groupe MCG, car ils souhaitent autoriser le Conseil d'Etat à dépasser le montant initial du crédit prévu pour 100 places. Nous lui avons d'ores et déjà dit d'aller de l'avant - notre déclaration était assez claire - mais nous souhaitons donner un signal encore plus formel pour l'engager à aller encore plus loin dans ce sens. Tout en sachant que cela ne résoudra pas le problème à court terme...
Une voix. Electoralement ! (Rires. Applaudissements.)
Une autre voix. Elle est belle ! (Brouhaha.)
Le président. Il faut poursuivre, Monsieur le député !
M. Fabiano Forte. Si vous arrivez à faire régner l'ordre dans la salle, je poursuivrai, Monsieur le président !
Le président. Monsieur le député, c'est vous qui parlez, alors il faut assumer vos paroles ! (Rires.)
M. Fabiano Forte. Je conclurai ainsi. Hier soir, nous avons eu une belle leçon, passant du virtuel au réel... Eh bien, j'inviterai - et vous transmettrez, Monsieur le président - mon collègue Jornot et son groupe à passer au réel, soit à passer à l'action en acceptant cet amendement. (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). En cette Année internationale de la biodiversité, j'aimerais que l'on montre un peu de respect pour la faune... Après avoir abondamment parlé des moeurs du blaireau, j'aimerais que l'on s'inspire de celles de nos amis et cousins primates à quatre pattes, en l'occurrence des chimpanzés. Il y a deux jours de cela, une grande spécialiste en la matière - une grande dame, Jane Goodall - est venue à Genève nous parler des moeurs de nos cousins, moeurs pas très éloignées des nôtres non seulement dans leurs bons côtés, mais aussi dans leurs mauvais. Mais eux, nos cousins, ont trouvé un moyen d'évacuer leur agressivité: avant d'entrer en session, ils prennent le temps de taper très fort le sol de leurs pieds et de courir un bon coup autour de la salle avant de s'asseoir - bien épuisés - ce qui leur permet de discuter dans la sérénité, voire de se tendre la main... Je propose que nous nous en inspirions !
En l'occurrence, je crois que tout a été dit sur ce projet. Ce n'est pas en doublant une somme que l'on arrivera à loger plus de...
Une voix. Blaireaux ! (Rires.)
Mme Christina Meissner. Les blaireaux ont été évacués manu militari de la prison. Et ils ne sont plus revenus, d'ailleurs ! Quoi qu'il en soit, ce n'est pas en doublant des crédits que nous ferons de bons projets ! Je crois qu'il faut rester dans l'enveloppe actuelle, et le groupe UDC ne votera pas cet amendement.
Le président. Merci, Madame la députée. La dernière intervention sera celle de M. Hohl.
M. Frédéric Hohl (R). Il me semble qu'il faut quitter le monde des animaux et revenir à la construction ! Vous proposez de doubler le budget de construction... Pourquoi pas le tripler ou le quadrupler ? C'est une fausse bonne idée ! Cela part d'une bonne intention. Et, nous le comprenons bien, vous avez envie que le gouvernement construise un ou deux étages de plus. Moi aussi !
Mesdames et Messieurs les députés, je vous le rappelle - c'est assez simple - le gouvernement va réaliser son projet de 100 places, mais cela ne l'empêche pas, dans un ou deux mois, de nous annoncer qu'il a trouvé une autre solution et qu'il peut ajouter un étage. Ce nouveau projet passera en commission des finances, et il n'aura certainement aucun problème à obtenir un budget supplémentaire. Cet amendement est une fausse bonne idée, il ne sert absolument à rien ! Je vous encourage donc, Mesdames et Messieurs, à refuser cet amendement qui ne sert à rien. Et, je le répète, le gouvernement aura tout loisir de faire passer un nouveau projet en commission des finances si, tout à coup, il estime qu'il est possible de construire un étage de plus, car - et nous sommes tous d'accord sur ce point - ce projet à 100 places n'est pas suffisant !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur l'amendement général présenté par le MCG. Vous avez cet amendement sous les yeux, il modifie le titre, l'article 1 et l'article 2 du projet de loi: le montant total passe de 24 984 000 F à 49 967 400 F.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 56 non contre 22 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 à 6.
Troisième débat
Le président. En troisième débat, nous sommes saisis du même amendement général. Je passe la parole à M. Poggia.
M. Mauro Poggia (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. Je suis effaré du spectacle que nous donnons à ceux qui nous regardent ce soir... (Rires et exclamations.) Nous sommes un parlement majoritairement irresponsable !
Pourquoi, «irresponsable» ? La droite demande davantage de sécurité... La droite, par l'intermédiaire du chef du département, met en place l'opération Figaro visant à débarrasser nos rues de cette petite délinquance qui pourrit la vie de nos concitoyens. Ces gens qui sont arrêtés doivent être détenus le temps d'être déférés devant la justice, condamnés ou acquittés. Or ils vivent aujourd'hui dans des conditions lamentables, dans une prison qui est notoirement surchargée !
D'un côté, vous demandez que l'on soit plus strict au niveau de la sécurité, mais, de l'autre, en refusant cet amendement, vous allez rendre la prison encore plus incapable d'accueillir les personnes que vous voulez que l'on arrête et qui seront, de ce fait, mises en liberté plus rapidement. Ou, tout simplement, sachant d'avance qu'il n'y a plus de place, la police ne prendra même plus la peine de les déférer devant un juge d'instruction ! Donc, les députés de droite - excusez-moi: sous réserve du PDC, qui a soutenu notre amendement - vous êtes absolument inconséquents et irresponsables !
Quant à la gauche, Mesdames et Messieurs...
Des voix. Ah !
M. Mauro Poggia. ...vous qui défendez la dignité humaine: où est la dignité humaine des personnes qui sont arrêtées, qui sont présumées innocentes et que l'on entasse dans des cellules ? Vous êtes aussi inconséquents et irresponsables que les députés de droite ! Vous êtes en train de faire une alliance de l'absurde pour refuser notre amendement, tout simplement parce que l'idée vient du MCG !
Réfléchissez une seconde ! Que cherchons-nous véritablement ? A mettre les criminels et les délinquants en prison ! En faisant en sorte que ces derniers, tant qu'ils sont présumés innocents, soient traités dignement ! Et nous devons trouver un consensus sur cette base ! Comment pouvez-vous décemment refuser un amendement qui est l'expression du bon sens ? (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Engelberts, à qui il reste cinquante secondes...
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président... (L'oratrice est interpellée.) Oh, ça ne me fait pas rire ! Je voudrais juste dire qu'il y a quand même quelques critères par rapport à la vie communautaire. Je pense que certains d'entre vous sont déjà allés dans des prisons, certains y ont peut-être vécu en tant que visiteurs, en tant que professionnels ou, même, d'une autre manière... (Commentaires.) Et cela ne fait pas vraiment sourire !
Quelle qu'en soit la raison, quand vous passez un certain temps en prison, quelques semaines, quelques mois, voire quelques années - je pense en particulier aux professionnels - vous vous rendez compte que certaines choses y sont insupportables et conduisent à la violence. Tout ce qui a trait à l'espace réservé à chaque prisonnier est donc totalement fondamental ! Quand on ne peut pas réfléchir un minimum, avoir un tant soit peu de silence, la situation est très difficile. Or, dans une prison, ce n'est pas possible: il y a du bruit constamment, jour et nuit, 24h/24 ! Et, à six détenus dans une cellule, c'est encore plus insupportable: la promiscuité est telle qu'il leur est impossible de se respecter les uns les autres !
Le président. Il va falloir conclure, Madame la députée !
Mme Marie-Thérèse Engelberts. Oui, je conclus tout de suite ! Ce qui veut dire que tout ce que l'on cherche à faire et tous les objectifs que l'on fixe dans ce domaine sont réduits à néant si nous ne pouvons pas donner un espace suffisant aux prisonniers ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Madame... (Rires.) Merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, j'allais dire «Madame la députée», car je voulais répondre directement à ma préopinante ainsi qu'à M. Poggia. J'ai déjà eu l'occasion de le dire ici, dans cette salle: j'ai fait de la prison, j'ai été condamné à six mois comme objecteur de conscience, et je sais un peu ce que signifie être en prison. A l'époque où il n'y avait pas encore de service civil, les objecteurs de conscience purgeaient leur peine - parce qu'elle était généralement courte - avec des détenus de droit commun qui avaient écopé d'une longue peine et qui étaient en fin d'incarcération. Effectivement, les prisons sont des lieux de violence; effectivement, les prisons sont des lieux de rapports de force. Mais vous ne pouvez pas «allumer», insulter les institutions toute l'année et croire - alors que l'on essaie de réaliser des projets concrets, et nous vous l'avons déjà signalé aujourd'hui, nous, les Verts, nous sommes scandalisés par la procédure qui est utilisée - que vous allez pouvoir résoudre un problème sérieux avec un amendement rédigé sur un coin de table ! Vous vous moquez de nous en nous faisant une telle proposition !
Ce que nous aimerions maintenant, c'est que l'on réalise des projets sérieusement en utilisant les procédures normales, c'est que l'on prenne les choses en amont ! Cela fait une bonne dizaine d'années que nous, les Verts, dénonçons les problèmes de la prison, de la dignité des détenus, alors ne venez pas nous faire la leçon maintenant ! D'autant moins que vos discours - comme votre proposition de motion d'hier soir - sont plus que fascisants ! (Exclamations.) Je pense que vous êtes les derniers à pouvoir nous donner des leçons ! (Applaudissements.)
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat ne souhaite pas que cet amendement soit adopté, et ce pour plusieurs raisons. La première, c'est que le projet que vous allez voter ce soir est un projet de construction avant un crédit ! Vous pouvez donc voter la somme que vous voulez, nous réaliserons ce projet de construction, basé sur des plans précis, fondé sur une autorisation de construire, et rien d'autre !
La deuxième raison est la suivante. En déposant cet amendement, en décrétant qu'il suffit de doubler le crédit en question pour pouvoir doubler la capacité de ce bâtiment, vous faites croire à ceux qui nous écoutent qu'il est possible, dans des délais brefs - en l'occurrence, dans l'urgence, dans les délais que vous appelez de vos voeux - de réaliser davantage de cellules que n'en propose le Conseil d'Etat. Or ce n'est pas possible ! Ce n'est pas possible pour des questions techniques, d'abord. Ce n'est pas possible pour des raisons de place au sol à Champ-Dollon, ensuite. Et ce n'est pas possible non plus pour des raisons de fonctionnement de la prison, sans parler de quelques raisons juridiques annexes qui peuvent se régler.
Vous formulez donc une proposition qui fait passer les membres du Conseil d'Etat pour des incompétents, qui fait passer les députés du Grand Conseil pour des personnes qui ne veulent pas résoudre les problèmes... Votre proposition, Monsieur le député, me fait un peu penser à celles que vous formuliez pendant la campagne, lorsque vous promettiez de résoudre le problème de la délinquance en quarante-cinq jours ! (M. Eric Stauffer interpelle M. Mark Muller.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Mark Muller. C'est parfaitement impossible ! Je tenais à expliquer que votre proposition ne résout rien: elle ne fait qu'induire tout le monde en erreur ! De plus, si elle était adoptée, elle générerait une forme de désunion entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil... Il serait tout à fait irresponsable, dans le contexte actuel de la surpopulation carcérale à Champ-Dollon, de générer une telle désunion !
Pour ces quelques raisons, je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser cet amendement, de voter le projet de loi et de soutenir le Conseil d'Etat dans son entreprise de construction de nouvelles prisons à Genève. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets à nouveau l'amendement général du MCG.
M. Eric Stauffer. Vote nominal ! (Exclamations.)
Une voix. Trop tard !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 23 oui et 1 abstention.
La loi 10668 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10668 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 81 oui contre 4 non et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons maintenant à la suite des objets que vous avez, hier et tout à l'heure, décidé de traiter en urgence. Nous commençons par le point 150 de notre ordre du jour, proposition de résolution 620, que nous traiterons en même temps que le point 151 bis, proposition de résolution 623, puisque nous avons accepté de les lier.
Débat
Le président. Je précise, Mesdames et Messieurs les députés, que trois minutes par groupe sont imparties, amendements compris. Je passe la parole à M. Hiltpold, auteur de la première résolution.
M. Serge Hiltpold (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette résolution est au coeur de l'actualité: elle a suscité passablement de débats, de fausses informations, de déceptions. Elle alimente l'actualité quotidienne de nos entreprises. J'aimerais tout d'abord vous dire, dans un cadre général, que j'espère que nos débats sur ce sujet seront empreints de dignité et de correction. Après ce que nous avons entendu, il serait souhaitable que le parlement ait des débats sereins et constructifs, «promotion constructive» étant les termes de cette résolution.
Vous savez que le CEVA - qui représente un maillon indispensable au développement structurel de la région, projet RER largement soutenu lors de la votation du 29 novembre dernier - commence à être sur les rails, malgré les quelque 20 recours dont il fait l'objet - recours d'ailleurs soutenus par un député MCG présent. C'est inévitable lorsqu'on se lance, à Genève, canton bien connu pour son côté frondeur, dans des travaux d'une telle envergure !
Quelques informations. Des projets tels que l'extension de l'aéroport en 1968, la construction de l'aérogare de Cointrin en 1985, ne se sont pas réalisés sans difficultés... On ne fait pas d'omelette sans casser d'oeufs ! Il y a toujours des contestations, il y a toujours un climat difficile.
Encore un exemple de ces constructions: l'autoroute de contournement, inaugurée en juin 1993, après sept ans de travaux, a permis un développement structurel important du canton, complété par la nouvelle ligne de tram du TCOB en cours de réalisation, desservant les communes d'Onex et de Bernex.
Acteur de ces développements, le secteur de la construction - dans son sens large - a permis une amélioration de la qualité de la vie des Genevois - je vous le concède: une fois que les travaux ont été terminés. La première campagne d'adjudication des travaux du CEVA pour les ouvrages de génie civil et de gros-oeuvre est maintenant achevée et nous constatons que, sur les 80 millions adjugés, les entreprises et les consortiums genevois et régionaux n'ont pas été mandatés à la hauteur de leurs espérances. En effet, il s'agit de grands groupes plus spécialisés dans ce genre d'ouvrages spéciaux extrêmement techniques - et ça, c'est un élément important - car ces premiers travaux étaient véritablement spéciaux: des tunnels, des tranchées couvertes, que toutes les entreprises n'étaient pas forcément capables d'assumer.
Je précise également que différents facteurs entrent en jeu dans les adjudications AIMP: le prix, la capacité de l'entreprise à assumer certains travaux, la capacité de jugement sur la formation professionnelle et sur l'emploi local. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, le but...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Serge Hiltpold. ...c'est de soutenir véritablement cette résolution, pour aider le Conseil d'Etat dans ses négociations AIMP avec les CFF !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais maintenant passer la parole à Mme Schneider Hausser, qui est la première signataire de la deuxième résolution.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Plusieurs socialistes ont signé la résolution 620 dont on vient de parler, qui met en lumière la nécessité pour le canton d'établir des critères d'adjudication permettant aux entreprises locales d'obtenir des lots de travaux, selon des critères d'apprentissage, de proximité. Cette résolution veut donner un signal au Conseil d'Etat.
Nous avons déposé aujourd'hui une seconde résolution, la R 623, qui a également la prétention de donner un signal pour assurer des conditions de travail adéquates aux personnes qui oeuvreront sur le chantier du CEVA.
Nous savons qu'une cellule d'accompagnement, composée du Conseil d'Etat, des représentants syndicaux et patronaux, a commencé à se réunir. Il faut maintenant que cette cellule puisse travailler et obtenir des mandats. La résolution 623 demande que la notion de responsabilité solidaire soit introduite dans les contrats de sous-traitance, à savoir que le paiement des salaires soit garanti par les entreprises soumissionnaires, donc qui ont reçu le contrat de l'Etat. En cas de non-paiement ou de faillite des sous-traitants, ce sont eux qui garantissent le salaire.
Il est également indispensable que les dispositifs de contrôle soient accrus, cela en termes de conditions de travail et d'exécution.
Si nous déposons cette résolution et que nous soulevons certains points, c'est aussi parce que nous venons de recevoir une réponse à l'interpellation urgente écrite 980... Nous nous posons des questions et nous sommes, disons, un peu déçus. Le DCTI a en effet décidé de modifier l'inspectorat des chantiers, qui était un exemple ou qui est un exemple parfait de partenariat des secteurs de l'industrie du bâtiment. Alors que la construction du CEVA commence et que les investissements de l'Etat ont augmenté, toute la partie concernant la sécurité des travailleurs serait, dans un proche avenir, transférée à la Suva.
La résolution 623 a l'ambition de rappeler à tous que, si le chantier du CEVA veut avoir une renommée et être un grand chantier, il doit aussi l'être pour ceux qui oeuvreront - et qui oeuvrent déjà - et, donc, leur assurer des conditions de travail adéquates et satisfaisantes.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, il semble que les illusions de certains soient en train de s'évanouir... Une fois de plus, le parlement, comme pour l'extension de la prison, réagit plutôt qu'il n'agit et qu'il ne prévoit. Et la gauche et la droite, dans cette même alliance de l'absurde, se réveille enfin !
Vous qui tous en choeur avez soutenu ce CEVA, vous vous rendez compte aujourd'hui qu'il y a des problèmes... 800 millions ont été adjugés à un grand groupe français, le groupe Vinci. Sur 1,5 milliard, il resterait, pour reprendre les chiffres du Conseil d'Etat - que le MCG considère d'ailleurs largement sous-estimés - 700 millions. Les socialistes craignent un risque de pression sur les salaires, alors que les radicaux, eux, craignent - ce qui est d'ores et déjà réalisé - que la manne que représentent ces travaux échappe aux entreprises genevoises.
Je ne résisterai donc pas à la tentation de vous lire quelques passages des résolutions qui vous sont soumises. D'abord celle des radicaux. C'est intéressant lorsque l'on sait quelle fut l'argumentation soutenue par le MCG pour s'opposer à ce train fantôme par rapport à l'argumentation de la droite. On nous dit ceci: «Il n'existe aucun exemple à ce jour d'infrastructures publiques importantes mises en soumission par des entités françaises qui n'aient été adjugée à des entreprises suisses.» Tiens ! «C'est en particulier le cas de la construction et de la rénovation de la ligne dite des Carpates (Genève-Mâcon), financée à près de 50% par la Confédération, pour laquelle l'offre d'un grand groupe suisse avait été tout simplement écartée sans autre forme de procès...». On se rend compte que, finalement, la collaboration franco-suisse n'est pas ce que l'on espérait !
Passons maintenant à la résolution du parti socialiste, signée également par certains Verts. On nous dit ceci: «L'attribution des lots aux "moins-disants" - on nous expliquera ce que veulent dire les "moins-disants" ! - majoritairement situés en dehors du canton de Genève, engendrera non seulement la prolongation des heures de déplacement pour les ouvriers venant travailler sur les chantiers du CEVA - évidemment, ils ne peuvent pas encore prendre le CEVA ! - mais aussi une pression sur les prix des sous-traitants.»
Alors, maintenant, tout le monde considère que, finalement, on n'a pas fait ce qu'il fallait et on demande instamment au Conseil d'Etat de bien vouloir - je cite: « ...se montrer beaucoup plus incisif et combatif pour défendre les intérêts de l'économie locale...». Mais qui a défendu l'intérêt de l'économie locale, il y a quelques mois, si ce n'est le MCG ? (Commentaires.)
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Mauro Poggia. Messieurs, de deux choses l'une: ou vous connaissiez les risques qui se réalisent aujourd'hui - qui étaient prévisibles, puisque le MCG les avait annoncés - et vous avez trompé les électeurs, ou alors...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Mauro Poggia. ...vous n'avez tout simplement rien vu, et vous êtes incompétents ! (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Le parjure - et c'est heureux ! - n'étant pas le fait de la droite libérale radicale ni celui de la gauche, nous venons d'entendre un bel exemple de contorsionnisme verbal, pour éviter de tomber dans l'ornière dite du «protectionnisme».
Mais quittons nos vocables et dogmes partisans... Un sage ne nous a-t-il pas enseigné qu'il ne fallait pas assimiler les mots à des idées ? Ne vivons-nous pas l'effet pervers d'une situation que tous, sauf l'Union démocratique du centre, ont soutenue ? L'ouverture des marchés, dont ceux de l'Etat, où les fonds proviennent de l'impôt, qui assumera aussi les dettes que devront payer les contribuables de notre canton et nos enfants. Même les subsides fédéraux proviennent aussi de l'impôt, donc de l'argent des contribuables suisses.
La vraie question est bien de se déterminer sur l'articulation de la redistribution de la fiscalité: doit-elle favoriser l'essor de ceux qui l'assument ou doit-elle être redistribuée à d'autres dont on sait que cette manne ne servira plus à la consommation locale ?
Chers collègues des bancs opposés, il y a quelques semaines vous interveniez pour demander des places d'apprentissage pour les enfants de sans-papiers... Un magistrat vaudois a même prononcé ces mots pour soutenir ce projet contraire à nos lois: «Nous faisons le pari de l'illégalité !» Ne sommes-nous pas dans le même cas de figure ? Plus d'entreprise, plus d'embauche, plus d'emploi, mais pas pour tout le monde ! Par éthique, je ne peux prendre le pari de l'illégalité... Mais j'aimerais vous inciter à entrer en résistance en faveur de notre économie locale et l'emploi, qui sont aussi vos préoccupations. Je vous invite donc, chers collègues, à soutenir la résolution 620.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Ivanov, à qui il reste une minute.
M. Christo Ivanov (UDC). J'essayerai d'être bref... Merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC souhaite une promotion constructive et efficace des intérêts de Genève. Cette résolution sur les travaux du CEVA soulève la problématique des adjudications et de la part qui auraient dû revenir aux entreprises genevoises ou suisses. Relevons que le groupe français Vinci s'est octroyé près de 40% du gâteau CEVA.
Il faut relever aussi la réponse du Conseil d'Etat à l'IUE 969 déposée par notre collègue Serge Hiltpold, relative à ce problème. Je lis: «A la fin d'avril 2010, après une longue procédure d'appels d'offres et des analyses multicritères à la base des évaluations des offres, les travaux de gros-oeuvre, représentant un total de près de 780 millions de francs de travaux, ont été adjugés, sans faire l'objet de recours en matière d'adjudication de la part des entreprises soumissionnaires.» Néanmoins, il n'y a pas de fumée sans feu...
Les invites de cette résolution - la R 620 - demandent au Conseil d'Etat d'être plus incisif et combatif pour défendre les intérêts de nos entreprises, car il reste 700 millions de travaux à adjuger pour le second oeuvre et les équipements.
C'est pourquoi le groupe UDC a signé la résolution 620 et la votera.
M. François Gillet (PDC). Nous, démocrates-chrétiens, sommes parfaitement conscients qu'il ne serait pas opportun de revenir au temps du protectionnisme et que les accords AIMP imposent de respecter des critères stricts lors des adjudications. Cela dit, nous savons aussi qu'un certain nombre de facteurs, dont la pondération, peuvent faire l'objet d'un certain nombre d'appréciations.
Nous souhaitons envoyer, à travers le soutien que nous allons apporter à la résolution 620, le message suivant au Conseil d'Etat. Nous pensons au futur, à savoir aux 700 millions - cela vient d'être évoqué - qui restent à adjuger pour les travaux du CEVA, et nous souhaitons que toute la marge de manoeuvre, aussi faible soit-elle, que le Conseil d'Etat a entre les mains lors de l'adjudication de ces travaux, que les CFF auront entre leurs mains, soit utilisée pour soutenir les entreprises de ce canton. Il est important que ce message soit clairement envoyé au Conseil d'Etat ce soir, et c'est la raison pour laquelle nous soutenons la résolution 620. Quant à nos collègues du MCG, ils peuvent bien ironiser sur l'attitude de nos groupes ! Si nous avions suivi le MCG, qui s'est opposé au CEVA, nous ne serions pas en train d'expliquer que l'adjudication est insuffisante: nous dirions qu'elle est nulle, puisqu'il n'y aurait pas de travaux du tout sur cette ligne... Par conséquent, la question de savoir ce qu'il conviendrait d'adjuger aux entreprises genevoises ne se poserait pas.
En revanche, les démocrates-chrétiens refuseront de soutenir la résolution 623. Nous considérons que le dispositif paritaire en vigueur aujourd'hui à Genève dans le secteur de la construction est susceptible de garantir des conditions de travail et des conditions salariales correctes pour les chantiers qui vont s'ouvrir prochainement, nous l'espérons, dans notre canton.
M. Roger Deneys (S). Une fois de plus, nous avons assisté ce soir à un «déraillement» de la part du MCG, de M. Lussi aussi... Je ne sais d'ailleurs pas très bien s'il est UDC ou MCG... (Exclamations.) Quoi qu'il en soit, cela n'a absolument aucun lien avec le débat sur le projet du CEVA lui-même, parce que l'infrastructure de transports publics est indispensable pour la République et canton de Genève, ne serait-ce que pour limiter le trafic frontalier.
Par contre, il est clair que lorsque des travaux portent sur des montants pareils, les mandats sont évidemment très importants pour les entreprises: ils peuvent garantir la survie de ces dernières ou la péjorer. Et, ne serait-ce que pour cela, le cas particulier du CEVA pose la question - quand même, Monsieur Gillet ! - du protectionnisme et de la nécessité de maintenir l'emploi local. Les entreprises locales et l'emploi local ! (Exclamations.)
Certains partis, qui se trouvent en face de moi, ont tendance à se focaliser sur les étrangers, les Roms, les frontaliers... Pour ma part, je pense plutôt que c'est fondamentalement une question de philosophie de notre société: sommes-nous favorables à des marchés ouverts, globalisés, où la logique du moins cher - toujours le moins cher - prédomine ? Et si l'on vit en Suisse, pays relativement aisé par rapport au reste du monde, cela se fait forcément au détriment de la Suisse. Cela se fait forcément au détriment des salariés suisses, cela se fait forcément au détriment des entreprises suisses. Il n'y a pas de miracle ! Tant que nous sommes pour des marchés ouverts, libéralisés, où la seule loi qui règne est celle du marché, eh bien, les entreprises et les salariés suisses seront pénalisés !
Pour cette simple raison, Mesdames et Messieurs les députés, il est fondamental de contrôler les travaux du CEVA ! Parce que l'une des tactiques utilisées par les entreprises pour garantir leurs bénéfices, c'est évidemment de recourir à des sous-traitants. Et cela, avec l'Union européenne, peut vouloir dire embaucher des employés qui viennent de l'Est, qui viennent des pays du Sud, qui sont illégaux aussi dans les pays voisins et qui ne reçoivent pas des salaires décents, des salaires corrects !
Mesdames et Messieurs les députés, il est fondamental, avec la résolution socialiste 623... (M. Eric Stauffer présente la page d'un journal à la caméra de Léman Bleu.) ...de garantir que les chantiers du CEVA seront contrôlés et que les travailleurs de ces chantiers seront payés aux conditions locales ! Si tel n'est pas le cas, l'Etat cautionnerait le démantèlement de l'Etat suisse, ce qui n'est pas acceptable pour les socialistes !
Nous vous demandons, par conséquent, d'accepter la résolution 623, pour garantir des conditions de travail décentes sur les chantiers du CEVA et, tout simplement, pour garantir la survie de l'économie genevoise à long terme.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. Et les questions globales sur le protectionnisme doivent être abordées à part ! C'est d'abord pour les entreprises et les salariés que nous devons contrôler les chantiers. D'ailleurs, hier, vous auriez aussi pu...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. ...contrôler les chantiers de Sovalp ! Parce qu'il n'y aura pas de contrôle !
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. Donc, oui à la résolution 623 pour des chantiers contrôlés ! (M. Eric Stauffer présente à nouveau la page d'un journal à la caméra de Léman Bleu.)
Le président. Monsieur Stauffer, nous ne sommes pas au cirque: pas d'exploit d'exhibitionnisme. Je passe la parole à M. Jeannerat.
M. Jacques Jeannerat (R). Pour commencer, je m'étonne des propos tenus par un député du dernier petit parti entré dans ce parlement, parti qui veut donner des leçons sur le CEVA, alors qu'il a toujours été opposé à ce projet.
S'agissant du fond de la question, je tiens à réaffirmer la position du groupe radical en faveur de l'application des accords internationaux qui lient la Suisse, notamment ceux relatifs à l'ouverture des marchés publics. Ils posent un cadre ainsi que des principes généraux, mais laissent une marge de manoeuvre au demeurant nécessaire aux autorités adjudicatrices.
S'agissant plus particulièrement du CEVA, c'est - avec la future traversée du lac - le chantier du siècle, qui non seulement va dessiner l'aménagement régional de ces prochaines décennies, dont il constitue la colonne vertébrale, mais va surtout générer, grâce à l'effet multiplicateur des activités de construction, plusieurs centaines de millions de retombées économiques pour le canton.
Si les premiers travaux adjugés ont en grande partie échappé aux entreprises genevoises, voire aux entreprises suisses, il n'y a pas de soupçon à avoir quant à des irrégularités ou une inégalité de traitement qui auraient désavantagé les prestataires locaux, quand bien même la déception bien légitime de ceux-ci est compréhensible. Il s'agit, au demeurant, de travaux lourds, pour lesquels les entreprises qui détiennent le savoir-faire ne sont pas très nombreuses et pas toujours «genevo-genevoises». Je pense, par exemple, aux tunneliers... Les CFF ont mené le bal, et le canton s'est contenté - ou a été contraint - de suivre !
En revanche, pour les 700 millions qui restent, qui concernent les travaux de second oeuvre, l'impact sera différent car les spécificités ne sont pas les mêmes. Ce sont des centaines d'entreprises et d'artisans locaux qui sont concernés. Il importe donc, aujourd'hui déjà, d'apporter un soutien au Conseil d'Etat pour que celui-ci se sente légitimé à introduire des éléments de politique économique dans la mise en soumission des travaux à venir, dans l'appréciation des offres et les décisions d'adjudication.
Cela signifie notamment de tenir compte de l'emploi, de la formation, du développement durable, de la proximité, etc., conformément d'ailleurs au contenu du discours de Saint-Pierre.
Genève apporte 43% du financement à ce projet. Genève a donc son mot à dire, même vis-à-vis des CFF, qui ne peuvent pas faire comme ils veulent sans tenir compte de ces points.
En ce sens, le Conseil d'Etat - il faut le souligner - a déjà franchi un premier pas en acceptant la constitution d'une cellule d'accompagnement tripartite des travaux du CEVA. Cette cellule doit se voir investie de larges pouvoirs non seulement pour le suivi des travaux, mais, également, pour le balisage de la procédure d'adjudication des travaux à venir.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jacques Jeannerat. Je conclus, Monsieur le président ! La résolution 620 arrive à point nommé pour ancrer un changement de perspective en matière de marchés publics. Le moins-disant, encore trop systématiquement choisi...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Jacques Jeannerat. ...doit clairement céder sa place au mieux-disant.
Le président. Je vous remercie !
M. Jacques Jeannerat. J'en ai pour dix secondes, Monsieur le président !
Le président. Non, c'est dix secondes de trop !
M. Jacques Jeannerat. C'est en amont des procédures que l'on peut agir. Il appartient au politique d'en prendre conscience et de faire valoir ses vues en la matière.
Le président. Merci ! Je vous coupe la parole !
M. Jacques Jeannerat (hors micro). Le Conseil d'Etat a besoin de l'appui du Grand Conseil pour concrétiser cette approche.
Le président. Je passe la parole à M. Norer ! (Remarque de M. Jacques Jeannerat.) Vous n'avez plus la parole, Monsieur Jeannerat ! (Commentaires. Exclamations.) Monsieur Jeannerat, vous devez respecter la règle, qui est valable pour tout le monde ! Je profite d'ailleurs de l'occasion pour demander aux opérateurs de Léman Bleu de filmer les orateurs et non pas les clowneries de certains députés ! (Exclamation de M. Eric Stauffer.) Je passe maintenant la parole à M. Norer.
M. Olivier Norer (Ve). Le groupe des Verts est assez cohérent avec son programme politique: nous avons toujours soutenu le développement des transports publics dans notre région, c'est pour cela que nous avons voté pour le CEVA; nous soutenons toujours l'emploi local, c'est pour cela que nous avons signé ces deux résolutions. En ce sens, nous continuons à soutenir le développement des transports publics, et c'est pourquoi nous ne contesterons pas les adjudications qui ont été faites.
Toutefois, nous souhaitons garantir que toutes les considérations légales en la matière soient considérées par l'Etat, par les CFF. Et ces deux résolutions permettront d'avoir des garanties en termes d'emploi local. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. M. Meylan a droit... Désolé, Monsieur Meylan, le temps des libéraux... (Commentaires.) Non, excusez-moi ! Il s'agissait de M. Hiltpold, qui a parlé comme premier signataire... (Un oiseau entre dans la salle. Exclamations. Le président quitte sa place, recueille l'oiseau et le laisse s'envoler par l'une des fenêtres. Exclamations. Applaudissements. Commentaires.) Monsieur Meylan, vous avez toujours droit à trois minutes !
M. Alain Meylan (L). Merci, Monsieur le président. Au nom du groupe libéral, j'interviendrai sur cette résolution, en partie issue du premier intervenant, résolution dont le but est d'introduire une vision positive du développement de Genève.
Vous connaissez les discussions qu'il y a eu sur le CEVA: il s'agit maintenant de réaliser ce projet dans le cadre défini par les accords internationaux - par notre droit national, également - de façon qu'il respecte toutes les normes, mais aussi, et je le dis très clairement, nos entreprises. Ces dernières auront - et ont - la possibilité de réaliser le CEVA dans la mesure de leurs compétences et de leurs possibilités d'action, et je suis persuadé qu'elles sauront relever ce défi.
Cette résolution veut se tourner résolument vers l'avenir. Tout ce qui a été expliqué et fait jusqu'à maintenant - cela a déjà été évoqué - a porté sur des travaux très spécifiques. Nous sommes toutes et tous enclins à dire que nos entreprises sauront - j'en suis personnellement intimement persuadé - répondre à ce défi à l'avenir. L'avenir, c'est aussi - puisque nous respectons les accords internationaux, nos accords nationaux - que les entreprises qui viendront chez nous respectent nos accords ! Nos conventions, notre système de régulation du marché, nos acquis sociaux. Et c'est moi qui le dis ! Nous proposons quelque chose de positif: nous voulons aller de l'avant, contrairement au MCG qui s'oppose à tout, qui décrie tout et son contraire, qui ne propose rien, qui ne construit rien, qui démolit systématiquement ce que nous voulons construire tous ensemble dans ce parlement et sans trop de recours ! J'imagine que la personne qui a pris la parole ce soir sera probablement l'une des dernières à présenter un recours sur le projet du CEVA, pour faire en sorte - mais j'espère que ce ne sera pas le cas - qu'il ne puisse pas être réalisé dans les délais souhaités !
Je suis persuadé... (L'orateur est interpellé.) Vous ne voulez rien, alors c'est normal ! (Exclamations.) Vous ne voulez pas que Genève se construise ! Je le sais, on le sait, nous l'avons entendu ce soir ! Arrêtez vos gesticulations, nous ne les connaissons que trop, et elles nous fatiguent à longueur de soirées ! (Exclamations.)
Maintenant, c'est le moment de construire ! C'est le moment de réaliser ! C'est le moment de réaliser des lieux, des lieux pour les prisons, des infrastructures, et c'est le moment d'aller de l'avant !
Mesdames et Messieurs, je le répète, cette résolution se veut positive. Je regrette, quant à la résolution socialiste...
Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Alain Meylan. La résolution socialiste enfonce des portes ouvertes, dans la mesure où tout ce qu'elle indique est en cours. Et c'est dommage !
Le président. Merci, Monsieur Meylan !
M. Alain Meylan. Le groupe libéral soutient cette résolution et soutient la construction du CEVA !
Le président. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Mark Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Lorsque le Conseil d'Etat a pris connaissance des adjudications des travaux pour le CEVA, il n'a pas été moins déçu que vous. Il espérait également qu'une large majorité des travaux de génie civil et de gros oeuvre reviendrait à des entreprises genevoises ou de la région romande. Malheureusement, tel n'a pas été le cas ! Quand nous avons fait ce constat, nous avons décidé de regarder de près comment les choses s'étaient passées, et j'aimerais vous donner quelques informations à ce sujet.
La première information importante - je pense - est de vous expliquer comment se font les adjudications. Il existe un comité d'adjudication, composé paritairement de représentants de l'Etat de Genève et des CFF. Ce comité d'adjudication examine les offres effectuées et, sur la base de critères préétablis, très rigides, adjuge les travaux.
La procédure que nous avions mise en place faisait en sorte, en cas de désaccord entre les représentants des CFF et les représentants de l'Etat de Genève, que le marché en question remonte et soit soumis aux instances politiques compétentes aussi bien au niveau de la direction des CFF qu'à celui du Conseil d'Etat. Eh bien, à aucun moment, le Conseil d'Etat n'a été saisi, pour la simple et bonne raison que le résultat des offres était extrêmement clair ! Pour la plupart des marchés en question - et vous devez entendre cela, Mesdames et Messieurs ! - la différence entre l'offre de l'entreprise française Vinci et la meilleure offre suisse était de 10% ! L'entreprise française était régulièrement 10% meilleur marché que la meilleure entreprise genevoise. Dans ces circonstances, nous n'avions évidemment pas d'autre choix que d'adjuger à l'entreprise Vinci.
Autre chose importante relevée au cours de ce débat: aucun recours n'a été déposé contre les adjudications. C'est le signe clair que la procédure a été parfaitement respectée, que les adjudications sont correctes et que personne n'a rien à y redire, qu'aucun concurrent évincé ne considère avoir été maltraité. C'est bien le signe que tout s'est passé de façon parfaitement correcte.
Ce que je souhaite, Mesdames et Messieurs - et ce que souhaite le Conseil d'Etat - c'est que, pour la deuxième phase des adjudications, qui porteront sur des travaux de second oeuvre, les entreprises genevoises soient concurrentielles ! Qu'elles soient compétitives, qu'elles fassent, chacune de son côté et pas forcément après s'être entretenue avec ses concurrents, la meilleure offre possible, afin de remporter ces marchés. C'est le voeu le plus cher du Conseil d'Etat ! Et je lance ce message à ces entreprises: «Faites votre meilleure offre, et vous serez désignées pour réaliser ces travaux», c'est mon voeu le plus cher !
Autre élément - et je m'adresse-là aux auteurs de la seconde résolution - vous l'avez reconnu, et je vous en remercie: le Conseil d'Etat a décidé d'accéder à la demande des syndicats... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et de créer une cellule de suivi des travaux: suivi paritaire, maître d'ouvrage, patronat, syndicats. Cette cellule fera son travail de suivi et de vérification du respect des règles applicables à Genève, du respect des conventions collectives, du respect des contrats, bref, du respect de l'ensemble des règles qui s'appliquent à Genève. Nous ferons ce travail, et nous le ferons très consciencieusement. Nous serons impitoyables avec les entreprises qui ne respecteront pas ces règles, le Conseil d'Etat vous l'assure !
J'en viens à la clause de solidarité que vous appelez de vos voeux. Je crois que vous l'interprétez à l'envers, Madame Schneider Hausser ! Vous dites qu'en raison de cette clause de solidarité l'entreprise va devoir s'engager à payer les salaires aux ouvriers d'éventuelles entreprises sous-traitantes... Ce n'est pas cela, la clause de solidarité que nous allons tenter de faire inscrire dans les contrats d'entreprises ! Au contraire, cette clause engagera l'entreprise soumissionnaire vis-à-vis du Conseil d'Etat à faire en sorte que les travaux soient réalisés selon les spécifications et selon le contrat. Ce n'est pas tout à fait la même chose, mais je tenais quand même à clarifier ce point-là. Ce que nous souhaitons, c'est faire en sorte que les entreprises sous-traitantes respectent les mêmes conditions contractuelles vis-à-vis du Conseil d'Etat - puisque ces entreprises s'engagent vis-à-vis du maître d'ouvrage: le canton de Genève et les CFF - et c'est cela que nous allons tenter d'obtenir de la part des entreprises adjudicataires, dans le cadre des négociations contractuelles en cours actuellement.
Voilà ce que je souhaitais vous dire ce soir sur ce processus du CEVA ! Le Conseil d'Etat est extrêmement engagé dans ce dossier, mais il l'est surtout pour que les travaux démarrent ! Et pour que le CEVA se réalise ! Après tout, c'est l'objectif numéro un ! Par ailleurs, il incombe aux entreprises genevoises de se montrer plus compétitives, et elles obtiendront une part plus importante des travaux. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'en profite pour saluer à la tribune notre ancienne collègue, Mme Caroline Bartl. (Applaudissements.)
Nous allons nous prononcer sur ces deux résolutions. Je vous soumets tout d'abord la première, proposition de résolution 620.
Mise aux voix, la résolution 620 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 85 oui (unanimité des votants).
Le président. Nous nous prononçons sur la deuxième résolution.
Mise aux voix, la résolution 623 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 43 oui contre 42 non et 1 abstention. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Nous passons au point 58 de notre ordre du jour: proposition de résolution 615.
Débat
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je serai relativement... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs !
M. Fabiano Forte. Je voulais être bref, mais... Donc, je serai relativement bref ! Je crois que la lecture, hier soir, du courrier du Syndicat du personnel de la douane et des gardes-frontière a donné l'ensemble des éléments qui ont conduit au dépôt de cette résolution.
Le groupe démocrate-chrétien regrette seulement une chose, c'est que ce parlement ait mis un mois pour se rendre compte de la situation et pour voter le débat en urgence sur un texte parlementaire qui demande une chose extrêmement simple au gouvernement fédéral: annuler sa décision de ne pas procéder à l'engagement de 20 gardes-frontière supplémentaires pour effectuer le travail de surveillance à nos douanes et à nos frontières.
J'aimerais insister sur ces 20 douaniers supplémentaires. Il s'agissait de 20 résidents genevois; 20 personnes qui habitent dans ce canton; 20 personnes qui avaient la volonté de suivre une formation; 20 personnes qui voulaient effectuer un travail particulièrement dur. Et quelle a été la réponse de la Confédération à ces 20 personnes ? «Mesdames et Messieurs, merci d'avoir effectué tout le processus d'engagement; merci de nous avoir adressé votre dossier de candidature, mais on ne vous prend plus ! Il faudra revenir l'année prochaine pour voir si nous avons une disponibilité budgétaire à ce moment-là...» !
Comme vous pouvez le lire dans la résolution déposée par le groupe démocrate-chrétien, nous estimons que le Département fédéral des finances, qui est un département assez important, pour ne pas dire «mammouth», aurait pu trouver d'autres pistes d'économies, puisqu'il répond à une volonté du Parlement fédéral ! Eh bien, nous demandons que le Conseil fédéral revoie sa position non seulement pour Genève, mais, également, pour les autres cantons. En effet, le problème est genevois, nous traitons de nos frontières, mais ce sont des frontières nationales. Et je n'aimerais pas que, demain, la situation que nous vivons aujourd'hui à Genève perdure, à savoir que nous devions continuer à faire appel - à grands frais ! - à des renforts de Suisse alémanique, à des renforts du Tessin. Il y a des douaniers qui prennent l'avion plusieurs fois par mois, sans compter les frais hôteliers, etc., et l'on se demande véritablement où sont les sources d'économies dans ce domaine ! (Brouhaha.)
Alors, avant que d'autres cantons ne fassent le grief au canton de Genève de «piquer» - entre guillemets - des effectifs du Corps des gardes-frontière et que cela ne devienne un véritable problème national... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, écoutez l'orateur !
M. Fabiano Forte. ...nous demandons - par le biais de cette résolution, qui est somme toute très simple - que l'on revienne à la situation antérieure, c'est-à-dire que l'on annule purement et simplement la décision de supprimer ces 20 postes de gardes-frontière et que la Confédération tienne ses promesses vis-à-vis de ces personnes qui veulent faire une effort de formation et qui veulent accomplir un job particulièrement difficile. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, dans la «Tribune de Genève», vous pouvez lire ceci: «Voleur de coffres pincé en flagrant délit par des gardes-frontière»... Voilà la une de la «Tribune de Genève» !
Mesdames et Messieurs, je vous le demande une nouvelle fois: les 11 conseillers nationaux que Genève a envoyés à Berne, que font-ils pour Genève ? Ont-ils défendu la cause genevoise ? Ont-ils expliqué au Conseil fédéral que Genève compte 170 km de frontière avec la France et seulement 6 avec la Suisse ? (Exclamations.) L'ont-ils expliqué ? Mais non ! Quand on arrive à Berne, eh bien, on ne fait plus rien ! Les assurances-maladie, on s'en fout ! Les gardes-frontière, on s'en fout ! On se demande bien ce qu'ils font à Berne, parce que, nous, on n'en entend jamais parler ! Alors, il faut maintenant que nous, parlement genevois, insistions pour que le Conseil d'Etat demande aux autorités fédérales - puisque les conseillers nationaux ne font pas leur boulot - de mettre des gardes-frontière à la frontière !
A ce propos, il faut soutenir les gardes-frontière. Demain matin, une manifestation organisée par le MCG va avoir lieu à la douane de Moillesulaz. Venez montrer que vous êtes derrière eux, venez montrer...
Le président. Monsieur le député, revenez à la résolution, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Mais, Monsieur le président, cette résolution concerne les douanes, et, justement, il se trouve qu'il y a une manifestation autorisée par le DSPE... (Exclamations.) ...à la douane de Moillesulaz, demain ! Je suis donc pile dans le sujet, Monsieur le président ! Je ne suis pas du tout hors sujet ! Je donne rendez-vous - demain matin à 10h, à la douane de Moillesulaz - à tous les citoyens responsables ! Téléphonez à vos proches...
Le président. Ce parlement n'est pas une tribune pour faire de la propagande ! Revenez à la résolution, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...amenez du monde et venez soutenir les gardes-frontière, ils ont besoin de vous ! Venez les soutenir, comme ce parlement s'apprête à le faire maintenant. Je vous demande de soutenir les gardes-frontière ! Je vous demande de voter cette résolution ! Nous, au MCG, nous n'en étions pas signataires - mais nous ne sommes pas sectaires, nous ne vous en voulons pas... Pour nous, ce qui prime avant tout, c'est le bien du peuple... (Exclamations.) ...et nous n'allons pas voter contre un projet, parce qu'il a été déposé par tel ou tel groupe ! Ce qui nous intéresse, c'est le bien-être de nos concitoyens, et c'est surtout de laisser la racaille là où elle se trouve, c'est-à-dire de l'autre côté de la frontière ! (Applaudissements.)
M. Jacques Jeannerat (R). Je serai bref, Monsieur le président, cela vous évitera de me couper la parole aussi brutalement que vous l'avez fait tout à l'heure ! (Rires.) Je ne vais pas répéter les propos de M. Forte, je voudrais juste les compléter. Mais, tout d'abord, je signale que le groupe radical soutiendra cette excellente résolution.
Je relève simplement que, dans les trois ou quatre précédentes volées en formation, il n'y avait pas de Genevois et que, cette fois, il y en a ! Et si le Conseil fédéral maintient sa décision, ce serait vraiment dommage. Parce qu'une bonne partie de ces personnes pourraient se décourager et s'engager dans une autre voie ! Il me semble important, dans les métiers liés à la sécurité, que les personnes qui les exercent soient enracinées localement, car cela leur permet de mieux accomplir leur mission, de mieux comprendre, sociologiquement parlant, ce qui se passe dans la région.
Je vous recommande donc, comme tous mes collègues radicaux, de soutenir cette résolution.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Bertinat.
Une voix. Ah, enfin la vérité ! (Commentaires.)
M. Eric Bertinat (UDC). Merci, Monsieur le député ! Je trouve que les sujets traités ce soir sont particulièrement révélateurs... Si l'on prend un petit peu de recul et que l'on examine les objets que nous avons décidé de traiter en urgence, ils sont presque autant d'aveux d'échec pour la droite comme pour la gauche. En effet, la libre circulation et les accords de Schengen, toutes sortes d'accords internationaux, l'AIMP, etc., tous ces dossiers sont en train de nous retomber dessus, et vos acrobatiques explications révèlent autant de choix politiques que d'échecs, ceux dont je vous parlais au début de mon intervention !
Nous devons construire des cellules en urgence, parce que nous en avons besoin ! Nous devons déposer des résolutions pour arriver à ce que les adjudications reviennent à Genève ! Et, maintenant, avec la résolution du PDC, voilà qu'il faut intervenir à Berne pour qu'on nous laisse quelques gardes-frontière !
Alors, bien évidemment, nous soutiendrons la proposition démocrate-chrétienne, mais vous ne pouvez pas empêcher l'UDC de regretter - pour rester dans l'ordre des déclarations que vous entendez - votre refus - à part le PDC, j'en conviens - de traiter notre résolution en urgence. D'autant que celle-ci demande de réintroduire les contrôles systématiques aux frontières ! Si vous voulez éviter que la prison de Champ-Dollon soit surchargée, ne convient-il pas de réintroduire les contrôles systématiques aux frontières, pour renforcer, d'un bout à l'autre, la chaîne de la sécurité à Genève ?
J'insiste, vous n'avez pas voulu traiter cet objet en urgence, et, maintenant, nous allons prendre, une fois de plus, une «petite décision», puisqu'il s'agit seulement de préserver 20 postes de gardes-frontière. Même si le groupe PDC a raison sur le fond - je le reconnais - ce n'est pas cela qui va changer fondamentalement le problème... En effet, la frontière reste une véritable passoire... L'espace Schengen a ouvert notre pays - et les autres pays aussi - à toutes sortes de criminels... Et nous sommes durement touchés, parce que notre canton est un canton frontière. Je regrette vivement, je le répète, que vous ayez refusé de traiter notre résolution en urgence, et j'espère que vous serez plus ouverts à la discussion quand il faudra la traiter. (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). J'ai été surpris par l'attitude de M. Stauffer, qui appelle à manifester demain... Il semble que cela devienne la grande mode dans ce parlement de faire des appels à la population pour manifester ! Je rappelle à toutes fins utiles que, demain, c'est la journée «Caves Ouvertes»... (Exclamations. Applaudissements.) ...et il me semble nécessaire que tout le monde s'y rende !
Cela étant dit, il me semble aussi important que nous nous soyons rendu compte qu'il y avait des besoins et qu'il était nécessaire d'y répondre. Nous avons ouvert une procédure pour recruter du personnel, mais Berne a brusquement procédé à des coupes dans les budgets, de manière quasiment linéaire, sans faire de choix - ou, tout du moins, des choix que nous ne comprenons pas - et a décidé que ces personnes ne seraient ni formées ni engagées. Nous, les Verts, déplorons aussi cette situation, et c'est pour cela que nous soutiendrons cette résolution.
Monsieur Bertinat, je tiens à vous dire que les contrôles systématiques à la frontière sont malheureusement contraires aux différents accords que nous avons signés. Nous n'entendons donc pas changer les choses en la matière: nous continuerons à être soumis au droit supérieur et à fonctionner au sein de la Confédération - ce qui, d'ailleurs, fait partie de notre serment de député - mais nous ferons également en sorte que les gardes-frontière aient les moyens de faire leur travail à Genève.
M. Pierre Weiss (L). Je n'entends pas intervenir sur cette résolution. Je veux juste revenir sur une phrase qui a été prononcée et selon laquelle «la racaille est de l'autre côté de la frontière»... Certains, une fois de plus, ont hurlé, ont profité de la caméra de Léman Bleu - qui existe encore, pour le moment, et retransmet nos débats - pour appeler les citoyens à se rassembler demain matin à la douane de Moillesulaz... J'espère que cet appel a été entendu par les infirmières de notre hôpital ! J'espère que demain matin, pour éviter d'être importunées, elles ne viendront pas travailler ! J'espère que cet appel a été entendu par tous ceux qui vivent de l'autre côté de la frontière et qui sont nécessaires au fonctionnement de notre canton - y compris les chauffeurs de bus des TPG - et que, demain, ils ne viendront pas travailler ! Pour ne pas affronter la vindicte, voire la violence qui éructe des propos de M. Stauffer !
Il y a un moment où cela suffit ! Il y a un moment où les chemises brunes qui sont dans ce parlement nous exaspèrent ! Il y a un moment où il faut dire non ! Ce soir, M. Stauffer a dépassé les bornes ! (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Vous voudrez bien transmettre à M. Stauffer une fable de La Fontaine... (L'orateur s'interrompt.) Mon siège est coincé ! Hop ! (Rires.) Bon, je me mettrai de côté ! Voici cette fable:
«Une montagne en mal d'enfant
Jetait une clameur si haute,
Que chacun, au bruit accourant
Crut qu'elle accoucherait, sans faute,
D'une cité plus grosse que Paris:
Elle accoucha d'une souris. (Rires.)
Quand je songe à cette fable
Dont le récit est menteur
Et le sens est véritable,
Je me figure un auteur
Qui dit: "Je chanterai la guerre
Que firent les Titans au maître du tonnerre."
C'est promettre beaucoup: mais qu'en sort-il souvent ?
Du vent.»
(Applaudissements.)
M. Olivier Jornot (L). Je me demandais ce que j'allais pouvoir chanter, pouvoir danser... (Rires.) Après ce qu'on a entendu ce soir, je me dis parfois que les sessions du vendredi... (Exclamations.) Peut-être même que certains projets pourraient... (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs, comme d'habitude, on part d'une bonne idée, et puis, à la fin, une fois qu'on en a tous parlé, on se demande si cela en valait la peine... Après avoir entendu le MCG soutenir ce «truc», après avoir entendu l'UDC nous expliquer qu'en réalité c'est à cause des accords de Schengen... Cela nous incite à relire l'exposé des motifs ! Et nous pouvons lire, sous la plume du parti démocrate-chrétien - qui, ce soir, aime bien la transversalité - que «ces cantons ont droit à des frontières bien gardées [...]». Excusez-moi, mais il me semblait que le parti démocrate-chrétien avait été favorable à un certain nombre de votes, notamment celui sur Schengen, qui, précisément, avait pour conséquence que les frontières ne seraient plus bien gardées, mais qu'elles resteraient ouvertes pour permettre la libre circulation ! En échange de quoi ? En échange du système de sécurité de Schengen, dont le rapport sur la politique de sécurité du Conseil fédéral, rédigé par un UDC assez notoire, nous explique que cela a renforcé considérablement la sécurité en Suisse. (Commentaires.)
Bref, pour finir, on ne sait plus de quoi on parle ! Le parti démocrate-chrétien nous propose de demander au Conseil fédéral de ne pas renoncer à l'engagement de ces jeunes gardes-frontière... Il faut évidemment soutenir cette proposition, mais, si l'on se réfère à ce qui a été dit tout à l'heure, je m'étonne que l'on ne nous demande pas d'en engager 200, 400, 600, d'autant plus que cela ne nous coûte rien ! (Commentaires.) On aurait donc pu facilement proposer d'augmenter la dose et, ensuite, pousser des grands cris pour dire que tous ceux qui s'y opposent sont contre la sécurité pour les Genevois... Je crois que j'ai bien compris la leçon ! Mesdames et Messieurs, je vous remercie ! (Rires. Applaudissements.)
Mme Loly Bolay (S). Le problème soulevé par cette résolution est important à plusieurs titres. D'abord parce que, depuis 2002, le département de M. Merz - radical - a décidé de geler les effectifs des gardes-frontière... (L'oratrice est interpellée.) Pardon ?
Une voix. Libéral !
Mme Loly Bolay. Excusez-moi ! C'est vrai qu'il y a eu un mariage depuis, mais comme je n'y ai pas été invitée... (Rires.) ...j'en suis restée aux radicaux ! (Applaudissements.)
Les effectifs ont été gelés, mais pas seulement pour les gardes-frontière: c'est vrai également pour les collaborateurs et collaboratrices de l'administration fédérale des douanes ! Là, 420 postes ont été supprimés au niveau suisse et 70 au niveau genevois, alors que la douane - j'ai pris contact avec les syndicats, qui m'ont fourni cette information - apporte un tiers des recettes au budget de la Confédération ! En 2009, elle a apporté 21,328 milliards, en grande partie grâce aux contrôles des marchandises ! Je vais vous dire comment ! Par la lutte contre le terrorisme, par la lutte contre le trafic des êtres humains, contre l'exploitation et les transits illégaux de drogues, armes et explosifs ! Mais elle a surtout été efficace dans la mise sur pied des contrôles de police routiers du trafic poids lourds, car, vous le savez, il y a là un véritable problème et la Suisse est extrêmement soucieuse en matière d'environnement.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, 70 postes ont été supprimés au niveau genevois. Ces suppressions ont certes touché les gardes-frontière, mais, également, l'administration fédérale des douanes. Comment les choses se passent-elles aujourd'hui ? Eh bien, Berne fait venir à Genève des contingents suisses allemands et tessinois. Mais, comme ces personnes ne parlent pas le français, cela engendre des dysfonctionnements au niveau de la collaboration, ce qui pose un véritable problème. De plus, l'école des 20 aspirants a tout bonnement été supprimée. Ce qui n'est pas acceptable, Mesdames et Messieurs les députés, parce que, malgré les accords de Schengen, la douane doit continuer à contrôler les marchandises. C'est son rôle ! Il n'y a pas que la libre circulation des personnes !
Je tiens quand même à vous dire que les accords de Schengen sont un plus pour les douaniers ! Car c'est le système d'information Schengen SIS qui a permis aux douaniers d'obtenir de telles performances. Avant, ils ne bénéficiaient pas de ce dispositif, mais, aujourd'hui, grâce à lui, les douanes peuvent être performantes !
Alors, je ne peux pas comprendre que M. Merz, radical-libéral...
Une voix. Libéral-radical !
Mme Loly Bolay. «Libéral-radical», très bien ! ...jeune marié libéral-radical qui dirige l'administration fiscale... (Brouhaha.) ...puisse supprimer des postes, alors que, comme je l'ai dit, cette entité apporte un tiers des recettes de la Confédération - entre 21 et 23 milliards.
Le groupe socialiste - enfin, presque tout le groupe socialiste, n'est-ce pas... (Rires.) Je ne veux pas prendre le risque de tout à l'heure !
Le président. Madame la députée, il vous faut conclure !
Mme Loly Bolay. ...votera cette résolution. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Poggia, à qui il reste quarante secondes.
M. Mauro Poggia (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. Vous direz à M. Bavarel que le groupe MCG ira aussi aux «Caves Ouvertes», pour fêter la réussite de sa manifestation qui aura lieu demain à 10h ! (Rires.)
Vous direz aussi à M. Weiss que nous n'avons jamais traité les infirmières de «racaille». Je m'étonne qu'il puisse faire un tel amalgame et, aussi, d'entendre de sa bouche un tel qualificatif à l'égard de ces braves travailleuses, qui viennent ici apporter leur soutien ! (Exclamations.)
Maintenant, un mot pour dire ceci: notre Conseil fédéral semble avoir oublié notre canton ! Il a oublié Genève lorsqu'il a négocié les Accords bilatéraux, puisqu'il n'a fixé aucun quota pour les Européens qui pouvaient - et qui peuvent - venir travailler librement dans notre canton ! De même, il a totalement oublié les frontières de Genève...
Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Mauro Poggia. ...sur plus de cent kilomètres ! Il faut le lui rappeler, puisque, comme l'a dit M. Stauffer, nos parlementaires ont été incapables de le faire jusqu'à maintenant.
M. Fabiano Forte (PDC). Etant donné que nous étions dans le registre des incantations, à ma gauche - c'est géographique; puisque nous étions aussi dans le registre statistique - face à moi - de même que nous étions dans le registre viticole, j'aimerais que l'on rende hommage à notre collègue Eric Leyvraz, qui a reçu pas moins de quatre médailles d'or pour ses excellents crus. Il me semble que nous pouvons l'applaudir, puisque, demain, c'est la journée «Caves Ouvertes» ! (Applaudissements.)
Pour revenir au sujet qui nous intéresse... (Remarque. Rires.) Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas question ici de remettre en cause les accords de Schengen, qui ont apporté un certain nombre de bienfaits à notre pays et à notre canton. Il n'en reste pas moins que, lors de la campagne de votations, un certain Hans-Rudolf Merz nous avait promis une augmentation des effectifs des douaniers à l'Administration fédérale des douanes, puisqu'il s'agissait aussi, pour le corps des gardes-frontière, de contrôler des marchandises, et pas seulement des personnes. Que constate-t-on après quelques années ? Que 430 ou 470 postes sont supprimés ! On procède à des coupes là où il ne le faut pas, là où ça rapporte en matière de fiscalité pour ce pays et pour notre canton ! Notre collègue Jornot devrait être sensible à ce genre d'argument... Il n'en reste pas moins que, oui, nous avons soutenu l'espace Schengen, et nous continuons à le soutenir. Nous sommes favorables à une Suisse ouverte, mais nous ne voulons pas que les douanes soient des passoires qui mettent en péril la vie de pères et de mères de famille ! (Applaudissements.)
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Je vais vous donner à tous l'occasion d'aller fêter une bonne nouvelle aux «Caves Ouvertes». Les bonnes nouvelles n'arrivant jamais seules - je pense au vote des 100 nouvelles cellules de tout à l'heure - je dois donner tort à ceux qui seraient tentés, comme cela a été le cas ce soir, de dire que nos élus à Berne ne font rien ! En effet, j'ai l'occasion - et je pense que cela ne va pas m'arriver souvent - donc j'ai l'occasion, à peine la résolution déposée, de vous apporter une réponse qui est une bonne nouvelle: je sais depuis hier soir, de la bouche de M. Rudolf Dietrich, directeur général des douanes, qu'il met à disposition de Genève 24 nouveaux gardes-frontière à partir de janvier. Une nouvelle école sera créée et ouvrira ses portes entre janvier et février. Genève disposera donc de 24 nouveaux gardes-frontière. Il m'a encore été précisé que cette décision a été prise à titre tout à fait exceptionnel - certains parleront d'une Genferei de plus ! En tout cas, c'est une bonne nouvelle, et je voulais la partager avec vous ce soir. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je vais vous soumettre, Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution 615. (Exclamations.)
Une voix. Appel nominal, s'il vous plaît !
Le président. Vote nominal ! Etes-vous soutenue, Madame la députée ? (Appuyé.) Très bien, c'est le cas.
Mise aux voix à l'appel nominal, la résolution 615 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 79 oui et 4 abstentions.
Le président. Nous passons maintenant au dernier objet que nous devons traiter en urgence: point 121 de notre ordre du jour.
Débat
M. Michel Forni (PDC), rapporteur. Ce projet remonte à 2009 et concerne une éventuelle transmissibilité de la réserve en matière d'assurance-maladie obligatoire. Il serait question, lorsqu'un assuré change d'assurance, de transférer à la nouvelle assurance le capital constitué par la réserve accumulée.
Ce document a été précédé d'autres textes. Vous vous souviendrez que, dans le contexte des réserves, nous avons voté le plafonnement, la cantonalisation, cela par le biais de textes déposés par plusieurs partis - libéral-radical, PDC - que nous avons déjà fait parvenir à Berne, dans le cadre de la résolution genevoise exprimant le fond de notre pensée et qui s'associe également à d'autres démarches.
Ce texte est intéressant, parce qu'il affiche d'emblée une divergence entre les auteurs et les experts consultés. Ces derniers, notamment l'OFAS, l'Institut de la santé de Neuchâtel, et, surtout, le département de la santé, ont apporté des réponses. Les chiffres fournis par ce département nous ont permis de constater que des modèles sont figés, qu'il y a des tabous, et cela peut parfaitement participer à un réexamen du mode de fonctionnement de la LAMal.
Ce texte a été amendé et finalement utilisé pour étudier les mécanismes d'explication et, surtout, de modification. Derrière ce texte, il y a des constats. Tout d'abord, le coût par assuré - c'est important de le redire - a été systématiquement surévalué à Genève et, malheureusement, la réserve des caisses a toujours été sous-évaluée.
Deuxième constat. La croissance des réserves des caisses est toujours restée à la hausse, notamment entre 2007 et 2008. Il est vrai que, depuis 2009, elle a un peu baissé. Quoi qu'il en soit, elle dépasse largement le minimum légal, qui a été calculé aux environs de 11%, puisqu'elle a atteint, à un certain moment, entre 41 et 42% du montant total des primes.
Autre constat: les primes, qui dictent normalement le taux des réserves, n'ont pas tenu compte des politiques de maîtrise appliquée par les cantons et ont continué à prendre l'ascenseur. Malheureusement, il n'y a pas de parallélisme entre le coût moyen par assuré et l'évolution des réserves. On serait donc tenté de dire qu'il y a un certain «mécanisme de séquestration». Il est donc difficile de faire des comparaisons au niveau intercantonal et, surtout, fédéral.
La constitution des primes fait appel à un processus mathématique simple qui aboutit à la constitution de réserves, lesquelles découlent de la différence entre les dépenses, les recettes et les frais généraux. L'ensemble de ces chiffres pourraient permettre une transparence financière... Hélas, ce n'est pas le cas, et je rappelle que cet élément a encore été dénoncé il y a quarante-huit heures par M. Burkhalter.
Le Conseil fédéral s'est préoccupé des disparités intercantonales de ces primes et a pris des mesures auprès de l'OFAS. Mais, l'OFAS, c'est un département, c'est une usine qui compte dix-sept services; il faut un certain temps pour obtenir des réponses. C'est probablement la raison pour laquelle le Conseil fédéral a, si j'ose dire, «bénéficié» de l'idée du réajustement des réserves en ciblant surtout le mécanisme d'approbation des primes. Vous savez peut-être que, chaque fin d'été, on nous annonce de nouvelles réserves; cela découle de ce mécanisme d'approbation. Il a été mis au point par une intervention bâloise - de Mme Anita Fetz - qui remonte à février 2009, et il a déjà donné lieu à différentes discussions aux Chambres fédérales.
Il y a un autre point que je vais souligner, c'est le flou entre la nature cantonale de ces réserves et l'utilisation qui en est faite au niveau fédéral. Comme je l'ai déjà indiqué, les mécanismes de rééquilibrage au niveau intercantonal peuvent affecter les cantons, notamment Genève.
Revenons au problème qui est à la base de la démarche de ce soir: les réserves excédentaires. Elles sont réparties inégalement entre les assureurs et font que la quasi-totalité de celles-ci sont détenues à Genève, il faut le préciser...
Le président. Monsieur le rapporteur, il vous faut conclure.
M. Michel Forni. Je conclus, Monsieur le président ! ...par une dizaine d'assureurs. Ce qui représente environ le tiers des assurés. Il faut relever encore que quatre compagnies seulement assurent 61% des Genevois.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je précise que le temps de parole imparti sur ce point est exceptionnellement de quatre minutes par groupe. Monsieur Aubert, vous avez la parole.
M. Claude Aubert (L). Il est important d'enfoncer le clou. En effet, la LAMal, qui a été conçue et adoptée en 1996, contient des articles qui pourraient apporter des solutions à pas mal de questions qui se posent, mais ce qu'on constate, c'est que depuis quasiment quinze ans il faut bagarrer, bagarrer et bagarrer encore, pour que l'on prenne en considération certains éléments importants. Par conséquent, il faut taper sur le clou, s'agissant de la notion de réserve, pour que certains éléments soient pris en compte - ce que fait le président Unger depuis plusieurs années.
Nous devons donc soutenir cette résolution et l'accepter, mais il faut quand même faire attention ! Parce que les considérants et l'invite pourraient conduire les personnes qui les lisent à confondre les systèmes. Le système de la LAMal n'est pas un système par capitalisation: c'est un système de solidarité ! Ce n'est pas comme la dot d'une mariée qui entre dans la famille, dot qui peut, à la limite, être reprise. Ce n'est pas capitalisé: chacun met de l'argent dans un pot commun, et ce pot commun est utilisé par tout le monde.
L'un des considérants indique: «que les assureurs opérant en matière d'assurance obligatoire des soins sont tenus de constituer des réserves pour chacun de leurs assurés;». Chacun de leurs assurés ! Le mot «chacun» pourrait laisser penser que, si je m'assure, il y aura une réserve Aubert. Et ce n'est pas du tout le cas ! La réserve sera certes associée à ma personne, mais en tant que membre du groupe. Il n'y aura pas de réserve Aubert.
S'il fallait aller jusqu'au bout de cette demande de transmissibilité de la réserve, cela poserait le problème suivant: comme nous avons 7,5 millions d'assurés en Suisse, il faudrait avoir un appareil de mesure et de statistique capable de connaître les réserves de tous les assurés et de savoir combien ils ont puisé - ou pas - dans ces réserves... Par conséquent, cette transmissibilité est tout à fait impossible à mettre en place en raison des frais que cela occasionnerait.
C'est une très bonne idée de mettre à nouveau la pression sur cette notion de «réserve», mais je dirai que, pour notre part, nous prenons les considérants et l'invite... sous toutes réserves. (Rires.)
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Je suis extrêmement contente d'entendre les propos tenus par M. Aubert s'agissant de la transmissibilité de la réserve quand une personne change de caisse maladie. Parce que la caisse maladie constitue une mutualisation des risques - et non pas une individualisation des risques - les Verts ne soutiendront pas cette résolution.
Les Verts ont, avec toute l'énergie possible, soutenu deux autres résolutions qui ont été déposées à peu près au même moment; ils ont soutenu toutes les résolutions que le parlement à envoyées à Berne pour résoudre le problème de la réserve des caisses maladie. Mais, dans ce cas de figure précis, il est totalement impossible de soutenir ce texte, précisément pour la simple et bonne raison que les réserves ne sont pas personnelles: elles sont mutualisées. Et si nous voulions personnaliser les réserves des caisses maladie, nous ferions ce que nous avons effectué pour les caisses de pension, c'est-à-dire qu'elles deviendraient des caisses personnelles. Il s'agirait alors de capitaliser les caisses maladie - ce qui n'est pas le cas actuellement - mais il faut savoir que, ce faisant, nos primes de caisses maladie ne pourraient pas rester au niveau actuel: elles doubleraient ou tripleraient !
M. Mauro Poggia (MCG). Le groupe MCG va soutenir cette résolution, non pas qu'elle soit la panacée, non pas qu'elle va résoudre le problème, mais pour que le canton de Genève donne un signe supplémentaire à Berne.
Je ne suis pas d'accord avec l'intervention des Verts, qui considèrent devoir s'opposer à cette résolution au motif qu'elle serait une entrave à la solidarité. Ce n'est pas ce qui est dit ! Elle ne préconise pas que chacun doit apporter sa réserve, comme un petit sac à dos, et que, le sac à dos une fois vidé, on n'a plus droit à rien ! Elle prévoit simplement, lorsque l'assuré passe d'une pièce à une autre, qu'il ne laisse pas son sac à dos dans l'ancienne pièce et qu'il doive en acheter un autre dans la nouvelle pièce ! C'est tout ! Et que l'accumulation des sacs à dos dans la nouvelle pièce sera répartie en fonction de ceux qui en auront besoin. Donc, votre argumentation pour vous opposer à cette résolution, excusez-moi de vous le dire, est fausse !
Cela dit, les réserves représentent évidemment un problème majeur dans le système de l'assurance-maladie. Certains le disaient déjà il y a dix ans: ils étaient seuls... Aujourd'hui, tout le monde l'admet, même le Conseil fédéral le reconnaît - j'y reviendrai dans un petit instant. Les réserves sont un problème, précisément parce que - nous le savons - lorsque nous avons la possibilité de changer de caisse pour le début de l'année civile suivante, nous allons, bien sûr, vers la caisse la meilleur marché. Et c'est le système des vases communicants. Puisqu'il n'est pas possible d'appliquer des tarifs différents à ceux qui sont déjà dans la caisse et à ceux qui y entrent, eh bien, il faudra obligatoirement augmenter les primes de ceux qui y sont déjà pour pouvoir créer à nouveau les réserves de ceux qui arrivent. Cela pose donc bien sûr un problème majeur. L'idéal serait de créer un fonds fédéral de réserve qui serait constitué une fois pour toutes, sans avoir à reprendre les petits sacs à dos - comme je l'ai dit dans mon exemple.
Encore une fois, il s'agit de donner un signe ! Car le Conseil fédéral est conscient du problème, mais il ne le résout pas dans le sens qui est proposé dans cette résolution. Dans son communiqué de presse d'il y a quarante-huit heures, M. Burkhalter disait ceci: «Les réserves minimales dépendront désormais des risques encourus par l'assureur.» Qu'est-ce que cela veut dire ? Que l'Office fédéral de la santé publique examinera quels sont les risques pris par tel ou tel assureur pour ses assurés et que, plus l'assureur aura pris des risques, plus les primes seront augmentées pour créer des réserves qui permettront d'assurer ces risques ? C'est absurde, évidemment ! Ce que l'on attend du Conseil fédéral, par l'intermédiaire du Département fédéral de l'intérieur, c'est évidemment qu'il se situe dans un travail en amont et qu'il évite précisément que les assureurs ne jouent avec notre argent ! Puisque c'est la crise, nous n'y échapperons pas: nos assureurs vont nous dire qu'ils ont perdu de l'argent en bourse et qu'il va falloir reconstituer les réserves. Par contre, quand ils en gagnent, ils ne les répartissent évidemment pas !
Alors oui à cette résolution, parce que c'est un signe, tout en sachant que la solution n'est pas là: elle est ailleurs, elle est dans une caisse unique ! Lorsqu'on veut faire des labours, on ne prend pas un cheval de course, on prend un cheval adapté, c'est-à-dire un cheval de trait. Or, dans le cas qui nous occupe, on veut permettre à des assureurs privés qui font la course parce qu'ils veulent gagner de l'argent d'utiliser un cheval de trait ! Non, ce n'est pas possible ! On ne peut pas mélanger les genres ! Il faudra distinguer les deux choses et séparer clairement l'assurance de base de l'assurance complémentaire ! Quand on veut faire de l'assurance de base, on est un assureur social; et l'on ne peut pas s'offrir le luxe d'avoir à contrôler une centaine de caisses et vingt-six cantons, comme voudrait le faire aujourd'hui le Conseil fédéral ! Autant créer une caisse publique fédérale unique, sur laquelle les assurés aussi auront leur mot à dire ! (Applaudissements.)
M. Pierre Conne (R). Ces réserves des assurances-maladie sont une bonne chose, car elles permettent de garantir à long terme la solvabilité des caisses. Sans ces réserves, nous risquerions de nous retrouver dans une situation comme celle que connaît l'un de nos grands voisins, avec un trou annuel de la... Tout le monde a saisi !
Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que les assureurs-maladie sont dans une situation de budgétisation très difficile. Sur la base des coûts d'une année, sans savoir combien de personnes ils devront assurer deux ans après, ils doivent proposer des primes - primes qui servent à couvrir les frais des malades qui ne sont pas encore assurés chez eux, et, en plus, à constituer - pour établir une garantie face à cette incertitude budgétaire - ces fameuses réserves qui sont calculées sur un taux technique. Jusque-là tout va bien !
Le problème qui se pose, c'est que, quand ce mécanisme de sécurité budgétaire a été conçu, il n'a pas été vraiment tenu compte du fait que - cela a été très bien expliqué - selon une autre partie tout à fait souhaitable de la LAMal, on encourageait les assurés à changer de caisse d'une année à l'autre. A partir de ce moment-là, on s'est trouvé dans cette situation absurde où, dans le fond, ces mécanismes de réserve ne sont qu'une pompe à fric pour les assureurs ! Parce que cela ne va que dans un seul sens ! Cela aussi a été dit tout à l'heure. Imaginez un jeu vidéo consistant à passer d'une maison à l'autre, la maison étant l'assurance: vous avez un pardessus qui vous protège des intempéries et de la chaleur, mais, lorsque vous arrivez dans la caisse avec votre pardessus, comme vous êtes bien élevé, vous le laissez au vestiaire; et quand vous voulez changer de maison, parce que vous pensez que celle d'à côté est un peu plus attirante, on vous indique que vous pouvez partir mais qu'il faut laisser le pardessus; et lorsque vous arrivez dans la nouvelle maison, il faut racheter un nouveau pardessus... Mais ce n'est pas vous qui allez le payer. Cela ne touche pas à la solidarité, mais c'est l'ensemble des personnes qui se trouvent dans cette nouvelle maison-assurance qui devront ajouter à leur prime de quoi constituer cette nouvelle réserve.
Nous nous trouvons aujourd'hui contraints d'envisager de corriger un défaut technique, car le système est fait de telle manière que les réserves ne peuvent qu'augmenter. C'est la raison pour laquelle certaines caisses ont actuellement plus de 40% du montant assuré, qui sont à disposition sous forme de réserves mais dont les caisses ne peuvent rien faire, sauf à imaginer qu'une année elles soient en déficit de couverture - et qu'elles puissent dire ouf... et puiser dans leurs réserves.
Je pense qu'il est vraiment temps d'envisager de corriger cette situation absurde ! Ce problème est fondamentalement technique, et il est urgent d'envoyer au Conseil fédéral le message que propose cette résolution.
Cela dit, j'aimerais m'associer aux propos de mon préopinant: il s'agit aussi - c'est même essentiel - d'ajouter à ce message un signe très fort aux Chambres fédérales, qui traitent à l'heure actuelle des objets importants en lien avec les réformes de la LAMal. Alors, s'il vous plaît, je vous encourage, Mesdames et Messieurs, chers collègues, Monsieur le président, à voter cette résolution ! Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à la dernière intervenante, Mme Schneider Hausser, à qui il reste une minute et vingt secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président ! Bien évidemment, la caisse unique sera, à terme...
Le président. Trois minutes !
Mme Lydia Schneider Hausser. Ce n'est pas grave, une minute vingt me suffira ! ...la solution idéale et indispensable. Mon intervention au nom du groupe socialiste sera très brève, puisque Mme Schneider-Bidaux a très bien exprimé et argumenté notre position sur ce sujet. Nous rejetterons donc, de la même manière, cette proposition.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous soumets la proposition de résolution 574, en précisant que la commission préconise qu'elle soit acceptée.
Mise aux voix, la résolution 574 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 43 oui contre 20 non et 4 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous en avons terminé avec les urgences. Nous reprenons notre ordre du jour ordinaire, avec le point 29.
Débat
Le président. Monsieur Hohl, vous avez la parole.
M. Frédéric Hohl (R). Mais quel plaisir de reprendre le débat sur la planification pénitentiaire ! Je pensais que vous alliez nous épargner cela, Monsieur le président !
Le président. Non, pas question !
M. Frédéric Hohl. Très bien ! Cela fait des semaines, des mois, des années que nous parlons de la planification pénitentiaire... Les radicaux l'ont réclamée depuis longtemps, raison pour laquelle - vous vous en souviendrez peut-être - nous étions les seuls à nous abstenir pour le vote de Curabilis. En effet, nous nous posions des questions... Certes, il y avait la parcelle de Champ-Dollon, mais nous ne savions pas quelles étaient les constructions prévues, le nombre qu'il était possible d'y ériger exactement, précisément pour Champ-Dollon II, etc., donc pour les projets qui doivent y être réalisés. Nous n'avons jamais disposé d'une véritable planification expliquant à quel endroit telle construction était prévue, pour quel type de détention, et c'est exactement ce qui nous manquait pour appuyer sur le bouton vert lors de cette difficile discussion que nous avons eue sur le projet Curabilis - ce qui, d'ailleurs, n'avait rien à voir avec le fait que nous sommes d'accord avec ce genre de détention - et, ce qui nous a gênés, c'était vraiment la problématique de la planification.
Ce soir, nous avons accepté le projet prévoyant 100 places supplémentaires, parce que, bien évidemment, nous ne pouvons pas faire autrement. Certes, le gouvernement avait donné - il y a onze mois, je crois - une planification pénitentiaire, mais elle ne répondait pas du tout à nos attentes. Nous espérons donc que, cette fois, il nous fournira un projet plus concret à ce sujet. C'est la raison pour laquelle je vous encourage, Mesdames et Messieurs, à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Cela me paraît tout à fait nécessaire pour continuer les travaux.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, à quoi bon renvoyer cette motion au Conseil d'Etat ? Laissez-moi vous indiquer... (Exclamations.) ...ce que le département va vous expliquer ! (L'orateur est interpellé par M. Frédéric Hohl.) Oui, M. le président transmettra, mais vous ne m'enlèverez quand même pas le plaisir, Monsieur le député Hohl, de vous regarder. Merci ! (Commentaires.)
Le département va vous expliquer qu'il prévoit Champ-Dollon II pour 2014, qu'il est en train de réaliser Curabilis - les travaux viennent de commencer - qu'il a fait, qu'il a fait, qu'il a fait... Résultat des courses: quand on se promène dans les rues, on constate que les problèmes sont toujours les mêmes ! Et il n'y a toujours pas assez de places dans les prisons, maintenant ! (Commentaires.) C'est bien de se projeter dans l'avenir et de jeter en pâture un projet au peuple...
Certes, on vient de voter 100 places supplémentaires à Champ-Dollon. Pfff, ce projet ne sera réalisé que dans treize mois ! En attendant, que fait-on ? On appuie sur le bouton d'un engin spatio-temporel qui nous amène tout de suite à l'année prochaine, lorsque ces 100 cellules seront réalisées ? Ce n'est évidemment pas possible, dans la vie réelle les choses ne se déroulent pas comme cela ! C'est à se demander si le gouvernement a bien conscience de ce qui se passe au quotidien ! Ou, peut-être, un virus atteint-il tous ceux qui sont élus au Conseil d'Etat ? Et, dès qu'ils sont en place, plouf ! plus rien...
Une voix. Tu as eu de la chance ! (Rires.)
M. Eric Stauffer. Oui, j'ai eu de la chance: j'y ai échappé ! (Rires. Exclamations.) Vous vous rendez compte ? Si j'avais été atteint par ce virus ? Mais achevez-moi sur place...
Une voix. Si seulement ! (Rires.)
M. Eric Stauffer. Le jour où je vous dis que tout va bien... (Chahut.) ...eh bien, c'est suspect ! (Le président agite la cloche.)
Soyons sérieux. Le problème réside dans le fait qu'il n'y a aujourd'hui aucune vision à court terme. Alors, je poserai une seule question et conclurai de la sorte. (Exclamations.) C'est une question très simple. Vous vous amusez en lançant l'opération Figaro; nous avons actuellement 600 détenus à Champ-Dollon... Si, au cours des deux prochains mois, vous devez arrêter 100 personnes de plus, où les mettez-vous - comment faites-vous ? (Commentaires.) Puisque nous savons d'ores et déjà que des instructions ont été données pour lever le pied ! Et que les grosses opérations policières doivent être reportées parce qu'on ne sait pas où placer les malfrats... Voilà la vérité !
Alors, Madame la conseillère d'Etat, nous attendons votre réponse avec impatience. Mais, de grâce, n'esquivez pas la question et ne tournez pas autour du pot, parce que je reprendrai la parole sur un autre sujet pour vous la reposer.
M. Olivier Jornot (L). Nous avons beaucoup parlé de politique pénitentiaire ce soir, ce qui fait que tout un chacun sait ce que pensent les autres en la matière. Il n'en demeure pas moins qu'au cours des dernières années cette notion de planification pénitentiaire a évolué. Mme Spoerri avait lancé le concept, il y a quelques années; M. Moutinot l'avait «oublié» pour des raisons administratives... (Rires.) ...et il est à nouveau à l'ordre du jour. Mais il est également et relativement évolutif ! Et c'est vrai que, pour ce parlement - et nous l'avons vu, nous en avons éprouvé le besoin dans le débat tout à l'heure sur les 100 places provisoires - il ne serait pas inutile d'avoir une planification sous la forme d'un document expliquant quels sont les projets envisagés, dans quels lieux, dans quels délais et à quel coût approximatif.
Pour évoquer le sujet que nous avons abordé tout à l'heure, il serait intéressant pour ce parlement de bien comprendre pourquoi et comment le projet Brenaz II a remplacé, à un moment donné, la perspective d'une surélévation du bâtiment actuel que, pourtant, un groupe parlementaire réclame par voie de motion.
Il serait intéressant pour notre parlement que vous, Madame la conseillère d'Etat, avec la persuasion dont vous êtes capable, vous parveniez à obtenir d'anticiper d'un, deux ou trois ans, le programme qui a été annoncé pour la construction de Champ-Dollon II, sinon vous serez obligée de venir, dans quelque temps, nous proposer des places provisoires supplémentaires, ce qui ne serait pas très heureux.
Il serait bon que nous sachions où le Conseil d'Etat compte, à terme, augmenter la capacité du centre de détention administrative de Frambois, car, sur ce point aussi, les parlementaires ont eu toutes sortes d'idées, notamment de l'intégrer dans le périmètre de Champ-Dollon, ce qui ne serait pas judicieux alors que nous avons besoin d'une capacité accrue dans le périmètre de l'aéroport. Nous serions heureux de savoir ce que le Conseil d'Etat a l'intention de faire à ce sujet, et dans quel délai.
Et puis, enfin, il y a un sujet dont nous avons eu souvent l'occasion de nous entretenir ici, mais cela fait assez longtemps - je dirais fort heureusement - que nous n'avons pas eu à en parler, c'est celui de la Clairière, lieu de détention des mineurs, qui connaît aussi une explosion des besoins. Certes, elle est moins impressionnante en valeur absolue, mais elle est tout aussi inquiétante en proportion. Sur ce point aussi, nous serions heureux de savoir quelle est la planification du Conseil d'Etat.
Le groupe libéral votera donc ce texte. C'est une véritable demande de disposer d'un programme clair - d'une «feuille de route», comme on le dit aujourd'hui - qui nous permettra de suivre exactement ce que le Conseil d'Etat entend faire au cours des prochaines années.
M. Patrick Lussi (UDC). Beaucoup de choses ont été dites, mais vous me permettrez tout de même de signaler que l'actualité ne nous autorise plus à douter de l'augmentation de la criminalité ! En effet, un trop grand nombre de délinquants déambulent et continuent de sévir dans nos rues, faute de places carcérales et, surtout, par manque de volonté - et je l'affirme clairement, quitte à recevoir des critiques - de renvoyer les criminels étrangers qui remplissent nos prisons.
Certains se plaisent à mettre en doute l'efficacité de nos policiers... Pourtant, alors que ces derniers n'ont pas encore terminé les nombreux rapports d'arrestation et textes connexes à rédiger selon une procédure complaisante pour les prévenus, ils les retrouvent souvent sur les lieux où ils les avaient arrêtés quelques heures auparavant ! Evidemment, ils doivent recommencer le travail !
Cette motion présente un inventaire actuel des places disponibles et une planification globale de la politique pénitentiaire sur les dix années à venir, ainsi que diverses invites qui seront source de nouvelles dépenses importantes et non de solutions pour endiguer le flot de délinquants étrangers en constante augmentation.
Nos concitoyens comprendront que cette assemblée, pour humer le parfum du politiquement correct, vous propose d'augmenter l'offre de places carcérales pour être en phase avec la demande en constante augmentation. Stratégie libérale de marché: excusez-moi, je ne la trouve pas sécuritaire !
Nous réaffirmons que l'initiative pour le renvoi des étrangers criminels est la solution pour plus de 50% d'occupation de nos prisons. Cependant, nous soutiendrons le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
M. Christian Bavarel (Ve). «Gouverner, c'est prévoir»... Ce soir, nous entendons encore les adeptes du «yaka» nous dire comment nous aurions dû faire. Les Verts ont examiné cette proposition de motion avec beaucoup d'intérêt. Or, lorsque le parlement vote, il se prononce sur les invites. Et renvoyer la motion au Conseil d'Etat, c'est les accepter ! Et, puisqu'il n'y en a qu'une, que demande cette invite ? Ceci: «à présenter une planification globale et complète de la politique pénitentiaire sur les dix années à venir [...]». Jusqu'ici, nous sommes tout à fait d'accord.
C'est après que les choses se gâtent: «[...], incluant notamment: la réalisation du projet «Curabilis», dont le concept architectural est à affiner;» A mon avis, c'est un peu dépassé ! Ensuite: «[...] la fermeture de Frambois et l'affectation de l'ensemble du périmètre à la Clairière, centre de détention pour mineurs;» Là, il y a une solution toute faite que l'on ne veut pas étudier, tout en disant au gouvernement qu'on veut cela. Nous ne partageons pas cet avis !
Et puis, enfin: «[...] le potentiel remplacement des maisons d'arrêt du Vallon, de Riant-Parc, de Montfleury et de Villars, par des structures plus modernes et mieux adaptées à leur rôle respectif.» Nous ne sommes toujours pas d'accord !
Ce que nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, c'est de renvoyer cette motion en commission... (L'orateur est interpellé par M. Pierre Weiss.) Vous voulez aussi renvoyer la commission, Monsieur Weiss ? Ce serait dommage ! ...pour que ce projet y soit étudié. Nous voulons éviter que le parlement donne un signe politique selon lequel ce texte contiendrait les solutions que nous souhaitons - à notre avis, ce n'est pas le cas. Nous pensons que le gouvernement peut présenter d'autres choses. C'est pourquoi nous aimerions, en commission, entendre ses éventuelles propositions. Monsieur le président, je vous demande donc formellement le renvoi en commission de cette motion.
Le président. Judiciaire, j'imagine ! Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Poggia. Vous disposez de quarante secondes, Monsieur le député.
M. Mauro Poggia (MCG). Vous demandez une planification au Conseil d'Etat: nous aussi ! La gauche semble ne pas en vouloir, considérant que gouverner c'est prévoir, mais décidant qu'ici il ne faut rien prévoir.
Si le Conseil d'Etat, qui est issu de vos rangs, travaille comme vous, eh bien ça promet ! Vous qui avez refusé de voter un crédit pour construire plus de 100 places supplémentaires - alors qu'il en faudrait, aujourd'hui déjà, 350 - vous appelez ça prévoir ? Pour vous, «prévoir» c'est ne rien faire: même pas ce qu'il faudrait faire tout de suite ! Alors, surtout, ne parlez pas de «prévoir» !
Mesdames et Messieurs les députés, nous allons soutenir, bien évidemment, cette motion, mais vous ne devriez pas demander aux autres ce que vous êtes incapables de faire vous-mêmes ! (Applaudissements.)
Mme Loly Bolay (S). En lisant - je ferai comme M. Bavarel - ces invites, je me rends compte qu'en définitive presque toutes ces dernières, pour ne pas dire la totalité d'entre elles, sont totalement désuètes. Pourquoi ? Parce que nous avons reçu un rapport du Conseil d'Etat sur la planification pénitentiaire et que tout y figure: Curabilis, on l'a vu, est en construction; la Brenaz II est dans le pipeline du Conseil d'Etat. Quant à l'invite concernant «La construction modulaire à Champ-Dollon, de manière à accueillir les détenus administratifs et des prévenus selon les besoins», Mesdames et Messieurs les députés, placer les détenus administratifs à Champ-Dollon, c'est une totale aberration ! Parce que, comme nous l'avons expliqué au groupe radical, il s'agit de gens qu'on expulse, et ce centre doit donc se trouver tout près de l'aéroport. Imaginez les transferts des détenus, de Champ-Dollon à l'aéroport... Il faudrait doubler les effectifs de la police. Donc, la maison destinée à la détention administrative et aux mesures y relatives doit se trouver là où elle est, à Frambois, ou directement à l'aéroport, mais en tout cas pas à Champ-Dollon. Encore une fois: c'est une aberration !
Par ailleurs, vous indiquez: «le potentiel de remplacement des maisons d'arrêt [...]». C'est vrai qu'aujourd'hui, à Genève, il y a une kyrielle de maisons de détention. Je vais vous les énumérer: il y a la «Grande Maison», c'est Champ-Dollon; il y a la Brenaz, 68 places; il y a Favra, juste derrière Champ-Dollon; il y a Montfleury, à Carouge; il y avait Villars, à Châtelaine; il y a Riant-Parc, pour les femmes; il y a le Vallon, à Vandoeuvres. Toutes ces petites maisons font que, effectivement, elles sont trop nombreuses. Alors, c'est une réflexion que la CVO - la commission des visiteurs officiels - est en train de mener, parce que c'est vraiment une problématique.
Le parti socialiste n'est pas opposé à une planification pénitentiaire. Mais ce que nous demandons depuis longtemps, c'est de comprendre pourquoi Genève affiche un taux de détention qui est le double de celui des autres cantons suisses ! Si l'on compare avec les cantons frontières, comme Vaud, Bâle, Neuchâtel... Eh bien, je vais vous donner les chiffres: au niveau européen, c'est environ 80 détenus pour 100 000 habitants; au niveau suisse, c'est 100 détenus pour 100 000 habitants; à Genève, on est à près de 200 détenus pour 100 000 habitants ! Alors là, il y a vraiment une réflexion à avoir par rapport à cette problématique, et...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Loly Bolay. Je vais conclure, Monsieur le président ! ...et le parti socialiste, depuis longtemps, demande un débat sur cette question ! Elle est vraiment très importante.
Le président. Merci, Madame la députée...
Mme Loly Bolay. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ces invites sont désuètes, et nous n'appuierons pas cette motion.
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, au nom de l'Entente... (Remarque.) Oui, cher collègue Jean-Michel, je me rachète une conduite, ce soir ! (Rires.) Au nom de l'Entente, j'aimerais présenter un amendement sur ce texte, amendement qui consiste à annuler les mots «incluant notamment» - avec les deux points - et l'ensemble des invites. Il subsisterait une invite unique, laquelle serait celle-ci: «invite le Conseil d'Etat à présenter une planification globale et complète de la politique pénitentiaire sur les dix ans à venir.» Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Aubert... (Remarque.) Non, pardon, il a renoncé ! Donc, il reste M. Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Monsieur Forte, votre proposition nous sied parfaitement.
Des voix. Ah !
Une voix. Vous savez écouter !
M. Christian Bavarel. Quant à mes «amis» du MCG... On va dire cela comme ça, car je sens qu'il y a un petit côté assez amusant d'employer des termes de ce type-là. Je viens de découvrir qu'on avait le grand «yaka», maintenant on a «y faut qu'on», et puis, certainement que «y aura qu'à» est coincé dans un coin. (Rires.)
Quand je vous entends nous faire des propositions telles que les vôtres, j'ai l'impression qu'il s'agit de gens qui parleraient d'architecture en disant: «Cet immeuble est moche», et ils balanceraient un cocktail Molotov dedans... Ensuite, ils regarderaient cela brûler en disant: «Eh bien, il y en a d'autres qui vont construire.» Vous êtes un peu tel Néron: vous êtes en train de vouloir voir Genève brûler et, derrière, vous essayez de nous composer non pas un poème, mais une élection ! C'est assez lamentable. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai une question à vous poser: maintenez-vous votre demande de renvoi en commission... ou renvoi au Conseil d'Etat ?
M. Christian Bavarel. Si l'amendement est accepté, je retire ma demande.
Le président. D'accord, merci beaucoup. Je passe la parole à Mme Rochat.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Je crois que, ainsi qu'il l'a été relevé dans cette salle, cette motion aura effectivement le mérite de nous faire revoir la planification pénitentiaire. C'est vrai qu'il existe le rapport RD 797; c'est vrai aussi qu'il est extrêmement compliqué, hasardeux, de prévoir des places de détention et de les anticiper pour dix ans.
J'aimerais juste rappeler d'abord que l'opération Figaro n'est pas un jeu, n'est pas un amusement, mais simplement une réponse à une demande de la population tout entière. J'aimerais également rappeler que, si l'incarcération et les taux de détention sont plus élevés à Genève, c'est qu'il faut prendre en compte, vraiment, toute la région ! Qu'elle soit romande ou qu'elle soit franco-valdo, c'est de toute façon une donnée qu'il faudra prendre en considération. Ces éléments-là, nous ne les avions pas au moment de l'élaboration de ce rapport.
Concernant cette motion, je vous invite à l'adopter avec son amendement, ce qui nous permettra de revoir exactement cette planification, pour le bien de tous.
Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle l'amendement. Il consiste simplement à remplacer tous les points figurant sous l'invite par une invite (nouvelle teneur): «à présenter une planification globale et complète de la politique pénitentiaire sur les dix années à venir.» (Exclamations durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 79 oui et 1 abstention.
Le président. Nous allons maintenant... (Remarque.) Vous demandez le vote nominal... Non. Nous passons donc au vote de la motion.
Mise aux voix, la motion 1882 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 77 oui et 1 abstention.
Le président. Nous prenons le point 30 de notre ordre du jour, motion 1888.
Débat
Mme Prunella Carrard (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste va vous demander de renvoyer cette motion à la commission des Droits de l'Homme. Je vous rappelle que cette motion est intervenue suite à l'annonce du Conseil d'Etat, il y a un an, de sa décision de doter la police genevoise d'armes à électrochocs, les Taser.
La motion que nous vous proposons demande simplement qu'une étude indépendante sur l'utilisation de cette arme soit effectuée et que, en attendant, nous décrétions un moratoire sur cette utilisation et que nous puissions avoir un débat parlementaire sur la question.
Cette idée ne vient pas de nulle part, bien évidemment. En 2005 et 2006, le Conseil d'Etat ainsi que le Grand Conseil se sont prononcés unanimement, tous partis confondus, contre l'utilisation de cette arme par les forces de l'ordre. Le Conseil d'Etat déclarait alors que l'utilisation d'appareils à électrochocs ne peut être tolérée et qu'il apparaît inapproprié et non respectueux des droits de la personne. Le Conseil d'Etat déclarait également que de nombreux accidents mortels ont été attribués à l'utilisation de cet appareil au cours de ces dernières années, notamment aux Etats-Unis. Un député, par ailleurs gendarme, a souligné qu'il s'agissait d'un moyen de contrainte digne des temps médiévaux; un autre a rappelé que le Taser n'est même pas utilisé pour contraindre les animaux, car la loi de notre pays l'interdit. Plus généralement, le Comité contre la torture des Nations Unies ainsi qu'Amnesty International se sont clairement positionnés contre l'utilisation du Taser qui inflige des douleurs extrêmes s'apparentant à la torture. De nombreux médecins suisses et genevois se sont prononcés également contre cette arme, arguant qu'il y a de forts risques que son utilisation entraîne des problèmes cardiaques pouvant aller jusqu'à la mort, d'autant plus, d'ailleurs, lorsque la personne se trouve en situation de stress intense. Le président de la Fédération des médecins suisses conclut que le Taser doit être considéré comme une arme mortelle et qu'il doit être régi par les mêmes règles que les armes à feu. Aujourd'hui, on peut lire dans la presse la déclaration du chef de la police, M. Cudré-Mauroux, qui dit que deux personnes - pour l'instant, depuis un an - ont été «taserisées» et qu'elles s'en sont sorties sans trop de dommages... Mais que veut dire cette fin de déclaration: «sans trop de dommages» ? Nous avons besoin d'explications.
Comment accepter de laisser notre police utiliser cette arme, sans même avoir réalisé une sérieuse étude indépendante sur la question, sur l'utilisation et la dangerosité de cette dernière ? Nous ne pouvons pas simplement oublier ou laisser tomber la prise de position de notre assemblée et du Conseil d'Etat en 2006. Ce sujet est trop grave pour être évincé. (Brouhaha.) C'est la raison pour laquelle je vous demande, d'une part, de m'écouter... (Le président agite la cloche.) ...et, d'autre part, de renvoyer cette motion à la commission des Droits de l'Homme. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Comme je m'étais engagé à le faire lorsque j'avais posé une question bien précise à Mme la conseillère d'Etat - en effet, j'avais dit que, si elle ne répondait pas, je le lui rappellerais lors d'une autre prise de parole. Et je lui avais demandé ceci: s'il y a 100 détenus de plus dans les deux mois, vous les mettez où ? Eh bien, nous prenons acte...
Le président. Cela n'est pas l'objet de cette motion !
M. Eric Stauffer. Si si ! Parce ce qu'on va tous les «taseriser», Monsieur le président ! Donc...
Le président. Vous revenez au sujet qui nous est soumis, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je suis exactement dans le sujet, puisque c'est sur le moratoire concernant les Taser. Mais nous prenons acte de ce que Mme la conseillère d'Etat a été dans l'incapacité de nous répondre. Fin de citation !
Cela étant dit, votre... (Commentaires.) ... votre motion pour le moratoire, le MCG va s'y opposer. Pourquoi ? Parce que dans les forces de l'ordre il y a tout un panel d'armes à disposition quand il faut faire usage de la contrainte, pour capturer ou maîtriser des individus qui se seraient opposés aux actes de l'autorité. Donc, il ne sert à rien de légiférer sur ce que fait ou ne fait pas le Taser. Demain, vous nous proposerez une motion en faveur d'un moratoire sur les armes... Et puis, comme ça, nous mettrons nos policiers, nus, dans les rues de Genève ! Ainsi il n'y aura plus de problème ! Déjà que les Lyonnais ont dit, lors d'une émission à la TSR, que maintenant ils avaient compris la leçon suite à l'accident sur la A1, avec le décès du voleur de voiture, et qu'ils viendraient dorénavant armés... Donc, c'est sûr, il faut vraiment enlever à nos policiers tous les moyens de contrainte ! Et puis, surtout, il faut protéger ces criminels ! Ces pauvres criminels qui se font tuer quand ils viennent en Suisse ! C'est inadmissible, Mesdames et Messieurs les socialistes: vraiment, légiférez ! Ces pauvres gens, il faut leur donner de grandes cellules, cinq menus par jour, des activités sportives, des activités culturelles, et puis, s'ils sont malades, il faut les soigner ! Merci ! (Applaudissements.)
M. Michel Forni (PDC). Cette motion est intéressante, en son fond et sur sa forme. Cependant, il y a deux situations qui ne sont pas comparables: en 2006, nous étudiions et refusions l'utilisation de ce type d'armes pour contraindre des requérants d'asile; nous sommes en 2010 et, malheureusement, le grand banditisme s'est emparé de cette arme et l'utilise. Non pas contre la police, mais contre les civils !
Ensuite, deuxième élément, c'est que nous sommes tous d'accord que ce type d'armes présente une dangerosité, entraîne des effets secondaires - vous les mentionnez sur le plan cardiaque - peut bien sûr participer, pour les gens qui ont des malformations, à d'autres complications. Mais, il faut aussi le savoir, ce type d'armes n'est réservé qu'à certaines situations. Et si vous relisez bien ce qui figure en page 4, dans l'exposé des motifs, «le Taser est engagé exclusivement par un membre du groupe d'intervention [...]», c'est-à-dire qu'il s'agit de gens sélectionnés qui appartiennent à des sortes de commandos de police, cela dans des conditions particulières allant de la prise d'otage en passant par des situations où il n'y a plus de capacité de se déterminer de la part de l'individu qui menace. Dans ce genre de situation, il est évident que le rapport de force n'est pas le même et que le groupe qui est engagé à ce moment-là, qui est commandé à ce moment-là, qui bénéficie d'une assistance à ce moment-là, doit disposer d'un arsenal suffisant. On parle ce soir du Taser, mais, si vous aviez un peu élargi la discussion, vous auriez vu qu'il existe d'autres armes - malheureusement - qui sont à disposition. Je citerai le Blast, par exemple. Vous savez ce que cela veut dire ? Une situation dans laquelle vous n'entendez rien du tout, mais vous êtes déstabilisé parce que vous n'entendez plus et n'arrivez plus à vous situer dans l'espace... Il y a des gaz hilarants, il y a des gaz toxiques, qui ont aussi une capacité d'induire d'autres effets, malheureusement.
Mais, dans ce genre de situation, nous sommes en train de dériver, et nous engageons un principe dans lequel il n'y a pas d'exception. Eh bien, malheureusement, nous devons conserver cette exception pour un groupe d'intervention qui doit avoir une capacité, non seulement de dominer la situation, de protéger éventuellement l'otage, mais d'être gagnant dans l'histoire, en neutralisant l'adversaire - sans le tuer ! Et c'est bien l'une des raisons pour lesquelles, lorsque vous mentionnez un échelon d'appui sanitaire, eh bien, il intervient pour ceux qui sont engagés; il n'y va pas uniquement pour la victime.
Et c'est dans ce contexte-là qu'il y a une certaine dérive de ce texte. Raison pour laquelle nous ne pourrons pas l'accepter.
L'idée de décréter un moratoire: oui ! Sauf dans les situations où il y a cet engagement par rapport à un corps spécialisé. Demander une étude indépendante: oui ! Mais incluant ce type de situations dans lequel ces groupes d'élite interviennent. Et puis alors, lever le moratoire lorsqu'il y a un débat parlementaire: oui ! Mais, à nouveau, en tenant compte de cette situation particulière. Ces éléments n'étant pas réunis, nous ne pourrons pas donner suite à cette motion.
M. Patrick Lussi (UDC). Beaucoup de choses ont été dites - beaucoup de choses justes ! - alors je vais un peu écourter. Chaque jour, l'actualité nous montre que la violence des délinquants approche la définition de la barbarie - si elle ne l'a pas déjà dépassée.
Mesdames et Messieurs les motionnaires de la gauche, il serait sain, face aux citoyens foncièrement honnêtes qui vous ont élus, que vous annonciez, sans langue de bois, qui vous entendez protéger par ce genre de texte ! Vos constantes tirades se référant à votre conception des droits de l'Homme ont permis et favorisé cette jungle urbaine dont bien des citoyens se plaignent. Car les habitants de notre canton doivent bien comprendre que vos textes conduisent à l'inefficacité de nos forces de police; leurs pauvres moyens sont déjà inférieurs à ceux de la délinquance, qui, elle, n'hésite pas à les utiliser ! C'est à croire que vous souhaitez que nos policiers n'interviennent plus contre la délinquance.
Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC vous engage à refuser sans équivoque cette motion. (Commentaires.)
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Je donne la parole à M. Python, à qui il reste une minute.
M. André Python (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le parti Mouvement Citoyens Genevois refusera la motion. En effet, un moratoire retarderait l'utilisation d'un fabuleux moyen de neutralisation. De plus en plus, la police doit intervenir contre des personnes violentes sous l'emprise de drogues ou d'une colère passionnelle due à un licenciement, à un chagrin d'amour ou à un autre motif; l'individu - souvent armé - en proie à ses colères agit de façon violente et disproportionnée dans des lieux où l'utilisation d'une arme à feu ne peut se justifier. Le Taser est à l'heure actuelle le seul moyen efficace pour intervenir dans les lieux publics sans qu'il y ait de dommages collatéraux. Les policiers spécialisés appelés à intervenir au moyen de cette arme sont dûment formés, afin que le Taser soit utilisé à bon escient et en minimisant les risques. Donc, nous vous appelons à refuser cette motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Olivier Jornot (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, M. Forni a, tout à l'heure, présenté une argumentation extrêmement détaillée, convaincue - et très érudite, d'ailleurs - sur ce thème, si bien qu'il a déjà exposé les principaux éléments du problème.
Le Taser est une arme non létale, qui ne vise pas à se substituer à des armes d'effet moindre, mais qui vise, au contraire, à se substituer aux armes à feu. Alors franchement, dans un contexte de ce genre, vous devriez applaudir à son utilisation, ce d'autant plus que, aujourd'hui, l'encadrement est extrêmement rigoureux et strict ! Vous avez vous-mêmes cité dans l'exposé des motifs de votre propre texte toutes les conditions qui sont posées à cette utilisation, et qui font que cela ne peut pas, par exemple, être employé - cela a été évoqué tout à l'heure - pour des expulsions, ni même pour les chagrins d'amour qui viennent d'être évoqués à l'instant.
Cela dit, j'aimerais que l'on fasse attention, une fois de plus, à ne pas faire des amalgames. Le Taser est destiné à un certain nombre de cas extrêmement précis, extrêmement particuliers, ceux où l'on peut éviter d'utiliser finalement un fusil à lunette et éliminer purement et simplement la personne qui cause un risque pour elle-même ou pour les autres. Mais le Taser n'est pas destiné, Monsieur Lussi, à électrocuter toute la racaille qui vous fait fantasmer. Ce n'est pas une arme qui est destinée à balayer dans la rue tous les problèmes d'insécurité ! En ce sens-là, c'est quelque chose d'extrêmement particulier, et il n'y a pas de raison d'en faire toute une histoire, et en tout cas pas celle de voter cette motion.
M. Christian Bavarel (Ve). Je ne reviendrai pas sur ce que vient de déclarer M. Jornot, éliminer ceux qui posent un danger pour eux-mêmes. C'est sa vision de la sécurité, ce n'est pas la mienne.
Concernant les Verts, nous sommes face à une motion, un texte parlementaire, et il y a trois invites. Elles sont simples: décréter un moratoire - ce n'est pas, pour l'instant, interdire, c'est décréter un moratoire sur l'utilisation de cette arme; demander une étude indépendante; ne pas lever ce moratoire sans débat parlementaire.
Le problème que nous avons se situe quant à l'utilisation de cette arme. Certes, nous savons que les armes que les policiers ont aujourd'hui sur eux, les Glock, sont équipées de munitions déformantes pour avoir un plus grand pouvoir d'arrêt. Nous le savons. Nous savons que, effectivement, la police est aujourd'hui dotée d'armes qui permettent, comme on dit en langage policier, de «traiter l'objectif», et que ces armes sont létales. Néanmoins, nous avons peur de certaines dérives. Nous entendons bien la différence entre l'utilisation d'un Taser et l'utilisation d'un fusil à lunette, mais nous avons aussi un peu peur que cette arme devienne une facilité à certains moments, que la capacité d'engagement soit plus grande, et que l'on n'ait pas forcément mesuré la dangerosité de l'arme.
Ensuite, nous avons un débat au niveau international, qui me semble aussi être important. Chez nous, l'arme pourrait être utilisée avec certaines contraintes et il faudrait que l'on voie quels sont exactement les enjeux autour de cette arme dans d'autres pays. Le fait que nous l'utilisions peut permettre de dire: «Vous voyez bien, les Suisses utilisent le Taser.» Et vous savez aussi bien que moi que c'est un outil de torture. Pendant des années, si Amnesty International s'est opposé au Taser, c'est que le Taser a pu être utilisé pour torturer les personnes. Ne banalisons pas ce type d'outils ! Vous avez des armes qui sont interdites aujourd'hui en temps de guerre, vous avez des armes qui posent d'énormes problèmes, et, en étant à Genève dépositaire de la convention internationale relative au droit de la guerre, convention signée dans la salle de l'Alabama - dans laquelle nous siégeons quelquefois... (Remarque de M. Olivier Jornot.) Je sais bien, Monsieur Jornot: pas tout le monde ! (Commentaires.) Je sais qu'il y a des cloportes rampants en quête de lumière qui sont à l'entrée de cette salle, en attente de ce jour béni où ils pourront enfin voir le soleil - «noir», comme dirait un journaliste, spécialiste de l'animation des grandes surfaces politiques...
Aussi, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter cette motion. Il s'agit de l'étudier, il s'agit de réfléchir, et il s'agit de débattre. Et je pense qu'il est nécessaire que nous ayons ce débat au sein de notre parlement. Merci !
Mme Patricia Läser (R). Le parti radical ne soutiendra pas cette motion et refusera également le renvoi en commission. Nous devons laisser la cheffe du département décider de ce qui est utile à la police et des procédures à établir pour l'utilisation du Taser.
Oui, ce pistolet à électrochocs est dangereux, oui, il comporte des risques lors de son utilisation, mais toutes les autres armes aussi. Aujourd'hui, certains malfrats sont déjà en possession de ce pistolet à électrochocs: la police doit pouvoir y faire face. Puisque ces pistolets circulent déjà en ville de Genève, nous vous demandons donc de refuser cette motion qui réclame un moratoire. Je vous remercie.
Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'on est dans un faux débat. Le Taser n'est pas là pour ce que disaient ou voulaient faire le MCG ou d'autres députés qui affirment que c'est pour lutter contre la délinquance dans la rue. Non ! Cette arme a été utilisée deux fois à Genève, tout d'abord dans le cas d'une personne qui voulait se suicider, puis dans une autre circonstance où il s'agissait de démence.
On sait qu'il s'agit d'un instrument qui est utilisé à des fins de torture, on sait que le Taser est contesté par Amnesty International et par d'autres organisations, donc il y a un doute certain quant à l'adéquation de l'emploi de cette arme, et il faut absolument étudier cette question. Ce que je vous demande, c'est d'accepter le renvoi de cette motion à la commission des Droits de l'Homme, afin que nous puissions en débattre, afin d'entendre notamment M. Cudré-Mauroux qui a lui-même dit que les personne «taserisées» s'en étaient sorties «sans trop de dommage». On a besoin de comprendre ce que cela veut dire. On ne peut pas simplement laisser aller les choses, et puis se dire que c'est une arme sans danger. Et le fait que ces armes commencent à circuler dans la population... Il faut rappeler qu'elles sont interdites à Genève, mais qu'elles sont importées illégalement et qu'elles commencent également à faire des dégâts. Donc, c'est un très mauvais exemple que de laisser la police les utiliser, alors qu'elles sont dangereuses et qu'on les interdit dans la population.
Donc, je vous remercie d'accepter le renvoi de cette motion à la commission des Droits de l'Homme, pour que cette question puisse être examinée dans la sérénité et de manière à prendre les meilleures décisions possibles pour l'avenir.
Le président. M. Pétroz ayant renoncé à prendre la parole, je la donne à Mme Rochat.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Sans vouloir esquiver une discussion qui devrait être plus technique que philosophique s'agissant de l'emploi de cette arme, dangereuse certes, j'aimerais toutefois relever que l'exposé des motifs de cette motion retrace et relève bien les réticences qui ont prévalu lors des débats précédant l'acquisition de cette arme par la police genevoise.
Je peux vous dire que, dans les deux cas qui ont été cités, lors desquels le Taser a été employé - ils concernaient d'abord un suicide, puis un forcené pris dans le cadre d'une violence domestique - on a échappé au pire, on a échappé à un bain de sang.
Je crois qu'il est absolument important de noter qu'il est fait emploi de ce Taser par un groupe d'intervention, comme cela a été précisé, dans des circonstances extrêmement restrictives et avec des ordres de service vraiment draconiens. Si l'on peut craindre que dans certains pays - notamment aux Etats-Unis, où le voltage de cette arme peut être réglé - certaines précautions ne sont pas prises, je peux vous assurer que, à la police genevoise, elles le sont. Je puis vous aussi dire, puisque j'ai la chance d'avoir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...l'office des droits humains dans mon département, que je ne pourrais supporter que nos policiers emploient une arme qui serait à ce titre dangereuse. Cette arme est dangereuse, mais extrêmement contrôlée, dans des conditions extrêmement strictes. Pour l'instant, je peux vous dire que j'ai toute confiance dans l'emploi par nos policiers, de par leurs compétences, de cette arme, quoique dangereuse.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix le renvoi de cette motion à la commission des Droits de l'Homme.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1888 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est rejeté par 48 non contre 26 oui et 4 abstentions.
Le président. Nous nous prononçons maintenant sur l'adoption de cette motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 1888 est rejetée par 50 non contre 26 oui et 3 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes arrivés au terme de notre soirée. Nous avons bien travaillé ! Je vous souhaite une excellente nuit et vous donne rendez-vous dès 10h demain, à «Caves Ouvertes», dans le canton de Genève. (Exclamations. Rires. Le président agite la cloche.) La séance est close !
La séance est levée à 22h55.