Séance du
vendredi 23 mai 2008 à
20h30
56e
législature -
3e
année -
8e
session -
46e
séance
M 1679-B
Suite du débat
La présidente. Nous en étions restés au point 22 de notre ordre du jour et il y avait encore quelques demandes de parole. Je passe le micro à Mme Sandra Borgeaud. Vous avez une minute et demie, Madame la députée.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). A propos de l'une des invites faites au Conseil d'Etat, je cite: «à inciter les communes à poursuivre, voire renforcer leurs efforts afin de développer des structures d'accueil pour la petite enfance en collaboration avec les entreprises intéressées», j'ai envie de dire que l'Etat doit aussi s'investir dans la création des crèches. Il peut utiliser ses propres locaux ainsi que des arcades vides afin de les transformer en crèches, ce qui coûterait déjà moins cher qu'une construction. Mais cela n'enlève pas la possibilité de construire. Et puisque l'Etat doit bâtir des logements - nous sommes en effet en pleine crise - il peut également intégrer des crèches dans les nouveaux immeubles.
Les communes ne sont pas sur le même pied d'égalité, vous le savez très bien. En ce qui concerne les finances, certaines communes arrivent à peine à atteindre le niveau zéro.
Rien de grand n'a jamais pu être réalisé sans enthousiasme. On craint la vieillesse grandissante et, comme on vit beaucoup plus longtemps, on redoute dans un avenir pas si lointain l'écart d'âge entre les personnes âgées et les jeunes. En clair, on nous dit de faire des enfants. Oui, d'accord ! Mais là où le bât blesse, c'est quand il s'agit de savoir où nous allons placer nos enfants pendant la journée lorsqu'on travaille. Rappelons tout de même qu'une maman de jour n'est payée que 4 F de l'heure, d'où la pénurie. Il faut donc bien trouver une solution, construire des crèches et augmenter le tarif des mamans de jour, car on n'a rien sans rien.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Deneys... qui n'est pas là. Un membre du groupe socialiste souhaite-t-il intervenir ? Il reste cinquante secondes.
Mme Véronique Pürro (S). Je crois que M. Deneys voulait réagir suite aux propos tenus tout à l'heure par l'une de nos collègues UDC, qui laissait entendre qu'il n'y avait pas besoin de diplôme pour garder des enfants et que les normes n'étaient pas très importantes. Eh bien, à tous ceux qui ont des enfants - et la personne qui est intervenue tout à l'heure dans ce sens-là en a - j'aimerais dire qu'il m'étonnerait qu'ils acceptent de confier leur progéniture à une crèche qui ne répond pas aux normes ou à du personnel non qualifié.
Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'on veut - et je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point - des services de qualité, c'est-à-dire des lieux sécurisés et du personnel formé, cela a un prix ! Et ce que les socialistes disent, c'est que l'on peut certes rediscuter des normes, mais tant que l'Etat ne consacrera pas les moyens nécessaires - ne soutiendra pas les communes et n'obligera pas ces dernières à développer et à construire des crèches - nous continuerons à discuter de cette problématique sans trouver de solution.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Catelain, à qui il reste une minute et deux secondes.
M. Gilbert Catelain (UDC). Sur les multiples invites de cette motion de commission il y en avait deux qui étaient importantes pour nous, à savoir inviter le Conseil d'Etat à inciter les communes à poursuivre ou à renforcer leurs efforts afin de mettre à disposition des places de crèche et, surtout, à revoir le dispositif légal et réglementaire, dont on a constaté qu'il était pénalisant.
Les entreprises qui se sont engagées dans la création de crèches d'entreprise ne sont pas très nombreuses et, au total, il existe 200 places de crèche en partenariat public-privé, abstraction faite des entreprises de l'Etat. Concernant la location de places de crèche, une seule société s'est finalement impliquée, soit Procter & Gamble.
Le Conseil d'Etat ne répond pas à la principale invite, d'assouplir la réglementation en vigueur, qui cause la pénurie et engendre une augmentation des coûts. Et du fait de cette invite à laquelle nous n'avons pas de réponse du gouvernement, nous ne pouvons pas accepter ce rapport et vous proposons de le renvoyer au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme von Arx-Vernon. Vous avez une minute, Madame la députée.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). J'aimerais juste revenir sur un élément important. Oui, les communes ont la compétence; toutefois, le Conseil d'Etat ne doit pas seulement inciter, car il détient en outre les clés qu'il convient d'utiliser pour déverrouiller un verrou important, à savoir les normes d'encadrement et également architecturales. Il ne s'agit pas de dire qu'il ne faut pas des gens extrêmement bien formés, ni qu'il faut placer les enfants dans n'importe quel contexte, mais vous, Messieurs du Conseil d'Etat, et plus particulièrement Monsieur Beer, vous avez un rôle essentiel à jouer ! Arrêtons de renvoyer la responsabilité quant à ces enfants entre le Conseil d'Etat et les communes, ce ne sont pas des ballons de foot, même si cette métaphore est de circonstance en ce moment ! Je vous en prie, les familles, les entreprises et les communes vous attendent, Monsieur Beer !
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est maintenant à M. Amsler, à qui il reste cinquante-trois secondes.
M. David Amsler (L). Je prends ces cinquante-trois secondes pour remercier d'abord le Conseil d'Etat d'avoir rédigé un rapport aussi court, puisqu'en quatre pages ce dernier a bien résumé la situation des crèches d'entreprise en partenariat avec les communes.
Pour revenir sur la conclusion, les frais de construction ne sont engagés qu'une fois, alors que c'est vraiment concernant l'exploitation que les communes attendent des simplifications.
Je profite aussi des quelques secondes qui me restent pour remercier les entreprises qui ont créé des partenariats avec les communes, car les places de crèche génèrent pour ces dernières des charges vraiment importantes - on parle d'environ 30 000 F par année. J'adresse donc mes remerciements aux entreprises qui rentrent dans ce processus, parce que je crois qu'elles ont bien compris l'intérêt qu'elles pouvaient elles aussi en tirer.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je tiens d'abord à relever que ce débat sur la petite enfance est crucial, dans la mesure où nous avons fondamentalement besoin de places, qu'elles soient offertes en structure collective ou individuelle, puisque la loi sur la petite enfance intègre aujourd'hui non seulement les crèches et jardins d'enfants mais également les mamans de jour. Il est du reste question, vous le savez, de créer un statut et d'avoir une entrée en vigueur au 1er janvier de l'année prochaine.
Ce besoin, ressenti par chacune et chacun, s'inscrit du point de vue de l'organisation dans la complexité, les paradoxes, et ce ne sont pas les grandes déclarations, aussi véhémentes qu'interrogatrices, qui vont faire oublier certaines décisions importantes. Parmi celles-ci, il y a la nouvelle loi sur la petite enfance, entrée en vigueur au 1er janvier 2004, qui prévoyait notamment une aide aux communes pour la création de places de crèche, et également de places d'accueil de façon plus générale pour la petite enfance. Or qu'en est-il aujourd'hui ? Mme la députée Pürro a évoqué tout à l'heure les 10 millions annoncés et jamais dépensés; il faut dire que nous n'avons jamais eu pour 10 millions de factures, aucune somme n'a même dépassé 2 millions, il faut le relever, ce n'était pas véritablement l'aide du canton qui était en cause, mais la construction des communes.
J'aimerais vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés - et Madame la députée von Arx-Vernon en particulier, puisque vous évoquez le football, qui va nous rassembler en juin pour une fête, je l'espère - que vous avez récemment décidé, sur demande du Conseil d'Etat certes, d'annuler tout le dispositif d'impulsion du canton. Alors je veux bien, après que vous avez voté, au nom du transfert des charges, l'annulation de ce dispositif, entendre que l'Etat ne fait rien. L'Etat n'a certes pas que ce rôle d'impulsion, mais vous et nous avons décidé de cesser d'agir à ce niveau et de demander aux communes d'intégrer totalement la charge de la petite enfance en matière de dispositif.
Mesdames et Messieurs les députés, notre compétence ne s'arrête pas là, mais j'aimerais dire que, pour le Conseil d'Etat qui s'engage à répondre à vos motions, il n'est pas question d'additionner toutes ces motions pour faire une politique d'ensemble. Ce que je vous propose aujourd'hui, au nom du Conseil d'Etat, c'est de ne pas multiplier les travaux parlementaires traitant de tel ou tel aspect du dispositif afin de dire qu'il n'y a qu'à régler ce point pour résoudre le problème. Le Conseil d'Etat vous suggère de vous présenter, d'ici à quelques mois, un rapport proposant l'instauration d'une véritable politique de la petite enfance, avec les différents rôles qui doivent être répartis entre les communes, le canton, mais également les dispositifs privés et ceux des entreprises. Oui, nous avons besoin de ces dernières; oui, si celles-ci sont destinées à s'engager pour la garde des enfants, elles doivent être encouragées, et le Conseil d'Etat souscrit tout à fait à ce procédé. Mais il n'empêche que nous demandons d'abord de pouvoir gérer dans l'ordre, c'est-à-dire selon un concept général, le dispositif de la petite enfance.
Mesdames et Messieurs les députés, je ne reprendrai pas cette déclaration générale plus tard, lorsque nous traiterons à nouveau du sujet, mais j'entends insister aujourd'hui sur un certain nombre d'aspects qui sont directement en jeu lorsqu'il s'agit d'élaborer la politique de la petite enfance.
En premier lieu, il convient de savoir ce que nous attendons de celle-ci, en dehors de la mise à disposition de places. Doit-il y avoir autre chose que du gardiennage ? Y a-t-il oui ou non une tâche éducative ? Cette question va être posée avec d'autant plus d'intensité que Genève, vous le savez, avec l'ensemble des cantons romands et suisses, s'est engagé dans un processus d'harmonisation scolaire, qui prévoit une obligation d'entrer à l'école au plus tard à l'âge de quatre ans. Nous devons donc également discuter de ce qui conduit à cette entrée à l'école à quatre ans, c'est-à-dire de l'ensemble de la politique de la petite enfance.
Le deuxième élément est celui de la formation du personnel, en suffisance et en qualité, qui demande également qu'on trouve une articulation entre les nouveaux certificats fédéraux de capacité et les formations de la petite enfance qui relèvent du niveau tertiaire.
Mesdames et Messieurs les députés, vous avez mentionné les normes. Elles vont être directement évoquées par le dispositif que nous entendons mettre sur pied pour la petite enfance. En matière d'encadrement, le nombre d'adultes et d'adultes formés par enfant est un élément qui est aujourd'hui défini réglementairement, de même que les normes de bâtiment. Le Conseil d'Etat entend vous suivre dans ce travail, mais, encore une fois, il souhaite l'inscrire dans une évolution générale que nous vous présenterons d'ici à la fin de l'année.
Je vous remercie donc de cette motion, qui permet au gouvernement d'affirmer sa politique de surveillance et de vous dire qu'il va prendre, d'ici à la rédaction finale de ce rapport, un certain nombre de contacts et engager des démarches générales. Je vais d'ailleurs rencontrer prochainement l'Association des communes, les communes suburbaines, ainsi que les entreprises désireuses d'investir, de manière à former une véritable table ronde qui nous permette de développer - l'expression est un peu gâchée - un véritable plan Marshall en faveur de la petite enfance. En effet, la population en a besoin en matière d'accueil et la prise en charge des enfants doit être de qualité, sans pour autant que la technocratie l'emporte sur l'aspect pédagogique et éducatif.
Alors, renvoyez-nous, si vous le voulez, ce rapport. Je dirai peu importe, dans la mesure où nous entendons de toute façon traiter cette question sur le fond et vous répondre par la proposition d'un dispositif, parce que vos interpellations sont légitimes et sont également celles du Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Il a été proposé tout à l'heure de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, je vais donc mettre aux voix cette demande.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 1679 est adopté par 46 oui contre 27 non.
Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1679 est donc refusé.