Séance du
vendredi 23 mai 2008 à
20h30
56e
législature -
3e
année -
8e
session -
46e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. Robert Cramer et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, David Hiler, Pierre-François Unger, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Marcel Borloz, Renaud Gautier, Mariane Grobet-Wellner, Virginie Keller, Georges Letellier, Claude Marcet, Yves Nidegger, Henry Rappaz, Brigitte Schneider-Bidaux, René Stalder et Daniel Zaugg, députés.
Annonces et dépôts
La présidente. La question écrite suivante est renvoyée au Conseil d'Etat:
Question écrite de M. François Gillet : Libre circulation des personnes et sous-enchère salariale. Lacunes préoccupantes dans le dispositif de contrôle genevois. Comment le Conseil d'Etat entend-il réagir suite au rapport alarmant de la CEPP ? (Q-3633)
Suite du débat
La présidente. Nous en étions restés au point 22 de notre ordre du jour et il y avait encore quelques demandes de parole. Je passe le micro à Mme Sandra Borgeaud. Vous avez une minute et demie, Madame la députée.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). A propos de l'une des invites faites au Conseil d'Etat, je cite: «à inciter les communes à poursuivre, voire renforcer leurs efforts afin de développer des structures d'accueil pour la petite enfance en collaboration avec les entreprises intéressées», j'ai envie de dire que l'Etat doit aussi s'investir dans la création des crèches. Il peut utiliser ses propres locaux ainsi que des arcades vides afin de les transformer en crèches, ce qui coûterait déjà moins cher qu'une construction. Mais cela n'enlève pas la possibilité de construire. Et puisque l'Etat doit bâtir des logements - nous sommes en effet en pleine crise - il peut également intégrer des crèches dans les nouveaux immeubles.
Les communes ne sont pas sur le même pied d'égalité, vous le savez très bien. En ce qui concerne les finances, certaines communes arrivent à peine à atteindre le niveau zéro.
Rien de grand n'a jamais pu être réalisé sans enthousiasme. On craint la vieillesse grandissante et, comme on vit beaucoup plus longtemps, on redoute dans un avenir pas si lointain l'écart d'âge entre les personnes âgées et les jeunes. En clair, on nous dit de faire des enfants. Oui, d'accord ! Mais là où le bât blesse, c'est quand il s'agit de savoir où nous allons placer nos enfants pendant la journée lorsqu'on travaille. Rappelons tout de même qu'une maman de jour n'est payée que 4 F de l'heure, d'où la pénurie. Il faut donc bien trouver une solution, construire des crèches et augmenter le tarif des mamans de jour, car on n'a rien sans rien.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Deneys... qui n'est pas là. Un membre du groupe socialiste souhaite-t-il intervenir ? Il reste cinquante secondes.
Mme Véronique Pürro (S). Je crois que M. Deneys voulait réagir suite aux propos tenus tout à l'heure par l'une de nos collègues UDC, qui laissait entendre qu'il n'y avait pas besoin de diplôme pour garder des enfants et que les normes n'étaient pas très importantes. Eh bien, à tous ceux qui ont des enfants - et la personne qui est intervenue tout à l'heure dans ce sens-là en a - j'aimerais dire qu'il m'étonnerait qu'ils acceptent de confier leur progéniture à une crèche qui ne répond pas aux normes ou à du personnel non qualifié.
Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'on veut - et je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point - des services de qualité, c'est-à-dire des lieux sécurisés et du personnel formé, cela a un prix ! Et ce que les socialistes disent, c'est que l'on peut certes rediscuter des normes, mais tant que l'Etat ne consacrera pas les moyens nécessaires - ne soutiendra pas les communes et n'obligera pas ces dernières à développer et à construire des crèches - nous continuerons à discuter de cette problématique sans trouver de solution.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Catelain, à qui il reste une minute et deux secondes.
M. Gilbert Catelain (UDC). Sur les multiples invites de cette motion de commission il y en avait deux qui étaient importantes pour nous, à savoir inviter le Conseil d'Etat à inciter les communes à poursuivre ou à renforcer leurs efforts afin de mettre à disposition des places de crèche et, surtout, à revoir le dispositif légal et réglementaire, dont on a constaté qu'il était pénalisant.
Les entreprises qui se sont engagées dans la création de crèches d'entreprise ne sont pas très nombreuses et, au total, il existe 200 places de crèche en partenariat public-privé, abstraction faite des entreprises de l'Etat. Concernant la location de places de crèche, une seule société s'est finalement impliquée, soit Procter & Gamble.
Le Conseil d'Etat ne répond pas à la principale invite, d'assouplir la réglementation en vigueur, qui cause la pénurie et engendre une augmentation des coûts. Et du fait de cette invite à laquelle nous n'avons pas de réponse du gouvernement, nous ne pouvons pas accepter ce rapport et vous proposons de le renvoyer au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme von Arx-Vernon. Vous avez une minute, Madame la députée.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). J'aimerais juste revenir sur un élément important. Oui, les communes ont la compétence; toutefois, le Conseil d'Etat ne doit pas seulement inciter, car il détient en outre les clés qu'il convient d'utiliser pour déverrouiller un verrou important, à savoir les normes d'encadrement et également architecturales. Il ne s'agit pas de dire qu'il ne faut pas des gens extrêmement bien formés, ni qu'il faut placer les enfants dans n'importe quel contexte, mais vous, Messieurs du Conseil d'Etat, et plus particulièrement Monsieur Beer, vous avez un rôle essentiel à jouer ! Arrêtons de renvoyer la responsabilité quant à ces enfants entre le Conseil d'Etat et les communes, ce ne sont pas des ballons de foot, même si cette métaphore est de circonstance en ce moment ! Je vous en prie, les familles, les entreprises et les communes vous attendent, Monsieur Beer !
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est maintenant à M. Amsler, à qui il reste cinquante-trois secondes.
M. David Amsler (L). Je prends ces cinquante-trois secondes pour remercier d'abord le Conseil d'Etat d'avoir rédigé un rapport aussi court, puisqu'en quatre pages ce dernier a bien résumé la situation des crèches d'entreprise en partenariat avec les communes.
Pour revenir sur la conclusion, les frais de construction ne sont engagés qu'une fois, alors que c'est vraiment concernant l'exploitation que les communes attendent des simplifications.
Je profite aussi des quelques secondes qui me restent pour remercier les entreprises qui ont créé des partenariats avec les communes, car les places de crèche génèrent pour ces dernières des charges vraiment importantes - on parle d'environ 30 000 F par année. J'adresse donc mes remerciements aux entreprises qui rentrent dans ce processus, parce que je crois qu'elles ont bien compris l'intérêt qu'elles pouvaient elles aussi en tirer.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je tiens d'abord à relever que ce débat sur la petite enfance est crucial, dans la mesure où nous avons fondamentalement besoin de places, qu'elles soient offertes en structure collective ou individuelle, puisque la loi sur la petite enfance intègre aujourd'hui non seulement les crèches et jardins d'enfants mais également les mamans de jour. Il est du reste question, vous le savez, de créer un statut et d'avoir une entrée en vigueur au 1er janvier de l'année prochaine.
Ce besoin, ressenti par chacune et chacun, s'inscrit du point de vue de l'organisation dans la complexité, les paradoxes, et ce ne sont pas les grandes déclarations, aussi véhémentes qu'interrogatrices, qui vont faire oublier certaines décisions importantes. Parmi celles-ci, il y a la nouvelle loi sur la petite enfance, entrée en vigueur au 1er janvier 2004, qui prévoyait notamment une aide aux communes pour la création de places de crèche, et également de places d'accueil de façon plus générale pour la petite enfance. Or qu'en est-il aujourd'hui ? Mme la députée Pürro a évoqué tout à l'heure les 10 millions annoncés et jamais dépensés; il faut dire que nous n'avons jamais eu pour 10 millions de factures, aucune somme n'a même dépassé 2 millions, il faut le relever, ce n'était pas véritablement l'aide du canton qui était en cause, mais la construction des communes.
J'aimerais vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés - et Madame la députée von Arx-Vernon en particulier, puisque vous évoquez le football, qui va nous rassembler en juin pour une fête, je l'espère - que vous avez récemment décidé, sur demande du Conseil d'Etat certes, d'annuler tout le dispositif d'impulsion du canton. Alors je veux bien, après que vous avez voté, au nom du transfert des charges, l'annulation de ce dispositif, entendre que l'Etat ne fait rien. L'Etat n'a certes pas que ce rôle d'impulsion, mais vous et nous avons décidé de cesser d'agir à ce niveau et de demander aux communes d'intégrer totalement la charge de la petite enfance en matière de dispositif.
Mesdames et Messieurs les députés, notre compétence ne s'arrête pas là, mais j'aimerais dire que, pour le Conseil d'Etat qui s'engage à répondre à vos motions, il n'est pas question d'additionner toutes ces motions pour faire une politique d'ensemble. Ce que je vous propose aujourd'hui, au nom du Conseil d'Etat, c'est de ne pas multiplier les travaux parlementaires traitant de tel ou tel aspect du dispositif afin de dire qu'il n'y a qu'à régler ce point pour résoudre le problème. Le Conseil d'Etat vous suggère de vous présenter, d'ici à quelques mois, un rapport proposant l'instauration d'une véritable politique de la petite enfance, avec les différents rôles qui doivent être répartis entre les communes, le canton, mais également les dispositifs privés et ceux des entreprises. Oui, nous avons besoin de ces dernières; oui, si celles-ci sont destinées à s'engager pour la garde des enfants, elles doivent être encouragées, et le Conseil d'Etat souscrit tout à fait à ce procédé. Mais il n'empêche que nous demandons d'abord de pouvoir gérer dans l'ordre, c'est-à-dire selon un concept général, le dispositif de la petite enfance.
Mesdames et Messieurs les députés, je ne reprendrai pas cette déclaration générale plus tard, lorsque nous traiterons à nouveau du sujet, mais j'entends insister aujourd'hui sur un certain nombre d'aspects qui sont directement en jeu lorsqu'il s'agit d'élaborer la politique de la petite enfance.
En premier lieu, il convient de savoir ce que nous attendons de celle-ci, en dehors de la mise à disposition de places. Doit-il y avoir autre chose que du gardiennage ? Y a-t-il oui ou non une tâche éducative ? Cette question va être posée avec d'autant plus d'intensité que Genève, vous le savez, avec l'ensemble des cantons romands et suisses, s'est engagé dans un processus d'harmonisation scolaire, qui prévoit une obligation d'entrer à l'école au plus tard à l'âge de quatre ans. Nous devons donc également discuter de ce qui conduit à cette entrée à l'école à quatre ans, c'est-à-dire de l'ensemble de la politique de la petite enfance.
Le deuxième élément est celui de la formation du personnel, en suffisance et en qualité, qui demande également qu'on trouve une articulation entre les nouveaux certificats fédéraux de capacité et les formations de la petite enfance qui relèvent du niveau tertiaire.
Mesdames et Messieurs les députés, vous avez mentionné les normes. Elles vont être directement évoquées par le dispositif que nous entendons mettre sur pied pour la petite enfance. En matière d'encadrement, le nombre d'adultes et d'adultes formés par enfant est un élément qui est aujourd'hui défini réglementairement, de même que les normes de bâtiment. Le Conseil d'Etat entend vous suivre dans ce travail, mais, encore une fois, il souhaite l'inscrire dans une évolution générale que nous vous présenterons d'ici à la fin de l'année.
Je vous remercie donc de cette motion, qui permet au gouvernement d'affirmer sa politique de surveillance et de vous dire qu'il va prendre, d'ici à la rédaction finale de ce rapport, un certain nombre de contacts et engager des démarches générales. Je vais d'ailleurs rencontrer prochainement l'Association des communes, les communes suburbaines, ainsi que les entreprises désireuses d'investir, de manière à former une véritable table ronde qui nous permette de développer - l'expression est un peu gâchée - un véritable plan Marshall en faveur de la petite enfance. En effet, la population en a besoin en matière d'accueil et la prise en charge des enfants doit être de qualité, sans pour autant que la technocratie l'emporte sur l'aspect pédagogique et éducatif.
Alors, renvoyez-nous, si vous le voulez, ce rapport. Je dirai peu importe, dans la mesure où nous entendons de toute façon traiter cette question sur le fond et vous répondre par la proposition d'un dispositif, parce que vos interpellations sont légitimes et sont également celles du Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Il a été proposé tout à l'heure de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, je vais donc mettre aux voix cette demande.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 1679 est adopté par 46 oui contre 27 non.
Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1679 est donc refusé.
Débat
La présidente. La parole n'est pas demandée pour l'instant et je prie Madame Borgeaud de présenter sa proposition de motion.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci ! Il est vrai qu'on souhaite ne pas devoir prendre pas la parole sur un tel sujet. (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, je prie d'ores et déjà ceux que ce thème n'intéresse pas de sortir, parce que c'est un sujet lourd, important et qui concerne les enfants. Vous pouvez prétendre être les meilleurs mais, en attendant, on voit bien ce qu'indiquent les statistiques aujourd'hui !
J'ai demandé à plusieurs reprises le traitement en urgence de cette proposition de motion et suis allée, dans ce but, consulter chaque groupe afin d'obtenir son soutien. J'ai été extrêmement choquée des propos tenus par Mme Brigitte Schneider-Bidaux, qui est infirmière et qui m'a répondu, je cite: «Ce n'est pas important, il y a déjà assez de choses faites pour ce problème.» Je trouve cela scandaleux, à l'heure où les médias font état de nombreux crimes et où l'on dénonce des abus sexuels commis sur des enfants par d'autres enfants ou adolescents à peine âgés de 11 ans. Où va-t-on ? Doit-on accepter de mettre au monde un enfant pour qu'il soit abusé ou violé sans que l'on n'ait rien le droit de dire ?
J'aimerais résumer en quelques mots certains passages de ma proposition de motion que peu d'entre vous ont lue. Les 25% des femmes dans le monde ont été abusées sexuellement dans leur enfance. Les abus sexuels ont significativement baissé maintenant, car c'est le siècle de l'enfant. Je rappelle, pour l'histoire, qu'aux XVIIIe et XIXe siècles la sexualité intergénérationnelle était normale, donc pas dénoncée. Vous pouvez consulter à ce sujet l'étude de Margolin sur internet - allez-y, de nombreuses études ont été réalisées.
Il est également mentionné qu'un adulte qui est arrêté la première fois pour viol a, en fait, commis entre 480 et 510 fois depuis son adolescence des actes d'offense sexuelle, des gestes d'agression et, enfin, des viols. Les 50% de ces agresseurs avaient déjà commencé à l'âge de 12 ou 13 ans, ils entament donc une très longue carrière.
Dans un autre domaine, on peut également indiquer que, sur 21 000 recrues en Suisse, une sur sept a commis une agression sexuelle dans les douze mois précédant son admission à l'école de recrues. Cela dérange beaucoup d'entre vous, mais des études ont été réalisées et cela a été prouvé !
Si l'égalité entre les hommes et les femmes était reconnue, ce serait une fameuse brèche dans la bêtise humaine. Pour essayer d'apporter de l'aide, le courage, c'est l'art d'avoir peur sans que cela paraisse... Mais il faut relever qu'il n'y a pas vraiment eu d'études réalisées sur les femmes qui commettent des abus. Ce que l'on peut retenir, c'est la psychose et les carences pour la première catégorie. Pour la seconde, il s'agit très souvent du sacrifice de leur propre enfant au profit de leur compagnon qu'elles ne veulent pas perdre: elles sont sous l'emprise d'un pervers, et vous savez tous que cela existe.
«On ne naît pas femme, on le devient.» Chaque fois qu'un garçon ou un homme dégrade une fille ou une femme, il se dégrade lui-même. D'ailleurs, pour conclure sur une note d'humour, ne dit-on pas que la femme est l'avenir de l'homme ?
Je reprendrai la parole plus tard, puisque j'ai déposé un amendement et que j'aurai à nouveau droit à trois minutes.
La présidente. Madame la députée, je vous rappelle que le débat... (Commentaires de Mme Sandra Borgeaud.) Madame la députée, écoutez-moi, c'est moi qui préside le débat ! Cet objet est en catégorie II, vous disposez donc de trois minutes en tant qu'auteur et, ensuite, d'une minute et demie. Cela signifie quatre minutes et demie en tout ! Nous allons compter ce qu'il vous reste, mais vous n'avez pas droit à trois minutes à cause de cet amendement: nous sommes dans un débat par catégorie. C'est le règlement, et je l'applique pour tout le monde !
M. Claude Aubert (L). Cette proposition de motion est très clairement un cri du coeur. Effectivement, face à tout ce qui est dénoncé, comment ne pas pousser un tel cri ? Cependant, nous pensons que ce texte doit rester un cri du coeur et les libéraux demandent à la motionnaire de retirer son document, de manière à pouvoir le travailler. Parce que nous ne pouvons malheureusement pas envisager de discuter des invites, et cela pour une raison simple: nous ne pensons pas qu'il faille passer de la peste au choléra.
Mme Michèle Künzler (Ve). M. Aubert l'a dit, il s'agit d'un cri du coeur. Mais ce sujet est suffisamment important et grave pour ne pas qu'on rajoute des inepties dans une proposition de motion.
Actuellement, de nombreuses mesures sont déjà en cours. Il est vrai qu'on voit dans les médias énormément de choses, mais il ne faut pas exagérer ! Ce que vous écrivez dans ce texte, c'est que nous sommes entourés de violeurs et d'auteurs d'abus, puisque, selon vous, 90% des hommes seraient des abuseurs. Eh bien non, on ne peut pas laisser dire de tels propos, et c'est la raison pour laquelle cette proposition de motion a un côté inacceptable.
Que se passe-t-il actuellement au niveau de l'école ? A l'école primaire, un enseignement est dispensé au sujet de la sexualité, mais on y parle aussi de relations humaines, et c'est cela qui est important. En effet, on a dépassé l'époque où l'on parlait simplement de l'acte sexuel comme d'une mécanique. Maintenant, il faut également évoquer les sentiments et la relation humaine, puisqu'au fond c'est là qu'il y a un réel problème.
Au niveau des adolescents, les élèves de 7e, 8e et 9e du cycle reçoivent eux aussi une éducation à ce sujet. Mes enfants en ont bénéficié, ils ont reçu le livre dont vous parlez dans votre amendement, et je pense que c'est bien.
S'agissant des maisons de quartier, il y a eu à Saint-Jean tout un programme sur la violence, particulièrement sur celle entre garçons et filles, qui a été suivi par toutes les écoles du quartier. En outre, une réflexion a été menée et une pièce de théâtre réalisée par les enfants. Là aussi, il y a donc des choses qui se font.
Ensuite, au niveau du collège, on peut encore mentionner d'autres éléments. Un certain nombre de moyens sont en place, notamment concernant la sexualité par internet. A ce sujet, des informations sont données puisque, maintenant, pour beaucoup de jeunes, c'est également par le biais de ce support que cela se passe. Or de nombreuses informations sexuelles extrêmement fallacieuses circulent sur internet, et ces dernières peuvent être nocives aux jeunes, raison pour laquelle je pense que là aussi nous devons mener une réflexion.
Ce qui est proposé dans ce texte ne résout rien. Toutefois, comme la problématique et le sujet que vous amenez sont graves, on pourrait peut-être, comme le proposait le docteur Aubert, vous demander de retirer votre texte, afin de voir si l'on peut trouver une proposition et de déterminer ce qui manque. En effet, peut-être faudrait-il, pour l'instant, simplement rajouter du personnel - comme cela avait déjà été demandé à l'époque - au niveau des infirmières scolaires, afin que les effectifs soient moins restreints, parce qu'actuellement il n'y en a qu'une pour 2000 enfants.
Sinon, je vous invite simplement à refuser cette proposition de motion, car, au fond, les dispositifs qu'elle demande sont déjà en cours et je pense qu'on ne peut pas faire plus qu'être vigilants et rendre nos enfants attentifs.
M. Charles Selleger (R). Nous sommes saisis d'une proposition de motion qui est éminemment émotionnelle. J'aimerais tout d'abord rappeler que, probablement depuis l'origine, il existe une grande variabilité interindividuelle entre les gens, en particulier entre les enfants. Certains enfants ont des pulsions sexuelles, alors que d'autres n'en ont pas et en auront beaucoup plus tard.
S'il est particulièrement tabou de parler de sexualité chez les enfants, c'est un sujet qui a toutefois fait changer la législation il y a quelques années, car maintenant les actes d'ordre sexuel commis entre enfants dont la différence d'âge n'est pas supérieure à deux ans ne sont plus poursuivis.
Cette proposition de motion nous parle d'abus commis sur des enfants, qui peuvent être le fait d'adultes, d'adolescents ou d'autres enfants. Je ne pense pas que la gravité de la chose soit moindre lorsqu'il s'agit d'enfants, ni qu'elle soit supérieure d'ailleurs. Cela étant, il faut quand même relever que les abus sexuels perpétrés sur d'autres enfants par des enfants restent une chose exceptionnelle, mais dont s'occupent des instances juridiques comme le juge des enfants ou le Tribunal de la jeunesse, qui sont parfaitement habilités à faire cela.
En ce qui concerne les invites de la proposition de motion, il faut savoir que certaines mesures appelées par la motionnaire, préventives en particulier, sont déjà largement mises en place et que le Conseil d'Etat s'en est expliqué il y a un peu plus d'une année dans sa réponse à la question écrite 3611 qui lui avait été posée. Rappelons à ce propos que de nombreux milieux associatifs s'occupent de ce problème: Viol-Secours, le Centre de consultation pour victimes d'abus sexuels, SOS enfants, pour ne citer que ceux-là.
D'autre part, certaines invites de cette proposition de motion nous semblent inadéquates, parce que, concernant la question des cours spéciaux sur les abus, ceux-ci peuvent très bien être intégrés - et je pense qu'ils le sont - dans les enseignements d'éducation sexuelle dispensés aux enfants des écoles primaires déjà, puis du cycle d'orientation.
Quant à réunir les parents pour leur parler de cette problématique, je pense que cela relève plutôt du rôle des associations que d'une tâche de l'Etat. En outre, les psychologues existent, dans toutes les écoles ils s'occupent des enfants qui ont des problèmes et je ne vois donc pas l'utilité d'engager des psychologues spécialisés pour ce problème-là particulièrement.
Pour toutes ces raisons, et en relevant quand même bien entendu la gravité des abus sexuels commis sur les enfants, le groupe radical vous propose de rejeter cette proposition de motion.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mme Borgeaud était certainement animée de bonnes intentions en déposant cette proposition de motion, comme il a été relevé précédemment. Cependant, le parti socialiste ne pourra pas la soutenir, car nous la trouvons inacceptable autant dans ses invites que dans son exposé des motifs.
Cette problématique des abus sexuels commis entre pairs ou envers des enfants n'est pas nouvelle. Elle est tout au plus actuellement mieux connue que par le passé, car les jeunes osent en parler. Statistiquement, il est possible voire même certain que, dans cet hémicycle, plusieurs d'entre nous ont vécu dans leur jeunesse cette problématique de violence. En effet, les statistiques indiquent qu'un quart de la population qui a actuellement 30 ans a été touchée par ce type de violence et a subi, sans aller jusqu'aux abus, de tels actes lorsqu'elle était adolescente.
La violence sexuelle entre pairs ou envers des enfants n'est pas juste un jeu de bons ou de méchants. Elle est un signe soit de dysfonctionnements de relations entre les genres, soit de troubles de la personnalité, mais elle est aussi en partie le reflet de ce que notre société induit via les natels, la télévision et les films pornographiques que l'on peut visionner quasiment à n'importe quelle heure du jour et de la nuit, et encore plus aujourd'hui grâce à internet.
Il est inutile de répéter tout ce qui se fait déjà dans les écoles à l'heure actuelle. Je voudrais juste relever l'effort fourni depuis plusieurs années par les maisons de quartier, où les animateurs sont attentifs à donner une réelle place aux filles dans les activités proposées et ont à coeur de développer des animations prioritairement destinées aux filles, que ce soient des cours de danse ou toute autre activité. Dans ces maisons de quartier, il est en outre de notoriété que les animateurs doivent travailler sur le dialogue entre filles et garçons, car c'est là que se situe la racine de tout cela: c'est grâce au dialogue, à l'entente et à l'échange que peuvent être modifiées les attitudes futures des enfants et des jeunes.
J'aimerais prendre l'exemple de la maison de quartier de Saint-Jean, qui travaille sur le sujet de la violence sexuelle avec le cycle d'orientation de Cayla depuis l'an 2000. Ce n'est donc pas nouveau ! En automne 2007, cette même maison a organisé une quinzaine de réflexions pour tous les gens du quartier, qui s'appelait «Ni Roméos, ni Juliettes ?». Peut-être avez-vous assisté à l'une de ces soirées...
La présidente. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Lydia Schneider Hausser. ...et cette quinzaine continue encore aujourd'hui dans le quartier entre les habitants et les professionnels.
Je crois que les professionnels de l'éducation travaillent sur ce sujet depuis longtemps en termes de prévention et d'accompagnement, et il est juste de dire que les réductions imposées actuellement à la fonction publique et aux associations entraînent également des diminutions de ces moyens de prévention.
La présidente. Vous êtes au terme de votre temps de parole, je suis désolée !
Mme Lydia Schneider Hausser. Je voulais juste terminer en disant que l'on ne résout pas les abus par les abus, et que le plus important est d'apprendre à tous les enfants à d'abord parler d'amour. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la députée. Je rappelle quand même que les groupes disposent de trois minutes pour s'exprimer !
M. Michel Forni (PDC). De nombreuses choses ont été dites ce soir et je crois que nous sommes tous d'accord. L'abus sexuel est aussi un mal social qui, dans l'intérêt de tous les enfants, doit être traité sur le plan sociojudiciaire et ne peut plus rester un sujet tabou.
Le thème de l'adolescent, du mineur abuseur d'enfants, choque, et ce fait est bien démontré par l'auteur de cette proposition de motion. Il appelle aussi à une condamnation, mais heureusement des mesures sont déjà prises.
Il y a cependant une opposition totale entre une logique de droit, celle de l'incivilité et celle derrière laquelle se cache l'abusant mineur. Comme vous le savez, les travaux récents ont bien décrit les deux types de personnages qui peuvent intervenir. Mais heureusement, comme cela a été relevé ce soir, des moyens thérapeutiques existent, et souvenez-vous qu'il y a un mouvement multidisciplinaire qui regroupe des pédiatres, des pédopsychiatres, des associations et des psychologues. Cela existe à Genève depuis plusieurs dizaines d'années, alors ce que l'on peut faire, c'est éventuellement optimiser et développer, mais il ne faut rien changer.
En ce qui concerne les invites de cette proposition de motion, qu'elles passent par une prévention au niveau scolaire, par une information aux parents, qu'elles se fassent au niveau du cycle ou de l'école, elles ont un calendrier, je vous le rappelle, qui est fixé pour la rentrée 2008, et il est évident que cela n'est pas réaliste.
Dans ces conditions, je pense qu'il faut tabler sur ce qui fonctionne déjà, sur ce qui peut être encore amélioré et, surtout, Madame la présidente, nous avons l'obligation de ne pas survoler ce thème en quelques minutes ce soir et de déboucher non pas sur un débat politique, mais sur des solutions qui peuvent apporter des remèdes à ce problème. C'est la raison pour laquelle le PDC vous propose de refuser d'entrer en matière sur ce type de proposition de motion car, vous l'avez compris, ses thèmes requièrent une analyse profonde et prudente, qui ne transparaît pas dans ce texte.
M. Antoine Bertschy (UDC). J'ai entendu précédemment l'expression «cri du coeur». Effectivement, cette proposition de motion en est un, mais parfois les cris sont un petit peu excessifs. En l'occurrence, lorsque je lis dans l'exposé des motifs, à la page 4, que sur 100% d'adultes, 90% sont des abuseurs, j'ai quand même quelque peine à croire à un tel chiffre. A mon sens, les proportions doivent être inversées, et encore, ce serait un chiffre terrible.
En outre, ce cri du coeur va beaucoup trop loin puisque, dans les invites, on peut lire qu'il faut faire prendre conscience aux parents qu'il existe des risques que leurs enfants soient des abuseurs et que n'importe quel camarade pourrait abuser d'un enfant. J'ai l'impression que cette proposition de motion essaie de créer une certaine paranoïa, et ce n'est pas le but.
En revanche, j'aimerais évoquer l'amendement qu'a déposé Mme Borgeaud sur sa proposition de motion, qui est à mon avis intéressant, parce qu'il va dans le sens de l'instruction et de l'information. Le groupe UDC l'invite donc, tout comme nos collègues libéraux, à retirer son texte et à le retravailler sur la base de son amendement.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Borgeaud: vous avez une minute, Madame !
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). J'aimerais juste vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, qu'a eu lieu le 4 décembre 2007 une conférence à l'hôpital, à laquelle je n'ai aperçu aucun d'entre vous. Or, si l'un de vous y avait assisté, il aurait pu témoigner que ce n'est pas moi qui ai inventé les chiffres qui figurent dans cette proposition de motion, mais qu'ils ont été donnés par un professeur reconnu depuis trente ans. Ce n'est pas mon genre d'inventer des trucs pareils !
Concernant la réalité, il vaut mieux, en effet, mener la politique de l'autruche et rester la tête dans le sable que de prévenir... Moi, ce que je vous demande, ce n'est pas de la répression, mais de la prévention ! Je vous demande que cela cesse ! Je vous demande d'arrêter d'accepter ces ignominies, parce que je suis certaine que la plupart d'entre vous, si c'était l'enfant de votre propre chair qui était violé, vous n'iriez pas vers un juge, mais plutôt vers le violeur pour lui mettre une balle dans la tête avec un flingue !
J'aimerais que l'on soit cohérent ! Lorsqu'on demande de faire de la prévention et que j'entends, à propos de l'amendement que j'ai déposé sur ma propre proposition de motion, que ce livre est fantastique... Mais il y a des enfants qui commencent entre 6 et 8 ans ! Alors je suis désolée, mais au cycle d'orientation c'est déjà trop tard ! J'en reparlerai donc lorsque mon amendement sera déposé.
La présidente. Non, Madame la députée, vous avez épuisé votre temps de parole ! (Commentaires de Mme Sandra Borgeaud.) Madame la députée, c'est moi qui préside, je vous l'ai déjà dit ! Vous n'avez pas à me faire la morale.
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je crois que le débat a quelque peu dérapé, car il y a certaines choses dont on doit se rendre compte. Je sais que nombre de mes collègues vivent dans un hémisphère protégé et qu'il est très agréable de se dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, mais j'aimerais relever que les éducateurs font un effort pour rendre les jeunes attentifs à certains dangers.
Dans l'histoire, on a vécu à Genève une jeunesse où il y avait certes aussi des abus; mais ce qu'on appelle les tournantes ou la violence telle qu'on la vit maintenant, je ne crois pas que cela ait jamais existé auparavant et je suis navré de devoir dire à cet hémicycle que c'est actuellement la réalité.
Alors ne nous satisfaisons pas de ce qui se fait, ne disons pas tous les jours que tout va bien puisqu'on a des spécialistes à droite et à gauche ! Et quels sont les résultats ?! Il n'y en a pas.
Peut-être que la proposition de motion qui est présentée comporte des excès, mais ce qui me gêne le plus, c'est que vous disiez: «Non, tout va très bien, on fait tout ce qu'il faut.» Pour ma part, je ne pense pas qu'on fasse tout ce qu'il faut, je crois qu'il y a encore beaucoup trop d'éléments qui sont ignorés ou qui ne sont pas pris au sérieux. Il me semble que le plus sage aujourd'hui est de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement et de l'éducation, afin que l'on puisse l'étudier, la modifier et suggérer des choses concrètes. Ce soir, je suis un peu frustré de voir que l'ensemble de cet hémicycle considère que tout cela n'est pas grave. Je suis navré de vous le dire: c'est très grave et on ne peut pas laisser traîner les choses !
Une voix. Bravo !
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. S'il y a un point qui fait l'unanimité, c'est la volonté de chacune et chacun de lutter contre les violences sexuelles à l'encontre des mineurs. On peut effectivement difficilement imaginer pire crime, pire atteinte à la personne que le crime sexuel, en dehors du crime ou du meurtre tout court. Nous sommes entièrement d'accord sur ce point et cela nous interpelle lors de nos travaux parlementaires.
Cela dit, nous avons effectivement un travail important, qui est celui de l'organisation de l'Etat, de l'organisation du dispositif, et nous devons nous demander s'il est adéquat ou non pour relever le défi que nous constatons, à savoir une augmentation de certains risques directement liés aux abus sexuels. Celle-ci n'est pas le fait de l'école ou d'un défaut de surveillance, mais - il faut le dire - d'un accès extrêmement facilité par un certain nombre de médias banalisant totalement la question de la sexualité.
Par rapport à cela, Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite que nous ayons le maximum de rationalité et de pragmatisme.
J'aimerais faire référence, si vous me le permettez - et je relève la qualité de ce travail - à la question écrite 3611 que nous avait posée Mme la députée Captyn au sujet des abus sexuels contre les mineurs. Le Conseil d'Etat n'a en aucun cas prononcé le moindre cri pour dire: «Nous maîtrisons la situation, il n'y a pas de danger ni de problèmes.» Nous avons pris dix pages afin d'évoquer la complexité du dispositif, parce qu'il faut agir dans tous les domaines: cela concerne l'école, les psychologues et les infirmières scolaires, bien sûr, mais également les parents - vous l'avez relevé - la police, les hôpitaux, les médecins de ville et, enfin, les juges pour enfants et les juges au Tribunal de la jeunesse.
Dès lors, Mesdames et Messieurs les députés, avant de surenchérir en demandant davantage au Conseil d'Etat, j'aimerais que, s'il y a des critiques du dispositif - et je peux le comprendre - on nous interroge sur la réponse que le Conseil d'Etat a fournie à votre Conseil. Si nous avons pris la peine de vous répondre, c'est pour vous indiquer la manière dont nous agissons, non pas pour entendre que nous ne faisons rien et qu'il faudrait réinventer la roue. Cette volonté est certes noble, mais elle est insuffisante en l'état, si l'on ne prend pas la peine de s'intéresser aux dispositifs mis en place.
Mesdames et Messieurs les députés, encore une fois, je comprends que, suite à la réponse à la question écrite 3611 de Mme Captyn, il puisse subsister des interrogations, mais je vous propose, si l'on entend poursuivre nos travaux, de prendre la peine d'analyser les réponses, d'examiner les dispositifs et de dire en quoi ils sont défaillants ou quelles sont vos suggestions, et non pas simplement d'omettre le travail précédent.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons d'abord voter sur le renvoi de cette proposition de motion en commission, tel qu'il a été demandé tout à l'heure.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1805 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est rejeté par 65 non contre 6 oui.
La présidente. Nous allons nous prononcer sur l'amendement déposé par Mme Borgeaud, qui consiste en une cinquième invite, dont je vous lis la teneur: «à rééditer le livre "Emoi... Et toi ? Tu peux, si je veux !" par le SSJ et Buche.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 7 oui et 12 abstentions.
La présidente. Pour terminer, nous votons sur le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la proposition de motion 1805 est rejetée par 62 non contre 6 oui et 2 abstentions.
Débat
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette proposition de motion est très importante pour le parti démocrate-chrétien, et nous vous remercions d'avance de bien vouloir lui réserver un bon accueil. Elle s'inscrit dans la tradition du PDC, qui avait été initiée par Dominique Föllmi, lorsqu'il a estimé en 1985 qu'il était indigne que des enfants, même clandestins, n'aient pas accès à l'école.
Aujourd'hui, cette proposition de motion répond à trois logiques. La première concerne la volonté de la Suisse, qui a ratifié la Convention des droits de l'enfant, consacrant notamment la primauté du droit à l'éducation sur toute considération de statut légal.
La deuxième touche l'égalité de traitement, entre les jeunes concernés bien évidemment, mais également entre les jeunes sans statut légal - entre eux-mêmes, si j'ose dire, Madame la présidente. En effet, les adolescents qui ont l'envie ou les compétences pour aller jusqu'à la maturité peuvent y accéder sans problème, alors que ceux qui décident de choisir une voie d'apprentissage, de CFC, n'y sont pas autorisés, bien qu'ils aient in fine les mêmes droits à l'éducation que leurs pairs qui, eux, peuvent continuer la filière scolaire.
La troisième logique concerne la notion de retour sur investissement, dans la mesure où ces jeunes ont bénéficié de nos écoles, ont appris nos valeurs et ont reçu une éducation extrêmement précieuse, à laquelle nous tenons tous pour nos enfants et qui a un coût; si l'on considère que l'éducation à Genève revient à environ 10 000 F annuels pendant dix ans, nous estimons important, en termes humains bien évidemment, mais également économiquement, qu'il y ait un retour sur investissement et, par conséquent, que ces jeunes, qui n'ont jamais posé de problème pour les 90% d'entre eux et dont les parents sont ici pour notre confort, notre bien-être et pour l'équilibre de notre économie, puissent avoir accès à un apprentissage sous une forme que nous proposons une fois qu'ils ont trouvé un patron.
Le dispositif que nous vous suggérons peut, bien sûr, être amélioré par vos amendements et vos conseils et nous nous réjouissions de l'étudier avec tous les groupes politiques en commission. Il s'agit du principe du chèque apprentissage, sur la même logique que le chèque service, qui vise à ce que les jeunes qui ont trouvé un patron puissent accéder à un apprentissage et que ce dernier ait l'assurance, à travers ce chèque apprentissage, de couvrir les charges sociales.
Vous me direz, Madame la présidente, que Genève va encore faire oeuvre de pionnier. Eh bien nous pouvons nous en réjouir ! En effet, Genève a été le premier en 1985 à ouvrir ses écoles aux enfants clandestins et, depuis, tous les cantons l'ont suivi. Et je crois que c'est notre fierté, c'est cela, l'esprit de Genève !
Pour finir, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le parti démocrate-chrétien vous demande de bien vouloir renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Künzler... (Commentaires.) Pardon ?
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Je me suis trompée, Madame la présidente ! Dans mon émotion, j'ai parlé du Conseil d'Etat...
La présidente. Oui, vous aviez évoqué précédemment un travail en commission. Maintenant, vous demandez de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat. Vous avez choisi ?
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Oui, je souhaite qu'il soit renvoyé en commission ! (Rires.)
La présidente. Laquelle ?
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. La commission de l'enseignement et de l'éducation.
La présidente. Très bien. C'est votre dernier mot ?
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. C'est mon dernier mot, Madame la présidente !
Mme Michèle Künzler (Ve). Nous voulons féliciter le parti démocrate-chrétien d'avoir déposé ce texte. C'est une proposition très intéressante et importante, parce que le problème qu'elle cherche à résoudre est grave. Il s'agit de jeunes qui ne peuvent pas avoir accès à certaines formations, et ceux qui n'ont pas la possibilité de poursuivre le collège, parce qu'ils n'ont pas les notes suffisantes, ne sont pas intégrés ailleurs et n'ont donc finalement plus accès à la formation. Et il est vraiment très important que chacun ait une formation, quel que soit son statut légal. Au fond, on travaille pour l'avenir ! Que ces jeunes restent ici ou qu'ils se rendent dans un autre pays, je crois que cet acquis-là peut être utile dans le monde entier, c'est pourquoi on le leur offre, et c'est normal.
Pour cette raison, je trouve que cette proposition de motion est extrêmement importante et qu'elle servira à corriger une inégalité, puisque les jeunes sans-papiers peuvent actuellement aller au collège ou à l'école de commerce, mais n'ont absolument pas la possibilité de suivre des formations duales ou qui nécessitent un apprentissage en entreprise.
Nous devons pourtant parier sur les jeunes, et ce texte est très bon ! Personnellement, je l'aurais renvoyé directement au Conseil d'Etat, car je ne vois pas très bien ce qu'on pourrait faire en commission. Mais si le parti démocrate-chrétien le demande, nous l'étudierons en commission. Nous verrons notamment combien il y a de jeunes concernés, mais je pense qu'ils ne sont pas très nombreux.
Je vous invite donc vivement à accepter cette proposition de motion.
M. Eric Stauffer (MCG). Je ne m'explique pas la raison de cette proposition de motion. On a de la peine à comprendre, à tel point que le groupe MCG va s'opposer à son renvoi et en commission et au Conseil d'Etat.
S'il est vrai que les enfants ne sont pas responsables des agissements de leurs parents, il n'en demeure pas moins que la République et canton de Genève ne peut pas donner comme message: «Illégaux, venez, vos enfants pourront aller à l'école, ils auront la possibilité de travailler et, qui sait, après, ils pourront avoir une carrière en travaillant au noir !» C'est parfaitement anticonstitutionnel et contraire aux intérêts des résidents de Genève qui, eux, sont légaux et paient leurs impôts comme tous les citoyens genevois, légaux, bien entendu !
Il faudrait savoir ce que l'on prône dans ce parlement. Si le message, c'est: «Venez, violez la loi, on vous absoudra !», il faut que ce discours soit clair ! Il doit être diffusé et médiatisé: «Genève est pionnier dans le monde entier; illégaux de la planète et réfugiés économiques, venez tous à Genève, vous aurez un toit, du travail, vous pourrez placer votre progéniture en crèche - évidemment au détriment des Genevois, qui eux doivent calculer les naissances des enfants par rapport aux places qu'ils pourraient obtenir dans les crèches - et elle pourra aller à l'école !», et j'en passe et des meilleures !
La Confédération - et nous avons voté à ce sujet il n'y a pas si longtemps - a payé, donc nous, peuple suisse, avons donné un milliard de francs aux pays de l'Est précisément pour endiguer ces flux d'émigration. Depuis que nous avons payé ce milliard de francs, ce sont tous les mendiants roumains et j'en passe qui sont venus à Genève ! Et là, encore une fois, ce parlement dit: «Ecoutez, ce n'est pas grave, on ne va pas leur infliger de contraventions, cela crée un sentiment d'insécurité, peu importe, allons-y de bonne guerre !» Eh bien non, Mesdames et Messieurs les députés !
Et pour quelle autre raison va-t-on s'opposer à cette proposition de motion du parti démocrate-chrétien ? Parce qu'elle provoque une nouvelle forme d'esclavagisme, et je vais vous expliquer pourquoi. Du moment que les enfants ont le droit d'aller à l'école et que les parents sont, eux, de manière illégale sur le territoire de Genève, ils vont devoir se sacrifier et vont accepter n'importe quel job pour que leurs enfants puissent continuer leurs études. Et cela, ce n'est pas tolérable ! Je préférerais que vous rédigiez une proposition de motion, Mesdames et Messieurs du PDC, qui énonce: «Régularisons tous les sans-papiers à Genève !» Là, peut-être, on pourrait y adhérer, mais pas par ce biais ! En effet, les parents vont se sacrifier pour leurs enfants, afin qu'ils aient une vie meilleure que la leur. Et, en cela, votre texte est extrêmement pervers et produit des effets secondaires qui sont dommageables.
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je conclus en vous indiquant - c'est un petit scoop et M. Charles Beer pourra nous le confirmer dans quelques minutes - que le département de l'instruction publique détient un fichier de tous les enfants illégaux sur le territoire de la République et canton de Genève.
La présidente. Vous devez terminer ! Maintenant ! Vous avez dépassé votre temps de parole.
M. Eric Stauffer. Aucune action n'est entreprise pour aller trouver les parents...
La présidente. Monsieur le député, vous devez conclure !
M. Eric Stauffer. ... pour les régulariser ou les expulser, et c'est cela... (Protestations. Le micro de l'orateur est coupé. Il continue néanmoins à s'exprimer.)
La présidente. La parole est à Mme Lydia Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je regrette d'être dans le même hémicycle que celui dont je viens d'entendre les propos. Eh oui, ils rappellent effectivement des teneurs de l'histoire qui sont plus que désagréables et inacceptables.
Monsieur Stauffer, cette proposition de motion n'est pas un appel d'air à des sans-papiers, elle vise à régulariser un état de fait qui existe dans la république et grâce auquel des jeunes gens qui ont des compétences peuvent être formés. Je vous rappelle qu'en 2004 le Conseil d'Etat genevois a demandé à Berne la régularisation de 5500 personnes sans permis de séjour, or il n'y a pas eu de réponse, ni de permis octroyés pour l'instant !
J'aimerais dire plus calmement que, en tant que parent d'enfants scolarisés à Genève, il m'est arrivé de croiser des écoliers sans papiers, et vous aussi certainement. Ces enfants sont comme les vôtres, ils ont des compétences et sont souvent parfaitement intégrés au niveau de la langue et des connaissances du pays. Leurs parents ont sacrifié leur vie à travailler et à vivre dans l'ombre et dans la non-existence laborieuse. Or le chemin de formation s'arrête pour ces enfants lorsqu'ils atteignent l'âge de la formation postobligatoire, s'ils n'ont pas la chance d'avoir les facultés pour aller au collège. Le mur placé actuellement devant eux, qui leur interdit l'accès à l'apprentissage, est un mur de bêtise. Ils sont une force pour notre collectivité et, pourtant, nous leur proposons la peur, le non-droit, la non-existence.
Cette proposition de motion est timide et prudente, mais elle a une qualité, celle d'avoir été déposée et de nous permettre de faire preuve de bon sens en continuant ce qui a été commencé et qui est une réussite: l'accès à la scolarité pour tous les enfants habitant sur le territoire genevois. C'est du bon sens que de reconnaître que nous avons des jeunes qui seront formés à des professions, auxquelles on a parfois de la peine à trouver des adolescents susceptibles de s'intéresser actuellement en termes d'apprentissage. C'est du bon sens, parce que si nous ne voulons pas devenir un grand EMS cantonal genevois, nous avons intérêt à soigner les jeunes qui vivent à nos côtés, qu'ils soient migrants ou suisses et qu'ils aient ou non un Stämpel sur leur carte d'identité.
Il est inutile de penser que nous pouvons ériger à tout jamais des murs pour empêcher des migrants de venir ou que nous pouvons expulser jusqu'à la dernière des personnes sans papiers. Inutile de se voiler la face, ces personnes sont indispensables à l'économie domestique, rurale, voire à l'économie tout court. Nous devrons d'ailleurs certainement reprendre plus en profondeur la question que nous posent les 7000 sans-papiers genevois - c'est du moins le nombre estimé actuellement - et les 100 000 sans-papiers suisses.
Ce soir, les socialistes vous demandent d'être pragmatiques et d'accepter de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement et de l'éducation. (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, j'aimerais commencer mon intervention par... (Remarque.) Il n'est pas là ! (Remarque.) Bon, de toute façon, il n'est jamais là !
J'aimerais dire que, véritablement, notre collègue député dépasse les bornes ! Quel que soit le sujet, il fait des amalgames, il dérape et tient des propos inadmissibles. Tous ensemble - nous sommes nonante-neuf - ne pouvons-nous pas une fois en faire façon ? (Rires.) Parce que ça devient inadmissible ! Je regrette d'autant plus ses propos que le sujet de cette proposition de motion est grave et important: il est question de l'avenir de jeunes filles et de jeunes gens qui sont en situation particulière. On ne voudrait pas tomber non plus dans une attitude trop sentimentaliste, mais c'est une réalité, et je pense qu'il faut qu'on empoigne ce sujet sérieusement.
La formation est peut-être la seule richesse et la seule valorisation que ces jeunes pourront obtenir dans notre pays; peut-être n'y resteront-ils pas mais, en tout cas, lorsqu'ils repartiront, s'ils le doivent, ils auront obtenu une plus-value et retiré des éléments positifs de leur séjour en Suisse.
J'aimerais dire au groupe PDC que, selon moi, il vaudrait mieux renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'économie. En effet, il s'agit bien d'apprentissage, dual qui plus est, et je vous rappelle que les deux tiers de ce dernier se passent en entreprise. Il serait donc souhaitable d'examiner soigneusement ce texte, parce que nous devrons plus tard informer clairement les patrons et employeurs sur le statut de ces jeunes et les renseigner sur les conditions et l'utilisation de ce chèque apprentissage. D'ailleurs, comment sera-t-il employé ? Pour ma part, je ne vois pas bien comment il va fonctionner. Est-ce que c'est un chèque où les cotisations sociales seront payées ? Dans notre cas, le jeune apprenti est connu et identifié alors que, avec le chèque emploi, c'est différent: l'identité n'est pas connue, enfin si, l'identité de l'employé est connue, mais elle n'est pas divulguée.
J'aimerais donc que la solution envisagée soit transparente et claire car, encore une fois, les patrons qui sont très intéressés à offrir des places d'apprentissage, quel que soit le statut des jeunes, doivent savoir qu'ils sont en règle et qu'ils ne transgressent pas la loi. Renvoyons donc cette proposition de motion à la commission de l'économie, car je crois qu'elle pourra y être étudiée sous tous ses aspects.
Mme Janine Hagmann (L). Comme certains le savent peut-être, la commission des droits de l'Homme a accompli cette année un travail très approfondi concernant l'intégration. A cette occasion, elle a eu la chance d'auditionner différentes personnes impliquées dans le problème de l'intégration à Genève, qui n'est pas si mal résolu. Parmi les personnes auditionnées, il y avait des gens du département de l'instruction publique, cela va de soi, qui s'occupent de classes d'accueil.
En réalité, le problème mis en évidence et que vise à régler la proposition de motion PDC avait déjà été soulevé par la commission des droits de l'Homme, mais, malheureusement, celle-ci n'était pas allée aussi loin que le PDC, puisqu'elle ne trouvait pas de solution réaliste à ce problème. En effet, nous avons par la suite auditionné le représentant de Berne, qui nous a dit que, pour que l'intégration soit bien réussie, il ne fallait pas qu'il y ait trop de différenciations. Il s'agit donc de trouver une solution et d'étudier ce que l'on peut faire avec ces jeunes, mais sans les discriminer des jeunes de chez nous qui ont aussi des problèmes à obtenir un apprentissage.
Au point suivant de notre ordre du jour se trouve un objet très important pour Genève, la proposition de résolution 543, concernant le 500e anniversaire de Calvin qui, comme vous le savez, a incité Genève à devenir une terre d'asile, ce à quoi nous tenons beaucoup.
En résumé, il faut que nous trouvions une solution, et je pense qu'il est important de renvoyer cette proposition de motion en commission, pour que nous puissions chercher des remèdes pour tous les jeunes qui ont des problèmes, et pas seulement pour ceux qui n'ont pas de papiers car, vous le savez, on ne veut pas qu'il y ait des jeunes qui traînent dans la rue et qui, par la suite, causent des problèmes à la société.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Weiss, à qui il reste deux minutes.
M. Pierre Weiss (L). Je voudrais parler sous un double angle de valeur concernant cette proposition de motion. Il est une réalité qu'il convient de ne pas occulter: il y a effectivement des jeunes ici qui sont sans papiers, comme leurs parents - mais ils sont parfois aussi sans leurs parents - et qui sont en formation à l'école. Ce fait a été admis depuis un certain nombre d'années, et je pense que c'est une bonne chose que Genève scolarise ces jeunes. Cependant, il se pose pour eux à un certain moment le problème de poursuivre leur formation; tous ne peuvent pas suivre une formation gymnasiale et certains souhaitent la faire dans des entreprises, parce qu'il n'y a pas de possibilité de formation duale dans les écoles professionnelles. Or on ne peut pas demander aux chefs d'entreprise d'enfreindre la loi et de conclure des contrats de travail, alors que la législation fédérale s'y oppose ! Il faut par conséquent ne pas tenir à l'égard des entreprises un double discours, qui consiste d'une part à leur demander de respecter la loi, de ne pas engager des personnes sans respecter les conventions collectives ni de faire du dumping et, d'autre part, à les appeler à enfreindre la loi dans certaines situations.
Dans le cas présent, je crois que nous pouvons trouver une solution. Elle consisterait, Monsieur le conseiller d'Etat, à ce que le gouvernement - c'est du moins ce que la commission de l'économie devrait étudier, et je rejoins la position de mon collègue Barrillier sur ce point - intervienne auprès de l'autorité fédérale, du Conseil fédéral et que, comme il l'a fait pour la régularisation au cas par cas des sans-papiers, une solution spéciale soit trouvée pour ces jeunes, afin qu'ils puissent poursuivre leur formation et que les entrepreneurs ou les chefs d'entreprise qui les engagent ne se trouvent pas dans une situation d'infraction légale. C'est le point sur lequel je voulais insister d'abord sous l'angle des valeurs du travail, de la formation et d'une politique finalement humaniste dans l'accueil qui doit être fait à Genève.
J'ai parlé d'un double angle de valeur, Madame la présidente, alors si vous me permettez de dépasser, le cas échéant...
La présidente. Oui, mais très brièvement, Monsieur le député !
M. Pierre Weiss. Tout à l'heure, j'ai entendu que l'on parlait de listes de gens à expulser. Ce sont des propos que je considère comme proprement odieux ! Ces listes de gens à expulser me rappellent les listes de personnes que l'on allait réveiller le matin pour les parquer dans des stades ! Et de cela, les libéraux et tous ceux dans ce parlement qui partagent ces valeurs humanistes ne veulent pas ! Je crois que nous devons tous fermement faire en sorte que ce type de discours ne puisse pas avoir l'assise qu'il trouve auprès d'une partie de la population, qui se laisse leurrer par des sirènes démagogiques, qui ne saisit pas les enjeux situés derrière et qui ne perçoit pas le mépris des personnes qui s'exprime dans la bouche de ceux qui énoncent ce genre de propos, ici ou dehors. Et je souhaite que, dans ce parlement, on ne tienne plus ce genre de discours, Madame la présidente ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme von Arx-Vernon, à qui il reste deux minutes vingt.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Premièrement, j'aimerais dire que c'est avec plaisir que le groupe démocrate-chrétien acceptera le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'économie.
Ensuite, il est important de signaler que la Suisse va avoir besoin de 200 000 à 300 000 employés, qui ne seront pas forcément issus des filières académiques. Or, là, il s'agit de jeunes qui, même s'ils ne sont que 80, 100 ou 150 - nous ne le savons pas - sont déjà formés à nos valeurs scolaires et ont déjà reçu une éducation qui nous convient. Ainsi, lorsque nous aurons besoin d'eux pour la prospérité de Genève, ils seront déjà là et formés grâce à notre système éducatif et nos écoles. C'est pour cette raison, Madame la présidente, qu'il est très important de continuer à leur faire une place.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Künzler, qui dispose d'une minute vingt.
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais également m'insurger contre les propos qui ont été tenus par le député Stauffer. C'est absolument inadmissible ! Vous êtes vraiment raciste, vous êtes en train de dire qu'il faut chasser des enfants ! En outre, vous parlez d'esclavage, mais savez-vous exactement ce que c'est ? Là, en l'occurrence, vous préférez que ces jeunes, qui n'ont pas choisi leur situation - ces enfants n'ont rien demandé ! - traînent dans la rue ? C'est exactement ce que vous voulez, bien sûr ! Vous le cherchez ! Eh bien, moi je préfère parier sur l'éducation et le travail. C'est cela qui compte dans notre société. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Fabiano Forte. C'est votre première intervention dans ce parlement, Monsieur le député, et il vous reste une minute vingt ! (Applaudissements.)
M. Fabiano Forte (PDC). Merci beaucoup ! Mais on me coupe mon temps de parole, comme vous pouvez le constater, Madame la présidente !
Je serai assez bref. Je voudrais simplement inviter à la relecture de l'une des invites de cette proposition de motion. Nous ne parlons pas d'ouvrir les portes, ni les vannes; il est question de jeunes, qui ont suivi une scolarité tout à fait normale, au même titre que les autres enfants. Nous ne parlons donc pas de légaliser les sans-papiers, je crois que c'est un faux débat !
Ma collègue Hagmann a évoqué le fait que d'autres jeunes cherchent des voies de formation. Mais nous ne les oublions pas ! Il ne s'agit pas là de les opposer, mais de donner une chance à celles et ceux - suisses ou non, avec un statut légal ou non - qui ont envie de travailler.
En outre, nous avons parlé de la Confédération. Eh bien, nous devons l'inviter à respecter la convention qu'elle a signée, celle des droits de l'enfant, qui stipule en son article 28 la primauté du droit à l'éducation sur toute considération de statut légal. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Gilbert Catelain (UDC). Autant l'accueil des enfants de sans-papiers dans le système scolaire obligatoire repose sur une base légale, autant la scolarité est autorisée depuis 1991 pour l'ensemble des enfants clandestins. Toutefois, en cas de renvoi, ceux-ci peuvent rester jusqu'à la fin de l'année scolaire, mais non pas de l'ensemble de la scolarité; c'est là où nous sommes en totale infraction par rapport au droit fédéral, puisque si notre canton, qui a pour mission d'appliquer ce droit fédéral, n'est pas en mesure de remplir son mandat légal en l'espace d'une année, c'est qu'effectivement il l'enfreint.
De même, dans le cadre de la proposition de motion qui nous est présentée par le parti démocrate-chrétien, nous sommes malheureusement en contradiction totale avec le droit puisque, comme l'a dit M. Weiss, ce que vous proposez revient à obliger l'Etat et les employeurs à conclure en toute illégalité un contrat de travail avec un adolescent qui ne remplit pas les conditions de base pour signer ce type de contrat. Je ne vois donc pas en quoi il existe dans ce texte une possibilité quelconque d'entrer en matière.
De plus, ce parlement, et le groupe démocrate-chrétien en particulier, a régulièrement dénoncé, à tort ou à raison, le manque de places d'apprentissage, quand bien même on s'est rendu compte l'an dernier qu'elles avaient plutôt augmenté. Malgré cela, nous le savons tous, le nombre de places d'apprentissage dans ce canton n'est pas suffisant pour accueillir l'ensemble des candidats, du moins dans certains secteurs. Mais il n'empêche qu'aujourd'hui les employeurs qui veulent conclure un contrat d'apprentissage ont d'énormes possibilités, puisqu'ils disposent d'un marché de 450 000 habitants et qu'ils ne sont pas obligés de faire appel à des jeunes. En effet, ils peuvent très bien passer un contrat d'apprentissage avec un adulte ! Du reste, il faudra nous expliquer où sera le respect de l'égalité de traitement entre deux clandestins, selon qu'ils soient adultes ou pas, qui veulent poursuivre une formation.
C'est une nouvelle porte qu'on ouvre, qui est préjudiciable au climat de Genève en général puisque, de notre point de vue, il est très dangereux et finalement irresponsable d'ouvrir cette porte, sachant que de nombreux jeunes ici et dans les cantons voisins souhaiteraient avoir la possibilité d'effectuer une formation professionnelle sur la place de Genève.
Nous savons également que, dans le système secondaire, des enfants suisses du canton de Vaud...
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...peuvent se voir interdire de poursuivre leur scolarité, et nos citoyens ne comprendraient pas que Genève attire des clandestins d'autres cantons - pas forcément de l'étranger - qui pourraient effectivement, puisqu'ils n'ont pas la possibilité d'accomplir un apprentissage dans le canton de Vaud...
La présidente. Vous êtes au terme de votre temps de parole, Monsieur Catelain !
M. Gilbert Catelain. ...le faire à Genève.
Sur le fond, cette proposition de motion enfreint donc plusieurs lois, et on ne peut pas demander à un canton qui a déclaré qu'il lutterait contre le travail au noir...
La présidente. Vous devez conclure, Monsieur le député, sinon je serai obligée de vous couper le micro, et j'en serais désolée !
M. Gilbert Catelain. ...de signer des contrats de travail qui enfreignent la loi sur le travail au noir.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Madame von Arx-Vernon, il vous reste vingt secondes !
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Oui, ça ira très bien, Madame la présidente ! Il s'agit de jeunes qui sont déjà ici et qui ont trouvé un patron d'accord de les engager. En effet, dans certains secteurs, il manque des apprentis alors que, dans d'autres, il est vrai que ce sont les apprentis qui cherchent des patrons.
Cette proposition de motion se situe donc en plein dans la réalité de notre société, qui doit continuer à évoluer afin que Genève demeure prospère.
La présidente. Vous avez dépassé votre temps d'une seconde, mais je ne vous en veux pas !
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous dire en préambule que les simplifications sont terriblement dangereuses et que, parfois, les bons sentiments qui nous animent les uns et les autres, s'ils sont exprimés sans autre précaution pragmatique et notamment politique, nous amènent à réveiller aussi la bête qui dort. Ce n'est pas une attaque contre qui que ce soit, mais une réalité d'idéologie que nous connaissons bien.
La question que nous abordons ici touche non seulement l'immigration, mais également l'immigration illégale, des sans-papiers, qui nous mène très souvent, il faut en convenir, à un cul-de-sac, puisqu'il nous faut à la fois honorer un certain nombre de principes humanitaires et appliquer des lois. Nous devons ainsi régulièrement trancher entre une obligation morale et une obligation juridique.
Mesdames et Messieurs les motionnaires, vous rappelez à travers votre texte cette difficulté, et je dois vous dire que, en ce qui concerne le marché du travail - j'aimerais vous répondre autre chose que ce que je m'apprête à vous indiquer, mais malheureusement je ne le peux pas: il n'y a aucune possibilité, en l'état actuel du droit fédéral, de faire accepter un apprentissage dual pour des personnes sans papiers. Et je pense qu'il n'est pas correct de laisser entendre que nous avons la possibilité d'offrir de tels débouchés. L'apprentissage dual est un contrat de travail qui exige la mention du type d'autorisation.
Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez - nous le savons tous - mais nous sommes obligés ce soir de le rappeler et de mentionner également certains éléments que, personnellement, comme vous tous, je me serais bien privé d'entendre.
J'aurais souhaité vous répondre différemment, Mesdames et Messieurs les députés du groupe démocrate-chrétien ! Vous connaissez bien l'état actuel de la situation: pendant vingt ans, le département de l'économie a été géré par un magistrat du PDC, et ce même département, au niveau fédéral, est dirigé par une démocrate-chrétienne, conseillère fédérale. Ce sont des gens de talent, généreux, compétents, mais qui sont aussi responsables de l'application de dispositifs légaux, que le département de l'instruction publique ou le Conseil d'Etat ne sauraient reprendre maintenant en termes d'engagement moral contre les obligations légales.
J'aimerais vous dire pourtant que - et j'insiste sur ce point - l'intégration de ces jeunes sans-papiers nous tient à coeur, et la deuxième invite m'amène à être beaucoup plus nuancé et à aller davantage dans votre sens. Cette invite, en effet, nous engage à concevoir des formations à plein temps, qui existent déjà aujourd'hui au cas par cas, je tiens à le dire, et nous oblige à étendre quelque peu le dispositif et à accroître notre capacité. Mais j'aimerais aussi qu'on la mette en perspective du point de vue des êtres humains et de leur trajectoire de vie. Il n'est pas raisonnable de laisser penser qu'on peut s'intégrer durablement à Genève sans papiers ! Lors de la dernière législature, le Conseil d'Etat, sous la présidence de Martine Brunschwig Graf, a entrepris - vous le savez, puisque vous l'avez rappelé - une démarche à Berne pour régulariser plus de 5000 sans-papiers: nous n'avons reçu aucune réponse véritable qui nous permette d'entrer en matière ! Et je ne suis pas d'accord de dire à des jeunes que nous leur offrons la possibilité de se former, sans leur indiquer vers quoi ils peuvent ensuite se diriger.
Alors si nous voulons avoir du coeur, ayons aussi le sens des responsabilités et le courage de dire à ces jeunes qui sont sans papiers que, si nous sommes disposés à leur offrir des formations de trois ans à plein temps menant au CFC, ou de quatre ans, ou encore une formation initiale en deux ans, nous préparons un projet pour la suite, et pas seulement une espèce de chèque en blanc qui se traduit en drames d'existence. Il ne doit pas y avoir de cul-de-sac dans la vie des gens, il faut de véritables perspectives, et je ne suis pas d'accord de leurrer la jeunesse de ce canton, même si elle n'a pas de papiers ! Personne ne le veut, vous ne le désirez pas non plus, et nous devons en tous les cas être particulièrement attentifs à ce point.
Enfin, je terminerai sur un élément qui m'a profondément choqué - d'abord parce que c'est un mensonge, Monsieur Stauffer: il n'existe aucun fichier de clandestins. Tel est peut-être votre rêve, mais ce n'est heureusement pas le cas. Et je me plais à dire que ma prédécesseure, comme celui qui l'a précédée et moi-même, avons toujours interdit la tenue de tout fichier qui ne relève d'aucune obligation légale et qui, au contraire, viole les dispositions essentielles qui font la dignité de la Suisse et de Genève, à savoir le respect de la Convention des droits de l'enfant. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter sur le renvoi de ce texte à la commission de l'économie - n'est-ce pas, Madame von Arx-Vernon ?
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1815 à la commission de l'économie est adopté par 63 oui contre 9 non.
Débat
La présidente. Nous sommes au point 25 de notre ordre du jour. Je vous rappelle que cette proposition de résolution est classée en catégorie II, c'est-à-dire trois minutes de parole par groupe, auxquelles s'ajoutent les trois minutes dévolues au premier signataire du texte. Je passe d'abord la parole à M. Weiss, puis ce sera au tour de Mme Künzler, qui a déposé un amendement. Ainsi, tout le monde pourra également s'exprimer sur cet amendement.
M. Pierre Weiss (L). Vous savez combien certains d'entre nous sont attachés à l'histoire de Genève. Je le rappelais hier soir au sujet d'un musicien, je le mentionne ce soir à propos d'un homme qui a fait la réputation de Genève, non seulement en Europe mais probablement dans le monde, et qui a eu en matière de valeurs, notamment spirituelles, une grande importance, également pour l'art de gouverner.
Cet anniversaire, qui se fêtera l'an prochain, mérite d'être soutenu par notre Grand Conseil. J'avais imaginé une solution modeste mais symbolique, qui mériterait certainement d'être développée, consistant à se féliciter des efforts déployés par une institution. Pourquoi une plus que l'autre ? Parce que cette institution est proche de nous et qu'elle a le grand avantage, dans cette séparation de l'Eglise et de l'Etat qui nous est chère et, pour certains, particulièrement sacrée, de ne pas mélanger les soutiens avec d'autres institutions de notre république. Néanmoins, et sans ambiguïté, elle exprimait la reconnaissance de Genève et de notre Grand Conseil pour les efforts fournis par le Musée international de la Réforme en vue du 500e anniversaire de Calvin.
Voilà la raison pour laquelle, d'une façon qui est peu coûteuse, sinon en reconnaissance, et qui n'enfreint pas le dogme de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, cette proposition de résolution a été déposée. Je voulais d'ores et déjà remercier non seulement ceux qui l'ont signée, mais également ceux qui se proposeraient de l'améliorer ce soir.
Mme Michèle Künzler (Ve). En lisant cette proposition de résolution, on se dit qu'elle ne mange pas de pain. Or je n'aime pas tellement les objets qui ne servent qu'à se féliciter, à dire: «Bravo les gars, c'est bien, continuez !» Car, au fond, c'est un peu se faire des amis à bon marché, et je pense que ce n'est pas du tout le but de la proposition de résolution qui est présentée ce soir.
Cette année, c'est la fête du football et l'année prochaine sera celle de Calvin. J'espère que nous ne mettrons pas sa tête sur le jet d'eau ! (Rires.)
J'estime qu'il y a un gros problème dans cette proposition de résolution, dans le sens où on laisse croire que c'est le Musée international de la Réforme qui va organiser les festivités, ce qui est évidemment totalement erroné, car il ne préparera qu'une petite partie de celles-ci. Du reste, ces festivités auront une importance internationale, même si à Genève - et c'est justement le trait du calvinisme - on ne se rend pas compte de l'aura qu'a notre cité de ce point de vue. En effet, toutes les universités américaines sont associées, ainsi que celles d'Afrique ou de Corée - de nombreux Coréens sont calvinistes, on ne le sait pas assez.
En outre, des pièces de théâtre sont prévues ainsi que d'innombrables activités culturelles, et c'est précisément en faveur de ces dernières qu'il est important, selon moi, que notre Grand Conseil agisse afin de les soutenir. Il y aura normalement une pièce de Beretti, mise en scène par François Rochais. Ce sont donc des événements importants, et nous aurons par conséquent besoin de financements.
J'aimerais rappeler à ceux qui s'inquiètent de la séparation entre l'Eglise et l'Etat que c'est pratiquement jour pour jour il y a 472 ans, le 21 mai 1536, qu'a été adoptée la réforme par le Conseil général, donc les ancêtres de ce Grand Conseil. Et en même temps qu'il adoptait cette réforme, il approuvait - cela rejoint le sujet précédent - l'instruction publique obligatoire. Nous avons donc une trace historique de Calvin et de son importance à Genève, extrêmement forte, et je pense que ce Grand Conseil doit aussi participer à ces festivités qui seront marquantes pour l'année prochaine.
Pour cette raison, je vous remercie d'accepter de transformer cette proposition de résolution en proposition de motion, pour qu'elle ait un effet et qu'elle demande qu'on participe au financement des activités culturelles.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Je dois vous dire, Mesdames et Messieurs les députés que, lorsque le groupe socialiste a pris connaissance de cette proposition de résolution, il a été un peu interloqué. En effet, lorsqu'on lit les considérants, on s'attend non pas à une invite, mais à plusieurs et, je dirai, avec un contenu réel ! Or que trouve-t-on ? Des auteurs qui se félicitent de voir une commémoration organisée bénévolement et sans soutien de l'Etat. Nous avons donc été un peu interloqués et nous sommes demandé, dans la mesure où notre ordre du jour contient plus de 150 points, s'il valait vraiment la peine de se féliciter de tout ce qui se fait de bien dans notre cité.
Puis, dans un deuxième temps, nous nous sommes dit: «Mais pourquoi pas ?» Et aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais qu'on se félicite tous ensemble de tous les bénévoles qui, dans ce canton, donnent régulièrement de leur temps pour pallier les manques, notamment dus au fait que, souvent, vous ne votez pas des budgets sociaux suffisants. Récemment, à la commission des affaires sociales, nous avons appris que 70 000 heures étaient offertes chaque année à Caritas par des bénévoles afin de s'occuper des plus démunis. Dans l'association que je préside en faveur des personnes handicapées, ce sont 10 000 heures chaque année, et ces bénévoles sortent, par exemple, des personnes handicapées de Belle-Idée, les promènent, leur permettent d'avoir des loisirs, etc.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, oui, félicitons-nous de temps à autre, mais cessons de perdre du temps avec des propositions de résolutions formulées de cette manière ! (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (R). Nous n'avons pas osé, chers collègues, nous n'avons pas osé ! Nous avons rédigé cette proposition de résolution, puis, pris d'un calvinisme aigu, nous n'avons pas osé conclure en demandant quelque chose. Mais c'est par modestie, par timidité ! Et je remercie Michèle Künzler... (Commentaires.) ...je ne sais pas ! Je la remercie d'abord d'avoir suggéré de transformer ce texte en proposition de motion, car c'est beaucoup plus clair, et d'avoir proposé une invite demandant à la République de faire un petit effort financier en faveur des activités culturelles. Culturelles, c'est très important ! Parce que nous devons vraiment observer très strictement la séparation entre l'Eglise et l'Etat, l'Etat laïc, ainsi que l'égalité de traitement. Il y a donc des principes que cette république applique, et je pense que la proposition de Michèle Künzler est tout à fait intéressante et juste.
Je ne voudrais pas tomber dans le pathos, mais il est vrai que cette réforme de 1536 a été l'élément générateur du rayonnement actuel de Genève, et futur, je le souhaite ! Alors quelles que soient nos convictions religieuses, je pense qu'on doit reconnaître cet événement dans sa dimension historique et ce messianisme qui fait que cette république est connue dans le monde entier.
Le groupe radical soutient donc cette proposition de motion et accepte les amendements proposés par Mme Künzler.
Mme Janine Hagmann (L). Il est vrai qu'il y a eu un enthousiasme de la part des signataires de cette proposition de résolution qui, après coup, a peut-être créé quelques remous au sein des parties agissantes qui s'occupent de la préparation de ce 500e anniversaire, si bien que nous nous sommes dit que le mieux est souvent l'ennemi du bien.
J'aimerais rappeler que Jean Calvin est né très précisément le 10 juillet 1509, c'est donc un jubilé d'importance que Genève fêtera l'année prochaine au sein de ses murs, parce que les 500 ans d'une personnalité d'exception, c'est un événement majeur ! Il faut également savoir qu'une gamme très variée d'événements académiques, culturels, festifs est d'ores et déjà prévue, qui permettra, non seulement à la cité de Calvin mais au monde entier, de se remémorer tout ce que l'on doit au grand réformateur et à l'ensemble de son oeuvre. Or je pense que, pour qu'il y ait un rayonnement universel, il faut que tout le monde y mette du sien. Mme Künzler l'a dit, cette année, c'est la fête du foot, et cette dernière s'est préparée de longue date ! Alors si l'on veut que ce jubilé soit un rayonnement pour la cité, il faut également lui donner les moyens d'exister !
Le seul élément qui a peut-être été un peu mal vu par les signataires de cette proposition de résolution, c'est que, pour qu'une fête soit réussie, il faut que ce soit un ensemble d'acteurs qui y participe. Les personnes figurant dans l'organigramme du jubilé représentent un ensemble beaucoup plus vaste que le Musée international de la Réforme ! Il comprend notamment l'Alliance réformée mondiale, la Fédération des églises protestantes de Suisse, le Musée international de la Réforme, mais aussi l'Université de Genève, la Société du musée historique, et ces acteurs vont former un tout grâce auquel une impulsion à ce 500e anniversaire verra le jour et lui permettra de rayonner.
Par conséquent, Madame Künzler, nous acceptons très volontiers votre amendement. En outre, cette proposition de résolution respecte la pluralité à laquelle nous nous sommes toujours attachés dans cette enceinte, c'est aussi pour cela que des députés de différentes religions ont voulu la signer.
Je termine par une petite citation, afin de vous laisser une pensée pour la nuit. Il est important de se souvenir que Calvin disait: «La foi est une vision des choses qui ne se voient pas.» Pensez-y !
M. Eric Leyvraz (UDC). Genève a été profondément et durablement marquée par l'extraordinaire personnalité de Calvin. Même si l'on ne considère qu'un seul des domaines où il a excellé, il a déjà laissé une trace indélébile à Genève. Le sujet religieux a déterminé l'importance mondiale de notre petite ville et la fondation du Collège, phare de l'éducation de notre cité depuis quatre cent cinquante ans - en effet, l'année prochaine, en 2009, nous célébrerons également le 450e anniversaire de notre collège, qui sera une magnifique fête, je l'espère - ainsi que de l'Académie, ancêtre de l'Université, a donné un élan décisif à l'éducation et au rayonnement de Genève. Dès lors, saisit-on vraiment la chance qu'on a eue d'avoir un tel citoyen en nos murs ?
Nous devons donc véritablement célébrer avec reconnaissance, quelles que soient nos sensibilités religieuses ou politiques, le 500e anniversaire de ce grand homme, avec des moyens adéquats et dignes de l'événement ! Parce que si ce n'est pas le cas, autant ne rien faire ! Pour ces raisons, nous soutenons l'amendement de Mme Künzler et espérons qu'il passera haut la main.
M. Guy Mettan (PDC). Je ne sais pas si c'est vrai, mais il se trouve que, à première vue, je suis le seul catholique à avoir signé cette proposition de résolution... Avec M. Walpen ! Alors je vais parler en notre nom ! En tous les cas, pour ma part, je reconnais que, lorsqu'on m'a proposé ce texte, j'ai eu dans un premier temps une petite seconde d'hésitation en pensant que, quand même, Calvin n'était pas le premier ami des papistes et qu'il fallait donc que je réfléchisse ! Mais, toute réflexion faite, j'ai signé cette proposition de résolution - et sans doute Francis Walpen l'a fait aussi - parce que je trouve qu'il est très important que des députés d'origine catholique, c'est-à-dire d'une autre tradition religieuse que Calvin, soutiennent un texte tel que celui-ci, et pour deux raisons.
La première, c'est que, depuis quelques décennies, notre monde se déchire pour des raisons d'intégrisme et de fondamentalisme religieux. Par conséquent, je trouve qu'il est important que, dans une ville comme Genève, des catholiques s'associent au 500e anniversaire d'un homme qui a remis en cause cette religion, et ce fut donc pour nous un motif suffisant de le faire.
La deuxième raison, c'est que Genève est quand même - on l'oublie trop souvent - la capitale de l'oecuménisme ! Elle accueille du reste le Conseil oecuménique des églises. Il est donc important que d'autres religions s'associent à l'anniversaire de Calvin.
Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien soutiendra cette proposition de résolution, ainsi que l'amendement déposé par Mme Künzler.
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je regrette, mais je n'ai pas signé cette proposition de résolution. Je me suis en effet caché derrière mon chef parlementaire, qui, lui, avait déjà signé... Non, ce n'est pas vrai ! En réalité, je trouve dommage que, dans ce texte, on ne mentionne pas un élément important, à savoir que Calvin a été l'esprit d'une Genève nouvelle, d'une Genève rayonnante dans le monde entier. Et ce qu'on oublie peut-être de dire, c'est que si l'on a des institutions internationales à Genève, c'est quand même grâce aux protestants américains, qui ont voulu faire de la Rome protestante également la représentante européenne de la Société des Nations, puis de l'ONU. C'est toute une culture que cette histoire nous a apportée, et il me semble qu'on devrait non pas le rajouter, mais quand même avoir une pensée émue à cet égard.
Cette grande manifestation serait peut-être l'occasion de nous rapprocher de la communauté internationale en l'invitant à célébrer cette fête avec nous.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Deneys, à qui il reste une minute. (Commentaires.) Il vous reste une minute pourtant ! (Brouhaha.) Prenez le micro d'à côté, Monsieur le député, il y a un problème technique !
M. Roger Deneys (S). Cela tombe bien, parce que cette minute sera amplement suffisante pour répondre à mon interrogation première, qui était de savoir pourquoi toutes ces personnes avaient signé cette brillante proposition de résolution qui ne mange pas de pain. Je pense que c'est en partie lié à la date de dépôt, le 25 septembre 2007, soit en gros un mois avant les élections nationales. Ça devait bien tomber ! Mais ce n'est pas de cela que je voulais vous parler.
Fondamentalement, ce que je trouve très intéressant ce soir, c'est qu'on pourra dire dans ce Grand Conseil: «Post tenebras Künzler !» Pour ma part, je garderai toujours la devise suivante: ni dieu, ni maître.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Brièvement, j'aimerais dire que la personnalité de Calvin a effectivement marqué notre république, à tel point que nous parlons régulièrement de «la cité de Calvin» pour évoquer une république laïque, ce qui est pour le moins paradoxal, vous en conviendrez. Ce que l'illustre Jean Calvin nous aura notamment apporté, au-delà d'une tradition qui fait partie du patrimoine, à savoir le protestantisme, ce sont des éléments liés à la connaissance, car nous fêterons l'année prochaine non seulement le 500e anniversaire de Calvin, mais également les 450 ans de l'Académie, du bâtiment et, en même temps, de l'Université de Genève, puisque celle-ci était directement ancrée dans ces bâtiments.
Il est donc pour le moins souhaitable qu'une mobilisation importante se déroule. Il n'appartient pas au gouvernement de la planifier mais de la soutenir, et de faciliter et d'accompagner les initiatives privées, associatives et publiques, pour permettre un digne rayonnement qui se fera dans la diversité de l'approche et dans les débats. En effet, nous avons profondément besoin de réflexions sur des sujets aussi complexes que notre rapport à notre passé ou l'héritage de Jean Calvin, notamment eu égard à ce qu'il aura amené à la connaissance à Genève.
Je vous remercie donc, si vous nous adressez une proposition de résolution, de l'inscrire dans la diversité, dans le respect de la variété des initiatives, parce que si le Musée international de la Réforme est là pour souligner l'importance de Genève en matière de protestantisme, il n'en demeure pas moins que ce dernier n'a pas l'exclusivité de la commémoration de Calvin. Il convient donc, au contraire, de faire en sorte que celle-ci soit diversifiée et repose sur nombre d'initiatives qui ont d'ores et déjà été annoncées auprès du Conseil d'Etat, qui s'engagera financièrement en faveur de ces deux événements.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis de deux amendements. Le premier consiste à transformer cette proposition de résolution en proposition de motion.
Mis aux voix, cet amendement (transformer la proposition de résolution en proposition de motion) est adopté par 46 oui contre 8 non et 10 abstentions.
La présidente. Cette proposition de résolution devient donc la proposition de motion 1826.
Adoption de la motion 1826: Session 08 (mai 2008) - Séance 46 du 23.05.2008
La présidente. Le second amendement... (Aboiement. Brouhaha.) Que se passe-t-il ?
Des voix. C'est un chien ! (Commentaires.)
La présidente. Bien ! Le second amendement consiste à rajouter une invite (nouvelle teneur): «invite le Conseil d'Etat, au vu de l'importance de cet événement pour notre cité, à prévoir lors de l'élaboration du budget 2009 une participation financière pour les événements culturels de la commémoration.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 50 oui contre 10 non et 5 abstentions.
La présidente. Nous nous prononçons sur le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la motion 1826 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 45 oui contre 12 non et 7 abstentions.
Débat
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Rappelons tout d'abord que cette pétition date de 2001, ce qui en dit long sur la rapidité du travail de notre parlement. Il faut aussi relever que l'invite principale, à savoir la création de postes, est dépassée, puisqu'elle a été exaucée au fil du temps et que les postes réclamés ont été octroyés. Cela n'a pas empêché la commission d'accomplir sur cette pétition obsolète un travail assez approfondi, je crois qu'on peut le dire, parce qu'elle touche un sujet important: les activités du service de santé de la jeunesse - SSJ.
Le rapporteur de minorité ne me contredira sans doute pas si je dis qu'en commission tout le monde a reconnu le sérieux et l'importance de ce service de santé de la jeunesse sur le terrain. Là où les divergences sont apparues, c'est sur certaines statistiques alarmistes qui ont été produites quant au nombre d'infirmières par élève puisque, dans les statistiques figurant dans le rapport, on ne considère cette problématique importante que par le petit bout de la lorgnette et on ne tient pas compte des effectifs ni des initiatives prises dans ce domaine par le département de l'économie et de la santé - DES. Cela nous donne au final une vision faussée, ce que bon nombre de commissaires ont relevé durant nos travaux.
Lors de nos débats, nous avons entendu, outre les représentants des syndicats, qui ont reconnu que leurs volontés avaient été pour la plupart exaucées, un représentant de l'office de la jeunesse, qui a souligné que durant son mandat à ce poste il n'avait reçu aucune plainte quant à la qualité des prestations fournies. Il a en outre confirmé que des gains d'efficience importants avaient pu être réalisés suite à des réorganisations du service et que, grâce à cela, il y a eu beaucoup plus de personnes, donc d'infirmières, sur le terrain - c'est ce qu'au fond tout le monde réclame - et moins de personnel administratif dans le back office. Par ce témoignage, on nous montre que la réforme de l'Etat est possible, qu'elle s'est faite dans le temps de manière efficace, qu'il n'y a pas eu de réclamations quant à des baisses de prestations et que, surtout, le problème important de la prévention et des prestations offertes dans le cadre des écoles par les infirmières ne doit pas être considéré par un bout de la lorgnette, mais de manière globale, avec l'appui important du département de l'économie et de la santé. Il est important de souligner que c'est lui qui est responsable de définir ce qu'est le programme de santé publique et qu'il n'appartient pas au service de santé de la jeunesse de fixer ces priorités qui ne sont pas de sa compétence. Cela risque au contraire de causer des confusions de rôle entre les différents services, ce qui est néfaste au travail sur le terrain, qui doit être effectué par ce service mais selon une politique définie par le département responsable, c'est-à-dire le DES.
Avec la majorité de la commission, je vous invite donc à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Comme l'a souligné mon préopinant, nous avons traité avec sérieux cette pétition à la commission des finances, mais il faut relever que les rapports sur ce texte, rédigé pourtant en 2001, n'ont été déposés qu'à la session d'avril 2008... Il s'est donc passé sept ans entre le dépôt de cette pétition et son traitement, alors même qu'il s'agissait de prévention au niveau du service de santé de la jeunesse ! C'est dire combien ce parlement donne de l'importance à ce sujet.
Pour en revenir à cet objet, je crois qu'il y a une divergence entre ce qui est exposé par le rapporteur de majorité et moi-même. A l'époque où cette pétition a été déposée, la dotation en personnel pour le budget 2002 était de 8,4 postes au service de santé de la jeunesse, alors que les pétitionnaires estimaient les besoins à plus de 16. Et comme ils n'ont pas été satisfaits, qu'ont-ils fait ? Il semblerait qu'ils aient pioché des postes à droite et à gauche, notamment dans le «fonds drogue», etc. C'est quand même grave ! En effet, cela contrevient à la gestion financière de l'Etat puisque, lorsqu'on affecte dans le budget des postes à une mission, il n'est pas normal, sans en informer la commission des finances ni les députés, de prendre des personnes affectées à une tâche pour les assigner à une autre.
Je salue néanmoins les fonctionnaires qui ont fait cela, parce qu'ils étaient guidés par le bien commun, par le bien du service public. Ils se sont dit: «Comme nous sommes en déficit de postes, nous faisons ce que nous pouvons !» Mais tout de même, c'est un bricolage total, qui engendre une opacité dans la gestion du personnel de l'Etat. Alors, si ce service de santé de la jeunesse a pu répondre aux besoins, c'est dans ce contexte-là, mais ils nous ont bien précisé qu'il était vraiment difficile de travailler ainsi.
Entre 1990 et 2007, les effectifs de l'instruction publique, c'est-à-dire des élèves, ont augmenté de 20%, et pourtant le SSJ n'a pas suivi, à tel point qu'entre 2006 et 2007 la dotation en infirmières a régressé de 1,8 poste; on voit donc qu'on n'a pas fait preuve de volonté en matière de prévention.
Lorsque j'ai moi-même posé la question de savoir s'il y avait eu des réclamations, puisque le service chargé notamment de prévention en matière de santé de la jeunesse était sous-doté, on nous a signifié qu'il y avait effectivement eu des plaintes de la part des directeurs d'établissements en raison des baisses de prestations fournies par les services. Le rapporteur de majorité fait donc une interprétation des chiffres, et moi une autre.
Comme corollaire, chers collègues, ce que je peux dire, c'est que le manque de prévention affecte toujours les classes les plus défavorisées, car les plus favorisées, à la limite, peuvent toujours surseoir à un manque d'effectif et, de surcroît, de prestations. Mais je ne suis pas d'accord, parce que j'estime que, quel que soit le revenu des personnes, une fois qu'elles ont payé l'impôt républicain, elles ont, les riches comme les pauvres, droit aux mêmes prestations à l'école. Or, lorsqu'il y a un déficit de prestations par manque de dotation, les personnes aisées peuvent toujours s'en tirer, alors que les moins aisées n'y parviennent pas toujours, car elles ne peuvent pas aller chercher leurs prestations en dehors du service public.
J'estime donc que, puisqu'elle concerne la jeunesse, la santé de la jeunesse - et cela a des conséquences sur les budgets futurs - il est important qu'on prête la plus grande attention à cette pétition. Même si elle a été déposée en 2001 ! En outre, comme il semblerait qu'en 2008 la situation n'a pas énormément évolué, je considère que ce texte est d'actualité, raison pour laquelle je désire qu'il soit renvoyé au Conseil d'Etat, contrairement à mon préopinant qui, lui, souhaite son dépôt sur le bureau.
La présidente. Merci, Monsieur le député, nous mettrons tout à l'heure aux voix la proposition du rapporteur de majorité, puis la vôtre.
M. Pierre Losio (Ve). Nous avons été heureux d'apprendre que, depuis 2001, la situation s'était améliorée en ce qui concerne les postes qui faisaient l'objet de cette pétition. Nous en sommes très satisfaits !
M. le rapporteur Cuendet a fait état d'informations que nous avons apprises concernant les chiffres mentionnés, les ratios d'infirmières par école, mais nous avons également reçu une autre information par le biais d'un document remis par la délégation du personnel du SSJ - et celui-ci ne date pas de 2001 mais du 30 janvier 2008 - selon lequel la situation actuelle entraîne les effets suivants: la suppression des visites de santé systématiques dans certains degrés scolaires, ainsi que dans les institutions de la petite enfance; la limitation de la durée des visites de santé par les infirmières; la suppression, au cycle d'orientation, des visites de santé pour les 7es années afin d'assurer les vaccinations contre l'hépatite B et les papillomavirus humains - HPV - et, au postobligatoire, la suppression des visites systématiques de santé en 1ère année, qui ont pour but la prévention des ruptures d'apprentissage.
Nous pensons que ce sont des signes préoccupants, et comme dans le domaine de la santé la prévention est l'un des piliers les plus fondamentaux, particulièrement lorsqu'elle est destinée à une population d'enfants, d'adolescents ou de jeunes adultes, toutes ces suppressions nous inquiètent et nous vous demandons par conséquent de bien vouloir renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, car nous souhaitons lui faire part de nos préoccupations.
M. Guy Mettan (PDC). Il est vrai que le Grand Conseil, plutôt la commission des finances a pris son temps - sept ans ! - pour examiner cette pétition. En qualité de président de cette commission, j'ai souhaité qu'on puisse boucler ce dossier, parce que le problème était important, en tout cas à l'époque.
En 2001, il s'agissait d'un problème aigu, mais la réponse à la pétition se trouve aujourd'hui contenue dans un petit paragraphe situé à la page 2. M. Montfort, du DIP, explique qu'entre-temps le département de l'instruction publique - et M. Beer va sans doute nous le confirmer tout à l'heure - a consenti des efforts conséquents pour augmenter le personnel du SSJ, puisqu'il est passé de 88 postes en 2002 à 101 postes l'année dernière, ce qui représente une hausse de plus de 15%.
Cela nous a semblé suffisant, raison pour laquelle nous recommandons, plutôt que de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, de la déposer simplement sur le bureau du Grand Conseil.
M. Claude Aubert (L). J'aimerais simplement signaler que probablement 99% des enfants et adolescents de Genève sont suivis par des psychiatres, des pédiatres ou des médecins généralistes d'exercice privé. Par conséquent, penser que seul le service de santé de la jeunesse fait de la prévention est un peu à la limite de la mystification ! Je crois qu'il faut laisser au secteur privé le fait qu'il se soucie lui aussi grandement de ce domaine, et ce qu'il faut souhaiter c'est une bien plus grande collaboration avec ce système privé.
M. Alain Charbonnier (S). On a entendu de nombreuses choses dans ce débat. Je tiens tout de même à signaler quelques chiffres, qui nous ont été donnés en commission: à l'école primaire, il y a une infirmière pour 1600 élèves; au cycle d'orientation, il y en a une pour 1800; et au postobligatoire, une pour 2000 !
M. Aubert nous dit qu'il faut laisser le secteur privé travailler et qu'il est tout à fait efficace... Je n'en suis pas très sûr, Monsieur Aubert ! Certes, le privé est mis à contribution et répond très bien aux demandes découlant de maladies déclarées des enfants, lorsque les parents vont chez le pédiatre ou aux urgences pédiatriques, comme on l'a vu dans d'autres débats, mais, pour ce qui est de la prévention, des problèmes de vaccination et autres, il en va autrement ! Et l'on s'aperçoit que le service de santé de la jeunesse fait à ce niveau-là un travail remarquable et qu'il manque malheureusement d'effectif.
Tout à l'heure, M. Mettan - sauf erreur - a déclaré que le représentant du département avait indiqué qu'il y avait suffisamment de monde et de postes au SSJ; ce n'est pas tout à fait ce qu'il nous a dit, puisqu'il a précisé que, pour la petite enfance, il estimait qu'il y aurait vraiment besoin de postes dans les domaines moins bien surveillés comme les mamans de jour et les familles d'accueil. C'est lui qui nous l'a affirmé ! Des postes supplémentaires sont donc vraiment nécessaires dans ces domaines-là.
D'autre part, M. Losio a rappelé précédemment la liste donnée par les personnes oeuvrant sur le terrain au service de santé de la jeunesse, qui indique les suppressions de prestations ayant eu lieu ces dernières années au SSJ.
Je vais en reprendre certaines, parce qu'elles sont d'importance, comme la limitation de la participation aux activités extra-scolaires. C'est la formulation officielle telle qu'elle est notée, mais, entre parenthèses, il est expliqué que cela signifie, par exemple, les journées sportives ou les camps permettant l'intégration des enfants souffrant de handicaps... Ce n'est quand même pas rien ! Et ce ne sont pas les pédiatres de ville qui vont accompagner les enfants lors de ces journées !
Ensuite, il y a l'interruption de la participation du SSJ à certains programmes d'éducation pour la santé, par exemple - et c'est à nouveau entre parenthèses mais, contrairement à M. Losio, je vais vous en parler: «Anatole», programme de prévention des abus de substances. Qui d'autre que les infirmières scolaires est le mieux placé au niveau de l'école pour effectuer ce travail de prévention ? Ce ne sont en tout cas pas les pédiatres qui ont le temps de le faire dans leur cabinet, vu les tarifs TARMED appliqués aujourd'hui !
On pourrait citer encore d'autres exemples, comme la suppression au cycle d'orientation des visites de santé des 7es pour assurer les vaccinations. Or - et vous transmettrez à M. Aubert, Madame la présidente ! - dans quelques cycles d'orientation, les parents issus de certaines populations n'emmènent pas forcément leurs enfants se faire vacciner. C'est malheureux, mais les personnes provenant de certains milieux socioculturels ne pensent pas toujours à ce genre de choses, et là les infirmières scolaires sont vraiment les mieux nommées pour accomplir ce travail. Il est donc indispensable de renforcer ces services.
Nous vous proposons par conséquent, comme l'a dit mon collègue Velasco, de renvoyer au Conseil d'Etat cette pétition, qui n'est pas du tout désuète. En effet, sur trois invites, il y en a en tout cas deux qui sont tout à fait d'actualité, au vu de ce que nous ont dit les représentants du SSJ. Je vous prie donc d'accepter le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Monsieur Aubert, il est vrai que le secteur privé oeuvre également dans ce domaine, il faut le relever. Je n'en doute pas ! Mais la question est de savoir qui s'appuie sur qui. Je ne pense pas que ce soit le SSJ qui doive s'appuyer sur la médecine privée mais le contraire. Je considère le service de santé de la jeunesse comme étant capable de détecter les problèmes très en amont, quitte à ce que ces enfants soient ensuite renvoyés chez leur pédiatre ou dans le secteur privé. En tous les cas, il est éminemment important, du moins pour une certaine classe de la population, que ce service fonctionne de manière adéquate en amont.
Certains députés affirment que le service est aujourd'hui suffisamment bien doté, alors que d'autres prétendent le contraire à l'aide d'arguments et de chiffres. Chers collègues, il serait donc intéressant que, après huit ans, le Conseil d'Etat établisse un point de la situation si nous lui renvoyons cette pétition. En effet, ce n'est qu'une pétition, et le Conseil d'Etat peut y répondre entre autres par un rapport, sans avoir forcément à prendre des mesures. Oui, ce n'est qu'une pétition, chers collègues, je tiens à le rappeler ! Mais elle peut nous aider les uns et les autres à avoir une vue un peu plus claire de ce qui se passe actuellement.
C'est la raison pour laquelle, sans aucune animosité à l'encontre de mes collègues de la droite, je demande que le Conseil d'Etat se saisisse de cette pétition et qu'il fasse le point sur la situation.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. J'ai entendu de nombreuses choses ce soir et relevé finalement très peu d'exactitudes dans l'ensemble des propos tenus.
Oui, nous avons comblé l'écart depuis 2001. Oui, nous sommes passés de 88 postes à 101 postes. Nous l'avons fait. mais en même temps, durant cette période, les tâches se sont accrues, le pourcentage des élèves a augmenté de pratiquement 25% et les demandes se sont multipliées vis-à-vis des écoles privées et de la petite enfance. Par conséquent, il est juste de dire que le Conseil d'Etat, respectivement le Grand Conseil, a consenti à répondre aux invites de la pétition mais que, aujourd'hui, la situation n'est pas totalement satisfaisante, loin s'en faut. Je me permettrai de mettre en avant, malgré tout, un certain nombre de réalités.
La première - et j'ai envie d'être un peu cruel avec l'époque des gouvernements et des parlements des vaches grasses - c'est que, chaque fois qu'une tâche tombait, l'exécutif et le législatif l'ignoraient et les postes étaient réalloués au sein même de l'administration. Les gouvernements respectifs, comme les parlements, étaient contraints de demander chaque fois qu'il y avait des besoins supplémentaires.
Or aujourd'hui - il faut bien le dire et le SSJ en est une parfaite illustration - les prestations ont été revues. En même temps, les éléments de la pétition ne donnent pas la réalité du mouvement. Mais toutes les prestations ont été revues, et heureusement ! Parce que les besoins en matière de santé publique ont évolué. En effet, le rôle des infirmières scolaires a beaucoup été modifié, dans le sens notamment d'une détection précoce de l'ensemble des problématiques, pas seulement de santé mais également sociales.
Aujourd'hui, le Conseil d'Etat vous l'a dit à travers de multiples plans de mesure et un certain nombre de travaux engagés, nous devons aussi apprendre à utiliser ce qui est en notre possession. Et notre tâche est particulièrement difficile aujourd'hui parce que, dans certains secteurs, nous sommes probablement sous-dotés, mais, en même temps, je ne suis vraiment pas convaincu que nous soyons parfaitement bien organisés. Nous devons travailler sur la qualité de l'organisation, sur l'efficience, et le Grand Conseil en est particulièrement conscient, puisque la commission de contrôle de gestion interpelle régulièrement le Conseil d'Etat - le département de l'instruction publique en particulier - pour savoir comment il coordonne le dispositif contre la maltraitance, sachant que de nombreuses personnes s'occupent de ce problème, en fonction de protocoles différents, dans le secteur public comme dans le privé. Il ne suffit pas de rajouter des postes à des postes pour obtenir une réponse efficace, et en tout cas pas efficiente.
Mesdames et Messieurs les députés, Genève compte probablement le plus grand nombre au total d'infirmières, d'éducateurs, d'assistants sociaux, mais également d'animateurs, d'enseignants, de médecins pour la jeunesse et de psychologues au kilomètre carré et par élève ou enfant de notre planète, et c'est une excellente chose. J'estime donc qu'aujourd'hui la priorité du Conseil d'Etat est de faire en sorte que les dispositifs fonctionnent correctement. Et je ne veux pas laisser passer ce débat sans rendre un hommage appuyé aux infirmières scolaires, qui sont particulièrement sollicitées et qui méritent notre reconnaissance. Je n'entends pas que celles-ci soient livrées à l'abandon ou à l'absence de moyens.
C'est pourquoi nous nous employons à une réorganisation très profonde de nos dispositifs d'aide, en agissant succinctement de la manière suivante. Premièrement, nous continuons à travailler en ce qui concerne la coordination des dispositifs de maltraitance; deuxièmement, nous renforçons le rôle des établissements scolaires du cycle d'orientation, du postobligatoire et tout particulièrement de l'enseignement primaire, de manière que des directions d'établissement, sur la base des signalements des enseignantes et des enseignants, soient aptes à se coordonner avec l'office de la jeunesse, qui a pour tâche également de mieux organiser l'intervention de ses différents services. Et l'introduction d'éducateurs dans les établissements du réseau d'enseignement prioritaire vient justement relever ce type de défis.
Nous ne répondons donc peut-être pas exactement à l'esprit de cette pétition, mais j'aimerais dire que nous avons la responsabilité de faire en sorte que l'ensemble des acteurs publics et privés se coordonne et que, partout où il y a un service public, il existe des responsables des dispositifs et, enfin, que des cartes scolaires ou régionales d'intervention soient mises en phase, de manière à permettre une meilleure efficacité du dispositif.
Oui, nous pouvons donc continuer les travaux. Si vous voulez nous renvoyer cette pétition, faites-le, nous ne sommes que trop conscients du problème, mais sachez également que, de toute manière, vous serez encore interpellés et saisis régulièrement par le Conseil d'Etat, notamment en matière d'organisation et de moyens et concernant le suivi des élèves sur le plan sanitaire, psychologique et social, qui mérite notre attention, parce que c'est également un facteur de réussite scolaire et d'intégration.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des finances (dépôt de la pétition 1358 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 46 oui contre 25 non.
Débat
La présidente. Nous passons maintenant au point 27 de notre ordre du jour. Messieurs les rapporteurs, je vous remercie de prendre place rapidement, nous avons un horaire à respecter !
M. Claude Aubert (L), rapporteur de majorité. Comme vous avez tous lu les rapports, nous pouvons être brefs, d'autant plus que, comme il s'agit d'une pétition déposée en 2005, traitée en commission en 2007 et que nous abordons en 2008, le fait que ce texte soit finalement déposé sur le bureau du Grand Conseil ou renvoyé au Conseil d'Etat est une question à la limite du dérisoire.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Voilà qui était bref ! La parole est au rapporteur de minorité, M. François Thion.
M. François Thion (S), rapporteur de minorité. Cette pétition n'est pas complètement dépassée, bien qu'elle date de 2005. Je rappelle qu'il s'agit d'une pétition émanant des étudiantes et étudiants de l'Ecole d'ingénieurs et qu'elle contient 220 signatures. Certes, la demande principale des pétitionnaires est dépassée, car il n'est plus possible de rouvrir la filière de génie chimique, mais, si l'on examine l'autre demande, celle qui vise à assurer le maintien des filières professionnelles à Genève, je crois que cet objet reste d'actualité.
Je rappelle qu'en 2001 il y avait onze filières à l'Ecole d'ingénieurs et qu'il n'en reste plus que six à l'heure actuelle. La situation est donc inquiétante pour l'avenir de cette école, d'autant plus qu'on nous a appris que les effectifs ne cessaient de baisser ces dernières années et que cette école ne fait plus recette auprès des jeunes, et en particulier des jeunes filles.
Les représentants de l'association des étudiants nous ont clairement indiqué que l'ambiance à l'école était mauvaise et l'ancien directeur de l'Ecole d'ingénieurs, qui a démissionné depuis lors - je ne sais pas si on lui a trouvé un successeur, mais je crois que ce fut assez difficile - nous a déclaré lors de son audition qu'il faudrait «mettre le paquet» en matière de communication pour faire revenir les jeunes dans cette école. J'ignore si cela a été fait depuis.
Pour le groupe socialiste, il est important de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, afin que la volonté des pétitionnaires d'assurer le maintien des filières professionnelles à l'Ecole d'ingénieurs soit prise en compte. Notre groupe souhaite également être rassuré par notre gouvernement sur l'avenir de cette école, au moment où elle fusionne avec celle de Lullier et où les pressions et les impatiences de la Confédération se font entendre.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Plusieurs personnes se sont encore inscrites: je leur demande d'être brèves, parce que nous devons terminer notre séance à 23h. Vous le savez, la télévision Léman Bleu ne diffuse plus nos débats après cette heure... Enfin, si l'on dépasse, on dépasse !
Mme Catherine Baud (Ve). La commission de l'enseignement supérieur a effectivement étudié très tardivement cette pétition. L'Ecole d'ingénieurs comprenait, à l'époque du dépôt de ce texte, à la fois les niveaux secondaires et supérieurs; en outre, elle était en pleine mutation, et cela déjà depuis plusieurs années. C'est à ce moment-là qu'elle a dû accepter des normes venant de la HES-SO, ce qui représentait un complet changement culturel. La commission a néanmoins souhaité traiter ce texte avec attention et a auditionné tant les pétitionnaires que les représentants des enseignants.
Il est alors apparu clairement, en écoutant ces différentes personnes, que les divers acteurs étaient passablement démotivés, en raison essentiellement d'une perte de repères au sein de leur école. Il ne s'agit évidemment pas de revenir au système antérieur ou de s'agripper au passé, comme il l'a été dit dans le rapport de majorité, mais bien d'être clair et d'informer correctement les étudiants et les membres du corps enseignant, afin de créer et de maintenir une dynamique dans cette école.
La pétition demandait à l'époque le maintien de la filière de génie chimique. Il est vrai que cette demande est totalement obsolète aujourd'hui, puisque ces matières sont enseignées sous une autre forme à Fribourg. Mais il convient néanmoins de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour les raisons suivantes.
D'abord, d'une manière générale, il faut que les décisions en matière d'HES aillent en faveur du maintien et de la valorisation de filières qui existent déjà et qui sont performantes. Il faut ensuite que les informations au sujet des formations soient claires et les titres délivrés compréhensibles, notamment par les employeurs. L'Ecole d'ingénieurs de Genève a incontestablement perdu du prestige lors de cette évolution et il y a beaucoup à faire pour que les élèves aient à nouveau envie de choisir cette voie dès le niveau secondaire. Je pense là notamment aux jeunes filles, qui sont vraiment très peu présentes dans cette école. En outre, il faut bien entendu que les entreprises connaissent les formations. Par conséquent, un gros effort d'information doit être consenti en ce sens, sinon d'autres filières vont fermer elles aussi, et cette fois-ci ce sera également faute d'étudiants.
Nous demandons donc le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.
Mme Janine Hagmann (L). Lorsqu'on passe devant l'Ecole d'ingénieurs, on peut voir sur la paroi un immense panneau, sur lequel est écrit en lettres de feu: «Avec les HES, créons l'avenir !» Alors d'accord, l'intention est là, mais, pour créer l'avenir, il faut aussi le vouloir et y mettre de la bonne volonté.
Je pense que les HES - on en a souvent parlé dans cette enceinte - après avoir eu quelques maladies d'enfance, ont trouvé maintenant un rythme de croisière assez extraordinaire, qui est le suivant: «On ne peut pas faire tout partout !» Alors, du moment qu'on a voulu créer des écoles qui sont en réseau et qui ont des filières, on est obligé d'admettre que certaines choses se font dans tel endroit et certaines autres dans tel autre. La qualité est évidemment respectée, parce que les HES privilégient l'excellence. Vous le savez, ce terme d'«excellence» est important !
Malheureusement, à l'Ecole d'ingénieurs il existe un problème de mentalité. C'est du reste de cette école, vous le savez tous, qu'était partie l'initiative contre les HES. Par conséquent, pour arriver à changer cette mentalité, il faudra du temps, ce ne sera pas facile, et je pense que, si les professeurs qui sont en place veulent respecter ce qui est inscrit sur leur paroi, ils doivent également y mettre du leur.
Cette pétition n'a plus sa raison d'être, car vous savez très bien qu'on ne peut pas avoir tout partout. C'est la raison pour laquelle il faut la déposer sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement, tout en affirmant que chacun ici veut la qualité. Maintenant que l'Ecole d'ingénieurs de Lullier et celle de Genève sont regroupées, notre canton est un modèle cité dans tous les autres comme réussite de la HES. Alors soyons fiers de cela !
M. Patrick Saudan (R). Cette pétition est certes un peu dépassée, mais elle nous interpelle néanmoins à plus d'un égard.
Le groupe radical va néanmoins, lui aussi, soutenir le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. En effet, il faut se rendre compte qu'il y a eu une disparition de la masse critique d'étudiants désireux de suivre une formation d'ingénieur en génie chimique à Genève, et l'espace de formation ne peut plus être maintenant que régional. Est-ce que cela marche ? C'est la question qu'il faut se poser. Si vous téléphonez à la HES de Fribourg, vous apprendrez qu'il y a à l'heure actuelle 66 étudiants en génie chimique. Sur ces 66 étudiants, 14 proviennent de Genève. L'instruction au niveau régional est donc une réalité et les HES fonctionnent.
Cet objet nous interpelle également à un autre égard, qui est important pour notre propre fonctionnement. Cette pétition, signée par 220 personnes, a été déposée en 2005 et n'a été traitée par la commission qu'en 2007, pour arriver en plénière en 2008. Je pense que le constat est sans appel: nous traitons mal les pétitions, surtout celles qui sont importantes, et il faut donc que nous revoyions le fonctionnement de notre Grand Conseil à ce sujet.
M. Michel Forni (PDC). Je serai bref, car je crois que tout a été dit ce soir: cette pétition contient 220 signatures, on déplore un retard de deux ans dans le traitement de cet objet et le système HES est en plein développement, avec ses processus décisionnaires et ses filières. Nous avons également parlé de masse critique et savons que 14 sur 60 étudiants à Fribourg viennent de Genève.
Dans ces conditions, soyons francs, la décision est déjà prise ! Le système fonctionne, la HES remplit son rôle, nous devons donc nous habituer à une nouvelle forme et également adapter nos étudiants au processus qui est celui des HES.
Le PDC privilégie l'idée que Genève peut s'adapter à cette évolution et à cette trajectoire des HES. Il approuve donc le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Philippe Guénat (UDC). Pour terminer, je dirai que beaucoup ont vu dans l'appellation HES quelque chose de grand ainsi que de futures améliorations de l'instruction, mais cette appellation entraîne également de nouvelles règles et de nouveaux standards. Et je dirai qu'on ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs !
Ce titre si convoité, «HES», nous a obligés entre autres à remplir certains critères. C'est pour cela que, entre des classes moribondes à Genève et resplendissantes de santé à Fribourg, nous avons décidé de concentrer la filière de génie chimique à Fribourg. Et c'est bien ainsi !
Le groupe UDC recommande donc le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je souhaite m'exprimer rapidement. Encore une fois, beaucoup de choses ont été dites. Les travaux parlementaires sont sérieux, mettent en évidence les enjeux et font le rappel des faits, ce qui est très éclairant pour nos débats.
Si je me permets de prendre la parole, c'est pour insister d'abord sur l'avenir. Mesdames et Messieurs les députés, évoquer le génie chimique et mécanique, ainsi que les tentatives de le transformer en génie du vivant est, bien sûr, important, mais c'est complètement hors du champ de nos préoccupations directes. Ce qui nous concerne en revanche de très près, c'est la réunion des deux écoles d'ingénieurs, celle de Lullier et celle de la rue de la Prairie. En effet, ces deux écoles rassemblent des filières prestigieuses qui, si elles sont mises en position de pouvoir développer des synergies, sont capables de nous amener bien des formations futures, de nous faire rayonner et d'agir de manière que le génie civil, l'architecture ou les techniques de l'information soient mieux développés en phase avec la gestion de la nature, l'agronomie ou encore l'architecture du paysage.
Genève a tout à gagner à devenir une capitale de l'ingénierie verte, du développement durable, des sciences de l'environnement, et à relier le devenir de cette école à l'université, au futur Institut des sciences de l'environnement et du développement durable et à HEID, spécialisé dans le développement. Parce que Genève a aujourd'hui tout à gagner à développer son savoir, ses hautes écoles, ses filières, la collaboration interinstitutionnelle et, surtout, à développer des savoir-faire directement en lien avec les grandes questions qui se posent à notre planète aujourd'hui. Si nous laissons passer l'opportunité qui se trouve devant nous pour considérer une fois de plus ce qu'il y a derrière et qu'il est douloureux de lâcher, je crains que nous ne regardions passer les trains en restant finalement en gare.
Mesdames et Messieurs les députés, sachons nous concentrer - et j'aurai l'occasion de le faire au cours des prochaines semaines - sur le devenir des HES, sur ce qu'elles peuvent offrir, notamment dans le domaine des réunions d'écoles d'ingénieurs, parce que c'est le garant du développement à Genève, d'un développement durable de l'enseignement, mais également des collaborations interinstitutionnelles, entre autres avec les organisations gouvernementales et internationales que Genève accueille. Nous avons une chance extraordinaire, et le débat parlementaire permettra, au niveau de la commission de l'enseignement supérieur, de la mettre en évidence.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission de l'enseignement supérieur (dépôt de la pétition 1556 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 39 oui contre 28 non.
La présidente. Nous nous revoyons au mois de juin, Mesdames et Messieurs les députés. Pour l'instant, je vous souhaite la plus agréable des nuits !
La séance est levée à 23h.