Séance du mardi 29 avril 2008 à 14h
56e législature - 3e année - 7e session - 38e séance

La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.

Assistent à la séance: MM. David Hiler, Robert Cramer, Charles Beer et François Longchamp, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Caroline Bartl Winterhalter, Jacques Baudit, Christophe Berdat, Gabrielle Falquet, Jacques Follonier, Nathalie Fontanet, Pablo Garcia, Renaud Gautier, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, Georges Letellier, Ariane Reverdin, Jean Rossiaud, Patrick Saudan, Damien Sidler, Ivan Slatkine, René Stalder, Daniel Zaugg et Hugo Zbinden, députés.

Correspondance

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Détermination du Grand Conseil dans le recours au Tribunal administratif formé par le Centre médical des Grangettes contre la loi 10127 du 13 décembre 2007 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (chemin Challendin) (voir C 2591) (C 2620)

Courrier de Mme WEGELIN Sylvie, Présidente du Tribunal de la jeunesse, concernant l'application des articles 15 al. 2 et 3 du droit pénal des mineurs (DPMin) et 397a et ss du code civil suisse (CCS) (transmis à la Commission des visiteurs) (C 2621)

Discussion et approbation de l'ordre du jour

M. Eric Stauffer (MCG). Je demande que le projet de loi 10242 soit inscrit à l'ordre du jour et traité en urgence, conjointement avec le point 119 de l'ordre du jour, c'est-à-dire le projet de loi 10202-A. Etant donné que nous devons traiter ce dernier point, nous pourrions faire d'une pierre deux coups, ce qui nous permettrait de gagner du temps et d'avancer dans notre ordre du jour. Ces objets concernent la Banque cantonale de Genève, notamment les remboursements de la banque cantonale à la fondation. Alors autant les traiter en une fois. Je demande donc formellement l'inscription à l'ordre du jour, le traitement en urgence et la discussion immédiate pour le projet de loi 10242.

La présidente. Monsieur le député, il s'agit du point 114, qui a déjà été renvoyé en commission. (Rires.) Il a déjà été renvoyé en commission, Monsieur le député ! Il aurait fallu demander le traitement en urgence au moment même où nous avons annoncé son renvoi en commission.

M. Eric Stauffer. Cet objet a été sorti de la liste des projets de lois renvoyés en commission ! (Exclamations.)

Une voix. Non, ça a été refusé !

La présidente. Monsieur le député, nous avons fait voter la discussion immédiate pour ce projet, et celle-ci a été refusée ! Ce projet a donc été renvoyé en commission.

Annonces et dépôts

La présidente. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:

Pétition : Donnons des espaces à la culture ! (P-1662)

Pétition 1662

PL 10202-A
Rapport de la commission de contrôle de la fondation de valorisation des actifs de la BCGe chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi 8194 accordant une autorisation d'emprunt de 246'200'000F au Conseil d'Etat pour financer l'acquisition d'actions nominatives et au porteur de la Banque cantonale de Genève et ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement pour la constitution d'un capital de dotation de 100'000F en faveur de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale afin d'assurer l'augmentation requise des fonds propres de la Banque cantonale et de répondre aux exigences de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne, du 19 mai 2000
Rapport de majorité de M. David Amsler (L)
Rapport de minorité de M. Eric Stauffer (MCG)

Premier débat

M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. Aujourd'hui, nous allons entamer un débat dont l'issue est à peu près certaine... Je pense en effet que vous avez tous vu, dans le rapport de majorité, que ce projet de loi a été voté à l'unanimité sauf une voix contre, celle du MCG.

Ce débat a dérapé sur la place publique étant donné que M. Stauffer a déjà alerté la presse, et vous avez certainement pu lire des articles au sujet de la mise en liquidation de cette fondation. En outre, il s'est également permis de publier des documents confidentiels, et je pense que cet élément va aussi faire l'objet d'un débat animé tout à l'heure. Et puis, M. Stauffer a la fâcheuse tendance, dans cette procédure, à mélanger la procédure pénale, qui est en cours - j'y reviendrai tout à l'heure - à la démarche plus politique, qui nous occupe aujourd'hui. Voilà quel est le contexte de ce débat, et il m'a semblé tout à fait sain de le situer en ce début d'après-midi ensoleillé de la fin du mois d'avril...

Alors, de quoi s'agit-il exactement ? Il me semble utile de le préciser à nouveau. Le 19 mai 2000, notre Grand Conseil a accepté la loi 9184 en urgence, un fameux vendredi soir, fort tard. Cette loi a constitué la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, et puis - comme vous l'avez lu tout à l'heure, Madame la présidente - elle a aussi octroyé un montant de 246 millions à l'Etat pour financer l'acquisition d'une partie du capital de la Banque cantonale de Genève. Pour ce faire et pour la compréhension du débat, j'ai annexé à nouveau au rapport de majorité l'excellent exposé des motifs qui a été fait par le Conseil d'Etat, qui résume, à mon avis, très bien toute la procédure qui a été mise en place en l'an 2000 pour sauver notre banque cantonale.

Je donnerai deux ou trois chiffres pour expliquer ce qui s'est passé en l'an 2000. Des créances pour un montant de 5,3 milliards, environ, ont été transférées à la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, ce qui représentait quelque 1200 objets. C'était donc la solution choisie par le Conseil d'Etat de l'époque pour sauver notre banque cantonale, issue du mariage de deux banques bien malades, victimes des années de spéculation.

Lors du transfert d'actifs, une provision de 2,7 milliards a été constituée pour couvrir les pertes. En effet, une expertise complète de tous ces objets immobiliers a été effectuée à l'époque, et la différence entre la cession de créances et la valeur effective de ces objets représentait un montant de 2,7 milliards. Nous verrons que ce montant a largement diminué aujourd'hui.

Lors de la constitution de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, sa durée de vie prévue était de dix ans. Nous sommes aujourd'hui en 2008... Après huit ans de fonctionnement, les chiffres sont largement supérieurs aux attentes - nous le verrons tout à l'heure - et ce projet de loi propose donc de mettre cette fondation de valorisation en liquidation.

Aujourd'hui, il ne reste «que» - et je mettrai «que» entre guillemets - 800 millions d'objets à réaliser environ. Je tiens ici à relever le travail efficace réalisé par la Fondation de valorisation, qui a su profiter de la bonne conjoncture pour faire diminuer les provisions de l'Etat de 2,7 milliards à quelque 2 milliards. Ce qui a fait apparaître dans les comptes de l'Etat des dissolutions de provisions pour un montant d'environ 700 millions. Et - vous avez pu le constater - les précédentes années, cette provision a été dissoute progressivement et a généré des bénéfices, un peu fictifs, c'est vrai, pour l'Etat de Genève.

Je tiens aussi à souligner l'excellent travail fourni et par le Conseil d'Etat et par notre parlement. Parce que, finalement, nous arrivons aujourd'hui au terme de ce processus, après huit ans de fonctionnement, et notre Grand Conseil s'est trouvé fortement engorgé par tous ces projets de lois qu'il a fallu voter les uns après les autres. La commission de contrôle a également réalisé un véritable travail de fourmi, puisqu'elle a dû valider les prix les uns après les autres et valider les ventes les unes après les autres.

Que reste-t-il à vendre aujourd'hui ? Un inventaire tout récent des objets qu'il reste à vendre se trouve dans le rapport de majorité. Et vous pouvez voir qu'il y en a pour environ 1,265 milliard... Quoi qu'il en soit, vous trouverez dans le rapport de majorité la liste de tous les objets qui sont ou en cours de procédure, ou en cours de réalisation, ou qui font déjà l'objet d'offres acceptées mais qui n'ont pas encore été réalisées.

Alors, qu'est-ce qui a conduit le Conseil d'Etat et la majorité de la commission à soutenir ce projet de loi ? C'est la nécessité de clore ce processus et de procéder à la liquidation de cette fondation de valorisation. Il faudra donc ajouter le terme «en liquidation» à «Fondation de valorisation», et ce à partir du 1er juin de cette année. Ce processus va toutefois durer jusqu'à la fin 2009, et, à ce moment-là, vous verrez, grâce à un subtil amendement de Me Jornot, que la fondation cessera automatiquement son activité. Tous les objets seront systématiquement transférés au Conseil d'Etat, et plus particulièrement au département des finances qui créera une cellule ad hoc pour terminer le travail.

Dans les grandes lignes, quels sont les principaux changements apportés à la loi de 2000 ? Comme vous avez pu le voir dans le rapport de majorité, et comme je viens de le dire, la «Fondation de valorisation» s'appellera désormais «Fondation de valorisation en liquidation». Et puis, le fonctionnement de la Fondation de valorisation se trouvera allégé: de cinq administrateurs, nous passerons à trois. Et la commission souhaite que l'un de ces trois administrateurs soit retenu en dehors des cinq administrateurs actuels et qu'il soit compétent dans le domaine financier. En effet, les administrateurs actuels ont de grandes compétences en matière juridique et immobilière, mais moins en matière financière. Nous faisons confiance au Conseil d'Etat pour recomposer ce conseil d'administration avec des personnes compétentes.

Par ailleurs, la commission s'est demandé s'il était nécessaire d'engager ce processus de mise en liquidation pour un fonctionnement d'un an et demi seulement... La majorité de la commission a voulu, me semble-t-il, donner un signal clair en faveur de ce processus de mise en liquidation. Et, aussi, pour que l'Etat et la fondation sortent au plus vite les derniers actifs de cette fondation, afin que la plupart des objets soient réalisés d'ici à fin 2009.

La commission a souhaité délivrer un autre message: que l'Etat se porte acquéreur d'un socle de logements sociaux pour respecter le fameux accord sur les logements d'utilité publique. J'ai, du reste, la convocation de la commission pour demain, le conseiller d'Etat Mark Muller sera présent, il nous donnera la position du Conseil d'Etat et nous indiquera quels sont les objets que l'Etat désire racheter à la Fondation de valorisation. La commission a émis un autre souhait: que l'Etat ne rachète que les objets qui rentrent dans le cadre des logements d'utilité publique, et pas des objets dont le plan financier ne correspond pas à ces fameux LUP. Voilà les messages retenus par la commission de contrôle.

Permettez-moi encore, Madame la présidente, de dire deux mots sur le rapport de minorité de M. Stauffer, donc du MCG. Je l'ai lu avec attention. Je l'ai trouvé complètement décousu, au point que je me suis demandé, Monsieur Stauffer, si vous l'aviez fait vous-même. J'ai essayé, mais vainement, de trouver un fil conducteur dans votre rapport... Vous commencez par un bref historique, qui ne respecte même pas l'ordre chronologique, et, de plus, vous produisez des pièces qui n'ont même pas été analysées en commission ! J'imagine qu'il y aura un petit débat tout à l'heure, pour savoir si un rapport de minorité doit faire état de ce qui s'est dit en commission et s'il peut comporter des pièces qui n'y ont pas été examinées. Cela mérite certainement une discussion.

D'autre part, vous confondez, dans votre rapport de minorité, la procédure judiciaire qui est en cours avec la démarche politique qui nous occupe. Je me suis renseigné pour savoir où en était cette procédure judiciaire. Elle a été initiée en juillet 2000, en même temps que la constitution de la Fondation de valorisation. Aujourd'hui, l'instruction initiale est terminée, et sachez, Mesdames et Messieurs les députés, qu'elle tient dans 1500 classeurs fédéraux, lesquels ont été transférés à notre procureur général, fraîchement et brillamment réélu. Donc un gros dossier l'attend sur sa place, pour l'année prochaine. Des jugements sont attendus pour l'année 2009, et c'est seulement à l'issue de ces jugements que nous saurons si des condamnations sont prononcées ou non dans cette affaire. Par conséquent, il me semble important de bien séparer cette procédure judiciaire, qui n'est pas de notre ressort, de la procédure politique qui nous occupe aujourd'hui.

Dans votre rapport de minorité, vous annexez un document confidentiel, sorti de ces 1500 classeurs et vous évoquez le fait que Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat de l'époque, voulait acquérir au moins un tiers des actions de la banque... Vous l'avez relevé tout à fait justement: le Conseil d'Etat de l'époque a montré une claire volonté de régler le problème et d'avoir une minorité de blocage pour pouvoir mettre en place ce rachat. Ce document n'est donc pas critiquable, car il était parfaitement conforme à la logique mise en place, à l'époque, par le Conseil d'Etat.

Dans votre rapport de minorité, vous avez aussi mentionné un élément important, je veux parler de la prise en charge des coûts de fonctionnement de la fondation. Sur ce point, je suis assez d'accord avec vous: je pense que la Banque cantonale doit assumer les charges qui ont été générées par la Fondation de valorisation. Vous les avez estimées à 350 millions de francs. Leur remboursement a commencé, mais, effectivement - il faut aussi le répéter...

La présidente. Monsieur le rapporteur, s'il vous plaît, vous devez conclure !

M. David Amsler. ...aujourd'hui, 80% des actionnaires sont publics. En quelque sorte, l'argent va d'une poche à l'autre.

Dernier point que je voudrais évoquer - puisque je dois conclure - c'est qu'il faut vraiment que le Grand Conseil travaille ensemble pour mettre fin à ce processus aussi rapidement que possible. La justice se chargera de définir les responsabilités. Je vous demande encore de soutenir, tous ensemble, la Banque cantonale de Genève pour qu'elle fasse des bénéfices et qu'elle puisse rembourser progressivement tous ses engagements. Elle a eu récemment de nombreux apports de fonds propres; elle n'a pas subi la crise des subprimes; elle a mis en place un bon contrôle interne; elle a une bonne direction; elle a de bons actionnaires, dont nous faisons partie.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous recommande d'accepter ce projet de loi.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Permettez-moi, d'emblée et préalablement à l'exposé de mon rapport de minorité, de réfuter certaines des affirmations émises par M. le rapporteur de majorité. (Rires.)

Vous avez dit, Monsieur Hensler... Amsler, pardon ! (Rires.) ...que le parlement, somme toute, méritait une médaille pour avoir voté tous ces projets de lois. Vous avez félicité la Fondation de valorisation pour son excellent travail, puisque la perte ne serait «que» de 2 milliards - ou à peine plus - au lieu des 2,7 milliards prévus... Vous avez également rendu hommage au Conseil d'Etat pour son excellent travail dans la mise en place de tous ces mécanismes depuis l'an 2000.... Mais vous avez oublié une chose, Monsieur Amsler: la facture pour le contribuable ! Je ne peux donc pas cautionner vos propos, Monsieur le rapporteur de majorité, ni m'associer à vos félicitations. A vous entendre, c'est tout juste s'il ne faudrait pas instaurer la légion d'honneur genevoise pour la remettre à tous ces braves gens, qui, finalement, n'auront coûté «que» 2 milliards aux contribuables de ce canton ! En tant que députés du Mouvement Citoyens Genevois, nous ne pouvons pas adhérer à ce genre de prose !

Ensuite, vous avez - et je l'exprime aussi clairement que je le pense - dit une ineptie, lorsque vous prétendez que 80% des actionnaires de la Banque cantonale de Genève sont des collectivités publiques et que, en fin de compte, l'argent remboursé va passer d'une poche à l'autre ! Je vais vous surnommer Houdini, Monsieur le rapporteur de majorité, parce que, entre les deux poches, il y a une case qui s'appelle «le contribuable», à qui l'on demande de se taire et de payer ! Vos propos ne sont pas convenables s'agissant de telles sommes !

J'en viens maintenant à mon rapport de minorité. Mesdames et Messieurs les députés - c'est vrai, et nous l'avons dit d'emblée - le MCG est favorable à la mise en liquidation de la Fondation de valorisation, mais pas à ces conditions. Nous voulons nous en expliquer aujourd'hui: nous savons qu'il existe - et cela figure dans les annexes de mon rapport - un contrat tripartite entre l'Etat, la Fondation de valorisation et la Banque cantonale de Genève. Ce contrat a été instauré par le Conseil d'Etat de l'époque, c'est-à-dire en 2000. Il prévoit notamment, outre le remboursement de la dette abyssale dont je viens de parler, le remboursement des frais de fonctionnement de la Fondation de valorisation. Ces frais, Monsieur le rapporteur de majorité - vous en avez convenu avec moi - se montent aujourd'hui à 351 millions de francs. Je vais vous les détailler, afin d'être parfaitement exhaustif, car les montants en jeu méritent tout de même quelques explications.

Cette dette se décompose comme suit. Les dépenses de fonctionnement de la fondation s'élèvent à 42 millions - j'arrondis les chiffres au million près, les montants sont tels que nous n'en sommes pas à quelques dizaines de milliers de francs près, quoique, pour le contribuable, cela représente beaucoup d'argent. Intérêt net et swap, c'est-à-dire le report des intérêts par des actions sur le marché: 296 millions de francs depuis 2000 - et je ne parle pas de la dette générée par la malhonnêteté de certaines personnes de la Banque cantonale de Genève. Frais de réalisation: 35 millions. Cela fait un total de 373 millions, ce dont je me suis étonné en ma qualité de rapporteur de minorité, puisqu'on arrivait à des frais de fonctionnement de 106%. C'était, en effet, sans tenir compte des dépenses extraordinaires s'élevant à 22 millions, soit 6%. Le total dû par la Banque cantonale de Genève se monte donc - et cette fois, je vais être tout à fait précis - à 351 532 654 francs.

Le contrat prévoyait des remboursements, évidemment basés sur la confiance et avec des personnes qui auraient été respectueuses de ceux qui les ont financés - c'est-à-dire la population, pas l'Etat, le parlement ou le Conseil d'Etat - et qui auraient dû, au moins, mettre la main à la poche pour donner un signal clair qu'elles allaient procéder à ces remboursements.

Alors, que s'est-il passé ? Eh bien, il faut savoir - selon les chiffres qui m'ont été fournis par la Banque cantonale de Genève - que M. de Saussure - pour le citer nommément - a payé 2 160 000 F pour l'année 2005, versés en 2006, et 3 600 000 F pour l'année 2006, versés en 2007. C'est-à-dire que la Banque cantonale de Genève - je ne parle pas du scandale de la dette de la Banque cantonale de Genève, mais uniquement des frais de fonctionnement de la Fondation de valorisation - n'a remboursé à ce jour que 5 760 000 F, sur 351 millions !

En dehors de cela, nous pouvons lire sur le site même de la Banque cantonale de Genève - c'est public, il suffit de faire «BCGe.ch» - que celle-ci a dégagé un bénéfice net, en 2007, de 77,1 millions de francs ! Cette progression de plus de 26% s'inscrit dans une hausse totale de plus de 970% de la capacité financière du groupe en quatre ans ! Mais de qui se moque-t-on dans cette république ? Comment la Banque cantonale peut-elle afficher, sur son propre site Internet, des chiffres aussi éloquents, aussi positifs, alors que le Conseil d'Etat doit payer 50 millions de francs d'intérêt sur les 2 milliards décaissés dans le scandale de la Banque cantonale de Genève ? Comment a-t-on l'outrecuidance de pouvoir publier de tels chiffres ? Au Mouvement Citoyens Genevois, nous avons beaucoup de peine à comprendre !

Et c'est là où je veux en venir, Mesdames et Messieurs les députés, car, aujourd'hui, nous aurions la possibilité - au Mouvement Citoyens Genevois, nous avons eu la possibilité de rédiger un projet de loi pour reprendre toute la problématique Banque cantonale de Genève et Fondation de valorisation, mais nous n'avons pas voulu le faire, de peur d'être contrés...

La présidente. Monsieur le rapporteur, vous devez conclure !

M. Eric Stauffer. Je vais conclure ! ...et de nuire à l'intérêt de la collectivité. Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons - étant donné qu'il n'y a pas d'urgence, à un ou deux mois près, à mettre cette fondation de droit public en liquidation - de renvoyer ce projet de loi en commission et de travailler tous ensemble sur différents modèles - comme le canton de Zurich, qui est actionnaire à 100% de sa banque cantonale, ou sur le modèle vaudois - et de trouver ensemble, avec le Conseil d'Etat, une solution pour que nous puissions diminuer la dette genevoise, qui a augmenté, j'aimerais quand même vous le rappeler, de 2 milliards !

La présidente. Vous devez conclure maintenant, Monsieur le rapporteur !

M. Eric Stauffer. Alors, je reprendrai la parole après, puisque je ne peux pas dire tout ce que je voulais !

Quoi qu'il en soit, je vous demande de ne pas mettre la pression pour procéder à cette liquidation: nous n'en sommes pas à un ou deux mois près. Nous sommes capables de travailler tous ensemble, pour trouver une solution dans l'intérêt des contribuables genevois ! J'interviendrai donc ultérieurement.

M. Alberto Velasco (S). Je serai relativement bref. C'est une sorte de motion d'ordre, Madame la présidente ! Dans ce rapport - c'est un document public, puisqu'il s'agit d'un rapport d'un député - figure un document qui est extrait de la procédure et qui provient du comité de banque... Je trouve tout de même assez étonnant qu'un tel document puisse figurer dans un rapport. Je ne comprends pas, Madame la présidente, comment on a pu laisser cette pièce ! D'autant moins que ce document est totalement, je dirai «manipulateur», dans la mesure où il n'est produit que partiellement: il n'y a que le point 4. On ne sait pas ce que comportent le point 1, le point 2, etc., on ne sait pas s'il y a dix points et s'il y a une conclusion !

Madame la présidente, je ne peux tolérer qu'un pareil document figure dans le Mémorial du Grand Conseil. Et je demande à ce Grand Conseil d'insister pour que ce document soit retiré.

La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Je le regrette, mais je ne peux pas soumettre au vote cette proposition. Le Bureau, comme vous le savez, a écrit dans ce sens à M. le rapporteur de minorité, qui n'a pas souhaité retirer cette annexe de son rapport. Nous ne disposons malheureusement pas, à l'heure actuelle, d'une base légale qui nous permette de le faire. La parole est à M. Frédéric Hohl.

M. Frédéric Hohl (R). Merci, Madame la présidente. Tout d'abord, j'aimerais remercier notre collègue, M. Amsler, pour son excellent rapport de majorité. A mon tour, je salue l'excellent travail de la fondation: oui, elle a bien travaillé. Sans nous lancer des fleurs, je salue l'excellent travail de la commission, qui a aussi bien travaillé, et puis je salue également le dernier acteur de cette réussite: le marché... C'est évident !

Aujourd'hui - vous l'avez dit - une cinquantaine d'immeubles ont été préréservés par l'Etat. Il ne reste pas grand-chose: c'est le moment idéal pour démarrer cette procédure de liquidation.

Au parti radical, nous avons toujours été très attentifs et très respectueux des rapporteurs de minorité et des rapports de minorité. C'est vrai, peu de documents ont été montrés pendant nos travaux de commission, peu de sujets ont été abordés, mais, à la rigueur, nous pouvons nous en passer.

En ce qui me concerne, je siège depuis bientôt trois ans dans cette commission - j'ai maintenant été remplacé par une collègue - et je puis dire que, pratiquement à chaque fois, le rapporteur de minorité a généré un début de polémique. A tel point que nous nous sommes presque demandé s'il n'en faisait pas une affaire personnelle... C'est un peu le problème dans cette affaire !

La perte générale dans ce dossier de la Banque cantonale de Genève avoisine les 2 milliards, alors qu'elle était budgétée à 2,7 milliards... Alors, oui, ce dossier a plutôt été bien géré ! Cela a été évoqué également: les 350 millions de frais de fonctionnement de la fondation seront intégralement remboursés par la banque. Effectivement, les choses pourraient aller un peu plus vite !

On ne peut pas, Monsieur le rapporteur de minorité, vous suivre dans votre idée que l'Etat rachète les parts des privés dans les actions de la banque, puisqu'on sait que 53% des actions appartiennent à l'Etat et environ 30% aux communes. Somme toute, vous demandez à l'Etat de rembourser l'Etat !

Je terminerai en disant que nous sommes des députés et non des juges. Il ne nous appartient absolument pas de faire le procès de la Banque cantonale de Genève !

Mesdames et Messieurs, je vous demande de suivre le rapport de majorité, et je vous en remercie. (Applaudissements.)

Mme Véronique Pürro (S). Les socialistes souhaitent s'associer à certaines dénonciations figurant dans le rapport de minorité. Ils l'ont déjà fait, du reste. Oui, nous payons, en tant que contribuables et en tant que locataires, les folles années de spéculations: les années 80-90 ! Oui, Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de minorité a raison: nous payons ces folles années en tant que contribuables, et c'est un véritable scandale ! Nous payons également en tant que locataires, puisque ces folles années ont largement contribué à élever le niveau des loyers que nous payons encore aujourd'hui. Et nous devons être très attentifs, parce que ces folles années sont en train de se reproduire... Nous devons donc tout faire pour éviter que ce soit le cas.

En revanche, là où nous ne pouvons suivre le rapporteur de minorité, c'est dans ses méthodes. En effet, depuis que les députés du MCG siègent dans ce parlement, le schéma est bien connu: nous sommes tous des pourris; ils sont les seuls à savoir; ils sont les seuls à avoir le courage de dénoncer; ils sont les seuls à détenir la vérité !

Mais, Messieurs du MCG, où étiez-vous en 2000, lorsque, à l'unanimité, nous avons décidé de sauver, en urgence, la Banque cantonale de Genève ? Car le problème était bien que les clients avaient perdu confiance: ils partaient et il fallait agir en toute urgence. Et sans la pugnacité de la ministre des finances de l'époque, Mme Calmy-Rey, et sans le Grand Conseil, unanime je vous assure que notre canton aurait connu une faillite dont nous ne nous serions pas encore relevés ! Nous devons donc rendre hommage au Conseil d'Etat et au Grand Conseil de l'époque, et non pas, comme le fait le rapporteur de minorité, tirer à boulets rouges sur ceux qui ont su prendre leurs responsabilités quand il le fallait.

Il en va de même de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe... Depuis que le MCG siège parmi nous, au lieu de soutenir l'action de cette fondation qui a été mise en place pour diminuer la dette que le contribuable devra payer en fin de compte, il n'arrête pas de tirer à boulets rouges sur cette fondation, qui a pourtant effectué un excellent travail. J'aimerais également m'associer aux félicitations et aux remerciements de mes préopinants, dans la mesure où la dette - même si on peut la regretter, certes - a quand même diminué grâce à son travail.

Puisque je siège au sein de ce Grand Conseil depuis la création de cette fondation, je voudrais signaler que nous avons consacré des heures à examiner ces dossiers: il ne faut pas croire que nous les avons traités à la légère. Je rappellerai à M. Stauffer que certains d'entre eux ont fait l'objet de débats, que ce soit durant les travaux de commission ou en plénière, et qu'ils ont été renvoyés à la fondation lorsque nous estimions que le marché permettait de réaliser une vente plus rentable que ce que la fondation proposait. Nous n'avons donc pas avalisé, comme il le laisse entendre, les propositions de la fondation sans les examiner sérieusement, et nous avons, sur ce point aussi, su prendre nos responsabilités.

Il est bien sûr facile au MCG de venir nous donner des leçons aujourd'hui, alors qu'à l'époque il n'était pas là. Il n'était pas là pour suivre les travaux de la fondation ni pour procéder à l'examen approfondi des dossiers: examen des pièces, étude des documents. Le MCG était absent ou, s'il était là, il n'a rien fait ! J'en veux pour preuve les huit heures que nous avons consacrées à ce projet de loi pour lequel M. Stauffer n'a pas été capable de nous faire une seule proposition ! C'est facile de dire maintenant qu'il faut renvoyer cet objet en commission pour y étudier une alternative ! Vous aviez tout loisir, durant les huit heures que nous avons consacrées en commission à l'examen de cet objet, Monsieur Stauffer, de nous faire des propositions concrètes !

Et c'est là que le bât blesse, précisément ! A part dénoncer, nous critiquer en disant que nous sommes tous des pourris, des malhonnêtes, des incapables, des incompétents, que savez-vous faire, Monsieur Stauffer ? Malheureusement, pas grand-chose... Malheureusement, pas grand-chose, il faut bien le reconnaître !

Alors, Mesdames et Messieurs, arrêtons ce cirque - parce que c'est un cirque ! Votons ce projet de loi à l'unanimité des gens responsables dans ce Grand Conseil... (L'oratrice est interpellée par M. Roger Golay. La présidente agite la cloche.) Vous savez, Monsieur Golay, en ce qui me concerne, je n'ai aucune action à la Banque cantonale ! (Brouhaha.) En 2000, alors que je ne sais pas où vous étiez, nous étions en train d'étudier des projets pour sauver cette banque, et je crois que les clients de la banque, que ce soient des gens comme vous et moi, Monsieur Golay, ou des petits artisans, ou des petits commerçants, sont aujourd'hui très contents que nous ayons sauvé cette banque. Si tel n'avait pas été le cas, je ne sais pas dans quelle situation se trouverait notre canton aujourd'hui ! Mais c'est vrai qu'à l'époque le MCG n'existait pas !

Alors, maintenant que vous êtes là, au lieu de dénoncer ces faits et de nous accuser tous autant que nous sommes - que ce soit le Conseil d'Etat de l'époque, le Grand Conseil de l'époque, celui d'aujourd'hui, la Fondation de valorisation - d'être responsables de ce qui est effectivement un scandale - que paie actuellement le contribuable - eh bien, faites-nous des propositions ! Mais en êtes-vous réellement capables ? (Applaudissements.)

Mme Nelly Guichard (PDC). Comme il l'a déjà été relevé, ce projet de loi représente la dernière étape des activités de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

Quoi qu'en pensent certains, cette fondation, qui avait pour mission de liquider au mieux des intérêts de l'Etat les mauvaises affaires cédées par la Banque cantonale de Genève, doit être liquidée à son tour. Les buts qui lui avaient été fixés sont atteints plus rapidement que prévu, et l'on ne peut que s'en réjouir, cela diminuera aussi les frais. La fondation peut donc être dissoute et entrer en liquidation au 1er juin 2008.

Au moment de l'entrée en liquidation, on peut donc estimer le solde des créances restant à réaliser à 800 millions, soit environ 15% de la cession initiale. Le Conseil d'Etat, de son côté, a décidé, au mois d'octobre 2007, de négocier avec la Fondation de valorisation l'acquisition d'un nombre important d'immeubles en vue de constituer un parc de logements d'utilité publique. Ces objets font l'objet de négociations qui sont en cours. Nous souhaitons évidemment que ceux qui sont choisis soient bien des objets adaptés à des logements d'utilité publique.

Le mandat du conseil de fondation, après avoir été renouvelé en 2004, prend donc fin. Il serait tout à fait possible, techniquement, que les membres actuels de la fondation se chargent de la liquidation au regard de la loi. Cependant, étant donné le nombre des objets qui restent à liquider, l'infrastructure doit être considérablement réduite pour assumer cette fonction de liquidateur. Pour des raisons de coûts et d'efficience, il a été estimé que trois personnes compétentes suffisent à assumer cette fonction. Il appartiendra au Conseil d'Etat de les désigner, et à ce propos la commission a souhaité mentionner expressément que l'un des liquidateurs, au moins, devait être choisi en dehors du conseil de fondation actuel. Il nous paraît en effet indispensable qu'un regard nouveau et extérieur puisse apprécier les transactions envisagées.

Le présent projet de loi confère donc un cadre juridique à la période de liquidation de la Fondation de valorisation, et je tiens à souligner que, grâce à son travail de qualité, à son efficacité et aussi - il faut le dire - à une bonne conjoncture, la fondation a réalisé des ventes à des coûts meilleurs que prévus. Il n'en reste pas moins - il faut le souligner également - que la perte est importante pour le canton et que le remboursement qui a été mentionné précédemment est l'un des éléments qui entre en ligne de compte.

La commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe est maintenue et elle assurera, jusqu'à la fin de la liquidation, le suivi de ce travail, comme le Grand Conseil l'avait souhaité lorsqu'il l'a instaurée. Et nous espérons qu'elle sera en mesure de travailler un peu plus sereinement que ce ne fut le cas dans la plupart de nos séances.

Concernant le rapport de minorité, j'aimerais simplement relever qu'il n'est pas d'usage, dans quelque rapport que ce soit, de faire figurer des textes qui n'ont absolument pas été abordés en commission. Quant au ton employé, je ne le qualifierai même pas, il n'est pas utile de s'étendre à ce propos ! D'autres l'ont fait, et bien fait. Comme il l'a été dit, je déplore qu'un tel rapport de minorité puisse figurer dans un Mémorial du Grand Conseil: ce n'est pas à l'honneur des députés, quels qu'ils soient et de quelque bord qu'ils soient !

Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi et, bien entendu, à ne pas le renvoyer en commission. (Applaudissements.)

Mme Michèle Künzler (Ve). C'est le moment de clore le sujet «Fondation de valorisation», plus vite que prévu. Et c'est tant mieux, parce que les frais s'en trouveront réduits. Il est du reste assez incompréhensible qu'il y ait un rapport de minorité pour s'opposer à la diminution de la voilure ! Voudrait-on favoriser des coquilles vides ? Il serait tout à fait absurde que la fondation continue à fonctionner pour rien !

L'objectif est maintenant de réduire le fonctionnement de la Fondation de valorisation, de liquider les derniers actifs, que l'Etat rachète des immeubles - et je lance une petite pique pour ceux qui sont intervenus avant moi - mais je n'aimerais pas que ces rachats se résument à trois ou quatre immeubles. J'ai en effet entendu que l'on voudrait ce qu'il y a de mieux... Mais, finalement, il n'y aura plus rien ! Il était prévu de racheter cinquante immeubles; si tel n'est pas le cas, nous ferons rapport de minorité sur rapport de minorité, et nous les gagnerons ! Alors, je vous préviens, ne revenez pas en arrière s'agissant de l'accord sur le logement !

Deuxième point, qui n'a pas encore été abordé. Il me semble important - et nous en avons eu la garantie en commission - de parler des futurs abandons de créances et de la gestion des actes de défaut de biens. En effet, les personnes qui ont fait l'objet d'actes de défaut de biens reviendront peut-être à meilleure fortune cinq ans ou dix ans après. Il faut donc contrôler leur situation sur le long terme et que nous obtenions de véritables garanties. L'Etat doit effectuer un suivi de ces affaires, certaines personnes ont remboursé partiellement leur dette, or elles doivent encore plusieurs dizaines de millions ! Je n'aimerais pas qu'à l'occasion de la clôture du dossier «Fondation de valorisation» on oublie ces dossiers dans un tiroir. Donc, la commission de contrôle de gestion et, aussi, la commission des finances devront effectuer le suivi de ces affaires pendant les dix ou quinze prochaines années. Quoi qu'il en soit, nous n'allons pas conserver la structure de cette fondation pour effectuer ce suivi, ce serait vraiment inadéquat.

Le rapport de minorité parle de la Banque cantonale... Mais ce n'est pas le sujet ! Et tout le monde, ici, déplore cette dette de 2 milliards: c'est une véritable catastrophe ! Pour évaluer l'ampleur de cette catastrophe, eh bien, elle équivaut à l'ensemble des bâtiments scolaires de notre république ! Mais j'aimerais vous dire, Monsieur le rapporteur, que cela aurait pu être pire: nous aurions pu perdre 4 milliards, sans parler des 800 chômeurs que l'on aurait pu compter à cause de la faillite de la banque ! Maintenant, il faut activer la liquidation de cette Fondation de valorisation et voter ce projet de loi, parce que le sujet du jour c'est cela, et uniquement cela !

Je vous invite donc à voter le rapport de majorité. (Applaudissements.)

M. Olivier Jornot (L). Il y a parmi nous un artiste habile... Un artiste habile qui, à partir de rien, a réussi à forger un rapport de minorité ! A partir de rien, parce que - on s'est référé tout à l'heure à l'usage, mais il y a une règle, qui n'est pas un usage - une règle qui fait partie de notre règlement du Grand Conseil précise que les rapports servent à exposer au plénum ce qui s'est passé en commission. Eh bien, Monsieur Stauffer, si, au lieu de jouer l'artiste, vous aviez été fidèle à ce qui s'est passé en commission, vous auriez rendu une page blanche, car, en commission, vous n'avez pas ouvert la bouche ! Si ce n'est pour nous dire, en fin de débat, que vous alliez déposer un rapport de minorité, et qu'on allait voir ce qu'allait voir...

Mesdames et Messieurs, oui, le dossier de la Banque cantonale de Genève est un scandale, tout le monde l'a dit dans cette salle. C'est un scandale, mais le scandale, ce n'est pas l'activité de la fondation ! D'ordinaire, quand il y a un accident, aérien, ferroviaire, routier, et que les secours arrivent, généralement on encourage les secours, on les soutient, on les admire. M. Stauffer, lui, préfère tirer sur les secours, c'est-à-dire sur la fondation qui a exécuté le mandat que nous lui avons confié de réaliser les créances et les gages de la Banque cantonale.

On peut se demander, d'ailleurs, pourquoi, Monsieur Stauffer - ou le MCG: on ne sait jamais vraiment que choisir de cette alternative - vous fustigez la fondation, alors que, dans le fond, on a l'impression que vous aimeriez bien qu'elle continue à exister. D'ailleurs, c'est un peu ce que vous nous dites en refusant le vote de ce projet de loi. En quelque sorte, vous avez peur que votre principal, votre meilleur ennemi disparaisse. Vous avez peur, en fait, que nous supprimions celle que vous fustigez à longueur de journée. Eh bien non, Monsieur Stauffer, le Grand Conseil ne vous fera pas le plaisir de maintenir pour vous votre seul et unique fonds de commerce électoral !

Tout à l'heure, j'ai parlé de scandale, mais, en réalité, il y a un «scandale du scandale»: c'est le fait que l'Etat ne semble toujours pas avoir retenu la leçon de cette affaire de la Banque cantonale de Genève. Parce que le vrai problème, au-delà des compétences des uns et des autres, c'est le problème de l'Etat banquier; c'est le fait que l'on n'ait toujours pas compris que l'Etat n'avait pas à se mêler de banque ni même qu'il n'avait pas à garantir les activités d'une banque. On est toujours, aujourd'hui, sous le même régime de garantie, par l'Etat de Genève, de l'intégralité des dépôts faits auprès de la banque jusqu'à concurrence d'un montant de 500 000 F ! On est toujours assis sur un volcan, des années après le scandale de la Banque cantonale de Genève, et ce dernier est toujours en activité ! Et il semble que l'on n'en ait pas encore pris conscience...

Alors aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, au-delà de cet aspect politique - qui, je l'espère, évoluera au cours des prochains mois ou des prochaines années, ce qui ne semble malheureusement toujours pas être le cas aujourd'hui - il faut mettre un terme aux activités de cette fondation en votant ce projet de loi. Il faut mettre cette fondation en liquidation.

Mais, dans ce contexte, les libéraux font deux remarques. La première porte sur la question du remboursement des frais. Il est vrai que ce Grand Conseil avait clairement voulu que la banque assume les frais de fonctionnement de la Fondation de valorisation et que la situation actuelle n'est pas totalement satisfaisante. Il faudra lui trouver une meilleure solution, une solution qui accélère le rythme des remboursements sans pour autant, évidemment, porter un tel coup à la banque que cela conduise à un effondrement du cours des actions, parce que si l'Etat devait perdre davantage par le biais de la chute du cours des actions que ce qu'il gagnerait par le biais des frais encaissés, il n'aurait bien sûr rien gagné dans cette histoire.

La deuxième remarque est la suivante. Pour que la liquidation et la dissolution de la fondation interviennent à satisfaction, il faut qu'elle ait effectivement terminé son travail. Il faut, par conséquent, que la question de l'acquisition éventuelle d'immeubles par l'Etat soit entièrement réglée et que tous les autres biens soient réalisés. En effet, si, à la fin de vie de la fondation, l'Etat devait se retrouver avec une série de biens de bric et de broc restant dans le stock de la fondation, ce serait une forme d'étatisation rampante, qui n'aurait strictement aucun sens et qui appauvrirait l'Etat au lieu de l'enrichir. Nous ne manquerons pas de demander, au cours des mois qui viennent, jusqu'au terme de la vie de la fondation, des comptes par rapport à l'accomplissement véritable, jusqu'au dernier objet, des tâches que nous lui avons imparties.

Cela étant, je vous recommande donc de voter ce projet, bien évidemment sans le renvoyer en commission. (Applaudissements.)

M. Christian Brunier (S). Avant de parler du fond, je vais parler de la forme. M. Stauffer a choisi d'utiliser dans son rapport, comme c'est souvent le cas, l'amalgame, la calomnie, en disant que, finalement, nous sommes tous copains, tous pourris...

C'est un peu facile, Monsieur Stauffer ! Je vous rappelle que l'un de vos anciens amis, M. Letellier, avait proposé un projet de loi pour essayer de vous évincer du Grand Conseil en utilisant la même tactique que la vôtre: l'amalgame et la calomnie. Il disait que tous ceux qui ont beaucoup de dettes n'ont pas le droit de siéger au Grand Conseil - ce qui vous aurait coûté votre place - que tous ceux qui ont été inculpé non plus - et cela vous aurait aussi coûté votre place - et que tous ceux qui ont fait de la prison n'ont pas le droit de siéger au Grand Conseil - cela vous concerne également et cela vous aurait aussi coûté votre place.

Une majorité d'entre nous, malgré nos divergences politiques, nous vous avons défendu, parce que nous voulions précisément lutter contre cette pratique de l'amalgame et de la calomnie: nous pensions qu'il était malsain que le parlement se conduise de la sorte. Nous demandons la même éthique dans cette affaire.

Discréditer tous les politiques, c'est aussi insulter les députés qui ont travaillé sur le dossier de la Banque cantonale - certains sont encore parmi nous, d'autres ne sont plus au parlement, je pense notamment aux députés de l'Alliance de gauche qui ont également fait un travail important sur cette question. D'autres personnes encore sont entrées au gouvernement entre-temps et avaient effectué un travail important pour dénoncer ce scandale, pour que la lumière soit faite sur cette affaire et pour redonner une chance à cette banque, qui est importante pour le canton, importante pour les entreprises qui bénéficient d'un soutien de sa part, et, bien entendu, qui est importante pour les citoyens du canton.

Alors oui, il y a scandale, tout le monde l'a reconnu, et ce scandale est inacceptable ! Il n'est par normal que la collectivité publique paie l'addition de 2 milliards - mais je vous rappelle qu'au début on pensait qu'elle serait beaucoup plus lourde. Oui, il y a des responsables: ce sont certainement quelques dirigeants de la banque de l'époque ! Mais ce n'est plus notre problème, c'est celui de la justice qui doit établir la responsabilité individuelle de ces personnes, car de grosses erreurs de gestion ont été commises - des prêts ont été accordés un peu trop facilement, les risques ont été mal évalués - sans parler du copinage. Or cela ne relève plus de la compétence du politique. Et lorsque les politiques s'érigent en juges, c'est toujours une mauvaise chose.

Le Conseil d'Etat des années 90 porte également une responsabilité, au moins par rapport au manque de surveillance. C'est assez facile de le dire après coup, mais il est évident que le Conseil d'Etat porte une responsabilité dans cette affaire. Et puis, certaines entreprises portent également une énorme responsabilité: je pense notamment aux personnes qui ont participé à la surchauffe économique de ce canton, pendant les années 90. Ma collègue Véronique Pürro disait très brillamment à ce propos que l'on ne sait pas où se trouvaient les députés du MCG à ce moment-là... On sait en tout cas qu'un des leaders du MCG a participé à cette surchauffe, puisqu'il a créé des sociétés, qui se sont malheureusement «plantées». C'était dans la presse, donc tout le monde le sait...

Une voix. Il n'écoute pas !

M. Christian Brunier. Il n'écoute pas, mais ce n'est pas important ! Le scandale de la Banque cantonale a été généré par ceux qui ont participé à cette surchauffe: certains ont voulu faire de l'argent trop facilement, trop rapidement, et, maintenant, c'est la collectivité publique qui le paie !

Le scandale a été découvert par des politiques: en tête Micheline Calmy-Rey, mais, aussi, David Hiler, qui ont fait un travail énorme pour trouver des solutions ! Et vous, vous dites que les politiques se sont complètement trompés... Mais quelle solution le MCG aurait proposée à l'époque ?!

Je vous le rappelle, trois scénarios étaient possibles - personne n'en a trouvé un quatrième. Le premier consistait à mettre la banque en faillite et à la fermer. L'addition pour la collectivité se serait située entre 3 et 5 milliards. Le deuxième consistait à la vendre. Des tentatives de négociations ont été effectuées. Vous savez aussi très bien que, si nous voulions vendre cette banque, il fallait de toute façon la recapitaliser et, donc, la perte pour le canton se serait élevée à 2 ou 3 milliards sans compter, bien sûr, tout ce patrimoine qui a été acquis par le canton.

Il restait donc le troisième scénario, qui est certainement le moins mauvais, c'est celui que nous avons choisi. Il consistait à recapitaliser la banque et à créer une fondation pour gérer les actifs de la Banque cantonale de Genève. Cela permettait de redonner du courage aux employés de la Banque cantonale qui avaient toujours bien fait leur travail, de redonner aussi du courage aux entreprises qui bénéficiaient des attraits de la banque et aux citoyens et aux citoyennes qui avaient des comptes dans cette dernière.

Nous avons travaillé avec sérieux, avec sérénité, avec courage. Je pense que le politique a fait son travail. Maintenant, c'est aux juges de faire le leur, et j'espère qu'ils arriveront à leurs fins. Aujourd'hui, je demande que ce projet de loi soit voté et que l'on félicite les politiques qui ont bien fait leur travail, alors que le MCG n'était pas là ! (Applaudissements.)

M. Olivier Wasmer (UDC). Je suis convaincu qu'à la lecture de l'excellent rapport de M. Amsler, vous avez tous compris ce projet de loi et que vous allez tous le voter. Vous avez, par contre, compris que le MCG, par la voix de M. Stauffer, ne l'a toujours pas compris... Et l'on ne s'étonne donc pas, aujourd'hui, que ce dernier, n'ayant rien compris du tout, ait présenté un rapport de minorité ! M. Stauffer, qui n'a jamais rien compris dans la vente des immeubles de la fondation - et non pas de la Banque cantonale - fait des amalgames absolument scandaleux, comme l'a dit M. Brunier tout à l'heure. J'aimerais tout de même vous rappeler que M. Stauffer avait personnellement déposé une plainte pénale contre la fondation dans une célèbre affaire Louis-Casaï, et il faut savoir que cette plainte pénale a été classée par le procureur général. Vous me direz qu'après tout, s'il n'y avait rien de pénal, c'est normal. Mais ce qui est plus grave, Mesdames et Messieurs les députés, c'est ce que vous ne savez pas: à savoir que, à la suite des faits dénoncés par M. Stauffer, le Conseil d'Etat a mis en oeuvre une expertise qui a coûté pas moins de 50 000F !

Cela étant, une fois encore, le MCG fait feu de tout bois en utilisant des arguments bassement populistes pour faire parler de lui. Vous aurez constaté qu'à chaque fois que l'on parle de la Fondation de valorisation, chaque fois que l'on parle de la Banque cantonale, le MCG répète toujours les mêmes choses et se permet - un de mes préopinants l'a dit tout à l'heure - de traiter tout le monde de pourri, sous prétexte que certaines personnes auraient prévariqué dans certaines ventes, se permet d'accuser d'autres personnes de s'être servies au passage et certains membres de la Fondation de valorisation d'avoir pu acquérir des appartements à moindre prix. Cela fait bientôt trois ans et demi que nous entendons la même litanie, Mesdames et Messieurs les députés, et aujourd'hui cela doit cesser ! Cela doit cesser, parce que vous avez voté en 2000 la constitution d'une fondation, non pas pour régler les problèmes de la fondation elle-même, mais pour régler le problème de la Banque cantonale de Genève !

Alors, je vais vous parler brièvement du problème de la Banque cantonale, pour vous démontrer - si vous ne le savez pas encore, mais je suis convaincu que vous l'avez tous compris - qu'il est en train d'être réglé d'une manière totalement distincte, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises. En effet, la Banque cantonale a été recapitalisée, cela pour l'aspect financier. Et, pour l'aspect pénal, les principaux inculpés, qui ont mis la Banque cantonale dans la situation dans laquelle elle était à la fin des années 99, vont bientôt être jugés. Il ne faut donc pas confondre le problème de la Banque cantonale et le problème de la Fondation de valorisation.

La Fondation de valorisation a fait son travail - beaucoup d'autres députés l'ont dit avant moi - même si elle a, il est vrai, bénéficié de conditions conjoncturelles tout à fait ensoleillées, puisque des immeubles ont pu être vendus beaucoup plus cher que le prix qu'ils valaient. Et, aujourd'hui, seuls 15% du parc immobilier restent. Les immeubles qui restent, Mesdames et Messieurs les députés, sont difficiles à vendre, et il est vrai que cela ne justifie pas de maintenir l'activité de la Fondation de valorisation, avec tous les frais que cela entraîne. Et le Conseil d'Etat a pris une fort bonne initiative en proposant de liquider cette fondation.

Donc, comme certains députés l'ont indiqué, la fondation va bientôt être liquidée - dès le 1er juin - et les immeubles restant dans cette fondation vont passer à l'Etat. En ce qui concerne les cessions de créances et actes de défaut de biens - la députée Künzler vous l'a expliqué tout à l'heure - il est vrai qu'il reste des créances très importantes que des débiteurs n'ont malheureusement pas pu payer, parce qu'ils n'avaient plus rien et que tous leurs biens ont été saisis, des actes de défaut de biens ont été délivrés contre eux. Aujourd'hui, l'Etat va les reprendre. Ces actes de défaut de biens étant imprescriptibles pendant vingt ans, l'Etat pourra poursuivre ces débiteurs, dans la mesure où ils auront encore quelque chose à saisir.

Pour tous ces motifs, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de rejeter ce rapport de minorité bassement populiste et d'approuver le projet de loi.

La présidente. Merci beaucoup, Monsieur le député. La parole est à M. Roger Deneys.

M. Roger Deneys. Je renonce !

La présidente. Bien, je donne la parole à M. le rapporteur de minorité.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Tout le monde sait que, lorsqu'un parti politique est à bout d'arguments, on passe aux attaques personnelles... (Exclamations.) ...au niveau du caniveau !

J'aimerais toutefois rassurer M. le député Brunier, s'agissant des propos qu'il a tenus à mon égard. Vous saurez, Monsieur le député, que mon casier judiciaire est vierge depuis le jour où je suis né jusqu'à aujourd'hui. Je n'ai jamais été condamné pour un quelconque crime ou délit, à l'exception d'un excès de vitesse sans alcool et sans accident. Voilà donc tout ce que la société peut me reprocher !

Pour le reste, comme beaucoup de citoyens dans ce canton, il m'est arrivé de trébucher, mais on reconnaît la valeur de quelqu'un à sa faculté de se relever, et certainement pas à des assertions dignes du caniveau. Mais il est vrai que vous avez été conscient que vous n'aviez pas le niveau: preuve en est que vous démissionnez de votre poste de député pour la fin de l'année, et c'est une bonne chose pour ce parlement ! (Protestations.)

Mesdames et Messieurs les députés, vous pouvez vous congratuler et vous taper sur la panse, applaudir et vous faire plaisir, encore et encore, en fustigeant le MCG qui n'était pas là en l'an 2000... Mais vous devez réaliser que le MCG - et nous, nous respecterons toujours les formes: même si nous sommes très fermes dans nos propos, nous n'insulterons personne - eh bien, que le MCG représente le constat de votre échec politique ! En effet, si vous aviez bien géré les affaires du canton, le MCG n'aurait jamais vu le jour ! Et c'est cela que vous n'arrivez pas à supporter: nous somme la preuve absolue que votre efficacité parlementaire n'a plus le niveau requis dans certains dossiers de cette république ! Je vous signale que le MCG a été créé trois mois avant les élections et que nous avons réalisé quasiment 8%, ce qui est historique en Suisse: ce n'est jamais arrivé ! Alors, avis aux amateurs ! Continuez à vous taper sur la panse, continuez à critiquer le MCG ! En attendant, le MCG continue à progresser, parce que nous avons pris conscience des vraies valeurs citoyennes !

Monsieur le député Wasmer, vous nous donnez des leçons... J'aimerais quand même vous rappeler ici, en votre qualité de président de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation, que vous avez, jusqu'il y a quelques semaines, essayé de sauvegarder les intérêts de clients qui étaient en procès contre la fondation, en négociant des abandons de créances ! Alors, voyez-vous, Monsieur le député - et je m'arrêterai là, parce que je ne veux pas tomber dans le travers des attaques personnelles... (Rires. Exclamations.) ...quand on veut piquer son voisin, on ferait mieux de balayer devant sa porte !

D'autre part, vous avez été très élogieux par rapport à la fondation... Alors, oui, certes, elle a fait un certain travail - ce pourquoi elle était payée - mais vous oubliez de dire que, depuis l'arrivée du MCG - ce MCG que vous fustigez...

La présidente. Monsieur le rapporteur !

M. Eric Stauffer. Oui !

La présidente. Vous vous adressez à la présidente, s'il vous plaît ! (M. Eric Stauffer rit. Remarque.)

M. Eric Stauffer. Oui, bon, enfin... De toute façon, on sait très bien... Madame la présidente, je voulais vous signaler que, juste au-dessus de vous, il est écrit: «Remplacer la lampe»... Il faudrait peut-être voir à... (Rires.) Excusez-moi, mais c'est écrit sur le tableau ! (Exclamations.)

Mesdames et Messieurs, un député a indiqué que la fondation avait fait un très bon travail... Je voulais vous dire, pour ma part, que, depuis l'arrivée du MCG - ce MCG tant décrié - les actions, les investigations, les questions posées - les bonnes questions posées ! - ont permis de découvrir qu'il y avait eu, depuis la création de la fondation, des détournements de fonds. J'en veux pour preuve que l'un de ses dirigeants, qui était l'un de ceux de la Banque cantonale, a été incarcéré à Champ-Dollon pour détournement de fonds - plus de 300 000 F ! Cela a été publié, c'est de notoriété publique.

Vous avez évoqué, Monsieur le président de la commission de contrôle de la fondation, le dossier «18, Louis-Casaï»... J'ai ici l'ordonnance du procureur général. J'aimerais juste vous citer un passage de M. le procureur général - pas du modeste député que je suis. Je cite: «En d'autres termes, la prévention de gestion déloyale des intérêts publics n'est ici pas donnée à teneur de dossiers, toute mauvaise gestion n'étant pas forcément pénale.» Je traduis: cela veut dire que la gestion du dossier Louis-Casaï a été mauvaise. Du reste, le rapport de l'administration des finances de l'Etat - l'AFE - indique... (L'orateur est interpellé.) Ecoutez, si vous contestez, Madame Gautier, vous qui avez aussi été présidente de cette fondation, je vais me payer le luxe de lire l'intégralité de ce document, que vous avez vous-même cité ! (Commentaires.) Et on verra, en fin de compte, qui dit la vérité dans ce parlement et qui essaie de cacher certaines choses, tout en se tapant sur la panse et en disant que tout va bien, parce que 700 millions ont été économisés et que les contribuables n'auront plus que 2 milliards à payer ! Eh bien non, Mesdames et Messieurs les députés, les choses ne fonctionnent pas comme cela !

Je me réfère maintenant aux propos de Mme Künzler - j'y reviendrai plus longuement ultérieurement - qui s'étonne de ce que le MCG ne veuille pas réduire la voilure de la fondation dans la mesure où cela économiserait des sous. C'est peut-être un signal de limite de compétence, mais depuis quand avons-nous besoin de mettre une entité en liquidation pour en réduire les coûts ? Cela n'a aucune espèce d'importance ! Si la liquidation de la fondation est acceptée aujourd'hui, cette fondation va tout de même continuer à travailler jusqu'à fin 2009. Mais on peut très bien réduire le personnel, remettre les locaux, convoquer des comités de direction du conseil d'administration de manière restreinte...

La présidente. Monsieur le rapporteur, s'il vous plaît, vous devez conclure !

M. Eric Stauffer. Eh bien je conclus, et je reprendrai la parole aussitôt, Madame la présidente !

M. Alberto Velasco (S). J'ai bien lu le rapport de majorité et je me souviens, Monsieur le rapporteur de majorité - je m'adresse au rapporteur de majorité, Madame la présidente - qu'en commission nous avions débattu de la proposition du rapporteur de minorité, à savoir augmenter les remboursements de la banque au Conseil d'Etat. Il avait même été question d'ajouter un article, mais nous étions tous d'accord que cela n'était ni l'intérêt de la banque ni de la République du canton de Genève. C'est la raison pour laquelle, nous avions décidé de ne pas ajouter cet article.

Par contre, Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut pas que le rapporteur de minorité soit le seul à le dire: la commission, dans son ensemble, avait estimé nécessaire que figure dans le rapport de majorité la demande faite au Conseil d'Etat que soit modifié l'accord entre le Conseil d'Etat et la Banque cantonale, afin d'augmenter ces remboursements. Malheureusement - je dois le dire, malgré la qualité de votre rapport - cela ne figure pas dans le rapport de majorité. (L'orateur est interpellé.) Moi, je ne l'ai pas lu ! Et il est important que cela y figure. Je pense que le Conseil d'Etat n'a pas informé cette assemblée de sa volonté.

Cela dit, Mesdames et Messieurs les députés, à l'orée de la fermeture de cette fondation, il est important d'être conscients que ce qui s'est passé à l'époque peut recommencer demain... Comme c'est le cas dans d'autres pays, nous traversons une période où - Mme Pürro l'a évoqué - les loyers flambent et où les projets d'investissement dans l'immobilier deviennent de plus en plus difficiles à réaliser. J'aimerais par conséquent que le conseiller d'Etat, M. Hiler - je pense qu'il va intervenir tout à l'heure - nous garantisse que de tels événements ne se reproduiront pas à l'avenir. Effectivement - et le rapporteur de minorité a raison sur ce point - ce sont toujours les mêmes qui payent, en fin de compte: les contribuables !

M. Jornot disait que ce n'est pas à l'Etat de s'occuper des affaires bancaires, de créances, de finances, etc. En l'occurrence, Monsieur Jornot, vous pouvez constater que même les Américains sont obligés de faire appel à lui pour venir en aide à leurs entités financières. Les Anglais l'ont fait, et les Européens suivent. De toute façon, on fera toujours appel à l'Etat, alors autant que celui-ci possède une entité financière, un outil financier, pour pouvoir aider l'économie, les petites entreprises et les citoyens. En cela, Monsieur le rapporteur de minorité, votre discours... C'est dommage, parce que vous déstabilisez la République. En effet, vous attaquez l'Etat, le Grand Conseil, la BCGE - tout le monde - de manière virulente, et cela ne peut que conduire à une situation de préfascisme. Vous êtes un tribun et, à ce titre, vous êtes politiquement dangereux !

Je me rallierai donc à la proposition de Mme Künzler quant aux abandons de créances, dont certains sont assez importants. Je pense, Monsieur le conseiller d'Etat, qu'il faut les conserver parce que les choses peuvent changer: des rebondissements sont toujours possibles. L'Etat ne doit donc pas abandonner ses créances, il doit les garder pour se donner une chance de se refaire financièrement.

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, il faut voter ce projet de loi, pour clore cette affaire. Mais l'histoire ayant, malheureusement, une fâcheuse tendance à se répéter, j'aimerais que le Conseil d'Etat veille à ce que pareille situation ne se reproduise plus. (Applaudissements.)

M. Claude Jeanneret (MCG). Voilà une chose un peu bizarre... On vote aujourd'hui une loi pour dissoudre une fondation ! Il est normal, dans l'affolement général d'une banque qui pourrait disparaître - ou ne pas disparaître - que l'on ait pris une décision. Maintenant, dire que c'était la meilleure ou pas, je ne le sais pas. A voir les résultats, ce n'était sans doute pas la meilleure !

Ce qui me gêne le plus dans cette situation, c'est que, lorsque l'on prend des décisions - et, là, je mets en cause les arguments de Mme Pürro - on ne demande pas à un nouveau parti, qui dénonce ce qui n'a pas été fait comme il faut, de réparer les erreurs commises dans le passé ! Nous n'y étions pas ! Je trouve que c'est d'une malhonnêteté crasse, je suis navré de devoir vous le dire. La Fondation de valorisation peut avoir ses qualités ou ses défauts: ce n'est pas le MCG qui peut réparer les erreurs du passé !

Deuxième chose que je remarque: mon collègue Wasmer a pris la parole dans ce débat, alors que certains de ses clients étaient concernés par cette affaire. Il aurait dû respecter l'article 24 et s'abstenir, cela aurait été beaucoup plus décent !

Maintenant, j'en viens au fait essentiel. La Fondation de valorisation a permis de réaliser des biens, ce qui est une bonne chose. Mais - mais... - ce qui est dramatique, c'est qu'à chaque fois qu'on vote une loi on occulte complètement le passé de ces biens. Que cette dette ait été générée de manière licite ou illicite, à partir du moment où le parlement décide de vendre un bien par le biais d'une loi, on occulte le passé de ce bien. En matière de loi bancaire, on appellerait ça du blanchiment; nous, on appelle cela un acte législatif: c'est dramatique ! M. Stauffer n'a peut-être pas toujours la manière, mais il a raison. Par exemple, lorsqu'il évoque l'affaire de l'avenue Casaï, il y a quand même un problème quand on sait que l'acquéreur avait fait une offre à 50 millions et qu'il a obtenu l'objet pour 40 millions ! Le procureur parle d'une erreur de gestion... J'aimerais savoir si nos citoyens qui paient leurs impôts pensent qu'il est admissible de faire des «erreurs de gestion» qui coûtent 10 millions ! C'est dramatique ! C'est catastrophique ! C'est scandaleux !

De plus, la fondation a été financée par l'Etat à raison de 350 millions, que la Banque cantonale de Genève devrait rembourser par toutes petites étapes... C'est absolument dramatique, nous en avons à peu près pour mille ans ! Nous devons nous rendre compte qu'il ne faut pas supprimer une fondation qui a encore des dettes, qui a encore un rôle à jouer au niveau de l'administration ! On a voté 350 millions pour que cette fondation liquide à vil prix des administrations qui étaient solidaires de l'Etat de Genève, afin de les rendre autonomes ! Et 350 millions, ce n'est tout de même pas négligeable ! Il faut essayer de les récupérer ! Si l'on supprime cette fondation, ces 350 millions vont s'évaporer dans la nature, on le sait bien !

En outre, ce qui est tout à fait malheureux, c'est qu'on peut facturer des frais... En effet, la Banque cantonale paie sur ses bénéfices des impôts cantonaux et fédéraux: 10% partent à Berne au titre de l'impôt fédéral, alors que la banque doit rembourser 350 millions ! Sur cette somme, ce sont donc 35 millions que nous offrons à Berne ! Mais où en est-on ? Ce parlement a-t-il encore une conscience citoyenne ?! On offre n'importe quoi à n'importe qui sans avoir conscience de ce que cela coûtera en impôt à chaque citoyen ! Alors, je vous le dis: si vous avez le moindre sens des responsabilités, il est exclu de fermer la Fondation de valorisation aujourd'hui !

Quoi qu'il en soit, cette fondation devrait, avant qu'une loi ne lui permette d'effacer cette dette, rendre des comptes sur tout ce qui a été établi et, surtout, sur certains cas qui étaient les mêmes que ceux qui avaient contribué à l'excès de crédit de la Banque cantonale, prétendument parce qu'elle était à même de mieux connaître les dossiers... C'est à peu près comme si l'on confiait la sécurité de la banque au type qui y commet un hold-up parce qu'il connaît le code ! Non mais, on croit rêver ! Il ne faut quand même pas rigoler... C'est dramatique ! Et que le parlement puisse avoir une idée de ce genre, je dois dire que c'est indigne de ceux qui nous ont élus !

Alors je vous le demande, Mesdames et Messieurs les députés, il faut refuser la dissolution de la fondation. Celle-ci doit d'abord rendre des comptes sur ce qu'elle a fait; elle doit facturer puis rembourser l'Etat des frais qu'il lui a avancés, de manière que la BCG ne paie pas d'impôt sur ce qu'elle doit. Parce que c'est une avance de frais, et les frais doivent être déduits de l'exercice ! J'entends déjà - j'anticipe - le discours, «Si l'on mettait cette charge au niveau de la BCG, il faudrait fermer...». Non ! La charge ne doit pas incomber à la BCG, mais à la fondation qui facture chaque année à la BCG ce que celle-ci peut payer ! Et, à ce moment-là, personne n'est pénalisé !

Quoi qu'il en soit, il faut arrêter de prendre le citoyen pour une vache à lait, qui n'est là que pour payer et se soumettre à des décisions irresponsables ! (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Véronique Pürro... Qui renonce. Je vous donne la parole, Monsieur le rapporteur de minorité.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Vous avez entendu le discours de mon collègue Claude Jeanneret, qui dirige une fiduciaire et qui sait de quoi il parle en matière de fiscalité.

Vous avez tous compris, Mesdames et Messieurs les députés, que le système instauré par le Conseil d'Etat, selon lequel la banque doit payer des dividendes, permet de la faire figurer aux actifs du bilan de l'Etat, puisque la banque est à peu près estimée - M. le conseiller d'Etat le confirmera - à environ 400 millions de francs. Mais, en payant des dividendes, elle paie des impôts, notamment des impôts fédéraux. Mon collègue Claude Jeanneret a évoqué le taux de 10% pour l'impôt fédéral... Sur 350 millions, cela fait 35 millions.

Maintenant, j'aimerais vous signaler que le bénéfice brut de la Banque cantonale de Genève depuis l'an 2000 est de 634 millions... Cela veut dire que la banque a payé 63 millions à Berne, ce qui représente 20% de la dette qu'elle aurait pu rembourser sur les frais de fonctionnement de la Fondation de valorisation. Alors, vous pouvez encore «vomir» sur le MCG, le critiquer, vous congratuler de l'avoir fait et d'avoir fait rire à nos dépens, mais une chose est certaine, chers collègues, c'est que les citoyens qui payent des impôts, eux, ne rigolent pas vraiment en vous entendant.

Et nous n'étions pas les seuls à nous être inquiétés de cette question de remboursement. Si vous avez pris la peine de lire mon rapport de minorité, vous aurez vu que j'ai inséré, en annexe 4, une lettre du président de l'époque, de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe. Il s'agissait de M. Souhail Mouhanna. Il écrivait déjà au Conseil d'Etat qu'il y avait quelques problèmes au sujet des frais de fonctionnement et qu'il fallait envisager que la banque rembourse un peu plus vite, comme cela était stipulé dans la loi.

Mais ce que vous ne savez pas et que je vais vous révéler aujourd'hui, c'est que cette lettre, Mesdames et Messieurs les députés, a été corrigée par un avocat: Me Mark Muller, qui est aujourd'hui conseiller d'Etat de la République et canton de Genève ! Alors, Mesdames et Messieurs les libéraux, avant de fustiger encore et toujours le MCG, il faudrait savoir de quel bord vous êtes... En effet, soit vous êtes du côté des citoyens, et nous pourrons travailler ensemble, soit vous êtes du côté des machines d'Etat qui se moquent des citoyens, et vous aurez - et quiconque se dressera sur cette route - le MCG contre vous ! (Exclamations.)

Eh oui, Mesdames et Messieurs, je vous l'ai déjà dit, mais vous n'écoutez pas: nous sommes la résultante de votre échec politique ! Quand avons-nous vu, à Genève, un parti placer, en trois mois, neuf députés à la fois: ce n'est jamais arrivé ! Et ce qui vous dérange, c'est de constater votre échec à chaque séance plénière, en regardant ce petit carré que vous avez voulu situer à l'extrême-droite. Tellement à l'extrême-droite, qu'un peu plus on tombait hors de l'hémicycle parlementaire ! Alors que, pour la petite histoire - vous m'excusez de ce petit aparté - à Onex nous sommes au centre et à Lancy nous sommes à l'extrême-gauche ! Il faudrait, une bonne fois pour toutes, que la chancellerie définisse où placer le MCG ! (Exclamations.)

Je continue... Je continue sur mon rapport de minorité. Il faut, Mesdames et Messieurs, pour évoquer la liquidation de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève, parler un tant soit peu de la BCG, puisque les deux sont intimement liées, dans la mesure où cette fondation est née du scandale de la BCG. Cette fameuse loi du 19 mai 2000, qui a instauré une superprovision de 5 milliards - qui est si «chère» aux contribuables - et la création de cette fondation, nous oblige, nous, MCG, à faire un petit brin d'histoire sur ce qui s'est passé à la Banque cantonale.

D'autres députés en ont déjà parlé. Mme Pürro, par exemple, a rappelé quelque chose de très juste, et je tiens à le souligner. En effet, nous avons toujours dit que nous soutiendrions les bonnes idées, qu'elles soient de droite ou de gauche, pour autant qu'elles aillent dans le sens des intérêts des contribuables. Mme Pürro a en effet parlé du «scandale des années 90», qui a obligé la Banque cantonale à demander - ou à quémander - en 2000 cette supergarantie de 5 milliards à l'Etat de Genève.

Et c'est la fusion, savamment orchestrée par le Conseil d'Etat de l'époque - je rappelle à ceux qui ne le sauraient pas que la haute autorité de surveillance de 1990 à 1996 n'était autre que le Conseil d'Etat et non la Commission fédérale des banques - eh bien, c'est la fusion Caisse d'Epargne/Banque cantonale qui a donné naissance à la BCGe: Banque cantonale de Genève.

Je continue sur mon rapport de minorité, qualifié par certains députés ou par le rapporteur de majorité de «décousu»... Il ne l'est pas tant que ça...

Mme Michèle Künzler. Quand même un peu ! (Rires.)

M. Eric Stauffer. ...mais, évidemment, il faut être doté de certaines facultés pour en comprendre l'essence. Eh bien, figurez-vous que nous avons voulu, au Mouvement Citoyens Genevois, regarder dans le Mémorial du Grand Conseil ce qui s'était passé - le Mémorial est un outil absolument extraordinaire, puisque tout ce qui est dit dans cet hémicycle est archivé pour l'éternité. Nous avons donc pu remonter en 1993 - pour être précis, le 2 décembre 1993 - et des députés dans cette enceinte s'inquiétaient...

La présidente. Monsieur le député, vous devez conclure !

M. Eric Stauffer. Alors, je reprendrai la parole juste après, Madame la présidente, comme le règlement m'y autorise !

M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. Je ne voudrais pas allonger les débats, mais je voudrais revenir sur une des annexes du rapport de minorité, que je viens de relire... C'est à croire que M. Stauffer n'a même pas lu ses propres annexes !

En effet, dans la convention tripartite entre la Banque cantonale, l'Etat et la Fondation de valorisation, il est clairement mentionné à l'article 6.5 que «L'Etat se réserve le droit de se rembourser ultérieurement dans le cadre de la répartition des bénéfices des exercices suivants.» Je pense donc, Monsieur Stauffer, que vous n'avez même pas lu les annexes que vous avez jointes à votre rapport. Il faut donc que vous fassiez confiance au Conseil d'Etat pour respecter l'équilibre entre les comptes de l'Etat et ceux de la banque, puisqu'il peut se réserver le droit de se rembourser sur les exercices suivants. Avant de poursuivre le débat, lisez donc les annexes que vous avez produites, parce qu'elles contiennent tout de même des éléments factuels que vous ne pouvez pas négliger !

Je ne vais pas en rajouter, parce beaucoup de choses ont déjà été dites, mais j'ai juste un message à l'intention du Conseil d'Etat en ce qui concerne la fin de l'exercice de la fondation. La commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe continue à valider et les prix de vente et les projets de lois, afin que cet exercice se termine fin 2009, comme prévu, avant que cela ne soit transféré à l'Etat.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci de me signaler l'article 6.5, Monsieur Amsler, mais c'est justement ce que le MCG dénonce... Certes, le Conseil d'Etat a la faculté de se rembourser sur les exercices suivant, mais, en fait, il ne le fait jamais ! Les premiers plans de remboursement s'étalaient sur cent vingt ans ! (L'orateur est interpellé.) Qu'est-ce que j'en sais ? La preuve, c'est qu'en ayant engendré 634 millions de bénéfice brut, soit à peu près 450 millions de bénéfice net depuis l'an 2000, la BCG n'a remboursé que 5,7 millions ! (L'orateur est interpellé par M. David Amsler.) Oui, mais, Monsieur Amsler, là où votre logique ne tient plus la route du tout et là où le politique doit intervenir - et, malheureusement, le seul vrai parti d'opposition dans cet hémicycle, c'est le MCG - c'est que l'on ne peut pas dire que le scandale de la BCG a coûté 2 milliards et payer les frais de fonctionnement de la fondation. En effet, l'Etat a déjà décaissé 2 milliards. Vous le savez mieux que quiconque - étant donné que vous êtes commissaire, comme moi, dans cette commission - que, chaque fois qu'une perte est consommée, la provision descend et un versement est fait. Donc, 2 milliards ont donc été décaissés, mais l'Etat de Genève n'avait pas cette somme, puisque, en 2000, il était déjà endetté à raison de 9 ou 10 milliards de francs. Et, suite à l'affaire de la BCG, la dette a atteint les 13 milliards. Par conséquent, l'Etat a dû emprunter cet argent à l'extérieur. Nous savons que, sur la dette globale, Genève paie un million de francs par jour d'intérêts débiteurs. Sur les 2 milliards décaissés - je le dis de mémoire, M. le conseiller d'Etat me corrigera s'il y a lieu - l'Etat paie 50 millions d'intérêts par année. Or, je vous le rappelle, ce dernier ne vend pas des hot-dogs au stade de La Praille: il encaisse des impôts ! Il ne peut donc payer ces charges qu'avec les impôts collectés auprès des citoyens. Cela veut dire que ces 50 millions d'intérêts sont payés avec les impôts des Genevois, que la banque ne rembourse pas, mais - et c'est le comble - elle ne rembourse même pas les frais de fonctionnement de la fondation chargée de liquider ses inepties des années 90 ! Alors, Monsieur Amsler, vous pouvez «me la tourner» comme vous voulez, mais ce raisonnement n'est pas sain !

Et si la BCG avait remboursé un montant substantiel, sur le bénéfice net de 450 millions qu'elle a réalisé depuis 2000 - avec l'argent des contribuables ou avec ses garanties - on n'en serait pas là aujourd'hui ! On parlerait de l'avenir ! La situation actuelle est vraiment à faire sauter tous les fusibles ! En effet, bien qu'elle ait engendré un bénéfice représentant des centaines de millions, la banque se moque de la population qui lui a pourtant permis de subsister, car elle n'a remboursé que 5 760 000 F. Et c'est cela qui n'est pas normal, Monsieur le rapporteur de majorité !

Alors, que demandons-nous, au Mouvement Citoyens Genevois ? Nous ne demandons pas de rendre la BCG exsangue. Nous demandons de nous concerter tous ensemble pour trouver un moyen de transférer cette dette au sein de la banque, toujours avec les garanties de l'Etat - nous ne voulons pas la faillite de la Banque cantonale de Genève - parce que nous désirons que la banque assume ses propres charges ! Charges qu'elle a générées par son incompétence, charges qu'elle a générées par ses folies immobilières et, comme l'a indiqué Mme Pürro, qui a provoqué la cherté des loyers. Ce sont tous ces golden boys de l'immobilier, qui achetaient un immeuble 10 millions à 8h du matin et qui le revendaient à 80 millions à 17h, qui ont provoqué la cherté des loyers à Genève ! En ce qui nous concerne, nous ne pouvons pas défendre des gens de cet acabit, qui vivent aujourd'hui sur des îles en faisant un pied de nez aux contribuables genevois... (Exclamations.) Eh oui, mais c'est la réalité, et cela n'est pas normal ! C'est ce qui ne tient pas dans votre raisonnement !

C'est pour cette raison que nous vous proposons de travailler tous ensemble sur une solution, un concept global - à l'image du canton de Zurich, à l'image du canton de Vaud: nous avons des exemples sur lesquels nous appuyer pour transférer... (L'orateur est interpellé.) Oui, Zurich est propriétaire à 100% de sa Banque cantonale: il n'y a pas d'actionnariat privé - pour répondre à votre question, Monsieur Cuendet. Mais vous devriez le savoir, puisque vous travaillez dans le domaine bancaire ! Donc, nous, au Mouvement Citoyens Genevois, voulons trouver un consensus dans ce sens. Si tel n'est pas le cas, il faudra des décennies pour régler cette situation.

Et puis, c'est l'habitude, nous l'avons constaté cinquante fois en commission, quand nous tombons sur un dossier qui ne nous paraît pas normal, on nous explique que la fondation ne s'occupe pas de ce qui s'est passé avant... Tout a été compartimenté, justement, pour que l'on ne puisse pas remonter aux vrais responsables de cette débâcle !

J'aimerais juste - je vais quand même essayer de ne pas être trop long... (Exclamations. Rires.) ...parce que je ne voudrais pas allonger inutilement ce débat - j'aimerais donc juste vous faire prendre conscience qu'il n'est pas du tout urgent de liquider cette fondation: nous ne sommes pas à un ou deux mois près. Donnez-nous au moins la possibilité d'étudier tous ensemble une solution - il y a assez d'avocats et de juristes dans cet hémicycle pour ce faire - une solution qui allégerait la charge de M. le conseiller d'Etat quant à la gestion de cette dette. Je dis simplement...

La présidente. Monsieur le député, vous devez conclure !

M. Eric Stauffer. Alors je conclus, Madame la présidente.

La présidente. Monsieur le rapporteur, je crois que, comme Jeanne d'Arc, vous entendez des voix, car nous n'avons pas entendu la voix de M. Cuendet de tout l'après-midi... Je donne la parole à M. Golay.

M. Roger Golay (MCG). Je pense - et c'est une proposition de l'ensemble du groupe MCG - qu'il faut renvoyer ce projet de loi à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, car il s'agit d'un problème très complexe, ne serait-ce que par rapport aux remboursements qui auraient dû être effectués s'agissant des frais de fonctionnement de la fondation. Cela nous permettra peut-être de lever certains doutes.

La présidente. Merci, Monsieur Golay. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous soumettre cette proposition, à savoir le renvoi de ce projet de loi à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10202 à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève est rejeté par 59 non contre 8 oui.

La présidente. Je donne tout de suite la parole à M. David Hiler...

M. Eric Stauffer (hors micro). Madame la présidente, conformément au règlement, je demande la parole ! (Le micro de M. Eric Stauffer est allumé.) Je n'avais pas fini mon exposé et je vous prierai d'appliquer le règlement. Je ne suis pas limité à trois prises de parole. Je ne vais pas abuser outre mesure du délai qui m'est imparti, mais vous ne pouvez pas agir ainsi !

La présidente. M. le conseiller d'Etat est inscrit depuis un long moment. Vous pourrez reprendre la parole au cours du deuxième débat. (Le micro de M. Eric Stauffer est coupé. M. Eric Stauffer continue à s'exprimer.) C'est moi qui dirige les débats, Monsieur le rapporteur ! La parole est à M. le conseiller d'Etat.

M. Eric Stauffer. Je veux m'exprimer ! C'est absolument scandaleux ! (Exclamations.)

La présidente. Monsieur le député...

M. Eric Stauffer. C'est un déni de démocratie !

La présidente. Monsieur le député, le Bureau - et la présidente, personnellement - en a assez de vos intimidations et de vos menaces voilées ! Alors, je vous prie de vous tenir comme il se doit dans ce plénum ! La parole est à M. le conseiller d'Etat David Hiler. (Applaudissements. M. Eric Stauffer quitte la salle.)

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Eh bien, eh bien, eh bien ! (Rires.) Mesdames et Messieurs les députés, il semble que, dans ce débat, la forme ait une importance extrême... En effet, sur le fond, je suis obligé de constater, après avoir écouté fort attentivement les uns et les autres, que tout le monde admet que cette fondation doit être mise en liquidation, afin de préparer sa cessation d'activité.

J'ai cru constater également que chacun était d'accord sur un point important, à savoir qu'il faudrait, d'ici la fin de l'existence de la Fondation de valorisation en liquidation, se doter d'une cellule de gestion des actes de défaut de biens plus performante que celle dont nous disposons aujourd'hui. Vous aurez d'ailleurs prochainement l'occasion d'en parler, puisque, sur ce point particulier, le département des finances demandera quelques postes. En effet, nous devons non seulement gérer le très important contentieux et les actes de défaut de biens de l'administration fiscale - qui sont d'une toute autre ampleur, soit dit en passant, que celui qui restera de la Fondation de valorisation - mais, en plus, nous avons repris - nous sommes en train de les reprendre progressivement - tous les actes de défaut de biens de tous les services de l'Etat. C'est une activité qui ne dégage pas un gros bénéfice, mais elle est en principe rentable, de sorte qu'un jour ou l'autre il faudra bien, si l'on souhaite mener cette action à bien, octroyer les ressources nécessaires. Voilà pour la Fondation de valorisation !

Par ailleurs, les membres de la Fondation de valorisation et leur personnel sont des êtres humains. Il aurait donc été étonnant que, sur chaque affaire, ils aient pris la meilleure décision au meilleur moment. Si tel était le cas, ils seraient des êtres parfaits, des dieux, et, donc, ils ne seraient pas des êtres humains. Quoi qu'il en soit, nous sommes tous d'accord d'admettre que, globalement, la fondation a fort bien fait son travail même si, sur l'un ou l'autre dossier, elle a pu avoir une appréciation différente de la nôtre. C'est à peu près ce que nous disons de nous-mêmes quand nous siégeons au niveau politique: que nous aurions peut-être mieux fait de voter autrement... Eh bien, il n'en est pas autrement dans ce cas, et je ne crois pas que l'on puisse parler de «mauvaise gestion». Certains risques ont pu ne pas être appréciés au mieux.

Restent deux dossiers: ils ont été évoqués et sont importants pour le Conseil d'Etat. Premièrement, la fin de la garantie. Soit l'impossibilité, en quelque sorte, que votre parlement, que le Conseil d'Etat, se retrouvent un jour dans la même situation que celle de l'an 2000. Le Conseil d'Etat l'a annoncé: il entendait se désengager par paliers. Non seulement il l'a annoncé, mais il a entrepris un travail avec la banque à ce propos, et il a une solution, elle est prête et peut vous être proposée. Petit bémol: nous souhaiterions - je pense que vous pouvez le comprendre - qu'un peu de calme soit revenu sur les marchés financiers au niveau international, car il n'est pas judicieux aujourd'hui de donner le message au marché que notre Etat aurait une quelconque crainte concernant la banque. Il est, comme vous, très triste à propos du passé, mais il n'a pas peur quant à la situation actuelle de la banque. C'est donc un problème qui doit pouvoir, comme la crise financière semble arriver à son terme, ce qui, normalement, enclenche l'arrivée d'une crise économique - ce qui est une moins bonne nouvelle - se régler encore dans le cadre de la législature, puisque les travaux sont prêts.

Reste la question du remboursement. Là, je dois quand même vous dire qu'un certain nombre d'inexactitudes ont été proférées aujourd'hui. Et, si l'on veut trouver une solution qui convienne à tous, il faut essayer de bien comprendre les mécanismes qui ont été mis en place.

En premier lieu, une loi a été votée par votre parlement en 2000. Cette loi prévoit que la banque doit rembourser les frais de fonctionnement dans la mesure où elle en est capable. Suit une définition dans la loi assez restrictive de cette capacité, c'est-à-dire après provisions, après réserves et après dividendes. Pourquoi une telle précaution ? Parce que, si cette créance de 350 millions était exigible aujourd'hui même, la Banque cantonale n'aurait plus suffisamment de fonds propres pour faire face à ses engagements de bilan, de sorte que la Commission fédérale des banques, sauf recapitalisation, ordonnerait sa fermeture. C'est la même règle que pour l'UBS ! C'est la raison pour laquelle il ne peut être question - et cela n'a jamais été le cas - d'un remboursement immédiat. Et cette loi - qui, quoi qu'on fasse, restera valable - comporte des modalités. Les modalités qui sont en vigueur aujourd'hui ont été définies lors de la précédente législature et consistent à prendre 20% de la totalité de ce qui va être distribué. De ce point de vue, je rappelle tout de même que la moitié de ce qui est conservé - dans des réserves, en particulier - nous appartient, puisque nous détenons 49,9% des actions. Ce n'est pas perdu pour l'Etat de Genève !

La question posée par le MCG - et par d'autres - mérite examen. Le seul ennui, c'est qu'elle n'a rien à voir avec ce projet de loi ! Cet accord, qui porte sur dix ans, doit-il être renégocié, afin d'accélérer quelque peu les remboursements ? Cette question mérite examen. C'est ma conviction, c'est celle du Conseil d'Etat, le mécanisme actuel est probablement un peu lent et pose un petit problème. Je vous rappelle qu'en fin de compte c'est l'assemblée des actionnaires qui prend toutes les décisions concernant les dividendes, concernant les réserves, ce qui signifie en d'autres termes, que c'est l'Etat qui les prend, puisqu'il détient la majorité, à lui seul, dans cette assemblée.

Maintenant, ce que nous devons réaliser, c'est un équilibre. En effet, l'action doit être attractive, parce qu'elle est cotée en bourse, parce qu'il y a 7000 petits actionnaires aujourd'hui, parce qu'il y en aura vraisemblablement 10 000 prochainement, et parce que ces actionnaires privés doivent être respectés. Mais nous devons nous assurer aussi que nous n'avons pas de pertes dans le bilan de l'Etat parce que nous aurions été trop gourmands sur le remboursement, parce que la valeur de l'entreprise diminue et que, par conséquent, le cours de l'action diminue. En même temps, nous devons choisir entre trois sources: le dividende, le remboursement et l'impôt cantonal.

Vous avez demandé, Monsieur Stauffer, de pouvoir discuter de ces questions... Mais elles le seront, Monsieur Stauffer ! Vous avez souhaité un échange... On peut le faire, encore faudrait-il inviter à la table la Banque cantonale de Genève pour que chacun puisse obtenir des renseignements sur les tenants et aboutissants de cette affaire. La créance existe. Elle est indiscutable. Elle n'est pas exigible aujourd'hui: nous pouvons fixer des rythmes de remboursement plus ou moins rapides.

Pourquoi mes prédécesseurs ont-ils été prudents - et moi-même encore, je le suis - s'agissant de la distribution ? Tout simplement, parce qu'il n'y avait pas dans cette banque - malheureusement - que des crédits gagés: il y avait aussi des crédits en blanc. La facture des crédits en blanc, provenant elle-même du scandale de la Banque cantonale - il s'agit aussi de crédits qui ont été accordés dans les années 80; parfois, ce sont des queues de crédits liés aux hypothèques, qui n'avaient plus de substance du tout - il a quand même bien fallu qu'ils soient couverts. Ce sont plus de 300 millions qui ont dû être couverts par des bénéfices cumulés.

Ensuite, les banques sont soumises à des règles concernant leurs fonds propres par rapport aux sommes qu'elles sont autorisées à prêter. Il se trouve qu'au début de son renflouement la banque n'était pas très solide sur ce plan et qu'il a donc fallu consolider ses fonds propres. Cela a été fait, et, pour l'exercice 2007, cela a été fait encore une fois, Monsieur Stauffer, pour affronter les nouvelles exigences de Bâle II. Je crains qu'avec la crise financière que nous avons vécue ces exigences tendent à se durcir encore. Donc, le taux de couverture, par les fonds propres, doit encore être supérieur à ce qu'il est aujourd'hui. A partir de là, effectivement, on devrait pouvoir espérer un remboursement entre 10 et 20 millions de francs par année.

La question qui a été posée - et qui est intelligente - est la suivante: ne vaudrait-il mieux pas que ces remboursements soient effectués avant impôt ? Oui, c'est une question intelligente, mais, pour le moment, la loi l'interdit ! En effet, la loi votée par le Grand Conseil en 2000 - et non pas par le Conseil d'Etat - interdit cette pratique, de sorte qu'aujourd'hui, sur ce point comme tant d'autres, je vous demande de laisser le Conseil d'Etat procéder comme il le fait, c'est-à-dire par étapes. La Fondation de valorisation doit effectivement cesser d'exister. Par ailleurs, nous devons résoudre la question de la garantie: ce risque est disproportionné à la capacité financière de l'Etat de Genève aujourd'hui, cela ne fait aucun doute ! Nous devons, en outre, nous assurer que nous obtiendrons un remboursement équilibré par rapport à nos intérêts d'actionnaire et à nos intérêts d'administration fiscale. Il faut donc trouver un équilibre. Je n'ai jamais pensé exclure aucune force politique de ce débat. Chacun peut y participer, à condition d'entrer dans les débats au moment où on traite de ces questions. Or, ce n'est pas le sujet que l'on traite aujourd'hui !

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je souhaitais dire. J'aimerais toutefois exprimer ma satisfaction que votre commission ait souhaité inclure dans le texte ce qui n'était qu'une déclaration de votre serviteur, à savoir que, sur les trois membres, l'un doit pouvoir apporter un oeil neuf... (L'orateur est interpellé.) Le texte parle d'un membre. Quoi qu'il en soit, il me semble excellent que cette personne - elle sera d'ailleurs difficile à trouver - soit assez éloignée de tous les acteurs politiques, économiques, institutionnels, de cette douloureuse affaire de Fondation de valorisation et apporte un oeil vraiment neuf, voire supracantonal. Notre canton étant petit, je ne suis en effet pas totalement certain que nous trouvions l'oiseau rare ici.

Pour le reste, vous avez manifesté tout à l'heure votre désir de prendre une décision tout de suite. Il me semble, par rapport à ce que le Conseil d'Etat réaffirme - ce n'est en effet pas vraiment tout à fait nouveau: nous le répétons avec beaucoup de constance depuis un an - que ce parlement pourrait et devrait voter ce texte à l'unanimité. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Jornot, je vous vois gesticuler...

M. Olivier Jornot (L). Madame la présidente, si vous me le permettez, je propose une motion d'ordre. Après une heure et quarante-cinq minutes de débat au cours duquel nous avons bien entendu la position des rapporteurs et des différents groupes, je dépose une motion d'ordre, au sens de l'article 79 de notre règlement, afin que vous mettiez fin au débat et que nous passions au vote d'entrée en matière.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je rappelle que ce vote requiert une majorité qualifiée des deux tiers. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets cette proposition de mettre un terme à nos débats.

Une voix. Un peu de courage politique, Messieurs les libéraux ! (La présidente agite la cloche.)

Une autre voix. Il y a beaucoup de libéraux dans ce Grand Conseil, donc c'est rapide ! (Rires. Exclamations.)

Une autre voix. Les anti-libéraux ont perdu la bataille ! (Commentaires.)

La présidente. S'il vous plaît, Messieurs, je vous rappelle que vous êtes dans un parlement !

Mise aux voix, cette motion d'ordre est adoptée par 58 oui contre 7 non et 3 abstentions.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons ainsi à la prise en considération du projet de loi 10202.

Mis aux voix, le projet de loi 10202 est adopté en premier débat par 64 oui contre 8 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 5 à 11.

La présidente. Il en est de même pour l'article 13... (La présidente est interpellée.) Alors cet amendement vient d'être déposé ! Si vous voulez que nous...

M. Eric Stauffer. Oh la la ! Madame la présidente, excusez-moi, mais... (Protestations.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement de M. Stauffer. Tout le monde l'a bien reçu ? Non... Je le lis: «Article 13, alinéa 1 (nouveau). Le Conseil d'Etat n'est pas autorisé à faire des avances au fonctionnement de la Fondation en liquidation.» Monsieur le rapporteur de minorité, je vous donne la parole.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, il n'y aura pas... (Brouhaha.) On va peut-être attendre ! Madame la présidente, je vous propose de suspendre la séance quelques minutes, le temps que tout le monde reçoive... (Exclamations.)

La présidente. Monsieur le député, je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est moi qui préside ce débat et c'est moi qui décide s'il faut faire une pause ou non. Pour le moment, nous sommes en cours de débat. Vous avez la parole, alors présentez votre amendement !

M. Eric Stauffer. Vous savez, Madame la présidente, vous avez déjà violé le règlement il y a quelques minutes ! Mais c'est vrai que les parlements peuvent devenir des dictatures le temps d'un instant ! (Exclamations.)

Mesdames et Messieurs les députés, l'amendement proposé à l'article 13, alinéa 1... (Brouhaha.) Puisque vous ne l'avez pas tous reçu, je vais vous lire l'ancien article puis mon amendement, c'est très court.

L'article actuel est le suivant: «Le Conseil d'Etat est autorisé à faire des avances nécessaires au fonctionnement de la Fondation en liquidation.» Comme je vous l'ai expliqué, la banque ayant généré 634 millions de bénéfices depuis 2008, je pars du principe - et le MCG avec moi - qu'il n'est plus nécessaire que l'Etat accorde des avances à la fondation, puisque la banque peut assumer ces dernières pour la liquidation de la fondation. Aussi, l'amendement qui vous est proposé est le suivant: «Le Conseil d'Etat n'est pas autorisé à faire des avances au fonctionnement de la Fondation en liquidation.»

En effet, nous pensons que la banque doit assumer ses erreurs, n'en déplaise à certains qui veulent nous couper la parole, certainement par peur de ce qui pourrait être révélé... (Exclamations.) Mais nous y reviendrons plus tard... Si toutefois la parole nous était encore coupée de manière cavalière et contrairement au règlement qui régit ce Grand Conseil, nous utiliserons d'autres moyens de communication !

Madame la présidente, vous avez prétendu que j'avais menacé Mme le sautier... C'est parfaitement scandaleux et c'est absolument faux ! J'ai simplement dit que, ayant été mis en cause, je ne voulais pas répondre à M. le député Brunier vingt minutes après ! Ce que j'ai pu faire quinze minutes plus tard...

D'autre part, et ce sera ma conclusion, vos tentatives d'intimidation par le biais des courriers que vous m'avez envoyés, au nom du Bureau, pour que je ne diffuse pas des pièces relatives à la procédure pénale, ne vous honorent pas, ni vous, ni ce Grand Conseil ! La population a en effet le droit de connaître la vérité quant aux responsables de cette débâcle qui coûte 2 milliards aux contribuables genevois ! Aujourd'hui, Madame la présidente, je les prends à témoin de la mauvaise qualité de ces débats et de la façon lamentable dont vous les présidez ! (Protestations.) Ce n'est absolument pas acceptable pour une démocratie ! (Huées.)

Une voix. Affreux ! Malhonnête ! (Brouhaha.)

M. David Hiler, conseiller d'Etat. C'est toujours relativement difficile, parce qu'il y a deux débats ! Je précise que je vais me limiter, de par vos compétences, à m'exprimer sur l'amendement, et je ne ferai pas de commentaire sur un autre sujet, aussi passionnant soit-il...

Nous ne pouvons tout simplement pas, Mesdames et Messieurs les députés, aller dans le sens proposé, parce qu'il n'est pas possible, à deux ans de la fin - même pas: un an et demi, maintenant - de modifier les règles du jeu ! Si votre parlement souhaite que la banque procède à des remboursements plus rapides et si notre solution ne vous agrée pas, vous pouvez, à tout moment, changer ces règles. Mais vous devrez le faire après avoir auditionné les différentes institutions, et en particulier la banque - plus que la Fondation de valorisation - pour connaître les conséquences des actes que vous seriez amenés à établir.

Le MCG veut donner un signal. Il l'a donné. Très bien ! Mais vous savez, personne n'est sourd ni aveugle dans cette assemblée: moi-même qui suis sourd de l'oreille droite, je vous assure que j'entends ce signal depuis six mois ! En plus, cela ne me dérangeait pas, puisque j'étais heureux... Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi le fait de vouloir donner un signal suscite autant de hargne, alors que, en cet bel après-midi, notre Conseil d'Etat pourrait, en toute harmonie, prendre des décisions intelligentes. Il n'est pas nécessaire de s'en prendre aux personnes, aux uns et aux autres, à la qualité de la présidence, ni de huer qui que ce soit.

J'invite donc ce Grand Conseil à refuser cet amendement, pas parce que je pense qu'il ne faut pas accélérer les remboursements, mais parce que, comme c'est souvent le cas, il ne suffit pas d'avoir une bonne idée: il faut qu'elle puisse se concrétiser, qu'elle soit respectueuse du droit, dont le droit fédéral. Certes, cette banque a été créée par une loi cantonale, mais elle est soumise au droit fédéral. Je ne suis pas certain que ce mode de faire irait beaucoup plus loin que notre Grand Conseil, dans la mesure où l'on pourrait considérer que nous prenons des libertés. Je vous le répète, ce n'est simplement pas la bonne manière pour arriver à accélérer le remboursement. Cette question doit être posée. Vous avez souhaité la poser aujourd'hui. Voilà ! Nous arrivons à la fin de ce débat. Tout le monde a compris qu'un vrai débat aurait lieu sur cette question - il ne s'agit pas d'une deuxième manche - mais celui-ci doit se faire de manière informée, ne serait-ce que pour que le travail en commission ne s'en trouve par trop dévalorisé. Car j'imagine que, sur des questions aussi techniques que les couvertures en fonds propres, les swaps, les intérêts, vous avez droit à une information provenant de plusieurs sources et suffisante pour pouvoir juger en toute connaissance de cause.

M. Roger Golay (MCG). J'ai bien écouté, M. Hiler, conseiller d'Etat, et je pense - comme il l'a dit - que la question des remboursements des frais de la Fondation de valorisation mérite un examen, s'agissant de la débâcle de la BCG. Il est temps de mener une nouvelle réflexion sur la capacité de remboursement de la BCG, par rapport à ces montants qui sont énormes - je vous le rappelle, environ 350 millions - et il serait sain que la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe puisse se pencher à nouveau sur ce sujet.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement proposé par M. Stauffer à l'article 13, alinéa 1 (nouveau), dont je vous rappelle la teneur: «Le Conseil d'Etat n'est pas autorisé à faire des avances au fonctionnement de la Fondation en liquidation».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 8 oui.

Mis aux voix, l'article 13, al. 1 (nouvelle teneur) est adopté.

La présidente. Monsieur Golay, avez-vous formellement demandé le renvoi de ce projet de loi en commission ? Oui. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets cette proposition de renvoi.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10202 à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève est rejeté par 61 non contre 8 oui.

La présidente. A l'article 14, alinéas 1 et 3 (nouvelle teneur) nous sommes saisis d'un amendement. Je pense que vous l'avez tous sous les yeux. Je passe la parole à M. le rapporteur de minorité.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Nous sommes en présence d'un problème que nous avons déjà soulevé, à savoir le remboursement des frais de fonctionnement de la Fondation de valorisation, durant la période de liquidation, par la Banque cantonale. Nous estimons en effet qu'il n'est pas concevable, pour deux motifs, que la banque procède à ce remboursement après paiement des dividendes. Nous avons déjà expliqué qu'en payant des dividendes la banque doit payer des impôts fédéraux. Et les 10% de ce qui est payé partent donc dans les caisses fédérales au lieu de diminuer la dette de la Banque cantonale envers la Fondation de valorisation et l'Etat !

La deuxième raison est la suivante. J'ai en main un document émanant de la Commission des OPA. Cette institution fédérale, en date du 29 mai 2000, a octroyé une dérogation à l'obligation de la République et canton de Genève de présenter une offre publique d'acquisition aux actionnaires de la Banque cantonale ! Je vous explique. (Exclamations.) Lorsqu'une entité détient plus de 50% du droit de vote dans une société, qu'elle soit publique ou privée, elle a l'obligation de racheter l'intégralité du capital-actions ! C'est dire que l'Etat de Genève, en 2000 - le document secret que nous avons divulgué le démontre - a violé la loi à deux titres et qu'il a obtenu, a posteriori, une dérogation des instances fédérales ! Et j'en veux pour preuve qu'aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, la Banque cantonale de Genève est détenue, à 86,24% des voix, par des entités publiques. Ce qui représente, en capital, 78,13% ! Je le répète, c'est la démonstration que le Conseil d'Etat de l'époque a violé la loi et que, vous, vous êtes en train d'entériner ce qui a été illégal à l'époque ! Ce qui me surprend le plus, chers collègues, c'est que, l'UDC n'étant pas un parti gouvernemental, vous cautionniez et fassiez le jeu de ceux qui ont plombé les comptes de la République ! Et ça, c'est effectivement très décevant !

Mesdames et Messieurs les députés, voici l'amendement que nous proposons à l'article 14, alinéa 1: «La Banque cantonale de Genève rembourse à la Fondation, y compris durant sa liquidation, sur une base annuelle et avant distribution des dividendes.» C'est-à-dire qu'elle va rembourser les frais de fonctionnement avant paiement des dividendes, pour les raisons que nous avons évoquées. Il n'est pas tolérable qu'il en soit autrement ! C'est comme si un citoyen qui doit payer ses impôts et qui est en saisie de salaire disait à l'Etat: «Cocorico, je pars en vacances; je fais mes cadeaux de fin d'année; et s'il me reste des sous, je paierais mes impôts !» Cela, dans un Etat de droit, n'est pas acceptable ! Par conséquent, je vous demande de soutenir cet amendement ! (Commentaires.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement proposé par M. Stauffer à l'article 14, alinéa 1: «La Banque cantonale de Genève rembourse à la Fondation, y compris durant sa liquidation, sur une base annuelle et avant distribution des dividendes.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 8 oui et 1 abstention.

La présidente. Monsieur Catelain, je vous donne la parole... Vous renoncez. L'article 14, alinéas 1 et 3, est ainsi...

M. Eric Stauffer. Il y a un amendement à l'article 14, alinéa 3, Madame la présidente !

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement proposé par M. Stauffer à l'article 14, alinéa 3... (La présidente est interpellée par M. Eric Stauffer.) Monsieur le député, ce n'est pas possible, on ne peut pas travailler comme cela ! Vous venez de rédiger cet amendement, or personne ne l'a reçu !

M. Eric Stauffer. Non ! Non, non ! J'avais demandé un huissier... Vous m'avez passé la parole... Je suis désolé, mais ils n'ont pas été attentifs ! (Exclamations.) Mais l'amendement était déjà rédigé ! (Protestations.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement proposé par M. Stauffer à l'article 14, alinéa 3. (Brouhaha.) Taisez-vous, s'il vous plaît ! Je vous le lis: «Cette garantie fait l'objet d'une rémunération par la Banque cantonale de Genève.»

M. Eric Stauffer. Madame la présidente, je demande à m'exprimer ! Vous ne pouvez pas agir de cette manière ! Ce n'est pas possible de mener les débats comme ça ! Je ne veux pas abuser de mon temps de parole, mais je vous demande d'avoir un minimum de respect !

La présidente. Monsieur le député, vous avez remis votre amendement au Bureau alors que j'avais déjà formulé l'article 14, alinéas 1 et 3...

M. Eric Stauffer. Ce n'est pas vrai ! (Exclamations.)

La présidente. Monsieur le député, je crois que vous dépassez largement les limites ! Vous les avez d'ailleurs dépassées depuis longtemps ! Les téléspectateurs qui sont devant leur téléviseur ont parfaitement compris.

Je vous donne la parole. Ensuite, je mettrai aux voix votre amendement.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Je serai bref. Mon but n'est pas de pourrir les débats en déposant une multitude d'amendements... (Protestations.) Eh bien, encore une fois: faites-vous plaisir, vomissez sur le MCG ! Nous, tout ce que nous voulons - et de manière respectueuse - c'est pouvoir nous exprimer et défendre la population qui nous a portés dans cet hémicycle !

Il est écrit dans la loi initiale que «Cette garantie - de 5 milliards de francs - fait l'objet d'une rémunération par la Fondation en liquidation selon les modalités fixées par convention conclue entre le Conseil d'Etat, la Banque cantonale de Genève et la Fondation, avant son entrée en liquidation.» C'est absolument scandaleux que ce soit la Fondation de valorisation qui paie la rémunération de la garantie des 5 milliards pour la BCG ! Nous, ce que nous vous proposons, c'est que ce soit la BCGe qui assume la rémunération de la garantie de ces 5 milliards ! (Brouhaha.)

Vous pouvez continuer à vous moquer des députés MCG, vous pouvez continuer à nous critiquer ! (Exclamations.) Madame la présidente, vous pouvez continuer à nous couper la parole, mais il n'en demeure pas moins que notre amendement est fondé et qu'il est respectueux envers la population et les contribuables de ce canton. Et je terminerai là !

La présidente. Monsieur le député, je vous rappelle que vous êtes intervenu déjà sept fois sept minutes, ce qui fait près de cinquante minutes... Ne dites pas que je vous ai coupé la parole ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement proposé par M. Stauffer à l'article 14, alinéa 3: «Cette garantie fait l'objet d'une rémunération par la Banque cantonale de Genève.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 8 oui et 3 abstentions.

Mis aux voix, l'article 14, al. 1 et 3 (nouvelle teneur), est adopté.

Mis aux voix, l'article 15 est adopté, de même que les articles 16 à 30 (abrogé).

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).

M. Roger Golay (MCG). Madame la présidente, nous imaginons très bien l'issue de ce débat: l'ensemble du Grand Conseil, à l'exception du MCG, va accepter ce projet de loi... Nous demandons par conséquent que le vote final se fasse à l'appel nominal, afin de nous dégager de toute responsabilité par rapport aux conséquences inhérentes à cette décision malheureuse d'accepter ce projet de loi.

La présidente. Etes-vous appuyé, Monsieur le député ? (Brouhaha.)

M. Eric Stauffer. Quel courage ! Quel courage !

La présidente. Monsieur le rapporteur, arrêtez de faire des commentaires ! Vous êtes soutenu, Monsieur Golay.

Troisième débat

La loi 10202 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 10202 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 9 non.

Loi 10202

Appel nominal

PL 8629-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Rémy Pagani, Christian Grobet, Jean Spielmann, Pierre Vanek, Salika Wenger, Cécile Guendouz, Jeannine De Haller modifiant la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux (B 5 05) (Indemnités de départ)
Rapport de majorité de M. Pierre Weiss (L)
Rapport de minorité de M. Alberto Velasco (S)

Premier débat

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Dans la suite de nos travaux «préhistoriques», le projet de loi 8629 a été examiné par la commission des finances. Il a été refusé par onze voix contre trois - trois voix socialistes; le rapporteur de minorité s'exprimera à ce sujet.

La raison essentielle pour laquelle nous nous sommes opposés à ce projet de loi est que, à part les considérations purement conjoncturelles qui avaient présidé à son dépôt, il nous est paru, du point de vue d'une saine gestion de l'Etat, peu approprié d'ajouter un troisième interlocuteur - j'allais presque dire «un troisième larron» - dans les relations qui doivent avoir lieu entre l'Etat employeur et un employé avec lequel il y aurait des difficultés, une fin de contrat. Le Grand Conseil sortirait de son rôle et de la séparation des pouvoirs qui doit présider à notre organisation.

Voilà pourquoi, Madame la présidente, je crois qu'il est, à ce stade, bon de refuser ce projet de loi. Si c'est vraiment nécessaire, je pourrai avancer d'autres arguments.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Il est tout de même étonnant de vous entendre, Monsieur le rapporteur de majorité ! Quand il s'est agi du fameux fonctionnaire du DIP, que vous citez dans votre rapport, par des initiales...

M. Pierre Weiss. Vous voulez parler de M. Ramadan !

M. Alberto Velasco. Vous mettez ses initiales, moi je ne vais pas plus loin ! Là, vous étiez scandalisé - la commission des finances aussi - des sommes qui lui avaient été versées au titre d'indemnité de départ. Et aujourd'hui, alors que vous avez l'occasion, justement, de remédier à cette situation, vous ne le faites pas ! Je trouve votre attitude incohérente ! Lorsqu'un fonctionnaire doit quitter la fonction publique, qu'il a été au Tribunal administratif et que l'Etat doit lui verser une indemnité importante, vous dites que c'est incroyable, que le Conseil d'Etat aurait dû négocier différemment, etc.

Or ce projet de loi de l'époque - pas si éloignée que cela, Monsieur Weiss - a été déposé à une période intéressante, pendant laquelle il y a eu des problèmes dans l'administration. En effet, des fonctionnaires d'un certain niveau ont dû être relevés de leur fonction et ont reçu des sommes assez importantes. Et ce projet de loi propose, quand les indemnités dépassent trois mois de salaire, que le Conseil d'Etat en informe la commission des finances: ni plus ni moins ! Ce n'est pas au Grand Conseil de prendre la décision, c'est au Conseil d'Etat d'informer la commission des finances et de lui expliquer qu'il faut régler le cas d'un fonctionnaire, qu'il faut s'en séparer pour telle ou telle raison et qu'il faut, selon les accords établis, lui verser une somme assez importante. Ensuite, le Conseil d'Etat devra voir avec la commission si elle est d'accord. Pour ma part, je trouve cela très simple. Et puis, cela permettrait aussi d'éliminer certains cas qui nous semblent délicats. Je pense, par exemple, à certains placards dorés... Je trouve ce projet de loi très intéressant et qu'on pourrait très bien l'adopter. D'ailleurs, le Conseil d'Etat peut continuer à verser une indemnité de trois mois de salaire, sans que la commission des finances n'intervienne; elle ne le ferait que si l'indemnité devait être supérieure à trois mois de salaire. Et il n'est pas dit, Monsieur le rapporteur de majorité, que la commission des finances ne suive pas le Conseil d'Etat ! Il est tout à fait possible qu'elle le suive, mais, au moins, elle serait informée que l'indemnité se monte à 500 000 F, à 1 million ou 2 millions.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste a, en commission des finances, voté l'entrée en matière de ce projet de loi. Par conséquent, je vous remercie de faire de même.

Présidence de M. Eric Leyvraz, premier vice-président

M. Christian Bavarel (Ve). Ce que propose ce projet de loi est assez simple: «Aucune indemnité de départ d'un membre du personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux d'un montant supérieur à trois mois de salaire ne peut être accordée sans l'approbation de la commission des finances du Grand Conseil.» Pour nous, cela veut dire que le patron - le Conseil d'Etat - ne pourrait plus prendre de décision seul: la commission des finances aurait son mot à dire. En ce qui nous concerne, nous, les Verts, nous ne souhaitons pas que le parlement ait une responsabilité d'employeur: nous souhaitons une séparation claire des pouvoirs. C'est la première remarque que je voulais faire par rapport à ce projet de loi.

Deuxième remarque. Il faut se rendre compte que cette restriction - à savoir que la commission des finances pourrait empêcher que des indemnités de plus de trois mois soient versées - est contraire au droit syndical et à la volonté de négociation des parties en présence. Des accords doivent pouvoir être trouvés, même en cas d'octroi d'indemnités supérieures à trois mois de salaire, cela nous semble tout à fait concevable !

Dernière remarque. Dans nos collectivités publiques, si le statut du personnel est particulier, c'est pour permettre à des personnes de faire acte d'autorité sans état d'âme, même contre l'avis d'élus. Par exemple, si une personne vous a refusé un permis de construire, il ne faut pas que vous puissiez le licencier quelque temps plus tard en exerçant une quelconque pression. Néanmoins, les conditions de travail au sein d'une administration publique, parce que les employés bénéficient d'un statut particulier, peuvent être relativement dures: il y a plus de cas de mobbing ou de cas de souffrance du personnel qu'ailleurs, nous le reconnaissons.

Nous partons aussi du principe qu'il faut pouvoir sortir d'une crise en ayant la possibilité d'octroyer de fortes indemnités financières. Cela doit permettre à chacun de garder sa dignité et évite que le système ne broie totalement une personne, au point que celle-ci soit obligée de demander l'AI quand elle est complètement détruite et qu'elle se trouve hors d'état de travailler. Nous dénonçons ce genre de cas, qui arrivent malheureusement fréquemment - trop fréquemment - dans l'administration publique. Une personne broyée est une personne broyée de trop ! Nous souhaitons donc qu'il soit possible de sortir d'une crise, lorsque cela est nécessaire, même si cela doit passer par le versement de fortes indemnités, et nous concevons cela tout à fait bien.

La loi sur le personnel de l'Etat a été modifiée dans ce sens, elle nous convient, et c'est pour cela que nous vous invitons à refuser ce projet de loi.

Présidence de Mme Loly Bolay, présidente

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Ce projet de loi a pour but de modifier la gestion du personnel, mais nous, au parti démocrate-chrétien, ne sommes pas d'accord que la commission des finances soit prise en otage. Ce n'est pas son travail de gérer le personnel de l'Etat !

Tout d'abord, nous faisons confiance aux partenaires sociaux, et nous tenons beaucoup à ce que les négociations puissent continuer à se poursuivre au sein des différents syndicats.

Surtout, nous faisons confiance au Conseil d'Etat, qui a inscrit clairement un nouveau style de gestion du personnel dans ses plans de mesures, notamment en ce qui concerne les cadres.

C'est pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que le parti démocrate-chrétien vous invite à refuser ce projet de loi.

M. Edouard Cuendet (L). Nous assistons à un mélange des genres qui me paraît assez inquiétant, dans la mesure où l'employeur, dans la loi concernée, c'est l'Etat et, par la voix de l'exécutif, le Conseil d'Etat. Et je rappellerai que le Conseil d'Etat s'efforce de mettre en place une politique de ressources humaines en progression par rapport à ce qui se faisait par le passé, c'est-à-dire rien ! Soutenir ce projet de loi, qui me semble finalement totalement dépassé et obsolète, serait donc une preuve de défiance qui me paraît absolument mal placée.

Monsieur Velasco, vous siégez à la commission des finances, comme Pierre Weiss et comme moi... Vous savez que l'on nous accuse souvent d'avoir tous les pouvoirs au sein du Grand Conseil. Alors, je ne sais pas s'il est vraiment judicieux que l'on nous en donne un de plus: la gestion des ressources humaines de l'Etat ! Cela me semble sortir de nos compétences, certes stratosphériques, mais quand même pas universelles.

Donc, pour cette raison aussi - et j'avoue mon humble incompétence - je pense qu'il est totalement déplacé de soutenir un tel projet de loi.

Mon collègue Bavarel, qui siège aussi à la commission des finances et qui connaît ses limites - tout comme moi... (Rires.)

Une voix. Tu as été mis en cause ! (Rires.)

M. Edouard Cuendet. Non, non ! Donc, nous nous rendons parfaitement compte que les choses ne peuvent pas fonctionner comme cela, et, surtout - en dehors de tout humour - ce qui me paraît le plus dangereux, c'est le coût humain qu'entraînerait une telle mesure. Car, bien évidemment, elle aurait pour conséquence de multiplier les procédures devant le Tribunal administratif, avec tout ce que cela comporte d'acrimonie, de rapports, d'audits internes. On a pu constater ce qui se passait dans certains départements avec les audits internes, qui devenaient très vite externes, et toutes les mesures qui, justement, peuvent broyer des fonctionnaires, ce qui n'est pas souhaitable.

Comme dans tous les domaines où il y a des relations employeurs/employés, la négociation reste la meilleure des solutions, quitte à ce que cela représente un coût modéré pour l'Etat. L'important est de trouver une solution pour sortir d'une crise qui, autrement, pourrait se prolonger indéfiniment devant les tribunaux, ce que, j'imagine, le rapporteur de minorité ne souhaite pas plus que moi.

C'est la raison pour laquelle je vous invite à suivre le rapport de majorité et à ne pas entrer en matière sur ce projet.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Il est intéressant de voir à quel point, lorsqu'on a une idée, on peut y tenir... M. Bavarel avait... Pardon: M. Velasco ! Excusez la méprise ! M. Velasco avait déjà prétendu en commission que la loi sur le personnel de l'administration cantonale n'empêcherait pas un cas tel que celui de Ramadan de se reproduire. Or il lui a été démontré que ce n'était plus possible, car cette loi a été modifiée et comporte de nouvelles dispositions concernant les licenciements. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juillet de l'an passé. M. Velasco s'est peut-être opposé à ces nouvelles dispositions... En tout cas, il semble les avoir oubliées. De même qu'il semble avoir oublié nos débats. Je le regrette !

Qui plus est, il a oublié de lire mon rapport, qui, sur ce point - me semble-t-il, modestement - est relativement clair. D'autant plus que j'y ajoute de façon quasiment littérale les précisions qui nous ont été données en commission par la secrétaire adjointe du département des finances, à savoir que la nouvelle loi sur le personnel de l'administration cantonale ne prévoit pas d'indemnités de départ, sauf dans deux cas: s'il y a suppression de poste et qu'un nouveau poste ne peut être trouvé ou bien s'il y a licenciement abusif. Or, dans le cas du «lapidateur» Ramadan, il ne s'agissait manifestement pas d'un licenciement abusif.

Par conséquent, Monsieur Velasco, s'il vous plaît, prenez en considération que le monde a changé, que des rapports ont été rédigés, que des lois ont été votées et que ce que vous craignez ne peut plus arriver, grâce à la sagesse de ce Grand Conseil ! Refusez donc avec moi ce projet de loi ! (Brouhaha.)

La présidente. Monsieur le rapporteur de minorité, je vous donne la parole.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Merci, Madame ! Pour autant que je puisse m'exprimer, parce qu'il y a un brouhaha insupportable dans cette salle ! (La présidente agite la cloche.) Après ce que nous avons supporté pendant deux heures, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés, un peu de tranquillité !

La présidente. Un instant, Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez raison ! Mesdames et Messieurs les députés, je demande un peu de silence ! Merci beaucoup ! Monsieur le rapporteur, vous pouvez continuer.

M. Alberto Velasco. Voilà ! Cher collègue, rapporteur de majorité, vous constaterez que l'ambiance a changé par rapport à tout à l'heure.

M. Pierre Weiss. Cher ami !

M. Alberto Velasco. Bon... C'est très bien, si l'on applique les nouvelles dispositions, mais il se pourrait qu'on ne les applique pas. (L'orateur est interpellé.) Mais oui, le Conseil d'Etat peut trouver des accords ! Quand on applique des dispositions, Monsieur le rapporteur, et que des personnes interpellent le Tribunal administratif, cela génère des procédures longues. Alors, les parties peuvent convenir d'un accord portant sur une somme assez importante.

Par ailleurs, notre collègue, M. Cuendet - estimé collègue - pense qu'il y aura une multiplication des procédures... Je ne vois pas pourquoi ! Au contraire: si l'on appliquait ce projet de loi, il y aurait moins de procédures ! En effet, comme il faudrait de toute façon passer par la commission des finances, cela rendrait les choses un peu plus difficiles. D'une part, les nouvelles dispositions devront être appliquées et, d'autre part, la mesure proposée par ce projet de loi permettrait à la commission des finances de se prononcer.

Quoi qu'il en soit, Monsieur le rapporteur de majorité, même si la commission des finances se prononçait négativement, je ne suis pas sûr que le Conseil d'Etat ne pourrait tout pas tout de même aller de l'avant... La mesure proposée par ce projet de loi relève en effet plus de l'information que de la directive. Et puis, j'estime qu'elle est d'actualité. D'autant qu'un excellent projet de loi - au point 24 de l'ordre du jour - qui comportait un certain nombre de dispositions sur l'éthique, sur les exigences du travail, sur l'attitude générale, a été refusé, ce qui montre bien votre volonté de refuser tout ce qui vient des groupes de gauche, notamment de l'Alliance de gauche. Je comprends que votre animosité pour cette formation politique vous pousse à ne même pas lire ces dispositions, mais, en ce qui nous concerne, nous entrerons en matière sur ce projet de loi.

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération du projet de loi 8629.

Mis aux voix, le projet de loi 8629 est rejeté en premier débat par 42 non contre 10 oui.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je propose d'interrompre nos travaux. Nous les reprendrons à 17h avec le point 109 de notre ordre du jour. A tout de suite !

La séance est levée à 16h30.