Séance du jeudi 6 avril 2006 à 20h30
56e législature - 1re année - 7e session - 31e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.

Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, Robert Cramer, François Longchamp et Mark Muller, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot et David Hiler, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Jean Rossiaud, Françoise Schenk-Gottret, Pierre Schifferli et Francis Walpen, députés.

E 1417-A
Prestation de serment de M. COMMISSO Aldo, élu Juge assesseur-e au Tribunal des Baux et Loyers (entrée en fonction : immédiate)
E 1421-A
Prestation de serment de Mme MONTI Brigitte, élue Juge d'instruction (entrée en fonction : 1er mai 2006)

Le président. M. Aldo Commisso et Mme Brigitte Monti sont assermentés. (Applaudissements.)

E 1418
Election de deux membres désignés par le Grand Conseil au Conseil de fondation de la Fondation de droit public d'aide aux entreprises (307) - PA 410.00 art. 5, 6 (rééligibles deux fois) et 10 (incompatibilité) (entrée en fonction immédiate - durée du mandat : jusqu'au 28 février 2010)

Deuxième tour

Le président. J'annonce le résultat du deuxième tour de l'élection au Conseil de fondation de la Fondation de droit public d'aide aux entreprises:

Bulletins distribués: 90

Bulletins retrouvés: 87

Bulletins blancs: 26

Bulletins nuls: 4

Bulletins valables: 57

Est élu: M. Andràs November (Ve), avec 45 voix.

Obtiennent des suffrages: M. Neil Ankers: 8 voix; M. Michel Aurélien Celi Vegas: 3 voix.

Annonces et dépôts

Néant.

Le président. Nous allons examiner la résolution 507 pour laquelle nous avons accepté le traitement en urgence tout à l'heure, point 67 de notre ordre du jour.

R 507
Proposition de résolution de Mmes et MM. Christian Brunier, Ariane Wisard-Blum, Sylvia Leuenberger, Elisabeth Chatelain, Anne Emery-Torracinta, Laurence Fehlmann Rielle, Françoise Schenk-Gottret, François Thion, Alberto Velasco, Loly Bolay, Véronique Pürro, Carole-Anne Kast, Alain Charbonnier, Alain Etienne, Mariane Grobet-Wellner, Antoine Droin, Eric Stauffer, Sandra Borgeaud contre la privatisation de Swisscom

Débat

M. Christian Brunier (S). Vous le savez, Swisscom a deux genres d'activités, en quelque sorte, et je pense que nous devons mener ce soir un débat qui dépasse le dogmatisme qui règne trop souvent dans ce parlement, pour parler clairement de ce qui peut être privatisable ou pas.

Swisscom a d'abord une activité purement de services. Sur ce point, franchement, même la gauche est relativement ouverte au fait que des privés puissent assumer ces fonctions-là, le fait que MSN ou que l'internet soient fournis par des publics ou des privés n'a que peu d'importance. Sur cette partie-là, on pourrait entrer en discussion, mais c'est la partie la plus rentable aujourd'hui pour Swisscom: elle lui permet d'équilibrer ses comptes et de dégager des profits pour cette société publique.

Toute la partie restante représente des activités liées à l'infrastructure. Aujourd'hui, de nombreuses régions sont desservies en réseaux par Swisscom: en réseau fibre de cuir, en réseau fibre optique, en réseau hertzien, parce qu'elles ne sont pas dans une logique de marché. Il y a des régions de Suisse - Genève échappe peut-être un peu à cela - qui ,si on appliquait une logique de marché, ne seraient pas rentables et tout simplement pas desservies en termes de télécommunications et de nouvelles technologies. Or on sait l'importance, aujourd'hui, pour une société, pour un pays comme le nôtre, d'être à l'avant-garde en matière de télécommunications et en matière de nouvelles technologies.

Dans notre pays, seul Swisscom permet d'établir de telles prestations. Donc, l'idée du gouvernement suisse de brader Swisscom est une mauvaise idée. Nous connaissons, certes, une situation financière nationale difficile, mais elle ne l'est pas au point de devoir vendre les actifs de Swisscom - gros centre de profits pour la Confédération - et de liquider purement et simplement cette société publique florissante, qui est un fleuron au niveau national. Cela, nous ne pouvons pas l'accepter ! Et nous ne comprenons vraiment pas la position du gouvernement genevois à ce sujet, puisque Genève a une tradition, celle de défendre le service public, d'ailleurs exprimée plusieurs fois par les électeurs, par les citoyens. En effet, des quartiers et des communes se sont mobilisés pour défendre leur service public. Et, jusqu'à présent, Genève a toujours été un moteur au niveau national pour la défense d'un service public efficace, servant avec équité les citoyens et citoyennes de ce canton et de ce pays. Donc, le fait que Genève, par la voix de son gouvernement, donne une sorte de blanc-seing à la privatisation de Swisscom est un acte grave ! Et aujourd'hui, nous voulons contrecarrer cela... (Remarques.) ... pour que le parlement... (Brouhaha.) Les libéraux, là, vous vous moquez beaucoup de la population ! Nous voulons que le parlement donne un message contraire à celui du gouvernement suisse et à celui du gouvernement genevois. C'est-à-dire que nous voulons que Swisscom poursuive son activité et son rôle de service public, avec une vraie cohésion nationale qui permette à des régions défavorisées de bénéficier d'un service de qualité en matière de télécommunications et de haute technologie !

Pour toutes ces raisons, et pour donner un autre écho que celui du gouvernement genevois, c'est-à-dire un écho contre la privatisation de Swisscom, nous vous invitons à voter cette résolution, avec l'amendement du PDC, qui permet, je crois, de trouver une majorité au sein de ce parlement.

M. Guy Mettan (PDC). En lisant les journaux ce matin, vous avez pu constater qu'effectivement Swisscom faisait l'actualité, parce que le Conseil fédéral, pour la énième fois, publie son avis sur l'avenir de Swisscom, prolongeant la «cacade» qui règne depuis plusieurs mois concernant cette importante entreprise publique.

Comme vous le savez, le PDC est attaché - il l'a fait savoir plusieurs fois, notamment au niveau fédéral - à ce que les pouvoirs publics, en l'occurrence la Confédération, conservent en tout cas une minorité de blocage, voire plus, qui préservent à la fois les intérêts de l'Etat et des citoyens contribuables suisses dans leur ensemble. Donc, nous tenons à ce que Swisscom conserve une partie importante de son actionnariat en mains publiques. Il en va de l'orientation stratégique de cette entreprise et, en même temps, de tout ce qui concerne les nouvelles technologies: télécommunications, téléphonie, internet, car on ne sait pas ce que l'avenir nous réserve. Et je crois qu'il est important que l'Etat puisse garder un oeil - même plus qu'un oeil - soit un certain pouvoir d'orientation sur de cette entreprise.

Encore une remarque: le cas de Swisscom est exactement l'inverse de celui de Swissair. Parce que dans le cas de Swissair, cette entreprise s'était précipitée à l'étranger dans une stratégie d'acquisition qui s'est révélée suicidaire, alors qu'en fait son management était mauvais; dans le cas de Swisscom, c'est exactement l'inverse: son management est bon - et reconnu comme tel. Même les rangs libéraux devront reconnaître que l'action Swisscom se porte bien, que dans leurs portefeuilles bien garnis elle ne dépareille pas, et cela grâce à un bon management. Dans le cas de Swisscom, nous avons donc un bon management, et, lorsqu'il s'est agi de permettre à cette société de procéder à des acquisitions qui pouvaient être intéressantes, et qui n'étaient pas pourries comme dans le cas de Swissair, eh bien, on ne l'a pas laissée faire... Le résultat de tout cela a été la chute des actions, des cours, et de faire perdre au peuple suisse des milliards de francs. Si ça, c'est de la bonne politique, eh bien, je veux bien qu'on me pende ici même ! (Chahut.) Je sais toujours trouver les mots qui suscitent une réaction positive... Et quand je sens l'attention un peu faiblir, j'essaie de la relancer. (Chahut.)

Tout cela pour vous dire, Mesdames et Messieurs, que l'amendement qui vous est proposé ce soir me paraît tout à fait acceptable, parce qu'il préserve l'avenir de cette société, importante pour le développement de la Suisse. Et les Genevois, qui ont appris il y a vingt-quatre heures que Telecom revenait à Genève, n'ont pas besoin de longues explications à ce sujet. Cela devrait vous convaincre également du bien-fondé de cet amendement.

M. Jacques Jeannerat (R). Je comprends bien que des choses sensibles comme la téléphonie et une institution comme Swisscom peuvent hérisser le poil de certains quand on parle de privatisation, mais je crois qu'il faut remettre les compétences au bon échelon. C'est un problème fédéral et je crois que ce sont les Chambres fédérales qui doivent discuter de cela. Nous avons tous dans ce parlement - à l'exception du «dernier petit jeune» MCG - d'excellents représentants aux Chambres fédérales. Nous avons de fortes personnalités qui représentent Genève, donc c'est à elles de discuter de cela.

Vous avez voulu ouvrir le débat, et nous allons quand même donner deux ou trois arguments. D'abord, le principe de la privatisation revient aux Chambres fédérales, c'est sûr, mais je vous rappelle que le projet, en parallèle, comporte des mesures d'accompagnement, notamment la mesure principale qui, dans la loi, fixe à Swisscom l'obligation du service universel, même si cette société était privatisée. C'est fondamental et cela permet aux radicaux d'avoir confiance en ce principe de privatisation, donc de s'opposer à cette résolution. Et si la décision de principe de la privatisation revient aux Chambres fédérales, c'est - du moment qu'on va la faire voler de ses propres ailes - à Swisscom de décider quand elle va vendre ses actions. C'est important, parce qu'elle doit choisir le moment opportun pour pouvoir rentabiliser cette vente de manière optimale.

Voilà, vous avez compris, Mesdames et Messieurs: les radicaux sont opposés à cette résolution, ils font confiance aux excellents parlementaires fédéraux qui représentent Genève à Berne.

M. Yves Nidegger (UDC). Effectivement, c'est un débat de nature fédérale, et il est un peu curieux qu'à Genève nous ayons ces «Genfereien» devenues célèbres qui consistent à intervenir dans le débat national. Cela étant, que Swisscom appartienne à la Confédération en majorité ou qu'elle appartienne à quelqu'un d'autre, rien ne changera au fait que cette société est liée par une obligation de service industriel... Pardon: de service universel ! (Rires.) C'est un lapsus, peut-être freudien. (Brouhaha.) Je reprends: cette société est liée par une obligation de service universel dans l'exploitation d'un réseau dont elle ne dispose pas librement.

Il ne s'agit pas de perdre la maîtrise de cette société et d'influer sur des choix stratégiques qui, de toute façon, ont déjà échappé depuis la nouvelle situation à la Confédération. Cette société doit être vendue parce qu'aujourd'hui elle vaut beaucoup d'argent et que demain elle en vaudra beaucoup moins. Au cours des débats de ces derniers mois sur cette question, certains ont dit vouloir cesser de voir Swisscom perdre des parts de marché. Il est vrai qu'en tant qu'opérateur sur un réseau qu'elle doit partager, dont elle doit autoriser l'accès à d'autres opérateurs depuis quelques années - c'est ce qu'on appelle «le dernier kilomètre», qui va même peut-être lui être retiré - Swisscom perd des parts de marché. Et, pour essayer d'en regagner ailleurs, elle a eu cette idée lumineuse d'acheter un opérateur comme «Eircom» qui, lui aussi, est tenu par des obligations de service public et, par conséquent, se trouve dans la même situation, c'est-à-dire confronté à des incombances lourdes et à une perte de ses parts de marché. Ce n'est pas en réunissant divers canards boiteux européens que l'on fait voler une société...

Encore une fois, cette société vaut aujourd'hui beaucoup d'argent, mais elle en vaudra certainement beaucoup moins demain. Pourquoi vaut-elle beaucoup d'argent ? Parce qu'elle réalise des bénéfices importants qu'elle distribue à ses actionnaires - dont la Confédération, c'est tout à fait exact. Et pourquoi peut-elle distribuer de confortables dividendes et réaliser autant de bénéfices ? Parce que, par atavisme, les Suisses restent fidèles à Swisscom qui est une société historique, ce qui lui permet de pratiquer des prix très au-dessus du marché, non concurrentiels, et par conséquent destinés, avec le temps, à s'effacer. C'est donc maintenant qu'il faut vendre. Dès le moment où l'on a décidé de vendre, l'idée de garder une minorité de blocage est une idée absurde d'un point de vue économique, car, en restant actionnaires, vous restez devoir renflouer le capital le jour où ça ira mal - façon Swissair - sans toutefois, puisque c'est une minorité dite «de blocage», pouvoir influer véritablement sur quoi que ce soit de stratégique et pouvoir diriger la société.

Pour faire court et pour conclure, finalement le Conseil fédéral mène un peu la même politique que notre Conseil d'Etat, laquelle consiste à faire du cash en libérant ou en vendant des actifs afin de rembourser la dette cantonale de 19 milliards. C'est donc une bonne opération qui doit s'effectuer maintenant. Et tergiverser nous expose à des pertes et à des inconvénients.

Donc, le groupe UDC refusera l'entrée en matière sur cette question et refusera aussi l'amendement PDC.

M. Pierre Weiss (L). Vous connaissez cette expression proverbiale selon laquelle «les Suisses se réveillent tôt et se lèvent tard». Ici, nous avons une variante: les Suisses se réveillent tard et se lèvent encore plus tard... Puisqu'à la date du dépôt de cette résolution, la procédure de consultation fédérale était terminée. En d'autres termes, nous pouvons évidemment débattre, nous disputer, polémiquer, parlementer, faire tout ce que nous voulons, et même adopter ou même rejeter, peu importe, l'affaire est close.

Il y avait le renfort de Sézegnin; il y a l'absence de renfort de Genève, qui ne sert à rien. Nous avons vu tout à l'heure qu'en matière internationale nous étions irrelevants; nous essayons de prouver qu'en matière nationale nous le sommes aussi - nous allons certainement le démontrer ce soir.

Je voulais juste faire une ou deux observations en ce qui concerne les considérants de cette proposition de résolution. La première est que nous avons vu l'entreprise Swisscom prendre certains risques à l'étranger: elle les a pris avec des conséquences qui n'ont pas été forcément heureuses pour les actionnaires. Je comprends que certains veuillent accentuer ces risques et faire en sorte que, par la suite, les actionnaires, à savoir le peuple suisse via la Confédération, supportent davantage encore des pertes qui pourraient advenir d'une gestion qui ne serait pas nécessairement heureuse... Bien entendu qu'elle pourrait être heureuse, et avec bénéfices, mais elle pourrait aussi être malheureuse. Chacun prendra ici ses responsabilités, le groupe libéral n'entend pas faire porter sur les épaules de la population ce type de risques, qui est par essence celui d'une entreprise privée. L'expérience Swissair aurait dû nous instruire, je vois qu'elle n'a pas instruit chacun parmi nous.

Le deuxième point est, plus fondamentalement, que, sur la question qui nous est proposée, le gouvernement a eu une prise de position que certains considèrent comme étant excessive. A titre de faction représentée au sein de ce parlement, nous la considérons comme particulièrement frileuse. Néanmoins, elle va dans la bonne direction: il s'agit de voir non pas une minorité de blocage comme solution mais, au contraire, un mandat de prestations. Parce qu'effectivement, et sur ce point nous sommes entièrement d'accord avec les auteurs de la résolution, il est essentiel que la mission de service au public que doit fournir l'entreprise Swisscom soit garantie. Qu'en d'autres termes des conditions extrêmement strictes pour les habitants des vallées les plus reculées - donc pas seulement du canton de Genève, mais aussi des villages les plus éloignées du centre - soient respectées. Il faut que les habitants des vallées les plus reculées soient connectés à ce réseau et que les débits à haute vitesse soient offerts à des conditions concurrentielles. Mais précisément à des conditions concurrentielles, ce n'est pas encore absolument le cas: pour ceux d'entre vous qui regardent les étranges lucarnes françaises, il suffit de voir les tarifs auxquels les compagnies françaises offrent le haut débit pour se rendre compte que Swisscom n'est pas réellement concurrentielle.

Voilà pourquoi un mandat de prestation - un retrait de la Confédération qui cesserait de faire prendre aux contribuables de ce pays des risques inutiles - devrait, au fond, réunir les avantages maximaux qui doivent nous concerner, à savoir le meilleur service, au moindre coût et au moindre risque. Raison pour laquelle le groupe libéral, évidemment, refusera et cette résolution et les amendements qui sont proposés par nos amis démocrates-chrétiens qui, en la matière, manquent pour le moins de courage mais veulent faire porter les risques aux autres ! (Exclamations.)

M. André Reymond (UDC). Il est vrai que Swisscom est une entreprise florissante. Mais il est facile d'être une entreprise florissante lorsque l'on peut facturer à un prix plus élevé que l'exige la loi du marché - nous le voyons avec nos voisins européens. Nous ne nous en souvenons pas, mais il a été relevé ce soir, c'est l'exemple de Swissair... Nous avions peut-être un bon management en Suisse, mais en l'exportant les propriétaires de Swissair, donc les actionnaires et les caisses de pension, ont beaucoup perdu. Parce qu'on a précisément voulu aller à l'étranger. Et je pense que le Conseil fédéral a eu raison de dire: «Attention, n'allons pas acheter d'autres réseaux à l'étranger».

Ce soir, je crois pouvoir saluer le courage du Conseil d'Etat qui, même si cela ne relève pas de son domaine d'action, prend position. En effet, il a eu le courage de le faire, et je tiens à l'en féliciter - vous avez pris position, reconnaissez-le, Monsieur le président ! Les repreneurs de Swisscom auront certes l'obligation d'assurer le service de prestations dans les vallées les plus retirées, donc il ne faut pas menacer la population et affirmer que, si Swisscom est privatisée, les vallées reculées n'auront plus de service à leur disposition.

Il faut se rendre compte qu'il n'y a pas que Swissair, et que nous devrons aussi, dans les services industriels, prendre des mesures qui ne seront peut-être pas agréables pour la gauche de ce parlement. Avant de conclure, je rappellerai qu'à un moment donné les CFF ont aussi voulu investir sur le réseau en Grande-Bretagne, mais heureusement que la sagesse a prévalu et que cela n'a pas été réalisé.

Donc, le groupe UDC recommande de refuser cette résolution. Et puis, laissons le soin au parlement fédéral de décider à quel moment le Conseil fédéral pourra vendre Swisscom !

Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). On le sait, Swisscom est fortement et de manière irresponsable menacée par les intentions du Conseil fédéral. Pour le Verts, le service public ne doit pas être géré par de grandes entreprises privées dont la seule ambition est un bénéfice juteux, sans garanties pour la population si, à l'avenir, ces bénéfices devaient diminuer. Il est certain qu'une privatisation aurait des répercussions négatives sur l'infrastructure des télécommunications offertes à la population suisse, surtout parmi ceux qui habitent des régions reculées, et nous craignons aussi qu'une telle décision n'entraîne de grandes et lourdes suppressions d'emplois.

Nous regrettons et condamnons vivement le message du gouvernement genevois adressé à Berne, qui va à l'encontre des intérêts de la population genevoise et de la population suisse: car soutenir une minorité de blocage ne conférerait plus à la Confédération le pouvoir de définir la stratégie de Swisscom, et Berne aurait par contre le devoir d'intervenir en cas de problèmes. Il va sans dire que le contribuable passerait alors à la caisse, à raison peut-être de plusieurs milliards, pour combler des lacunes du service public au service privé.

Les Verts souhaitent faire savoir aux autorités fédérales que le parlement genevois désapprouve de voir la majorité du capital de Swisscom passer en mains privées. Par ce message, nous voulons nous engager solidairement aux côtés de la population de notre pays pour que Swisscom soit un vrai service au public. Nous soutiendrons donc cette résolution amendée par le groupe PDC.

M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, je suis quand même soufflé en vous écoutant. Nous n'arrêtons pas d'entendre les libéraux ou l'UDC affirmer que le secteur privé sait gérer les affaires et que le secteur public ne le sait pas trop... Aujourd'hui, que nous dites-vous ? Que le public doit se débarrasser rapidement de Swisscom, parce que l'entreprise est florissante aujourd'hui mais que, demain, cela sera «la cata»... Et comme par hasard, il y a de très nombreux privés - les bons gestionnaires que vous félicitez continuellement - qui se précipitent pour acheter ! Alors, il y a un truc que je ne comprends pas: soit ils n'ont rien compris à l'économie, et ils se précipitent pour acheter quelque chose qui va foirer, soit vous êtes en train de nous mentir !

Des voix. Oh ! (Brouhaha.)

M. Christian Brunier. Deuxième chose. Vous nous dites: «Nous prévoyons la décroissance de Swisscom.» Vous l'avez relevé, aujourd'hui Swisscom n'est pas compétitive au niveau des prix, et de loin pas. Néanmoins, vous l'avez aussi reconnu, peu de clients de Swisscom sont partis ailleurs par rapport à certaines comparaisons européennes. Cela signifie qu'en n'étant pas très compétitif, dans un marché libéralisé, le service public a conservé de nombreux clients. Pourquoi ? Parce que les gens ne réfléchissent pas qu'aux prix, ils réfléchissent aussi aux services ! Et vous savez très bien qu'aujourd'hui, en matière de couverture de télécommunications, en matière de fiabilité et de qualité de services, Swisscom est encore nettement meilleure que ses concurrents ! Alors, décroissance, peut-être... mais pas sûr ! Parce que, la stratégie économique, c'est souvent un peu de la spéculation sur ce qui va se passer ou pas. Vous, vous prévoyez la décroissance en affirmant que peu à peu les clients vont partir en plus grand nombre... Vont-ils partir en plus grand nombre alors que, vraisemblablement, Swisscom va être de plus en plus en compétitive ? Alors que son réseau reste le meilleur ? Et alors que dans bien des pays d'Europe nous voyons des clients, ayant quitté le service public pour aller vers des opérateurs multinationaux, reviennent au service public parce que ce dernier est un gage de qualité ? Votre spéculation économique repose donc sur peu de comparaisons européennes et sur une spéculation qui me semble plus idéologique qu'économique.

J'ai entendu MM. Nidegger et Jeannerat nous dire qu'en fin de compte cela ne nous concerne pas, que cela concerne la Confédération... Excusez-moi, mais les intérêts des citoyens de ce canton en tant que clients des télécommunications et des nouvelles technologies, cela doit concerner un peu le parlement ! D'autant plus que Berne a demandé au canton de Genève son avis. Alors, soit le parlement dit que l'avis du canton de Genève ne concerne que le gouvernement et que, nous, cela ne nous regarde pas... Ce serait franchement minimiser ce parlement. Je pense que le parlement a un mot à dire ! Et quand le gouvernement donne un mot d'ordre qui ne correspond vraisemblablement pas à ce que pensent les Genevoises et les Genevois - qui ont eu l'occasion d'exprimer leur opinion lors de mobilisations dans leurs quartiers et suite à des votes précis sur le service public - eh bien, le parlement a le devoir de corriger les choses ! Aujourd'hui, si une majorité de ce parlement dit non à la privatisation, cela signifie que le message de Genève ne sera pas simplement celui du gouvernement, lequel ne reflète pas celui de la population !

Alors, vous avez essayé, les libéraux et l'UDC, de rassurer les gens en nous disant: «Oui mais, même si c'est totalement privatisé, il y aura une assurance de service universel.» Déjà, ce n'est pas une assurance de service public: le service universel, c'est un service minimum offert à chaque citoyen ! Que veut dire en matière de télécommunications «le service minimum» ? Je ne suis pas sûr que beaucoup de gens en aient la même définition... Et à Berne en tout cas pas ! Je peux vous dire que, très vite, il y aura une logique implacable de marché. C'est normal ! Et les régions les plus défavorisées de ce pays disposeront de communications de mauvais ordre, elles n'auront plus accès aux nouvelles technologies. Ce n'est pas le mode de développement dont nous avons envie pour ce pays ! Ce n'est pas le mode de développement dont nous avons envie pour certaines communes de ce canton, les communes dans lesquelles vous habitez. Et là, on va se marrer, parce que c'est un peu comme les postes... Les postes, quand elles ont été fermées en ville, on ne voyait pas beaucoup de députés de droite se mobiliser; mais quand elles ont commencé à être fermées dans les villages, alors, d'un seul coup, parce qu'il s'agissait de «ses» postes, la droite a commencé à se mobiliser ! (Remarques. Brouhaha.) Eh bien, au niveau des télécoms, c'est un peu le même cas de figure !

Et puis, ma conclusion se rapporte à l'intervention de M.  Jeannerat qui nous dit: «Ayez confianced: nous, nous faisons confiance aux bons radicaux qui défendent les intérêts des Suisses en matière de service public.» Alors, je lis la «Tribune de Genève» de ce matin et je vois que les bons radicaux - M. Merz, leur grand leader - déclarer: «La Confédération doit céder toutes ses parts.»... Ils sont en train de brader tout le service public un peu facilement ! (Exclamations.) Et moi je ne fais pas confiance à M. Merz. Et les Genevois et les Genevoises non plus, je crois ! (Applaudissements.)

M. Claude Jeanneret (MCG). Le groupe MCG va indiscutablement soutenir la demande d'amendement du PDC. Pour une raison très simple: nous sommes absolument convaincus que Swisscom est un service public. Or nous ne sommes pas convaincus que Swisscom ne doive pas céder une partie de ses parts, ne serait-ce qu'à des partenaires ayant éventuellement des technologies intéressantes et bien développées chez eux. Donc, il faut être un peu plus modéré quant au partage du capital. Par contre, nous partageons totalement l'idée que la maîtrise de la société doit rester suisse, parce que c'est un service public.

Je crois aussi que les bénéfices que Swisscom réalise maintenant ne sont pas nécessairement une preuve de bonne ou de mauvaise gestion. Lorsqu'on a la chance d'avoir un monopole, il est difficile de faire des déficits - ce n'est pas mon collègue Brunier qui va dire le contraire. Donc, ce qui me tarabuste un peu, c'est qu'il ne s'agit pas d'une question de profit ou de non-profit, c'est qu'il s'agit d'abord d'une société suisse qui rend un service au pays. Et je pense que le fait de partager son capital avec des gens ayant des compétences est séduisant. C'est la raison pour laquelle notre mouvement soutient complètement la motion PDC.

M. Yves Nidegger (UDC). Je voulais juste répondre à M. Christian Brunier, qui parle de mensonge économique, qu'une société se vend en bourse et que les gens qui achètent des actions le font parce qu'ils pensent qu'ils y gagneront de l'argent. Il peut très bien y avoir un pronostic économique défavorable pour l'avenir et une très bonne opération de bourse, pour autant qu'on la réalise au bon moment. Et il n' y a pas de mensonge économique à ce sujet, c'est maintenant qu'il faut vendre si l'on veut gagner de l'argent.

M. André Reymond (UDC). Je suis un peu étonné de voir que certains partis de gauche puissent, dans certains cas, se montrer nostalgique du passé. Je pense qu'il faut faire preuve de sagesse. Effectivement, Swisscom vaut quelque chose aujourd'hui et, à l'avenir, ce ne sera pas forcément le cas. Alors, que faire de ces milliards? Vous-mêmes - la gauche - vous demandez que l'âge de la retraite soit réduit... A un moment où tout le monde fait remarquer que l'on vit plus longtemps, puisque nous avons cette chance-là, il faudra peut-être augmenter l'âge de la retraite... Eh bien oui, peut-être que le groupe UDC proposera que ces milliards, par la vente de Swisscom, soient, éventuellement, non seulement affectés à la réduction de la dette mais entièrement versés à l'AVS ! (Remarques. Brouhaha.)

M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Loin des discours à caractère un peu posturaux que l'on a pu entendre autour de ce débat, le Conseil d'Etat a fait preuve d'un certain pragmatisme. D'un côté, il y a effectivement ce monde de la concurrence et d'une fantastique innovation technologique permanente en manières de télécoms, et, de toute évidence, rares sont les entreprises purement publiques qui sont à même de fournir la créativité nécessaire à l'essor de ces technologies. D'un autre côté, nous sommes attachés - tous, dans ce Conseil d'Etat - au service public. Il n'est pas question de privatiser complètement Swisscom. La question nous était posée, la réponse était claire: sans aucune ambiguïté, elle doit garder un pouvoir public qui exerce au minimum une minorité de blocage !

Une voix. Au minimum ?

M. Pierre-François Unger. Au minimum ! Au minimum une minorité de blocage ! Et cela pour une raison simple: la notion de service universel. Même si, Monsieur le député, je vous le concède, tout le monde en matière de télécommunications n'en aurait peut-être pas exactement la même définition. Il faut que le service public garde pour chacun et chacune des citoyens la possibilité de jouir de ce fantastique moyen de vivre ensemble qu'est celui de communiquer. La question que le Conseil d'Etat s'est posée est assez simple: pourrions-nous tolérer la faillite de Swisscom ? La réponse est clairement non ! Et quand on ne peut pas tolérer la faillite d'une entreprise, alors on ne peut la privatiser non plus ! Les choses sont assez simples et l'exemple de Swissair est éloquent à cet égard: à partir du moment où l'on privatisait cette entreprise, alors il fallait en accepter la faillite, ce que le Conseil fédéral de l'époque n'a pas su gérer en mettant encore quelques milliards pour une agonie qui n'en a que duré plus longtemps ! C'est exactement ce que nous ne voulons pas voir se reproduire.

Au fond, notre position n'est pas très éloignée de celle que, à n'en pas douter, vous allez prendre ce soir et nous accepterons volontiers de transmettre la position qui sera la vôtre. Parce que nous désirons un service universel, nous ne pourrions pas tolérer la faillite de Swisscom. Mais attention, au cas où il n'y aurait pas assez de possibilités d'innovation en matière de télécommunications, soyons - et soyez, vous qui êtes de fidèles défenseurs du service universel - attentifs à la politique des prix ! Parce que le fossé, à ce moment-là, ne se creuserait plus en raison de la distance de quelques zones éloignées, mais à l'intérieur même des zones urbaines, entre ceux qui peuvent payer et ceux qui ne le peuvent plus. Et à l'heure actuelle, les tarifs de Swisscom sont tels que beaucoup de gens doivent renoncer à un certain nombre des services qui sont offerts.

C'est pourquoi le Conseil d'Etat a défendu cette position, totalement pragmatique, qui n'est basée sur aucun dogme mais sur un principe de réalité que nous nous réjouissons de vous voir suivre.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous sommes maintenant en procédure de vote. La proposition de résolution fait l'objet d'une demande d'amendement. Nous allons voter d'abord l'amendement, puis la résolution, amendée ou pas.

La proposition d'amendement de M. Guy Mettan - vous l'avez reçue sur vos bureaux - comporte deux différences par rapport au texte: la première est qu'elle s'adresse au Bureau du Grand Conseil plutôt qu'au Conseil d'Etat; la deuxième est qu'elle introduit la notion de totalité de la cession au lieu de la majorité, soit: «... invite le Bureau du Grand Conseil à communiquer, aux autorités fédérales, le refus du parlement genevois de voir privatiser totalement Swisscom.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 49 oui contre 28 non et 4 abstentions.

Mise aux voix, la résolution 507 ainsi amendée est adoptée et renvoyée aux autorités fédérales par 42 oui contre 35 non et 4 abstentions.

Résolution 507

PL 9632-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Alain Charbonnier, Laurence Fehlmann Rielle, Roger Deneys, Jacques-Eric Richard, Loly Bolay modifiant la loi en faveur du développement de l'économie et de l'emploi (I 1 36)
Rapport de majorité de M. Pierre Kunz (R)
Rapport de minorité de M. Alain Charbonnier (S)

Premier débat

M. Pierre Kunz (R), rapporteur de majorité. Le débat politique relatif à la problématique du chômage ayant eu lieu à l'occasion du premier des projets de loi, je suppose que nous pouvons en venir à des choses un peu plus factuelles et je n'ai que ceci à dire: le projet de loi 9632 est un peu surprenant. Parce que ses auteurs, pour aider des entreprises en difficulté ou pour les attirer à Genève, entendent ni plus ni moins, réduire leur compétitivité en les obligeant à gérer leurs ressources humaines sur la base de critères ne répondant pas à une saine et efficace gestion mais à des préoccupations d'ordre social - certes tout à fait louables - mais qui ne sauraient entrer en premier lieu dans la vie des entreprises. Contrairement à ce que prétendent souvent les gens de gauche et les syndicalistes, les entreprises, Mesdames et Messieurs, ne sont pas des monstres froids conduits par l'égoïsme. Ces entreprises sont, le plus généralement, parfaitement conscientes de leurs responsabilités sociales et les assument chaque fois qu'elles le peuvent, c'est-à-dire quand elles sont en bonne santé.

Mais ici, on parle des entreprises en difficulté, en reconversion, d'une part, et de celles qu'on voudrait faire venir à Genève, d'autre part. Des entreprises qui, par conséquent, doivent absolument soigner leur efficacité avant toute autre considération si nous souhaitons qu'à terme elles produisent des emplois.

Alors, vouloir leur imposer de contribuer à la solution d'un problème, grave, certes, mais qui n'a rien à voir avec leur marché, c'est donc affaiblir ces entreprises et, par conséquent, c'est contre-productif.

Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, la majorité de la commission vous recommande de rejeter le projet de loi 9632.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur de minorité. Ce projet de loi 9632, M. Kunz le sait très bien, n'intéresse pas du tout les entreprises en difficulté qui, évidemment, font partie de la loi-cadre en faveur du développement de l'économie et de l'emploi que nous touchons par ce projet. En fait, il intéresse essentiellement les entreprises en très bonne santé, qui bénéficient malgré tout d'encouragements et de cadeaux fiscaux très importants de la part de l'Etat de Genève pour qu'elles s'installent à Genève.

Il faut quand même donner un ou deux chiffres. En 2003, le Conseil d'Etat, en répondant à une interpellation urgente d'un député de notre groupe, a déclaré qu'en 2003 sur 794 emplois attendus et pour un montant de 38 765 000 francs d'allégements fiscaux - je dis bien: 38 765 000 francs - seuls 108 emplois ont été effectivement créés. En commission, nous avons demandé au responsable de l'office cantonal de l'emploi en charge du lien avec les entreprises nouvellement installées à Genève quel était le nombre de personnes au chômage ayant été engagées par ces entreprises: il a été incapable de nous répondre, nous disant qu'il ne disposait pas de ces chiffres et ne tenait pas ces statistiques-là.

Donc, nous pensons que notre projet de loi a tout son ancrage et son bien-fondé. Pour ces entreprises qui bénéficient en une année, je vous le rappelle, de 38 millions d'allégements fiscaux, ce que nous proposons, ce n'est pas du tout de leur imposer quoi que ce soit. Cela, M. Kunz le sait d'ailleurs très bien, mais, depuis le début des travaux concernant ce projet de loi - que nous avions déposé, il y a déjà quelques années - il fait décidément exprès de nier l'évidence... A l'article 2A, alinéa 1, il est écrit: «Afin de pouvoir bénéficier des possibilités prévues aux chapitres III et IV de la présente loi, les entreprises et industries négocient et signent avec l'Etat un contrat stipulant le montant et la nature de l'aide fournie ainsi que les engagements de l'entreprise notamment à:...»; de plus, il y a une liste où l'on peut lire: «a) donner la préférence à l'engagement de demandeurs d'emploi; b) développer des places d'apprentissages... », et puis: «d) prendre des mesures actives pour l'intégration professionnelle des personnes souffrant d'un handicap». Nous pensons que cela représente un minimum lorsque l'Etat de Genève accorde de pareilles largesses et que les entreprises sont très intéressées à s'installer à Genève pour de multiples raisons. Et ce n'est pas cette négociation, je parle bien de négociation et pas du tout de contrat imposé par l'Etat... En fait, c'est une incitation forte de l'Etat de Genève envers ces entreprises, qui reçoivent ces cadeaux de la population - parce que, finalement, c'est avec l'argent du contribuable que ces 38 millions, en 2003 par exemple, sont passés à la trappe, donc dans l'escarcelle de ces entreprises, indirectement - et nous pensons que la moindre des choses est qu'elles participent à un tel effort... (Remarque de M. Pierre Kunz.) ... eh oui, à un effort, peut-être social, Monsieur Kunz ! Mais le social existe et il a un coût ! Et nous pensons que ces entreprises peuvent participer !

M. Roger Deneys (S). Avant de parler de ce projet de loi, j'aimerais quand même revenir sur ce qui s'est passé tout à l'heure avec le projet de loi précédent et notamment sur la façon dont vous avez clos les débats, Monsieur le président.

Tout d'abord, j'aimerais dire que, lorsqu'il y a une demande de renvoi en commission, il me semble légitime de la formuler à un moment ou à un autre du débat, parce que des arguments peuvent être avancés par l'un des groupes en présence et que manifestement, dans certains cas, il y a des groupes qui n'ont pas très bien compris le projet de loi en question. Je pense ici au MCG qui, tout à l'heure, a fait référence, pour s'opposer à notre projet de loi, aux emplois temporaires - Mme Borgeaud - et au fait que l'aide devait être apportée plus tôt - M. Jeanneret. En l'occurrence, ils parlaient d'autre chose: ils parlaient de la loi fédérale et des emplois temporaires cantonaux, ce qui n'était pas le cas avec notre projet de loi. Simplement, ç'eût été la moindre des choses que de leur expliquer qu'en commission nous aurions pu reprendre cela avec eux - ces personnes n'étant pas là lors de la précédente législature - et il aurait été possible de discuter peut-être plus à fond de ce qu'ils ne connaissent manifestement pas très bien. Et là, ils ne servent pas tellement les intérêts des Genevois sur ces questions de chômage !

Pour le reste, cela m'a empêché, Monsieur le président, de demander le vote nominal sur cet objet, ce que j'aurais souhaité. Parce que vous avez quand même procédé au vote alors que nous n'avions pas pu nous exprimer et que M. Hodgers et moi-même étions inscrits. Et je le déplore.

Pour terminer, je tiens aussi à rappeler que lors des discussions sur le projet de loi qui a été voté l'année dernière en avril, M. Pétroz, en tant que président de ce Grand Conseil, avait adopté un peu la même attitude dans le débat du Grand Conseil. C'est-à-dire qu'il avait clos la liste des intervenants relativement tôt - comme vous venez de le faire, Monsieur le président ! Et sur ces questions de chômage, qui touchent, je vous le rappelle, plus de 20 000 personnes à Genève, je trouve cela particulièrement dommage. Parce qu'il s'agit d'un sujet vraiment grave, qui mérite des discussions approfondies, et également que l'on puisse se répondre et expliquer le pourquoi et le comment de nos positions. Je déplore donc cette façon de procéder.

Ensuite, pour rester dans les questions de procédure, j'aimerais revenir sur la qualité du rapport. Je m'adresse ici à M. Weiss - mais il ne m'écoute pas pour le moment... Monsieur Weiss, tout à l'heure, vous m'aviez invité à relativiser la portée de mes propos concernant la qualité insuffisante du rapport de M. Kunz, en disant que certaines fois les rapports socialistes étaient peut-être eux aussi insuffisants... En ce qui me concerne, j'aimerais que l'on distingue bien deux choses: nous ne sommes pas tous pourvus des mêmes compétences en matière de rédaction, d'esprit de synthèse, et, donc, les uns et les autres nous préparons les rapports avec nos moyens individuels... Et il peut arriver que ces rapports soient considérés comme insuffisants parce qu'ils ne relatent pas complètement tous les aspects d'un travail en commission - cela peut être insuffisant au niveau de la syntaxe, de la grammaire, des expressions, etc. Néanmoins, ce n'est pas de cela que je parle, Monsieur Kunz et Monsieur Weiss: c'est de la qualité insuffisante du rapport de M. Kunz en ce qui concerne les auditions ayant été menées sur ces projets de loi. Et quand on auditionne onze personnes, le minimum est de relater les propos de ces onze personnes ! Et pas simplement les phrases qui intéressent M. Kunz, surtout quand un vote a lieu à sept contre sept. Je voulais donc préciser cela.

Pour revenir au projet de loi qui nous concerne maintenant - et là, je voudrais que le MCG écoute aussi, parce qu'il n'a pas l'air d'avoir lu très attentivement ces projets de loi - il s'agit des conditions dans lesquelles le canton de Genève octroie des avantages, en termes de terrains ou en termes fiscaux, aux entreprises qui viennent s'établir à Genève. Et là, on parle souvent de multinationales.

M. Kunz, à la page 3 de son rapport, évidemment, dit qu'il s'agit de diktats... Or tous les observateurs et connaisseurs de la vie des entreprises privées savent qu'aucune d'entre elles ne peut survivre si elle accepte ce genre de diktats. Mais, comme l'a relevé M. Charbonnier dans son excellent rapport et dans son intervention précédente, il ne s'agit pas de diktats: parce que si vous lisez l'article 2A «Conditions de l'aide étatique», il est bien indiqué au début : «Afin de pouvoir bénéficier des possibilités prévues aux chapitres III et IV de la présente loi, les entreprises et industries négocient et signent avec l'Etat un contrat stipulant le montant de la nature de l'aide fournie ainsi que les engagements de l'entreprise...». Donc, dans ce sens-là, c'est une négociation, Monsieur Kunz ! Nous demandons que l'Etat agisse de façon systématique pour promouvoir, lorsqu'il accueille des entreprises venant de l'extérieur, les emplois du marché genevois. Concernant donc des Genevois au chômage, des jeunes en formation et des apprentis. Et nous aimerions être sûrs que cela soit fait de façon systématique ! Parce que, M. Lamprecht l'avait évoqué à l'époque, de même que la promotion économique, cela se fait déjà ! Mais nous n'avons pas de garanties que cela se fasse de façon systématique. Et ce n'est pas parce qu'un journal de la place peut annoncer qu'une entreprise engage quelques personnes venant de l'office cantonal de l'emploi - ce dont on peut se féliciter au demeurant - que cela nous rassure vraiment lorsque l'on sait que le chômage touche plus de 20 000 personnes ! Ce qui nous intéresse, c'est que cela soit fait de façon systématique et que, quand on accueille une entreprise étrangère, on lui parle des problèmes d'emploi à Genève - des personnes extrêmement compétentes qui sont au chômage - et qu'on fasse, si possible, en sorte que ces entreprises les engagent. J'aimerais vous rappeler, Monsieur Kunz, que le chômage, dans les comptes 2005 que nous avons reçus ce matin, c'est 47,9 millions de plus que prévu par rapport au budget !

Une voix. C'est la faute à qui ?

Roger Deneys. Par rapport au budget ! Donc, dans ce sens-là, si nous accueillons des entreprises en leur concédant des avantages fiscaux, il paraît normal que nous essayions de faire en sorte que ces entreprises engagent des chômeurs. Je rappelle que ce projet de loi vise à ce qu'un contrat soit signé entre l'Etat de Genève et les entreprises, ce n'est pas une obligation...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

Roger Deneys. ... c'est une négociation. Donc, je vous invite à soutenir ce projet de loi. Je vous remercie.

Le Président. Merci, Monsieur le député. Je signale quand même, puisque la question a été posée, que les personnes s'exprimant dans ce débat sont au nombre de douze, c'est-à-dire un huitième de l'assemblée, et que, sur ce nombre, cinq d'entre elles sont des porte-parole du groupe socialiste. Le Bureau n'a donc pas l'impression d'avoir brimé quiconque.

M. Christian Bavarel (Ve). Je vais revenir sur ce que vient de dire M. Deneys. Il est vrai que j'aurais été très intéressé de pouvoir lire dans le rapport ce qu'avait déclaré M. Christophe Dunand, directeur de l'Association Réalise, M. Stéphane Tanner, directeur des affaires juridiques et fiscales d'UDF, Mme Eliane Barras, directrice de l'office du personnel de l'Etat, le professeur Yves Flückiger, directeur de l'Observatoire Universitaire de l'Emploi, M. Jean-Charles Magnin, directeur des affaires économiques du DEEE, M. Pierre Jacquet, délégué de l'Office de la Promotion Economique, de M. Neil Ankers, directeur de l'office cantonal de l'emploi. (Remarques.) Malheureusement, je n'étais pas en commission ! J'y ai siégé quatre ans, mais, là, je n'y étais pas. Et je ne trouve rien dans ce rapport - qui fait six pages. Je dois dire que pour prendre des décisions, c'est quelque peu compliqué avec un rapport aussi succinct ! Je suis désolé, Monsieur Kunz, j'ai vraiment de la peine avec des rapports de ce type-là, d'autant plus qu'il y a cinq séances et que les jetons de présence du rapporteur sont en proportion du travail effectué en commission... (Remarques. Brouhaha.) Cela, c'est simplement sur la forme.

Sur le fond, pour nous, les Verts, ce projet de loi propose quelque chose d'assez intéressant: on aide les entreprises qui ont une attitude sociale plus responsable. Peut-être que le texte ne vous convenait pas parfaitement - mais on est face à une non-entrée en matière. Pourtant, l'idée ne me semble pas choquante: elle consiste à aider les entreprises ayant une attitude responsable face aux difficultés sociales de ce canton. Je vous rappelle simplement que, si l'on avait un taux de chômage équivalent aux autres cantons suisses, nous n'aurions pas de problèmes de finances publiques dans ce canton ! Le sujet vaut simplement la peine d'être étudié, et sérieusement, ce qui me semble être le travail du législateur. Alors, je suis un peu surpris que les choses se fassent comme ça...

Lors du dernier débat, j'ai entendu quelques contrevérités par rapport à ce qui s'est passé en commission en ce qui concerne la loi sur le chômage. Je tiens a rappeler que j'y ai présidé une partie des travaux et que j'ai eu la grande chance de pouvoir aller discuter, suite à ces derniers, avec les syndicats ouvriers, où tout le monde reconnaît que la loi sur le chômage actuelle n'est pas bonne, et nous devons aujourd'hui arriver à une meilleure solution. Mais une vision jusqu'au-boutiste - où je dirai que certains tenants d'un libéralisme pur et dur ont voulu décrire le catéchisme du libéralisme et voir si cela pouvait, par hasard, fonctionner dans la réalité - tend à l'imposer dans un canton qui vit, lui, dans un monde réel. Alors, je vous demanderai d'avoir un autre type d'attitude - et une attitude responsable. Une attitude qui soit conforme à notre démocratie semi-directe - ce qui signifie qu'il y a un risque de référendum - et proportionnelle - ce qui signifie aussi que des positions pures et dures et jusqu'au-boutistes ne marchent pas - mais que l'on cherche à avoir une attitude... Qui est celle du gouvernement actuel, n'est-ce pas ? - Une attitude que l'on ressent très clairement... (Remarque.) ... dans le gouvernement actuel, et qui est beaucoup plus constructive.

C'est pourquoi je vous demanderai simplement de prendre la peine d'effectuer le travail du législateur qui nous a été confié par la population et de renvoyer ce projet en commission, de sorte que l'on puisse obtenir un rapport complet sur les auditions, une entrée en matière et un travail réel accompli par une commission qui travaille. (Applaudissement.)

Le Président. Merci, Monsieur le député. J'ai bien entendu: vous demandez le renvoi en commission. Nous allons donc procéder à une prise de parole par groupe, puis nous voterons sur le renvoi en commission puisque nous sommes dans les débats et pas encore dans la procédure de vote.

M. Gilbert Catelain (UDC). La commission de l'économie a traité cet objet l'automne dernier et je comprends parfaitement la difficulté pour le rapporteur de rédiger un rapport totalement exhaustif, dans la mesure où les auditions ont eu lieu sur quatre objets simultanés, à savoir les projets de loi 9624, 9625, 9631 et 9632. Et les interventions des personnes auditionnées se sont plutôt axées sur l'un ou l'autre des projets de loi, et pas particulièrement sur le projet 9632A qui nous est soumis ce soir. Sur cette base là, et comme j'ai encore relu en partie les procès-verbaux, je peux vous dire qu'un renvoi en commission ne me paraît pas très utile, et ce d'autant moins qu'il me semblerait assez déplacé de redemander à ces personnes de venir donner leur avis sur un projet de loi qu'ils ont déjà commenté en partie. Je rappelle que la prise de position des personnes auditionnées était directement dépendante des questions des commissaires, question qui ne traitaient pas forcément de ce projet de loi spécifique.

Pour en revenir au projet de loi et pour argumenter le non-renvoi en commision, je dirai la chose suivante: effectivement, les buts défendus par le projet de loi socialiste sont tout à fait louables, puisqu'il est question de favoriser le développement de l'activité économique, puisqu'on nous dit qu'il faut que l'Etat s'efforce de mettre en place des conditions-cadres attractives, notamment en matière d'infrastructures. Et quand on me dit «infrastructures», cela signifie: la traversée de la Rade, une troisième voie sur l'autoroute, des conditions de circulation optimales... Tout ce que ne veut pas le parti socialiste ! (Remarques. Brouhaha.)

Ensuite, pour favoriser ce développement économique, le parti socialiste nous dit qu'il faut conditionner l'action de l'Etat à des principes, notamment celui du développement durable, avant de favoriser l'implantation des entreprises. Mais si je suis chômeur, «je m'en tape», du développement durable ! Ce que je veux, c'est un emploi, quel qu'il soit ! Même si le développement durable est en soi un concept que nous devons favoriser, ce qui compte pour le chômeur, c'est un emploi ! Et le développement durable vient eu deuxième position.

Les conditions de l'aide étatique fixées pour accueillir ces entreprises ressemblent à un boulet que l'on va attacher à leur pied ou à une sorte d'épouvantail qui va les faire fuir vers d'autres cieux fiscaux assez avantageux - qui va les faire fuir vers l'Axe lémanique... Il faut savoir que des communes comme Gland, Nyon et Morges développent des zones économiques importantes pour permettre l'implantation de ces entreprises et que nous sommes en concurrence directe avec ces dernières. Je rappelle que la FIFA a créé 140 emplois dans le cadre de l'Eurofoot 2008, et que ces 140 emplois ne se sont pas créés à Genève ! Mais en grande partie dans le canton de Vaud.

Donc, oui à la création d'emplois ! Oui au développement économique ! Oui aux mesures qui vont permettre de favoriser l'implantation de ces entreprises ! Mais non aux conditions-cadres qui plombent leur compétitivité et, finalement, les incitent à aller voir si l'herbe est plus verte dans le canton voisin !

Pour tous ces motifs, je vous propose de ne pas renvoyer ce projet de loi en commission et de le refuser.

M. François Gillet (PDC). Au nom du groupe démocrate-chrétien, je voudrais vous dire tout d'abord que - comme les auteurs de ce projet de loi - nous soutenons évidemment toute mesure qui pourrait aller dans le sens de la réinsertion des chômeurs du canton, dans les meilleures conditions possible et au plus vite.

Comme les auteurs de ce projet, nous pensons qu'il est important de tout entreprendre pour créer de nouvelles places d'apprentissage à Genève. Simplement, nous pensons - et nous l'avons dit d'ailleurs en commission de l'économie - que des mesures partielles touchant notamment à l'emploi et au chômage ne sont pas souhaitables en ce moment. Nous devons tout faire pour avoir une vision d'ensemble de la problématique et pour éviter que des mesures partielles, prises à court terme, entrent en contradiction avec la politique générale. Raison pour laquelle nous soutenons le point de vue du président Longchamp qui nous a déclaré tout à l'heure vouloir nous présenter le plus rapidement possible une politique générale de l'emploi à Genève. Nous sommes convaincus que les propositions faites ce soir peuvent tout à fait entrer dans la réflexion globale sur l'ensemble de la loi, mais nous pensons qu'il est inopportun de nous focaliser ce soir sur un aspect très partiel de cette réalité de l'emploi.

S'agissant de mesures incitatives destinées aux entreprises afin de favoriser la création de places d'apprentissage, là aussi, comme il nous l'a été indiqué récemment en commission de l'enseignement, le parlement sera nanti sous peu d'une révision de la loi sur la formation professionnelle. (Brouhaha.) Dans ce cadre, il sera évidemment essentiel de trouver de nouvelles mesures susceptibles d'inciter les entreprises à engager des apprentis. Mais, là encore, il est, à nos yeux, nécessaire de raisonner sur l'ensemble de la problématique et non pas d'intégrer seulement certains aspects liés à l'incitation à la création de places d'apprentissage.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe pense que les préoccupations évoquées sont légitimes et importantes mais qu'il est inopportun de nous engager sur cette voie partielle, que ce soit pour la réinsertion des chômeurs ou pour la création de places d'apprentissage.

M. Christian Brunier (S). Je pense qu'il faudrait se promener un peu en Europe ou en Suisse allemande. Visiblement, il y a une majorité de parlementaires, en tout cas à droite, qui sont choqués du fait que, lorsqu'on fait de la «promo» économique, on fait des cadeaux fiscaux à des entreprises pour qu'elles s'implantent à Genève... Eh bien, que l'on fixe un minimum de conditions à leur implantation, cela choque visiblement les parlementaires ici présents ! Mais partout, dans la plupart des villes européennes, dans la plupart des villes en Suisse allemande - et, Monsieur Kunz, vous qui avez été un haut cadre du groupe Migros, vous devez le savoir: vous savez très bien que lorsque une Migros s'installe dans certaines villes de Suisse allemande, eh bien, les villes vont attirer ces supermarchés ! Mais elles vont poser un sacré nombre de conditions en matière d'urbanisation, de transports, d'emplois... Et pourtant la Migros s'implante ! Vous voyez donc bien que lorsque vous faites preuve d'imagination au niveau de la «promo» économique, vous pouvez poser des conditions. Je rappelle le chiffre qui a été donné par M. Charbonnier - mais ce chiffre a été communiqué par le Conseil d'Etat, suite à l'une de mes interpellations: en 2003, Genève a fait pour 38 millions de cadeaux fiscaux à des entreprises. En échange, elles s'étaient engagées à créer 794 emplois. Elles n'en ont créés qu'une centaine ! Une centaine, et le canton ne réagit pas, «c'est normal»... On a été trompés sur le «deal» à un moment donné, et il n'est pas acceptable que l'on fasse des cadeaux fiscaux représentant 38 millions de francs, pour, finalement, quelques créations d'emplois ! On doit être plus exigeants en matière de promotion économique.

Vous savez très bien qu'il y a beaucoup d'entreprises qui veulent s'établir à Genève... Et nous avons le choix. Par quel critère devons-nous trier ? Par l'apport en matière économique, en matière sociale et en matière environnementale ! On n'arrête pas de parler de développement durable, mais on fait venir des entreprises qui génèrent peu d'emplois, qui engendrent une urbanisation importante et des transports à n'en plus finir... Quel est le gain pour les Genevoises et Genevois lorsqu'on établit une telle promotion économique ? C'est pas lourd... En plus, ce sont des entreprises qui, après avoir bénéficié de cadeaux fiscaux, parfois délocalisent... Eh bien, on peut être plus exigeants ! Il faut croire en Genève et en notre capacité à attirer des entreprises - nous avons de nombreux atouts, et vous le savez très bien. D'ailleurs, lorsque vous ne faites pas de politique, dans vos publications de la Chambre de Commerce ou des Syndicats patronaux vous n'arrêtez pas de vanter les mérites de Genève: il y en a plein, et vous avez raison ! Or quand vous vous exprimez ici, en politique, d'un seul coup Genève n'a plus aucun mérite et il faut quasiment se coucher devant les entreprises pour les faire venir... Eh bien, non ! Je suis persuadé que l'on peut trouver des entreprises plus qualitatives, qui apportent beaucoup plus aux Genevoises et Genevois - c'est quand même le rôle du canton - et qui créent beaucoup plus d'emplois... (Remarque.) Qui créent beaucoup plus d'emplois ! Le retour sur investissement de notre promotion économique en termes de création d'emplois et de bien-être à Genève n'est pas satisfaisant. Et, Monsieur Longchamp, si vous menez une politique plus active en matière d'emplois - et je m'en réjouis - j'espère que vous aurez aussi une politique plus active en matière de promotion économique. Or «plus active» ne veut pas dire qu'on attire tout et n'importe quoi. Mais, tout simplement, on a des critères qualitatifs en matière de développement durable et en matière d'emplois. Et quand on donne 38 millions aux entreprises, il est normal que l'on soit exigeants et qu'on leur demande de créer un minimum d'emplois...700 emplois pour 38 millions... Je vais vous dire: vous pouvez payer les chômeurs avec 38 millions! (Brouhaha. Remarques.) Tout à fait !

Donc, soyons un peu plus fiers de Genève ! Utilisons tous les atouts que nous avons pour attirer ces entreprises - certains secteurs font quasiment la queue pour venir à Genève, et vous le savez très bien. Alors, exigeons un peu plus en termes d'emplois, je crois que c'est le minimum lorsque l'on utilise les deniers publics de la sorte !

M. Jacques Jeannerat (R). Le groupe radical s'opposera au renvoi en commission pour la simple et bonne raison que ce projet de loi, même s'il part d'une bonne intention, est dangereux. Il est dangereux parce qu'il nie complètement les fondements de l'économie de marché et de la libre entreprise.

Par ailleurs, j'ai beaucoup apprécié les leçons d'arithmétique de nos camarades socialistes. M. Brunier essaie de nous dire qu'avec 38 millions de francs, nous pourrions payer plein de chômeurs... Mais si nous n'avions pas fait ces cadeaux à ces entreprises-là, elles ne seraient simplement pas venues à Genève, Monsieur Brunier ! Elles seraient allées ailleurs ! (Remarques.) C'est l'inverse: nous aurions perdu de l'argent ! Quant à la leçon d'arithmétique de M. Charbonnier, rapporteur de minorité... Au fond, c'était le plan d'une usine à gaz qui, de toute façon, aurait nécessité l'engagement d'une dizaine de fonctionnaires - si ce n'est plus - pour garantir son fonctionnement - et sans garantie de résultats à la clé !

Le gouvernement, par la voix de François Longchamp, nous a dit tout à l'heure qu'il allait déposer un projet de loi pour revoir tous les fondements de la loi sur le chômage: eh bien, ne venons pas polluer l'intention du gouvernement avec une mesure isolée, dont on ne connaît même pas l'efficacité !

M. Pierre Weiss (L). Je pense qu'il est toujours intéressant d'entendre, en matière de développement d'économie de marché, le représentant d'un monopole étatique donner des leçons à ce parlement... (Exclamations.) Et de ce point de vue-là, l'exposé de M. Brunier a été totalement éclairant sur la façon dont il convenait de ne pas procéder au développement économique de ce canton.

Au fond, la question qui nous est posée ici est de savoir si nous voulons renvoyer ce projet de loi dans une commission, celle de l'économie, pour qu'elle y reçoive un traitement plus complet. En lisant le rapport, elliptique d'ailleurs, du rapporteur de minorité M.  Charbonnier, on comprend néanmoins que le projet de loi en question ne développe l'idée que d'inciter des entreprises et aucunement à rendre obligatoires les mesures proposées. Ce rapport est suffisamment explicite en lui-même, comme d'ailleurs celui du rapporteur de majorité, notre collègue Pierre Kunz, pour comprendre qu'un renvoi en commission n'apporterait rien de plus - compte tenu des nombreuses auditions qui ont été rappelées tout à l'heure par notre collègue des Verts - à notre compréhension du sujet et à notre appréciation des choses.

Une question, évidemment, n'a pas été traitée ce soir, bien qu'elle puisse susciter nos interrogations: les mesures proposées sont-elles conformes aux accords bilatéraux ? Je crois que, de ce point de vue-là, effectivement, on pourrait donner une réponse. La réponse est négative. Au fond, nous avons affaire ici à un rapport dont je dirai que, s'agissant du chômage, il montre que l'enfer du chômage est pavé de bonnes intentions - ces bonnes intentions cumulatives - mais qui, en définitive, rendent toute création d'entreprises quasiment impossible, voire paralysent l'action des entrepreneurs potentiels.

Quand il s'agit - je ne fais que me référer à la lettre de l'article 2A, «Conditions de l'aide étatique» - de voir que l'aide étatique en question ne pourrait être apportée que si l'on donnait la préférence à l'engagement de demandeurs d'emploi, que si l'on développait des places d'apprentissage... (Protestations.) ... que si l'on prenait des mesures actives pour la mise en oeuvre de la loi fédérale sur l'égalité... (Exclamations.) ... que si l'on prenait des mesures actives pour l'intégration professionnelle des personnes souffrant d'un handicap... (Protestations.) ...  et que si l'on respectait scrupuleusement les normes environnementales, eh bien, on se rend compte qu'en réalité une chape est mise sur les possibilités de création d'entreprises par le biais de l'aide étatique ! En qu'en d'autres conditions non seulement le projet de loi en question serait inopérant, mais, qui plus est, le renvoi en commission démontrerait cet aspect inopérant, comme d'ailleurs le rapport de majorité le rappelle «d'abondance», si j'ose dire...

En d'autres termes, cette mise en cause de la politique économique menée par le gouvernement me semble totalement superflue. Il a été dit qu'une remise à plat allait être effectuée; sur ce point aussi, nous pouvons encore développer quelque patience - une patience à l'égard du gouvernement, une impatience à l'égard de ceux qui proposent le renvoi en commission. Le groupe libéral s'y opposera.

Mme Sandra Borgeaud (MCG). Nous avons, le MCG, déposé une motion d'urgence pour traiter du problème des OCE, sujet qui vous occupe visiblement beaucoup, vu le temps qu'on lui consacre. Mais vous l'avez refusée. Où est la cohérence ?

Les OCE sont des esclaves des temps modernes - payés par le chômage pour certains, c'est la moitié d'un salaire de fonctionnaire. Cette mesure cantonale est créée pour une formation et une possibilité de retour à l'emploi. Or, on ne les forme pas et le travail est incommensurable, il n'y a pas de personnel adéquat. Le plan quadriennal n'est pas respecté. Il s'agit d'engager en priorité, en ce qui concerne l'Etat, les internes qui veulent une mutation ou un poste plus intéressant, ensuite les chômeurs, puis les personnes externes. Sur trente OCE, on s'aperçoit qu'à peu près trois arrivent à obtenir un poste six mois ou plus à la fin de leur contrat. Pour le reste, il s'agit trop souvent de personnes externes. Pourquoi ? Les OCE sont de bons éléments pour bon nombre d'entre eux. Quant aux allocations de retour à l'emploi, elles sont normalement une bonne solution, mais les patrons en profiten, malheureusement, et licencient les employés une fois que les prestations ne sont plus payées par l'Etat, c'est-à-dire un an après.

Le MCG ne soutiendra pas ce projet de loi et attend le projet de loi du Conseil d'Etat en qui il place sa confiance.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur de minorité. Finalement, j'apprécie M. Kunz ! Parce que, même si ses rapports sont un peu succincts et ne reflètent pas tout à fait les débats de la commission, il a au moins l'honnêteté de dire ce qu'il pense vraiment. Contrairement à M. Weiss qui s'amuse à ne lire, tout à fait délibérément, que la moitié des articles. Donc, je ne reviendrai pas sur ce qu'il a fait tout à l'heure, sa démonstration est d'une petitesse qui nous en dispense.

M. Pierre Weiss. Non... (Brouhaha.)

M. Alain Charbonnier. Mais je reviens sur les déclarations de M. Kunz. Déjà en 1997, dans son rapport de minorité par rapport à la loi sur le chômage et les mesures cantonales, M. Kunz avait écrit - ce qui nous permet bien de voir de quel bois il se chauffe, tout comme ses «camarades», si j'ose dire... Donc, il avait écrit: «Pourquoi le chômeur en fin de droit, qui est manifestement perçu par un employeur potentiel comme un travailleur ayant perdu une partie de son efficacité, qui doit se reformer, n'accepterait-il pas lui-même le sacrifice salarial requis pour sa réinsertion sur le marché du travail ?» Donc, on voit bien de quel bois se chauffent ces gens ! Ils pensent que, finalement, c'est au chômeur de payer, autant de sa personne qu'au niveau financier, pour sa réinsertion sur le marché du travail... Alors, quand on fait un cadeau de 38 millions aux entreprises - certes, elles apportent quelque chose en retour à l'économie genevoise - eh bien, en regard de ces 38  millions, nous pensons que le minimum serait qu'elles soient incitées - «incitées», Monsieur Weiss; je souligne ce terme pour vous: «incitées», et rien d'autre ! - à engager des chômeurs, à créer des places d'apprentissage et des places de stage et, éventuellement, à engager des personnes handicapées. Voilà !

Le président. La parole va être donnée à M. Pierre Kunz. Monsieur Weiss, vous avez demandé la parole parce que vous avez été insulté. Je vous en donne acte, vous l'avez été deux fois... (Remarques.) Vous avez été traité de menteur et d'avoir fait preuve de petitesse, en conséquence de quoi... (Exclamations.) Laissez-moi terminer ! J'estime que vous avez été malmené: je le dis. Je considère que, d'une manière générale, ce sont ceux qui recourent à l'offense qui se font du tort à eux-mêmes et à la crédibilité de leur débat... Donc, je juge inutile de vous redonner la parole sur ce sujet. (Rires.)

M. Pierre Kunz (R), rapporteur de majorité. Je voulais juste faire remarquer à mon interlocuteur, M. Charbonnier, qui reproche à M. Weiss de sortir, paraît-il, certains propos du contexte dans lequel M. Charbonnier aurait aimé les voir placés... Dans sa citation, M. Charbonnier a tout simplement éludé une partie de la vérité. A savoir que les propos qu'il m'a attribués concernaient les chômeurs après une année d'emplois temporaires...

M. Alain Charbonnier. Allocations de retour en emploi !

M. Pierre Kunz. ...et que ces informations faisaient le parallèle avec ce qui se passe dans les vingt et quelques autres cantons suisses.

M. Alain Charbonnier. Les «allocations de retour en emploi», ce n'est pas la même chose !

Le président. Je rappelle qu'une fois le débat engagé sur le renvoi en commission, on est supposé ne parler que de cela ! Cela vous expliquera pourquoi il me faut, de temps en temps, faire preuve d'un peu d'impatience.

M. François Longchamp, conseiller d'Etat. J'ai esquissé tout à l'heure, au nom du Conseil d'Etat, les grands axes de la politique d'emploi que le gouvernement appelait de ses voeux et vous présenterait à la rentrée. Vous aurez noté que les mesures proposées dans le projet de loi que vous êtes en train de traiter n'y figuraient pas. Nous avons sciemment souhaité qu'elles n'y figurent pas. Le Conseil d'Etat estime que les conditions qui sont aujourd'hui liées à l'efficacité de la promotion économique doivent supposer une souplesse, de même que la reconnaissance d'une concurrence extrêmement vive dans ce secteur entre les différents pays et les différents cantons qui disposent d'une politique de promotion économique. Il n'est donc pas raisonnable de vouloir, dans une loi, lier les conditions de la promotion économique à celles que vous proposez.

Cela étant, le Conseil d'Etat, sensible à cette situation, a tout récemment modifié sa pratique en matière d'octroi d'exemptions ou d'avantages fiscaux pour les entreprises, en rappelant, dans les documents qui scellent ces exemptions fiscales, la nécessité pour ces entreprises de veiller à l'engagement de collaborateurs et de collaboratrices genevois, et notamment, de chômeurs lorsque cela est possible.

Mesdames et Messieurs les députés, c'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous demande de refuser le renvoi en commission et, aussi, ce projet de loi.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9632 en commission est rejeté par 59 non contre 30 oui.

Mme Loly Bolay (S). Je regrette que la demande de renvoi en commission de ce projet de loi n'ait pas été acceptée. Beaucoup de choses ont été dites ce soir et il nous semble - pour le groupe socialiste - que ce projet de loi s'inscrit dans la même logique, dans la même ligne, que l'autre. C'est-à-dire qu'il reflète notre souci de la situation actuelle de l'emploi à Genève. Nous l'avons relevé tout à l'heure, il n'existe aujourd'hui aucune corrélation entre les allégements fiscaux et la création d'emplois des entreprises.

J'aimerais ici, si vous me le permettez, Monsieur le président, raconter ce qui s'est passé en avril 1997 dans une entreprise dans laquelle je travaillais: elle a licencié vingt-et-une personnes, qui se sont retrouvées au chômage - cette entreprise est une grande multinationale française, très connue, qui réalise des millions voire des milliards des bénéfices. Vingt-et-une personnes, dont des cadres, ont été condamnées à rechercher un emploi alors qu'en même temps cette société - son secteur financier - est venue à Genève s'installer à la rue du Rhône: elle y est venue avec tout son staff de Paris, elle n'a créé aucun emploi, et elle s'est vu offrir par l'Etat de Genève des propositions d'allégements fiscaux alors qu'elle n'en avait même pas demandé... C'est vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, si notre projet de loi vise la cible: il veut précisément que les allégements fiscaux accordés le soient pour les entreprises qui engagent des chômeurs !

Je suis étonnée de ne pas entendre ici les représentants des Syndicats patronaux, ceux-là mêmes qui se font souvent du souci pour les PMI-PME dont on sait aujourd'hui qu'elles n'arrivent pas à trouver des financements. Mesdames et Messieurs les députés, combien y a-t-il de petits entrepreneurs qui se lancent en tant qu'indépendants, et qui ne réussissent pas du tout parce qu'ils ne trouvent pas de financements ? Certains nous disent - je suis sur le terrain et je le sais - qu'ils aimeraient bien - parce qu'ils sont eux-mêmes conscients qu'il y a un problème - engager des chômeurs mais qu'ils n'ont pas du tout la possibilité de le faire et que, si l'Etat les aidait, eh bien, ils entreraient dans cette logique !

Mesdames et Messieurs, vous n'avez pas voulu que l'on renvoie ce projet de loi en commission, mais j'ai bien entendu M. le conseiller d'Etat. Monsieur le conseiller d'Etat, je vous remercie: malgré tout, vous nous avez dit des mots encourageants et je sûre qu'il vous tient à coeur de traiter de ce problème. Aussi, Mesdames et Messieurs les députés, si vous ne votez pas pour ce projet de loi - car je vois bien qu'une majorité se dégage contre ce dernier - alors, Monsieur le conseiller d'Etat, c'est vous qui traiterez ce problème ultérieurement.

Le président. Mesdames et Messieurs, nous allons nous prononcer sur la prise en considération de...

Des voix. Vote nominal ! (Appuyé.)

Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 9632 est rejeté par 58 non contre 30 oui et 1 abstention.

Appel nominal

M 1671
Proposition de motion de MM. Pierre Kunz, Louis Serex, Jacques Jeannerat concernant la lutte contre le travail au noir dans l'économie domestique et le développement de l'emploi dans ce secteur

Débat

M. Pierre Kunz (R). Mesdames et Messieurs les députés, voilà près d'une décennie que le monde politique comme les milieux syndicaux - le Conseil fédéral, le Conseil d'Etat, le syndicat SIT- se plaignent du travail au noir et le condamnent depuis plusieurs années. Encore ce matin dans la presse, le syndicat affirme que dans l'économie domestique règne une véritable zone de non-droit.

Si nul ne peut nier que de gros efforts ont été entrepris et des progrès accomplis sur le plan des entreprises, le secteur de l'économie domestique demeure un problème grave qui a été mis en évidence par le professeur Yves Flückiger: plus de 9 000 postes de travail dont seule une petite minorité est déclarée. Entre 18 000 et 25 000 personnes employées sont dans ce secteur - la plupart au noir; plus de 25 000 familles ou personnes font appel à ce personnel; près de 40 millions de francs échappent ainsi au fisc et aux assurances sociales chaque année. Avec, en dernière analyse - et c'est très important, peut-être plus important que tout le reste, d'énormes injustices dans la distribution des prestations sociales, le personnel déclaré se trouvant gravement discriminé par rapport à ceux qui trichent !

Il faut donc saluer l'initiative du Conseil d'Etat qui a pris la responsabilité, et non seulement la responsabilité, mais qui a créé le chèque emploi. Malheureusement, il s'agit là d'une réponse partielle puisque aujourd'hui, toujours d'après les chiffres du professeur Flückiger, le chèque emploi ne couvre que 2% du «chiffre d'affaires» de l'économie domestique dans notre canton. Il s'agit donc, Mesdames et Messieurs, de chercher des voies nouvelles, et plus audacieuses !

C'est une telle voie qu'ouvre cette motion. Celle d'autoriser les parents professionnellement actifs, soumis à l'impôt sur les personnes physiques et qui emploient du personnel domestique, à déduire de leurs revenus fiscalement imposables 50% du salaire annuel versé à ce personnel. Que l'on comprenne bien l'intention des trois auteurs de cette motion, ils n'ambitionnent qu'une chose: convaincre ce Grand Conseil et le Conseil d'Etat d'empoigner le problème du travail au noir dans l'économie domestique. A cet effet, ils cherchent à ouvrir une voie, qu'ils seront heureux d'explorer avec vous en commission si, bien sûr, vous voulez bien renvoyer cette motion en commission de l'économie. C'est expressément ce que je vous demande.

Mme Catherine Baud (Ve). Cette motion a un noble but, mais elle prend le problème à l'envers. En effet, si le premier considérant est tout à fait juste, et qu'il y a effectivement des difficultés à trouver du personnel de maison, le deuxième est tout à fait faux. Parce qu'en fait ce ne sont pas des démarches administratives simplifiées ou des avantages fiscaux qui vont permettre d'engager ce type de personnel.

Avez-vous déjà passé une petite annonce dans un journal gratuit pour rechercher du personnel de maison ? Faites-en l'expérience... On se trouve alors dans un monde parallèle qui est à notre porte. Il faut être lucide, dans l'économie domestique il y a deux types de personnes: celles en situation régulière, qui sont des «working poors» et qui cherchent à arrondir leur fin de mois en essayant d'obtenir quelques avantages supplémentaires - et c'est vrai que ces personnes-là ne croient pas en l'avenir et ne croient pas qu'elles peuvent cotiser et obtenir quelque chose pour leur retraite. Alors, il faut les informer, tout comme leurs employeurs, pour trouver des solutions ensemble et les aider. Et puis, il y a la majorité des personnes travaillant dans l'économie domestique, qui sont en situation irrégulière, des personnes sans titre de séjour. Cela concerne 5 000 à 6 000 personnes dans le canton de Genève, qui sont à 95% des femmes. Et comment le fait de les déclarer pourrait résoudre le problème du travail au noir ? En fait, on va arriver à la solution totalement aberrante d'avoir des travailleurs au gris: on va déclarer ces gens à l'AVS, mais ils ne sortiront pas de la clandestinité. A propos des travailleurs au gris dans l'économie domestique - vous avez cité le rapport de M. Flückiger - cela représente 1% de l'économie domestique. Alors, peut-être qu'en mettant en place ce système on en aura plus, mais je ne crois pas que ce soit une solution. C'est plutôt le comble de l'hypocrisie et de la bonne conscience. On est dans une situation totalement absurde.

Il s'agit donc d'encourager les employeurs, non pas à essayer de déclarer ce personnel de l'économie domestique, mais tout simplement de rendre ce personnel déclarable. Et là, on arrive à un problème de fond, de reconnaître l'existence de ces personnes, la réalité de leur travail, et de les faire sortir de la clandestinité. Une fois qu'elles auront un statut, on pourra peut-être alors appliquer des conditions de travail décentes. Mais sortir de la clandestinité, c'est le préalable.

Il faut donc refuser la loi sur les étrangers, qui menace encore plus ces personnes et les empêche d'accéder à une régularisation. Et il faut soutenir les efforts qu'a faits le canton de Genève pour régulariser ces personnes ! Ce ne sont donc pas uniquement des incitations fiscales qui pourront supprimer le travail au noir et qui aideront la majorité des familles. Ces mesures feront certainement plaisir à quelques personnes, mais malheureusement elles ne vont pas résoudre les problèmes de fond.

Cette solution est une mauvaise réponse à une problématique bien réelle, et les Verts ne pourront donc pas soutenir cette motion. (Applaudissement.)

M. Antoine Droin (S). Je suis aussi perplexe - Mme Baud a déjà soulevé le gros problème des personnes en situation illégale confrontées au travail au noir - et je pense que cette motion est une fausse bonne idée. Si cette motion, à l'origine, part d'un bon sentiment, ce n'en est pas moins de la poudre aux yeux ou l'expression d'un acte pervers.

Le constat de départ est qu'il y a trop d'emplois au noir dans l'économie domestique - c'est indéniable - mais cette motion ne se place que dans la vision des employeurs des personnes au noir et non pas dans la vision des employées - avec «ées» plutôt que les «employés» - puisque, effectivement, les femmes en sont les principales victimes. Il ne faut pas négliger, non plus, le fait que s'il y a emploi au noir dans l'économie domestique, c'est dû aussi en grande partie à la situation très souvent illégale des travailleurs et travailleuses, comme l'a relevé Mme Baud avec pertinence.

La très grande majorité des employeurs connaissent très bien le statut de leur personnel et c'est donc délibérément qu'ils ne déclarent pas leurs employés. Il y a donc un effet pervers de la motion: dans l'hypocrisie - j'utilise le même terme que vous - flagrante des employeurs qui pourraient déclarer aux assurances sociales les employés, tout en profitant d'une déduction fiscale pour eux-mêmes mais sans se préoccuper le moins du monde de leur statut.

Un autre effet pervers réside dans le fait de la discrimination devant l'impôt: d'une part, puisque la proposition ne fait référence qu'aux seuls parents actifs professionnellement, ce qui exclut d'emblée ceux qui ne sont pas parents, les célibataires ou les personnes âgées; d'autre part, cela revient à récompenser les employeurs qui n'ont pas respecté la loi et à pénaliser ceux qui l'ont appliquée jusqu'ici. Il ne s'agit donc pas de récompenser une partie seulement des employeurs au qui régulariseraient leurs employés au noir mais, bien au contraire, de mettre à l'amende les hors-la-loi qui, eux, sévissent encore aujourd'hui. Je vous invite donc à rejeter cette motion.

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Le parti démocrate-chrétien va vous proposer une logique inverse à celle des Verts et des socialistes pour démontrer combien cette motion est intéressante. Si la logique devait partir du point de vue des employés pour obtenir le résultat souhaité dans cette motion, eh bien, ce serait vraisemblablement déjà réalisé. Or on sait que ce n'est pas ce qui se passe actuellement et que c'est justement en partant de la logique des employeurs qu'il peut encore y avoir une petite ouverture sur une brèche qui est quand même légèrement ébranlée.

Cette motion s'inscrit aussi dans un historique auquel le parti démocrate-chrétien est particulièrement attaché. Lorsqu'on parle de lutte contre le travail au noir, son corollaire est la reconnaissance des travailleurs et travailleuses sans statut légal, et le parti démocrate-chrétien, dès la première heure, a lutté contre cette hypocrisie, poussée à l'extrême lorsqu'il s'était agi aussi des enfants de travailleurs non autorisés à vivre en Suisse. J'espère que vous vous souvenez tous de Dominique Föllmi, le conseiller d'Etat, qui a eu le courage...

Une voix. Oui... (Remarques. Brouhaha.)

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von. ... qui a eu le courage, c'est important de le rappeler, d'accompagner lui-même un enfant à l'école, pour sortir de cette hypocrisie ! Alors, aujourd'hui, nous aimerions aussi vous rappeler qu'en 2001 le parti démocrate-chrétien a été le fer de lance d'une motion qui, soutenue à la quasi-unanimité, a fait l'objet d'un énorme travail du Conseil d'Etat, et nous tenons à lui rendre hommage, de même qu'à Mme Brunschwig Graf qui, aujourd'hui encore, à Berne, est le témoin de ce travail qui doit être encore poursuivi.

Maintenant, nous devons être face à cette réalité: la nécessité de reconnaître l'importance et l'utilité des travailleurs et travailleuses sans statut légal, pour le respect de leur dignité et pour le bien-être de notre économie. C'est dans cet état d'esprit que le parti démocrate-chrétien renverra cette motion à la commission de l'économie.

M. Alain Meylan (L). Le groupe libéral soutient également ce renvoi en commission. Je suis bien heureux qu'un des auteurs de cette motion l'ait proposé, parce qu'il est vrai que certaines questions peuvent se poser derrière les idées reçues. Et je n'affirme pas, comme M. le député Droin, que c'est une fausse bonne idée. C'est certes une idée, mais une idée qui mérite d'être analysée à la lumière des différents éléments à notre disposition.

Tout d'abord, l'historique du chèque service - ce dernier est né et bien né. Et je crois que les chiffres ont évolué par rapport au moment où la motion a été élaborée, puisque nous en sommes actuellement à plus de 4 millions de «chiffre d'affaires», c'est-à-dire de salaires déclarés, soit pratiquement plus de 100 000 à 200 000 francs déclarés aux assurances sociales. Donc, 1 200 employeurs, 915 personnes concernées, à en croire la presse de ce matin, ce qui signifie un vrai succès. Et l'on voit, sans véritable publicité, que l'on peut, par une mesure bien née, bien amenée, administrativement bien gérée, obtenir des succès incontestables.

Néanmoins, mes préopinants ont cité certaines restrictions, des conditions qui sont effectivement difficiles à apprécier à la première lecture, et je crois que le renvoi en commission s'impose. On est conscients des problèmes, il faudra les lire à la lueur, notamment, de la LHID. Est-il possible de trouver des moyens d'action par rapport à nos lois fiscales et aux lois fédérales ? Je crois qu'il faudra poser le débat, voir où sont les obstacles et examiner quelle est la marge de manoeuvre cantonale, voire - pourquoi pas ? - fédérale, pour traiter de ce problème dont Mme Von Arx Vernon a relevé l'aspect global et les dossiers des personnes se trouvant dans des situations particulières.

Le groupe libéral soutient cette mesure. Il soutient naturellement l'essence même de cette motion qui vise à accorder des avantages fiscaux à ceux qui peuvent favoriser le développement économique - et sans vouloir toujours taxer. C'est dans la philosophie libérale que s'inscrit cette motion que nous soutiendrons en commission.

M. Yves Nidegger (UDC). Cette proposition radicale est une vraie bonne idée et non pas une fausse bonne idée; elle devrait toutefois être creusée quelque peu en commission. C'est une bonne idée pour trois raisons au moins: le marché de l'économie et de l'emploi genevois est attractif, avec un contrat type de l'économie domestique ayant fixé le salaire minimum - devenu impératif à l'été 2005 - à 3 300 francs. Il y a donc un bassin de recrutement très attractif, dans la mesure où ce salaire représente tout simplement le double du SMIG français.

Une incitation fiscale générera du travail légal dans ce domaine, alors qu'au mieux le système de chèque service génère du travail au gris et non pas du travail entièrement légal. Pourquoi générera-t-il des déclarations intégrales ? Parce que, pour obtenir les déductions fiscales correspondantes, les employeurs choisiront des employés de l'Union Européenne qu'ils pourront déclarer et qu'ils devront évidemment identifier pour que l'administration fiscale puisse leur accorder l'abattement correspondant. Cela signifie qu'il ne sera pas possible d'indiquer que l'on employe quelqu'un en situation irrégulière, puisqu'il faudra donner les coordonnées de cette personne, comme toute prestation versée dont l'administration fiscale exige la justification. Bien entendu que l'Etat perdra quelques unes de ses recettes fiscales du fait de ces abattements. Par conséquent, il en gagnera considérablement plus puisque ces salaires seront déclarés - salaires qui sont de toute façon versés aujourd'hui avec un double effet pernicieux: c'est avec de l'argent déjà au noir que l'employeur rétribue au noir son employé, les deux trouvant un intérêt mal calculé à court terme à utiliser cette situation. Sans compter que le travail au noir n'est pas simplement choquant d'un point de vue moral ou légaliste. On sait parfaitement qu'il existe un nombre croissant de personnes assistées dans ce canton, par l'Hospice notamment - dont le budget a explosé. Et, il ne faut pas se le cacher, il existe des personnes qui préfèrent, pour ne pas perdre les avantages de l'assistance, travailler au noir et de façon non déclarée plutôt que de communiquer les revenus qu'elles pourraient réaliser.

Il y a donc à gagner sur tous les plans, il s'agit d'une vraie bonne idée.

M. Georges Letellier (Ind.). Je tiens d'abord à féliciter les motionnaires qui posent les bonnes questions et ouvrent un débat très intéressant et crucial sur le travail au noir.

Le travail au noir dans l'économie domestique n'est qu'une partie de l'iceberg. Actuellement - et le débat ne se fait jamais sur ce point - une partie des chômeurs, à peu près 1 ou 2%, sont des professionnels du travail au noir, et ils doivent aussi être inclus dans une loi générale.

Il faut donc intervenir sur cette question, car elle nous coûte très cher, et je pense que le Conseil d'Etat fera son travail dans la prochaine loi qu'il va nous proposer.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1671 à la commission de l'économie est adopté par 41 oui contre 22 non et 1 abstention.

I 2041
Interpellation de M. Alberto Velasco Existe-t-il un marché dit "du chômage" au point que les chômeurs se voient affublés de l'appellation de "clients" ? Pour quelle raison existe-t-il un service clientèle dans certains services de l'Etat ?

M. Alberto Velasco (S). J'ai été étonné d'apprendre qu'un chômeur avait reçu une correspondance, signée par le fonctionnaire concerné, qui indiquait: «responsable du service clients». Il s'agissait de l'Office cantonal de l'emploi et du chômage. Evidemment que cela m'interpelle, car, lorsque l'on utilise le terme «clients», on se place logiquement dans une relation marchande. Cela signifie que le chômeur est en position d'acheter quelque chose et que le service est en position de vendre... (Remarques. Brouhaha.) C'est un débat que nous avons déjà eu aux Services industriels, c'est vrai ! Or là, Monsieur le président, nous sommes dans une relation d'assurés. C'est-à-dire qu'il y a quand même une nécessité économique et que dans cette relation d'assurés il ne devrait pas y avoir de différenciation quant à la capacité économique de la personne qui est en train de faire appel à l'assurance... En d'autres termes, l'assurance est une relation de solidarité, contrairement au marché. C'est-à-dire que tout le monde contribue... Ce n'est pas parce que j'ai payé une assurance que je dois recevoir quelque chose. Je paie une assurance, et peut-être que je ne consommerai pas... Mais je le fais parce qu'il y a une relation de solidarité. Tandis que si l'on introduit la notion de client: puisque j'ai payé, je reçois. Il y a donc un problème...

Il y a une année, j'avais posé la même question au service de la population, et j'ai eu le grand plaisir de constater que le Conseil d'Etat m'a écouté puisqu'en ouvrant l'annuaire officiel j'ai pu voir que l'on avait supprimé cette référence de «service clientèle». Parce que c'est un service de l'Etat - c'est une prestation - et qu'à ce titre il ne devait pas y avoir cette dénomination.

Alors, Monsieur le président du département, vous êtes arrivé dans ce dicastère et je ne pense pas que ce soit vous qui ayez introduit cela, mais mon devoir de député est d'attirer votre attention et, surtout, de vous dire qu'il existe deux économies: une économie publique et une économie privée. L'économie publique a ses références; l'économie privée a les siennes ! Mais, lorsque «l'on croise les câbles», il n'en ressort pas grand-chose. C'est pourquoi j'espère que je serai écouté. (Applaudissements.)

M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Monsieur le député, vous m'apprenez l'existence d'un «service clients» dont j'ignorais jusqu'à ce jour qu'il puisse se trouver au sein de l'OCE. Cela m'étonne évidemment, car, tout naturellement, la relation qu'il y a entre l'OCE et un chômeur n'est manifestement pas celle qui lie un client à une administration. La définition même du client est celui qui achète un service sur un marché où il a le choix, et je doute qu'un chômeur ait effectivement le choix.

D'autre part, en consultant mes très honorables collègues ici présents, ils ne représentent pas à eux seuls la majorité du Conseil d'Etat mais ils s'emploieront avec moi à convaincre nos collègues ici absents. Nous veillerons à ce que soit restaurée la notion d'un mot qui devrait avoir cours dans une administration, dans un service public, qui est celui d'«usager», un mot très noble, qui nous vient du Moyen-Age, qui définit bien plus parfaitement la relation qui devrait nous lier...

M. Michel Gros. Avec accent aigu... (Rires.)

M. François Longchamp. Avec accent aigu ! C'était du temps, Monsieur Gros - et c'était certainement le cas à Satigny - où, comme vous le savez, nous faisions usage des biens communaux à des fins de partage, notamment des revenus agricoles. L'administration a évidemment évolué depuis !

Monsieur le député, je vous assure que je veillerai personnellement - et avec l'ensemble du Conseil d'Etat - à ce que pareille utilisation du mot «clients» ne se reproduise pas au sein de l'office cantonal de l'emploi, ni d'ailleurs dans le reste de l'administration. Nous laisserons le soin à Swisscom d'utiliser éventuellement cette notion de clients, là où peut-être - je dis «bien peut-être» - il aurait dû garder des usagers. (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S). Monsieur le conseiller d'Etat, je tiens à vous remercier, parce que vous m'avez entendu. Je tiens à remercier aussi le président du Conseil d'Etat, car il a fait des signes d'acquiescement... (Rires.) De même que M. Cramer, président du département ayant la tutelle des SIG. Il est aussi impliqué et il a aussi hoché la tête... (Rires.)

Donc, j'en prends acte, Monsieur le président, et si jamais je constate... (Remarque.) Pas dans le vôtre, parce que je sais que vous allez prendre des mesures, Monsieur Longchamp ! Vous êtes un homme de confiance. (Brouhaha.) Mais j'en prends acte, Monsieur le président du Conseil d'Etat et Monsieur Cramer, et si jamais - si d'aventure - je devais percevoir de tels termes, je vous en ferais part. Je vous en remercie. (Rires.)

Le président. Sur cette promesse, il est pris acte qu'il ne sera plus fait usage d'un mot mal choisi par l'administration.

L'interpellation 2041 est close.

PL 9326-B
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients (K 3 03)
Rapport de M. Claude Aubert (L)

Premier débat

Le président. Il est probable que nous n'arriverons pas au terme de ce point, il sera donc poursuivi demain si nous n'avançons pas assez rapidement ce soir. Le rapporteur est M. Claude Aubert. Il y a les courriers C 2211 et C 2111 dont la lecture a été demandée. Si vous voulez bien, Monsieur le rapporteur, nous les lirons d'abord, puis je vous donnerai la parole.

Courrier 2211

Courrier 2111

M. Claude Aubert (L), rapporteur. En préambule, j'aimerais vous rappeler que les trois projets de loi qui nous sont présentés - PL 9326-B, PL 9327-B, PL 9328-B - sont des projets de loi majeurs, avec, en particulier, un projet de loi que j'appellerai «monumental» sur la santé. Etant donné qu'il s'agit probablement de 200 articles, si nous consacrons une minute par article, nous en avons pour trois heures et vingt minutes... Par conséquent, nous avons le temps de nous mettre à la tâche.

Que s'est-il passé ? Eh bien, ces trois projets de loi, déposés en août 2005, ont été acceptés à l'unanimité de la commission. Je dis bien: «à l'unanimité de la commission». Lors de la dernière séance du Grand Conseil, lorsque nous avons proposé le renvoi en commission, c'était, vu l'importance des textes, pour permettre d'une part de recevoir un texte d'un seul tenant qui incorpore des amendements ayant été votés à l'unanimité par la commission de la santé, en automne, et, d'autre part, pour procéder à un certain nombre de corrections de renvois d'articles. C'était donc pour des mesures tout à fait formelles. Il nous semblait, à l'époque, que des projets de loi acceptés unanimement, auxquels on ajoutait des amendements également acceptés à l'unanimité, devraient probablement faire l'unanimité... Mais c'était sans compter sur le sort.

En effet, sur ces entrefaites, sachant que ce projet de loi était renvoyé en commission, nous avons reçu une demande d'audition du président du Tribunal administratif. Ladite demande nous est parvenue huit mois après le dépôt des rapports et à peu près trois ans après que la procédure de consultation eut touché les différentes juridictions du Palais, puisque la Cour de justice et le Tribunal tutélaire avaient répondu. Pourquoi le Tribunal administratif n'a-t-il pas répondu ? Le mystère reste entier. Nous avons donc auditionné M. Paychère, qui nous a donné des indications extrêmement intéressantes sur ces différents projets de loi, en particulier sur le projet de loi dont nous traitons maintenant, concernant le droit des patients et les commissions de surveillance. M. Paychère a évoqué toute une série de travaux juridiques montrant des incertitudes; en particulier, nous avons appris que la notion de proches, que ce soit en droit pénal ou en droit administratif, ne signifiait pas la même chose, de même concernant les représentants légaux. Bref, il s'agissait d'une demande de reprendre quasiment l'ensemble de ce projet de loi pour y introduire des indications ayant échappé aux juristes de la Cour de justice et à ceux du Tribunal tutélaire, et, bien évidemment, ayant échappé à tous les juristes que nous avions auditionnés, y compris les juristes du département.

Le président Paychère a par ailleurs formulé une objection importante en soulignant qu'il existe une loi fédérale sur le Tribunal fédéral; elle date de 2005 et devrait entrer en force, or il semble que les cantons ont maintenant près de six ans pour pouvoir adapter leur législation. La question se posait donc ainsi: devions-nous reprendre tous ces éléments pour retravailler une compatibilité qui pouvait attendre quelques années, étant donné que cette compatibilité avec la loi sur le Tribunal fédéral touchait bien d'autres domaines que la loi sur la santé ?

En commission, le département a, en quelque sorte, répondu point par point aux propositions et aux formulations du Tribunal administratif. Il a conclu en disant que tous ces points étaient extrêmement intéressants, que la plupart avaient été discutés, et qu'il y avait un moment où il fallait une décision politique. C'est alors qu'il y a eu un moment de crise au sein de notre commission, c'était vendredi passé. Les députés socialistes et Verts ont dit extrêmement clairement qu'à leur avis il fallait reprendre les éléments présentés et les étudier, quitte à ce que l'on procède d'autres auditions; tous les autres partis, le MCG, L'UDC, les libéraux, les radicaux et le PDC ont, pour leur part, dit qu'il fallait s'arrêter, que tout avait été déjà bien travaillé et que Genève devait avoir une loi sur la santé. C'est pourquoi, lors du vote final, lorsqu'il s'est agi en troisième lecture d'adopter le texte - déjà accepté à l'unanimité, avec des ajouts qui l'étaient également - les commissaires socialistes et Verts ont déclaré qu'ils s'abstenaient, non pas parce qu'ils étaient contre la loi mais parce qu'ils étaient contre la décision de la majorité de la commission de boucler ce dossier et d'aller en séance plénière aujourd'hui - le risque étant évidemment que, si l'on reprenait tous les éléments, ces projets de loi seraient reportés aux calendes grecques.

Aujourd'hui nous devons donc, en premier lieu, étudier le projet de loi sur la surveillance des professions de la santé et du droit des patients. Comme vous l'avez vu, ce sont des sujets très compliqués où se mêlent plusieurs types de juridictions, plusieurs types de procédures. Le texte qui vous est proposé est celui que nous allons maintenant discuter.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Les socialistes saluent la démarche initiée en vue de refondre le droit sanitaire et de travailler à une loi qui traite de la santé de manière globale, en tenant compte des déterminants que constitue la biologie de l'être humain, mais aussi de son mode de vie et de son environnement. En fait, la santé appréhendée au sens global, telle que l'a définie l'OMS, est non plus un état d'absence de maladie, mais prend en compte l'être humain dans sa totalité, avec ses aspects sociaux, physiques et psychiques. Donc, la loi la plus importante qui nous est soumise ce soir est bien la loi sur la santé, et qui reconnaît - notamment dans l'article 1 - explicitement à chaque citoyen et citoyenne le droit à des soins de qualité, ce qui nous tient tout particulièrement à coeur.

Les travaux menés en commission ont été, comme l'a dit M. Aubert, très denses et souvent très animés. Effectivement, ils mettaient en jeu toutes les notions liées à la prévention, à la promotion de la santé, à la planification sanitaire et aux droits des malades, aspects extrêmement importants qui sont enfin rassemblés dans une seule loi. A cet égard, on peut rendre hommage au rapporteur qui a fait un travail important. Et puis, il nous l'a dit, il y a eu des allées et venues qui n'ont pas été faciles, étant donné des aspects techniques et de nouvelles auditions. Je pense que son rapport est bien le reflet de l'ensemble du travail accompli.

Hormis quelques points - qui feront l'objet de deux amendements, notamment sur le problème de la liste des professions de la santé où il est question de ne pas les inclure dans la loi mais plutôt dans un règlement - les socialistes peuvent globalement souscrire à ces projets de loi, en particulier au projet de loi sur la santé et à l'ensemble de cette réforme sanitaire. Mais - en effet, M. Aubert l'a relevé et nous l'avons redit aussi dans la lettre qui a été lue tout à l'heure - la fin des travaux a été marquée par un certain nombre de confusions, et c'est cela que nous déplorons. Nous avons non seulement auditionné le président du Tribunal administratif, mais auparavant, alors que les rapports étaient plus ou moins déposés et les points inscrits à l'ordre du jour, nous avons également effectué une audition du Procureur général, qui a été importante. Cela a causé certaines confusions et a pu susciter un malaise au niveau des travaux alors que les discussions avaient déjà pris quelques mois. Nous savions que ce projet de loi sanitaire avait été étudié par une précédente commission extraparlementaire, puis il y a eu les travaux parlementaires qui ont duré longtemps. Il nous semblait, suite à l'audition de M. Paychère, que nous pouvions tenir encore une séance - quitte à reporter d'un mois la discussion sur ces projets de loi - et que cela n'allait pas prétériter à tout jamais cette question.

Au final, nous nous sommes abstenus en commission, mais, sur l'ensemble, nous pouvons dire que nous voterons probablement ces projets de loi. Nous souhaitons qu'il soit fait bon accueil aux amendements qui vous seront proposés. Ce sont mes collègues vous les présenteront tout à l'heure.

M. Michel Forni (PDC). Nous avons pu prendre connaissance des lettres qui nous ont été lues tout à l'heure et je crois que notre collègue Aubert a bien rapporté l'esprit de cette loi.

Je dirai qu'il y a trois choses à considérer: d'abord, ce n'est pas un piège calamiteux; d'autre part, ce n'est pas un bouillon de désillusions; enfin, ce n'est pas non plus, comme disait Victor Hugo, «l'aveuglement qui produit la cécité».

A partir de ces éléments-là, je crois qu'il serait bon que nous puissions revoir les trois thèmes décrits: premièrement, la commission de surveillance - je dis bien «surveillance» - des professions de la santé et des droits - des droits ! - des patients.

Le deuxième élément, il faut le préciser, c'est la privation de liberté. Ce sont des thèmes qui s'enchaînent, mais ils ont tous une spécificité. Enfin, il y a un projet de loi du Conseil d'Etat sur la santé, qui est le thème qui doit régir nos activités et qui doit nous permettre aussi d'apporter sécurité aux uns mais efficacité aux autres, et, surtout, développement d'un principe de médecine qui peut aussi aller du palliatif en passant par des nouvelles stratégies, ne serait-ce que le dépistage.

Et c'est dans ce sens que je serai heureux, au nom du PDC, de pouvoir aller de l'avant et de pouvoir donner un crédit net à ces différentes notions. (Applaudissements.)

Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). Genève est effectivement le seul canton romand qui, à ce jour, ne s'est pas doté d'une loi-cadre sur la santé. Les lois genevoises relatives à la santé comptent à peu près 700 articles, ce qui amène à morceler l'individu selon la pathologie ou le problème de santé qu'il rencontre au cours de sa vie plutôt que d'aborder la personne dans sa globalité. Une réforme profonde, complète et cohérente du droit sanitaire de notre canton s'avérait alors nécessaire. Ce travail a été de longue haleine, effectué en concertation avec des personnes de sensibilités différentes et de compétences diverses, représentant l'ensemble des milieux politiques et des partenaires de la santé. La loi sur la santé proposée ce soir est composée de 139 articles et elle a le mérite d'offrir à la population une loi sur la santé qui soit lisible et cohérente, abordant en priorité la santé plutôt que les soins, et cela dans le respect des termes de l'OMS et de l'ONU qui rappellent que la santé, et non seulement les soins, représente un investissement pour une société plus équitable. Cette nouvelle loi permet de mettre en place des principes nouveaux et intéressants, comme le médecin de confiance et la médiation. Par ailleurs, la promotion de la santé et la prévention y tiennent les places essentielles qu'elles doivent avoir quand on veut mettre sur pied une vraie politique de la santé.

Si nous sommes satisfaits de la loi-cadre sur la santé, il n'en va pas tout à fait de même pour les deux autres lois annexes, celle concernant la commission de surveillance et celle sur la privation de liberté à des fins d'assistance. Ces lois n'ont pas bénéficié, il faut le dire, de la même concertation avec les milieux intéressés. Car, dans un premier temps, après le dépôt du rapport au Grand Conseil, des amendements suggérés par le Procureur et repris par le département ont certes été acceptés par la majorité de la commission; seulement, le fait que M. Paychère revienne ensuite avec de nouveaux amendements nous a incités à nous poser des questions et nous a poussés à demander une prolongation des travaux afin de remettre ce projet de loi en adéquation avec la nouvelle législation fédérale.

Nous demandions un petit mois supplémentaire, pour revenir plus sereinement devant le parlement et pour voter ces lois de manière concertée. Cette demande a malheureusement été refusée par la majorité de la commission et c'est pourquoi - comme le rapporteur le disait précisément - nous nous réservons le droit de nous abstenir sur les deux lois annexes. En revanche, nous voterons la loi-cadre sur la santé.

Mme Patricia Läser (R). Comme vous le savez, ces projets de loi ont été étudiés depuis de nombreuses années en commission de la santé. Malgré quelques éventuelles imperfections, il est très important de voter aujourd'hui ces lois afin de donner rapidement à nos institutions une base solide pour travailler dans les jours, les semaines et les mois à venir. C'est pour cette raison que le groupe radical votera ces trois projets de loi. Je vous remercie.

M. Eric Ischi (UDC). Comme l'a dit très justement le rapporteur, la commission de la santé a consacré de très nombreuses séances à l'étude de ces lois et, je crois qu'il faut le souligner encore une fois, c'est à l'unanimité de la commission qu'elles avaient été acceptées.

La surprise, il est vrai, c'est - si vous me permettez l'expression - l'«irruption» du président du Tribunal administratif. Je ne suis pas convaincu qu'il soit venu là pour proposer des amendements, mais plutôt pour nous rendre attentifs et émettre un certain nombre de remarques. Et la principale, c'était pour lui en quelque sorte une incompatibilité entre la législation fédérale et ces lois telles qu'elles vous sont proposées ce soir.

Mais j'aimerais rappeler ici que le directeur du département de l'économie et de la santé a - à mon sens - répondu point par point et d'une manière précise. Surtout, ce qui nous a influencés et poussés à aller de l'avant concernant ces lois, c'est le fait qu'effectivement la législation fédérale permet aux cantons, dans un délai de six ans, de s'adapter à cette nouvelle législation au niveau suisse. Raison pour laquelle on nous a fait remarquer qu'il y aurait un bon nombre de textes législatifs à corriger et que cela faisait partie d'un travail d'ensemble. C'est ce qui nous a poussés - nous, la majorité - à vous proposer de voter ce soir ces trois lois, ce que le groupe UDC fera, bien sûr.

Le président. Il est peut-être opportun, à ce stade, que j'indique à cette assemblée que nous avons reçu, à l'occasion de notre rencontre périodique avec le bureau du pouvoir judiciaire, de la correspondance et diverses remarques concernant cette nouvelle législation fédérale à laquelle nous devons nous adapter. Le Bureau se met en contact avec le Conseil d'Etat pour examiner ce qu'il y a lieu de prévoir dans l'ensemble de ces textes. Je vous en informe, car cela fait partie des informations qui peuvent vous être utiles.

Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Mon intervention portera sur les deux lois, celle relative à la commission de surveillance des professions de la santé et celle relative au droit de privation de liberté à des fins d'assistance.

Concernant la première, vous savez que M. Paychère, à la dernière minute, a demandé une audition pour relever les incompatibilités de textes entre la loi que l'on propose et la loi fédérale. Pour l'instant, il nous semble incompatible et pas raisonnable de la voter, même si la loi-cadre nous paraît tout à fait recommandable et même importante. Nous demandons donc un peu de temps, juste pour nous assurer que ce que l'on fait est compatible avec les lois et pour que nous votions un texte que l'on puisse recommander sans aucune restriction.

Par rapport à la privation de liberté à des fins d'assistance, je dirai qu'il se passe exactement la même chose alors que l'on parle de choses extrêmement importantes, c'est-à-dire de la privation de liberté. Et cette dernière concerne particulièrement des gens ayant des problèmes psychiques et qui sont particulièrement démunis face à leur maladie et face aux personnes. C'est pourquoi un délai d'un ou deux mois de plus pour vous présenter une loi sur laquelle nous sommes absolument tous d'accord ne me paraît donc pas être trop demander.

Je serai personnellement en faveur du renvoi en commission de ces deux objets, par rapport à la loi sur la santé.

M. Olivier Jornot (L). J'aimerais dire quelques mots de cette problématique, revenue dans plusieurs interventions, qui est celle de la compatibilité avec la loi sur le Tribunal fédéral. Cette problématique est extrêmement intéressante, mais je crois qu'il y a quelques inexactitudes qui méritent d'être dissipées, de manière que ce parlement puisse voter unanimement une législation, plus exactement trois lois qu'il semble tout aussi unanimement appeler de ses voeux.

La loi sur le Tribunal fédéral qui a été votée le 17 juin 2005 entrera en vigueur le 1er janvier 2007 - elle prévoit des délais transitoires, cela été dit. Ces derniers vont impliquer, pour le canton de Genève, un énorme travail dans toute une série de lois et avec des conséquences qui seront parfois relativement surprenantes.

Il y a donc des délais transitoires, un délai de 5 ans à partir du 1er janvier 2007 pour tout ce qui concerne la matière civile et pénale. Or il y a des aspects civils et pénaux dans ces lois, notamment la privation de liberté à des fins d'assistance qui est considérée par la loi sur le Tribunal fédéral comme relevant de la matière civile. Et puis, il y a un délai de deux ans pour tout ce qui concerne le domaine du droit administratif.

Le président Paychère a eu raison d'attirer l'attention du législateur, non pas sur le problème de compatibilité - parce qu'aujourd'hui ces lois sont parfaitement compatibles et le seront jusqu'à l'échéance des délais transitoires - mais sur le fait qu'il faudrait se mettre au travail, et le faire vite. De ce point de vue, je salue l'information qui nous a été donnée il y a un instant par le président de ce parlement, selon laquelle des contacts ont été pris pour entamer et effectuer rapidement ce travail.

Certaines conséquences en matière administrative vont nous surprendre. Par exemple parce que les décisions devront nécessairement avoir été prises par un tribunal suprême. Et le président Paychère a soulevé à cet égard la question de savoir si toutes les commissions - notamment la commission de surveillance mise en place ce soir par l'une des trois lois - ne devraient pas être élues exactement comme des magistrats du pouvoir judiciaire, c'est-à-dire par ce parlement, voire en votation populaire... De très nombreuses questions devront donc être étudiées. Mais ce que j'aimerais vous dire - et je m'adresse en particulier à celles et ceux qui ont appelé de leurs voeux un renvoi en commission - c'est qu'à ces questions il n'y a aujourd'hui pas de réponses ! Il est donc inexact de dire qu'il aurait suffi de prolonger les travaux de quelques semaines, voire d'un mois. Ce n'est pas juste ! Aujourd'hui, on ne sait pas exactement encore quelles vont être toutes les conséquences dont il y aura lieu de tenir compte et les modifications qu'il faudra apporter dans la législation. Cela signifie que vous pouvez, Mesdames et Messieurs, voter ces lois la conscience parfaitement tranquille ! Il n'y a aucune incompatibilité et il appartiendra ensuite au Conseil d'Etat, puis au parlement, d'apporter les modifications. Ce n'est pas pareil dans un certain nombre d'autres domaines où il y a une urgence bien plus grande à adapter notre droit. Je vous donnerai l'exemple de l'entrée en vigueur, au premier janvier 2007, de la partie générale du code pénal, qui nous oblige à revoir toute une série de lois pénales et, aussi, à instaurer un tribunal nouveau pour l'application des peines. Et pour tout cela, nous n'avons, pour l'instant, été saisis d'aucun projet ! Il y a là une urgence qui est tout à fait importante, et en tout cas bien plus que celle de l'adaptation de ces trois lois. Je vous remercie.

M. Pierre Weiss. Mais ceci est une autre histoire !

M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Deux mots pour dire que vous serez saisis prochainement d'un cortège de lois modifiant différentes notions du droit pénal, puisque le nouveau code pénal entre en vigueur en janvier de l'année prochaine et que cela a été la priorité du Conseil d'Etat.

En revanche, s'agissant des modifications suggérées par le président Paychère, elles sont toutes intéressantes, mais elles sont de rang - si j'ose dire - un peu différent. Il émet un certain nombre de remarques vis-à-vis de la nouvelle législation sur le Tribunal fédéral, mais qui, en réalité - après entretien téléphonique de cette semaine à la Chancellerie fédérale - montrent que, par exemple, la notion de double instance cantonale n'est pas forcément prévue comme une double juridiction. Donc, il se pourrait qu'une sanction telle que prévue dans cette loi, prise par le département et susceptible d'un recours au Tribunal administratif, soit parfaitement compatible avec la loi fédérale sur le Tribunal fédéral.

Je crois donc que la précipitation n'est pas nécessaire. De toute manière - et vous l'avez observé au cours des quatre ans de travaux - tout a été fait pour renforcer les droits des malades à travers l'ensemble du dispositif, qu'il s'agisse de la loi-cadre, sur laquelle vous semblez faire preuve d'unanimité, ou des deux lois annexes ou lois d'exécution parlant de situations particulières, sur lesquelles au départ il y avait eu unanimité et puis, effectivement, in fine, plutôt des hésitations qu'une véritable scission.

Donc, je puis vous rassurer: s'il faut modifier ces lois, dans un avenir de l'ordre d'une année, de deux ou trois ans, nous le ferons, bien entendu ! Mais nous le ferons toujours dans le respect de l'esprit qui a prévalu à nos travaux, celui d'accroître les droits des patients et non pas de les restreindre, sauf à y être forcés par le droit fédéral - mais qui, je crois, ne va pas dans ce sens-là non plus.

Mis aux voix, le projet de loi 9326 est adopté en premier débat par 80 oui (unanimité des votants).

Le président. Il sera procédé au deuxième débat demain après-midi. Je lève la séance. Bonne nuit !

Fin du débat: Session 07 (avril 2006) - Séance 33 du 07.04.2006

La séance est levée à 23h.