Séance du
vendredi 15 mai 2009 à
17h
56e
législature -
4e
année -
8e
session -
43e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, Laurent Moutinot, Robert Cramer, Pierre-François Unger, Charles Beer et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. David Hiler, président du Conseil d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Caroline Bartl Winterhalter, Laurence Fehlmann Rielle, Claudine Gachet, Philippe Guénat, Claude Marcet, Alain Meylan et Yves Nidegger, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Je demande l'ajout et l'urgence pour le projet de loi 10459 du Conseil d'Etat.
Le président. Nous allons nous prononcer sur cet ajout et cette urgence. Je rappelle que les deux tiers de l'assemblée sont requis.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport PL 10459-A est adopté par 65 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 10459-A est adopté par 60 oui (unanimité des votants).
M. Eric Stauffer (MCG). Le groupe MCG demande l'ajout et l'urgence de la proposition de résolution 583 sur le délai des accords bilatéraux, pour inviter le Conseil fédéral à prolonger le délai des quotas sur la migration des citoyens européens.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de résolution 583 est rejeté par 51 non contre 11 oui et 1 abstention.
Le président. Nous traiterons en point fixe, à 17h, le PL 10459 dont vous venez d'accepter l'ajout et l'urgence. Nous disposerons de trente minutes, dont trois minutes par groupe.
Annonces et dépôts
Néant.
Interpellations urgentes écrites
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Fabiano Forte : Réorganisation de La Poste Suisse : vent de menace sur Genève ? (IUE-765)
Interpellation urgente écrite de M. Fabiano Forte : Suppression de la loi sur la fonction d'architecte cantonal (L 5 3) : quelle consultation ? (IUE-766)
Interpellation urgente écrite de Mme Janine Hagmann : Quelle place pour une commission interparlementaire dans l'accord historique du 2 avril 2009 signé entre Vaud et Genève ? (IUE-767)
Interpellation urgente écrite de Mme Anne Emery-Torracinta : Habitat transfrontalier : quelle est l'implication du canton de Genève ? (IUE-768)
Interpellation urgente écrite de M. Fabiano Forte : Quartier des Pâquis, quel bilan criminogène ? (IUE-769)
Interpellation urgente écrite de M. Eric Stauffer : Pandémie grippe porcine et personnel frontalier réquisitionné par un Etat étranger (IUE-770)
Interpellation urgente écrite de M. Fabiano Forte : Valeur de rendement des immeubles agricoles : quelles solutions pour les contribuables de bonne foi ? (IUE-771)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Etienne : A quand Flux à Genève ? (IUE-772)
Interpellation urgente écrite de M. Christophe Aumeunier : Projet de plage dans la Rade : Quel financement ? (IUE-773)
Interpellation urgente écrite de M. François Gillet : Chantier du CO Florence : la plaisanterie a assez duré ! (IUE-774)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Etienne : Où en est-on avec le PDQ de la Fontenette à Carouge ? (IUE-775)
Interpellation urgente écrite de Mme Béatrice Hirsch : Peut-on faire confiance aux statistiques si les modes de calcul changent ? (IUE-776)
Interpellation urgente écrite de Mme Michèle Künzler : Menuiserie non autorisée en zone agricole que fait le DCTI ? (IUE-777)
Interpellation urgente écrite de M. Eric Stauffer : Ou est la cohérence du gouvernement dans le domaine de la sécurité publique à Genève ! (IUE-778)
Interpellation urgente écrite de Mme Véronique Pürro : Liberté syndicale : un droit fondamental (suite) (IUE-779)
IUE 765 IUE 766 IUE 767 IUE 768 IUE 769 IUE 770 IUE 771 IUE 772 IUE 773 IUE 774 IUE 775 IUE 776 IUE 777 IUE 778 IUE 779
Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante.
Premier débat
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, que vous avez accepté de traiter maintenant en l'ayant renvoyé en commission hier à 17h, s'inscrit dans le cadre d'une série de mesures voulues par le Conseil d'Etat pour lutter contre les effets de la crise financière que nous connaissons actuellement. Le moyen choisi est l'utilisation de la Fondation d'aide aux entreprises, que nous avons créée à fin 2005, qui a commencé à fonctionner en 2006 et qui, à l'époque, avait fusionné divers dispositifs plus ou moins disparates et composites pour en faire une seule structure.
Alors comment est-ce que la Fondation va être utilisée pour contribuer à lutter contre les effets de la crise ? Premièrement, on va en augmenter les moyens, aussi bien par le biais des dépenses de fonctionnement que par le biais d'un investissement, à savoir une augmentation de capital de 10 millions. Deuxièmement, on va faire en sorte que la Fondation pratique encore davantage qu'aujourd'hui ce que l'on appelle le «coaching», c'est-à-dire l'accompagnement des entreprises. Troisièmement, il s'agira de permettre plus facilement à la Fondation de prendre des participations. Et quatrièmement, enfin, il s'agit de mettre en place un dispositif d'avance de liquidités, parce que, comme vous le savez, on se trouve aujourd'hui dans une situation où une entreprise peut être parfaitement saine, mais néanmoins éprouver de la difficulté à financer sa trésorerie. Il en résulte paradoxalement que des entreprises aux carnets de commandes tout à fait honorables peuvent être contraintes de déposer leur bilan, précisément parce qu'elles s'apprêtent à encaisser, peut-être à l'horizon de trois ou six mois, des créances, alors qu'elles ont, elles, des échéances, des obligations de paiement mensuelles, ne serait-ce que par exemple envers leurs employés.
C'est évidemment le point central de ce projet de loi, à savoir un nouveau type d'intervention, en quelque sorte, sur la palette des interventions de la FAE. C'est aussi, bien entendu, le point qui a le plus retenu l'attention de la commission, non pas dans la séance qu'elle a consacrée à ce projet de loi hier soir, puisque c'était une séance formelle pour voter le texte, mais pendant les différentes séances qu'elle a tenues au cours du mois, en préparant d'une certaine manière le traitement de ce projet avant même qu'il lui soit renvoyé. Pourquoi ce dispositif a-t-il fait débat ? Parce qu'il suscite effectivement un certain nombre de questions. Les banques, et en particulier la Banque cantonale de Genève, ayant de la difficulté à prêter comme on le voudrait aux entreprises, l'Etat doit-il se faire banquier pour autant ?
Le président. Monsieur le député, il vous faut terminer. Vous aurez à nouveau trois minutes dans une seconde intervention.
M. Olivier Jornot. Très bien, Monsieur le président. Un dispositif de ce type n'est-il pas de nature à entraîner des distorsions de concurrence entre les entreprises qui en bénéficient et celles qui n'en bénéficient pas ? La commission a souhaité adopter ce nouveau dispositif, mais en le réorientant pour en faire un dispositif temporaire, pendant la période de crise, avec une intervention limitée de l'Etat et avec une égalité de traitement aussi grande que possible, à savoir par le biais de la perception d'intérêts sur les avances de liquidités. En définitive, la commission a voté ce projet de loi à l'unanimité, et je vous recommande d'entrer en matière.
Mme Fabienne Gautier (L). J'aimerais simplement vous informer que, étant membre du Conseil de la Fondation d'aide aux entreprises, je m'abstiendrai de voter.
M. Jacques Jeannerat (R). Le groupe radical soutiendra ce projet de loi en période de difficultés économiques, telle que nous la traversons maintenant. On ne connaît ni la durée, ni la profondeur de cette crise, et il est important que l'Etat puisse, au travers d'un outil comme la Fondation, venir en aide à un certain nombre d'entreprises confrontées à des soucis.
En commission, le groupe radical a tout de même émis dans un commentaire quelques réserves, comme l'a déjà dit le rapporteur de majorité, notamment sur la notion de distorsion de concurrence. En effet, le groupe radical soutiendra ce projet de loi, mais souhaite que la Fondation fasse preuve de vigilance et étudie de façon très attentive tous ses projets. C'est pourquoi, dans ce projet de loi, on a prévu des moyens et des postes supplémentaires pour la Fondation. Ainsi, le groupe radical souhaite que les collaborateurs puissent effectuer leur travail convenablement et éviter de tomber dans un piège de distribution d'argent «à la tête du client».
S'agissant de l'avance de liquidités, le projet de loi initial ne prévoyait pas d'intérêts. Nous avons contesté cet élément et un amendement a été déposé en séance de commission, qui a obtenu une très large majorité et qui satisfait le groupe radical.
Je le disais au début de mon intervention, nous sommes dans une période de difficultés économiques, donc ce projet de loi doit venir comme un outil contre la crise économique. C'est pourquoi il prévoit un contrat de prestations qui ira jusqu'à la fin de l'année 2011. Ainsi, à ce moment-là, quand il s'agira de discuter, de négocier et d'adopter le prochain contrat, le parti radical souhaite que l'on puisse analyser ce qui se sera passé en 2009, puis en 2010 et en 2011. Le cas échéant, il sera alors peut-être temps - et j'espère comme beaucoup d'entre vous que, d'ici là, la crise sera derrière nous, on pourra du moins tirer bénéfice de la réflexion - donc, il sera alors peut-être temps d'éventuellement - éventuellement ! et j'utilise ces mots avec beaucoup de prudence - de réduire un peu la voilure.
En l'état, ce projet de loi est un outil utile au gouvernement pour aider les entreprises, et je vous recommande par conséquent de l'accepter.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Les Verts, ainsi que l'a souligné le rapporteur, sont, comme tous les partis dans ce plénum, favorables à ce projet de loi, car il permet aux entreprises en difficultés momentanées à cause de la crise économique de passer le cap. Il est important de souligner que, pour une fois, les partenaires sociaux, l'Union des associations patronales genevoises et la CGAS sont d'accord avec la proposition de ce projet de loi, ce qui a aussi facilité les travaux de la commission.
Pour les Verts, la crise économique que nous vivons était attendue depuis longtemps; la question était de savoir quand elle allait arriver et quelle réponse y donner. Il est évident que ce n'est pas seulement en Suisse et à Genève que nous pouvons répondre à cette question, cependant nous avons des responsabilités tant au niveau économique qu'environnemental, et l'économie c'est un peu comme la planète: elle est définie. Donc, il faudra bien partager le gâteau d'une façon ou d'une autre: ceux qui se sont beaucoup servis à un certain moment devront moins se servir, et ceux qui n'ont rien eu pourront tout de même obtenir des parts. La distribution de toutes ces... (Remarque.) Non, ils n'auront pas que des miettes, Monsieur le député ! Mais il faudra bien répartir le gâteau entre tout le monde, ce qui dépend de notre responsabilité, et les Verts y seront attentifs à l'avenir.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Permettez-moi, en tant que présidente de la commission de l'économie, de remercier les commissaires qui ont travaillé dans un état d'esprit absolument remarquable, éminemment constructif. Permettez-moi de remercier M. Jornot, qui a produit un magnifique travail et un excellent rapport, reflétant parfaitement l'état d'esprit de la commission. Nous avons pris très au sérieux cette proposition du conseiller d'Etat, et le parti démocrate-chrétien est extrêmement fier et heureux de pouvoir remercier M. Unger d'avoir présenté un projet de loi correspondant exactement aux besoins des entreprises.
Nous ne pouvons que nous féliciter de l'unanimité qui ressort des travaux de la commission et nous réjouir que cette même unanimité ressorte du vote de ce parlement pour que l'on transmette un message très clair aux entreprises, aux PME et PMI: «Tenez bon, nous sommes avec vous, et nous sommes parfaitement conscients de vos difficultés.» Donc, voilà pourquoi il y a enfin un projet de loi qui correspond à leurs attentes.
M. Claude Jeanneret (MCG). Chers collègues, cette loi fait l'unanimité, donc on a plaisir à en parler et on n'aura pas de débats contradictoires sur des points aussi importants. Elle fait l'unanimité parce que, il faut tout de même le rappeler, les PME-PMI représentent à Genève peut-être 40 000 emplois sur 250 000. C'est donc beaucoup d'emplois qui constituent une grande richesse de la place, une capacité professionnelle que l'on sauvegarde. On pense bien qu'une crise comme celle que l'on est en train de vivre ne va pas durer éternellement et, au moment de la reprise, il faudra bien que les gens soient en place afin de pouvoir en profiter.
Cette loi est très bien faite. Je ne crois pas, contrairement à ce que disait le rapporteur, qu'il y ait une discrimination entre les entreprises. Cette loi ne limite pas les entreprises ou le genre d'entreprises qui sollicitent cette aide, car toutes celles qui en ont besoin peuvent la demander. Donc, il n'y a pas de discrimination. La seule chose que l'on puisse dire, c'est qu'on les favorise légèrement sur les intérêts, mais la mesure est momentanée.
De plus, cette loi prévoit d'analyser ses effets d'ici deux ans. Elle n'est donc pas pérenne, elle a simplement pour objet de sauvegarder les intérêts de la république en préservant momentanément la capacité financière des entreprises.
J'aimerais profiter du fait que j'ai la parole pour demander au Conseil d'Etat qu'il prenne également garde à la facilité qu'ont les entreprises françaises à s'installer chez nous, c'est-à-dire en deux heures de démarches. Alors que pour nos entreprises, faire la même chose en France réclame trois jours sans résultats - à moins d'être extrêmement riche, mais ce n'est pas le cas des PME. Peut-être que dans le cadre des crédits qui seront alloués, on en aura qui permettront de se substituer aux cautions que la France nous demande, à certaines garanties qui permettent à ce pays de signer des accords sans pouvoir les respecter, en sachant pertinemment qu'en appliquant sa loi il discrimine la Suisse. En termes de contrat, on appelle cela du dol.
Pour conclure, le MCG sera bien sûr enchanté de voter à l'unanimité cette loi pour le bien-être de nos PME-PMI.
M. Daniel Zaugg (L). Mesdames et Messieurs les députés, mes préopinants ont déjà largement expliqué la nature de ce projet de loi, ainsi que les réticences que nous avons eues en commission, en tout cas en ce qui concerne les groupes libéral et radical, par rapport aux éventuelles distorsions de concurrence. Je n'y reviendrai donc pas davantage. (Brouhaha.)
Traditionnellement, nous autres libéraux ne croyons pas forcément que l'Etat soit un moteur de l'économie. Mais dans la crise qui nous touche, qui n'est pas de nature structurelle mais conjoncturelle, nos entreprises sont saines et l'Etat a un rôle à jouer dans cette situation. Il peut contribuer de diverses manières à la relance, notamment en allégeant les charges qui pèsent sur les entreprises ! En agissant sur la fiscalité ! Sur la lourdeur des procédures administratives ! En instaurant des mesures incitatives, comme dans le secteur de la construction avec le «Chèque 2009 énergie», en lançant évidemment des grands projets. L'Etat peut également mettre en place des mesures de soutien aux entreprises en manque de liquidités, et c'est dans cet esprit que s'inscrit ce projet de loi. (Brouhaha.)
Mais j'aimerais m'attacher à un point en particulier. Qui dit manque de liquidités dit retard de paiement. Or il existe un débiteur qui, à l'heure actuelle, a des délais contractuels de paiement de soixante jours. Ce débiteur, c'est l'Etat de Genève ! Aussi, j'aimerais tout de même souligner qu'une autre mesure conjoncturelle qui pourrait se révéler intéressante est de réduire ses délais de paiement. En effet, l'Etat nous a déjà dit à plusieurs reprises qu'il était capable de payer à vingt-deux jours; pourquoi continuerait-il à établir des contrats avec des délais de paiement de soixante jours ?
La deuxième réflexion que j'aimerais soumettre au département et au conseiller d'Etat en charge, c'est qu'il ne faudrait pas que cette mesure exceptionnelle - liée à la conjoncture - de soutien aux entreprises au travers de la FAE serve finalement à ce que l'Etat s'endette pour aider celles qui souffrent des retards de paiement de ce même Etat.
En dehors de cela, bien entendu que le groupe libéral appuiera ce projet tel qu'il a été amendé et qu'il est ressorti de la commission. (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). Ce projet de loi est une réponse à la motion 1870 du groupe démocrate-chrétien, qui demandait deux choses par rapport à cette crise: soutenir la Fondation d'aide aux entreprises et impliquer la Banque cantonale de Genève, l'obliger à devoir prêter sans forcément tenir compte des risques qui auraient prétérité la cotation de cette banque. En commission, le débat que nous avons eu à ce sujet a permis de clarifier les choses et, finalement, de renoncer à impliquer la Banque cantonale seule dans cette situation. En effet, contrairement à ce qui figurait dans l'exposé des motifs de la motion 1870, les banques à Genève ne refusent pas de prêter aux entreprises, cela nous a été confirmé. L'ensemble des banques, notamment celles qui disposent de pas mal de liquidités, ont plutôt des raisons suffisantes de prêter, et c'était assez de se limiter à soutenir la Fondation d'aide aux entreprises pour qu'elle puisse, de manière supplétive, aider les PME.
Ce projet de loi, très légèrement amendé, convient à l'ensemble de la commission et des partis. Il va permettre à cette fondation de jouer ce rôle supplétif sans forcément peindre le diable sur la muraille concernant les banques, qui jouent leur rôle. D'une certaine façon, d'ailleurs, la Fondation d'aide aux entreprises et les banques collaborent. Il est urgent de voter ce projet de loi aujourd'hui, parce que les besoins sont immédiats. On espère surtout que ces derniers ne vont pas perdurer au-delà de 2011 et que nous aurons retrouvé une conjoncture économique favorable.
Nous devrons apprendre de cette crise, notamment de cette crise de liquidités. Il est facile de dire que l'Etat est un mauvais payeur, qu'il paie à soixante jours, pourtant je trouve que s'il le fait à soixante jours, c'est déjà pas mal. Car il y a un autre débiteur, qui s'appelle Confédération; là, si vous arrivez à vous faire payer une facture à moins de nonante ou cent vingt jours, vous êtes excellents ! Tous les mois, les Services industriels de Genève n'arrivent pas à se faire payer les factures, ils doivent attendre la mise en demeure pour cela, car le système de contrôle de facturation est composé de quatre couches et cela monte jusqu'au département des finances.
De cette crise, nous pouvons apprendre que nous devons peut-être permettre aux entreprises de créer des réserves de liquidités défiscalisées, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, et introduire dans la gestion un bon sens paysan, puisque les agriculteurs, vous le savez, n'ont pas l'assurance d'avoir de bonnes récoltes et doivent constituer des réserves en cas de grêle, de sécheresse ou d'inondation.
Ainsi, nous soutenons et voterons ce projet de loi. Et nous pensons qu'à l'avenir il faudrait imaginer encore d'autres réponses par rapport à ces problèmes de liquidités au sein de notre économie.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes soutiendront ce projet de loi sans hésitation. Nous pensons qu'en période de crise tous les instruments publics doivent être mis à contribution, en plus des instruments privés qui existent notamment du côté des banques, afin de faciliter la gestion des moments difficiles pour les petites entreprises.
Je tiens tout de même à être un peu moins optimiste - ou... grandiloquent, aurais-je presque envie de dire - que Mme von Arx, car je ne suis pas certain que ce montant de 10 millions mis à disposition de la Fondation ainsi que l'avance de trésorerie suffisent à faire passer les moments difficiles aux entreprises genevoises. En effet, le changement de conjoncture avec un retour à des jours meilleurs prend un certain temps. De plus, les questions de liquidités des entreprises ne sont pas forcément qu'un problème conjoncturel aujourd'hui; il y a aussi le temps de traitement des dossiers. D'ailleurs, il va certainement falloir choisir les entreprises que l'on va aider parce qu'on les estime viables; on n'en soutiendra pas d'autres - car on les estime moins viables, à tort ou à raison - pour ne pas prendre trop de risque. Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que ce n'est pas seulement avec un projet de loi comme celui-ci que l'on va sauver toutes les entreprises genevoises. Cependant, il vient en plus de ce qui existe.
Concernant les crédits bancaires, j'aimerais tout de même vous dire ceci, Monsieur Catelain: certes, les banques, surtout la Banque cantonale, prétendent que les prêts bancaires sont accordés aux entreprises sans problème particulier... Sauf que l'on joue sur les mots, et on le sait très bien: les crédits bancaires sont accordés aux entreprises qui répondent à toutes les garanties habituelles de mise à disposition de liquidités ! Donc en gros, avec ceinture et bretelles, si vous avez 120% de garantie et une existence d'une certaine durée, on va vous prêter de l'argent; mais dès que vous êtes un peu en dehors de ces normes, c'est extrêmement difficile. Et si des entreprises sont très saines et existent depuis longtemps, cela ne veut pas dire que d'autres, qui le sont beaucoup moins, ne fournissent pas de travail et qu'il ne faut pas les aider ! (Brouhaha.) Pour moi, la Fondation d'aide aux entreprises sert à pallier les lacunes du système bancaire ou le manque de souci quant au soutien à l'économie, notamment aux petites entreprises et aux indépendants. Voilà pourquoi cette mesure vient en plus, et je pense qu'il faut l'encourager.
Les socialistes ont un bémol à mettre sur l'alinéa 2 de l'article 7A, qui vise à limiter dans le temps l'avance des trésoreries. On n'en fera pas un amendement, mais j'aimerais seulement expliquer pourquoi nous, socialistes, sommes perplexes quant à cette restriction temporelle. L'idée de limiter à une année l'avance des trésoreries ne correspond pas vraiment à quelque chose de réel, si ce n'est au souhait du législateur ou d'une majorité du Grand Conseil de dire: «Cette aide ne doit pas être fournie ad aeternam.»
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. Oui, Monsieur le président. Pour les socialistes, ce serait bien mieux de dire que la FAE dispose d'un instrument supplémentaire qui permet de prêter de l'argent aux entreprises, et quand elle n'a plus besoin de cet instrument, elle arrête de l'utiliser. Mais c'est la FAE qui le gère.
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes soutiennent ce projet de loi. J'invite encore tout le monde à bien lire le rapport de M. Jornot, qui est excellent et digne de Victor Hugo. Je l'en félicite !
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je soutiendrai bien évidemment ce projet de loi, comme tout le monde, mais je me pose tout de même des questions. Peut-être que le Conseil d'Etat pourra y répondre.
J'aimerais tout d'abord savoir à qui l'on va s'adresser pour bénéficier de cet argent, et à quel taux. En effet, j'ai pu lire dans le rapport que l'on ne veut pas fixer le taux dans la loi. Mais cela me paraît tout de même important, car, si c'est pour se retrouver au même taux que dans une banque, ce n'est pas franchement utile. (Brouhaha.)
J'aimerais aussi savoir comment l'on va procéder quand une entreprise est considérée comme persona non grata auprès des banques parce qu'elle a, par le passé, été victime de vol, par exemple, et que, à cause de cela, elle a énormément de peine à se remettre financièrement. Cela donne lieu à un cercle vicieux: puisqu'elle ne peut pas honorer ses paiements, il y a des poursuites. Or, dans les banques, vous savez qu'on n'aime pas prêter de l'argent à des gens faisant l'objet de poursuites. Et une entreprise qui a malheureusement fait faillite une fois est quasiment interdite en matière bancaire. (Brouhaha.)
Qu'advient-il d'une entreprise qui a plus de 100 000 F de dettes et qui est créancière de plus d'un million, comme on peut l'imaginer pour une entreprise saine ? Comment, dans ce cas-là, va-t-on faire pour l'aider avec 80% ? Je comprends bien qu'une somme de 100 000 F ne se trouve pas sous le sabot d'un cheval, mais ce n'est pas forcément la panacée.
J'aimerais également savoir quel pouvoir a la Fondation de faire payer les débiteurs qui mettent plus de deux ans pour régler les factures des entrepreneurs; on sait que dans le secteur du bâtiment, pour la plupart des cas, c'est un problème récurrent, les architectes, ingénieurs et autres ont énormément de mal à payer les factures des entrepreneurs qui ont achevé les chantiers depuis bien longtemps. Quel pouvoir a cette Fondation de, éventuellement, relayer un appui ? En effet, c'est souvent là que le bât blesse: l'entreprise est saine, comme on l'a dit, mais quand elle a des centaines de milliers de francs de créances parce que les factures ne sont pas honorées, comment peut-on faire ? Si une entreprise met deux ans pour vous payer, vous comprendrez bien qu'en une année vous n'allez pas pouvoir régler la situation. Ainsi, vous allez lui prêter de l'argent pendant un an, mais elle ne va pas pouvoir vous rembourser. Dès lors, une entreprise qui ne peut pas s'adresser à une banque a-t-elle la possibilité, éventuellement ultérieurement, de refaire une demande si cela est nécessaire...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.
Mme Sandra Borgeaud. ...ou envisagez-vous la fermeture de l'entreprise, qui compte peut-être une centaine d'employés ? Si le Conseil d'Etat peut répondre à toutes ces questions, cela me rassurerait, car je n'ai pas trouvé toutes les réponses dans ce projet de loi, Monsieur Catelain.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je commencerai par remercier le rapporteur d'avoir pu, avec tant de célérité, rédiger un rapport entre le vote d'hier et une arrivée tardive en train tout à l'heure; si j'ai bien compris, les trains de Lucerne avaient une fois de plus un peu de retard. J'aimerais également remercier votre Bureau et vous-même, Monsieur le président, d'avoir accepté, non pas de faire une entorse, mais d'avoir mis le maximum de votre énergie pour que nous puissions, ce soir, voter ce projet de loi qu'un certain nombre de petites et moyennes entreprises ou industries attendent à Genève afin de pouvoir passer un cap, car c'est de cela qu'il s'agit. Enfin, j'aimerais bien sûr remercier votre Conseil - je le fais par anticipation - de voter très largement et peut-être unanimement ce projet.
Il convient de rappeler - j'essaierai d'être bref - la chronologie, de telle manière que l'on comprenne quel sens a ce projet de loi, qui a d'ailleurs été rebaptisé - le rapporteur ne l'a pas précisé - pour bien montrer à quoi il sert. Ce projet de loi se situe dans le contexte d'une crise financière majeure et initiale qui intervient dans un pays où il y a de la spéculation immobilière - tout cela prend la forme des subprimes et de leur terrible aventure - et dont les ménages, parallèlement, sont très endettés. Partant de cela, la crise financière fait que l'argent ne circule plus. Les banques ne font plus confiance à leurs clients; elles ne se font plus confiance entre elles; à l'intérieur même des banques, d'un secteur à l'autre, les gens ne se font plus confiance... Et c'est cet effet boule de neige qui précipite une crise financière mondiale en quelques semaines, pour ne pas dire quelques jours ! Puisque c'est tout de même au début du mois d'octobre de l'année dernière qu'un certain nombre d'établissements bancaires font faillite, brutalement, alors même que la veille ils étaient cotés par des organes de cotation, dont on peut d'ailleurs s'interroger de la performance - performance AA - juste avant la mort de Lehman Brothers, par exemple.
Tout cela a des conséquences sur l'économie réelle. Pourquoi ? Parce que l'économie réelle impose des flux d'argent entre les clients, les fournisseurs, les producteurs, les distributeurs et à nouveau les clients. Et c'est la paralysie de ces flux d'argent qui bloque maintenant l'économie. (Brouhaha.) La profondeur, la brutalité de cette crise est tout à fait particulière, en tout cas chez nous. La raison pour laquelle la Suisse est un peu moins touchée, pour le moment en tout cas, et Genève un peu moins que d'autres cantons - pour longtemps, on l'espère - c'est que notre économie est saine et que nous ne vivons pas la spéculation immobilière. Ces deux éléments sont cardinaux.
Alors de quoi s'agit-il ? Il s'agit de procéder au tarissement d'une hémorragie. Le malade saigne, il faut comprimer le point et sans doute l'opérer, mais il n'est pas en mauvais état. On n'est pas du tout dans la situation des années nonante, où nous cumulions crise financière, spéculation immobilière et économie paralysée par une certaine vétusté des outils de production et des modes d'innovation. (Brouhaha.) C'est la raison pour laquelle ces procédés vous sont proposés ce soir dans ce projet de loi: le renforcement du dispositif de cautionnement, l'allégement des conditions posées à la prise de participations - auparavant c'était 2/3-1/3 entre le privé et la Fondation, c'est maintenant 55%-45%, donc on incite les privés en montant un peu nos taux de participation - l'augmentation des moyens de coaching, notamment, et de traitement des dossiers de la Fondation, et enfin le nouveau système, le seul tout à fait nouveau système, que constitue l'avance des liquidités.
Je ne pourrai pas, Madame la députée, répondre à l'ensemble de vos questions. En revanche, elles peuvent être posées à la Fondation, qui est là pour cela. Elle a un Conseil de fondation, des organes directeurs, des employés, qui répondent au quotidien aux questions que vous vous posez et qui lui sont soumises. Elle a reçu un peu plus de deux cents demandes depuis que nous avons instauré la «hotline» ou «ligne chaude» - je ne sais pas comment vous voulez qu'on l'appelle - de la promotion économique, comme d'ailleurs mon collègue François Longchamp a mis en place une «hotline» pour les problèmes du maintien de l'emploi. Elle est aussi extrêmement «chaude»... Mais il ne faudrait pas en rire, parce que ce sont des éléments qui sont fondamentaux compte tenu de la vitesse et de la brutalité avec lesquelles les événements sont survenus.
Encore une fois, merci à la commission de ses travaux, que je qualifierai de «préalables», qui ont permis indiscutablement d'améliorer le projet en enlevant toute suspicion de distorsion de concurrence. Merci à la Fondation d'accepter de prendre ces charges supplémentaires, dans un moment où ce n'est pas la faillite du système bancaire, comme je l'ai entendu tout à l'heure, qui pose le vrai problème. Mais c'est ce problème de confiance, qui ne peut se rétablir qu'avec un certain nombre de signes que l'on donne.
Le premier signe, vous l'avez donné tout à l'heure, s'agissant de la crise, en votant la résolution émanant du parti radical et qui est devenue la résolution de tout le parlement, parce qu'elle avait été élargie. Le deuxième élément concret est l'adoption, maintenant, de ce projet de loi d'aide aux entreprises, avec des compétences nouvelles et des montants recalibrés. Et puis, vous aurez dans la soirée, avec des urgences, d'autres éléments que vous pourrez mettre en évidence, avec un dispositif de soutien notamment aux industries de construction, en particulier aux investissements en termes d'infrastructures, qui sont nécessaires pour Genève.
Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat a confirmé mettre ce dispositif sur pied tout en s'engageant à une autre chose, qui devrait rassurer ceux qui ont émis quelques craintes: nous ne cautionnerons aucun projet s'il ne s'inscrit pas dans une perspective de durabilité. Notamment s'agissant de ce projet-là, il est prévu dans le contrat de prestations que l'Etat a conclu avec la Fondation d'aide aux entreprises que, dans le management, dans le coaching et la restructuration d'une entreprise, la dimension du développement durable soit une condition sine qua non à l'octroi de prêts. En effet, nous ne sommes pas là pour pallier une structure entrepreneuriale qui serait démodée ou moribonde. Nous sommes là, au contraire, pour lui permettre de survivre dans un moment où elle est plutôt tonique, avec la possibilité de s'adapter préalablement aux conditions qui lui seront nécessaires pour s'épanouir au sortir de la crise. Encore merci de réserver un bon accueil à ce projet.
Mis aux voix, le projet de loi 10459 est adopté en premier débat par 76 oui (unanimité des votants).
La loi 10459 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10459 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 79 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'issue du vote.)
Premier débat
Mme Loly Bolay (S), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi que nous allons voter est très important à plusieurs égards, et j'en citerai quelques-uns. D'abord, en adoptant ce projet de loi tel que nous l'avons accepté à une très large majorité à la commission des travaux, Genève va enfin pouvoir concrétiser les engagements pris vis-à-vis du concordat latin depuis bientôt quarante ans. De plus, ce projet de loi est essentiel car il y a nécessité de disposer d'une structure adéquate afin de soigner des individus malades, des personnes dont il faut s'occuper et qui doivent trouver pour cela une structure adéquate répondant à leurs besoins thérapeutiques et médicaux.
Aujourd'hui, nous le savons, il y a deux structures: d'une part, La Pâquerette, qui dispose d'un étage complet à Champ-Dollon, où environ quinze détenus ayant commis des délits très graves y sont actuellement soignés; d'autre part, il y a l'unité psychiatrique carcérale de Belle-Idée, où l'on traite également des détenus atteints de troubles mentaux aigus.
Concernant ce projet de loi, on a eu de larges discussions au sein de la commission des travaux. La première réunion s'est d'ailleurs tenue sur le site même de Champ-Dollon, avec la commission des visiteurs, laquelle, je le dis en passant, se bat depuis plusieurs années pour que l'on puisse voter cette loi et concrétiser le projet.
Il y a eu de fortes critiques à l'encontre de ce projet de loi, j'en citerai quelques-unes. Tout d'abord, on a relevé son coût élevé. C'est vrai que 108 millions représentent un coût élevé, mais il faut dire que 88 millions sont destinés à Curabilis tandis que 20 millions seront consacrés à l'amélioration de Champ-Dollon qui en a bien besoin, notamment pour réaliser une cuisine centrale, qui servira à la fois à Champ-Dollon et Curabilis, et pour construire le tunnel de liaison entre Champ-Dollon et Curabilis ainsi qu'un poste de surveillance avancé.
On a aussi critiqué l'utilisation du sol. Il faut savoir que le projet pavillonnaire qui nous a été présenté est très tendance à l'heure actuelle, puisque dans plusieurs pays d'Europe et même en Suisse alémanique on en construit pour ce besoin particulier. C'est-à-dire que l'on n'a pas affaire à des détenus dits normaux. Il ne s'agit pas de construire une prison ou un pénitencier pour ces derniers, mais un établissement pour des personnes qui ont besoin d'une thérapie spéciale, comme je l'ai dit tout à l'heure, car elles sont dangereuses pour la société. Ainsi, une utilisation du sol importante fait craindre à certains groupes comme le groupe radical - ils s'exprimeront tout à l'heure - que l'on ne puisse pas construire sur ce site une extension de Champ-Dollon, puisque sur cette parcelle se trouvent déjà Champ-Dollon et La Brenaz, et bientôt Curabilis.
Certains d'entre nous émettent également des critiques ou des regrets parce que, dans le projet initial, il y avait aussi la proposition de construire Femina, la prison pour femmes. Ce projet a été abandonné...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée. Mais vous pourrez reprendre la parole encore une fois.
Mme Loly Bolay. Très bien, Monsieur le président. Voilà donc tous ces regrets, toutes ces critiques. La dernière d'entre elles - et je vais conclure ici, mais je reprendrai tout à l'heure, Monsieur le président - concerne le manque de concours, puisqu'il était prévu à l'époque que le même architecte qui a construit Champ-Dollon érige Curabilis. Et il n'y a pas eu de mise au concours, parce qu'une convention, réaffirmée en 2005, avait été signée entre le Conseil d'Etat de l'époque et les mandataires...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée !
Mme Loly Bolay. Donc ceci explique cela. En annexe de mon rapport, j'ai joint un avis de droit qui certifie que le Conseil d'Etat a agi en parfaite harmonie avec la loi.
Je reprendrai tout à l'heure la parole, Monsieur le président, si vous me le permettez.
M. David Amsler (L). Les membres de la commission des travaux ont parfaitement mesuré l'ampleur de l'enjeu par rapport à ce projet de loi 10418, puisque nous avons consacré quatre séances de travail à son analyse. J'aimerais remercier ici le président du département des institutions, M. Moutinot, et celui du DCTI, M. Muller, de leur présence à la commission et de la qualité des présentations. Je voulais aussi remercier en particulier M. Bervini, du département des institutions, et M. Boada, qui nous a donné toutes les informations nécessaires. J'aimerais enfin remercier, pour l'accueil que nous avons reçu et la qualité des présentations lors de la visite de la prison, en particulier M. Franziskakis, directeur de la prison, et toute son équipe.
Ce projet de loi, comme l'a dit Mme Bolay, comporte deux volets: la modernisation de la prison et le projet Curabilis. Concernant le premier volet, qui représente un montant d'environ 20 millions, le besoin d'agrandissement et de modernisation des installations est avéré, le parti libéral en est conscient. Au sujet de Curabilis, nous avons bien pris note du concordat intercantonal, qui demande cette infrastructure depuis quarante ans, et de la subvention de la Confédération de 35% à ce projet. Au vu de la nécessité de l'infrastructure et du contexte intercantonal et fédéral, ce projet ne pose pas de problème à notre parti.
Restait l'épineuse question des coûts. Comme je l'ai dit, pour les bâtiments existants, nous avons bien compris la nécessité et le montant alloué à ce projet. Par contre, pour Curabilis, nous avons eu beaucoup de discussions. Le montant est d'environ 900 000 F par place; dans un premier temps nous avons été un peu surpris par ce chiffre, mais nous avons reçu toutes les garanties par des validations d'experts cantonaux et fédéraux. Grâce également à l'explication de médecins et de psychiatres, la commission a finalement accepté ce budget d'investissement et la structure pavillonnaire qui en elle-même, comme l'a dit Mme Bolay, génère des coûts importants de travaux.
Un autre aspect financier est lié aux frais de fonctionnement de cette nouvelle infrastructure. Cette dernière nécessite l'engagement de 270 nouvelles collaboratrices et nouveaux collaborateurs pour un budget annuel de 35 millions par année. Ce dernier sera bien sûr inscrit dans le budget de fonctionnement de l'Etat. Il n'était pas directement lié à ce crédit d'investissement, mais il a tout de même fait l'objet de grandes discussions au sein de la commission des travaux. Il nous a tout d'abord laissés un peu sceptiques, puis nous avons comparé ce coût à celui d'autres institutions et, après de longues explications, nous avons finalement accepté ce budget.
Par conséquent, malgré quelques sérieuses réticences sur les coûts, le besoin a été le plus fort et le groupe libéral a accepté le projet, mais avec un message: pendant toute la durée du projet, nous demandons de rester attentifs aux coûts et de procéder à toutes les économies possibles. Finalement, nous souhaitons que ce projet de loi soit un message de soutien à toutes celles et tous ceux qui oeuvrent à la sécurité de notre canton, ce qui n'est pas une mince affaire et demande un engagement de tous les instants. Pour toutes ces raisons, le parti libéral soutiendra ce projet de loi et vous invite à faire de même.
M. Damien Sidler (Ve). Concernant l'opportunité de ce projet, je crois que beaucoup de choses ont déjà été dites en 2005, lors de l'étude du projet de loi 9622. Le rapporteur était M. Hiltpold. Nous avions alors parlé de la planification pénitentiaire concordataire; on a effectivement constaté que nous avons un certain retard depuis quarante ans pour répondre aux exigences de cette planification intercantonale. De plus, les rapports de la commission des visiteurs nous rappellent chaque année les problèmes à Champ-Dollon. Et pour les Verts, il est particulièrement important de relever que des standards internationaux ne sont actuellement pas remplis dans cette prison.
Quant au programme de ce projet de loi, on peut tout de même s'étonner du compte rendu qui nous est présenté. Nous estimons qu'il est un peu partiel par rapport à ce qui avait été convenu entre notre parlement et le Conseil d'Etat en 2005, puisqu'il était notamment prévu que ce dernier nous soit présenté à nouveau avec un devis des coûts pour le bâtiment Femina. D'autres éléments ont été simplement abandonnés en cours de route, ou remis à plus tard, alors même que le magistrat en charge du département à l'époque, M. Moutinot, nous avait promis qu'il reviendrait, lors de l'examen du crédit d'investissement, avec tous les devis et que nous pourrions nous-mêmes choisir et prioriser les bâtiments et les options.
On peut aussi regretter que nous n'ayons pas prévu d'extension à ces bâtiments. Déjà aujourd'hui on a entendu en commission qu'une surélévation ne sera pas possible. Le concept pavillonnaire, on l'a vu aussi, est intéressant mais extrêmement coûteux. Nous l'avions, en tout cas les Verts, voté en 2005; nous ne reviendrons pas sur le choix effectué à ce moment-là, mais nous en supporterons aujourd'hui les conséquences: annoncé à 450 000 F, ce bâtiment coûtera 900 000 F par lit, ce qui est tout de même relativement important. Par comparaison, on peut citer d'autres montants: le bâtiment de La Brenaz, qui ne comportait effectivement pas d'infrastructures complémentaires telles que des cuisines, un accueil ou même un mur d'enceinte, coûtait lui-même 270 000 F. Alors nous nous sommes tout de même interrogés, et je suis personnellement allé voir d'autres constructions pénitentiaires. Il y a des exemples en France, où l'on arrive, semble-t-il - certes avec d'autres concepts architecturaux, avec d'autres qualités de bâtiments ou de soins - à des prix inférieurs à 200 000 F. Donc, même en imaginant que l'on double les prix par rapport aux prisons françaises, on voit que l'on se situerait à 400 000 F. Or aujourd'hui, nous en sommes à 900 000 F, ce qui est énorme.
Concernant le choix des mandataires, ce n'est, à mon avis, pas du tout le moment de polémiquer... Je constate que j'ai à peu près le même âge - j'ai fêté hier mon anniversaire, vous le savez - que le contrat passé avec les mandataires. Et je remarque que, pour la première fois, à la commission des travaux - où je siège depuis quatre ans, mais auparavant j'étais membre de la commission des travaux de la Ville de Genève - eh bien, je remarque qu'on produit des documents technico-financiers et juridiques montrant qu'il a tout de même anguille sous roche...
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Damien Sidler. Je termine ! ...sur quelques éléments de la procédure suivie et les choix opérés, qui font qu'aujourd'hui on peut vraiment se poser des questions. Malheureusement, on ne peut pas polémiquer davantage, l'urgence est là. On peut regretter qu'avec l'arrivée...
Le président. Il faut terminer, Monsieur le député ! Vous avez largement dépassé votre temps de parole.
M. Damien Sidler. ...et le changement de magistrats, malgré le discours de législature qui nous indiquait qu'il fallait restaurer la confiance, retrouver la liberté pour innover - avec des contrats de quarante ans ?! - et gouverner autrement, eh bien, les vieux démons sont tout de même réapparus...
Le président. Vous devez terminer, s'il vous plaît !
M. Damien Sidler. ...et ce que l'on va voter aujourd'hui n'a pas beaucoup changé. Nous sommes déçus, mais voterons néanmoins ce projet de loi.
M. Olivier Sauty (MCG). Je serai très bref. En premier lieu, je dirai que, même s'il s'est abstenu en commission concernant ce projet de loi, le MCG est tout à fait favorable à la réalisation d'un établissement pénitentiaire pour les détenus purgeant une peine de longue durée. Seulement, le MCG s'est abstenu au sujet de Curabilis, car il pense que ce projet n'est pas le plus approprié par rapport au but recherché. Il y a surtout deux aspects qui nous dérangent considérablement, sur le fond et sur la forme.
Sur le fond, ce qui me dérange le plus est, comme l'a relevé M. Sidler, que nous sommes liés par des accords de trente ans. Pour ma part, je trouve tout à fait inacceptable que nous n'ayons pas, en qualité de députés, notre libre arbitre et la possibilité de dire: «Nous voulons choisir celui-ci ou celui-là»... Nous sommes pieds et poings liés et n'avons finalement qu'à répondre amen ! Voilà le premier point qui me pousse à dire que ce projet n'est pas celui que j'aurais souhaité.
Le deuxième point, sur la forme, concerne le choix pavillonnaire. Je ne suis pas un spécialiste, mais quand je vois que l'on va utiliser un espace si grand pour aussi peu de cellules... A la commission des travaux, j'ai demandé s'il était possible d'obtenir les résultats visés par la loi et par les médecins dans un établissement carcéral de type bloc contenant beaucoup plus de cellules: il m'a été répondu que le type pavillonnaire était mieux ! C'est une réponse très politicienne, car on aurait peut-être très bien pu obtenir ce résultat avec un autre style d'établissement qui aurait permis d'avoir bien plus de détenus sur notre sol. Mais voilà... Quoi qu'il en soit, aujourd'hui la situation est dramatique dans des prisons.
Nous avons besoin de réaliser cette prison le plus vite possible, voilà pourquoi le MCG, qui s'est abstenu en commission, soutiendra ce projet.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, le parti radical tient à remercier le Conseil d'Etat d'avoir demandé l'urgence de ce projet Curabilis, qui représente plus de 110 millions. Il fait d'ailleurs partie du plan de relance, et on le salue. Cela a été répété, depuis plus de quarante ans, les cantons latins attendent cette promesse que Genève avait faite. Nous saluons donc l'arrivée de Curabilis, qui répond malheureusement à un besoin. Cependant, Curabilis ne va pas désengorger la prison de Champ-Dollon, je crois qu'il faut être clair ! C'est un autre projet. Cet établissement va simplement libérer trente à trente-cinq places.
Pendant tous les travaux de commission, nous nous sommes abstenus, et nous allons le faire ce soir pour les raisons suivantes. Depuis quelques mois, tant la population que les médias et les politiques sont fortement interpellés par la problématique de la sécurité. Le parti radical a déposé plusieurs motions, résolutions et pétitions concernant notamment la détention administrative. D'ailleurs, nous avons essayé hier, avec une résolution urgente, de demander la construction de 100 à 150 places de détention administrative. Or notre peur dans le projet Curabilis est que les travaux commencent et que l'on nous dise dans quelques semaines ou quelques mois: «Somme toute, votre idée de détention administrative était bonne, mais on n'a plus la place sur la parcelle de Champ-Dollon.» Et c'est bien là le problème ! Donc nous demandons de considérer nos abstentions comme positives et de faire attention, notamment dans la gestion de ce projet, en vue d'une éventuelle diminution de coûts et, peut-être, d'espaces.
Mesdames et Messieurs, pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons et nous rappelons la motion que nous avons renvoyée au département des institutions sur la planification pénitentiaire. Du reste, nous avons dit en commission que si le département des institutions nous rassurait quant à la planification pénitentiaire, nous aurions pu accepter ce projet ce soir. Voilà donc pourquoi nous allons nous abstenir.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Borgeaud. Vous avez deux minutes et trente secondes, Madame la députée.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Vu la situation actuelle et certains événements pas si lointains - nous avons tous en mémoire les graves difficultés que la prison de Champ-Dollon a connues - il n'est à ce jour plus possible de continuer ainsi, d'autant moins que le problème de surpopulation carcérale ne date pas d'hier... En effet, on ne cesse de le rappeler depuis des années. Je soutiendrai ce projet de loi parce que je n'ai pas le choix: il faut à tout prix régler à court terme ce problème de surpopulation, cela pour la sécurité des employés - et des détenus, car tout être humain a le droit à un minimum de respect.
Effectivement, ce pavillon ne contiendra pas beaucoup de cellules, alors qu'on sait qu'il en faudrait beaucoup plus pour régler cette question de surpopulation. N'aurait-il pas fallu, au moment où l'on examinait le projet Curabilis, envisager un concept d'agrandissement de la prison, ne serait-ce qu'en y ajoutant un ou deux étages supplémentaires ? Cela ne poserait pas tant de problèmes que cela et il y aurait même la possibilité de faire participer aux travaux certains détenus en fin de peine... (Brouhaha.) ...comme cela se fait dans d'autres pays. Par exemple, lors de feux de forêts, les détenus sortent et participent à des tâches d'intérêt général de la vie citoyenne. (Commentaires.) Je vois que cela fait bien rigoler, or je crois que la meilleure façon de réintégrer des détenus dans la société c'est de leur apprendre qu'il y a des règles à respecter et, aussi, de leur donner la possibilité de faire quelque chose de leurs mains et de leur tête ! Cela, en occupant leur journée, plutôt que de les laisser passer leur temps enfermés cinq par cellule à regarder la télévision ou de leur accorder une heure de promenade par jour... Sachez, même si ma proposition fait rigoler certains d'entre vous, que d'autres pays procèdent déjà ainsi. Et chez eux, ça ne fait pas rire, au contraire: des détenus demandent à être occupés, ils en sont ravis et réussissent ainsi à se sortir du mauvais monde dans lequel ils se sont plongés. Donc, je crois qu'il y a des exemples à suivre.
Quant au projet de loi, le crédit d'investissement étant de 108 000 F pour sa réalisation, je vois les mètres carrés que l'on va payer...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée !
Mme Sandra Borgeaud. Oui, je termine, Monsieur le président. Je trouve assez étrange que l'on fixe des prix aussi faramineux: on ne va pas construire des villas, on parle d'une prison. Il y a donc des choses à dire au niveau financier. Ainsi, je voterai ce projet de loi, mais pas avec grand plaisir.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Stauffer. Vous avez deux minutes et trois secondes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer (MCG). J'aimerais simplement compléter la prise de position du MCG. Nous sommes fâchés, furieux, d'être pris en otage ce soir avec un contrat qui date de plus de trente ans. Il faut savoir que nous n'avons même pas pu, nous autres députés, choisir le maître d'oeuvre ou l'architecte, puisqu'il a été défini par contrat il y a trente ans ! (Brouhaha.) Et, très franchement, il y a là un problème ! Alors, certains diront à nouveau que je dépasse les bornes ce soir... Mais il faut reconnaître, Mesdames et Messieurs, qu'il appartient au pouvoir exécutif d'avoir une vision des choses: cela fait trente ans qu'il sait que ce contrat existe ! Et aujourd'hui nous sommes pris en otage: on ne peut pas refuser la construction d'une nouvelle prison, parce que nous devons aussi penser aux conditions de travail des gardiens qui, actuellement, n'en peuvent plus. Au moment où je vous parle, il y a 540 détenus - 540 ! - à Champ-Dollon. Le taux d'occupation est de 200% ! Mais quelle est la vision du gouvernement depuis plusieurs législatures ?! Ce n'est pas seulement votre responsabilité, Monsieur Moutinot, c'est celle de ceux qui vous ont précédé dans ce département. Aujourd'hui, il y a une criminalité qui, évidemment, n'était pas telle il y a trente ans à Genève, et personne - personne ! - n'a anticipé ce problème ! J'espère vraiment qu'il va se passer quelque chose de positif à Champ-Dollon, sinon nous nous dirigeons vers une catastrophe. Comme vous le savez, Champ-Dollon est en train de devenir une bombe avec ce taux d'occupation de 200% ! Par ailleurs, je crois avoir entendu que, ce matin, il y a eu le feu à la prison de La Brenaz, à cause des détenus. Voilà ce que j'avais à relever, Monsieur le président.
M. Eric Ischi (UDC). Tout d'abord, de source bien informée, j'aimerais préciser que les deux députés UDC qui ont siégé à la commission des travaux ont fermement défendu ce projet, et je les en remercie.
Il est d'usage que l'on adresse des remerciements, des bravos, des félicitations... Une fois n'est pas coutume, je ne vais pas déroger à cette règle. J'aimerais remercier Mme la rapporteuse de son excellent rapport ! Celles et ceux qui l'ont réellement bien lu doivent penser que bon nombre d'interventions auraient pu être évitées ce soir, car toutes les explications sont données. J'aimerais également adresser un grand bravo au Conseil d'Etat de cette législature, qui va permettre de réaliser enfin ce qui est attendu depuis fort longtemps à Genève. Genève fait face - enfin ! - à ses engagements vis-à-vis du concordat latin, fait face à ses obligations et à ses responsabilités à l'égard d'une population certes difficile, mais que l'Etat a le devoir de prendre en charge.
Certains ont émis quelques bémols tout à l'heure; j'appelle cela, si vous le permettez, chercher les poux parmi la paille. Et je ne comprends pas les réactions de plusieurs d'entre vous. Lorsqu'on parle de prix, il faut savoir de quoi il est question. Cela me rappelle une grande déclaration d'une corporation très puissante à Genève: les pompiers. A l'époque, le chef des pompiers de la Ville disait toujours dans les commissions: «Mesdames et Messieurs, la sécurité n'a pas de prix, mais elle a un coût.» On pourrait presque dire la même chose dans ce domaine, où la population carcérale est aussi un problème de sécurité, pas seulement pour le personnel des prisons et les détenus eux-mêmes, mais également pour l'ensemble de la société. Vous l'aurez certainement compris, le groupe UDC votera sans réserve ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Wasmer, vous avez la parole pour une minute et vingt secondes.
M. Olivier Wasmer (UDC). J'essaierai d'être bref. Je voulais simplement ajouter à ce que mon collègue a dit que, concernant Curabilis, il ne faut pas se tromper de débat. Plusieurs ont trouvé exagéré le prix de 900 000 F pour une cellule, mais il faut savoir que ce n'est pas un EMS, comme certains députés le pensent, estimant que c'est trois plus cher qu'un EMS. Effectivement, le prix est très élevé. Pourquoi ? Simplement parce que, d'un point de vue architectural, les architectes ont dû concevoir des bâtiments non pas pour des criminels ordinaires, mais pour des criminels qui doivent suivre une thérapie. Pourquoi une thérapie ? Eh bien, ce sont des gens très dangereux, mais irresponsables. Des gens qui ne peuvent pas être mis en prison comme ils l'ont été jusqu'à ce jour.
Je salue aussi le Conseil d'Etat d'avoir réalisé ce projet, car de nombreux criminels irresponsables, au lieu d'avoir été soignés, ou ayant été peu soignés - par exemple, dans l'établissement de La Pâquerette - ont dû purger des peines dans une prison préventive, alors qu'aujourd'hui ces personnes pourront être soignées. Donc, comme l'a dit mon collègue, cette question des coûts est irrelevante. Même si le projet coûte plus de 100 millions, il faut savoir que cet argent est investi pour accueillir une cinquantaine de personnes - réduisant d'autant le nombre de détenus à Champ-Dollon - qui seront soignées et qui peut-être, suite à une thérapie, pourront un jour être réintégrées dans la société...
Une voix. Bravo !
Le président. Il vous faudra terminer, Monsieur le député.
M. Olivier Wasmer. Je crois donc que la question de coûts n'est absolument pas relevante et vous invite à voter ce projet de loi.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, c'est un sujet qui peut favoriser un certain populisme, comme on l'a entendu ce soir dans cette enceinte...
Il me semble extrêmement grave que le parti radical, alors qu'il réclame par des pétitions plus de sécurité, déplorant le manque de sécurité, tient ce soir un discours contradictoire, puisqu'il s'abstient de voter ce projet de loi. Or à quoi est destiné Curabilis ? Curabilis est destiné à des personnes extrêmement dangereuses, des détenus condamnés que l'on ne peut relâcher, même au terme d'une peine, parce que l'on doit bien évidemment protéger la société. Les drames que vous avez connus, Mesdames et Messieurs, pas plus tard que ces derniers temps en Suisse alémanique, relevaient précisément d'internement de personnes que l'on ne peut pas remettre en liberté. Alors, s'abstenir et ne pas construire Curabilis, ce n'est pas faire preuve de responsabilité en matière de sécurité !
Certes, le défaut de cette construction est que l'on aura attendu quarante ans avant de la réaliser. C'est cela qui est inacceptable ! Mais n'oublions pas que les cantons sont solidaires entre eux dans le cadre du concordat, et que Genève doit absolument respecter ce dernier. Curabilis permettra en outre de libérer des places dans les autres cantons, où des détenus purgent leur peines, et à Genève d'envoyer dans d'autres cantons concordataires ses détenus pour qu'ils y paient leur dette à la justice. Il y a le principe, en matière de détention, des vases communicants.
On nous parle de détention administrative à Champ-Dollon. Or le problème de la détention administrative est également un problème concordataire. Mais Champ-Dollon n'est pas nécessairement le meilleur endroit pour construire un établissement concordataire à des fins administratives ! Je que crois que si l'on devait construire à des fins administratives, il faudrait aussi que la justice décide de garder plus longtemps des détenus administratifs, mais cela ne relève pas de notre compétence. Ce centre de détention devrait voir le jour là précisément où il peut être plus opérationnel, à proximité de l'aéroport, et doit être une réalisation intercantonale, comme c'est déjà le cas de Frambois.
Mesdames et Messieurs, nous devons prendre nos responsabilités. Certes, c'est cher. Mais notre société doit être protégée, et ses autorités ont le devoir de protéger les citoyens contre des criminels extrêmement dangereux qui doivent être détenus durant de longues années. C'est dans ce sens que le parti démocrate-chrétien votera ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Schneider Hausser. Madame, je vous laisse trois minutes, parce que votre rapporteure a demandé une minute.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je vais essayer d'être rapide. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, nous regrettons très fortement que soient mêlés dans ce débat Curabilis et le problème actuel de sécurité dans certaines rues de Genève. L'internement et l'hospitalisation des détenus souffrant de troubles psychiques et mentaux graves a de tout temps été un souci du législatif déjà au niveau fédéral, depuis le début du siècle, mais également dans les cantons. Toujours, la question de l'enfermement des irresponsables s'est posée, et les concordats intercantonaux en matière de détention de 1963, signés de nouveau en 1984, ont attribué à Genève la responsabilité de créer cette structure, qui devra allier exécution de peine, traitement thérapeutique et sociothérapeutique. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs, l'Histoire et la durée, surtout, ont un coût ! Curabilis n'a pas été réalisé lors de la construction de Champ-Dollon, et les contrats conclus à l'époque avec une étude d'architectes de la place doivent être honorés. C'est aussi, ma foi, le respect de contrats. Peut-être pouvons-nous le regretter. Les plans, cependant, et les coûts de Curabilis tels qu'ils sont proposés ont été contrôlés par les services du DCTI et au niveau fédéral par le département de justice et police. Ces coûts ont été décrétés par ces personnes - des spécialistes de la construction, tout de même - comme acceptables.
Tout s'est différé, et des travaux, des obligations découlant de contrats nous coûtent, bien sûr. Pourtant, Mesdames et Messieurs les députés, Genève doit répondre des responsabilités prises envers les cantons latins et la Confédération, et surtout de sa responsabilité et de son exemplarité vis-à-vis des droits humains, qui sont également en jeu. Nous traitons de sécurité, véritablement, qui concerne des gens déjà jugés. A cet égard, nous avons une obligation, et Genève ne doit pas avoir honte d'oser être exemplaire - peut-être, nous l'espérons - dans ce domaine délicat. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter ce projet de loi.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Velasco, vous avez une minute et quarante-cinq secondes.
M. Alberto Velasco (S). J'estime que le rapporteur a son temps et les groupes le leur, Monsieur le président. Cela dit...
Le président. C'est ce que j'ai appliqué, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. J'aimerais intervenir dans ce débat, Monsieur le président, parce que j'ai entendu un certain nombre d'observations qui sont tout de même à la frontière de ce que l'on appelle la dignité, et je m'explique. Un détenu est privé, selon notre constitution, strictement de liberté. Tous les autres droits lui sont conservés, Monsieur le président: information, éducation, vêtements adéquats, nourriture et... la manière de se loger.
Alors, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas Curabilis qui coûte plus cher. C'est que les autres lieux de détentions ne sont pas en accord avec les normes que la Suisse s'est engagée à respecter ! L'architecte de Curabilis a fait les choses correctement. Et alors nos députés se posent la question: «Mais ces gens-là vont-ils vivre mieux que dans une villa ?» Certains ont dit cela ! Ils ont observé: «C'est moins cher de construire une villa pour ces personnes-là.» Non, mais franchement ! On donnerait en échange une villa à ces personnes-là qu'ils ne la voudraient pas ! Car la liberté vaut beaucoup plus qu'une villa pour ces personnes ! Enfermer quelqu'un dans une villa de dix pièces, il ne l'accepterait pas ! Des personnes, de surcroît médicalisées, vont passer toute leur vie là-dedans. Comment peut-on faire des remarques telles que «On pourrait diminuer l'espace des cellules pour augmenter le nombre de personnes, donc l'efficacité et la rentabilité» ?! Mais c'est à la limite de la dignité, Mesdames et Messieurs !
Par ailleurs, je tiens à dire que cela fait quarante ans que ce débat est posé et qu'il y a une majorité dans ce parlement qui est consciente de ce retard et de ce manque d'engagement qui a été pris.
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Oui, je termine. J'aimerais dire qu'aujourd'hui nous devons voter ce projet... mais à l'unanimité ! A l'unanimité ! Je ne comprends pas que, ce soir, des députés s'abstiennent. Il y a quarante-trois ans que la Suisse entière - pas Genève, la Suisse entière ! - attend du canton de Genève qu'il satisfasse les engagements pris de construire une prison concordataire. Mesdames et Messieurs, il en va de l'honneur de notre république !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Hohl, à qui il reste une minute et cinquante-sept secondes.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, pour répondre aux questions de M. Ducrot, du parti démocrate-chrétien, je rappellerai que nos critiques envers le projet se situent au niveau architectural, de l'utilisation de l'espace et de l'amélioration du projet. On ne parlait pas de sécurité, c'était à la commission des travaux.
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Bolay, vous avez une minute !
Mme Loly Bolay (S), rapporteuse. Je vous l'avais promis, Monsieur le président, je ne prendrai qu'une minute, pour dire que la Conférence latine des chefs des départements de justice et police a plébiscité le projet Curabilis le 13 mars dernier. Par ailleurs, je rappelle que, dans le cadre du concordat, 300 nouvelles places vont être construites à Bellechasse - canton de Fribourg - et à Palézieux - canton de Vaud. Cela a été relevé tout à l'heure: il y aura de la place ailleurs pour les détenus genevois.
Le problème actuellement est que l'on n'arrive plus à placer les détenus dans le concordat - et la commission des visiteurs s'est aussi rendue en Suisse alémanique - aujourd'hui, on les place hors concordat. C'est dire qu'il est nécessaire - aujourd'hui ! - de concrétiser l'engagement que Genève a pris il y a quarante ans, tant il est important de disposer d'une telle structure pour des personnes malades, on l'a dit tout à l'heure, et qu'il faut soigner non seulement pour le bien de la société, mais également pour le leur, parce qu'ils sont dangereux pour eux-mêmes aussi !
Le président. Merci d'avoir respecté la minute, Madame la députée. La parole est à M. le conseiller d'Etat Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi que vous allez voter ce soir est très important: la réalisation d'un établissement pénitentiaire de 92 places pour des détenus dangereux. C'est aussi une réponse - très partielle, je vous l'accorde - au problème de surpopulation carcérale à Champ-Dollon, puisque par la réalisation de Curabilis nous allons libérer quarante-deux places à Champ-Dollon, ce qui offrira un peu d'air. Vous allez également permettre à Genève de respecter - enfin ! - une obligation concordataire, une obligation contractée envers les autres cantons, romands en particulier, il y a de nombreuses années, et même de nombreuses dizaines d'années. Je crois que respecter enfin cette obligation est la moindre des choses que nous puissions faire.
J'aimerais apporter quelques réponses aux interrogations soulevées ce soir par les différentes interventions. Tout d'abord en ce qui concerne ce fameux contrat des années septante. Alors certes, on peut regretter trente ans plus tard de ne pas avoir été en mesure d'ouvrir à nouveau un concours ou un appel d'offres et d'opérer un nouveau choix. Je vais vous décevoir: ce n'aurait pas été le Grand Conseil qui aurait choisi le nouveau mandataire, mais le département. Cependant, nous avons dû respecter ce contrat, car un contrat, une fois signé, ne s'éteint pas du seul écoulement du temps. Il demeure valable, applicable, et nous avons dû respecter cet engagement contractuel.
Des questions ont également été posées concernant les modifications apportées au projet par rapport aux crédits d'études votés. Deux modifications importantes ont été apportées. Tout d'abord, nous avons renoncé - provisoirement - à la réalisation de l'établissement pour femme, Femina. En effet, il était prévu pour 90 personnes, alors qu'à Champ-Dollon il y a environ - cela varie évidemment d'un jour ou d'une semaine à l'autre - 20 détenues. Par conséquent, nous avons considéré qu'il n'y avait pas d'urgence à nous lancer dans la réalisation de Femina. Mais ce projet reste d'actualité, demeure à l'étude, et nous reviendrons très probablement avec un nouveau projet.
Le deuxième élément du programme qui n'a pas été réalisé est la surélévation de Champ-Dollon. Quelqu'un d'entre vous a regretté que nous n'augmentions pas la capacité de Champ-Dollon elle-même en surélevant le bâtiment. Mais imaginez, Mesdames et Messieurs, que nous procédions à des travaux de surélévation de Champ-Dollon, alors que nous en sommes actuellement au double de sa capacité originelle... Ce serait tout simplement impossible. Cela poserait des problèmes de sécurité et d'«habitabilité» de Champ-Dollon pour les détenus. Nous avons donc très sagement renoncé à surélever le bâtiment. En revanche, comme vous le savez, le Conseil d'Etat a commandé une étude à nos services pour la réalisation d'un nouvel établissement pénitentiaire, probablement dans le périmètre de Champ-Dollon. Et là, je réponds aux inquiétudes de M. Hohl sur la capacité du site actuel de Champ-Dollon à accueillir un nouvel établissement. Les études en cours, qui ne sont pas terminées, semblent démontrer que des solutions existeraient pour que l'on puisse réaliser ce nouveau bâtiment à Champ-Dollon, et ce serait compatible avec la construction de Curabilis. Donc je crois pouvoir être en mesure, aujourd'hui, de vous rassurer.
Le dernier point, primordial, est la question du coût. Ce dernier est important, et on ne peut pas comparer avec une villa ou avec une place en EMS - c'est totalement absurde - puisqu'il s'agit là d'héberger des détenus, dangereux, qui nécessitent un suivi médical. Ainsi, il n'y a aucune comparaison possible avec d'autres infrastructures. En revanche, on peut souligner - et c'est la référence qui a guidé le Conseil d'Etat pour valider ce projet et vous le proposer - que la Confédération va subventionner ce projet. Or la Confédération ne subventionne pas un ouvrage de ce type sans vérifier qu'un certain nombre de critères, notamment de coûts, soient respectés. Comme nous avons reçu le feu vert des services de la Confédération, qui ont considéré que nous étions dans le cadre financier prévu pour ce type d'établissement. Dès lors nous pouvons sereinement accepter ce coût pour la réalisation de Curabilis.
J'aimerais également, à l'instar de certains d'entre vous, adresser des remerciements. Tout d'abord à Mme la rapporteuse de la commission, qui a effectivement fourni, avec son rapport, un excellent travail dans de brefs délais. Merci, Mme Bolay ! J'aimerais aussi saluer les nombreux collaborateurs de l'administration qui ont travaillé sur ce projet. Ce dernier a été très complexe à mener, puisque nous avons dû faire coopérer les services de l'office pénitentiaire, de l'office des bâtiments, du département de l'économie et de la santé et des Hôpitaux universitaires de Genève, qui ont travaillé en très bonne intelligence. Nous pouvons leur adresser un très grand coup de chapeau.
Mesdames et Messieurs les députés, vous votez ce soir un projet de loi important, qui nous permet de respecter nos obligations concordataires et de démarrer, dans le courant de cet automne, un grand chantier dont notre économie a besoin pour une réalisation qui, comme cela a été relevé, fait partie du dispositif pour l'économie et l'emploi de Genève. Voilà aussi une excellente nouvelle.
Mis aux voix, le projet de loi 10418 est adopté en premier débat par 61 oui et 7 abstentions.
La loi 10418 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10418 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui et 8 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous sommes en débat de catégorie II: cinquante minutes, dont cinq minutes par groupe.
M. Mario Cavaleri (PDC), rapporteur de majorité. Chers collègues, c'est peu dire que ce projet n'a que trop traîné, puisque cela fait bientôt trente ans que nous parlons de cette traversée souterraine de Vésenaz. Je dois d'abord marquer mon étonnement en constatant que la «méthode Stauffer» fait des émules, puisque Mme la rapporteure de minorité est arrivée fort opportunément en remplacement. Et elle est ce soir autour de la table, étant donné qu'elle a participé aux trois séances consacrées à ces travaux. Je rappelle qu'il était pourtant d'usage dans notre parlement, dans le fonctionnement des commissions, que les députés qui remplacent ne produisent pas de rapport. Mais je pense qu'il fallait absolument que la cheffe de groupe puisse s'exprimer pour bien marquer le dogme du groupe des Verts sur tout projet dès qu'il s'agit d'un ouvrage consacré aux véhicules ! Ici, il ne s'agit pas seulement de réaliser un ouvrage utile aux véhicules privés, puisque ce projet a été amélioré de manière à pouvoir, un jour - et nous espérons que ce jour-là vienne beaucoup plus vite que selon la planification annoncée aux commissions des travaux et des transports - relier Rive à Douvaine par un tram. (Brouhaha.)
Parmi les motifs du refus du groupe des Verts, il y a le fait que l'on ne résoudrait rien avec cet ouvrage... C'est faire peu de cas des riverains, et ils sont tout de même beaucoup plus nombreux depuis une trentaine d'années puisque le village de Vésenaz s'est fortement développé. Mais apparemment, ce n'est pas une préoccupation du groupe de Verts que de prendre en compte la qualité de vie de ces riverains. Or, dans l'excellent rapport qu'il avait préparé dans le cadre du projet de loi 8662, le 14 janvier 2003, M. Hugues Hiltpold rappelait notamment les mesures prises par la Confédération pour assainir les voies à très grand trafic en bordure desquelles habite la population et le fait que ces mesures-là s'appliquaient parfaitement au village de Vésenaz. Depuis 2003, ce dernier s'est encore davantage développé et il y a donc plus de logements qu'auparavant. Mais, de cela, les Verts n'en ont cure, et c'est bien regrettable.
Ensuite, je salue notre collègue, Mme Bolay, qui a dû s'abstenir étant donné la position de son groupe, mais qui appuyait ce projet-là dans le but, qui est aussi celui de la majorité, d'essayer d'obtenir la réalisation d'un même ouvrage à la route des Nations pour aller au Grand-Saconnex. Vous connaissez la problématique, donc je ne vais pas la rappeler, mais il est des ouvrages qui non seulement sont symboliques, mais qui ont aussi une réelle utilité.
Alors ce soir, mes chers collègues, je vous demande instamment de conclure enfin et d'adopter le projet de loi, en fonction notamment du fait que la commune de Collonge-Bellerive a, une fois de plus, mis la main à la poche pour sortir tout de même énormément d'argent. Donc, il faut réaliser cet ouvrage: il est absolument indispensable pour la qualité de vie des habitants du village et pour que les transports publics puissent, en surface, desservir la population au travers de ce village.
Dernier élément, j'ai rappelé que cet ouvrage pourra recevoir un tram. Eh bien, j'espère que, au niveau de la planification, le Conseil d'Etat prendra en considération les nécessités de développer ce projet-là, tout comme j'espère que le Conseil d'Etat viendra enfin - prochainement, rapidement - avec un ouvrage identique pour la route des Nations.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'apporterai tout d'abord apporter deux précisions relatives à l'intervention du rapporteur de majorité. D'une part, il n'y a pas d'autoritarisme chez les Verts. Si j'ai suivi cet objet en commission, ce n'est pas parce que je suis cheffe de groupe, mais bien parce que c'était l'un de mes premiers engagements politiques au niveau municipal et que je connaissais bien le dossier. D'autre part, dans l'intervention de M. Cavaleri, j'ai entendu beaucoup de propos sur les défauts des Verts, quelques-uns concernant la route des Nations, mais, finalement, pas tant d'arguments que cela au sujet des qualités de la tranchée couverte de Vésenaz. (Remarque.) Vous le savez, les Verts ont une vision de la mobilité bien différente de celle de la majorité de ce parlement. Nous pensons que la mobilité individuelle motorisée n'est pas vraiment une solution d'avenir, que ce soit pour des questions d'espace, de pollution ou encore de disponibilité des ressources.
Mais, loin d'être une simple opposition de principe à une nouvelle infrastructure routière, notre opposition au projet de traversée de Vésenaz est un non à un gaspillage d'argent public. Pour cet ouvrage, on veut dépenser 56 800 000 F afin de passer d'environ 30 000 véhicules par jour, actuellement, à 20 000 par jour, soit 15 000 venant de la route d'Hermance et 4000 ou 5000 véhicules résiduels sur la route de Thonon.
Le trafic ne va pas diminuer avec les années. Vésenaz est un pôle régional, comme il a été relevé dans l'exposé des motifs de ce projet de loi. Il y a de nombreux commerces et infrastructures à Vésenaz, et le village est quasiment conçu pour attirer le trafic avec pas moins de quatre grands centres commerciaux qui comptent chacun un parking. De plus, un parking communal a été construit il y a quelques années.
Les éventuels avantages, très marginaux, ne profiteraient qu'à environ 500 personnes: les riverains directs de la traversée. Pour toutes les autres personnes, on peut simplement attendre une augmentation du trafic. Cela représente donc, si l'on fait une division très simple, un coût de 112 000 F par habitant qui bénéficierait de cet ouvrage ou encore 112 000 F par mètre de tranchée. En termes de gestion saine des finances, on peut tout de même se poser quelques questions ! Non seulement les avantages seront faibles à Vésenaz, mais, en plus, cette tranchée créera un appel d'air et amènera plus de trafic au centre-ville, ce qui est exactement ce que l'on essaie de combattre depuis des années. Je crois que tout le monde est d'accord ici pour dire que le centre-ville est saturé par le trafic, et que le but n'est pas d'y attirer plus de voitures.
Voici les solutions que nous vous proposons. Si nous sommes prêts à dépenser près de 60 millions, investissons-les dans un prolongement du trolleybus de Genève-Plage en direction de Vésenaz et de la Pallanterie, construisons des parkings d'échange à la Pallanterie et à la douane d'Anières, créons une vraie plateforme d'échange, par exemple sur internet, pour le covoiturage, ce qui permet sans aucune infrastructure de diminuer fortement le nombre de véhicules qui circulent sur nos routes. Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à refuser cette solution périmée et à investir dans une mobilité d'avenir.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. David Amsler (L). J'aimerais tout d'abord remercier M. Cavaleri de la qualité de son rapport et Mme Flamand d'avoir respecté le délai de dépôt malgré les arguments fallacieux contenus dans son rapport de minorité. (Exclamations.) J'aimerais aussi remercier les trente-deux députés libéraux, radicaux, PDC, UDC et MCG, soit environ les trois quarts de ce parlement, qui ont compris que ce projet concernait un pôle régional de 50 000 habitants de notre canton. Les Verts, et dans une moindre mesure les socialistes, ne l'ont pas compris, et c'est regrettable. Puisque le tram se fera un jour, c'est presque le même projet qui est en cours à Meyrin, financé par le budget des trams et piloté par le conseiller d'Etat Vert, M. Cramer. Je vous laisse apprécier la contradiction !
Par ailleurs, j'aimerais vous informer que la commune de Collonge-Bellerive a, le 4 mai dernier, voté à une écrasante majorité le crédit complémentaire de 8,5 millions - les autorités de la commune sont là et je les remercie. Non seulement la commune de Collonge-Bellerive soutient ce projet, mais aussi toutes les communes d'Arve et Lac, de même que les habitantes et habitants, bien entendu.
Je ne reviendrai pas sur l'exposé des motifs de ce projet de loi. Je rappellerai seulement que, par quatre fois, les conseillers d'Etat Joye, puis Moutinot et enfin Cramer ont promis la réalisation de ce projet, avant de l'empêcher. Tout d'abord, il s'agissait de reporter les crédits de la traversée de la rade sur la traversée de Vésenaz, courrier du Conseil d'Etat à l'appui. On connaît la suite... Puis, en 1998, le projet de loi pour le financement de l'ouvrage a été retiré par M. Moutinot, prétextant un manque de financement. Finalement, M. Cramer a d'abord inscrit le projet dans le fonds d'urgence, pour ensuite le retirer, prétextant un manque de financement, ce qui était totalement faux, puisque ce fonds d'urgence finançait les projets à raison de 50%. Et, cerise sur le gâteau, dans le projet d'agglomération, ce projet est déclassé par la Confédération, car le fonctionnaire fédéral qui a procédé à l'analyse du projet d'agglomération n'est autre qu'un ancien employé du département du territoire.
Mme Flamand rapporte qu'en 2006 j'avais mentionné que le projet avait reçu le feu vert. En effet, le Conseil d'Etat l'avait confirmé à la commune. En 2003, M. Barrillier empoigne le problème et rédige la loi 8662 pour soutenir l'emploi. Merci d'avoir fait cette démarche à l'époque. La volonté du parlement s'était clairement exprimée et a été bafouée depuis.
En ce qui concerne le parking des Rayes au coeur du village de Vésenaz, il a été réalisé par la commune pour les habitants du village, et les parkings de proximité sont indispensables à la survie d'une activité économique. Je crois que vous faites un peu feu de tout bois, et cela vous dessert.
Je terminerai par la question du carrefour à feux, qui semble vous perturber, Madame Flamand. Vous produisez dans votre rapport un échange de correspondance à ce sujet, datant de 2002, entre la DGM - Direction générale de la mobilité - et la commune. Sachez que le souhait des autorités de l'époque était de coupler deux feux piétons de part et d'autre du carrefour pour interrompre le flux des véhicules. La DGM a tout d'abord refusé, redoutant des files d'attente interminables. Et depuis 2002, la DGM n'a plus jamais répondu, sachant que toute mesure à feux est parfaitement irréaliste. Ainsi, la tranchée couverte est la seule solution au problème posé.
Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à réitérer mes remerciement à celles et ceux qui soutiendront ce projet. Suite au vote de ce soir - j'espère - c'est un important projet pour toute la rive gauche qui se réalisera, et qui fait également - enfin ! - partie du plan de relance du Conseil d'Etat pour soutenir l'emploi dans notre canton. J'aimerais encore remercier en particulier M. Mark Muller de son soutien à ce projet. Les 50 000 habitants de la rive gauche s'en souviendront prochainement. En résumé, vous l'avez compris, le groupe libéral soutient ce projet de loi et vous invite à en faire de même.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Anne Mahrer (Ve). Je commencerai par une petite précision. M. Jornot, qui tout à l'heure a présenté son excellent rapport pour la commission de l'économie, était remplaçant.
Mesdames et Messieurs les députés, pour les Verts, s'il y a une chose à enterrer ce soir, c'est bien ce projet de loi. Soyons sérieux ! Il s'agit de 60 millions pour recouvrir 500 mètres de route, sans diminuer le trafic automobile et son cortège de nuisances ! C'est 60 millions pour une tranchée couverte qui offrirait des avantages aux habitants de la région Arve et Lac, Trois-Chêne inclus, attirés par ce nouveau pôle régional de Vésenaz... Mais quels avantages, Mesdames et Messieurs les députés, si ce n'est de venir grossir le trafic en surface et en direction de la ville ?
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est d'un autre temps, à des années lumière du développement durable. Ces 60 millions doivent être investis dans des parkings d'échange en amont, comme l'a très bien mentionné Mme Flamand dans son rapport, et des lignes de bus performantes pour toute la région. Investir 60 millions dans un tel projet cautionnerait un développement qui a montré ses limites et mené à une crise économique, financière et environnementale. Les Verts soutiennent bien entendu des investissements pour relancer l'économie, pour autant qu'ils répondent aux exigences du développement durable. A l'évidence, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi ne répond à aucun de ces critères. Par conséquent, nous vous invitons à rejeter ce projet de loi.
Une voix. Bravo Anne ! (Applaudissements.)
M. Jacques Jeannerat (R). Mesdames et Messieurs les députés, à entendre les opposants à ce projet de loi, on croirait assister au grand retour du tout-voiture. «Ce projet de loi est d'un autre temps», dit Mme Mahrer. Non, je ne crois pas; au contraire ! A l'heure où Genève reconstruit son réseau de trams, ce projet de loi est simplement un aménagement utile. En effet, il améliore la qualité de vie dans un village comme Vésenaz... (Remarque.) ... la sécurité des habitants, en particulier des enfants de ce village, et la fluidité du trafic. Oui, il est utile aux gens qui, pour des raisons professionnelles ou pour une question de logement, doivent transiter par cet axe important, qui est tout de même une pénétrante, afin d'accéder à la ville. C'est important. Il améliore la fluidité des transports publics aussi: comme l'a dit M. Cavaleri tout à l'heure, les véhicules des TPG, pour l'instant des bus, à l'avenir peut-être un tram, pourront tout à fait bénéficier de l'augmentation de la fluidité du trafic, puisque les transports publics passeront en dessus. Je crois que c'est un aspect important.
Cette traversée de village fait partie d'un groupe de trois projets, avec la traversée du Grand-Saconnex et celle Meyrin qui est en train de se réaliser, poursuivant le même objectif. Il ne s'agit donc pas de construire de nouvelles routes dans tout le canton, mais simplement, avec ces trois aménagements - trois seuls aménagement, il n'y a pas d'autres projets à Genève actuellement pour améliorer la traversée de localités ! - d'améliorer des axes de communication, des infrastructures qui existent déjà.
Mesdames et Messieurs les députés, les radicaux ont toujours été attachés à la complémentarité des transports. Depuis plusieurs législatures, ils soutiennent le réaménagement du réseau de trams. Ils soutiennent aussi - sans limite - le projet CEVA, dont ils ont même été l'un des moteurs. Donc nous sommes également attachés à la complémentarité des transports. Or, l'amélioration de cette pénétrante par une tranchée couverte pour traverser le village de Vésenaz fait partie de la complémentarité. Je suis attaché personnellement à cette notion de complémentarité, comme la majorité des Genevois puisqu'ils l'ont figée il y a quelques années dans la constitution cantonale en demandant justement la complémentarité des transports.
Enfin, cette traversée de Vésenaz s'inscrit dans une suite logique de ce que nous avons déjà décidé quelques années auparavant, puisque nous avons construit un P+R sous cet axe dans le quartier de la Nautique. Donc, au fond, cette amélioration de la fluidité sur cet axe va de pair avec le parking que nous avons construit.
Par conséquent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir ce projet de loi. Quant aux Verts et aux socialistes... De grâce ! Cela fait des années que l'on vous demande d'améliorer la mobilité dans ce canton ! Nous avons voté, je le répète, tous les crédits pour les trams ! Alors, ayez au moins la pudeur de ne pas vous opposer et de vous abstenir pour ce petit projet. Merci ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous devrions pouvoir terminer les débats concernant ce projet de loi vers 19h15, si vous êtes d'accord. Ainsi, nous traiterions cet objet en une fois - je crois que c'est beaucoup mieux - puis nous pourrions reprendre à 20h45 avec un nouveau sujet. La parole est à M. Forni. (Brouhaha.)
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, mathématiquement, concentrer deux tiers du trafic, qui représentent le passage de plusieurs dizaines de milliers de véhicules par jour sur un axe, et le dégager d'un goulet d'étranglement en créant cette traversée souterraine, tel est simplement le projet que nous analysons ce soir dans le cadre de ce crédit complémentaire. Ce projet permet et maintient en surface une circulation pour environ un tiers des véhicules, qui rejoindront l'autre axe, c'est-à-dire un axe intercommunal en direction d'Hermance et du CESCO, hôpital qui fait besoin pour de nombreuses personnes et qui nécessite des transports particuliers.
Il est vrai que ce projet associe plusieurs nouveautés, à savoir cette possibilité de l'intégrer au tramway dans un avenir plus ou moins proche. Ce plan d'infrastructure routière et ces nouveaux tracés permettront de donner un nouvel élan au village de Vésenaz en repensant une partie de son urbanisation et de son paysage et, aussi, en réaménageant un cadre de vie de qualité. Ce type d'objectifs est poursuivi par d'autres communes à Genève et permet des actions échelonnées dans le temps, d'anticiper les besoins, d'orienter les projets, de codifier les moyens financiers - ce que nous faisons ce soir - et, finalement, de coordonner ces actions dans le cadre d'un canton, de communes, et également d'un projet d'agglomération franco-valdo-genevoise !
A partir de ces éléments, il est tout de même intéressant de voir le temps qui s'est écoulé. Le 4 avril 2003, un certain esprit s'était dégagé de la loi 8662. Cette dernière devait déjà financer ce projet de tranchée couverte, améliorant circulation et liaison, réduisant nuisances en termes de bruit, de vibrations et de pollution, mais améliorant aussi la mobilité et, surtout, réduisant les risques qui découlent de ce trafic routier qui représente plusieurs dizaines de milliers de véhicules par jour !
Il est vrai que l'histoire et l'épaisseur du dossier - et je me suis permis de le reprendre de A à Z pour présenter ce petit exposé ce soir - sont intéressantes et démontrent bien que cette vision stratégique s'est embourbée, non pas dans des paramètres techniques tels que vitesse, tonnage ou pente, mais face à une vision politique avec ses zones d'ombre. Revenons un peu sur un certain détournement de programmes financiers, alors que les décideurs de Berne mettaient à disposition plusieurs centaines de milliers de francs, voire des millions ou des milliards. Revenons un peu sur le hit-parade des projets prioritaires de Genève, allant de la rive droite, secteur Nations-Grand-Saconnex, en passant bien sûr par l'éternelle, contestable et contestée traversée du lac de Genève... Ce projet sera paralysé aussi par les ballets traditionnels de la démocratie, allant de la «recourite» au complément d'étude sur l'environnement. Et puis, l'interpellation du député Barrillier, du 2 mars 2004, rappellera cette détermination du Conseil d'Etat de faire avancer le projet, malheureusement en utilisant non pas la méthode du lièvre, mais celle de la tortue. Et ce projet sera également autopsié par Mme Flamand en mai 2006 dans une interpellation redoutant l'ampleur du surcroît financier, qui permettra bien sûr d'oublier qu'une partie de ces frais était imputable au développement des transports publics à Genève, et notamment du projet du tram.
Eh bien, après cette longue gestation, ce projet de traversée de Vésenaz revient devant notre parlement avec une demande de crédit complémentaire devant couvrir les adaptations techniques nécessaires, leur renchérissement, et compenser aussi la part financière qui était attendue de la Confédération. Certains millions ont disparu, d'autres sont arrivés, notamment avec la contribution des SIG, et nous aboutissons donc actuellement à un projet efficace et qui tient la route !
Concernant les motifs, ainsi que cela a été relevé dans l'excellent rapport, Vésenaz joue un rôle de pôle régional pour environ 50 000 habitants - et j'en fais partie. Or j'ai toujours une certaine forme d'urticaire lorsque j'entends que l'on veut limiter les possibilités de se déplacer, face à une commune, celle de Collonge-Bellerive, qui offre non seulement des zones résidentielles, mais aussi commerciales et hospitalières, comme je l'ai dit tout à l'heure, et où l'on vit correctement !
Ce carrefour est indispensable pour la rive gauche, puisqu'il est situé sur l'axe Genève-Thonon et qu'il s'ouvre sur le Chablais. Mais c'est un aussi un village qui doit se sécuriser et promouvoir la mobilité douce, y compris les cyclistes et les piétons. Mais je vous défie, actuellement, de vous déplacer le long de l'axe qui mène à Anières depuis Vésenaz, si nous ne diminuons pas le trafic. Et je vous défie également d'apprécier la fluidité - au plutôt l'insuffisance de fluidité - des TPG, qui font les frais des embouteillages tous les jours, matin et soir.
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Michel Forni. Je vais terminer sur ce point. Dans ce contexte, nous sommes donc face à une amélioration de la sécurité pour les piétons - pour les paroissiens aussi, puisque, lorsqu'ils sortent de leur chapelle, ils se font écraser. Et puis, nous sommes aussi face à un texte qui analyse des impacts de scénarios. (Remarque de M. Etienne Barrillier.) Non, Monsieur Barrillier, ce ne sont pas des catholiques: c'est une chapelle protestante... (Brouhaha.)
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député !
M. Michel Forni. C'est la raison pour laquelle je vous demande de souscrire à ce projet de la commune de Collonge-Bellerive, qui va décharger ses axes, et de confirmer que l'enjeu n'est pas seulement communal, mais également intercommunal. Voilà pourquoi je vous demande de faire bon accueil à cette loi.
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Scheider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, chacun ici défend des intérêts bien différents. Il y a les habitants de la ville, ceux de Vésenaz... et encore, pas tous ! Parce que, même à Vésenaz, des habitants ne sont pas de l'avis exprimé par la majorité ici, et il y a les pro-autos, les pro-transports publics et mobilité douce. Où, alors, trouver la vérité ? Peut-être auprès des instances techniques neutres, telles que la Confédération - sortons même du canton. Mais alors, que se passe-t-il lorsque ces instances relèguent ce projet en catégorie C, au bas de la pile ? Eh bien, on joue à la genevoise ! Et ceux qui ont la majorité ont raison. Dommage ! Dommage pour les visions d'avenir de la ville et de la mobilité. Tout à l'heure, comme il a été dit précédemment, un projet de loi dépassé en termes de mobilité va être voté, et peu importe qu'il ne règle pas vraiment le problème de l'engorgement de Vésenaz. Pour preuve, un amendement proposé en commission demandait qu'une fois le tunnel réalisé les TPG aient une priorité en surface: «irréaliste», «irréalisable», avez-vous répondu.
Quand vous prévoyez que ce tunnel va fluidifier le trafic, c'est une manière sympathique de dire qu'encore davantage de voitures arriveront plus rapidement au centre-ville. Par ailleurs, vous oubliez d'indiquer que des membres de votre parti et de la commission des travaux ont déjà proposé - et qu'ils ont au frigo - deux autres magnifiques grandioses projets pour la voiture... Rappelons ne serait-ce que le parking du Jardin anglais et le parking nommé «Clé-de-Rive» sous le rond-point de Rive. Peut-être alors que quelques habitants de Vésenaz, pour un moment, auront une vie agréable. Mais ce qui est certain, c'est que des milliers d'habitants des Eaux-Vives et du Glacis-de-Rive vont, eux, souffrir de l'arrivée facilitée de centaines, voire peut-être de milliers de voitures par jour, avides de passages et de parkings. Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste refusera ce projet.
M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, pour le groupe UDC, l'important dans cette affaire est que tout le monde sera gagnant. (Remarque.) Le trafic de transit sera fortement fluidifié ! Les transports publics cesseront de perdre du temps dans les bouchons et en recouvreront sur leur parcours. Dans le fond, le plus important, ce sont les habitants de la commune: ils y gagneront en qualité de vie ! (Commentaires.) Oui, Mesdames et Messieurs les députés, ce sont les habitants... (Brouhaha.) La rapporteuse de minorité dit: «Seuls 500 habitants en seront bénéficiaires»... Mais je suis désolé ! Et ces 500 habitants apprécieront de voir à quel point vous leur refusez ce droit d'y gagner en qualité de vie !
Je profite ici de féliciter la commune et de la remercier d'avoir, avec ce crédit de 8 millions qu'elle a voté pour pallier la subvention fédérale, relancé ce projet. Quand parlez de gaspillage, j'aimerais vous rappeler que vous avez, il n'y a pas si longtemps que cela, fait des pieds et des mains afin que passe un crédit de 9 millions pour une passerelle au Bachet, qui ne sert absolument à rien !
Une voix. Ce n'est pas vrai ! (Brouhaha.)
M. Stéphane Florey. Elle ne sert absolument à rien ! (Applaudissements.) J'habite dans le quartier et je passe régulièrement devant: il n'y a même pas un vélo ! (Commentaires.) Il n'y a même pas un vélo qui l'emprunte ! (Exclamations.)
Le président. Silence, s'il vous plaît ! Laissez parler l'orateur !
M. Stéphane Florey. C'est là que vous gaspillez les deniers publics ! (Commentaires. Brouhaha.) Vous gaspillez de l'argent avec des projets qui ne servent à rien du tout !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Morgane Gauthier.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Tout d'abord, je constate ce soir que si plus d'habitants de la rue des Deux-Ponts ou du boulevard du Pont-d'Arve... (Brouhaha.) ...avaient été élus et se trouvaient dans notre hémicycle, c'est d'abord par ces routes-là que l'on commencerait à faire quelque chose.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Morgane Gauthier. Par ailleurs, je me suis baladée sur le site informatique de la commune de Collonge-Bellerive: de quoi parle-t-on à la première page ? De développement durable ! Alors il y a peut-être des problèmes d'acceptation de termes, des problèmes de négociations... Il faut peut-être que l'on se mette d'accord sur ce que cela signifie. Mais dépenser près de 60 millions pour 600 mètres de route et pour le bénéfice de 500 riverains est un calcul plus que discutable. La commune, si elle veut se payer son joujou, peut cependant le faire ! Elle en a les moyens: en 2008, 40 millions de francs, dont un bénéfice de 10 millions de francs ! Pourquoi les habitants de cette commune eux-mêmes ne se paient-ils pas ce joujou dont ils ont tellement envie et qui respecterait prétendument la qualité de vie de chacune et de chacun ? Pourtant, en amont et en aval, le chemin piétonnier des enfants - puisque l'on a parlé d'eux - qui se rendent à l'école n'est absolument pas sécurisé. (Commentaires.) Donc, avec la question des centimes additionnels excessivement bas et la capitalisation de la commune, qui se permet de mettre de côté autant de millions de francs, on peut vraiment s'interroger sur sa capacité financière et ses possibilités d'investir pour une part plus grande dans ce projet.
Je conclurai en parlant des interventions des autres députés. M. Jeannerat dit que 50 millions, c'est un petit projet. Mais, sur des dépenses de subventions de 500 000 francs pour des associations, je l'ai entendu dire que c'étaient des budgets énormes pour ces dernières... Il me semble que nous n'avons pas la même notion de ce qui est un petit ou grand projet, petit ou grand budget ! Et enfin, M. Forni parle de défi. Or il me semble que le défi pour l'avenir est que la Suisse respecte ses engagements de diminution de CO2 et qu'elle soit toujours à la pointe des pays respectueux de l'environnement. C'est de moins en moins le cas aujourd'hui, et on en prend encore moins le chemin ce soir avec le vote du crédit de cet ouvrage et sa réalisation.
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.
Mme Morgane Gauthier. Nous vous appelons fermement à voter contre ce crédit et à vous battre pour que les habitants de ce canton ne doivent pas payer pendant des années pour un manque de solidarité, alors que la commune a largement les moyens de financer son joujou. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Chatelain. Vous avez deux minutes et cinquante secondes, Madame la députée.
Mme Elisabeth Chatelain (S). Mesdames et Messieurs les députés, dans son intervention, le rapporteur de majorité nous a expliqué que nous n'avions rien compris. Effectivement, il y a quelque chose que je n'ai pas compris, du moins en ce qui me concerne. Est-ce que, au nom d'un plan de relance, on doit faire tout et n'importe quoi ? Le parti socialiste, clairement, répond non à un projet déclassé en catégorie C au niveau de la Confédération. Cela a d'ailleurs été dit, ce projet a un rapport coût-utilité peu justifié. Je crois que le projet a un intérêt uniquement communal, et il faut le relever.
Les arguments des partisans de ce projet sont intéressants. J'en cite quelques-uns: sécurisation du trafic, promotion de la mobilité douce, meilleure fluidité des transports publics, réduction du bruit... Je noterai en particulier encore ceci: rendre la rue au village, réduire la césure entre chaque partie du village. Or, avec ce projet, nous passerions de 35 000 véhicules par jour, à peu près, à 20 000. Pour réduire la césure dans un village avec 20 000 véhicules par jour, on repassera, s'il vous plaît ! Donc, comme rue de village, mobilité douce et calme assuré, je crois que l'on aura vu mieux...
Je vous rappelle tout de même que le parti socialiste a demandé une priorisation des transports publics dans le cadre de ce projet et que cela a été refusé ! Vos intérêts ne sont clairement pas pour les transports publics et la mobilité douce, où que ce soit. C'est la conclusion que l'on doit en tirer.
La réflexion doit se faire d'une façon globale, et non pas rester sur le plan local. On doit réfléchir au lieu d'implantation de la traversée du lac. Si par hasard elle se situe en amont de cette traversée, ce sera joyeux en dessous de Vésenaz... Je me réjouis de voir cela ! Il faut aussi prendre en compte les Communaux d'Ambilly, les communes qui se trouvent en amont, les P+R qui seront construits, le covoiturage que nous devrons mettre en place et le CEVA qui limitera les pendulaires venant de Thonon et Evian. Clairement, nous avons tous les arguments pour dire non à ce projet. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Bertschy. Vous avez trois minutes, Monsieur le député.
M. Antoine Bertschy (UDC). Je crois que la droite a largement plébiscité les 500 millions pour les transports publics sur dix ans; et lorsque nous devons voter 36 millions pour le transport individuel, nous voyons que la gauche s'y oppose farouchement. Nous constatons là qu'elle ne respecte pas le peuple, qui veut pouvoir utiliser autant les transports publics que privés.
Dans le rapport de minorité, la seule solution proposée pour réduire le trafic est... de le diminuer ! C'est une lapalissade totale ! Evidemment qu'il faut réduire le trafic ! Mais nous ne le pourrons pas tant que la population augmentera. Il ne faut pas seulement réduire le trafic, mais aussi trouver des solutions pour que les gens puissent circuler plus facilement grâce à davantage de fluidité.
Mesdames et Messieurs les députés, la rapporteure indique parmi les arguments de la minorité que l'on ne peut pas mettre 112 000 F pour chaque habitant... Je trouve lamentable que l'on ne puisse pas consacrer 112 000 F par habitant pour améliorer leur qualité de vie alors qu'on vient de voter 900 000 F pour des prisonniers. Et 112 000 F pour les habitants de Vésenaz, cela me semble tout à fait honnête. (Brouhaha.)
Non, Mesdames et Messieurs, le fond du problème n'est pas ce projet de loi: il s'agit d'un problème philosophique de déplacement. Les Verts et leurs alliés ne veulent pas de liberté dans le déplacement, ils ne veulent pas de trafic individuel, et c'est là que se situe le problème. (Brouhaha.) L'UDC est en faveur du trafic individuel, comme il est en faveur du transport collectif, mais il souhaite l'égalité entre les deux. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Favre pour trente secondes.
Mme Christiane Favre (hors micro). Je renonce, Monsieur le président.
Le président. Je donne alors la parole à M. Wasmer: il vous reste une minute et dix secondes, Monsieur le député.
M. Olivier Wasmer (UDC). Je suis toujours gêné de voir ce dogmatisme des bancs d'en face. Car en fait, quand il s'agit de voter des projets qui les intéressent, bien évidemment qu'ils nous font les yeux doux et nous amadouent afin que l'on accepte des crédits de centaines de millions pour les trams - comme l'a dit mon collègue tout à l'heure - et le CEVA. D'ailleurs, l'UDC a soutenu le CEVA parce que c'est un grand projet. Cependant, dans la complémentarité des transports, il n'y a pas que les transports collectifs. Nous sommes encore dans un état démocratique et libre, et chacun choisit librement son moyen de locomotion.
Les Verts parlent d'écologie, de calme et de respect de la qualité de vie... Alors je rigole doucement quand on refuse aujourd'hui un crédit qui permettrait à tout le village de Vésenaz de vivre enfin, après bientôt cinquante ans, dans la tranquillité ! Depuis tant d'années les citoyens de Vésenaz entendent en permanence, toute la journée, le bruit des voitures, des motos et des bus... Je ne comprends pas qu'on refuse un petit crédit de 36 millions, alors même, comme l'a rappelé mon collègue tout à l'heure, qu'on a voté un crédit pour une passerelle inutile aujourd'hui...
Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.
M. Olivier Wasmer. ...qui ne mesure même pas 100 mètres et qui a coûté 9 millions, soit 30 000 F le mètre linéaire, comme l'a rappelé mon collègue Cavaleri.
Pour tous ces motifs, l'UDC appuiera bien évidemment cette traversée de Vésenaz. Qui plus est, comme l'a dit M. Forni tout à l'heure, lorsqu'il y aura une traversée de la rade, elle permettra, le cas échéant, de relier cette structure avec le réseau autoroutier et le tunnel ou le pont.
M. Olivier Sauty (MCG). J'ai bien écouté tout ce qui a été dit ce soir. Il y a tout de même certains points qui m'ont surpris et avec lesquels je ne suis pas d'accord. Quand j'entends que ce projet est qualifié de joujou ayant vocation à servir uniquement 500 personnes, franchement, je m'interroge sur les motivations. A mon sens, l'enjeu semble plutôt cantonal - et pas communal. De plus, je vous rappelle qu'il s'agit d'un axe transfrontalier, si l'on continue un peu plus loin. On critique souvent le MCG de ne pas faire attention aux frontaliers, mais il faut relever qu'ils seront également nombreux à emprunter cette tranchée. Je ne comprends donc pas pourquoi on trouve que ce projet n'est pas bon.
Le problème que nous voyons dans cette tranchée, c'est effectivement, comme il l'a été relevé tout à l'heure, un gros débit de trafic qui arrivera au niveau de Genève-Plage. Il faudra probablement trouver des solutions pour canaliser cela, mais je ne pense pas qu'il faille en avoir peur. Il convient d'aller de l'avant et de construire cette tranchée, non seulement à Vésenaz, mais encore à de nombreux endroits où il est nécessaire de réaliser ce genre de travaux en ce canton. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous prie de soutenir cet excellent projet déposé par le parti libéral.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Velasco: vous avez cinquante-cinq secondes, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco (S). Combien ?
Le président. Des voix. Cinquante-cinq secondes !
M. Alberto Velasco. Oh ça ira, merci beaucoup, Monsieur le président ! Les habitants de Vésenaz ont effectivement le droit, comme tout le monde, à une bonne qualité de vie. Mais ceux de Genève aussi, n'est-ce pas ? Et la qualité de vie à Genève n'est pas terrible. Seulement, ce projet est mauvais ! Le projet est mauvais, d'abord parce que la trémie sort au centre du village et, ensuite, parce qu'à l'époque il était prévu que le tunnel aille aussi en direction d'Hermance. Or qu'a-t-on fait ? On a péjoré le projet ! Avant, il n'était déjà pas bon; maintenant, il est encore pire ! Et vraiment, demander aux citoyennes et citoyens de ce canton de mettre 20 millions...
Une voix. C'est 36 millions !
M. Alberto Velasco. Oui, mais avec les sommes du Conseil d'Etat et de la commune ! ...eh bien, leur demander 20 millions pour un projet péjoré, mais c'est nul, Mesdames et Messieurs ! Tandis qu'il aurait fallu mener une réflexion pour aller jusqu'à Douvaine, avec un RER par exemple. Alors la réflexion aurait été bonne ! Or le tunnel n'est même pas prévu pour accueillir un RER... Je ne mets pas en question la demande légitime de ces citoyens, mais voilà, le projet est mauvais !
Deuxièmement, on est en république, Mesdames et Messieurs ! En république ! Et l'intérêt prépondérant de la majorité, normalement, s'impose à la minorité.
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. En l'occurrence, c'est une minorité cantonale - le Grand Conseil - qui a le dessus sur la majorité de ce canton. Voilà, Monsieur le président ! Merci de votre compréhension envers le petit délai de démocratie qui m'était imparti, (Rires. Applaudissements.)
Le président. Je vous en prie ! La parole est à M. Stauffer. Vous avez trois minutes et quarante secondes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer (MCG). Eh bien écoutez, Monsieur Velasco: on va faire un CEVA numéro 2 sous la tranchée de Vésenaz ! Vous voulez mettre un RER, alors proposez un amendement et on verra si on le soutient... (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut avoir une certaine cohérence. Ce qui me désole dans ce parlement, c'est que l'on a affaire à une gauche totalement «ayato-automobiles», qui ne veut plus d'automobiles. (Commentaires. Brouhaha.) Ce sont des extrémistes anti-automobiles ! Et là où vous avez un manque de cohérence, Mesdames et Messieurs, c'est que le problème à Vésenaz ne vient pas des Genevois, ni des villageois, mais bel et bien des frontaliers ! (Brouhaha.) Mais oui ! Personne n'ose prononcer ce mot, parce que pour vous c'est un tabou ! Mais, encore une fois, la population genevoise est prise en otage... Et quand le MCG vous propose des textes parlementaires qui invitent nos amis français à construire des parkings-relais - chez eux ! - pour qu'on puisse mettre à leur disposition des transports publics, vous dites que c'est discriminatoire et vous balayez ces motions: quelle belle cohérence !
De plus, vous vous moquez des habitants de Vésenaz, puisque vous dites: «Ils n'ont pas besoin d'une bonne qualité de vie, il... (Brouhaha.) ...ne faut pas voter ce budget, et ils n'ont qu'à subir ces 35 000 véhicules par jour.» Mais dites-moi, combien y a-t-il de villageois sur les 35 000 véhicules par jour: cent, deux cents ?! Tout le reste, ce sont des frontaliers. Vous savez quoi ? Finalement, on devrait peut-être proposer une motion pour vous expatrier en France ! Ainsi vous iriez sévir en France pour faire réaliser des parkings-relais comme vous en avez fait construire aux Genevois à coup de dizaines de millions ! Pour ceux qui l'auraient oublié, je rappelle que la Fondation des parkings est en déficit de plus de 120 millions et que nous finançons ces pertes par la vente des macarons aux Genevois. En fait, votre mission d'élus du peuple est de taper sur la tête des Genevois, encore et encore... Tant qu'ils n'ont pas un vélo et une petite marguerite à la bouche, ce sont des ennemis à abattre ! Eh bien, vous êtes lamentables !
Monsieur Deneys, ce n'est pas M. Florey qui est lamentable, mais c'est bel et bien vous... (Remarque.) ...parce que cette passerelle au Grand-Lancy ne sert à rien, et vous avez jeté les deniers publics par la fenêtre ! Mais c'est vrai que vous, les socialistes, vous convoitez l'argent du riche. Laissez-moi vous dire que vous finirez par voler celui du pauvre, tant vous êtes incohérents.
En conclusion, nous soutiendrons sans réserve ce projet du parti libéral. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous avons encore cinq minutes pour voter l'entrée en matière, puis nous prendrons notre pause. Nous poursuivrons le débat ensuite, puisque des amendements ont été déposés. La parole est maintenant à Mme Flamand. Vous avez deux minutes, Madame la députée.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de minorité. Si j'ai bien compris M. Wasmer, quand l'Entente et l'UDC ont une idée, c'est un plan de relance; et quand les Verts et les socialistes ont une idée, c'est du dogmatisme. Je prends acte de cette déclaration, c'est un avis assez personnel.
C'est vraiment dommage: en plus de tous les arguments que nous avons déjà donnés, nous allons faire fi de l'avis de la Confédération, qui avait reclassé ce projet de catégorie de priorité A en priorité C, en arguant que le rapport coût-utilité était très mauvais. Encore une fois, la théorie du complot évoquée par M. Amsler, notamment dans l'exposé des motifs du projet de loi 10441, nous n'y croyons pas ! Le canton de Genève a présenté un immense projet d'agglomération et je ne pense pas que le monde entier se soit dit: «On va comploter pour bien couler cette traversée de Vésenaz.» Honnêtement, si c'est ce que vous pensez... Mais cela ne me paraît pas très réaliste.
Quant au tram, il est un peu la caution écologique de cette traversée de Vésenaz, puisqu'on nous signale que la dalle sera renforcée et qu'il pourra passer en dessus de la traversée... Certes ! Cela dit, on peut très bien construire un tram sans tranchée en dessous. Si l'on diminue la circulation, c'est tout à fait possible. Un tram est fait pour diminuer la circulation, non pas pour permettre au même nombre de voitures de continuer de passer à côté, ce qui est totalement absurde.
J'aimerais reprendre une phrase du rapport de minorité de 2003 de ma collègue Morgane Gauthier sur le même objet. Elle disait que le seul aspect cantonal de la traversée, finalement, c'est son financement. Et c'est vrai, on va simplement répondre à des intérêts particuliers, extrêmement spécifiques, et dépenser 60 millions. Non pas pour 50 000 personnes, comme je l'entends dans la salle; car, même si les habitants de Thônex seront très heureux de savoir que leur cousins de Vésenaz verront passer non plus 30 000 mais 20 000 voitures sous leurs fenêtres, cela ne va pas changer leur vie: cela va changer marginalement la vie de 500 habitants, répétons-le.
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.
Mme Emilie Flamand. Je termine, en disant que les habitants de la ville qui subissent tous les jours les nuisances du trafic apprécieront cette dépense de 60 millions et attendent certainement avec impatience le projet de loi de l'Entente qui proposera d'enterrer toutes les rues du centre-ville ! Je vous encourage encore une fois à refuser ce projet de loi absurde. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Cavaleri. Vous avez trente secondes, Monsieur le député.
M. Mario Cavaleri (PDC), rapporteur de majorité. Trente secondes ?! Eh bien ce sera très rapide. Pour répondre immédiatement à la dernière question de Mme Flamand, je peux dire que nous avons d'ores et déjà voté plus de 90 millions pour réaliser le TCOB. En ville, on va effectivement dégorger le trafic, notamment la rue des Deux-Ponts dont vous avez abondamment parlé.
Je veux tout de même rappeler que si l'ouvrage a été déclassé, ce n'est pas une question de non-reconnaissance de l'utilité, puisqu'elle a été acceptée par la Confédération, nonobstant le fait qu'il s'agit de la catégorie C. Mais pourquoi ? Parce qu'on a d'abord attribué les fonds disponibles pour toutes les infrastructures des trams ! Or combien le canton a-t-il consacré pour les infrastructures publiques des trams ces dernières années ? Plus de 500 millions ! Et combien de fonds publics depuis dix ans pour le fonctionnement des TPG ? Plus de 1,5 milliard ! Et après cela, on dira que la droite n'est pas pour les transports publics ?! Donc je vous engage vivement à mettre ces éléments dans la balance et à accepter ce projet de loi.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le conseiller d'Etat Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je prends la parole brièvement pour vous indiquer quelle est la position du Conseil d'Etat à propos de ce projet de loi émanant de députés.
Le Conseil d'Etat est favorable à ce projet de loi pour plusieurs raisons: d'une part, c'est une infrastructure de transport attendue par tous les habitants de la région Arve et Lac, et il est temps de la réaliser. (Brouhaha.) D'autre part, cette structure est inscrite dans plusieurs documents officiels: tout d'abord, dans le plan directeur du réseau routier que vous avez adopté; ensuite, elle est également inscrite dans le projet d'agglomération que le Conseil d'Etat a déposé devant la Confédération en décembre 2007; et elle a été retenue dans le projet d'agglomération par le Conseil fédéral, certes avec un degré de priorité C, alors que nous aurions souhaité un degré de priorité A, mais, sur le principe, encore une fois, la Confédération accepte ce projet.
Or dans le cadre de la consultation actuellement en cours au sujet de ce projet d'agglomération, comme vous le savez, le Conseil d'Etat a demandé expressément que la traversée de Vésenaz soit reclassée en catégorie A avec un certain nombre d'autres ouvrages, dont la route de Meyrin et plusieurs infrastructures de transports publics. Nous avons par ailleurs inscrit la traversée de Vésenaz dans le dispositif pour l'économie et l'emploi, que nous avons présenté récemment. Ce n'était pas pour nous attribuer la paternité du projet, Monsieur le député, mais tout simplement pour marquer le soutien du Conseil d'Etat à cette infrastructure.
Aujourd'hui, la question n'est pas de savoir s'il faut réaliser la traversée de Vésenaz, cette question est tranchée et une autorisation de construire est entrée en force: la question est de savoir comment il faut la financer. Et devant l'urgence à laquelle nous sommes confrontés, le Conseil d'Etat considère que l'on peut parfaitement intégrer cette part de financement dans les budgets d'investissement de l'Etat de Genève. (Applaudissements.)
Mis aux voix, le projet de loi 10441 est adopté en premier débat par 50 oui contre 28 non et 1 abstention.
Fin du débat: Session 08 (mai 2009) - Séance 44 du 15.05.2009
Le président. Avant de lever la séance, je vous informe que la commission législative est attendue à la salle de l'Auditeur. Nous reprenons nos débats à 20h45. Bon appétit !
La séance est levée à 19h15.