Séance du jeudi 17 décembre 2009 à 20h30
57e législature - 1re année - 3e session - 12e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Guy Mettan, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger, Charles Beer, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Mark Muller et David Hiler, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Guillaume Barazzone, Mathilde Captyn, Edouard Cuendet, René Desbaillets et Morgane Gauthier, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de passer à la prestation de serment, je salue notre ancienne collègue Carole-Anne Kast, qui se trouve à la tribune. (Applaudissements.)

E 1715-A
Prestation de serment de Mme HUBER Anne-Laure, élue Substitut du Procureur général

Le président. Mme Anne-Laure Huber est assermentée. (Applaudissements.)

IN 144-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la validité et la prise en considération de l'initiative populaire 144 « Pour la mobilité douce (Initiative des villes) »

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, en application de l'article 119 de la LRGC, le rapport du Conseil d'Etat sur l'IN 144 est renvoyé à la commission législative.

Le rapport du Conseil d'Etat IN 144-A est renvoyé à la commission législative.

PL 10566-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant les budgets d'exploitation et d'investissement des Services industriels de Genève pour l'année 2010
Rapport de majorité de M. Eric Leyvraz (UDC)
Rapport de minorité de M. Eric Stauffer (MCG)

Premier débat

Le président. Nous sommes maintenant au point 160 de notre ordre du jour. Je donne tout de suite la parole au rapporteur de majorité, M. Leyvraz.

M. Eric Leyvraz (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi, qui approuve les budgets d'exploitation et d'investissement des Services industriels de Genève, a bien sûr été étudié avec attention par la commission de l'énergie.

Les points principaux sont résumés dans le rapport de majorité. Nous rappellerons brièvement le montant important du chiffre d'affaires qui est de 1085 millions, et l'effort de réduction des charges d'exploitation fixé à 5 millions par année. Le résultat net s'inscrit à 91 millions, ce qui est un bon résultat, dans les normes des années précédentes si l'on utilise des paramètres comparables. Le niveau exceptionnel des investissements à 236 millions comprend un développement rapide du réseau des fibres optiques, des dépenses soutenues dans les énergies renouvelables, notamment l'éolien.

Il a été démontré que les SIG ne recevaient aucune subvention de l'Etat et que la somme de 22 millions que l'Etat va verser aux SIG en quatre ans provient d'une différence dans le transfert d'actifs. Le secteur des déchets spéciaux, en effet, a été cédé à une entreprise spécialisée pour un franc symbolique, car c'est un secteur fortement déficitaire. Les SIG n'ont fait qu'appliquer une recommandation de la Cour des comptes selon laquelle les secteurs déficitaires et n'entrant pas dans la stricte mission publique des Services industriels doivent être abandonnés. L'Etat rembourse donc la somme versée par les SIG concernant ce service qui avait été comptabilisé lors du transfert d'actifs.

Il faut relever aussi que les SIG ne contreviennent pas aux dispositions légales en gardant les dividendes extraordinaires reçus de la fusion entre EOS et Atel pour les utiliser pour le financement de moyens de production d'énergies renouvelables, puis en affectant seulement les dividendes ordinaires à la baisse des tarifs de l'électricité: ils sont libres de le faire !

Quant aux tarifs de l'électricité, il faut rappeler qu'ils sont fixés par le Conseil d'Etat. Et si, entre les années 2004 et 2008, le bénéfice sur ces derniers a été élevé, l'argent a été clairement utilisé: d'abord pour rembourser une dette trop lourde, la réduisant de plus de 430 millions de francs, puis pour la réalisation d'investissements importants dans le secteur électrique et de la valorisation des déchets.

Aujourd'hui, les SIG remboursent une somme d'argent aux consommateurs, car les tarifs électriques ont été trop élevés par rapport au prix payé. Mais c'est grâce à l'intervention des SIG auprès de Swissgrid, chargé de l'acheminement du courant et dont les prix avaient été doublés, et grâce à leur plainte auprès de M. Prix que les tarifs de Swissgrid ont été fortement baissés et, par conséquent, les tarifs des Services industriels.

Il est à noter aussi que pour pallier des variations trop fortes des tarifs dans un marché de l'électricité aujourd'hui complètement libéralisé, les SIG verseront, dans un fonds de péréquation, les sommes supérieures aux 5% de bénéfices autorisés, fonds qui servira à lisser les prix les années suivantes.

Rappelons aussi que les SIG sont une régie autonome, qu'ils ne reçoivent pas de subvention, et donc qu'ils gèrent la masse salariale comme ils le désirent ! Les 95% de cette masse salariale sont fixes et 5% représentent une part variable rattachée à des objectifs. Il ne s'agit donc pas de bonus, car les bonus sont une dotation fixe.

Rappelons également que les Services industriels ont pour actionnaires l'Etat, à 55%, et les communes, à 45%. Cette compagnie appartient donc - on peut le dire - au peuple.

Quant à la Cour des comptes, elle a fait aux Services industriels de Genève des recommandations lors de son audit, qui ont été suivies en large partie, mais elle n'a rien relevé dans la gestion des Services industriels de contraire à la loi.

Je suis donc affligé du ton et du contenu du rapport de minorité, dont les arguments sont d'une insigne pauvreté. On sent vraiment qu'il s'agit d'un règlement de compte de son auteur - qui n'intéresse personne finalement - lequel a été renvoyé pour faute grave du conseil d'administration des Services industriels...

Dans ses écrits, son parti parle de «politique des petits copains», des «coquins»... Cela est injurieux pour une société aimée des Genevois, qui remplit fort bien son rôle de distributeur d'énergie et d'eau, eau dont la qualité est exceptionnelle.

C'est aussi indirectement injurieux pour les 1600 employés des Services industriels, qui sont fiers à juste titre de leur entreprise.

Il faut quand même un sacré culot pour jouer les «pères la vertu» quand on traîne derrière soi des centaines de milliers de francs de poursuites ! (Exclamation.) Où se trouvent les coquins et les malhonnêtes autour de cette table ?

M. Eric Stauffer. C'est inadmissible !

M. Eric Leyvraz. Pour moi, c'est clair !

Le président. Vous avez raison ! (Exclamations. Sifflets.) Vous avez raison ! Monsieur Leyvraz, pas d'attaque personnelle, s'il vous plaît !

M. Eric Stauffer. C'est n'importe quoi !

M. Eric Leyvraz. Monsieur le président, j'ai la parole ! Les dés sont pipés, parce que...

Le président. Veuillez poursuivre, mais, s'il vous plaît, pas d'attaque personnelle !

M. Eric Leyvraz. ...M. Stauffer sait très bien que je ne l'interromprai pas quand il aura la parole !

M. Eric Stauffer. Allez, cou-couche panier !

M. Eric Leyvraz. J'estime que son attitude n'est pas acceptable ! Nous pratiquons M. Stauffer depuis quatre ans: il n'a pas d'éducation, et ce n'est pas nécessaire d'en rajouter !

M. Eric Stauffer. Tu parles pour qui, là, pour toi ?

M. Eric Leyvraz. Tous les partis, sauf le MCG, vous recommandent donc d'accepter cet excellent projet de loi 10566.

Mais avant de terminer et de passer la parole au rapporteur de minorité, je dois expliquer au public qui nous regarde pourquoi je ne lui accorderai pas beaucoup d'attention... Je sais déjà comment les choses vont se passer: c'est le chemin classique ! (Commentaire de M. Eric Stauffer.)

Chapitre 1: «Ce projet de loi est scandaleux, je dénonce la politique des petits copains !» Chapitre 2: «En tant qu'élu du peuple, je n'accepterai jamais que...» Chapitre 3: «...dans cette république bananière...»

Mesdames et Messieurs les députés, je fais un effort pour me mettre à ce niveau, mais, cet après-midi, je suis allé à la FNAC et j'ai relu «Babar et les quatre voleurs»...

Vous pouvez passer la parole au rapporteur de minorité ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Pour la sérénité des débats, je vous invite à éviter les attaques personnelles. En l'occurrence, Monsieur Leyvraz, vous auriez dû suivre ce conseil ! (Exclamations.) S'il vous plaît ! Je donne maintenant la parole au rapporteur de minorité, à qui je fais les mêmes recommandations ! (Rires. Commentaires.)

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Vous savez, Monsieur le président, je ne m'abaisserai pas à répondre à ces attaques mensongères, car, en fin de compte, nous sommes ici pour parler des affaires de la république. Mais si vous voulez que nous parlions de ma vie, Monsieur Leyvraz, je suis à votre disposition ! En attendant, vous avez été un menteur ce soir, en donnant des informations erronées !

Cela étant, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais que vous me citiez un seul canton suisse - un seul ! - où ceux qui vendent de l'électricité ont dû rembourser, à deux reprises en trois ans, plus de 60 millions aux usagers, parce qu'ils ne sont pas capables de calculer les tarifs de l'électricité... Un seul canton, Mesdames et Messieurs les députés ! Trouvez-en un seul - à part Genève, bien sûr, où nous avons la palme de l'imbécillité en ce qui concerne les tarifs d'électricité !

Maintenant, Mesdames et Messieurs de l'Entente, vous qui êtes si vertueux s'agissant des impôts, vous qui voulez les faire baisser - et nous vous avons soutenus sur ce point, me semble-t-il - que dire en constatant que les Services industriels ont engrangé un bénéfice de 634 millions - je dis bien: 634 millions ! - c'est-à-dire plus que la baisse d'impôts que nous avons consentie en votation populaire, entre 2004 et 2008 ? Ce n'est pas moi qui le dis, c'est indiqué dans le rapport No 23 de la Cour des comptes ! Que dire de cet impôt déguisé ? Les plus intelligents de ce parlement me diront - et il y en a beaucoup ! - que c'est une très bonne affaire... Oui, mais pour l'Etat: pas pour les citoyens consommateurs contribuables, car ce sont eux, au travers des tarifs d'électricité, qui paient cet impôt déguisé !

Que se passe-t-il, Mesdames et Messieurs les députés: seriez-vous en contradiction avec votre discours ? Vous voulez baisser les impôts d'un côté et faire payer les Genevois de l'autre ? Voyez-vous, Monsieur Leyvraz, moi, au moins, je suis cohérent avec cette politique: je suis favorable à la baisse des impôts et favorable à des tarifs d'électricité justes !

Le président. S'il vous plaît, Monsieur Stauffer, adressez-vous au président !

M. Eric Stauffer. Je n'ai pas compris votre remarque, Monsieur le président !

Le président. Vous devez vous adresser à moi et non pas au rapporteur !

M. Eric Stauffer. Vous m'excuserez, mais étant donné le dérapage de notre collègue M. Leyvraz, je m'adresserai à qui bon me semble ! (Exclamations. Huées.)

Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, laissez-moi vous préciser encore - je reviendrai après sur ce point - la manière dont sont calculés les tarifs d'électricité: les Services industriels nous présentent les tarifs sous forme de centimes; ils nous indiquent le montant des charges, etc... J'en faisais partie: je sais donc de quoi je parle ! De plus, je n'ai pas été révoqué pour «faute grave», mais simplement parce que je dérange le Landerneau politique, Monsieur Leyvraz, et vous ne pouvez pas contester cela, puisque, apparemment, vous cautionnez par votre attitude le fait qu'il y ait des salaires de 420 000 F pour des postes à 40% !

J'en reviens au calcul des tarifs et à ce qu'on nous fait avaler dans ce Grand Conseil... On prétend, Mesdames et Messieurs, qu'avec les frais d'exploitation, les charges, on arrive à un prix de 2,23 centimes le kWh, et que celui-ci comprend une marge infime qui n'est que d'un centime... Alors, évidemment, nous, les administrateurs des Services industriels, nous acceptons, car cette marge nous paraît tout à fait raisonnable... Mais que penser lorsque, après examen du bilan, nous comprenons que les Services industriels nous ont menti, puisque les chiffres montrent un bénéfice de 634 millions en quatre ans ?

Est-ce à croire que l'on nous prend pour des imbéciles, Monsieur le président ? Que l'on prend les citoyens de ce canton pour des imbéciles ?

Alors, Monsieur Leyvraz - et ce sera ma conclusion, Monsieur le président - nous avons cherché avec mes camarades, puisque nous sommes en période de Noël, à vous faire un cadeau, vous qui êtes le représentant de la majorité: un cadeau qui est symbolique des valeurs que vous défendez. Laissez-moi vous offrir ce cadeau que j'ai apporté ici, Monsieur le député: un régime de bananes ! Car aujourd'hui nous sommes bien dans une république bananière ! (M. Eric Stauffer offre un régime de bananes à M. Eric Leyvraz. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité ! La dégustation de bananes se fera après la séance... Monsieur Haldemann, vous avez la parole.

M. François Haldemann (R). Merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical votera favorablement le projet de loi 10566 approuvant les budgets d'exploitation et d'investissement des Services industriels de Genève pour l'année 2010.

Nous avons noté avec satisfaction le retrait, dans ce projet de loi, du montant de 22 millions à investir pour la centrale chaleur force du Lignon, comme nous l'avions demandé avec le groupe des Verts.

Nous adhérons pleinement à l'objectif des Services industriels visant à tendre vers une plus grande indépendance énergétique, mais nous considérons que cet objectif ne peut être crédible si l'on fait appel aux énergies fossiles importées.

Par contre, nous soutenons la politique d'investissement dans les projets visant à recourir aux énergies renouvelables. Par ailleurs, nous félicitons les SIG d'avoir déjà investi 6,5 millions dans les études de faisabilité du barrage de Conflan, et nous les encourageons à investir massivement et dès à présent dans les études de détail.

Pour faire face à cette politique volontariste d'investissement, nous savons que le recours à l'emprunt sera nécessaire, et ce malgré la capacité d'autofinancement annuel, qui se situe depuis plusieurs années autour de 200 millions de francs. L'augmentation de la dette des SIG ne sera que le reflet de cette politique volontariste et ambitieuse de se doter d'infrastructures efficaces et respectueuses de l'environnement. C'est pourquoi le groupe radical a toute confiance dans la gestion de fonctionnement des SIG et acceptera donc de voter ce projet de loi.

M. Serge Hiltpold (L). Après une étude approfondie de la commission de l'énergie et des Services industriels, le groupe libéral vous recommande d'adopter ce projet de loi approuvant les budgets d'exploitation et d'investissement des SIG pour l'année 2010, comme l'a fait la commission de l'énergie et des Services industriels à l'unanimité des membres présents moins deux unités, semble-t-il légèrement plus pondérées en commission...

Afin de ne pas entrer dans un débat démagogique et réducteur, les libéraux tiennent encore à préciser que ce projet de loi ne peut être amendé; par conséquent, il ne peut être qu'accepté ou refusé, comme le précise la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève - L 2 35.

Le groupe libéral, après analyse objective, soutient la politique ambitieuse des Services industriels concernant les investissements prévus dans ce budget 2010. Plus 40,9 millions par rapport au budget 2009, à raison de 236 millions, notamment dans les domaines suivants. Plutôt que de nous intéresser à des bananes, nous préférons envisager une politique d'avenir ! (Commentaires.) Ce sont 110 millions pour l'ensemble des réseaux eau potable, gaz et électricité, afin d'assurer la qualité et la fiabilité des prestations pour les entreprises, industries et ménages; 42 millions pour l'extension du réseau de chauffage à distance, y compris la liaison entre la rive droite et la rive gauche du Rhône; 29 millions pour les activités des eaux usées et la mise en valeur des déchets... Peut-être pourrions-nous utiliser les peaux de bananes qui sont sur la table !

En outre, 18 millions pour les projets de développement d'énergies renouvelables - microhydrauliques, biomasses, éoliens, photovoltaïques - dans une vision responsable des programmes Eco 21, et 8 millions pour les projets de géothermie en complément des énergies renouvelables. Et, enfin, 7 millions pour le développement du réseau de fibres optiques, infrastructure indispensable à la Genève de demain qui se tourne vers l'avenir et confirme sa vision dans les nouvelles technologies, avec un investissement sur six ans de 184 millions.

Forts de ces arguments, nous pensons que le chemin vers l'indépendance énergétique est une priorité majeure, qui plus est lorsqu'un pays comme la France importe à ce jour plus d'énergie électrique qu'elle n'en exporte, tributaire d'un marché dont elle ne mesure pas les effets à long terme.

Conscients et pragmatiques, les députés libéraux voteront ce projet de loi donnant les moyens nécessaires aux SIG dans l'exercice de leurs compétences, mettant en avant les intérêts de la république plutôt qu'un discours électoraliste, dépassé, réducteur et irresponsable !

M. Roger Deneys (S). Les socialistes soutiendront ce projet de loi car, comme cela a été rappelé tout à l'heure, il n'est de toute façon pas possible de l'amender. Nous ne pouvons que l'accepter ou le refuser mais, bien entendu, en tant que députés parlementaires responsables, nous avons à notre disposition tous les autres instruments que nous confère le statut de député pour changer les choix d'investissement - comme on le fait, par exemple, pour la centrale chaleur force, en essayant de repousser sa construction ou en proposant d'autres modes de rémunération au conseil d'administration. Les instruments à notre disposition sont les suivants: les motions, les résolutions, les projets de lois, mais, je le répète, dans le cas présent, nous ne pouvons qu'accepter ou refuser ce projet de loi.

Donc, sur un budget annuel d'un milliard de francs, il faut avoir une vision globale du fonctionnement de l'entreprise, et je crois que la première chose à signaler, c'est que cette entreprise publique est bénéficiaire. Année après année, elle fait des bénéfices, ce qui permet de financer aussi le canton: en effet, les Services industriels reversent chaque année une partie de ceux-ci à l'Etat. Il est même arrivé que les députés dans cette enceinte, lors du vote du budget, piquent un peu plus d'argent aux SIG pour pouvoir présenter un budget équilibré ! Cela s'est passé il y a quatre ans... C'est une pratique parlementaire courante de profiter des bénéfices des Services industriels, qui appartiennent aux collectivités publiques. Quoi qu'il en soit, cet argent n'est volé par personne, puisqu'il revient aux collectivités publiques ! Et comme pour toute entreprise, le fait d'avoir des recettes supplémentaires l'année x plutôt que l'année x + 1 permet simplement de faire des investissements supplémentaires ou d'envisager la suite de la marche de l'entreprise différemment.

Donc, fondamentalement, le budget des Services industriels pour 2010 est tout à fait correct. Il n'y a pas de problèmes majeurs pour les différents pôles d'activités des Services industriels qui sont l'approvisionnement en électricité, l'approvisionnement en eau, le traitement des déchets, sans parler des missions que je qualifierai de «secondaires» - en tout cas d'un point de vue de la mission de service public - notamment le réseau de fibres optiques. A ce propos, on pouvait d'ailleurs se demander si c'était bien le rôle des Services industriels que d'investir dans un réseau de fibres optiques... Cela dépend de notre vision du rôle de l'Etat... En ce qui me concerne, je pense qu'il s'agit d'une infrastructure technologique d'avenir et qu'il est raisonnable d'imaginer que la collectivité publique mette à la disposition de ses citoyens ce réseau de fibres optiques. Par contre, nous devons éviter - c'est l'avis des socialistes - que ce réseau soit privatisé après coup, parce qu'il s'agit d'un investissement public qui doit rester en mains publiques !

Concernant le rapport de minorité, Monsieur Stauffer, je suis un peu embarrassé, parce que la remarque de M. Leyvraz me semble quand même assez pertinente dans la mesure où vous indiquez ceci dans la première phrase de votre rapport de minorité: «La loi doit être respectée par tous ! C'est la base de notre démocratie et de l'Etat de droit !» Et c'est vrai que l'on peut se demander qui, parmi nous, respecte ou non la loi que nous sommes tous censés respecter... Du coup, sa remarque devient pertinente...

Mais, fondamentalement, il est important de rappeler ici que les Services industriels respectent tout à fait la loi et que le seul élément que vous évoquez dans votre rapport de minorité - ma foi bien maigre, et je le regrette ! - est la note de la Cour des comptes. Vous avez même mis en gras et en grosses lettres le passage qui vous dérange ! Mais, comme c'est votre habitude, vous avez omis de signaler la première partie du texte en question, puisqu'il s'agit d'une note complémentaire du rapport de la Cour des comptes. Elle se trouve à la page 38 du rapport de cette dernière et précise d'abord pour quelle raison cette soi-disant subvention a été accordée - en l'occurrence, il s'agissait effectivement du financement du four des déchets spéciaux aux Cheneviers qui allait de toute façon disparaître, et on peut critiquer le procédé qui a été utilisé à l'époque. Quoi qu'il en soit, nous, socialistes, étions opposés aux transferts d'actifs et nous étions aussi critiques par rapport au montant en question. Il s'agissait d'un mécanisme financier, mais il aurait peut-être dû être fait autrement. De toute façon, il ne s'agit pas d'une subvention à long terme, puisque ce sont les Services industriels qui versent chaque année des montants de l'ordre de plusieurs dizaines de millions au canton de Genève, et d'ailleurs aussi aux communes, étant donné que les communes sont aussi actionnaires. Donc, en réalité, ce sont les Services industriels qui nous permettent d'avoir des comptes plus favorables. Et, en l'occurrence, ce budget ne pose aucun problème légal. Il est du reste étonnant que l'on puisse avoir un intérêt médiatique pour ce débat, puisqu'il n'y a rien de particulier à dire ! Cette manne versée par l'Etat dure quatre ans: il s'agit du remboursement des 22 millions du four spécial. Cela s'est fait sur quatre ans: cela aurait pu être fait en une année, ce qui aurait été préférable, mais c'est ainsi.

Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes soutiendront ce budget. Ils seront en particulier attentifs aux questions d'investissements, car l'autre volet qui mérite notre attention est la question des économies d'énergie. Les SIG vendant de l'énergie, ils ont évidemment intérêt à vendre de plus en plus. Or, pour les socialistes, il est important d'inverser la tendance: de diminuer la consommation d'énergie. Et, Monsieur Stauffer, le prix de l'électricité est précisément l'un des éléments sur lequel il est possible d'intervenir pour essayer de diminuer la consommation d'électricité. Il est donc faux de prétendre que le prix est surfait: c'est aussi une manière d'intervenir sur la consommation ! En conclusion, nous vous invitons à accepter ce budget.

M. Hugo Zbinden (Ve). Je serai très bref. Comme nos collègues radicaux, nous nous réjouissons du retrait de l'investissement de 22 millions pour la centrale chaleur force. Cela signifie que le moratoire que nous avons demandé il y a une année est réalisé dans les faits et que nous avons du temps devant nous pour étudier les alternatives possibles. Il en est de même pour les SIG, qui d'ailleurs examinent les alternatives et investissent dans les énergies renouvelables ainsi que dans les économies d'énergie. Bien sûr, en tant que Verts nous aimerions qu'ils investissent davantage, surtout en matière d'économies d'énergie, mais il est évident que nous allons accepter ce budget. Nous ne voulons pas risquer de ne pas atteindre notre but en refusant bêtement ce budget comme le fait le MCG !

Nous allons donc voter le budget des SIG, car ils ont besoin d'un budget pour pouvoir travailler comme il faut, et je vous invite à en faire de même.

M. François Gillet (PDC). Effectivement, comme c'est l'habitude, quand on parle des SIG, Eric Stauffer monte au front... On peut comprendre qu'il regrette le temps béni où il pouvait allègrement mélanger sa casquette de député et d'administrateur: cela lui permettait d'utiliser les informations de première main qu'il avait au conseil d'administration ! Mais ce temps béni est révolu ! Aujourd'hui, sa seule possibilité, c'est de faire des rapports de minorité pour pouvoir salir les Services industriels de Genève...

J'aimerais rappeler deux choses, Mesdames et Messieurs les députés. Les SIG sont au service de ce canton. Les SIG sont une entreprise qui effectue un travail qui a été reconnu de grande qualité par la Cour des comptes, contrairement aux nouveaux scandales à venir que l'on nous annonçait - M. Stauffer en tête - lors de la publication du second rapport de la Cour des comptes. Il n'en a rien été !

La Cour des comptes a simplement reconnu la difficulté d'évaluer justement le prix de l'électricité dans un marché libéralisé, de plus en plus fluctuant. Et cette dernière a simplement émis des recommandations, qui ont d'ailleurs déjà été prises en compte par les Services industriels pour le budget 2010. Ces recommandations ont permis la création d'un fonds de péréquation pluriannuel, qui va être très utile aux entreprises de ce canton et aux consommateurs d'électricité, puisque le prix va être lissé dans la durée, ce qui évitera des fluctuations importantes. Voilà ce qu'il fallait dire, Mesdames et Messieurs les députés !

Les SIG gèrent cette entreprise de façon très rigoureuse. Le budget qui nous est présenté est équilibré: il prévoit des investissements importants, comme cela a été dit, dans le domaine des économies d'énergie et des énergies renouvelables. C'est essentiel pour notre canton, et c'est cela qu'il faut retenir !

Maintenant, si M. Stauffer veut refaire le passé et revenir sur la période où, effectivement, des bénéfices excessifs ont été enregistrés par les Services industriels, je lui rappellerai que ces bénéfices ne sont pas allés dans la poche des administrateurs ni des cadres de l'entreprise: ils ont été utilisés pour investir dans le domaine des infrastructures énergétiques, pour rembourser la dette, donc pour faire de cette entreprise une entreprise utile à ce canton ! Voilà ce qu'il faut dire, Mesdames et Messieurs les députés !

Aujourd'hui, nous ne refaisons pas le passé: nous parlons du budget 2010 ! Ce budget est équilibré, il est bon, il est porteur d'avenir pour notre canton, et il faut le soutenir ! (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). Nous parlons actuellement du budget 2010 des SIG, mais certains voudraient parler du passé... Alors, du passé, parlons-en ! Nous parlerons du budget 2010 après !

Certains reprochent aux SIG d'avoir trop perçu dans les années antérieures: 42 millions en 2006, 14 millions en 2007, 5,8 millions en 2009... Qu'en a-t-il été ? Eh bien, les consommateurs ont été remboursés !

Par exemple, les 42 millions de 2006 ont pour moitié été remboursés directement aux consommateurs, et pour moitié été attribués à un programme Eco 21, en 2007, qui consiste précisément à trouver des moyens de faire des économies d'énergie.

Les 14 autres millions prétendument trop perçus ont aussi été remboursés aux consommateurs en octobre-novembre 2009. Nous venons d'ailleurs d'en bénéficier...

Pourquoi ces 14 millions de trop-perçu ? Parce qu'il y a eu des erreurs de calcul ou, plus exactement, parce que l'on avait pensé que les prix de l'énergie seraient supérieurs à ceux qu'ils ont été en réalité. Et, une fois les décomptes finaux effectués par les Services industriels de Genève, ceux-ci ont remboursé aux consommateurs ce qui leur était dû. Et d'ailleurs, à l'avenir, pour améliorer la question des calculs, pour éviter que des pics en matière de prix de l'énergie n'influencent les tarifs fixés, ils ont décidé d'introduire un fonds de péréquation des tarifs électriques, qui permettra de lisser les prix dans la durée. Du reste, la Cour des comptes nous dit dans son rapport que les prix seront stables jusqu'en 2012.

En réalité, Mesdames et Messieurs les députés, la bonne nouvelle pour 2010, c'est que les prix vont baisser ! Certains augmentent leurs prix - ils ne peuvent malheureusement pas tenir leurs objectifs - mais les Services industriels de Genève baissent leurs prix en matière d'énergie et ils remboursent les consommateurs pour le trop-perçu. Les SIG sont une entreprise honnête, et il convient de le dire ! C'est une entité publique qui se comporte de façon honnête, je le répète ! Certains entendraient la salir ici: moi, je fais partie de ceux qui défendent la libre concurrence, de ceux qui défendent un marché de l'énergie pluriel ! Quand une entreprise publique travaille bien et rembourse aux consommateurs le trop-perçu, il faut le dire: c'est la moindre des corrections, et je rends hommage aujourd'hui aux SIG et à leur direction !

J'aimerais ajouter ici que les SIG ne sont pas une entreprise cachottière... Il suffit, pour s'en rendre compte, de lire le dernier numéro de «Bon à savoir», qui classe les SIG dans les entreprises les plus transparentes de Suisse en matière de distribution d'énergie. Voilà, la réalité ! Ce ne sont pas les fantasmes que d'aucuns imaginent !

Mesdames et Messieurs les députés, il convient de relever les défis qui nous attendent et de faire des choix ! Voulons-nous une centrale chaleur force ? Voulons-nous faire des investissements dans la biomasse ? Voulons-nous continuer à explorer le domaine des économies d'énergie ? Voulons-nous faire des investissements en matière, par exemple, de fibres optiques ? Voilà des choix que nous proposent les SIG, via le conseil d'administration et via leur direction ! Et c'est sur ces choix que nous devrons prendre position !

En tant que libéral, je retiens une chose aujourd'hui: dans le budget 2010, quelque 5 millions d'économies s'ajoutent encore aux 11 millions qui ont été trouvés dans l'exercice qui s'achève ces jours-ci: cela montre que nous avons affaire à une direction qui a pris conscience...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Pierre Weiss. ...de certaines erreurs du passé ou d'un manque de rigueur du passé. Cette nouvelle direction est rigoureuse, et ce ne sont pas les gesticulations de certains qui changeront quoi que ce soit à cela ! C'est au nom de la rigueur que les libéraux approuveront ce budget !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Moyard... Mme Moyard est appelée au micro, mais elle n'est pas là... (Exclamations.) Où est-elle ? Ah, la voilà !

Mme Marie Salima Moyard (S). Merci, Monsieur le président ! Je souhaitais rebondir sur l'intervention de mon collègue Roger Deneys. Les socialistes approuvent évidemment le haut niveau d'investissement de ce budget 2010. Il s'agira de continuer ces investissements, de les augmenter ces prochaines années, et ce dans trois directions.

La première consiste bien sûr à augmenter la part des énergies vertes dans la consommation totale d'énergie de ce canton, ce qui paraît une évidence. On est sur la bonne voie, mais il y a, je pense, matière à faire encore mieux...

La deuxième, c'est la possibilité d'augmenter et de rechercher à augmenter la capacité d'approvisionnement énergétique de ce canton.

La troisième, qui me paraît personnellement la plus importante, c'est de ne pas chercher à tout prix à augmenter encore et encore la production d'énergie, mais plutôt de rechercher à faire des économies d'énergie, car consommer toujours plus d'énergie, fût-elle verte, n'est pas une solution !

Donc j'exhorte les SIG, quand bien même nous voterons évidemment ce budget, à prendre en compte ces recommandations. J'invite plus largement ce parlement à leur donner également le poids législatif, stratégique et politique nécessaire, afin de préparer correctement le canton à répondre à la consommation énergétique du XXIe siècle ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je vois que vous étiez pile dans les sept minutes ! Je donne la parole à M. Olivier Sauty.

M. Olivier Sauty (MCG). Merci, Monsieur le président. S'agissant du budget des SIG, ce qui me dérange le plus, c'est une remarque de la Cour des comptes concernant la rémunération des cadres et de certains administrateurs... Je trouve en effet dommage que l'on avalise ces rémunérations en disant que c'est comme cela depuis tellement longtemps qu'il s'agit d'un droit acquis... En entendant cela, je me demande ce que les gens vont penser ! M. Stauffer a déjà indiqué une fois qu'il ne payait pas ses impôts depuis dix ans, que c'était un droit acquis... Cela peut faire rire, mais on pourrait appliquer cette théorie à tout le monde ! C'est la raison pour laquelle je trouve ce budget illégal !

M. Longchamp a déclaré vouloir construire la Genève de demain... Je suis d'accord, mais il faut le faire sur des bases saines: il n'est pas possible de construire des cathédrales sur du sable ! C'est pour cela que, au nom du MCG, je vous demande de refuser ce budget, de faire table rase et d'en proposer un autre qui soit complètement conforme à la loi !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer, à qui il reste une minute et vingt secondes...

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Oui... Je ne sais pas comment le décompte a été fait, mais enfin ce n'est pas grave ! On veut limiter le temps de parole parce que, évidemment, mes propos dérangent !

Le président. Sept minutes moins cinq minutes quarante égalent une minute vingt !

M. Eric Stauffer. Pour faire vite, je vais utiliser le style télégraphique... Monsieur Weiss, vous êtes un menteur ! Vous venez de dire que les SIG ont remboursé de manière spontanée le trop-perçu aux Genevois... Il y a un passage du rapport de la Cour des comptes à ce sujet et je vous cite un article de l'ATS à ce propos: «Les Services industriels de Genève vont rembourser 25,7 millions de francs aux consommateurs d'ici 2012, notamment à cause de tarifs d'électricité trop élevés. La conclusion d'un rapport de la Cour des comptes relevé vendredi les invitait à restituer ce trop-perçu.» Allô, allô ! Ce n'est donc pas spontané: c'est la première chose !

Deuxième chose - et on pourrait continuer comme cela jusqu'à demain matin ! - vous prétendez que les SIG remboursent le trop-perçu... Dites-moi, Monsieur Weiss, sans vouloir faire d'amalgame malheureux: les fonds en déshérence, cela vous rappelle-t-il quelque chose ? On rembourse les usagers... Et ceux qui ont déménagé du canton, ceux qui sont décédés, ceux qui ont changé de commune ? On va faire des recherches pour leur rembourser le trop-perçu de leurs factures d'électricité ?! Ou est-ce une escroquerie d'Etat, Monsieur le président ? Comme ça, les fonds en déshérence restent dans les caisses des Services industriels...

Je maintiens ici, devant tout le monde, que ce budget est illégal, que si nous le votons ce soir nous sommes une république bananière, parce que nous ne voulons pas voir la réalité en face ! Vous avez les bananes ! Bravo, Monsieur Leyvraz: au moins vous êtes cohérent dans votre rôle de président d'un parti d'une république bananière ! (Exclamations. Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC), rapporteur de majorité. Je remercie le MCG pour ce beau cadeau... (Rires.)

Une voix. C'est des Max Havelaar !

M. Eric Leyvraz. Je me réjouis de leur offrir, en contrepartie, quelques bouteilles de vin de nos coteaux, car vos bananes viennent d'un pays lointain... J'aimerais mieux que l'on utilise d'autres termes comme «république framboisière» ou «république figuière», parce que ce sont des fruits que j'aime bien...

En ce qui concerne la centrale chaleur force, j'aimerais dire ma satisfaction s'agissant du retrait de ces 22 millions du budget des Services industriels. Le débat ne porte pas sur le fait d'être favorable ou non à cette centrale, mais on peut très bien comprendre que les habitants de Vernier n'en veuillent pas: ils ont déjà largement payé le prix des nuisances, car, c'est vrai, la rive droite de Genève compte un maximum de nuisances. C'est donc une bonne chose que ce projet soit repoussé: cela permettra de discuter, de décider si l'on veut ou non cette centrale et où elle doit se situer.

Pour terminer, je voudrais aussi vous rappeler que, dans les années 50 - peut-être vous en souvenez-vous ? - un livre écrit par le professeur Rentchnick avait eu un énorme succès... Il était intitulé: «Ces malades qui nous gouvernent»...

M. Eric Stauffer. Vous parlez pour vous ?

M. Eric Leyvraz. Eh bien, le titre de mon prochain blog sera le suivant: «Ces malades qui ne nous gouverneront jamais» ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Le temps de parole du parti libéral étant épuisé, je ne peux donner la parole ni à M. Weiss ni à M. Borloz. Je passe donc le micro à Mme Rochat.

Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas question ici de droits acquis, il n'est pas question de république bananière ! Il est question d'une mission essentielle de l'Etat: fournir aux particuliers et aux entreprises l'énergie, qui est indispensable à notre survie ! Et cette énergie doit être de plus en plus verte, de plus en plus bio et de plus en plus compatible avec le développement durable: nous en sommes convaincus.

Le signe que l'entreprise SIG se porte bien se relève au niveau de ses investissements, car quel meilleur exemple qu'une entreprise qui investit.

La Cour des comptes a relevé un certain nombre de points. M. Weiss a parlé du fonds de péréquation qui permettra, justement, de compenser le différentiel des tarifs entre le moment où le tarif est adopté et celui où il est appliqué. Car il se passe six mois entre les deux - M. Stauffer ayant siégé au conseil d'administration des SIG, il le sait mieux que personne ! Ce différentiel sera donc compensé par ce fonds de péréquation.

S'agissant des droits acquis et de ces fameuses rémunérations absolument scandaleuses, la chose a été assainie: vous le savez très bien, Monsieur Stauffer, puisque les salaires ont été revus à la baisse !

En ce qui concerne l'arrêté auquel vous vous référez, qui recommande ce remboursement, j'indique qu'il s'agit d'un arrêté du mois de juillet. Mais vous n'êtes pas en possession de l'arrêté du 25 mars qui stipule effectivement que ce remboursement se ferait automatiquement par les SIG... Alors je crois que lorsque l'on donne une information, il faut la donner d'une façon complète.

L'essentiel a été relevé, et je n'ai pas l'intention ce soir de répéter ce qui a été dit. Je ne peux que vous encourager extrêmement vivement à entrer en matière, à voter ce budget, sous forme de projet de loi, qui est l'expression d'une volonté de la part des SIG de mener une politique extrêmement volontariste en termes d'économies d'énergie. Dans le contexte infiniment sensible dans lequel nous allons nous retrouver ces prochains mois en raison de la votation sur la loi sur l'énergie, il me semble absolument indispensable d'apporter un soutien politique extrêmement fort aux SIG ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Monsieur Stauffer, je vous donne la parole uniquement si vous voulez demander un renvoi en commission, sinon... (M. Eric Stauffer acquiesce.) Bon, d'accord ! Je vous laisse formuler votre demande !

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je ne suis pas d'accord avec ces propos ! Je demande le renvoi de cet objet à la commission de contrôle de gestion, car il faut contrôler les Services industriels: c'est une véritable tonte organisée des citoyens, qui sont pris dans un monopole d'Etat ! On dit que les SIG gagnent de l'argent... C'est vrai, mais ce serait bien malheureux s'ils en perdaient en ayant un monopole d'Etat !

Je demande donc le renvoi à la commission de contrôle de gestion.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets cette proposition de renvoyer le rapport PL 10566-A à la commission de contrôle de gestion.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10566 à la commission de contrôle de gestion est rejeté par 74 non contre 17 oui.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'entrée en matière du projet de loi 10566... (Le président est interpellé.) A l'appel nominal ? (Appuyé.) Très bien !

Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10566 est adopté en premier débat par 74 oui contre 17 non.

Appel nominal

La loi 10566 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10566 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui contre 18 non.

Loi 10566

R 598
Proposition de résolution de Mmes et MM. Loly Bolay, Claude Aubert, Catherine Baud, Antoine Bertschy, Michel Ducret, Fabiano Forte, Renaud Gautier, Pierre Losio, Eric Stauffer pour un déménagement provisoire des fonctionnaires de la police judiciaire en attendant la fin des travaux à l'Hôtel de police du boulevard Carl-Vogt (VHP)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il avait été convenu que la parole ne serait pas demandée. Je passe donc tout de suite au vote. Je vous soumets le renvoi de cette proposition de résolution au Conseil d'Etat, comme la commission des visiteurs l'a demandé.

Mise aux voix, la résolution 598 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 88 oui (unanimité des votants).

Résolution 598

PL 10526-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'organisation et le personnel de la prison (LOPP) (F 1 50)
Rapport de M. Olivier Jornot (L)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que l'inscription à l'ordre du jour et le traitement en urgence de ce projet de loi ont été acceptés tout à l'heure. Je passe donc la parole au rapporteur, M. Olivier Jornot.

M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi a effectivement été inscrit à l'ordre du jour et il a été décidé de le traiter en urgence car la commission judiciaire a étudié cette semaine, selon une procédure extrêmement rapide, ce projet de loi qui avait été déposé en août par le Conseil d'Etat. Si elle l'a fait, c'est à la demande de ce Conseil d'Etat lui-même, parce qu'une partie de ce projet de loi était nécessaire, et même indispensable pour permettre au Conseil d'Etat de conclure l'accord qu'il a annoncé hier, accord conclu avec les syndicats de police, y compris avec la branche prison de ces syndicats. La commission devait ainsi permettre au Conseil d'Etat de prendre la main, en quelque sorte, en matière de politique salariale, puisque les gardiens de prison étaient les derniers fonctionnaires de l'Etat de Genève à avoir une grille salariale inscrite dans la loi.

En raison de l'extrême rapidité avec laquelle le Conseil d'Etat a demandé à la commission de traiter ce projet de loi, la commission, sous l'alerte présidence de M. Frédéric Hohl, a décidé de s'en tenir à l'essentiel et de ne retenir que les éléments absolument nécessaires pour la conclusion de cet accord avec les syndicats, raison pour laquelle c'est un projet de loi singulièrement amaigri qui est sorti des travaux de commission. Mais il permet néanmoins de moderniser la politique salariale concernant les gardiens de la prison de Champ-Dollon.

Je dois, hormis le fait de vous signaler que la commission a voté ce projet de loi à l'unanimité, attirer votre attention sur deux ou trois points.

Tout d'abord, les éléments touchant à l'organisation de la prison de Champ-Dollon qui figuraient dans le projet de loi initial et que la commission a retirés devront revenir, d'une manière ou d'une autre, sous la forme d'un projet de loi du Conseil d'Etat. La commission ne les a pas rejetés, elle ne les a pas refusés: elle a simplement constaté qu'elle ne pouvait pas les traiter avec autant d'urgence que les dispositions de nature salariale.

Deuxièmement, l'accord conclu avec les syndicats prévoit une uniformisation progressive de la situation de l'ensemble du personnel pénitentiaire, c'est-à-dire non seulement les gardiens de la prison de Champ-Dollon, mais également les différents surveillants affectés aux autres établissements tels que La Brenaz, Favra, etc.

Cela n'est pas prévu directement par ce projet de loi: il faudra aussi que le Conseil d'Etat nous propose un projet de loi qui, en quelque sorte, formalise cette uniformisation des statuts des différents agents de détention, pour que nous puissions nous prononcer en toute connaissance de cause, notamment sur le plan financier, puisqu'il va de soi que cette uniformisation aura un coût, ne serait-ce que parce que la caisse de retraite n'est pas la même entre les gardiens qui sont à la caisse de retraite de la police et les surveillants qui sont à la CIA.

Enfin, troisième remarque... Je crois pouvoir affirmer que la commission judiciaire, même si elle n'a pas eu toute la latitude et le temps nécessaires, a été très satisfaite de pouvoir concourir à la pacification obtenue par le Conseil d'Etat. C'est donc de manière tout à fait enthousiaste que la commission, même si elle a été un peu brusquée par le Conseil d'Etat, a voté ce projet de loi, qui marque une étape importante dans la réforme de nos institutions de sécurité. Je vous recommande donc d'accepter l'entrée en matière et de voter ce projet de loi.

Mme Loly Bolay (S). Permettez-moi tout d'abord de remercier le rapporteur, qui a fait un excellent travail en très peu de temps. Comme il l'a indiqué, nous avons voté ce projet de loi dans l'urgence, et nous n'avons pas pu procéder aux auditions comme il l'aurait fallu, tant le projet était important. Mais nous étions tous d'accord de le traiter rapidement parce que c'était nécessaire. C'est vrai, que ce soient les gardiens de prison à Champ-Dollon ou les surveillants des maisons d'arrêt, ces personnes effectuent un énorme travail - tout le monde connaît le problème de la surpopulation carcérale à Champ-Dollon - et elles ont aussi besoin de la reconnaissance des politiques. C'est l'une des raisons qui nous a poussés à accepter ce projet de loi.

Comme l'a relevé le rapporteur, il s'agit d'un premier pas, mais il faudra ensuite rationaliser l'ensemble et faire en sorte qu'il n'y ait plus qu'un seul statut. Car, à l'heure actuelle, les gardiens de la prison de Champ-Dollon sont soumis à la loi sur l'organisation et le personnel de la prison et les surveillants de la maison d'arrêt ont un statut différent. Il est temps - il est temps ! - d'uniformiser leurs statuts pour qu'ils soient tous soumis aux mêmes conditions salariales. Certains gardiens de prison touchent des salaires bien inférieurs à d'autres, alors qu'ils exercent le même métier. Il est donc temps, je le répète, de reconnaître cet état de fait et de faire ce premier pas ! Bien entendu, Madame la conseillère d'Etat, la commission judiciaire attendra, comme l'a également indiqué le rapporteur, le prochain projet de loi, qui sera la clé de voûte de tout ce système qu'il faudra uniformiser.

Le groupe socialiste votera bien entendu ce projet de loi avec beaucoup d'enthousiasme.

Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Je serai très brève, comme le délai qui a été imparti à la commission judiciaire pour se prononcer sur ce projet de loi... J'aimerais m'associer aux remerciements adressés au rapporteur et je remercie la commission de la célérité avec laquelle elle a traité ce projet de loi.

En effet, nous devrons présenter rapidement un nouveau projet de loi englobant tous les éléments qui n'ont pas pu être traités faute de temps la semaine dernière. Il faudra répartir de façon homogène l'organisation, en tout cas en ce qui concerne les agents de détention et les gardiens de prison, et revoir les grades et l'organisation en général.

Encore une fois, je vous remercie de la célérité avec laquelle vous avez pu traiter ce projet de loi. Je vous ai brusqués, et je vous remercie de ne pas m'en tenir rigueur.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous soumets l'entrée en matière du projet de loi 10526.

Mis aux voix, le projet de loi 10526 est adopté en premier débat par 79 oui et 1 abstention.

La loi 10526 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10526 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 80 oui (unanimité des votants).

Loi 10526

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au point 153 de notre ordre du jour.

PL 10432-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'instruction publique (C 1 10)
Rapport de majorité de M. Patrick Saudan (R)
Rapport de minorité de M. Henry Rappaz (MCG)
RD 585-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la formation initiale des enseignants primaires et secondaires
Rapport de majorité de M. Patrick Saudan (R)
Rapport de minorité de M. Henry Rappaz (MCG)

Premier débat

M. Patrick Saudan (R), rapporteur de majorité. Je ne rappellerai pas l'importance de ce projet de loi, qui est évidente pour tout le monde, tant nos futurs enseignants que les futurs élèves genevois.

La genèse de ce projet de loi est en fait contenue dans le RD 585. J'en rappellerai juste brièvement les axes principaux, qui ont été repris dans le projet de loi 10432. Tout d'abord, il s'agissait de mettre la formation des enseignants du primaire et du secondaire sous un même toit. Ensuite, que celui-ci soit un toit universitaire: non plus le toit de la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, mais un institut interfacultaire. Puis, que la durée de formation pour le primaire reste à quatre ans, afin de continuer à assurer un enseignement généraliste qui puisse aller de la première enfantine à la sixième primaire et qui permette, au cours de la quatrième année, une spécialisation dans l'enseignement des langues et dans les matières spéciales. Enfin, que la formation au niveau du secondaire n'excède pas six ans.

Je dois rendre les membres de ce parlement attentifs au fait que ce projet de loi a été étudié à l'aune d'une sorte de contreprojet radical composé par les différents textes joints à ce projet de loi et qui demandait - avec le soutien d'autres partis d'ailleurs - que la formation des enseignants du primaire s'effectue en trois ans, en HEP, et qu'elle soit sanctionnée seulement par un bachelor.

De nombreuses auditions ont eu lieu. Tout d'abord, les auditions des recteurs des HEP et de la CDIP ont permis de mettre en exergue certains faits. En particulier que la structure du lieu de formation dépend plus de l'historique cantonal: tous les cantons qui formaient leurs enseignants du primaire dans des écoles normales sont passés au modèle HEP qui s'est imposé dans pratiquement toute la Suisse. En revanche, les cantons qui bénéficiaient déjà d'une structure universitaire l'ont conservée.

D'autre part, la durée de la formation des enseignants du primaire sur trois ans a fait l'objet d'une décision politique rapide pour répondre à des contraintes budgétaires; cette formation d'un enseignement généraliste, de l'avis de toutes les personnes auditionnées, n'est plus possible en l'espace de trois ans. C'est pour cela que la CDIP a mis en place plusieurs modèles... Je vous prie de lire le rapport, parce qu'il s'agit d'un sujet assez complexe que je n'ai pas le temps de développer.

Enfin, l'exemple valaisan - qui est souvent cité - d'une formation généraliste en trois ans est probablement rendu possible par la typicité de ce canton, qui est peu urbain, et surtout par le fait que les élèves passent leur maturité à l'âge de 20 ans.

Par ailleurs, les auditions des associations professionnelles ont mis en évidence que ces dernières, à part ARLE, étaient globalement satisfaites de ce projet de loi. Et les auditions de l'université et du DIP ont réussi à convaincre l'ensemble de la majorité de la commission - qui, au départ, était réticente sur certains points - qu'il valait mieux conserver un institut universitaire de formation, c'est-à-dire rénover une structure déjà existante plutôt que de partir de novo en créant une nouvelle structure.

Nous avons d'autant plus accepté cet institut universitaire qu'il sera interfacultaire et régi par une convention entre l'employeur et l'université. Cette convention va en effet imposer une formation professionnalisante, laquelle permet d'éviter le côté théorique qui était reproché auparavant à la FAPSE.

Concernant la durée de la formation des enseignants du primaire en quatre ans, celle-ci permettra de conserver son aspect généraliste, qui assure une meilleure mobilité des enseignants, lesquels peuvent passer du degré enfantin au degré primaire. Elle permettra également de régler le problème de l'enseignement des langues, qui a été prégnant dans toutes les séances de la commission.

En fait, la commission a accepté ces deux concepts grâce aux amendements du Conseil d'Etat, qui ont permis de lever nos oppositions. Je les rappelle brièvement. Un, le relèvement des exigences à l'entrée dans la formation, en particulier pour l'enseignement des langues. Deux, la validation des acquis qui permettra de raccourcir, dans certains cas, la formation à trois ans. Et, surtout, la levée de la discrimination envers les étudiants des autres cantons confédérés qui ont un simple bachelor HEP, avec la suppression de ce certificat complémentaire et de cette quatrième année.

Nous avons relativement peu parlé du secondaire pour deux raisons principales. La première, c'est que la plupart des associations professionnelles étaient contentes du projet de loi concernant la formation des enseignants du secondaire. La deuxième, c'est que l'IFMES, qui est actuellement rattaché au DIP, est une structure qui n'est plus reconnue par la CDIP. Il est donc urgent d'adopter ce projet de loi pour ce motif.

Néanmoins, les partis de l'Entente...

Le président. Je vous signale, Monsieur le rapporteur, qu'il vous reste deux minutes !

M. Patrick Saudan. D'accord ! ...continueront à observer une vigilance stricte à l'avenir quant à la formation du secondaire.

Je m'arrête pour l'instant. J'interviendrai ultérieurement sur le fond de l'amendement du MCG.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Monsieur Rappaz, vous n'avez pas demandé la parole, mais je suppose que vous voulez quand même intervenir !

M. Henry Rappaz (MCG), rapporteur de minorité. Oui, merci, Monsieur le président ! Je commencerai par un bref historique pour justifier ma position de rapporteur de minorité...

Le 27 août 2008 exactement, les députés radicaux et UDC déposaient le projet de loi 10316. Le 3 février 2009, M. Charles Beer annonçait le dépôt du projet de loi 10432. Ces deux projets de lois ont fait l'objet de délibérations de la commission depuis le jeudi 26 février 2009 jusqu'à la dernière séance de commission de la précédente législature, le jeudi 29 octobre. Lors de cette séance de commission, je me suis opposé à tous les amendements proposés, ce qui m'a valu de rédiger le présent rapport.

Toutes les auditions se sont, jusqu'à présent, normalement succédé, sans parvenir à mettre en évidence un projet de loi plus que l'autre jusqu'au 15 octobre, date de l'avant-dernière séance de commission de l'enseignement supérieur, où les choses se sont brusquement précipitées. C'est alors que survint le coup de tonnerre de l'annonce médiatisée dans la «Tribune de Genève» et sur Léman Bleu, le 16 octobre 2009, selon laquelle le projet de loi 10316 sur la HEP était purement et simplement retiré au terme d'un accord historique intervenu, comme par enchantement, entre M. Beer et le député Follonier, auteur du projet de loi 10316 sur la HEP.

Cette déclaration intempestive inquiéta beaucoup le MCG, qui s'interrogea aussitôt sur les raisons et les conditions de ce retrait... Pourquoi, en effet, les choses se précipitaient-elles si brusquement, alors que la commission venait à peine d'aborder le deuxième débat sur le projet 10432, suite à la décision de la commission de l'enseignement supérieur ?

Je fus d'autant plus surpris par cette annonce que le vote d'entrée en matière du projet de loi 10316 n'a jamais été soumis à la commission et que les commissaires demandaient encore des auditions complémentaires. Ce scoop jetait, à mon sens, le discrédit sur le travail discret et sérieux qui avait été effectué jusqu'alors en commission. Par son empressement à conclure à tout prix avant la fin de la législature, le conseiller d'Etat laissait planer le doute sur la justesse des solutions choisies à la hâte. Trop de questions restaient en suspens. Elles portaient sur la formation des enseignants du cycle d'orientation et du postobligatoire, sur le contenu de la formation complémentaire des enseignants du primaire et sur leur niveau de formation en langues selon les nouvelles normes du portfolio européen.

Je me suis trouvé dans la situation inconfortable où, pour être au courant du sort que les députés réservaient à la formation des enseignants genevois, il valait mieux avoir lu la «Tribune de Genève» ou suivi les débats sur Léman Bleu qu'être membre de ma commission !

Le MCG a évidemment vigoureusement protesté pour dénoncer ces fuites et scoops sciemment orchestrés à des fins électoralistes, qui nuisent à la sérénité des débats et travestissent la réalité parlementaire. (L'orateur fait une pause.) J'ai bientôt terminé !

Alors, sur le fond, le MCG souhaiterait que Genève s'aligne sur tous les autres cantons en ce qui concerne la formation des enseignants du primaire, à savoir que celle-ci soit effectuée dans une HEP. Bien que tout laisse penser que cette solution ne sera pas retenue, permettez-moi de la développer et de vous relater le constat issu de la comparaison entre une HEP et un IUFE, où il est question d'harmonisation scolaire. Tous les cantons suisses ont opté pour une formation des enseignants en HEP, soit trois ans d'études, qui aboutissent à un bachelor. Il existe la structure BEJUNEFRIVAL - Berne, Jura, Neuchâtel, Fribourg et Valais - et il aurait été logique que Genève la rejoigne.

Le projet de loi que nous nous apprêtons à voter présente en l'état un défaut majeur auquel il convient de remédier, afin de ne pas instaurer une loi arbitraire. Je comprends toujours mal aujourd'hui comment, lors de sa dernière séance du 29 octobre, la commission a soudainement accepté les amendements proposés par le département, ceux-ci confirmant clairement cette injustice. Les amendements portaient sur deux points qui restaient en suspens: la longueur des études et le certificat complémentaire conditionnant la nomination.

Après avoir demandé un avis de droit pour savoir si ce certificat complémentaire peut être imposé à tous les détenteurs d'un bachelor d'une HEP romande comme une condition pour être nommés dans l'enseignement primaire, sans contradiction avec le droit supérieur, M. Charles Beer change subitement de point de vue par rapport au projet initial, puisqu'il pense que la formation des autres cantons doit être pleinement et totalement reconnue par le canton de Genève, même pour la nomination des enseignants, en ne les astreignant pas à une formation supplémentaire. Il renonce ainsi à l'idée de subordonner le diplôme obtenu dans un autre canton à une formation complémentaire, même si l'avis de droit demandé estime qu'il est possible de le faire. L'avis de droit demandé par la commission est annoncé par M. Charles Beer comme attestant qu'un certificat complémentaire peut être imposé à tous les détenteurs d'un bachelor obtenu en HEP, sans contradiction avec le droit supérieur.

C'est donc dans un esprit constructif que nous vous proposons un amendement pour conclure, et cela, afin de voter une loi équitable et pour encourager une formation sérieuse et performante à Genève.

M. Michel Forni (PDC). La loi, telle qu'elle vous est remarquablement présentée ce soir par le rapport de majorité, cible - il faut le savoir - environ cent mille scolarisés. Et, comme cela a été indiqué, les travaux se sont étalés sur treize séances de commission.

Le but est d'être en mesure de renouveler notre staff d'enseignants, et cela, dans les quinze ans qui viennent. Les objectifs étaient relativement ambitieux et il fallait y parvenir en ayant une discussion qui a eu lieu entre la gauche et la droite. Tous les commissaires ont participé de manière constructive, à part un seul - le rapporteur de minorité - et je reviendrai sur ce point tout à l'heure. Nous avons tenté d'harmoniser les principes de formation en restant conformes, comme cela a été indiqué, aux nécessités de la CDIP, mais aussi à deux principes: l'un, dynamique, pour permettre la mobilité des enseignants et, l'autre, pour qu'un effort soit fait en particulier dans les langues.

Cette compatibilité intercantonale était nécessaire - cela a été souligné ce soir - et, d'autre part, nous disposions d'un outil à Genève: l'institut universitaire, donc la faculté, qui avait déjà fait ses preuves, la FAPSE. Il fallait réunir ces différentes tendances pour avoir un outil efficace qui soit compatible, comme je viens de le dire, avec l'outil fédéral. Eh bien, cela est réalisé dans ces deux éléments, et vise donc une formation d'environ quatre ans, la quatrième année étant, pour les enseignants du primaire, renforcée par le certificat évoqué par le rapporteur de minorité.

S'il y a des problèmes, il y a aussi des solutions, comme la validation des acquis - je crois que c'est très important et cela a également été relevé - et les stages linguistiques.

Ce projet est le résultat de nos travaux de commission, le résultat d'un consensus politique. Cela a permis un certain partenariat entre l'employeur - le DIP - et ses futurs employés. Comme cela a aussi été indiqué, des contacts privilégiés se sont noués avec les associations professionnelles. C'est la raison pour laquelle le projet qui nous est soumis est un bon projet: je propose donc d'y donner suite en l'acceptant.

Je voudrais quand même mettre un bémol au rapport de minorité... Stigmatiser ou claironner, ce n'est pas la même chose: à chacun son vocabulaire ! Essayer de piéger avec des idées simples et produire une logique qui se développe sous l'action de ses contradictions ne révèlent qu'une forme de morale dont nous laissons la responsabilité à son auteur ! En l'occurrence, il s'agit d'une symphonie pour sourds-muets, et elle ne nous intéresse pas du tout ! C'est la raison pour laquelle je vous propose de soutenir le rapport de majorité avec beaucoup de vigueur.

M. Gabriel Barrillier (R). J'aimerais tout d'abord féliciter le rapporteur de majorité pour son excellent rapport, qui synthétise bien un dossier pourtant compliqué.

Ensuite, j'aimerais dire au rapporteur de minorité - Monsieur le président, peut-être pourrez-vous lui transmettre ? - que la gestation d'un compromis sur un dossier aussi important est un long cheminement.

Lors de la dernière séance, il a dit qu'il n'était pas spécialiste en la matière... Je voudrais le rassurer en lui disant qu'il n'est pas le seul, que d'autres députés de la commission sont dans le même cas et que c'est peut-être mieux que les commissaires ne soient pas tous des spécialistes et des pédagogues. Mais cette particularité ne le privait pas - ne nous prive pas - dans une commission qui a travaillé durant treize séances sur ce dossier - cela a été rappelé - de participer à la discussion, de faire des propositions, de poser des questions: je pense que c'est un cheminement que tout député de milice doit accepter et comprendre.

J'en viens au fond. Les radicaux, qui avaient déposé un projet de loi avec l'UDC sur la problématique de la formation des enseignants, ont participé activement aux travaux et se sont montrés très concernés par cette proposition. A ce propos, je rappelle que notre parti est très attaché à une école exigeante, mais pas élitaire. Et pour y arriver, il faut des enseignants motivés, qui ont des connaissances et des facultés qui leur permettent d'enseigner, de transmettre des connaissances, de transmettre des comportements. Vous savez très bien qu'en chaque Suisse, chaque Suissesse, sommeille un Pestalozzi... C'est peut-être un truisme de le dire, mais c'est vrai que chacun se considère comme un spécialiste de la pédagogie...

Alors, HEP ou uni ? Trois ans de formation ou quatre ans ? Faut-il un institut universitaire ? Toutes ces questions ont été examinées en profondeur. Pour ce qui est de savoir s'il fallait une formation de trois ans dans une Haute école pédagogique ou s'il fallait laisser à l'université - c'est une tradition genevoise - le soin de former les enseignants, je dois dire que ma position n'était pas du tout tranchée au départ. Toutefois, au fil des auditions, nous avons pu obtenir l'assurance - de la part du département également - que, malgré le fait que cet institut universitaire serait arrimé à l'université, il aurait une très grande autonomie et que sa gouvernance dépendrait directement du rectorat - ça c'est pour le cadre de l'enseignement de ces futurs enseignants. Ensuite, nous avons pensé que le côté pratique de la formation était très important: nous ne voulions pas d'une tertiarisation de la formation des enseignants. Et en auditionnant plusieurs responsables de HEP de Suisse, nous avons été convaincus que le temps consacré à la pratique et au terrain était aussi important à Genève qu'ailleurs.

Puis s'est posée la question de l'harmonisation, qui est tout à fait primordiale... Sur ce point également, nous pouvons garantir que les étudiants et les enseignants genevois ne seront pas prétérités en allant en Suisse.

Il y avait en outre un aspect non négligeable à prendre en considération: le coût de cette formation. Créer une HEP - Haute école pédagogique - de toutes pièces coûte en effet extrêmement cher, environ 30 000 F par place - nous avons pu le vérifier - alors qu'en poursuivant la collaboration avec l'institut et l'université, tout en gardant une autonomie certaine, il fallait compter un tiers en moins. Cet élément est donc extrêmement important, et nous devons en tenir compte.

Enfin, je tiens à dire que les performances de l'enseignement, qui dépendent de la qualité de la formation de nos maîtres et maîtresses, sont directement liées aux exigences demandées à l'entrée dans ces formations et également au temps consacré à l'enseignement, c'est-à-dire aux horaires. Et on sait bien qu'à Genève, depuis de nombreuses années, notre école primaire enseigne sur une durée inférieure à ce qu'elle est dans la plupart des cantons, notamment en Suisse romande. Il n'est pas possible qu'un enseignement soit aussi bon et exigeant qu'ailleurs si la durée de l'enseignement est plus brève. Tout ceci est en cohérence.

Je tiens à dire ce qui suit. Nous avons vécu la réorganisation du cycle d'orientation - rappelez-vous, chers collègues: ce n'est pas vieux ! Nous avions discuté et examiné des projets pendant de nombreux mois en commission de l'enseignement et, finalement, nous nous sommes mis d'accord sur un compromis, compromis qui a été accepté par le peuple. Nous nous sommes alors demandé ce qui allait se passer... Je peux vous assurer - je peux en témoigner - que cette réorganisation du cycle d'orientation est entrée dans sa réalisation - je fais un parallèle - dès le résultat positif de la votation, et même avant !

Le président. Il vous reste une minute, Monsieur le député !

M. Gabriel Barrillier. Je termine, Monsieur le président ! Et on mesure la volonté d'appliquer ce que le parlement - et dans certains cas, le peuple - a décidé. Je suis fermement convaincu que si nous nous mettons d'accord sur ce projet de loi, la volonté de l'appliquer concrètement se manifestera rapidement.

Je terminerai, Monsieur le président, en indiquant que notre parti n'a pas retiré son projet de loi... Il attendra le délai référendaire pour se décider. Mais j'ai la conviction que ce projet représente un bon compromis, qui va permettre d'augmenter les exigences de la formation de notre jeunesse tout en maintenant une ouverture pour toutes et tous. C'est la raison pour laquelle notre groupe votera l'entrée en matière de ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le député, vous avez parlé pile sept minutes ! Madame Christine Serdaly Morgan, vous avez la parole.

Mme Christine Serdaly Morgan (S). La création de l'Institut universitaire de formation des enseignants - IUFE - est un projet important à plusieurs titres. D'abord, il consacre un engagement presque centenaire de Genève et de son université dans la question de l'éducation. Il le consacre, mais en lui donnant un nouveau prolongement: il le valorise et le renouvelle.

La commission de l'enseignement supérieur ainsi que le DIP et l'université ont ainsi marqué leur désir de continuer à faire de Genève un pôle d'excellence en matière de formation. Car si Genève a été pionnière en matière d'éducation, elle l'est aussi pour la formation des adultes. La FAPSE a une renommée au moins nationale, mais elle peut aussi se targuer d'attirer les grandes pointures d'aujourd'hui dans le domaine de la formation. Il est donc réjouissant d'avoir osé la continuité dans une forme de redéploiement.

Dans ce mouvement, la seconde bonne nouvelle est la mise sur pied d'un institut qui concerne l'ensemble de la scolarité, du primaire au secondaire II. C'est l'assurance de l'élaboration d'une culture commune forte, qui ne peut que renforcer la cohérence entre les cycles de formation, parce que tous les acteurs ont des valeurs et un langage communs et se comprennent. C'est aussi un élément de base fondateur de la mobilité entre les cycles de formation, souhaitée particulièrement entre le secondaire I et le secondaire II. De manière générale, avec la mobilité - dans un sens ou un autre, d'ailleurs - ce sont des perspectives de carrière qui s'ouvrent, constituant ainsi un facteur d'attraction supplémentaire pour la profession.

C'est enfin valoriser la formation des enseignants du secondaire en leur offrant désormais un titre intégré dans le système national et international plutôt qu'une formation que l'on aurait presque pu qualifier de «branche».

La troisième bonne nouvelle est la collaboration mise en place entre l'université et l'employeur - soit le DIP - dans la convention d'objectifs, ainsi que l'existence d'un groupe de coordination et, dans ce contexte, l'engagement du DIP à offrir des conditions d'encadrement qui soient satisfaisantes pour les enseignants appelés à encadrer les personnes en formation au sein de leur classe.

Ces bonnes nouvelles ne doivent toutefois pas faire oublier un certain nombre de choses auxquelles le groupe socialiste sera attentif. Nous pensons à la nécessaire association des directions et des enseignants concernés, qu'ils soient en formation ou formateurs d'enseignants, afin que le dispositif de formation et ses contenus soient adaptés à la réalité des besoins et des conditions de travail sur le terrain.

Dans ce sens, les socialistes seront attentifs au respect des engagements du DIP à créer des conditions adéquates d'encadrement des personnes en formation, sans que les enseignants formateurs ne s'épuisent à la tâche ou délaissent soit leurs élèves, soit ceux qu'ils doivent encadrer. Nous serons également attentifs à l'articulation entre formation et travail, qui conduit un certain nombre de personnes actuellement en formation à l'épuisement.

Le processus de changement ne doit pas non plus décrédibiliser ceux qui se sont formés jusque-là dans un autre système. Ainsi, une communication claire est nécessaire, après une longue période de transition, quant à la reconnaissance des titres et à la mobilité intercantonale.

Les socialistes saluent le travail effectué, qui a vu chacun évoluer dans ses positions et ses attentes et oeuvrer pour un projet partagé. Ils vous invitent ainsi à soutenir le projet de loi et engagent le DIP, en tant qu'employeur, à être sensible aux attentes exprimées par le groupe. (Applaudissements.)

M. Eric Bertinat (UDC). Nous avions soutenu la proposition radicale pour la création d'une HEP capable de former des enseignants en trois ans. A constater la faiblesse de l'enseignement genevois, nous espérions également une rupture salutaire avec l'actuelle FAPSE.

Les travaux de la commission de l'enseignement supérieur nous ont amenés à revoir notre position, prenant en considération les aspects financiers comme les aspects historiques propres à l'enseignement genevois. D'autre part, il est évident que nous vidions la section des sciences de l'éducation pour remplir notre toute nouvelle HEP. Nous avons donc soutenu la proposition de M. Beer assurant la formation des enseignants à l'uni par un institut plurifacultaire. Nous avons également compris que le problème de l'enseignement des langues étrangères à l'école primaire nécessitera une durée de formation plus longue, débordant des 180 crédits attribués au bachelor.

Ce que nous n'avons pas compris, c'est pourquoi les autres cantons y parviennent en trois ans, si ce n'est en admettant que les enseignants sont moins bien formés ou que la formation genevoise est moins performante. En acceptant l'engagement d'enseignants confédérés, nous croyons comprendre que c'est la première proposition qu'il faut retenir.

Dans le projet de loi qui nous est soumis, des efforts notables sont prévus, comme le renforcement des exigences d'entrée. Par un esprit de consensus, nous avons accepté la proposition du DIP, proposition que nous trouvons tout de même boiteuse, car elle permet d'accepter des enseignants provenant de notre pays - donc formés en trois ans - tout en exigeant des futurs enseignants genevois quatre ans d'études.

Nous voterons l'entrée en matière, mais nous réservons notre vote final selon les propositions qui seront présentées lors du deuxième débat.

Mme Catherine Baud (Ve). Ce projet de loi n'a pas seulement été étudié en quelques semaines comme semble le dire M. Rappaz. Il est issu d'une longue réflexion qui date d'environ plus de dix ans. En fait, cela nous a permis d'étudier ce projet de loi dans les détails, mais l'esprit de cette évolution est beaucoup plus ancien.

Le projet de loi a d'abord comme raison d'être une nécessaire harmonisation des diplômes, tant au niveau suisse qu'au niveau international; une refonte de l'actuelle FAPSE, puisque cette faculté ne forme que les enseignants du primaire, les enseignants du secondaire étant formés par l'IFMES - on cherche donc à uniformiser leur formation; et, enfin, une adaptation aux principes et aux structures mis en place par la nouvelle loi sur l'université.

Comme le rapport de majorité l'a fort bien souligné, nous avons travaillé dans un esprit constructif, avec une attitude positive, même si les discussions ont souvent été vives entre les différents commissaires.

L'essentiel des travaux a effectivement été effectué pendant les auditions, de manière à établir au préalable une vision commune de cette formation, et cela s'est fait petit à petit par l'élimination des différentes possibilités au fil des auditions. Plusieurs questions se sont posées: nous les avons résolues les unes après les autres.

D'abord, fallait-il se tourner vers une HEP ou vers l'université ? La tradition universitaire de Genève nous a fait retenir une formation de type universitaire. La manière dont les choses se sont passées a été évoquée tout à l'heure, et je ne vais donc pas rentrer dans les détails, mais il est vrai que l'importance universitaire de la formation des maîtres à Genève est exceptionnelle, et elle permet en plus la recherche. Il était donc extrêmement dommage de se priver de cette grande richesse.

Ensuite, il a fallu se mettre d'accord sur le découpage des cycles pour les élèves... Plusieurs possibilités ont été étudiées. D'abord, avoir une formation pour l'école enfantine, l'école primaire, le cycle, puis le postobligatoire. Mais cela n'était pas compatible avec les nouvelles normes HarmoS. Il pouvait y avoir l'école obligatoire d'un côté, le postobligatoire de l'autre... Il pouvait y avoir le primaire, le cycle, puis le postobligatoire...

Finalement, un système beaucoup plus simple a été retenu: le primaire d'un côté et, de l'autre, le secondaire I et II - c'est-à-dire à la fois le cycle et le postobligatoire - de manière à favoriser la mobilité des enseignants au niveau secondaire. En fait, nous avons d'un côté une formation de généraliste au niveau primaire et, de l'autre, une formation de spécialiste au niveau secondaire.

Puis, il a fallu se mettre d'accord sur la durée des études... Cela n'a pas été simple non plus ! En effet, les discussions ont été extrêmement nourries et le débat a été tout à fait vif. En réalité - cela a déjà été indiqué - la formation des maîtres du primaire dure actuellement quatre ans... Mais, maintenant, il faut s'adapter au système de Bologne: c'est soit trois ans, soit cinq ans. Nous avons donc organisé le système avec un bachelor de trois ans, plus une année complémentaire pour les Genevois. C'est cette année complémentaire qui peut poser problème: nous en rediscuterons vraisemblablement tout à l'heure, puisqu'il semble qu'un amendement a été déposé à ce propos. Donc, une fois titulaire de son diplôme, le nouvel enseignant va pouvoir entrer dans une période probatoire afin d'être nommé.

Au niveau secondaire, finalement, il y a eu relativement peu de problèmes pour reconnaître que le master était le niveau de base pour la formation des enseignants. En fait, l'enseignant doit être titulaire d'un master spécialisé dans son domaine et, ensuite, d'un «master of advanced studies» qui va s'organiser par tuilage, c'est-à-dire que les deux années vont pouvoir s'intégrer l'une à l'autre, ce qui permettra à l'étudiant-enseignant d'acquérir une certaine pratique professionnelle avant d'entrer en période probatoire.

Donc, d'une manière générale, en résumé, on peut relever deux principaux avantages à ce projet de loi: d'abord - et c'est un point très important - un lieu universitaire unique de formation, à la fois pour la formation initiale et pour la formation continue de tous les enseignants, des premiers degrés primaires jusqu'à la fin du postobligatoire. Et, enfin, c'est un élément très important également, un lien entre l'université - formation théorique - et le DIP - stages pratiques - grâce à cette convention d'objectifs qui va permettre d'articuler la théorie et la pratique. Ce projet de loi est donc tout à fait cohérent, et les Verts vous recommandent d'entrer en matière.

M. Pierre Weiss (L). L'issue des travaux de commission débouche parfois sur un résultat différent du point de départ: les idéaux des uns ou des autres ne correspondent pas forcément aux solutions qui sont trouvées et votées. Du reste, on peut quelquefois se demander si l'idéal du départ était pertinent et s'il ne découlait pas d'une vision un peu simplifiée de la réalité... Et, dans ce sens, les auditions que nous avons effectuées nous ont ouvert l'esprit. C'est du moins le témoignage personnel que je voulais donner...

Du dialogue sont nées des propositions; du dialogue est né un texte de loi, que les libéraux soutiennent aujourd'hui, malgré un certain nombre d'imperfections. J'évoquais des nouvelles réalités... Ces nouvelles réalités ont amené des nouvelles questions, et aussi de nouveaux doutes.

Par exemple, le fait qu'il n'est pas possible d'avoir une formation de généraliste en trois ans, alors que d'autres cantons, avec des HEP, y arrivent... Toutefois, les directeurs de ces HEP ont reconnu qu'il était très difficile d'assurer une formation de généraliste de qualité dans ce laps de temps. A Genève, la formation pour les enseignants du primaire durait jusqu'à présent quatre ans.

Une solution aurait été possible: consacrer trois ans uniquement à la formation de certaines matières ou à la formation destinée à une partie de l'école primaire, y compris l'école enfantine - soit les quatre premières années du primaire - les quatre années suivantes du primaire étant enseignées en une année de formation supplémentaire - ou deux - via un master.

Une autre réalité nous est apparue: l'importance de la formation pratique à Genève. D'aucuns pouvaient avoir l'impression que la partie théorique était plus développée à Genève que dans d'autres HEP romandes. Eh bien, ce n'est pas le cas: c'est du moins ce que montrent les statistiques qui nous ont été présentées en matière de répartition des temps.

Nous avons donc recherché des compromis et nous avons aussi fait des propositions qui ont été en partie acceptées. Par exemple, les libéraux ont demandé que les exigences à l'entrée en formation soient plus élevées, parce que si celles-ci sont trop basses, la revalorisation du métier d'enseignant que nous souhaitons reste un vain mot. Il faut en effet exiger davantage pour attirer les meilleurs. C'est ainsi que les enseignants auront une image d'eux-mêmes positive et qu'ils projetteront cette image positive du métier d'enseignant sur la société.

Autre demande que nous avons faite: améliorer la formation en langues, notamment en allemand et en anglais, parce que ces matières seront davantage enseignées dans le primaire. Et il faut reconnaître qu'actuellement nombre d'enseignants manient avec une aisance variable pour certains, et parfois réduite pour d'autres, la langue de Goethe ou celle de Shakespeare...

Il a aussi fallu entrer en matière sur une proposition radicale consistant à rendre cette loi helvético-compatible... Cela impliquait d'admettre que ce qui est fait en trois ans ailleurs peut donner le droit d'être engagé et nommé à Genève. En d'autres termes, on ne peut pas se murer derrière la Versoix et empêcher ceux qui ont acquis une formation HEP dans d'autres cantons de venir enseigner à Genève ! Ceux qui veulent une formation en quatre ans à Genève peuvent le faire, mais ceux qui ont effectué une formation en trois ans ailleurs doivent conserver la possibilité d'enseigner à Genève. Ce qui est, au passage, une façon de reconnaître que la qualité de la formation n'est pas l'apanage de Genève et que certains se gargarisent sans doute un peu trop facilement de l'omniscience, notamment en matière pédagogique, qui régnerait dans ce canton.

Je dirai aussi que cette solution met quand même à mal le corporatisme local consistant à ne rien changer, y compris à ne supprimer aucun enseignement du passé et à continuer à marcher dans la même voie, même si elle n'a pas toujours été satisfaisante jusqu'à présent.

Les questions sont ouvertes: je n'en évoquerai que deux. D'abord, la formation au niveau secondaire. Nous avons continué à garder une formation unifiée pour le cycle d'orientation et le collège... D'autres pourraient avoir - j'en fais partie - une vision différente consistant à distinguer, comme c'est le cas dans la majorité des cantons suisses, la formation des enseignants du secondaire inférieur et du secondaire supérieur. D'ailleurs, il est vrai que les enseignants qui enseignent au collège ne veulent jamais enseigner au cycle ou rarement.

Autre question ouverte: le fonctionnement de l'IUFE - l'Institut universitaire de formation des enseignants... Ce sera un peu «la preuve du pudding»: il faudra que ce nouvel IUFE prouve par les faits qu'il est meilleur que le système précédent. Cela obligera - au sens de «noblesse oblige» - ceux qui seront à sa tête, qui en auront la responsabilité, à se donner les moyens de réussir et à prouver que la confiance placée en eux aujourd'hui n'est pas vaine.

Je conclurai, Monsieur le président, en vous disant que je suis heureux d'avoir entendu mon collègue Barrillier reconnaître ce dont, dès le départ, j'étais convaincu, à savoir que la solution de la HEP aurait été une solution plus chère, trop chère, parce qu'elle aurait privé Genève d'une aide fédérale.

Par ailleurs, je tiens à relever - c'est aussi une certitude - à quel point ce rapport est de qualité... Le rapport de majorité, j'entends ! Mais, en fait, il n'y a qu'un seul rapport ! Et je félicite Patrick Saudan. Enfin, ultime certitude: ce rapport prouve l'esprit de compromis qui nous a animés durant les travaux de commission, et nous annonçons que nous soutiendrons le projet de loi qui en résulte.

M. Jean-François Girardet (MCG). Monsieur Weiss, il y a deux rapports: un rapport de majorité et un rapport de minorité ! Le rapport de minorité a été sollicité par le seul commissaire représentant le MCG dans cette commission lors de la législature précédente, qui ne s'est en effet jamais exprimé, parce que toutes les séances de la commission de l'enseignement supérieur qui ont été consacrées à cet objet ont été dédiées aux auditions. Et puis, lors des deux dernières séances, les choses se sont précipitées en raison de la fin de législature, et il a fallu prendre - j'ai lu tous les PV à ce sujet - des décisions à la hâte. Et il faut savoir que l'entrée en matière du projet de loi initial déposé par le parti radical et l'UDC n'a même pas été abordée ni votée ! Cela veut dire que cet objet sur la HEP n'a pas vraiment été discuté, et c'est regrettable ! En effet, quand il n'y a qu'un seul représentant en commission - et l'UDC va en faire l'expérience - les choses sont difficiles, surtout lorsqu'il y a des tractations qui se font en coulisses et que les choses ne sont pas rendues visibles. Bien sûr, on peut dire qu'il ne s'est pas exprimé en commission, mais lorsque les amendements ont été présentés, il a fallu en prendre connaissance et réagir rapidement, avant le vote, pour savoir s'ils étaient compatibles avec l'option prise au départ.

Le MCG soutenait le projet radical-UDC, parce qu'il était HarmoS-compatible... En effet, la politique d'HarmoS était tout à fait respectée avec une formation en HEP et avec un bachelor - reconnu par les accords de Bologne - octroyé aux futurs enseignants à l'issue de trois ans d'études. La formation en HEP, prévue dans ce projet, privilégiait plutôt la formation de généraliste, alors qu'une formation universitaire, par définition, était beaucoup plus théorique. La Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation était par ailleurs mise à l'écart, ce qui était bien la volonté du projet radical-UDC sur cette formation en Haute école pédagogique.

La commission a choisi l'IUFE, et nous reconnaissons ce choix démocratique d'une formation universitaire, option qui avait été proposée initialement par le département.

J'ai quand même relevé quelques erreurs dans ce rapport... Je demanderai donc des renseignements au chef du département à ce sujet. Par exemple, le rapporteur dit que la formation à Genève se fera sur quatre ans... Or, d'après ce que j'ai vu, il était prévu à l'article 134 concernant l'engagement en primaire qu'un enseignant peut être engagé à Genève qu'il ait une formation romande en HEP ou une formation genevoise, du moment qu'il est titulaire d'un bachelor. Et il faut qu'il ait suivi une formation complémentaire pour pouvoir être nommé dans une école genevoise: c'est le certificat complémentaire qui lui permet d'être nommé !

Au-delà de tout ce qui a été indiqué par Mme Baud, du parti des Verts, ou par les autres préopinants, nous relevons qu'il y aura une amélioration sensible de la qualité de la formation des enseignants, que ce soit du postobligatoire ou du primaire... Mais cette formation complémentaire pourrait être l'occasion, justement, d'y inclure davantage de pratique. Et recevoir cette formation complémentaire devrait être un critère de nomination.

Or, que se passe-t-il ? Les enseignants genevois et les enseignants qui seront formés à Genève sont l'objet de discrimination ! En effet, en acceptant d'engager à Genève des enseignants vaudois, valaisans, jurassiens et de les nommer sans exiger une formation complémentaire, on discrimine véritablement les enseignants genevois et les enseignants qui sont formés à Genève !

Je pense donc qu'il est important de revenir sur ce point. C'est pour cela que nous reprendrons la parole au moment de la discussion sur l'amendement concernant l'article 122, alinéa 4. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Saudan, à qui il reste une minute et vingt secondes, je crois...

M. Patrick Saudan (R), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président ! Je vais essayer d'être très bref...

A l'adresse de M. Bertinat, je dirai d'abord qu'à mon avis, c'est une erreur d'imputer la cause des résultats médiocres de l'école genevoise à une formation déficitaire des enseignants genevois... La cause a été clairement identifiée par le DIP: c'est dû au manque d'heures d'enseignement dispensées à nos élèves à l'école primaire ! Le DIP va y remédier ! Et, du reste, celui-ci nous a rendus attentifs au fait qu'il serait paradoxal de diminuer la formation des enseignants au moment où le nombre d'heures d'enseignement dispensées aux élèves va augmenter !

Ensuite, je suis désolé que le rapporteur de minorité ait appris dans la «Tribune de Genève» la conclusion des travaux de la commission... S'il avait été plus attentif dès le départ, il aurait su qu'il n'a jamais été question d'entrer en matière sur le PL 10316 - le projet de loi radical-UDC ! Il était prévu de traiter le projet de loi 10432 en étudiant en parallèle les autres textes.

Enfin, Monsieur Girardet, je tiens simplement à signaler ceci: c'est vrai, HarmoS et le règlement de la CDIP - le règlement sur l'Accord intercantonal sur la reconnaissance des diplômes de fin d'études - imposent des exigences minimales pour les diplômes. Mais je ne suis pas sûr, contrairement à ce que prétend l'avis de droit, que la CDIP accepterait qu'un certificat complémentaire soit exigé des détenteurs de bachelor d'autres cantons pour qu'ils puissent être nommés à Genève ! La nomination des enseignants dépend davantage de la période probatoire, qui est de deux ans à Genève.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite commencer mon propos en rendant hommage à la commission pour son travail important sur un projet de loi relativement difficile d'accès.

En effet, la question de la formation des enseignants, au-delà de la passion que ce thème déchaîne, engendre très vite, régulièrement, une certaine complexité du point de vue des choix à opérer, même lorsqu'il s'agit de modifier la loi sur l'instruction publique. Alors permettez-moi de rendre hommage à la commission, dont les travaux ont toujours été animés par sa volonté constante de rechercher un consensus, un intérêt général conforme à l'intérêt de l'école publique genevoise, qui a effectivement besoin d'une formation des enseignants consensuelle, reconnue et solide.

Maintenant, j'aimerais remercier tout particulièrement le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport, rédigé en très peu de temps. Finalement, il a prolongé son grand investissement en tant que président de la commission de l'enseignement supérieur. Je l'en remercie vivement et chaleureusement, parce que, je le répète, le thème est relativement difficile, surtout lorsqu'il faut rendre un rapport qui doit traduire des préoccupations politiques en même temps qu'il met en évidence des questions complexes de choix de structure, ce qui ne ramène pas toujours au projet de loi lui-même, mais à des conséquences dans un certain nombre de conventions, et je vais étayer mon propos.

Mesdames et Messieurs les députés, il y a un grand problème au départ - il faut bien le dire - l'obligation de revoir la formation des enseignants du primaire, notamment eu égard à l'introduction de la Déclaration de Bologne ayant pour effet de faire disparaître la licence, avec un choix relativement important entre le niveau bachelor et le niveau master, sachant qu'il fallait quatre ans pour obtenir une licence. Le choix devait se porter sur 180 crédits pour le bachelor, auxquels s'ajoutaient 90 à 120 crédits pour le master... Au départ, les points de vue étaient très largement différents: certains voulaient très clairement limiter la formation à 180 crédits - pour le bachelor - mais l'université et le Conseil d'Etat voulaient demander un master, c'est-à-dire 90 à 120 crédits de plus. En réalité, nous avons choisi la voie médiane, puisque la formation ne sera ni l'un ni l'autre: il faudra 180 crédits pour le bachelor et 60 crédits supplémentaires pour la formation d'enseignant du primaire. Cela veut dire que celles et ceux qui voudront avoir le master devront obtenir 30 ou 60 crédits de plus.

Maintenant, il faut également le dire - et vous avez raison de le relever - toujours du point de vue de la durée, dans d'autres cantons la formation se fait en 180 crédits... Eh bien, disons-le tout de suite, ces 180 crédits sont déjà d'actualité aujourd'hui ! Vous exprimez des craintes, Messieurs les députés, en raison de l'écart entre Genève et le reste de la Suisse... Mais c'est une situation que nous connaissons déjà, et il n'y a pas d'exode de Genevoises et de Genevois vers les formations HEP de Vaud ou d'autres cantons ! Au contraire ! Il y a beaucoup de candidats et relativement peu d'élus pour, au terme de la première année, entrer dans le véritable processus de formation que la licence décline. Il s'agit donc, pour les enseignants du primaire, d'une actualisation de la licence - c'est la mise en oeuvre de la Déclaration de Bologne: un bachelor, soit 180 crédits, et 60 crédits supplémentaires. Et l'écart que nous avons avec les autres cantons reste le même, avec, évidemment, le respect - qui est assuré aujourd'hui - des dispositions de la CDIP en matière de reconnaissance de formation des enseignants.

Mesdames et Messieurs les députés, un autre problème nous a contraints à actualiser la loi: je veux parler de la formation des enseignants du secondaire. Ils étaient jusqu'à maintenant formés pratiquement à l'IFMES - un institut rattaché au département lui-même - et il n'y avait pas la reconnaissance, contrairement à la licence octroyée par l'Université de Genève, reconnue brillamment pour les enseignants du primaire ! Si nous avions voulu aller jusqu'au bout dans la demande de reconnaissance pour les enseignants du secondaire, nous serions très clairement allés dans le mur - comme on le dit communément - c'est-à-dire que nous n'avions aucune chance de pouvoir l'obtenir.

Il fallait donc saisir l'occasion qui nous était donnée à travers cette crise - la non-reconnaissance - pour définir un nouveau projet. Et le projet qui est présenté aujourd'hui a le grand mérite de compter sur une ambition majeure: celle de rassembler la formation primaire et secondaire, tout en restant spécifique, au sein d'une même entité constituée par un institut universitaire, qui est en réalité un institut interfacultaire et qui repose donc sur une très large contribution de différents partenaires à la qualité de la formation des enseignants du primaire et du secondaire. A cette ambition, attachons également celle d'y lier la formation continue, et aussi la formation des cadres scolaires, en partenariat...

Le président. Vous avez déjà parlé six minutes, Monsieur le conseiller d'Etat !

M. Charles Beer. J'ai bientôt terminé, si vous me laissez encore trente secondes ! Merci ! ...pour une HEP qui représente non pas notre ambition, mais le décalage que nous avons avec notre projet !

Mesdames et Messieurs les députés, pour terminer, j'aimerais dire que ce choix d'un Institut universitaire de formation des enseignants a été voulu par le Conseil d'Etat, voulu par le département de l'instruction publique comme étant un moyen terme entre une structure HEP et une structure universitaire, où une seule faculté avait jusqu'alors la responsabilité de former les enseignants du primaire. Avec ce centre interfacultaire et aussi avec une organisation spécifique intégrant les partenaires de la formation, le département de l'instruction publique et les formations des enseignants, nous aurons à coeur de garder un lien constant avec le terrain, ce qui renforcera une formation déjà très ancrée dans la pratique, contrairement à ce qui a été dit à ce sujet - c'est probablement la formation la plus ancrée dans la pratique de toute la Suisse.

Enfin, Mesdames et Messieurs les députés - ce sera mon dernier propos: je vous rassure, Monsieur le président ! - la majorité, pour ne pas dire l'écrasante majorité des recteurs des HEP de Suisse, affirme qu'il est impossible de former correctement les enseignants du primaire en trois ans, avec le projet d'harmonisation et l'introduction de deux langues dès l'école primaire, allemand et anglais.

Je voudrais encore dire ceci: nous ne pouvons pas vouloir HarmoS, vouloir redresser l'école en général et l'école genevoise en particulier et, en même temps, vouloir diminuer la durée de formation des enseignants au détriment de la qualité, alors que les exigences vis-à-vis des enseignants sont en train d'augmenter ! C'est comme si l'on proposait aux élèves genevois d'entrer dans HarmoS, d'apprendre deux langues, tout en diminuant le nombre des heures de cours ! (Applaudissements.)

Le président. Merci beaucoup, Monsieur le conseiller d'Etat: vous avez été parfait du point de vue de la durée de votre intervention ! Et naturellement aussi, du point de vue du contenu !

Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant passer au vote sur l'entrée en matière du projet de loi 10432.

Mis aux voix, le projet de loi 10432 est adopté en premier débat par 78 oui et 4 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, à l'article 122, alinéa 4, nous sommes saisis d'un amendement proposé par le MCG. Monsieur Girardet, je vous donne la parole. Je vous rappelle que trois minutes par groupe sont imparties...

M. Jean-François Girardet (MCG). J'ai trois minutes de parole ? C'est extraordinaire !

Comme nous l'avons déjà indiqué, ce qui pose problème - et les propos du conseiller d'Etat viennent de le confirmer - c'est qu'un enseignant qui a obtenu un bachelor à Genève ne pourra pas être engagé, c'est ce que j'ai cru comprendre, alors qu'un Vaudois, un Valaisan, un Français... (Exclamations.) - un frontalier ! - ...pourra être engagé et nommé en ayant obtenu le même diplôme. C'est d'autant plus étrange que la durée de formation de l'enseignant genevois est plus longue: il doit rester une année de plus, voire deux, sur les bancs de l'université !

L'une des priorités du discours de Saint-Pierre était d'avoir une formation performante et exigeante... Mais trouvez-vous normal que nos jeunes en subissent la contrepartie ? Trouvez-vous normal que leur formation soit plus longue - un ou deux ans de plus - que celle des Vaudois, alors que ceux-ci ont déjà un an de scolarité en moins pour arriver à la maturité ? Finalement, un Vaudois peut arriver sur le marché du travail trois ans avant un Genevois qui a suivi toute sa scolarité à Genève ! Pour ma part, je trouve cela inique: la loi que nous sommes en train de voter est péjorante pour la formation à Genève !

En acceptant cet amendement, on reviendrait exactement à ce que préconisait le Conseil d'Etat dans son premier projet de loi à l'article 122, à savoir que les titulaires d'un diplôme qui ont suivi une formation HEP doivent aussi obtenir un certificat complémentaire pour être nommés.

La formation consisterait donc à obtenir le bachelor et à être engagé pour faire deux ans - voire trois - de travail pratique à la tête d'une classe - soit à 50%, soit à temps partiel - pour obtenir un certificat complémentaire. Ce certificat permettrait de se spécialiser soit en élémentaire, soit en primaire, soit en enseignement spécialisé, soit en langues. D'ailleurs, l'avis de droit qui avait été demandé par le chef du département à ce sujet - c'était une question qui se posait, un argument même, pour que la formation en HEP passe et soit choisie par les députés - dit spécifiquement...

Le président. Vous devez conclure, Monsieur Girardet !

M. Jean-François Girardet. ...qu'il serait discriminatoire d'imposer des conditions supplémentaires...

Le président. Vous devez vraiment conclure !

M. Jean-François Girardet. ...aux non-Genevois, mais qu'on aurait le droit de le faire, soit de leur demander qu'ils aient le même niveau que ceux qui ont fait leurs études à Genève.

M. Pierre Weiss (L). Tous les chemins mènent à l'école, y compris le chemin des écoliers... Et l'IUFE, d'une certaine façon, c'est le chemin des écoliers ! Quatre ans de formation... Actuellement, la formation en HEP dure trois ans. Je ne parle pas de la formation en HEP de demain... Certains voudraient qu'elle dure quatre ans... Ce jour-là, tout le monde empruntera le chemin des écoliers !

Si nous adoptons la loi telle quelle, il y aura deux façons de devenir enseignant à Genève. Certains y voient une absence d'équité... Le marché décidera probablement ! Le marché, c'est-à-dire les futurs enseignants en pédagogie qui se destinent au métier d'enseignant dans le primaire ! Et on verra bien si, demain, de nombreux Genevois se rendront à Lausanne, à Saint-Maurice - ou à Brigue pour parfaire en trois ans leurs connaissances en allemand - ou s'ils resteront à Genève. Ou même si des Valaisans, attirés par notre - petite - ville-lumière, viendront jusqu'au bout du lac pour profiter de notre enseignement. C'est la réalité de demain ! Nous n'entendons pas la brimer: nous entendons, en refusant cet amendement, offrir une situation qui permettra d'avoir le choix. C'est la raison pour laquelle nous refuserons cet amendement.

J'aimerais - je parlerai lentement pour être compréhensible - poser une question au rapporteur de minorité: cet amendement en annonce-t-il un autre sur la formation des élèves ? Demain, les élèves de la grande majorité des cantons de Suisse, qui reçoivent une formation en douze ans et obtiennent une maturité, seront-ils obligés de faire une année supplémentaire de formation pour être admis à l'Université de Genève ? En d'autres termes, et je parlerai plus rapidement, les Suisses des autres cantons - dans 21 cantons sur 26, à peu près, la scolarité se fait en douze ans et non en treize ans comme à Genève - devront-ils faire une année scolaire de plus pour pouvoir faire leurs études universitaires à Genève ? Voilà la question que je pose ! Voilà l'amendement que j'attends de la part du MCG ! Voilà une logique qui serait cohérente avec la recherche d'équité de la part de ce parti !

Mme Catherine Baud (Ve). J'interviendrai très rapidement sur cet amendement... Il est vrai qu'il peut sembler curieux que la formation dure quatre ans à Genève, alors qu'elle dure trois ans ailleurs... Mais c'est déjà le cas actuellement, et les étudiants ne vont pas forcément faire leurs études dans d'autres cantons parce que la durée de formation y est de trois ans !

Cela n'a donc pas de sens d'affirmer que c'est une mauvaise chose, parce que plus la formation est longue, plus les élèves ont des chances d'être bien formés par des enseignants qui eux-mêmes sont bien formés. Mais cela ne signifie pas pour autant que la formation en trois ans qui est dispensée dans les autres cantons est inférieure et que nous aurions des leçons à leur donner sous prétexte que nous serions des modèles. Il est donc tout à fait malsain de procéder ainsi: nous n'avons pas de leçons à donner aux autres cantons ! En l'occurrence, si nous souhaitons que la formation dure une année de plus, cela nous regarde - c'est effectivement pour des raisons de traditions, des raisons genevoises - mais nous n'avons tout simplement pas à l'imposer aux autres cantons ! C'est la raison pour laquelle nous refuserons cet amendement.

M. Patrick Saudan (R), rapporteur de majorité. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont déjà été avancés par mes préopinants...

Je crois tout de même qu'il faut sortir du fantasme... A ce sujet, il est intéressant de connaître les chiffres. Par exemple, Monsieur Girardet, 98% des enseignants genevois sortent d'une formation genevoise: cela varie de 1 à 4%, à l'heure actuelle ! Croyez-vous que beaucoup d'étudiants genevois suivent une formation en HEP, par exemple à Lausanne ? Je me suis renseigné: 20 Genevois seulement sont inscrits à Lausanne sur les 400 élèves de première année, ce qui représente 5% ! Il faut le savoir, la plupart des enseignants sont captifs de l'endroit où ils sont formés, car c'est là qu'ils effectuent leurs stages qui leur permettent d'être connus et d'être engagés par la suite. Je pense donc que le danger de voir des Genevois discriminés par rapport à d'autres étudiants qui viendraient de cantons confédérés relève du pur fantasme !

Deuxièmement, il faut savoir qu'il n'y a pas seulement HarmoS, le règlement de la CDIP... Il y a aussi les accords européens, et une formation universitaire permet - c'est vrai - une meilleure mobilité au point de vue international. Nous sommes dans un monde globalisé, nous sommes dans un monde où les enseignants risquent de changer de pays, et à mon avis la formation genevoise en quatre ans gardera tout son attrait.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous soumettre... Monsieur Beer, vous souhaitez vous prononcer sur cet amendement ? Je vous donne la parole brièvement !

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Très brièvement, quatre points de clarification.

Premier point. Pratiquement partout en Europe - et c'est en cours en Suisse - la durée de la formation pour les enseignants du primaire est en voie d'uniformisation à quatre ans.

Deuxième point. Effectivement, du point de vue de la durée de la formation des enseignants du primaire, l'écart entre Genève et les autres cantons est connu: les enseignants genevois n'ont jamais, pour autant, demandé de raccourcir la durée de la formation, pas plus que les étudiants d'ailleurs. Et nous n'avons pas non plus constaté le moindre exode des étudiants genevois vers d'autres HEP. Je dirai même que ceux qui vont étudier dans le canton de Vaud sont, en majorité, des étudiants qui n'ont pas réussi leur examen d'entrée pour suivre la formation genevoise. Il me semblait évidemment important de rectifier ce point.

Le troisième point porte sur l'avis de droit que vous avez évoqué... Oui, nous avons demandé un avis de droit, pour savoir ce qu'il était possible de faire. A partir de là, nous avons effectivement souhaité entrer dans une logique d'uniformisation, et avoir un certain nombre d'échanges tout en recherchant l'intérêt général. Finalement, les échanges avec la présidente de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique, Mme Chassot, nous ont amenés à décider que, au-delà des avis de droit, c'est le respect des accords, tels que celles et ceux qui en ont la charge en termes de sécurité les avaient définis - comme Mme Chassot - qui devait l'emporter. C'est un point important, parce que la CDIP est quand même l'instance qui a la charge de la reconnaissance de la formation des enseignants.

Quatrième point - je terminerai par là: s'il y a un écart important, il nous permettra enfin d'entrer dans la logique des langues et de renforcer un aspect important de la formation souhaité par chacune et chacun d'entre vous: je veux parler de la formation pratique.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'amendement présenté par le MCG - vous l'avez sur vos tables - concernant l'article 122, alinéa 4. Il s'agit d'un alinéa (nouvelle teneur), ainsi libellé: «Dans l'enseignement primaire, la nomination est subordonnée à l'obtention d'un baccalauréat universitaire (bachelor) et d'un certificat complémentaire - mention enseignement primaire - de l'université de Genève (ci-après université) ou d'une formation jugée équivalente par la Conférence suisse des directeurs de l'instruction publique. Les titulaires d'un baccalauréat obtenu dans une haute école d'un autre canton sont également astreints à l'obtention de ce certificat complémentaire durant la période probatoire.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 19 oui.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le MCG vient de nous présenter un nouvel amendement au même alinéa, mais nous n'avons pas encore eu le temps de le distribuer... Monsieur Stauffer, vous avez trois minutes pour le présenter.

M. Eric Stauffer. Non, je ne vais rien présenter maintenant: c'est pour le troisième débat, ce n'est pas pour tout de suite !

Le président. Ah, c'est pour le troisième débat ? Excusez-moi ! Très bien ! Alors, dans ce cas, je continue.

Mis aux voix, l'article 122, alinéas 3 et 4 (nouvelle teneur), alinéas 5 et 6 (nouveaux), est adopté, de même que les articles 134 (nouvelle teneur) à 156 (nouvelle teneur, avec nouvelle note).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous revenons à ce nouvel amendement à l'article 122, alinéa 4.

M. Eric Stauffer (MCG). Très brièvement, avant que mon collègue Jean-François Girardet ne prenne la parole...

Je suis une fois de plus désolé ce soir que nous fassions des lois qui prétéritent les résidents genevois: c'est tout ce que je voulais dire ! Une fois de plus, ces lois favorisent les frontaliers et les gens qui viennent d'ailleurs, au détriment des Genevois ! (Exclamations.) Et là, on parle de l'enseignement public !

Maintenant, chacun prend ses responsabilités, chacun agit en son âme et conscience ! Nous, en ce qui nous concerne, nous continuerons à défendre les résidents genevois: un point c'est tout !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Girardet, à qui il reste deux minutes.

M. Jean-François Girardet (MCG). Vous n'avez peut-être pas encore reçu l'amendement...

Le président. Continuez, Monsieur le député: on est en train de le distribuer ! Quoi qu'il en soit, on en connaît l'esprit...

M. Jean-François Girardet. Vous n'en connaissez pas seulement l'esprit: vous l'avez tous sous les yeux, puisqu'il s'agit de l'article initial tel que présenté par le chef du département. C'est l'article 122, alinéa 4, dont la teneur est la suivante: «Dans l'enseignement primaire, la nomination est subordonnée à l'obtention d'un baccalauréat universitaire (bachelor) et d'un certificat complémentaire - mention enseignement primaire - de l'Université de Genève (ci-après Université) ou d'une formation jugée équivalente. Le Conseil d'Etat fixe dans un règlement les conditions relatives à la formation complémentaire suivie obligatoirement par les personnes qui ne disposent pas de ce niveau de formation.» Punkt, Schluss ! C'était l'article du projet de loi tel que présenté par le chef du département !

Les juristes du département ont eu le temps de plancher sur cet article, puisque le projet de loi radical avait été déposé en août 2008 et que le projet de loi du département a été proposé comme un contreprojet en février 2009. Il a fallu presque six mois pour le préparer: les juristes ont donc eu tout le temps nécessaire ! Ils ont même demandé un avis de droit qui justifie la conformité de l'article 122, alinéa 4, proposé par le chef du département.

J'estime que, si vous êtes de bons législateurs, vous devriez faire confiance à votre chef du département: il ne vous a quand même pas proposé un article de loi qui est de la foutaise ! Cet article de loi que vous êtes en train de voter représentait le marché qui a été conclu avec M. Weiss, M. Barrillier et tous les signataires du projet sur la HEP, tout cela pour obtenir quelque chose en contrepartie du retrait du projet sur la HEP. Alors maintenant...

Le président. Il faut conclure, Monsieur le député !

M. Jean-François Girardet. ...vous devez prendre vos responsabilités, accepter que les enseignants genevois ne soient pas prétérités et qu'ils soient traités à égalité avec les autres, qu'ils soient français, vaudois ou valaisans ! (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Pierre Weiss (L). Le texte initial du Conseil d'Etat représentait une position qui pouvait se défendre, mais qui n'a pas eu la majorité en commission. L'objectif du Conseil d'Etat était de faire adopter son texte... L'objectif d'un certain nombre de groupes au sein de la commission était de faire adopter un autre texte: il fallait donc trouver une voie médiane...

Certains croient pouvoir imposer leur volonté alors qu'ils sont minoritaires. D'autres font preuve de réalisme, et je rends ici hommage au conseiller d'Etat qui a fait preuve de réalisme, parce qu'il a compris qu'il ne pouvait imposer son texte. Mais quelques-uns n'ont pas encore compris qu'ils ne pouvaient pas imposer seuls le leur ! Et nous, nous avons aussi compris que nous ne pouvions pas imposer notre volonté sans déboucher sur une crise avec l'exécutif, en l'occurrence avec le Conseil d'Etat.

Ce qui nous est cher, c'est la qualité de la formation: c'est l'excellence, ce sont les exigences qui sont requises.

Et puis j'ajouterai un point qui me tient particulièrement à coeur. Nous ne sommes pas seulement des habitants et des citoyens d'un canton; nous sommes citoyens d'un pays: la Suisse ! Il y a un marché de la formation en Suisse; il y a des formations dans d'autres cantons, et je crois qu'il était nécessaire de rendre hommage à ce qui se fait dans d'autres cantons et de permettre une mobilité de la formation des enseignants du primaire, qu'ils viennent de Lausanne, de Neuchâtel ou de Brigue !

C'est la raison pour laquelle la solution qui a été adoptée - de compromis - est la meilleure des solutions possibles, compte tenu de la nécessité d'avoir rapidement un texte qui permette à la formation en enseignement primaire à Genève de devenir une réalité.

Voilà pourquoi nous nous opposerons à ce nouvel amendement du MCG !

M. Patrick Saudan (R), rapporteur de majorité. Je ne vais pas accaparer la parole dans la mesure où M. Weiss a dit l'essentiel... Je dirai simplement que le texte initial par rapport à cette problématique a toujours été combattu par les partis de l'Entente et que nous sommes très satisfaits du compromis qui a été trouvé avec le département. Je vous encourage donc tous à refuser cet amendement.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je n'avais, au début de cette discussion en troisième débat, pas véritablement l'intention de prendre la parole une nouvelle fois, mais si je le fais, c'est tout simplement parce qu'il ne faut pas se tromper de discussion. Et les propos de M. le député Stauffer tout à l'heure sont véritablement de nature à induire - volontairement ou involontairement - en erreur.

J'aimerais expliquer mon propos de la manière suivante. Aujourd'hui, en réalité, le MCG - ce qui est son droit le plus strict - défend un projet HEP... Après que pratiquement l'ensemble de la commission - en tout cas une très large majorité - s'est prononcée pour un compromis en faveur de la création de l'Institut universitaire de formation des enseignants, voyant que la HEP était beaucoup plus chère et qu'aucune HEP n'avait été créée en prenant la décision politique de retirer à une instance, qui plus est universitaire, la formation des enseignants, on essaie aujourd'hui de dévier le débat en disant que les Genevois sont discriminés...

C'est un thème remarquable pour une plénière, Mesdames et Messieurs les députés, mais il est tout à fait en dehors - je dis bien en dehors - des préoccupations de toute la commission, car aucun député n'a posé une question sur le sujet de la discrimination ! La question qui a été posée a simplement été celle-ci: fallait-il imposer ou non aux autres cantons la durée de la formation genevoise, en matière de reconnaissance des diplômes ?

Et essayer de faire croire que cela favoriserait les frontaliers est un tour de passe-passe comme un autre ! Alors, je rassurerai les députés du MCG: s'il y a des enseignants formés depuis longtemps en quatre ans, ce sont bien les enseignants formés en France voisine !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'amendement présenté par le MCG en troisième débat concernant l'alinéa 4 de l'article 122, tel que M. Girardet vient de l'énoncer.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 18 oui et 1 abstention.

Le président. En cas de refus, le MCG a prévu de déposer à nouveau l'amendement qu'il avait proposé tout à l'heure. Je vous demande donc de vous prononcer à nouveau. (M. Eric Stauffer interpelle le président.) Vous avez la parole, mais on en a déjà beaucoup parlé, Monsieur Stauffer ! (Rires.)

M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, c'est mon droit, et je l'utilise !

Il faut être très clair... (Rires.) Je vais vous donner un exemple que tout le monde va comprendre. Il y a Maurice, résident genevois et étudiant, et Alfred, étudiant vaudois qui réside dans le canton de Vaud. Ils commencent leur formation en même temps, mais Alfred la termine en trois ans, et il postule pour un poste à Genève. Il est engagé et nommé. Maurice, l'étudiant genevois, doit faire encore une année de plus au bout des trois ans, et il ne peut pas être engagé. Il est donc discriminé. Tout le monde aura compris: vous voyez, il n'est pas nécessaire de faire de grands discours d'universitaire, avec de belles phrases bien enrobées ! Monsieur et Madame Tout le Monde auront compris l'exemple que je viens de donner !

Vous dites, Monsieur le conseiller d'Etat, qu'en France les enseignants sont formés en quatre ans... C'est bien, mais je m'excuse, nous sommes, mes collègues et moi, élus de la République et canton de Genève, et notre première mission est de donner la priorité de l'emploi aux résidents genevois: tout le reste est superfétatoire !

Enfin, dernière chose, Mesdames et Messieurs les députés... (L'orateur est interpellé par M. le conseiller d'Etat.) Prenez la parole, Monsieur le conseiller d'Etat, c'est bien ! (Exclamations.) On critique souvent le MCG, mais j'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs de l'Entente, et Monsieur Hohl, qui hochez la tête - vous transmettrez, Monsieur le président - que, juste derrière vous, deux petites lumières vertes se sont allumées avec celles du MCG. Qu'est-ce que cela signifie ? Qu'il y a finalement peut-être des gens intelligents au parti radical... (Exclamations. Applaudissements.) - l'un des plus petits partis de ce Grand Conseil - qui ont voté avec le MCG ! Si vous écoutiez ces gens qui ont l'expérience, eh bien peut-être que l'on arriverait finalement à faire quelque chose de positif et de constructif au sein de ce Grand Conseil pour les Genevois... Vous savez, ceux qui votent pour nous et qui font que nous sommes ici aujourd'hui !

Voilà, Mesdames et Messieurs ! C'est tout ce que je peux vous dire, ce soir à 22h50, avec mon coeur, avec mes tripes, avec mes collègues: nous serons toujours là pour défendre les résidents genevois ! Je remercie les deux «renégats», entre guillemets - «renégats» pour les radicaux, bien sûr ! - qui ont voté avec le MCG, car ils ont fait preuve d'indépendance et de courage en votant contre leur parti, qui les muselle tous. Ils viennent nous dire dans les couloirs que le MCG a raison, mais qu'ils sont coincés dans leur vieux parti traditionnel et qu'ils sont contraints de voter comme l'ensemble du groupe, qu'ils ne peuvent pas s'exprimer librement, sauf à la buvette. Cette discussion a eu lieu il y a quarante-cinq minutes à peine, avec l'un de vos collègues dont je tairai le nom ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'amendement proposé par le MCG...

M. Eric Stauffer. Je retire cet amendement, Monsieur le président !

Le président. Vous retirez cet amendement ? Dans ce cas, nous pouvons passer au vote d'ensemble... La parole est à M. Deneys... (Exclamations.)

M. Roger Deneys. Je peux prendre la parole en troisième débat !

Le président. D'accord !

M. Roger Deneys (S). Monsieur le président, nous sommes en troisième débat, et j'ai le droit de m'exprimer en troisième débat ! Tous les députés en ont le droit: il n'y a aucun problème particulier !

Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je suis assez surpris des propos du député Stauffer. En fait, il a l'air de considérer que la durée de la formation est un gage de succès au niveau professionnel...

Moi je travaille dans l'informatique, et je peux vous dire que les CFC en informatique se font en quatre ans, mais certains font des études à l'Université de Genève ou ailleurs, au Poly - parfois dix ans d'études. Les deux sont informaticiens, mais ont-ils le même métier ? A la fin de leur formation, auront-ils les mêmes débouchés ? (Brouhaha.) Lors d'une restructuration d'entreprise, lors d'une fusion, ces formations leur donneront-elles les mêmes possibilités de retrouver du travail ?

Eh bien, Monsieur Stauffer, Mesdames et Messieurs les députés, c'est pour cela que les socialistes pensent que le système de formation des enseignants par une formation universitaire en quatre ans est un gage de succès au niveau professionnel. Et c'est donc un gage de succès pour les Genevois afin de trouver du travail et de le conserver, et pour ne pas laisser sur le carreau des personnes qui auront eu l'illusion de suivre une formation certes courte, mais qui n'offre aucun débouché !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à soutenir ce projet de loi qui garantit des formations de qualité pour les enseignants, et donc des formations de qualité pour les élèves genevois !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Bolay, à qui il reste une minute et trente secondes.

Mme Loly Bolay (S). Je serai beaucoup plus brève, Monsieur le président ! J'en ai un peu ras le bol, comme beaucoup ici, d'entendre les attaques perpétuelles du MCG contre les frontaliers !

Je vous rappelle, Monsieur Stauffer, que vous, quand ça vous arrange, vous engagez des frontaliers ! (Exclamations de M. Eric Stauffer.) En effet, vous avez engagé deux assistants parlementaires frontaliers et vous avez nommé des frontaliers dans les CODOF... (L'oratrice est interpellée par M. Eric Stauffer.) J'ai les preuves à la maison...

Le président. Madame Bolay...

Mme Loly Bolay. ...et je peux vous les apporter ! Vous avez nommé des frontaliers dans les CODOF !

Le président. Madame Bolay, adressez-vous à la présidence, s'il vous plaît !

Mme Loly Bolay. Alors, arrêtez de donner des leçons aux autres, parce que vous êtes bien pire qu'eux ! (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le débat s'est très bien déroulé jusqu'à maintenant... Il nous reste encore cinq minutes, et je vous prie de revenir à un peu de calme. Essayons de clore ce débat en restant zen !

Je passe la parole à M. Hohl qui, j'en suis sûr, se tiendra à cette recommandation...

M. Frédéric Hohl (R). Monsieur le président, vous aurez la gentillesse de transmettre à M. Stauffer que nous n'avons pas donné de consigne de vote dans notre parti; nous sommes un parti de liberté, et je vais apporter une réponse tout de suite: pour le dernier vote dont parlait M. Stauffer, M. Jean Romain s'est abstenu et M. Pierre Conne s'est trompé de bouton, ce qui peut arriver ! Voilà ! Merci ! C'est tout !

Le président. Merci pour cette précision, Monsieur le député !

M. Jean-François Girardet (MCG). Je voudrais juste souligner les soucis qu'auront les directeurs d'établissement, puisqu'ils auront davantage d'autonomie... Ils pourront, avec cette nouvelle loi, engager ceux qui auront un bachelor pour l'enseignement primaire, et c'est à eux qu'il faudrait donner cette autorité pour pouvoir le faire et pour pouvoir aller jusqu'au bout de l'autonomie donnée aux directions d'établissement. Eh bien, ma directrice, qui était une ancienne députée socialiste, m'a expliqué qu'effectivement elle serait dans l'embarras lorsqu'elle devra juger et engager une personne qui aura un bachelor vaudois, avec peut-être deux ou trois années d'expérience, car elle l'engagera certainement au détriment d'un jeune étudiant genevois qui devra suivre une formation complémentaire. Et cela, vous le décidez, en toute connaissance de cause, en votant ce projet ce soir: je pense que le peuple vous le rendra !

On ne va pas lancer un référendum... En tout cas, le MCG n'a pas les forces nécessaires pour lancer un référendum, parce que le débat est beaucoup trop technique. Mais, vous, vous étiez à même de comprendre cela, et je pense que vous auriez pu voter en votre âme et conscience et soutenir les amendements MCG !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Stauffer, qui présente à nouveau un amendement... Il vous reste une minute.

M. Eric Stauffer (MCG). Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, mais j'ai demandé la parole !

Mesdames et Messieurs les députés, je vais être très bref. Madame Dolores Bolay - vous transmettrez, Monsieur le président - je suis désolé pour vous, mais nous avons toujours engagé des attachés parlementaires de nationalité suisse ! (L'orateur est interpellé.) De nationalité suisse !

Une voix. Alors, lesquels ?

M. Eric Stauffer. Alors, lesquels ? Nous avons eu Patrick Dimier, Thierry Walther, suisse, et aujourd'hui François Baertschi ! (L'orateur est interpellé par Mme Loly Bolay. Le président agite la cloche.) Mais c'est au Secrétariat général du Grand Conseil: vous êtes une menteuse, Madame ! Nous avons eu trois attachés parlementaires ! Bref, vous pourrez contrôler au Secrétariat du Grand Conseil: c'est public, c'est sur le site de l'Etat, donc vous mentez ! Mesdames et Messieurs les députés, c'est tout ce que je voulais dire, pour rétablir la vérité !

Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Engelberts, je ne peux pas vous donner la parole, parce que les trois minutes imparties sont écoulées. Je passe la parole à M. Beer.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. J'aimerais que l'on retrouve ce que devrait être l'ambiance d'un parlement: nous ne sommes pas dans une cour de récréation ! Merci beaucoup !

Je tiens à apporter quelques précisions qui me semblent particulièrement importantes. Premièrement, jamais un étudiant ou un enseignant genevois n'a été discriminé.

Deuxièmement, Monsieur Girardet, non seulement vous commettez des irrégularités en citant des gens absents et, qui plus est, certainement tout à fait en dehors du contexte, je n'en sais rien, mais ce que je sais, c'est que vous n'avez pas le droit d'affirmer que les directrices et les directeurs d'enseignement des établissements primaires auront la compétence d'engager, puisque l'engagement des enseignants du primaire est centralisé ! L'établissement aura seulement la compétence de les occuper à telle ou telle fonction - maître d'appui, MS ou titulaire de classe. Et je veille personnellement à ce que l'ensemble des enseignants genevois formés à Genève accèdent directement à l'emploi. Vous n'avez pas le droit de prétendre le contraire, sauf si, une fois de plus, vous recherchez des propos démagogiques pour un combat perdu ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Le MCG ayant redéposé le même amendement qui a déjà été refusé une fois, il n'est pas valable.

M. Eric Stauffer. Il est différent !

Le président. Non, pas du tout, il est exactement pareil ! Je le répète, comme il a déjà été refusé en troisième débat, il n'est pas valable !

Mis aux voix, l'article 122, alinéas 3 et 4 (nouvelle teneur), alinéas 5 et 6 (nouveaux), est adopté, de même que les articles 134 (nouvelle teneur) à 156 (nouvelle teneur, avec nouvelle note).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons donc pouvoir maintenant passer au vote d'ensemble en troisième débat de ce fameux projet de loi 10432.

Mise aux voix, la loi 10432 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 70 oui contre 17 non et 3 abstentions.

Loi 10432

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons pas tout à fait terminé... Encore deux minutes de patience !

Il faut maintenant prendre acte du rapport RD 585-A.

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission RD 585-A.

Le président. Les objets qu'il nous reste à traiter en urgence - les points 104 à 107 de notre ordre du jour, soit les propositions de motions concernant les manifestations, ainsi que la proposition de résolution 592 - seront traités demain après le budget, si nous en avons le temps.

Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, avant de lever la séance, je dois encore vous faire part d'une communication - agréable - de la présidence... Nous remercions la conseillère d'Etat chargée du département de l'intérieur et de la mobilité, Mme Michèle Künzler, qui, selon la coutume instaurée par son prédécesseur depuis quelques années, remet à chaque député quelques bouteilles - au pluriel - de vin issu des crus du vignoble de l'Etat. Les huissiers vous attendent donc à la salle Petitot pour effectuer la distribution.

Bonne nuit et rendez-vous demain à 8h ! (Applaudissements.)

La séance est levée à 23h.