Séance du
jeudi 11 février 2010 à
20h30
57e
législature -
1re
année -
5e
session -
23e
séance
R 602
Débat
M. Alain Charbonnier (S). Mesdames et Messieurs les députés, les chiffres du taux de chômage à Genève pour le mois de janvier viennent d'arriver: ils sont de 7,3%. Je précise tout de suite que c'est le chiffre officiel, pas le chiffre maquillé, truqué, du département de M. Longchamp. En effet, ici à Genève, on s'amuse à faire une Genferei de plus - les Genfereien vous amusent souvent - mais là, c'est assez spécial: on prend d'autres chiffres de base pour calculer le taux de chômage à Genève, contrairement à tous les autres cantons suisses.
En 2007, en fin d'année, si mes souvenirs sont bons, nous avons voté une nouvelle loi sur le chômage. Elle est entrée en application au mois de février 2008. Et on nous dit souvent: «Depuis que cette nouvelle loi est entrée en vigueur, le taux de chômage a diminué, la durée du chômage a diminué. Tout va bien, ici à Genève, dans notre République.» Mais avant cet événement, avant le vote de cette loi suite à un référendum, il y avait eu une diminution de la durée des indemnités journalières, qui était passée de 520 jours à 400 jours durant le printemps, je crois, au mois de juin 2007. Or évidemment, quand vous diminuez d'environ 25% la durée du chômage, qu'obtenez-vous dans un premier temps ? Une diminution du chômage ! Il n'y a pas besoin d'être mathématicien pour faire ce constat. Mais à Genève, on est quand même assez particulier, parce que l'on n'a jamais fait ce constat. Personne, en tout cas pas le département, n'a dit: «Effectivement, en diminuant la durée des indemnités, on a diminué la durée du chômage.» On nous a dit: «Non, c'est la nouvelle loi qui est la cause de tous ces bénéfices.»
M. Longchamp nous avait promis aussi, quand il a pris le département, qu'il ramènerait le taux de chômage de Genève dans la moyenne suisse. Or aujourd'hui, force est de constater, en prenant les documents officiels de l'office cantonal de la statistique, que les courbes entre la moyenne suisse et la moyenne genevoise sont constamment parallèles. On le voit dans ce document datant du 11 janvier 2010: depuis 2003, voire avant, jusqu'à fin 2009, on a des courbes exactement parallèles. (M. Charbonnier montre à l'assemblée la page en question.) C'est difficile, peut-être, de le voir d'où vous êtes. Mais je vous le jure, vous pouvez aller le constater dans les documents de l'office cantonal de la statistique: elles sont exactement parallèles.
Alors qu'elle n'a pas été notre surprise, il y a quelques jours, d'apprendre ce qu'a décidé la Confédération. C'est elle, en effet, qui avait diminué la durée des indemnités pour Genève de 520 à 400 jours en 2007, puisque, à l'époque, il fallait 5% de chômage; Genève les avait, mais la Confédération, par gain d'économie, avait décidé de diminuer la durée de ces indemnités. Aujourd'hui, la Confédération voit bien que la reprise économique n'est pas encore vraiment là, qu'il y a de gros problèmes de chômage. Le chômage a toujours un effet décalé dans le temps. Ce n'est pas parce qu'il y a reprise économique tout d'un coup qu'il n'y a plus de chômeurs. Non: le chômage continue à augmenter, souvent durant un laps de six mois au moins.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Alain Charbonnier. Nous sommes signataires de cette résolution.
Le président. Trois minutes pour vous !
M. Alain Charbonnier. Plus trois minutes pour le groupe !
Le président. Alors dans ce cas, vous pouvez continuez, même si vous devez prendre la parole deux fois, normalement. Mais allez-y. (Exclamations.)
M. Alain Charbonnier. On cumule ! On cumule ! Malheureusement, les chômeurs, eux, n'ont pas accumulé, puisque le Conseil d'Etat, lui, leur a refusé l'offre de la Confédération de passer de 400 à 520 jours. Aujourd'hui, nous avons 7,3% de chômage, 2,3% au-dessus de ce que préconise la Confédération. C'est Mme Leuthard - je ne crois pas qu'elle soit une gauchiste, je ne crois pas qu'elle distribue l'argent de la Confédération à tout vent et de n'importe quelle façon - c'est elle qui propose de passer de 400 à 520 jours, et le département dit: «Non, non, à Genève, on est les meilleurs ! On a 7,3% de chômage, mais on a des mesures de réinsertion qui battent tous les records !» Qui battent tous les records ? Pourtant, 5000 chômeurs sont arrivés en fin de droit l'année passée, en 2009, pour environ 700 à 900 mesures cantonales. En comparaison, cela représente un cinquième - même pas un cinquième ! Les Genevois ont de quoi s'inquiéter. On ne va pas reprendre les leitmotive de M. Stauffer, mais les Genevois ont vraiment de quoi s'inquiéter.
Je vous recommande de renvoyer cette résolution directement au Conseil d'Etat, de façon que les Genevois, ceux qui sont au chômage, puissent bénéficier de 120 jours de répit supplémentaires, même si l'on sait très bien que la durée du chômage a tendance à allonger la durée pour le chômeur - évidemment: c'est une lapalissade. Cela le prétérite peut-être, mais nous vous demandons instamment de renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez à M. le député Charbonnier: il a raison. Et bravo au parti socialiste de reconnecter avec cette partie de la population qui en a grandement besoin !
Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, nous avons un gouvernement de magiciens. Ils ont trouvé la solution pour réduire le taux de chômage à Genève. Eh oui ! On réduit les indemnités de chômage à 7 jours. Après 7 jours, tout le monde est sorti du chômage, et il n'y a plus de chômage. Vous êtes les «kings», les rois; la Suisse vous admire ! Mais de qui se moque-t-on dans ce parlement ? Nous avons, à Genève, un fait historique: le taux de chômage le plus élevé. Malheureusement, nous avons été rejoints par le canton de Neuchâtel ou du Jura, je ne me souviens plus... (Commentaires.) ...Neuchâtel, merci, qui commence à rejoindre les taux de Genève.
Aujourd'hui, la Confédération - c'est-à-dire non pas les deniers du canton de Genève, mais les deniers du l'assurance-chômage fédérale - propose, pour les cantons qui sont dans la nécessité, d'augmenter de 120 jours les indemnités de chômage. Or nous avons ici un gouvernement qui dit: «Non, non, nous sommes les meilleurs. On a vraiment des mesures de réinsertion fabuleuses.» Vous comprenez, à l'Etat, on n'a plus de budget, donc il nous faut une main-d'oeuvre bon marché, que l'on prend sous le prétexte d'emploi-formation. Ainsi, nous mettons en place des programmes d'emploi-formation selon un barème dérisoire, vraiment digne des pires employeurs pratiquant le dumping salarial, qui seraient condamnés et jetés en prisons s'ils payaient des employés 2200 F par mois pour des jobs à 100%. Mais c'est bien l'Etat qui fait cela !
L'Etat, Mesdames et Messieurs, place ces chômeurs, ou ces bénéficiaires de programmes d'emploi-formation qui durent six mois, dans les offices de l'Etat. Nous avons découvert que, à la réception de la Clairière par exemple, où il y a tous les terminaux de sécurité - écrans et dispositifs d'ouverture des portes partout - les alarmes feu, les bagarres, j'en passe et des meilleurs, quelqu'un qui n'est pas employé de l'Etat et gagne moins de 3000 F par mois a été envoyé par le chômage. Et quand on demande au directeur de la Clairière pourquoi il n'engage pas quelqu'un en fixe, il répond: «Ah, mais Monsieur le député, je n'ai pas les budgets pour le faire.» Voilà la société que ce gouvernement nous propose et voilà comment on se moque des citoyens dans ce canton !
Non, Mesdames et Messieurs du gouvernement, Genève doit demander à Berne 120 jours de plus. Il en va de la sécurité de milliers de familles à Genève, des gens qui n'ont pas la chance d'avoir le niveau de revenu que vous avez au gouvernement, et que vous n'avez pas le droit d'abandonner. Notre soutien sera inconditionnel à ce texte parlementaire des socialistes.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Pour les Verts, qui sont d'ailleurs signataires de cette résolution, il est important de renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat. En effet, nous avons, depuis de longs mois, plus de 5% de chômage, et nous avons droit à ces 120 jours de plus.
Par contre, pour les Verts, il est aussi important de dire que nous avons soutenu la nouvelle loi sur le chômage, et nous la soutiendrons encore, parce que l'une des façons de résoudre le problème, non pas forcément du nombre de personnes au chômage, mais du nombre de personne qui peuvent retrouver un emploi dans la dignité, est la formation qu'offre la nouvelle loi sur le chômage. Donc il faut peut-être faire une différence entre la nouvelle loi et ces demandes de 120 jours de plus d'indemnisation, qui sont un pis-aller dans la situation économique particulière de ces deux dernières années.
M. Pierre Conne (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous parlons donc de l'emploi, du chômage et du retour en emploi. Pour finalement illustrer ce phénomène important, nous disposons de deux indicateurs qui éclairent des parties différentes de la situation.
Le premier indicateur, effectivement, est le nombre de chômeurs et le taux de chômage. Or le nombre de chômeurs dans notre société est essentiellement fonction de la conjoncture économique et du dynamisme des entreprises.
L'autre indicateur est la durée totale du chômage. Et là, nous abordons une toute autre question. Pourquoi ? Cela a été évoqué, et balayé à mon avis un peu rapidement: plus le temps d'éloignement du travail est long, moins les chances de retrouver un emploi sont importantes. A cet égard, ce parlement et le gouvernement ont pris leurs responsabilités avec les nouvelles dispositions qui permettent effectivement de tout mettre en oeuvre pour ramener le plus rapidement possible une personne en emploi.
Cette proposition, qui consisterait, dans le fond, à proposer une rallonge supplémentaire aurait un effet inverse et irait exactement dans le sens contraire de ce qui est mis en place. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical refusera cette résolution, et nous vous proposons de faire de même. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Schneider Hausser, à qui il reste quarante secondes pour le groupe socialiste.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Il est vrai que les 120 jours que nous sollicitons lourdement seront payés par la Confédération à 80%. Le canton met quelque chose: 20%. Est-ce que 85% des 5000 chômeurs en fin de droit, qui seraient à l'assistance, coûteraient moins cher que les 20% que le canton devrait injecter pour que les chômeurs en fin de droit bénéficient de ces 120 jours ? Voilà une bonne question. Si l'on répond par la positive, c'est que c'est grave, c'est que l'assistance ne répond plus à grand-chose.
En outre, je voudrais contredire mon préopinant. Les gens qui sont bien formés, certes, ne doivent pas rester longtemps au chômage. D'ailleurs, ils y restent un peu moins longtemps que les autres, que beaucoup d'autres, qui n'ont pas eu la chance d'avoir une formation importante ou dont le problème est que leur champ d'activités n'offre pas d'emplois actuellement. On se rend alors compte que ce n'est pas le placement rapide dans des petits jobs qui va résorber le chômage, mais c'est bien la formation.
Malgré tout, la réponse négative à la question que j'ai posée, fondamentalement, interpelle. En l'examinant, on voit bien ce soir que, par rapport à tous les chômeurs qui se retrouvent à devoir aller à l'assistance, on se dit: «Mais ce n'est pas possible d'avoir répondu cela.» Alors pourquoi cette réponse ?
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Lydia Schneider Hausser. Je vais conclure. Je pense que l'une des hypothèses peut être la rétrocession que le canton ou la Confédération fait par rapport à la RPT. C'est vrai que ce que le canton investit dans le chômage n'est pas compté comme charge cantonale au niveau de la RPT, alors que l'aide sociale est comptée. Et tout ce qui est dans l'aide sociale...
Le président. Il faut vraiment conclure, Madame la députée. Sinon, je vais couper le micro.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...ne doit pas être payé par Genève, ou la Confédération peut aussi nous le rembourser. Quid ? Est-ce bien cela, la clef ? Je ne sais pas, mais ce n'est pas aux chômeurs de le payer. (Applaudissements.)
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien, tout en étant conscient de la difficulté que vivent les chômeurs de ce canton en cette période particulièrement ardue, ne pourra pas soutenir cette résolution pour la raison suivante. Nous avons, il n'y a pas si longtemps que cela, travaillé sur la nouvelle loi en matière de chômage, et il été clairement démontré que la durée du chômage était le facteur le plus pénalisant pour le retour en emploi. Rien ne démontre - et je dirai que les faits démontrent plutôt le contraire - que ces 120 jours supplémentaires donneront davantage de chances aux chômeuses et aux chômeurs de ce canton de retrouver un emploi. Donc je crois que c'est un point important.
M. Stauffer nous dit que plusieurs aspects du dispositif actuel ne sont pas satisfaisants. Certes, les programmes d'emploi-formation pourraient être améliorés. Mais ce n'est pas parce que certains volets du dispositif sont perfectibles que l'on doit forcément passer par cette augmentation de la durée du chômage.
La conjoncture a imposé d'adapter un certain nombre de dispositions. Un élément essentiel a pu être mis en oeuvre au niveau de la Confédération, mais également à Genève: l'augmentation de la durée du chômage partiel. Je crois que cet élément a joué un rôle très important pour que des personnes puissent garder le pied à l'étrier. Mais il est essentiel de ne pas trahir l'esprit de la nouvelle loi, qui est de réduire, autant que faire se peut, la durée du chômage. Or nous pensons que cette augmentation de 120 jours serait en contradiction avec cet esprit de la loi actuelle.
M. Eric Bertinat (UDC). La résolution que l'on nous soumet ce soir me semble être une véritable fuite en avant, surtout vis-à-vis de la nouvelle loi sur le chômage qui a été votée par la population. L'idée de cette loi était de ne pas laisser trop longtemps... (Remarque.) ...les gens chercher du travail et de les aider à se réinsérer. Soit l'Etat y arrive... (Commentaires.) ...et il doit y arriver, parce que, ici à Genève, on ne cesse de nous expliquer que l'économie crée de nombreuses places de travail, qu'il y a un dynamisme incroyable, et cela a l'air d'être le cas. Soit alors quelque chose ne va pas et, effectivement, à Genève, il y a un problème de chômage.
S'il y a un réel problème de chômage, se pose la question de savoir si la libre circulation est coupable ici de quelque chose de bien précis. (Applaudissements. Remarque.) Il faut avoir le courage - et le MCG ne l'a pas jusqu'à présent - d'aller jusqu'à revoir cette libre circulation. (Remarque.) Il n'est pas normal d'avoir des chômeurs et dans le même temps d'autoriser 70 000 personnes à venir travailler dans le canton de Genève. (Commentaires.) Je note qu'une bonne partie de ces 70 000 personnes est issue de l'Union européenne et vient s'établir en bordure... (Remarque.) ...du canton de Genève et prendre ici des places de travail. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Alors soit ici à Genève, on a un nombre suffisant de places de travail à offrir aux Genevois et aux résidents genevois; soit on ne les a pas, mais il faut aller les chercher. Voilà ce que je tenais à vous dire.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Alain Meylan (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral refusera d'entrer en matière et rejettera cette résolution pour les raisons suivantes. Elles ont en partie déjà été dites, mais je crois utile de les rappeler.
Nous préférons utiliser notre énergie à qualifier ou à requalifier les gens dès le début de leur entrée au chômage. C'est là que l'effort doit être fait, c'est là qu'il commence à être fait et c'est là qu'il atteindra le plus efficacement son but, conformément aux objectifs de la loi qui a été votée majoritairement par le peuple.
Il s'agit effectivement d'essayer de requalifier les gens, quand ils sont malheureusement sortis d'un secteur d'activité qui n'est peut-être plus aussi florissant qu'auparavant, de leur donner la possibilité, après la période de chômage, de réintégrer le marché du travail par le biais des ARE, les allocations de retour en emploi. Grâce à ces dernières, ils peuvent voir un autre secteur d'activités tout en bénéficiant non seulement des aides de l'Etat, mais aussi d'un travail qualifié et qualifiant, qui leur permette aussi de retrouver une dignité au travers du travail, et pas seulement au travers d'indemnités de chômage.
Il y a aussi les AIT, qui n'ont pas été mentionnées dans cette résolution, ce qui prouve que les auteurs ne connaissent peut-être pas toutes les possibilités qui existent pour les personnes désirant retravailler. Les allocations d'insertion au travail donnent la possibilité, lorsqu'on a perdu une partie de ses capacités ou qu'une technologie d'un secteur d'activité évolue, de retrouver le niveau qui doit être celui grâce auquel on trouve un emploi dans l'économie. Rappelons-le, cette dernière crée toujours des emplois à Genève, de sorte que Genève résiste malgré tout. Disons-le, et disons-le franchement. Cette économie continue et maintient une activité tout à fait acceptable; elle permet et doit permettre à ces gens de retrouver un emploi.
Donc, Mesdames et Messieurs les auteurs de cette résolution, vous vendez de l'illusion, malheureusement, de l'illusion non qualifiante. (Brouhaha.) Je préfère d'autant plus donner la possibilité à ces gens d'employer les moyens qu'on leur met à disposition pour se requalifier et retrouver une vie active professionnelle satisfaisante. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Poggia, à qui il reste 20 secondes.
M. Mauro Poggia (MCG). Merci de votre générosité, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suis sidéré par le manque de sérieux de l'argumentation des libéraux, radicaux et PDC. Le syllogisme que l'on nous présente consiste à dire: «Plus longtemps une personne touche des indemnités, plus difficilement elle sera reclassable.» Cela signifie-t-il que des chômeurs s'installent volontairement dans cette situation ? Non, c'est absurde ! Mais qui envie la situation d'un chômeur ici à Genève ?!
Si ces gens sont au chômage, c'est parce qu'ils n'ont rien trouvé. Et les deux mesures, aider ceux qui ne trouvent pas de travail et aider simultanément ces personnes à retrouver du travail, sont des mesures qui doivent être mises en place conjointement et qui ne s'excluent évidemment pas l'une par rapport à l'autre.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la philosophie qui nous a amené, il y a trois ans, à changer le dispositif de lutte contre le chômage à Genève est partie du principe suivant. Plus une personne reste longtemps au chômage et moins les mesures actives que nous lui proposons sont présentes, plus les difficultés à retrouver un emploi sont grandes. Ces faits, nous les connaissions depuis des années. Depuis des années, nous avions une politique qui, précisément, allait dans un autre sens et qui nous a amenés à connaître des chiffres dont nous payons aujourd'hui les conséquences: être systématiquement, dans tous les paramètres du chômage, le canton lanterne rouge.
C'est pourquoi nous avons, avec l'accord du peuple et d'une large majorité de votre parlement, créé une nouvelle loi, qui a amené un certain nombre d'outils. C'est ainsi que nous avons préféré, à la passivité d'un système qui consistait à prolonger, parfois indéfiniment, des périodes d'indemnisation, des mesures actives de retour vers le marché du travail. Les allocations de retour en emploi ont doublé en nombre; les programmes cantonaux d'emploi-formation ont permis à 551 personnes, à ce jour, d'avoir une activité; 248 personnes exercent aujourd'hui un emploi de solidarité, et nous disposons de places en nombre pour permettre à d'autres personnes, durant ces prochains mois, de les rejoindre, s'il n'y avait malheureusement pas d'autres solutions pour elles.
Cette politique a aussi amené un certain nombre de résultats. Ne vous en déplaise, Monsieur Charbonnier, pour la première fois depuis vingt ans, le canton de Genève non seulement n'est plus lanterne rouge sur un certain nombre de paramètres du chômage, mais figure parmi les meilleurs cantons. Il est très exactement le deuxième meilleur canton. La durée moyenne du chômage est passée, entre 2006 - qui était pourtant une année plutôt prospère en matière économique - de 343 jours à 265 jours actuellement. Le mois dernier encore, cette durée moyenne a baissé. (Remarque.) Le nombre de personnes chômeuses en fin de droit, qui s'élevait à 3900 personnes il y a trois ans, était de 3200 personnes en 2009; ce chiffre marque une évolution favorable. Aucun autre canton, ne vous en déplaise, ne peut se prévaloir de résultats de cette nature.
Cela étant, un problème demeure. Il y a trop de chômage, trop de chômeurs à Genève. Or les politiques que nous devons pratiquer ne sont assurément pas celles qui ont démontré leurs échecs. Souvenez-vous, Mesdames et Messieurs, de la précédente période, lorsque mon prédécesseur avait dû - et je vous assure que, si vous l'auditionniez, il vous dirait combien il regrette d'avoir été contraint de prendre cette décision - augmenter les durées d'indemnisation du chômage. Il me semble que plusieurs d'entre vous oublient les difficultés insurmontables qu'un certain nombre de chômeurs ont dû traverser lorsque nous avons dû sortir de ce dispositif. Vous oubliez aussi que la Confédération a démontré combien ces augmentations de durée de chômage étaient en réalité contre-productives pour les chômeurs eux-mêmes.
C'est la raison pour laquelle, contrairement à ce qui est affirmé, la Confédération ne nous demande pas - elle ne nous demande pas ! - de faire usage de cette disposition. C'est si vrai que la Confédération a proposé de supprimer cette disposition dans le nouveau projet de loi sur le chômage. Dieu sait si cette nouvelle loi est contestée, mais ce point-là, comme par hasard, est l'un de ceux qui est le moins contesté, y compris sur vos bancs, tant chacun a compris que cela n'avait plus aucun sens d'offrir aux chômeurs pour seule solution la possibilité d'avoir une prolongation des indemnités sans mesures actives, sans une politique plus volontariste en matière de lutte contre le chômage.
Voilà la raison pour laquelle nous préférons investir des moyens dans une politique cantonale du chômage, politique sur laquelle nous faisons de gros efforts; près de 90 millions de francs sont investis chaque année à cet effet. Quand on nous explique que les cantons voisins de Vaud, de Neuchâtel et du Jura utilisent, de manière partielle d'ailleurs ce dispositif - le canton de Vaud ne l'utilise pas à plein - j'aimerais simplement vous rappeler que ces cantons n'ont pas la moindre politique cantonale en matière de chômage; ils n'investissent aucun moyen sur leurs propres deniers publics pour créer des ARE et permettre des programmes de formation et la création d'emplois de solidarité.
C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat a estimé que c'était faire fausse route - que c'était reculer pour mieux sauter - que d'offrir des solutions qui sont des mirages, qui ne sont pas de vraies solutions. La vraie solution est d'avoir des mesures actives, une politique volontariste. Le Conseil d'Etat s'y est employé et s'y emploiera. Il reconnaît humblement qu'il y a encore un long chemin à faire. Mais assurément, ce chemin ne peut pas prendre des issues que l'on sait sans aucune espèce d'objectifs ni de buts, comme nous l'avons trop vu durant ces dernières années. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le Conseil d'Etat. Madame Emery-Torracinta ? Vous demandez le vote nominal, d'accord. Etes-vous soutenue ? C'est le cas.
Mise aux voix à l'appel nominal, la résolution 602 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 48 oui contre 47 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Cette résolution est donc adoptée par... (Exclamations. Protestations. Commentaires.) Un peu de calme, s'il vous plaît ! Le vote nominal a été demandé; nous allons donc vérifier si le vote de M. Aubert a été enregistré.
Une voix. Il n'a pas voté ! (Commentaires.)
Une autre voix. Il n'était pas là ! (Protestations.)
Le président. Il était là ! (Protestations.) Selon l'indication du vote nominal, que l'on me remet à l'instant, M. Aubert n'a pas voté, alors qu'il était là.
Une voix. Voilà ! (Brouhaha.)
Le président. Donc ce bouton ne marche apparemment pas ! Nous allons revoter et vérifier que le vote de M. Aubert marche. (Protestations.) M. Aubert était là, tout le monde a pu le voir ! (Remarque.) Non, si le bouton ne fonctionne pas, nous devons vérifier ! (Commentaires.) On va faire un test... (Commentaires.) Veuillez m'excuser, mais chaque député a le droit de vote ! Si M. Aubert n'a pas pu s'exprimer parce qu'il y avait une panne, ce n'est pas normal. Nous procédons au test en demandant à M. Aubert de voter tout seul. (Une procédure de vote est lancée pour le test.)
Une voix. Ça marche ! (Brouhaha.) Donc il n'avait pas voté ! (Le président est interpellé. Brouhaha. Protestations.)
Le président. S'il vous plaît, nous allons revoter, puisque M. Aubert était là ! Je soumets de nouveau au vote la résolution 602. (Exclamations. Protestations. Applaudissements. Protestations et commentaires pendant la procédure de vote.) Cette fois, le doute n'est plus permis ! Cette résolution est bel et bien acceptée et renvoyée au Conseil d'Etat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la résolution 602 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 49 oui contre 48 non. (Applaudissement à l'annonce du résultat.)