Séance du
vendredi 14 mars 2008 à
17h
56e
législature -
3e
année -
6e
session -
31e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. David Hiler, Robert Cramer, Pierre-François Unger, Charles Beer et François Longchamp, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, et Mark Muller, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. Christophe Aumeunier, Guillaume Barazzone, Christian Bavarel, Didier Bonny, Georges Letellier, Yves Nidegger et Véronique Pürro, députés.
La présidente. Nous avons reçu de notre collègue, M. Pierre Kunz, sa lettre de démission de son mandat de député, avec effet à l'issue de cette séance. Je prie Mme la secrétaire de bien vouloir lire le courrier 2587.
La présidente. Il est pris acte de cette démission.
Mesdames et Messieurs les députés, M. Pierre Kunz a siégé au Grand Conseil pendant plus de dix ans, de 1993 à 1997, puis de 2001 à ce jour. Il a été élu sur la liste du parti radical en 1993, puis réélu en 1997, 2001 et 2005.
Il a siégé au sein de nombreuses commissions: ad hoc sur le personnel de l'Etat, affaires sociales, contrôle de gestion, droits de l'Homme, économie, énergie, finances, grâce, judiciaire et réexamen en matière de naturalisation.
A peine élu en 1993, il présida la commission de l'enseignement supérieur. Par la suite, il a également exercé la fonction de vice-président de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève et de celle des droits politiques.
Passionné par les caisses de pension, il est également l'auteur du projet de loi introduisant l'application des normes IPSAS au sein de l'Etat et de celui fixant au 1er janvier 2007 la mise en place d'un système de contrôle interne pour l'administration.
Nous formons tous nos voeux pour la suite de sa carrière politique et, conformément à son souhait, allons verser la contre-valeur du stylo souvenir à l'Association Emmaüs.
Monsieur le député, je vais quand même, comme à tous les autres, vous faire un gros mimi ! (Rires. Applaudissements. La présidente embrasse M. Pierre Kunz.)
Nous sommes au point 5b, RD 734...
Une voix. Les hommages !
La présidente. Oui, excusez-moi, il y a les hommages, vous avez raison ! J'ai été un peu perturbée...
M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, après l'avoir fait pour Marie-Françoise de Tassigny et Hugues Hiltpold, il m'incombe maintenant de rendre hommage à mon ami Pierre Kunz. Dur, dur, parfois, d'être chef de groupe ! Pourtant, mon premier contact avec Pierre ne m'avait pas mis de très bonne humeur. (Rires.) Il avait quasiment déboulé dans mon bureau de la rue Bellot, à l'époque, pour m'expliquer comment il fallait résoudre la crise du logement et abaisser les coûts de la construction, à moi, le secrétaire du bâtiment ! Rien que ça ! Je lui avais rétorqué que les coûts de la construction étaient en grande partie déterminés par exemple par les salaires, lesquels étaient fixés par des conventions collectives de travail, par la paix sociale, bénéfique à l'ensemble de la société. A cela, il avait répondu que les compromis mous ne l'intéressaient pas beaucoup.
En politique, comme dans les relations sociales, il n'a jamais caché sa préférence pour les situations claires, où chacun entre dans la salle de négociations avec des idées précises, pouvant le cas échéant en ressortir avec un accord après une confrontation constructive.
Comme le relève Bernard Favre, ancien secrétaire général du parti radical, Pierre Kunz, je cite: «manie la plume comme un samouraï son sabre: le verbe aiguisé, tranchant, une lame de lumière qui ne dédaigne pas se fondre dans la mêlée pour trancher des têtes et soutenir ses frères.»
Si maintenant on considère son parcours politique et ses engagements dans la société, notamment culturels, je dois constater qu'il n'est pas le «tonton flingueur» que certains ont décrit. En réalité, on vient de le voir, Pierre est un homme sensible, capable d'accepter des compromis même en matière de finances publiques. (Commentaires. Rires.) Et je me souviendrai longtemps des passes d'armes et des coups de gueule au sein du caucus à la veille de chaque débat sur le budget... Ce qu'on a souffert !
Comme tout radical qui se respecte, Pierre a le sens de l'intérêt général, qui résulte d'un subtil équilibre entre le respect de la liberté individuelle et la nécessité, dans une collectivité, de donner un coup de pouce à celles et ceux qui ont moins de chance, sans ériger cette intervention en un droit automatique, qui peut démobiliser les individus. Et c'est vrai, dans maints dossiers sensibles, il a contribué à trouver des solutions valorisantes et respectueuses, autant pour la dignité des individus que pour l'utilisation parcimonieuse des deniers publics.
Pierre Kunz a décidé de quitter cette enceinte pour se mettre à disposition de la Constituante. Son expérience, son entregent, son esprit frondeur et son courage seront sans doute très utiles et d'un très grand apport pour jeter les bases d'une nouvelle constitution pour Genève.
Au nom du groupe, je te remercie, Pierre, d'avoir de temps en temps secoué les cocotiers et d'avoir été à l'origine de maintes propositions comme, par exemple, la motion qui a abouti à la réintroduction des notes à l'école. Je te souhaite bonne chance pour l'élection de la Constituante ! (Applaudissements.)
Mme Janine Hagmann (L). Permettez-moi, au nom du groupe libéral, de vous adresser quelques mots à l'occasion du départ de notre collègue. Pierre Kunz et moi-même avons fait un long chemin ensemble. Entrés tous deux au parlement en 1993, nous avons découvert l'arène politique, vécu ses moments de passion comme ses moments d'ennui, traversé différentes majorités - monocolore, multicolore - constaté la disparition d'un groupe trublion - remplacé par un autre, tout aussi trublion - et cela crée des liens.
Pierre a vite rejoint le groupe des ténors. Mais, têtu comme un âne gris et aimant les défis, il a annoncé haut et fort en 1997 qu'il n'accepterait pas de nouveau mandat s'il n'était pas élu dans les cinq premiers de sa liste. Arrivé en huitième position, il nous a tous soufflés. En effet, il a fait ce qu'il avait dit et a refusé son élection, pour prendre un congé sabbatique de quatre ans. C'est une preuve de sa forte personnalité, qui a souvent donné des sueurs froides à son chef de groupe: lorsque Pierre prend la parole, on retient son souffle, pour attendre la chute souvent radicalement opposée aux propos des préopinants de son groupe.
Cher Pierre, nous te l'avons déjà dit, tu aurais été reçu à bras ouverts dans notre parti, où tu aurais figuré d'ailleurs parmi la droite inflexible. Tu as tenu une ligne politique rigoureuse, osant même parfois contredire les tiens. Tu n'as jamais utilisé la langue de bois. De ce fait, tu n'as laissé personne indifférent. Avec un radical de ta trempe, des fiançailles sont faciles !
Tu nous quittes parce que tu t'intéresses à la Constituante. Je te comprends ! Ta vision de la chose publique, toi qui t'es toujours senti concerné par l'évolution de notre société, que tu aimerais influencer, te permettrait d'être un acteur efficace dans ce nouveau contrat.
Tu n'aimes pas subir, tu préfères agir. Nous regretterons ton engagement d'homme responsable, qui a toujours refusé un endettement trop lourd pour Genève. Nous regretterons également tes prises de position pas toujours politiquement correctes. Mais je suis sûre que nous allons aussi te manquer, car tu aimes les débats. Tu m'as dit que tu n'avais jamais brigué toi-même de présidence de commission, craignant que ce ne fût un frein à l'expression de tes positions.
Toi et moi, cher Pierre, n'avons jamais pu nous mettre d'accord sur les problèmes scolaires. En revanche, nous sommes tous deux convaincus que nos petits-enfants respectifs sont les plus intéressants et les plus attachants du monde. Alors, durant les mois de liberté que te laissera ton départ de cette enceinte, profite bien de tes trois petits Américains. Tu me reparleras de leurs expériences scolaires dans quelque temps, et nous réussirons peut-être à trouver enfin un accord sur ce sujet !
Pierre, tu as fêté tes 65 ans lundi dernier, et tu t'en vas. Tu me laisses donc pratiquement seule dans cette enceinte pour représenter 25% de la population de notre canton. Dur, dur ! Alors souviens-t'en dans la Constituante, où je te souhaite d'être élu, afin qu'elle puisse bénéficier de ton expérience parlementaire. Bon vent, cher Pierre ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Cher Pierre, tu vas me manquer, parce que, lorsqu'il y avait l'appel nominal, comme c'était le cas dans le temps, je savais que si Kunz disait non, c'était simple, moi je devais dire oui ! Je n'avais même pas besoin de connaître le sujet ! C'était clair. Enfin, peut-être pas le caractère, mais les opinions, certainement ! Nous avons toujours trouvé agréable que tu aies des positions franches, tranchées et honnêtes, et c'est ce qui nous a fait apprécier ta présence.
C'est vrai, on est rarement d'accord sur un sujet, mais le parti radical a commencé à se préoccuper du développement durable, et on en est très heureux, parce qu'on vit tous sur la même planète.
En fait, tu nous manqueras, parce que, dans toutes ces controverses, une des rares qualités... Enfin, une des qualités rares que tu possèdes... (Rires.) ...c'est l'amabilité, et c'est extraordinaire, parce que je n'ai jamais entendu de ta part un mot désagréable, méchant ou inadéquat envers tes collègues. Pour les femmes aussi, il était très agréable de côtoyer un homme aussi aimable et sympathique. Et cela, on va le regretter ! (Applaudissements.)
M. Eric Bertinat (UDC). Chers collègues, à l'occasion de son départ vers d'autres défis, je souhaiterais rendre un double hommage à mon collègue Pierre Kunz. Le premier s'adresse au député. Depuis plus de deux ans, j'ai retrouvé Pierre Kunz dans la plupart des commissions qui m'ont été attribuées et, sur la plupart des sujets, nous avons été d'accord. Il n'y a là rien de bien nouveau, si ce n'est la surprise que j'ai souvent éprouvée en l'écoutant défendre son avis, non seulement avec conviction mais avec une franchise et un ton direct qui m'ont plus d'une fois laissé admiratif.
Pierre Kunz est bel et bien radical, dans tous les sens du terme. Il aura été pour moi un bon exemple de ce que doit être un député, quelle que soit sa couleur politique.
Le deuxième hommage que je désire lui rendre est presque sentimental parce que, dès que j'ai fait sa connaissance, j'ai éprouvé une réelle amitié pour lui. Ce qui m'autorise à lui dire sans détour que je regrette beaucoup sa démission du Grand Conseil. Mais l'amitié que je lui porte me permet aussi de lui souhaiter beaucoup de succès et de plaisir pour la suite de sa carrière politique.
Le groupe UDC a apprécié Pierre Kunz et continuera sans doute à le faire, si les électeurs veulent bien l'élire dans ce «bibelot» à 50 millions qui rédigera une nouvelle constitution pour ce canton. Ce n'est donc pas un adieu, même pas un au revoir, c'est juste un salut de la main, droite. (Applaudissements.)
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Cher Pierre, je crois que je pourrais reprendre à mon compte les propos de Michèle Künzler. C'est vrai que nos positions ont rarement été très semblables, et je crois que si le groupe socialiste devait désigner les députés les plus à droite de ce parlement, tu ne serais pas loin d'avoir la palme d'or ! (Rires.) Tu as aussi un côté un peu John Wayne dans les westerns de John Ford, c'est-à-dire que tu ressembles à un héros solitaire, un peu désabusé, en marge, qui agit tout seul, mais avec beaucoup de courage, et qui pourfend le mal en chevauchant son cheval dans les plaines de l'Ouest. (Rires.) Mais tu as aussi une qualité, et Michèle Künzler l'a relevée, c'est la chaleur humaine. Ainsi, même si l'on n'est régulièrement pas d'accord, on peut toujours dialoguer, et j'ai d'ailleurs souvent eu des discussions politiques avec toi. On a également parlé d'histoire, et tu es un homme cultivé, fin, intelligent, que j'apprécie particulièrement.
Au nom du groupe socialiste, je te souhaite bon vent pour la suite mais, si tu devais être élu à la Constituante, n'oublie pas que la conquête de l'Ouest est terminée et que le monde n'est pas peuplé que de cow-boys et d'Indiens ! (Rires. Applaudissements.)
M. Pascal Pétroz (PDC). Cher Pierre - ou plutôt devrais-je dire «cher Peter», puisque je me suis laissé dire que c'est ainsi qu'on t'appelait lorsque, enfant, tu fréquentais la belle commune de Thônex - cher Pierre, le groupe démocrate-chrétien s'associe à l'hommage qui t'est rendu ici. Nous avons également énormément apprécié ta franchise, ta rigueur, ton côté un peu trublion, tes propos taillés à la hache et le fait que, finalement, tu arrivais à avoir des positions parfois assez dures et tranchées, mais toujours avec un sourire en coin, un charme et une gentillesse qui te caractérisent.
Nous te remercions énormément pour tout ce que tu as apporté à ce parlement pendant les longues années où tu as siégé ici. Tu sais à quel point la Constituante m'est chère, et à titre personnel j'aimerais te dire que je trouve fantastique que tu sois l'un des pionniers à se lancer dans cette aventure. Le geste que tu fais aujourd'hui en t'engageant pour cette dernière est très important. Certes, il nous attriste, puisque tu nous quittes, mais il nous motive aussi, parce qu'il démontre l'envie que tu as de t'impliquer dans l'avenir de ce canton. J'espère que tu seras suivi par de nombreuses autres personnalités genevoises, et que vous formerez une Constituante qui fera un excellent travail. Je te remercie ! (Applaudissements.)
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je suis un vieux citoyen, mais un jeune député, et Pierre Kunz fait partie des gens que j'ai connus dès le départ, ne serait-ce que par la commission des finances. J'aimerais dire que j'admire chez Pierre une qualité extraordinaire: il a une conviction personnelle qu'il sait exprimer et il ne s'en démet jamais; il suit de plus une ligne directrice parfois un peu étonnante, parce qu'elle ne permet pas la surprise. On sait en effet d'avance que ses décisions sont prises d'une manière claire, nette et précise. En outre, j'admire sa franchise et sa qualité d'analyse.
Pierre et moi sommes souvent en désaccord, mais cela importe peu. Ce que j'aime avec lui, c'est qu'on peut être en opposition tout en faisant preuve de respect, d'amitié, bref, d'humanité. Pour cela, Pierre, je te remercie, parce que, du fait que nous sommes au MCG, peu de députés de ce parlement ont permis la discussion avec nous. Or toi tu l'as rendue possible ! Certes, on peut avoir des idées divergentes ou des approches différentes, mais le respect est une valeur importante, et tu en as toujours fait preuve, ce dont je te remercie. C'est d'ailleurs une qualité qui donne de la valeur à quelqu'un. Ainsi, quelles que soient tes idées politiques - on peut les approuver ou non, et on a eu la preuve que tout le monde ne pense pas comme toi ! - il y a une chose que personne ne peut prétendre, c'est que tu ne respectes pas les autres opinions. Alors merci, Pierre ! Et je dois dire que, comme ton parti, tes opinions sont radicales ! Je te souhaite un excellent parcours dans la nouvelle constitution que tu aimerais nous préparer. (Applaudissements.)
M. Pierre Kunz (R). Chers collègues, vous avez eu à mon égard des propos aimables, même s'ils étaient, dans certains cas, plutôt radicaux ! Les paroles que vous avez prononcées m'ont touché, parce qu'en les entendant je me suis convaincu qu'au-delà des escarmouches et des conflits qui nous ont occupés ici et en commission, vous aviez finalement bien compris qui je suis et ce qui m'anime en politique. Vous avez compris que je n'ai jamais cru au consensus en tant que valeur suprême de la politique. Je pense aujourd'hui comme hier que la politique vaut par l'arène pacifique qu'elle fournit à l'affrontement des idées, et le compromis ou le consensus ne peuvent constituer que la solution à cet affrontement, la solution destinée à mettre un terme à celui-ci. C'est l'affrontement qui fait la grandeur des acteurs, c'est lui qui alimente leurs passions, alors que le compromis final est plutôt leur servitude.
Je n'ai jamais davantage été un relativiste qui considère que toutes les idées se valent et qu'elles méritent toutes le respect. J'ai donc toujours, ici et en commission, pris le contre-pied - parfois avec une vigueur un peu excessive, je le reconnais ! - des idées qui me paraissaient, et qui me paraîtront dans l'avenir, fausses ou dangereuses. Mais, pour moi, si la tolérance ne consiste pas à placer toutes les idées sur le même plan, elle exige que l'on respecte de la même façon ceux qui les expriment, qu'on soit d'accord avec ces opinions ou que l'on s'y oppose. Ce à quoi, vous l'avez bien compris, je me suis toujours astreint.
A celles et à ceux qui défendent un projet de société différent du mien, je voudrais dire combien dans les faits ils m'ont changé depuis 1993, lorsque pour la première fois je me suis assis dans cette enceinte. En effet, ils m'ont appris à me questionner davantage, à affiner mes idées, à mieux connaître les Genevois et leurs institutions, et à mieux me connaître moi-même. En résumé, même si cela peut paraître un peu surprenant à ceux qui ne m'ont pas connu il y a une quinzaine d'années, ils m'ont appris un peu de sagesse ! (Rires.) Celle qui me manquait manifestement en 1997, comme l'a relevé Janine Hagmann. Celle aussi qui m'a amené à admettre que, finalement, je n'appartenais pas à une espèce incomprise et persécutée, qui seule aurait la raison pour elle.
Madame la présidente, chers collègues, ce que je viens de dire vaut aussi pour mes meilleurs ennemis... les conseillers d'Etat ! (Rires.) Eux que j'ai contestés avec une grande persévérance, en tout cas jusqu'à fin 2005, lorsque ce gouvernement s'est mis en tête de diriger Genève comme je ne l'espérais plus ! Heureusement, à la fin de l'an dernier, tout, si j'ose dire, est rentré dans l'ordre. (Rires.) Et même si ce Conseil d'Etat est certainement le meilleur de ceux que Genève a connus depuis vingt ans, j'ai pu reprendre ma posture du contestataire de l'incohérence gouvernementale et celle du défenseur d'une rigueur budgétaire toujours sacrifiée sur l'autel du pragmatisme et des équilibres politiques.
Madame la présidente, chers collègues, au moment de quitter le Grand Conseil, je ne voudrais manquer de parler à celles et ceux avec qui j'ai fait équipe, les radicaux. J'en suis sûr, chacun s'est rendu compte qu'il règne dans ce coin de salle, au sein de ce groupe, un climat un peu particulier. Ce dernier est fait de l'amitié aussi profonde que virile... (Rires.) ...qui relie et intègre ses membres. Une amitié fondée sur le travail sérieux et partagé, et sur un débat toujours ouvert et franc. Une amitié faite aussi, comme il se doit, d'engueulades homériques, mais aussi de moments festifs franchement rabelaisiens.
Chers amis, je me suis toujours trouvé bien avec vous, dans ce groupe où les rancunes et les conflits de personnes n'ont pas de place. Je me suis trouvé bien, sans doute parce que vous m'avez toujours pardonné ma manière parfois peu orthodoxe de fonctionner. Alors un grand merci à vous !
Madame la présidente, chers amis, chers collègues, il n'est jamais aisé de choisir entre ce qui est juste pour soi et ce qui est bon. Ce qui aurait été agréable et facile eût été de rester, c'est sûr ! Mais en l'occurrence je suis persuadé que ce qui est juste et raisonnable est de céder mon siège. D'autant que, en politique comme en amour, nous le savons tous, il vaut mieux prendre le risque de partir un peu trop tôt que de rester trop longtemps ! (Rires.) Et, franchement dit, l'habitude me guettait ! Quant à vous, chers collègues, avouez-le: j'ai cessé de vous surprendre et de vous agacer...
Une voix. Non, non !
M. Pierre Kunz. ...tant vous me connaissez désormais !
Vous le savez, je quitte le Grand Conseil, non pas pour entrer en retraite ou en somnolence, et encore moins par lassitude: je passe à autre chose, mais comme un convive rassasié quitte une excellente table, avec une grande gratitude pour ses hôtes. Je vous remercie. (Longs applaudissements.)
M. Francis Walpen (L), rapporteur. Au cours de sa séance du 13 mars, la commission des droits politiques a examiné la liste des liens d'intérêts de la remplaçante de notre collègue Pierre Kunz, Mme Claudine Gachet. Aucun des liens mentionnés sur sa déclaration n'est incompatible avec un mandat de députée au sein de notre Grand Conseil.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport oral.
La présidente. Mme Claudine Gachet prêtera serment ce soir à 20h30.
Liens d'intérêts de Mme Claudine Gachet (R)
Infirmière en psychiatrie, thérapeute de famille, spécialiste dans la violence, les traumatismes
Infirmière, thérapeute de famille, indépendante
Membre fondatrice et conseil de fondation Institut de la famille Genève
Fondatrice et directrice de l'association «Face à face»
Membre de l'Association suisse de thérapie de famille et interventions systémiques - ASTHEFIS
Membre de la commission de délivrance des titres - ASTHEFIS
Membre de l'Association genevoise des thérapies de famille - AGTF
Membre de la Fédération romande des intervenants auprès des auteur(e)s de violence domestique - FRIADV
Membre de l'Association suisse des infirmières - ASI
Membre du Centre de liaison des associations féminines GE - CLAFG
Membre du groupe de réflexion et action autour de la violence - GRAAV
Membre de la commission consultative sur les violences domestiques
Membre du comité du Choeur de la cathédrale
Annonces et dépôts
La présidente. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:
Pétition : Pour des trains deux fois par heure, également en soirée et le samedi et des correspondances optimales à Coppet (P-1657)
Interpellations urgentes écrites
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de Mme Patricia Läser : L'autorité peut priver un parent de son droit de visite en instaurant une clause péril sans preuve et surtout sans l'écouter (IUE 547)
Interpellation urgente écrite de M. Charles Selleger : Dangerosité des pistes cyclables (IUE 548)
Interpellation urgente écrite de M. Christian Brunier : Quelle est la logique de développement de Puplinge ? (IUE 549)
Interpellation urgente écrite de Mme Béatrice Hirsch-Aellen : Est-il normal que, du jour au lendemain, des parents ne sachent plus rien des études de leurs enfants majeurs? (IUE 550)
Interpellation urgente écrite de Mme Sandra Borgeaud : La loi est-elle respectée lors des dépouillements des votations / élections ? (IUE 551)
Interpellation urgente écrite de Mme Sandra Borgeaud : Faculté des sciences, section biologie (IUE 552)
Interpellation urgente écrite de Mme Sandra Borgeaud : Inégalité de crédit pour la section biologie à la faculté des sciences (IUE 553)
Interpellation urgente écrite de Mme Sandra Borgeaud : Elargir la garde d'enfants scolarisés à des retraités (IUE 554)
Interpellation urgente écrite de M. Mario Cavaleri : Indemnités et aides financières selon la loi du 15 décembre 2005 (LIAF) - Essaierait-on de recycler des thésaurisations par le système des vases communicants ? (IUE 555)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Bus D comme... Demain, demain, toujours demain ? (IUE 556)
Interpellation urgente écrite de M. Mario Cavaleri : Allocation logement du Canton et aide personnalisée de la Ville de Genève : à quand la fin de l'inégalité de traitement sur le plan fiscal ? (IUE 557)
Interpellation urgente écrite de M. Jacques Follonier : Soutien aux enseignants, respect et sérénité à l'école (IUE 558)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Charbonnier : Entreprise Reliure SA (IUE 559)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Démantèlement de l'entreprise Similor à Genève : que fait le Conseil d'Etat pour éviter la disparition des entreprises du secteur secondaire dans notre canton et ne pas laisser tomber 250 employés? (IUE 560)
Interpellation urgente écrite de M. Roger Deneys : Nouvelle loi sur le chômage : bientôt des dispositifs de formation M-Budget, au détriment des chômeuses et chômeurs ? (IUE 561)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : A SIG, le mécénat, comme le courant vert, peut-il devenir une option pour les clients ? (IUE 562)
IUE 547 IUE 548 IUE 549 IUE 550 IUE 551 IUE 552 IUE 553 IUE 554 IUE 555 IUE 556 IUE 557 IUE 558 IUE 559 IUE 560 IUE 561 IUE 562
La présidente. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle des 24, 25 et 29 avril.
Premier débat
M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. Nous étudions ce soir simultanément les PL 9513 et PL 9966. Vous verrez dans le document que vous avez reçu que, si ces deux dossiers sont traités par deux projets de lois différents, ils ne font en revanche l'objet que d'un seul acte de vente, raison pour laquelle il n'y a qu'un seul rapport.
La commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève a siégé à huit reprises pour traiter de ces deux objets. Vous avez vu dans le rapport de majorité que la commission a d'abord été saisie des dossiers le 26 mai 2004, puis le 8 septembre 2004. Lors de ces deux séances, il n'a été question d'analyser qu'un des deux projets de lois, le 9513, qui concernait les Halles de Carouge. Puis, la commission a été saisie d'un autre projet de loi, relatif à un immeuble de charme situé à côté de ces halles, qu'elle a examiné le 20 septembre et le 11 octobre 2006. Lors de ces séances, la commission a validé les prix de vente de ces deux objets.
Cette année, la commission a de nouveau siégé à trois reprises pour analyser ces deux projets de lois, d'où la difficulté de suivre le fil de cette opération. Le 16 janvier 2008 tout d'abord, la fondation nous a informés qu'un acte de vente reliant les deux objets avait été signé, avec une vente en bloc. Cette dernière nous a aussi bien expliqué les difficultés qu'elle avait eues à mettre en valeur et à réaliser ce gage.
Le 6 février 2008, la commission s'est rendue sur place pour se rendre compte de l'état de ces deux bâtiments et se faire une idée in situ de ces deux projets de lois. Finalement, ce n'est que le 20 février, puis le 5 mars 2008, que la commission a validé ces ventes.
Je profite de ce rapide historique pour ajouter que la commune de Carouge a été sollicitée à plusieurs reprises afin d'indiquer si l'achat de ces deux objets l'intéressait. Cette dernière a renoncé à faire valoir son droit de préemption et, même, à formaliser son intérêt par une proposition.
M. Velasco, rapporteur de minorité, a aussi récemment rappelé à la Ville de Genève qu'elle aurait pu être intéressée par ce site pour reloger certaines activités qui se trouvent aujourd'hui principalement sur le site d'Artamis, sauf erreur. Toutefois, vous l'avez appris par la presse, la Ville de Genève a également renoncé à s'intéresser à ce projet de relocation des artisans d'Artamis dans le secteur des Halles de Carouge.
Dans son rapport de minorité, M. Velasco retrace le même historique que celui que je viens de vous faire et demande que cette vente soit différée dans le temps. J'espère cependant que mon rapide survol, qui résume les quatre ans de procédure de vente de ces objets, vous convaincra du bien-fondé de la décision de la majorité de la commission, qui vous propose quant à elle de vendre cet objet.
Vous verrez encore dans le rapport que nous avons eu une petite discussion sur le prix de vente, puisqu'il a été proposé que celui-ci soit relevé à l'addition des deux prix de repli, ce qui faisait une différence d'environ 300 000 F par rapport au montant de la vente totale. Cette proposition a été refusée par la majorité de la commission, et c'est finalement la somme de 5 400 000 F qui a été retenue pour l'addition de ces deux ventes.
Voilà, Madame la présidente, c'était effectivement une longue histoire ! L'Etat subit une perte assez importante dans ce dossier, même très importante, puisqu'elle représente environ 80% de la valeur du gage, soit environ 17 160 000 F. Cette casserole trouve donc aujourd'hui une issue dans ce montant de 5 400 000 F, que la majorité de la commission vous recommande d'entériner ce soir.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. En premier lieu, je tiens à remercier le rapporteur de majorité pour l'objectivité de son rapport, ce qui me permet de ne pas revenir sur les éléments factuels puisqu'ils sont relatés de manière extrêmement adéquate. Nous sommes donc d'accord sur les faits, et je pourrais même approuver les principes financiers qui règlent ce dossier. Cependant, à mon avis, cette affaire est politique, et c'est la raison pour laquelle mon groupe a décidé de rédiger ce rapport de minorité. Je tiens à préciser que je remplaçais Mme Véronique Pürro et que c'est à ce titre que je siégeais dans cette commission.
Comme l'a dit mon préopinant, on se retrouve avec 17 millions de perte dans cette affaire concernant les anciennes Halles de Carouge, que certains d'entre vous connaissent, et un petit immeuble adjacent que nous sommes allés visiter.
On peut bien sûr se poser la question de savoir à quoi on aurait pu affecter ces Halles situées au centre de Carouge, dans le Vieux-Carouge. Elles ne sont certes pas énormes, mais cet équipement aurait quand même pu servir à de nombreux usages: crèche, petits artisans, commerces, artistes, bref, il existe de multiples possibilités. Je suis donc extrêmement perplexe quand je vois l'attitude de la Ville de Genève - notamment à gauche, je dois le reconnaître, chers collègues - et de Carouge, qui était également à gauche à l'époque et qui, je l'admets, a pourtant l'habitude des grands discours sur les équipements publics, sur le fait qu'il faut investir... Car là, il y avait une affaire en or ! En effet, on apprend que cet objet fait perdre 800 000 F à la fondation et que le but de cette dernière était donc de s'en départir. Ainsi, si une collectivité publique - que ce soit la Ville de Genève ou de Carouge, à l'époque - l'avait accepté, la fondation aurait été prête à discuter et même à descendre en dessous des 1 600 000 F ! Je ne comprends donc toujours pas quelle est la raison intrinsèque qui a amené à l'époque la Ville de Carouge et maintenant la Ville de Genève à ne pas acquérir cet objet. Vraiment, je n'y comprends rien ! A moins que les voies de la Fondation de valorisation soient impénétrables pour nous, députés !
Il est possible que la fondation ait aussi fait son lobbying et que les élus en question aient laissé tomber cette affaire. Mais j'aurais aimé, par exemple, que la Ville de Genève se déplace - ou qu'elle envoie quelqu'un visiter et étudier cet objet, mais rien ! - d'autant plus que, derrière ces Halles de Carouge, il y a quand même un parc... Il y aurait pu y avoir une crèche, ç'aurait été sympathique !
Et je m'étonne de l'attitude de la Ville de Carouge, car ces halles sont situées dans le Vieux Carouge, au centre de cette ville qui est appelée à se développer toujours plus ! Les loyers pratiqués au centre de la Ville de Carouge ont grimpé et vont continuer à le faire, alors je trouve que ce serait politiquement extraordinaire qu'une collectivité publique détienne un tel bâtiment et puisse le mettre à disposition à des prix au mètre carré accessibles pour les petits commerçants - cela aurait permis à des petits commerçants de s'installer dans ces halles en payant des loyers qui ne sont pas de 52 000 F comme précédemment. D'ailleurs, ces halles sont tombées en faillite précisément parce qu'on demandait un loyer de 52 000 F à ceux qui s'y établissaient.
Mais on aurait très bien pu envisager, selon le prix auquel la commune aurait acquis ces halles, qu'elle procède à des aménagements très légers et qu'elle fixe donc des loyers tout à fait accessibles à ces petits commerçants. Ce qui aurait aussi permis de réactiver ce centre !
Eh bien, je suis très étonné de tout cela. Et je suis convaincu, Madame la présidente, que si les collectivités publiques et les politiques veillaient à l'intérêt du bien commun, on ferait en sorte que ces halles redeviennent un équipement public. C'est pour ces raisons que, dans mon rapport, je demande à surseoir à cette vente, afin qu'on établisse un acte de bien commun et qu'on demande à ces collectivités publiques de reconsidérer leur position et de ne pas voir cette situation par le trou de la lorgnette.
Par conséquent, Madame la présidente, comme vous l'avez vu dans mon rapport, je demande non pas de refuser l'opération mais d'y surseoir, afin qu'on ait une discussion plus sérieuse avec les collectivités publiques.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Si j'ai bien compris, vous demandez l'ajournement de ces deux projets de lois. C'est donc une proposition ferme, que je mettrai aux voix avant de faire voter le projet de loi.
Mme Michèle Künzler (Ve). Il s'agit donc de deux objets différents: une maison typiquement carougeoise et les anciennes Halles de Carouge, mais seulement la partie inférieure, le haut étant occupé par un appartement.
L'objet a été extrêmement bien discuté à la commission et nous sommes même allés exceptionnellement visiter ces halles, puisque, au début, nous nous étions dit qu'elles pouvaient être intéressantes pour la collectivité. Toutefois, une fois sur place, ces halles se sont révélées bien petites !
On a proposé à M. Pagani, de la Ville de Genève, d'aller les voir et éventuellement de les acheter pour reloger Artamis. Mais attendez ! Cette surface ne mesure même pas 500 mètres carrés ! On parle de construire des lofts, mais je vous le dis tout de suite: ce sera un seul loft ! De plus, la moitié de ce bâtiment est frappée d'une servitude de passage pour accéder au parc situé derrière.
Nous sommes donc allés sur place et avons vu l'immeuble, qui est certes joli et intéressant mais, même en fixant le mètre carré à 10 000 F, on n'arrive pas à trouver un prix supérieur à ce qui a été proposé par la Fondation de valorisation. Je crains même qu'on ait obtenu un très bon prix, parce que j'ai vu la semaine dernière une maison typiquement carougeoise de 500 mètres carrés à vendre à 2 millions de francs. Et là, on en tire 5 400 000 F ! De plus, l'intérieur de cet immeuble est malheureusement totalement abîmé. En réalité, il n'y a plus aucun charme dans les aménagements intérieurs, tout a été banalisé ou détruit. Donc, honnêtement, je pense qu'il faut vendre ! J'ai rédigé de nombreux rapports de minorité, et quand c'est nécessaire j'interviens pour sauver l'intérêt public. Mais là, franchement, on a fait le tour de la question: on s'est rendu sur place, on a analysé la situation, et je pense que la meilleure décision est de vendre ces halles, qui nous coûtent quand même, bon an mal an, 800 000 F en intérêts ! Par conséquent, le fait de surseoir à cette vente représente une dépense mensuelle de presque 100 000 F, et je pense que cela n'en vaut pas la peine.
M. Olivier Wasmer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, Mme Künzler vous a presque tout dit sur ces Halles de Carouge, qui n'en ont malheureusement que le nom, puisqu'il s'agit de locaux qui sont vides depuis près de dix ans. Ils ont été complètement dénaturés, n'ont plus de plafond et, surtout, sont malheureusement gênés par une servitude de passage, qui fait que les propriétaires du jardin situé derrière les halles ont le droit de les traverser. Cet objet est donc complètement dévalorisé.
La commune de Carouge, qui a longtemps été sollicitée pour acheter ces halles, car on pouvait imaginer créer un complexe commercial, a toujours décliné l'offre, même à un million, puisqu'il n'y a effectivement aucun intérêt commercial. Il faut savoir que les commerçants qui s'y trouvaient il y a une dizaine d'années ont tous fait faillite, de même que le propriétaire des halles. En effet, à l'époque, on louait à des petits commerçants des emplacements, tenez-vous bien, 54 000 F par an ! C'est dire que de garder ces halles en l'état n'était purement et simplement pas viable.
Comme l'a très bien relevé M. Amsler dans son rapport de majorité - confirmé en cela par Mme Künzler - pour valoriser le petit hôtel particulier contigu aux Halles de Carouge, il faudrait la superficie de celles-ci pour créer un loft et aménager des jours. Après plusieurs interventions de certains commissaires pour retarder cette vente, la commission s'est donc rendue sur place, parce qu'il n'y avait qu'une visite des lieux qui permettait de se faire une idée. La commission a constaté que ces halles ne pouvaient plus être utilisées et qu'il valait effectivement mieux créer un loft - et non pas trois ou quatre - pour valoriser l'hôtel d'à côté. C'est dire que le prix de 5 400 000 F que la fondation a réussi à trouver par le biais d'un acquéreur... D'ailleurs, il faut savoir qu'il n'y en a pas eu dix, ni trois, ni deux; la fondation est intervenue à plusieurs reprises et n'a malheureusement trouvé personne, malgré toutes ses démarches. Les halles ont été reproposées à la Ville de Carouge, qui les a refusées, et donc aujourd'hui, 5 400 000 F, comme l'a dit Mme Künzler, confirmant les propos de M. Amsler, est un excellent prix ! En outre, cet objet nous coûte 800 000 F par année: plus le temps passera, plus il nous reviendra cher. Alors, comme l'a dit très justement Mme Künzler, il s'agit aujourd'hui de sauvegarder l'intérêt public, puisqu'à l'évidence aucun autre acquéreur potentiel ne s'est présenté à ce jour, bien qu'un député nous ait promis qu'il avait trouvé quelqu'un pour plus d'un million.
Pour ces diverses raisons, l'UDC s'opposera à tout ajournement de cette vente et vous recommande d'adopter ces projets de lois.
M. Roger Deneys (S). Je dois dire que je ne suis pas très optimiste quant aux chances de succès d'un éventuel autre usage que celui qui est envisagé aujourd'hui en réalisant des lofts. Cependant, en entendant M. Wasmer, je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a un petit côté «souk» dans ce Grand Conseil. On a l'impression que c'est: «Yes, buy one, take two, it's a good price, my friend ! It's a good idea, you buy ! Very very quick ! Good price !» Mais ce n'est pas sérieux ! En réalité, l'argument de Mme Künzler, selon lequel ce dossier nous coûte cher en intérêts - 100 000 F par mois... Et il a été ajouté que cela dure depuis dix ans. Eh ben alors ! De toute façon, vu la somme gaspillée dans ce dossier, on n'est plus vraiment à un mois près !
Je vous l'ai dit, je ne suis pas certain qu'on arrive à trouver une autre solution qu'un loft, mais il n'empêche que ce dossier mérite d'être étudié, et donc la proposition de M. Velasco est très raisonnable. J'aimerais quand même vous rappeler que l'utilité publique d'un loft est absolument nulle ! Et ici, on a affaire... Je pense qu'il ne faut pas non plus se faire d'illusions au niveau économique: on ne peut pas simplement placer des petits commerçants en leur fixant des loyers qui sont le quart du prix de ce qui se trouve dans le secteur, parce que ce serait tuer ceux qui sont déjà en place ! Il s'agit donc d'envisager une autre solution, pour des activités différentes et, à mon avis, cela mérite d'être encore étudié, parce qu'on sait très bien comment négocie la Fondation de valorisation. Si vous lisez mon rapport de minorité concernant le dossier Marziano, vous verrez comment la Fondation de valorisation propose les biens à l'Etat ou aux communes ! C'est: «Nous avons décidé de vendre le bien à tel prix. Etes-vous intéressés, oui ou non ?» Je suis désolé, mais ce n'est pas une négociation sérieuse entre deux entités publiques. Il s'agit quand même d'une Fondation de valorisation financée par les contribuables ! Et de collectivités publiques pour lesquelles on paie tous des impôts ! Ce n'est pas sérieux comme négociation !
Alors pour «gagner» un ou deux millions, c'est-à-dire en réalité ne pas les perdre, on voudrait simplement vendre le plus vite possible ?! Je suis désolé, ce dossier mériterait qu'on prenne encore un peu de temps pour étudier d'autres possibilités. Je vous l'ai dit, je ne suis pas certain qu'on y arrive, mais il me semble quand même très précipité, parce qu'une offre se présente tout à coup, de la concrétiser tout de suite. Je trouve cela vraiment dommage !
M. Thierry Cerutti (MCG). Le MCG trouve scandaleux que la Fondation de valorisation ait fait le jeu des promoteurs immobiliers, en autorisant des lofts luxueux aux Halles de Carouge: cela nuit aux petits commerçants - lesquels amènent un point positif et un commerce de proximité à Carouge - et nous le déplorons donc profondément.
De plus, la fondation a mandaté une société pour effectuer de prétendus sondages dans les Halles de Carouge. En réalité, la situation était totalement différente, puisque cette société a commis des déprédations, de façon que les halles ne trouvent plus preneur.
Pour ces raisons, le MCG ne soutiendra pas la vente de cet objet.
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais juste préciser qu'un ajournement ne résoudrait rien dans le sens où, si l'on veut réfléchir à une autre solution, il faut refuser la vente. En effet, ce n'est qu'un tel refus qui permettrait de trouver un autre acquéreur.
Je rappelle que, lorsqu'on est ici en procédure de vote, c'est que l'acte est signé et en attente de réalisation. On donne l'accord sur une signature.
Personnellement, je refuserai cet ajournement et la vente, et je répète qu'ajourner ce projet ne résoudrait rien.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. J'aimerais dire que, dans cette histoire, l'Etat aura perdu 17 160 000 F, auxquels s'ajoutent les 800 000 F annuels dépensés pendant dix ans - ce qui fait 8 000 000 - le total s'élève donc à 25 160 000 F: 25 millions ! Et l'on vient nous dire qu'un acquéreur serait prêt à payer 4 millions, mais que si l'on accepte ce prix, cela ferait un million de moins. Or mon collègue Deneys a tout à fait raison: on n'est pas à un million près ! Ni à 4 millions près ! On est à 25 millions près dans cette histoire ! Et que nous dit-on ?! Qu'on va liquider cela ?!
Ce que gagne la collectivité publique, ce sont des lofts au centre de Carouge... Des lofts ! On réanime le centre de Carouge en créant des lofts ! On parle de logements sociaux, d'amener la population au centre-ville, et on va construire des lofts ! Trois lofts au centre de Carouge ! Voilà à quoi servent les acquis de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève: 25 millions dépensés pour qu'un entrepreneur aménage des lofts au centre de Carouge !
Concernant le petit hôtel situé à côté des halles, j'ai vu des projets, par exemple à Saint-Jean, où de petits immeubles de ce genre ont servi à construire des crèches d'enfants. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, la Ville de Genève l'a fait !
Par ailleurs, je suis allé visiter les Halles de Carouge et, bien que je ne sois pas architecte mais ingénieur, je peux vous garantir que, à l'utilisation, ces halles sont en très bon état et on aurait pu, moyennant peu de travaux, installer soit des artistes, soit des petits commerçants ou artisans. Et à ce sujet, M. Pagani a tort: personne n'a prétendu loger dans ces halles tout Artamis ! Personne ne l'a prétendu ! Et il faut savoir que le conseiller administratif de la Ville de Genève a soutenu qu'il était arrivé trop tard dans ce dossier, parce que l'objet avait déjà été vendu. Mais ce n'est pas vrai ! On n'avait encore rien décidé ici ! Cela signifie donc que la Ville n'avait pas le dossier en main ! En effet, elle aurait pu, comme collectivité publique, s'adresser à l'Etat ou à la fondation pour dire qu'elle était intéressée et qu'elle voulait voir la totalité du dossier; elle aurait pu se rendre sur place pour étudier l'objet, etc., mais rien n'a été fait !
Ce que je constate dans cette affaire, c'est qu'il y a de la part des pouvoirs publics une sorte d'abandon d'une vision du futur et de l'opportunité de munir ces halles, situées au centre, d'équipements publics qui satisfassent au bien commun.
D'autre part, Mme Künzler a indiqué qu'il y avait une servitude de passage dans ces halles mais, d'après ce que j'ai compris - peut-être me suis-je mépris, car je suis arrivé tard dans la commission - l'acquéreur de ces lieux bénéficiera de la possibilité de lever cette servitude. Alors si lui peut le faire, je ne vois pas pourquoi d'autres ne le pourraient pas, par exemple une collectivité publique !
Je suis extrêmement étonné que nous, citoyens et citoyennes de cette république, ayons mis 25 millions sur la table avec cet objet - car c'est nous qui payons ! C'est la République qui paie ces 25 millions ! - et que ce Grand Conseil soit incapable de dire qu'il ne veut pas de ces lofts dans ce lieu mais des équipements publics, alors qu'il met 25 millions. Je m'étonne qu'on ait une approche aussi financière de cette histoire et non d'utilité publique. J'en suis surpris et je m'interroge. Lorsqu'on a perdu 2,3 milliards, on ne se pose pas la question de savoir si on va perdre 1 ou 2 millions ! On se demande si ces équipements vont servir aux futurs citoyens et citoyennes, ou aux petits commerçants, artistes ou jeunes, bon dieu ! C'est cela qu'il faut savoir ! Donc je m'étonne et je m'énerve !
Madame la présidente, peut-être que le fait de demander l'ajournement ne constitue pas la solution. Mme Künzler a sans doute raison ! Je ne connais pas toutes les arguties de la loi et des corpus de lois, mais mon attitude est très claire, et ce qui compte c'est l'attitude politique que je veux montrer dans cette affaire.
S'agissant des 25 millions que l'on utilise aujourd'hui, j'aimerais qu'on attende le bon moment pour être bien sûr qu'il n'y a pas d'autre possibilité de rentabiliser cette vente pour l'Etat et les citoyens et citoyennes. C'est cela que je souhaite ! Alors s'il faut attendre, attendons. Et si la solution, Madame Künzler, est de refuser cette vente, eh bien nous la refuserons ! Mais je ne voulais pas avoir une attitude totalement négative, parce que si dans un ou deux mois l'impéritie de nos autorités, de notre Grand Conseil et des collectivités publiques est telle qu'il faut se résoudre à vendre, on le fera ! Mais, au moins, donnez-nous les moyens de dire à ces gens qu'on a déjà dépensé 25 millions !
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Si j'ai bien compris, vous renoncez à votre demande d'ajournement. (Commentaires.) Non ? Vous maintenez votre proposition. Dans ce cas, excusez-moi, je vous ai mal compris !
M. David Amsler (L), rapporteur de majorité. J'ai failli ne pas réintervenir, mais je vais quand même le faire. Malheureusement, M. Velasco ne peut pas se substituer aux décisions des conseillers administratifs, ni de la Ville de Carouge ni de la Ville de Genève, malheureusement pour lui !
J'aimerais vous donner un petit élément de réflexion, que vous pouvez lire dans les deux rapports, et vous verrez très bien que ces Halles de Carouge ne sont pas vendables toutes seules. J'en veux pour preuve que le prix de repli fixé par la commission n'a même pas pu être financé par l'acquéreur de ces halles. Donc, je crois qu'il faut vraiment suivre cette proposition de vente. Mme Künzler l'a encore dit, ces halles ne sont pas vendables toutes seules; ce n'est que le fait de les lier avec cet immeuble situé à côté, qui lui a pu être financé de manière un peu plus importante que le prix de repli, qui nous fait nous approcher de l'addition de ces deux prix de repli.
Je n'en dirai pas plus et vous recommande simplement d'accepter ces projets de lois et de vendre ces deux objets ensemble sans tarder.
M. Roger Deneys (S). Je voulais insister sur la transformation des Halles de Carouge, prévues actuellement pour des activités artisanales - même si elles sont vides depuis de nombreuses années - en loft. En effet, c'est un signal extrêmement négatif que nous donnons à toutes les petites entreprises genevoises et à tous les artisans et indépendants, qui font de nombreux efforts pour rester en place dans le centre-ville. Je parle d'ailleurs en connaissance de cause, puisqu'à l'autre bout de la ville, à la Jonction, je subis le même sort avec une partie de mes locaux. Je suis du reste très content, j'ai des petits jeunes de la «Boîte à boulots» qui m'aident, David et Eddy, et ils sont très efficaces. Mais cela ne résout pas nos problèmes, parce que je n'ai pas envie d'aller m'installer je ne sais où en rase campagne. Je tiens à rester dans le tissu urbain, car je fais partie de l'économie de proximité.
Je trouve donc qu'il est extrêmement regrettable, pour ne pas dire scandaleux, que nous renoncions à des locaux utilisables pour des activités commerciales afin d'en faire un loft. C'est totalement scandaleux ! D'autant plus que nous manquons de surfaces à des prix raisonnables. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il est de notre devoir de faire passer ce message: nous ne sommes pas d'accord avec ces transformations !
Une voix. Bravo !
M. Thierry Cerutti (MCG). J'aimerais ajouter que la fondation est allée jusqu'à prétendre que les Halles de Carouge étaient maudites, en prétextant que jamais les commerces n'ont fonctionné, et pour cause ! Le Mouvement Citoyens Genevois a bien sûr investigué et a découvert que, à l'époque, le crédit octroyé par la BCG était proche de 20 millions de francs. Si bien que, pour payer le montant astronomique des intérêts, l'ancien propriétaire louait 16 mètres carrés pour un montant annuel de 54 000 F, ce qui est énorme ! Comment voulez-vous qu'un petit artisan puisse assumer un tel loyer ? C'est tout simplement impossible ! Il est donc de notre responsabilité de réhabiliter les Halles de Carouge pour les artisans et les petits commerçants qui sont, je vous le rappelle, les premiers générateurs d'emplois dans notre canton.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. J'aimerais juste dire que je demande l'appel nominal !
J'ai également oublié de vous signaler que j'ai été contacté il y a trois ou quatre jours par une organisation, l'association Oseo, qui cherchait justement des petits ateliers. Je l'ai donc renvoyée à la Fondation de valorisation. Vous voyez que, si on fait correctement de la publicité, il y a des gens qui s'intéressent à ces objets !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Etes-vous soutenu pour l'appel nominal ? Vous l'êtes !
Mis aux voix à l'appel nominal, l'ajournement sine die du rapport sur les projets de lois 9513 et 9966 est rejeté par 57 non contre 20 oui.
Mis aux voix, le projet de loi 9513 est adopté en premier débat par 52 oui contre 21 non et 2 abstentions.
La loi 9513 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9513 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 21 non et 1 abstention.
Mis aux voix, le projet de loi 9966 est adopté en premier débat par 54 oui contre 21 non et 1 abstention.
La loi 9966 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9966 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 21 non et 3 abstentions.
Premier débat
Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de majorité. Situé à la rue de Berne, cet immeuble est composé en grande partie de studios dans un état un peu vétustes. D'ailleurs, cet édifice nécessiterait divers travaux.
Actuellement, ces studios sont utilisés par Carrefour-Rue, suite à un arrangement que la Fondation de valorisation a établi avec cette association, qui occupe cet immeuble afin qu'il ne soit pas squatté. Ces deux entités ont également passé un accord selon lequel, lorsque l'acte de vente sera signé, les habitants vivant dans l'immeuble sis rue de Berne 34 quitteront les studios. Bien que ce fait ne soit pas précisé dans le rapport, il nous a été confirmé à plusieurs reprises par la Fondation de valorisation lorsque nous avons étudié le dossier en commission. C'est d'ailleurs un souci qu'on peut lire dans le rapport de minorité de M. Velasco.
Il est utile de noter que l'immeuble est dans un état de vétusté avancé, puisque les 35% environ du bâtiment seraient à retaper, ce qui augmenterait nettement son coût. Il faut également souligner que le prix de vente de 3 340 000 F est bon, puisque supérieur à celui que la commission de contrôle de la Fondation de valorisation avait établi.
Concernant la perte, on peut l'estimer à 44%, mais je rappelle que la Fondation de valorisation avait évalué les pertes à 53% lorsqu'on l'avait instituée. Or il s'avère que les pertes générales sur les huit ans avoisinent maintenant 40%, ce qui signifie que cette fondation a fait un très bon travail ! Et cette perte de 44% sur l'objet qui nous occupe se situe donc dans une bonne moyenne. Elle est même relativement basse par rapport à ce qu'on a pu voir avec d'autres immeubles.
Pour toutes ces raisons, je vous recommande d'accepter la vente de cet objet, soit de suivre la majorité de la commission, qui a voté ainsi.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Nous sommes dans le même cas de figure que précédemment. Je crois qu'il existe deux notions de ce qu'est une valeur: il y a ce qu'on appelle une valeur économique - et là-dessus je ne peux qu'être d'accord avec la fondation, elle a bien travaillé - et ensuite, pour les politiques, il y a ce qu'on nomme la valeur d'usage d'un objet. Et celle-ci peut être bien au-delà de sa valeur économique, à tel point que... Pourquoi souriez-vous ? Moi je ne souris pas !
Mme Fabienne Gauthier. Je peux sourire !
M. Alberto Velasco. Oui, mais pour moi l'affaire est très sérieuse ! On peut donc estimer que la valeur d'usage est telle qu'elle n'a pas de valeur, tout simplement. C'est ainsi, et beaucoup d'éléments du domaine social, l'eau par exemple, ont une valeur d'usage énorme ! C'est du reste pour cela que c'est parfois l'Etat qui prend en charge ces éléments-là, en créant un monopole !
Nous traitons ce soir un objet situé aux Pâquis, quartier populaire du centre-ville. Cet immeuble accueille actuellement l'association Carrefour-Rue qui effectue un travail social extrêmement important pour la collectivité et qui devra pourtant quitter ces lieux. On voit là que notre Etat est très social puisque, alors qu'il a déjà perdu 2 600 000 F dans cette affaire, il demande à une association dont le travail est de qualité de «se tirer de là», afin de récupérer environ 3 millions de francs sur les pertes assez énormes qu'il a déjà subies, même si cela suppose que l'association quitte les lieux.
De plus, cet objet aurait aussi pu être transformé, par exemple, en logements d'étudiants, car on sait très bien que notre ville connaît un déficit terrible dans ce domaine. Tout le monde a conscience de la situation actuelle du logement à Genève: elle est catastrophique ! Et l'on connaît aussi la paix du logement et l'accord qui a été conclu entre les milieux du logement et l'Etat, qui s'est engagé à avoir des LUP - logements d'utilité publique ! Or on sait bien quelle est aujourd'hui la situation de ces derniers. Je suis donc étonné de voir qu'un immeuble comme celui-ci ne soit pas destiné à faire partie des logements d'utilité publique, alors que cela aurait pu être possible.
Concernant l'objet précédent, les collectivités publiques de la Ville de Genève et de Carouge se sont défilées de manière incroyable, et je suis du reste étonné qu'une ville de gauche agisse ainsi, mais enfin, c'est comme ça... Or là, c'est l'Etat ! Il doit donc refuser et faire en sorte que cet objet devienne un LUP. Et je suis étonné que, la perte étant déjà de 44%, l'Etat se dessaisisse de cet objet...
D'autre part, Madame, vous dites que cet objet doit être rénové. Oui, mais beaucoup d'immeubles le sont, et d'ailleurs le mien devra l'être un jour ! C'est sûr ! Et pourquoi pas ? Les fondations de l'Etat de Genève rénovent nos immeubles et reçoivent des subventions de ce dernier. Il y a d'ailleurs un projet de loi Vert, dont j'ai fait le rapport de minorité, qui mettait 30 millions à disposition pour l'acquisition de ce type de logements et leur rénovation. Ces 30 millions pourraient couvrir le «gap», soit le différentiel entre la valeur de fondation et celle de la fondation publique, afin d'assurer un état locatif abordable pour les faibles revenus. Malheureusement, ce projet de loi stagne, mais il suffit de le mettre en place et c'est bon ! Par conséquent, les moyens existent.
Ce que je constate ici, c'est un manque de volonté politique d'aller au-devant de la problématique du logement et de donner un signe très fort, qui aurait pour but que, dès qu'un objet peut intéresser la population parce qu'il est social et peut loger une partie de la population affaiblie socialement, on l'acquière. Des studios à 600 F sont très accessibles et peuvent être mis à disposition de nombreuses personnes en manque de logement. Du reste, l'Hospice doit aujourd'hui placer des gens dans des hôtels ! Lesquels nous coûtent beaucoup plus que 600 F par mois, je peux vous le garantir ! Et j'en connais, des gens qui sont installés par l'Hospice dans des hôtels.
Et pourtant, on liquide un objet dans lequel on pourrait loger un certain nombre de personnes. Alors, franchement, je ne comprends plus rien à la politique sociale de notre Etat !
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Je salue à la tribune notre ancien collègue Pierre Marti. (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Une fois n'est pas coutume, j'ai été extrêmement partagée sur cet objet. En effet, d'une part - comme l'a dit Mme Gautier - la fondation a obtenu un excellent prix de vente pour cet immeuble, dont on aimerait du reste bien se débarrasser, car il est assez vétuste. Mais, d'autre part, il remplit une fonction essentielle - M. Velasco vient de le souligner - et serait extrêmement utile pour une réhabilitation sociale. D'ailleurs, c'est exactement l'usage qui en est fait actuellement: certaines personnes y sont relogées dans des studios par La Coulou, après avoir été placées dans des abris collectifs.
Selon moi, il devrait y avoir à Genève des sortes de logements D2 sociaux, et je pense que nous, les Verts, allons déposer un projet de loi visant à la création de ce type de logements sociaux accompagnés. En effet, comme l'a relevé M. Velasco, certaines personnes sont logées à l'hôtel, ce qui coûte beaucoup plus cher, et n'ont pas d'accompagnement social; alors que là, comme pour les personnes âgées, il y aurait un accompagnement social léger, avec un assistant social qui passe de temps en temps pour vérifier que tout se déroule bien. Et, par la suite, ces personnes pourraient rejoindre des appartements normaux.
Finalement, après calcul, même avec la rénovation, on peut arriver à 5 millions, et les loyers des studios s'élèveraient à 800 F. C'est cher, mais pas tant que cela ! Par conséquent, après discussion avec notre groupe, nous allons suivre l'avis de M. Velasco et refuserons cette vente. Parce qu'il faut vraiment réfléchir à un nouveau genre de logements sociaux ! Il ne s'agit pas de logements d'utilité publique ordinaires mais de logements sociaux accompagnés - de petites structures - qu'on devrait aménager dans différents quartiers, que ce soit la Jonction ou les Pâquis, donc plutôt des quartiers urbains. Dans notre cas, il s'agit de 24 studios: c'est le maximum pour loger ensemble des personnes de ce type, et je pense que l'on pourrait créer une oeuvre utile dans chaque quartier en resocialisant des gens à la dérive. C'est la deuxième étape après le passage à La Coulou. Du reste, je connais des gens qui ont passé parfois dix ans à La Coulou et qui s'en sortent. Il ne faut pas perdre espoir !
L'immeuble dont il est question ce soir pourrait ainsi servir à cela et je vous invite à refuser la vente et à aller de l'avant vers un D2 social.
M. Olivier Wasmer (UDC). Cet immeuble devait être proposé à l'Etat dans le cadre du stock de LUP, mais malheureusement ce dernier n'en a pas voulu. Et pour cause ! L'Etat nous a fait un inventaire d'immeubles intéressants, et il en existe des centaines ! Si l'Etat n'a pas voulu de celui-ci, c'est simplement parce qu'il a été vendu pour une valeur à peine plus élevée que la valeur vénale. En effet, c'est un immeuble qui ne vaut malheureusement rien, sa valeur vénale est d'environ 2 900 000 F, et il a été vendu à 3 300 000 F, comme vous avez pu le lire dans le rapport. En outre, il a un taux de vétusté de plus de 35% et on voit donc mal l'Etat... C'est du reste un problème qui s'est souvent posé en commission, parce que certains de nos collègues députés voulaient absolument fourguer à l'Etat des immeubles pourris. Mais ce n'est pas le but de l'Etat, Mesdames et Messieurs les députés ! Ce dernier a assez perdu dans l'affaire de la Banque cantonale de Genève sans devoir encore acquérir des immeubles dont les travaux seront d'importance !
C'est pour cette raison que la majorité de la commission a décidé que cet immeuble ne serait pas affecté aux LUP, parce que l'Etat n'en veut pas, et surtout qu'il devait être vendu au meilleur prix.
Je m'étonne donc que certains députés persistent à penser que ce genre d'immeuble pourrait être utile, alors qu'il nécessite de très importants travaux et que l'Etat a déjà perdu beaucoup d'argent dans le cadre du stock des immeubles de la fondation. Pour toutes ces raisons, l'UDC soutiendra ce projet de loi et vous demande d'en faire autant.
M. Eric Stauffer (MCG). Comme vous l'avez vu dans le rapport, nous soutenons le rapporteur de minorité sur ce dossier. On peut certes se poser la question de savoir s'il faut aménager des studios pour les étudiants, car de tels logements sont nécessaires à Genève. En effet, il existe aujourd'hui de nombreuses personnes sans diplôme ayant passé l'adolescence - elles ont donc 18 ou 20 ans - qui commencent un apprentissage et sont contraintes de l'interrompre parce que, avec les salaires d'apprentis, ils ne peuvent même pas se payer un studio ou une chambre.
Il est donc vrai que l'Etat a un devoir absolument patent d'aider ces jeunes, notamment en leur offrant un logement - studio, chambre - à des prix abordables. Du reste, la société s'y retrouvera, parce que les jeunes qui ont décidé à 20 ans, suite à un déclic salutaire, de faire un apprentissage auront un CFC ou un diplôme et ne seront donc pas dépendants de l'assistance sociale à l'avenir. Donc, à terme, la société s'y retrouvera.
D'autre part, vous avez beau jeu, certains députés de droite, de dire que l'Etat a trop de tâches à assumer pour acheter des immeubles pourris ! Oui, c'est sûr qu'avec la Banque cantonale de Genève, qui a octroyé des crédits à coups de centaines de millions de francs, provoquant la flambée de l'immobilier et fixant des loyers que les Genevois ne peuvent plus se payer, si ce n'est les multinationales qui s'installent et qui, elles, vont payer 6000 ou 7000 F pour des cinq pièces...
C'est la raison pour laquelle il nous paraît important de soutenir la gauche dans ce cas-là. Oui, cela nous arrive car, comme je l'ai dit, nous sommes, nous, suffisamment évolués pour être hors des clivages politiques et ne pas nous enfermer dans des dogmes complètement stériles, qui ne font pas avancer les affaires de la République. Alors oui, nous refuserons la vente de cet immeuble ! Et oui, nous espérons que l'Etat en fera l'acquisition ! Afin d'y aménager des studios à bon marché que nous pourrons proposer à nos étudiants ou à ceux qui n'ont pas des revenus annuels de l'ordre de 100 000 ou 150 000 F.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je précise juste que les studios qui pourraient être aménagés dans cet immeuble seraient loués 800 F après rénovation. Je ne trouve pas que ce soit excessif, surtout au vu de ce que paie l'Hospice général pour loger des gens dans des hôtels, où les prix s'élèvent autour de 1500 F quand tout se passe bien.
Je pense qu'il y a en tout cas une vingtaine de personnes à la recherche de logement à Genève, qui sont hébergées dans des hôtels. Ces gens ne sont pas forcément de bons voisins: certains gardent toutes leurs ordures chez eux, d'autres font des bruits bizarres la nuit, etc. ! Mais, pour toutes ces personnes, on doit trouver une solution. Pour l'instant, dès qu'on les place dans des immeubles ordinaires, le processus d'exclusion se remet en marche. Il faut donc trouver un logement intermédiaire entre la rue, La Coulou et l'habitation ordinaire, et l'immeuble dont il est question ce soir pourrait être utilisé ainsi. Je vous invite donc à refuser cette vente.
Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de majorité. Je comprends tout à fait la position du rapporteur de minorité et des groupes qui le suivent parce qu'effectivement nous manquons de logements de ce type-là à Genève. Mais je vous rappelle que l'Etat a constitué, pour son socle de logements sociaux, un fonds d'immeubles qu'il pense acquérir à la Fondation de valorisation. Ces objets ont été listés, et je pense que l'immeuble de la rue de Berne dont il est question ce soir a été vu par l'Etat. Par conséquent, il faut faire confiance aux personnes qui ont étudié ce dernier et qui ont estimé s'il valait la peine de l'acquérir ou pas.
Je pense que le prix auquel cet objet est vendu, avec les travaux à entreprendre à l'intérieur pour qu'il soit habitable... En effet, il faut reconnaître qu'il comporte actuellement des risques; des échafaudages ont été installés et la Fondation de valorisation a pris quelques précautions en engageant déjà des travaux d'extrême nécessité, mais cet immeuble est vétuste et il y a d'énormes investissements à faire pour le rendre viable sur le long terme, car on cible quand même sur la pérennité et non sur la courte durée.
L'Etat a fait des calculs et, par rapport au prix de vente obtenu par la Fondation de valorisation auquel s'ajoutent les coûts des travaux à entreprendre dans cet immeuble, je pense que cet objet ne sera pas rentable. En outre, l'Etat a d'autres solutions à proposer pour le logement social. Preuve en est la liste de plus de 40 immeubles, sauf erreur, qu'il pense acquérir à la Fondation de valorisation, par le pacte du logement social, et la somme de 300 millions que nous avons votée l'année dernière pour qu'il acquière ces logements, sur dix ans je le rappelle.
Pour toutes les raisons que j'ai évoquées, je soutiendrai la vente de cet immeuble et vous encourage à faire de même, parce que je pense que l'Etat est bon juge pour savoir ce qu'il veut acquérir ou pas.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Je doute, Madame la rapporteure de majorité, que, avec les immeubles que l'Etat s'est engagé à acheter, on atteigne les fameux 15% de logements d'utilité publique. Cela va augmenter ce pourcentage, mais il y a encore de la marge pour y arriver, et cet immeuble pourrait y contribuer. Je crois que les arguments de ma collègue Mme Künzler sont extrêmement pertinents. En effet, j'ai vécu la même chose, j'ai vu comme elle des personnes logées à l'hôtel par l'Hospice, qui paie très cher, c'est absolument fou !
Monsieur Wasmer, vous dites que cet objet n'a pas de valeur, mais comment pouvez-vous affirmer une chose pareille ? Aujourd'hui, à Genève, il existe des fondations de droit public qui ne construisent pas parce qu'elles n'ont pas de terrains, Monsieur ! Imaginez-vous à quel point le terrain est important dans notre république ! Or l'immeuble dont il est question ce soir est situé au centre-ville, aux Pâquis ! L'important, ici, Monsieur Wasmer, c'est qu'il s'agit d'un logement situé au centre-ville - comme l'a dit Mme Künzler, c'est un endroit très social - et Carrefour-Rue fait un travail intelligent dans un lieu extrêmement délicat socialement... (Remarques.) Cet objet-là remplit actuellement une mission. Et ça, ça a aussi une valeur ! Ça se calcule !
Et je commence à m'interroger, quand Mme Gautier dit que les fonctionnaires ont bien fait leur travail. Vous le savez, j'ai toujours défendu la fonction publique, mais là, en l'occurrence, j'ai des doutes concernant cet immeuble. En effet, j'ai entendu l'autre jour à la commission du logement des fonctionnaires nous dire qu'ils ne pouvaient pas acquérir tel ou tel immeuble, parce que cela ne rentrait pas encore dans l'état locatif.
Je commence à m'énerver, parce que, je le répète, il y a un projet de loi des Verts relatif à 30 millions de francs, en attente, destinés à combler financièrement le différentiel entre la valeur de vente de la fondation de valorisation et l'achat par la fondation immobilière de droit public. Ces fonctionnaires ne se rendent-ils pas compte qu'ils doivent prendre en considération cette subvention qui pourra être mise à disposition ? Et quand ils calculent la valeur locative d'un immeuble, il faut qu'ils tiennent compte du fait que nous, politiques, avons une action dans ce Grand Conseil, qui est de leur accorder une subvention pour remplir leur mission. Mais ils doivent en tenir compte parce que, actuellement, un certain nombre de logements sont bloqués à cause de cela. Et, voyez-vous, lorsque ces personnes doivent décider si cet immeuble doit être acheté ou pas, elles prennent leur plume, font un calcul de rentabilité, arrivent à un chiffre négatif et disent non ! Elles ne verront pas qu'il y a Carrefour-Rue, que c'est aux Pâquis, que les députés du Grand Conseil ont cette volonté. Cela, les fonctionnaires ne le voient pas ! Alors moi je dis qu'il est temps qu'ils en tiennent compte.
On a la chance d'avoir ici certains conseillers d'Etat, comme MM. Hiler et Unger, et j'espère qu'ils vont relayer notre souci, parce qu'ils peuvent agir aujourd'hui... M. Cramer a déjà eu beaucoup à faire hier avec le CEVA et je ne pense pas qu'il soit responsable de ce dossier. Monsieur Cramer, vous savez très bien que je vous respecte, ce n'est pas de manière irrespectueuse que je n'ai pas tenu compte de votre présence ! Ce que je voulais simplement dire, c'est que le Conseil d'Etat a une responsabilité dans cette histoire.
D'autre part, Genève se targue d'être une ville universitaire. Et lorsque le recteur, accompagné de ses collaborateurs, vient à la commission des finances, il parle de Genève, ville universitaire par excellence, avec ses facultés... Et que je te rajoute des couches ! Mais lorsqu'on se targue d'être une ville universitaire - et notre député Gautier voulait l'autre jour alimenter encore l'IUED - on veille à ce que les étudiants puissent trouver un logement ! Car cela ne sert à rien d'avoir des facultés fantastiques, des laboratoires merveilleux, si les étudiants qui veulent venir étudier chez nous ne trouvent pas où se loger ! Qu'on me dise qu'on ne veut pas trop favoriser le social, soit ! Mais alors, soutenons notre ville universitaire ! Affectons ces logements aux étudiants et laissons tomber ces pauvres de Carrefour-Rue !
Et puis, si je prends cette option d'investir pour l'université, achetons cet immeuble et aménageons-y des logements pour étudiants, qu'on mettra à disposition du rectorat de l'université. Voilà l'autre option, Mesdames et Messieurs les députés ! Je crois qu'il y a suffisamment de possibilités pour qu'on arrête cette vente et que l'Etat acquière ce bâtiment.
Enfin, je finirai en disant que la Ville de Genève avait à Saint-Gervais des immeubles en très mauvais état. Mais elle ne les a pas vendus ! Elle les a rénovés ! Aujourd'hui, tous ces immeubles sont habités et je vous garantis que tout le monde veut aller à Saint-Gervais ! De nombreuses personnes seraient toutes heureuses d'habiter Coutance, et il y a une foule de gens disposés à vivre là-bas !
Quoi qu'il en soit, l'argument qui nous a été donné pour la vente est totalement ridicule. Par conséquent, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, Messieurs les conseillers d'Etat, j'aimerais vraiment qu'on arrête cette vente et qu'on affecte cet immeuble à des LUP.
Mis aux voix, le projet de loi 9883 est adopté en premier débat par 39 oui contre 29 non.
La loi 9883 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9883 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 41 oui contre 28 non.
Premier débat
La présidente. Je passe le micro au rapporteur de majorité. (Quelques instants s'écoulent.) Monsieur Stauffer, vous avez la parole !
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de majorité. Ah ! Excusez-moi, Madame la présidente ! (Rires.)
Tout à l'heure, nous nous sommes battus pour que l'immeuble dont il était question soit affecté à des logements pour les étudiants. Celui dont nous parlons maintenant est un bâtiment de l'Etat, qui abritait la caisse de chômage. Il s'agit donc plutôt d'un immeuble commercial et sa conversion à une autre affectation serait préjudiciable à notre économie. Nous savons que c'est une grande banque qui en a fait l'acquisition pour son développement. Comme les banques sont, selon moi, des acteurs économiques importants pour notre canton, nous ne suivrons pas la gauche pour cette fois, parce que nous pensons qu'il est plus opportun et intelligent que cette zone reste une surface commerciale plutôt que de la changer d'affectation.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Je crois que, parmi les dossiers de la Fondation de valorisation, cette affaire dépasse toutes les bornes de l'invraisemblable. Nous avons ici un immeuble situé dans le secteur la Praille-Acacias-Vernets, c'est-à-dire en plein dans le périmètre du masterplan prévoyant la réalisation d'un nouveau quartier dans cette zone, avec des enjeux de spéculation immobilière déjà importants aujourd'hui. On a ici des parcelles et des immeubles qui sont aux mains de la Fondation de valorisation, et que se passe-t-il ? Au lieu de garder la maîtrise publique de ces parcelles pour pouvoir les utiliser dans le cadre du développement de ce plan, la Fondation de valorisation les vend à un acteur privé ! D'ailleurs, je remercie M. Stauffer de l'avoir précisé, ces parcelles ont été cédées à une banque privée, comme si ce type d'établissement n'avait pas les moyens de construire d'autres locaux ! La banque est pourtant un des rares secteurs économiques qui a les moyens de le faire ! C'est donc totalement scandaleux. Et c'est encore plus scandaleux que, dans ce dossier, nous allons perdre 11 millions de francs, alors même que l'Etat loue actuellement des locaux dans cet immeuble, sis rue Alexandre-Gavard 28, où se trouve l'office cantonal de l'emploi. Cela représente un loyer annuel de 400 000 F, que l'Etat de Genève paie depuis des années ! Si l'on compte les travaux effectués par l'office cantonal de l'emploi, cela représente même un montant de 550 000 F par année payés par l'Etat pour louer des locaux qui appartiennent aujourd'hui à la Fondation de valorisation. Et pourtant, quand la fondation décide de mettre ce bien en vente, l'Etat ne veut même pas l'acheter... C'est tout simplement incroyable !
Aujourd'hui, cet immeuble accueille des activités mixtes, du tertiaire, à des loyers s'élevant aux alentours de 200 F annuels le mètre carré. Ce sont donc des locaux tout à fait abordables pour de nombreuses petites entreprises - c'est, par exemple, le cas de la mienne - ces loyers conviennent très bien aux petites boîtes, et pourtant on va y mettre une banque privée ! Alors qu'on sait qu'un établissement de ce type qui aménage des locaux paie des loyers au-delà de 400 F le mètre carré par an ! Cela revient donc à accorder un cadeau à des banquiers privés qui sont déjà pleins aux as.
En même temps - et c'est là que c'est franchement insupportable - l'Etat loue des locaux commerciaux à 400 F le mètre carré. J'ai retrouvé un exemple, qu'on peut voir dans le Mémorial du Grand Conseil: il s'agit du PL 9335, qui date de janvier 2005 - cela fait donc un certain temps déjà - concernant des locaux loués pour le CTI, c'est-à-dire l'informatique, à la rue du Grand-Pré. Que s'était-il passé à l'époque ? Le Conseil d'Etat avait signé un bail de vingt ans avec une entreprise privée pour des locaux à 420 F le mètre carré, c'est-à-dire un loyer annuel de - écoutez-bien ! - 3 500 000 F, pour des locaux loués à un privé ! Alors même que, de l'autre côté, on a des immeubles qui sont déjà loués à 60% par l'Etat, à des prix deux fois moindres, et qui plus est dans un secteur stratégique ! Mais comment est-ce possible ?! C'est tout simplement incroyable !
Et c'est d'autant plus choquant qu'on bute une nouvelle fois sur les incohérences de la politique publique. La Fondation de valorisation exerce son rôle, c'est-à-dire qu'elle essaie de vendre au plus offrant, et le Conseil d'Etat fait sa mijaurée en disant que c'est trop cher et que ça ne va pas, alors qu'en fait il a tout le pouvoir dans ce dossier ! C'est totalement incroyable ! Et de toute façon, ce sont les contribuables qui vont payer ces 11 millions de perte.
Ce qui est aussi complètement scandaleux, c'est que cet immeuble a été acheté à 7 700 000 F par la Fondation de valorisation lors d'une vente aux enchères, qui a ensuite fait son travail et demandé à l'Etat s'il voulait le racheter. Et ce dernier, trois mois plus tard, répond qu'il le lui rachète, mais 7 millions ! C'est-à-dire 700 000 F de moins ! Comment voulez-vous faire des négociations sérieuses lorsqu'on propose 700 000 F de moins trois mois plus tard ?! Il y a donc ici un manque de cohérence, de dialogue et de concertation entre la Fondation de valorisation et le Conseil d'Etat, qui a pour conséquence que des biens situés dans des secteurs stratégiques de notre canton partent en mains privées, de personnes qui ont largement les moyens de construire d'autres locaux. C'est donc totalement scandaleux !
Par ailleurs, je suis particulièrement choqué que ce soit M. Stauffer qui ait rédigé le rapport de majorité. C'est peut-être dû au fait qu'il a de nouvelles activités dans le secteur immobilier ? Je ne peux pas savoir si cela fait changer tout à coup le point de vue sur certains sujets mais, fondamentalement, comment est-ce possible d'accepter cette vente, qui se fait au détriment des commerçants et des petits artisans ? On a besoin de locaux à 200 F le mètre carré par an ! Et les banques privées n'ont qu'à s'offrir des immeubles à 400 F annuels le mètre carré ! Il n'y a pas de problème, qu'elles le fassent ! Mais ne bradons pas le bien qui sert à la collectivité !
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, c'est très clair: je vous invite à refuser ce projet de loi dans les plus brefs délais.
Mme Michèle Künzler (Ve). Je ne peux qu'aller dans le sens du rapporteur de minorité. C'est vraiment surréaliste ! L'Etat est en train d'étudier un plan d'aménagement de la zone la Praille-Acacias-Vernets. Cette parcelle est située à proximité du secteur des Tours, c'est-à-dire dans le coin le plus cher de ce périmètre. En outre, l'Etat est locataire de cet immeuble, qui abrite l'office cantonal de l'emploi. On a besoin de ce bâtiment, qu'on loue à un très bon prix, et on va le vendre à un privé pour qu'il nous fixe un loyer plus cher ?! Mais il faut vraiment être stupide ! Pourquoi vendre un objet dont on a besoin, qui n'est pas cher, et qui est situé dans un secteur stratégique ? Je comprends tout à fait la banque Pictet ! Elle fait son boulot, elle va investir dans un endroit tout à fait stratégique. Elle travaille très bien, je n'ai rien à lui reprocher ! Mais l'Etat, quel manque de réflexion !
De plus, on apprend que l'Etat a mandaté ses caisses de pension pour acheter cet immeuble... Mais mes cheveux se dressent sur la tête ! La CIA n'a pas offert, comme l'a prétendu M. Deneys, 7 millions: mais 5 millions ! C'est-à-dire qu'elle envisage d'acheter seulement lorsque le rendement est d'environ 10 ou 12%, parce qu'avant ce n'est pas très rentable. Non mais, attendez ! La banque Pictet achète actuellement avec un rendement de 5% un immeuble dont les loyers s'élèvent seulement à 200 F le mètre carré. Mais on pourrait facilement «doubler» ce montant, et ce serait encore tout à fait louable ! Donc, dans ce sens-là, c'est vraiment une erreur stratégique fondamentale de ne pas garder cet immeuble. En effet, il est situé dans le meilleur endroit du secteur la Praille-Acacias et, en plus, on l'utilise déjà. Alors franchement, c'est vraiment la pire des stupidités de le vendre. J'espère que nous serons suivis !
Mme Fabienne Gautier (L). A lire le rapport de minorité de notre collègue M. Deneys, je comprends tout à fait son étonnement de constater que les loyers actuels des locaux loués par l'Etat dans cet immeuble d'Alexandre-Gavard sont nettement inférieurs aux prix du marché. Vous avez tout à fait raison, Monsieur Deneys ! Je comprends aussi parfaitement qu'il souhaite que l'Etat acquière cet immeuble parce qu'effectivement cela peut être intéressant. Mais est-ce vraiment raisonnable ? En effet, je crois que le but de l'Etat n'est pas celui-ci. Son objectif est de créer une cité administrative... (Brouhaha.) ...ce qui signifie mettre toute l'administration de l'Etat sous le même toit. Et cette cité administrative, Monsieur Deneys, rendra service à la population mais aussi à l'Etat, car, au lieu d'être éparpillé de gauche et de droite comme c'est le cas actuellement... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) En effet, l'Etat n'occupe que 60% de cet immeuble ! Il n'y a qu'une partie de l'office cantonal de l'emploi qui se trouve à l'intérieur de ce bâtiment, le reste de cet office étant réparti dans au moins quatre ou cinq autres endroits du canton. Ne trouvez-vous pas, Monsieur Deneys, que, puisque nous avons le secteur de la Praille-Acacias-Vernets à disposition, celui-ci serait l'endroit idéal pour créer une cité administrative ? Il y a peut-être une volonté de l'Etat par rapport à cela - il pourra nous le dire - parce qu'il n'y aurait pas meilleure rationalisation que de travailler tous sous le même toit, d'abord pour la population, qui n'aurait plus besoin de se rendre que dans un seul endroit, et ensuite pour la gestion des deniers de l'Etat. Croyez-vous que c'est bien gérer les deniers publics que de courir toute la journée à droite et à gauche pour se rendre d'un service à l'autre ? Croyez-vous vraiment que c'est une bonne gestion des deniers de l'Etat ? Moi j'en doute. C'est pour cela que je suis favorable à la vente de cet immeuble, qui ne constitue qu'une toute petite partie de l'administration, puisqu'il n'abrite que 60% d'un service... (Commentaires.) ...Oui, ce n'est même pas 60% du service qui se trouve dans cet immeuble, Monsieur Deneys ! Alors je ne trouve pas que c'est une bonne gestion que d'acheter cet immeuble et je défendrai la cité administrative pour le bien de la population et de la gestion des deniers publics. Nous soutiendrons donc la vente de cet immeuble, Monsieur Deneys.
M. Alberto Velasco (S). Je crois qu'aujourd'hui les députés de la commission des travaux et ceux des finances doivent s'interroger, parce que nous avons reçu à plusieurs reprises des rapports montrant l'état locatif de l'Etat de Genève. Et ce ne sont pas des centaines de milliers mais des dizaines de millions de francs que l'Etat genevois paie en état locatif pour ces locaux... (Remarque.) ...que ce soit à des privés ou à d'autres ! Plusieurs fois, j'ai entendu des députés - de gauche et de droite, attention, tous partis confondus, ce qui montre leur grand intérêt pour les deniers de l'Etat - demander s'il ne serait pas plus intéressant de construire que de payer de tels loyers ! Oui, ne serait-il pas plus intéressant d'acquérir un immeuble que de verser ces loyers ? Si l'on prend comme exemple le vieil Hôtel de Police, qui abrite le département de l'aménagement, c'est un bâtiment pour lequel l'Etat paie des loyers depuis vingt ou trente ans ! Il est hyper amorti puisque, chaque année, ce sont des centaines de milliers de francs qui sont déboursés pour l'occuper. Voilà donc un objet que l'Etat a pratiquement déjà payé par ses locations. Rien qu'en s'acquittant du prix de la location, il aurait pu acquérir cet immeuble ! Mais non, l'Etat ne l'achète pas ! On ne comprend donc plus rien, Mesdames et Messieurs les députés ! Plus rien ! Et ce n'est pas une question de gauche ou de droite, non, c'est une question de logique financière, une logique des intérêts des deniers publics ! Vous êtes les premiers à parler des deniers publics, à nous dire qu'il faut amortir la dette et qu'il faut faire des économies, alors voilà le moyen d'en faire ! Achetons cet immeuble, qui est déjà occupé à moitié par l'Etat, aménageons-y d'autres services de l'administration et dépensons moins en location. Voilà aussi comment on réduit la dette de l'Etat ! Mais non, la fondation va vendre à perte à une banque cet objet financé par des deniers publics, banque qui aurait pu, j'en suis sûr, payer davantage, parce qu'elle en a vraiment les moyens, tout comme les autres établissements de ce type !
Mesdames et Messieurs les députés, concernant ce troisième objet de discussion, je le dis et le répète, ce n'est même pas une question de gauche ou de droite; c'est vrai que parfois des sujets nous divisent pour des raisons idéologiques, mais là, non. Et je dois même avouer que, bien souvent, mes collègues d'en face partagent les mêmes réflexions que moi ! Alors je ne comprends pas. Je crois qu'il doit y avoir un problème avec les fonctionnaires et les personnes de la Fondation de valorisation, problème auquel s'ajoute la volonté politique de certaines commissions, comme celles des travaux et des finances, d'acheter des objets dans lesquels on peut loger des services de l'Etat - parce que cela coûte beaucoup moins cher que ces locations, qui se chiffrent par dizaines de millions de francs, Monsieur Stauffer. Des dizaines de millions ! Il y a un immeuble situé derrière la gare, pour lequel on paie un loyer annuel de 2 700 000 F et qui était occupé à l'époque par le CTI; 2 700 000 F ! En cinq ans, le propriétaire l'amortissait ! On s'est d'ailleurs tous demandé pourquoi l'Etat ne l'a pas acheté, et j'attends toujours la réponse ! Cela fait six ans !
Alors oui, cette histoire est à la limite du scandale ! En tout cas nous, socialistes, allons nous poser la question de savoir s'il ne faut pas lancer un référendum contre ces objets.
Une voix. Bravo, Alberto !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je signale qu'il est 18h55 et que nous irons jusqu'au bout de ce projet de loi, pour ensuite reprendre nos travaux à 20h30 avec une prestation de serment. Je passe la parole à Mme Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je serai très brève. Voilà un moment que l'on parle dans cet hémicycle de la vente et de l'achat d'un immeuble, de ce que cela peut rapporter à l'Etat, à des banquiers, à des privés, etc. Mais je crois qu'il faut qu'on aille plus loin. On est en train d'imaginer à Genève tout un nouveau quartier dans la zone de la Praille-Acacias-Vernets. Qu'on y veuille ou non des tours, peu importe, ce sera un quartier complètement nouveau, où l'on sait qu'il y aura un nombre certain d'habitations et, donc, d'habitants.
Puis, on a l'opportunité, non pas seulement de placer les pions de l'Etat, mais de se pencher sur l'étude d'une surface qui pourra plus tard être un espace collectif à disposition des habitants, destiné à ce qu'on appelle une vie collective ou de quartier. Et là on hésite, on veut le vendre à des privés pour que cela soit rentable. Très bien ! On peut toujours travailler sur le court terme, mais ce n'est pas très politique ni positif pour ceux qui viendront s'installer là-bas, par exemple des familles, et c'est la raison pour laquelle je soutiens la position de M. Deneys et que je refuserai cette vente.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de majorité. J'aurais déjà une petite réponse. Si M. le député Velasco attend des explications concernant les 2 700 000 F payés par le CTI pour le bâtiment qu'il occupait derrière la gare, qu'il demande à son conseiller d'Etat, qui était à l'époque en charge des constructions, à savoir M. Laurent Moutinot. Si je ne m'abuse, il est également socialiste, donc c'est à lui qu'il faudrait demander une réponse. Et comme je l'ai déjà dit, on ne construit pas des logements à coups de règlements, mais avec une pelle et une pioche. Bref !
Il y a deux institutions en Suisse auxquelles il ne faut pas toucher, ce sont la banque et la fiscalité. C'est ce qui a fait le succès de la Suisse ! Et si aujourd'hui une banque - dont j'avais tu le nom, mais que Mme la députée Verte a divulgué et que je ne répéterai pas - ayant son siège juste à côté de ces parcelles a besoin de s'étendre, cela représente aussi des centaines d'emplois et, également, beaucoup d'impôts pour le Canton et la République de Genève. Il faut donc savoir un peu ce que l'on se veut !
Il y aura certainement, dans la zone de développement de la Praille et des Acacias, des logements bon marché, d'autres un peu plus onéreux, ainsi que des surfaces commerciales, et tout cela fait partie d'un plan de mixité. Et le fait qu'une banque ait pris part à cette vente aux enchères... J'aimerais d'ailleurs souligner que la fondation avait mis cet objet en vente à 9 700 000 F, qu'elle a reçu sept offres qui atteignaient ou dépassaient ce prix, et que cette banque a misé 11 250 000 F. Malgré cela, on a une perte de 49%. Alors je vous le demande, Mesdames et Messieurs de la gauche, socialistes et Verts: qui a octroyé des crédits à 25 millions pour cet immeuble ? Qui dirigeait la BCG à l'époque ? Eh oui, il faudrait peut-être le demander à une certaine conseillère fédérale, qui siégeait au conseil d'administration ! Alors, voyez-vous, le MCG n'a pas de leçons à recevoir sur la gestion ou sur ses prises de position, parce qu'encore une fois je crois que, s'il y a eu une flambée des prix des loyers à Genève, vous en êtes, vous, les socialistes, bien responsables avec la débâcle de la Banque cantonale de Genève... (Brouhaha.) ...puisque vous avez contribué à financer tous ces excès...
La présidente. Monsieur le député, revenez au débat, je vous prie ! (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Et je rassure également M. Deneys, qui faisait allusion à mes nouvelles fonctions professionnelles. Non, je n'ai pas changé mon fusil d'épaule, j'ai un job, je le respecte. Et Genève est ainsi faite qu'elle comporte des logements bon marché et d'autres plus cher. Et c'est cette mixité que nous allons défendre, Monsieur le député !
Donc, dans ce cas-là, puisqu'on sait que cette zone va se développer et qu'il y aura des surfaces pour les petites et moyennes entreprises, qui sont quand même, je le rappelle, les premiers employeurs du canton, cela ne nous pose, à nous, MCG, aucun problème que cette banque, qui a son siège à quelques centaines de mètres de ces parcelles, puisse étendre son activité et la renforcer. En effet, le jour où ces grandes institutions, ces grandes banques qui ont fait la fierté de notre pays s'en iront, nous verrons, Mesdames et Messieurs de la gauche, qui paiera le plus d'impôts à Genève et comment vous pourrez en séance plénière dépenser l'argent que vous n'aurez plus perçu grâce aux impôts !
Je conclurai en disant que, à force de convoiter l'argent du riche, vous finirez par voler celui du pauvre.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Je remarque cette larme au coin de l'oeil de M. Cuendet, cette satisfaction bancaire et cette émotion, c'est merveilleux ! Merci, Monsieur Stauffer, la banque est ravie de votre discours, c'est fantastique !
Mais je pense qu'il faut être un peu sérieux dans ce dossier. Les socialistes sont bien entendu en faveur de la présence des activités bancaires à Genève et souhaitent que ces dernières puissent se dérouler dans de bonnes conditions. Mais il n'empêche que ce n'est pas à la collectivité publique d'en payer le prix, car c'est précisément un secteur économique qui a de grands moyens !
Nous, socialistes, ce qui nous intéresse dans le secteur de la Praille-Acacias, c'est de maintenir et de garantir la mixité des activités. Alors pourquoi voudriez-vous supprimer un immeuble assez vétuste, dont les loyers s'élèvent à 210 F le mètre carré, pour le remplacer par des activités bancaires à 400 F le mètre carré ? C'est tout simplement irrationnel, même s'il y aura peut-être un jour de nouveaux locaux !
En l'occurrence, chaque fois qu'une banque s'étend, cela ferme des petites entreprises, parce qu'elles n'ont pas les moyens de payer le loyer. Et j'en sais quelque chose, Monsieur Stauffer !
J'aimerais revenir plus sérieusement aux arguments avancés tout à l'heure par Mme Gautier, qui, je dois le dire, m'étonnent un peu, parce qu'il me semblait qu'elle était bien plus avisée au niveau de la gestion privée de ses affaires immobilières. Elle nous dit qu'il faut vendre, mais soyons sérieux !
L'Etat loue aujourd'hui des locaux à 200 F le mètre carré et, en échange, en loue ailleurs d'autres à 400 F pour la même surface... Quelle est la meilleure affaire ? Celle à 200 ou à 400 F ?! Il faut réfléchir longtemps pour savoir, de 200 ou 400 F, ce qui est plus intéressant ! Tic-tac, tic-tac ! Vous allez revenir en deuxième semaine ? Vous avez gagné ! C'est 200 F ! Bravo ! Il faut louer à 200 F et non à 400 F: merveilleux ! Alors l'Etat va vendre ces locaux à 200 F le mètre carré, pour aller en louer à 400 F: excellente affaire commerciale !
Mme Gautier nous dit qu'il faut vendre ce bien... Mais on va perdre 11 millions ! L'Etat propose un prix s'élevant à 7 millions et on a un différentiel de 4 millions. Ne pouvons-nous pas arriver à trouver un terrain d'entente pour que la collectivité rachète cet objet ?
Un autre petit calcul élémentaire: le prix d'achat est de 11 millions. L'Etat paie 550 000 F... (Brouhaha.) Bon, personne ne s'intéresse au calcul, je vois ! L'Etat paie 550 000 F par année, ce qui fait que, en vingt ans, il amortirait son acquisition à ce prix de 11 millions. C'est totalement incroyable de renoncer à une opération immobilière qui s'amortit en vingt ans ! Et je ne vois pas pourquoi Mme Gautier, qui connaît bien le monde de l'immobilier, ne pourrait pas imaginer que l'Etat revende ce bien par la suite. Vous pourriez l'acquérir aujourd'hui, pour un prix compris entre 7 et 11 millions, et le revendre dans quelques années ! En effet, on sait très bien que les prix vont monter dans ce secteur et la banque privée, elle, n'est pas folle, contrairement à certains dans cette salle ! Parce que, franchement, on ne peut pas louper de telles occasions ! Et je suis sûr que si Mme Gautier voulait conclure une affaire privée, elle n'hésiterait pas à la faire pour elle-même, et moi de même ! Et puis, la réponse...
La présidente. Merci, Monsieur le député...
M. Roger Deneys. Non, Madame la présidente ! Quant à l'argument de la cité administrative, je suis désolé, n'est pas sérieux. C'est un projet peut-être intéressant - ce n'est même pas certain - mais qui est à long terme, et ce n'est pas en renonçant aujourd'hui à cette acquisition qu'on va empêcher la réalisation d'une future cité administrative. Ça, c'est du bla-bla pour ne pas conclure cette affaire ! C'est totalement scandaleux ! Et j'invite le Conseil d'Etat à ne pas demander le troisième débat. Je suis désolé, mais vous devriez réfléchir, nous sommes en plein dans le quartier stratégique de la Praille-Acacias, on ne peut donc pas brader des biens maintenant, alors que ce secteur n'est pas encore complètement défini. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. S'est encore inscrit M. Stauffer, et le Bureau décide de clore la liste. Je rappelle que nos débats ne sont plus visibles sur Léman Bleu puisque, à 19h, ils cessent la diffusion de nos séances. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de majorité. Vous savez, votre humour ne fait rire que vous ! Et si certains députés ici... (Protestations.) ...s'expriment parce qu'ils sont diffusés ou non sur Léman Bleu, nous, au MCG, nous disons... (Exclamations.) ...ce que nous avons à dire. Il y a effectivement des démonstrations qui sont dignes du jardin d'enfants, mais les quatre heures, les cocolets, c'est passé ! Vous irez prendre votre goûter après; pour l'instant, on travaille !
Pour en revenir au sujet, Monsieur Deneys, rapporteur de minorité, vous fustigez le Conseil d'Etat et l'implorez de faire l'acquisition de ce bien. Mais, rappelez-moi, parce qu'il est peut-être temps qu'on change les cartes au Conseil d'Etat, vous n'en avez pas quatre sur sept, de conseillers d'Etat de gauche ? (Remarques. Brouhaha.) Qu'y a-t-il tout à coup ? Il ne se passe plus rien ?! On n'a pas reçu d'offre à la commission de contrôle de l'Etat, ils ont fait la sourde oreille. La liste est close, Monsieur Deneys ! Eh oui ! A moins que les règles soient différentes pour le MCG et le groupe socialiste !
Fort de ce principe, si le Conseil d'Etat avait dit ce soir qu'il allait acheter ces locaux, le groupe MCG aurait pu réévaluer la situation, mais le gouvernement a fait la carpe. Comme à son habitude, vous me direz ! Mais c'est vous qui êtes majoritaires au Conseil d'Etat, donc vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-mêmes, Mesdames et Messieurs socialistes et Verts ! En ce qui nous concerne, nous maintenons notre position, et comme je vous l'ai dit, il y a deux principes auxquels on ne touche pas en Suisse, ce sont le secret bancaire et la fiscalité.
La présidente. Nous allons maintenant voter la prise en considération de ce projet de loi...
Une voix. Appel nominal ! (Appuyé.)
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10196 est adopté en premier débat par 47 oui contre 27 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3.
Troisième débat
La présidente. Le troisième débat est-il demandé ? (Brouhaha.)
Des voix. Oui !
Des voix. Non ! (Chahut.)
La présidente. Oui, il l'est !
La loi 10196 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10196 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 26 non et 2 abstentions.
La présidente. Je rappelle aux membres de la nouvelle commission Justice 2010 que nous devons nous réunir dans quelques minutes à la salle des Fiefs. Merci de vous y rendre ! Pour les autres, nous reprenons nos travaux à 20h30 précises. A tout à l'heure !
La séance est levée à 19h10.