Séance du vendredi 4 novembre 2005 à 20h30
56e législature - 1re année - 1re session - 3e séance

R 495
Proposition de résolution de Mmes et MM. Rémy Pagani, Françoise Schenk-Gottret, Christian Bavarel, Jocelyne Haller, Jeannine De Haller, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Alain Charbonnier, Salika Wenger, Christian Grobet, David Hiler, Michèle Künzler, Antonio Hodgers demandant l'extension facilitée des conventions collectives, des salaires minimaux et l'annulation de licenciements abusifs de syndicalistes (Initiative cantonale)

Débat

M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Permettez-moi de réagir à cette proposition de résolution et de rappeler un certain nombre de points !

Tout d'abord, le Conseil de surveillance du marché de l'emploi - on y revient et on voit son importance - est l'autorité compétente en matière de politique générale du marché du travail. Dans le cadre des mesures d'accompagnement de la libre circulation des personnes, ce conseil assure la fonction de commission tripartite au sens du code des obligations. Ainsi, dès la détection de cas de sous-enchère abusive et répétée, le Conseil de surveillance du marché de l'emploi propose, lui, l'extension facilitée des conventions collectives ou l'édiction de contrats types de travail avec des salaires minimaux - impératifs !

Je relève que le fait de ne disposer de ces moyens qu'en cas de sous-enchère abusive et répétée ne se discute pas. En effet, à quoi servirait-il de normaliser des relations de travail dans le secteur économique si ces relations ne posent pas de problème particulier ? Il s'agit, bien sûr, d'intervenir rapidement et efficacement lorsque des abus sont répétés. Alors, il ne faut pas commencer à se disperser et aller mettre des gendarmes derrière chaque employeur: il faut véritablement agir quand il le faut ! Et ça, le Conseil de surveillance du marché de l'emploi le fait ! Or, autant le préciser d'emblée, le département et les partenaires sociaux n'ont pas ménagé leurs efforts - je le répète - pour préparer et appliquer les mesures d'accompagnement de façon pragmatique !

Je reviens maintenant aux considérants de cette proposition de résolution: si je les mets en parallèle avec le travail accompli par la commission tripartite de notre canton, je constate ceci. Premièrement, il est faux de dire que depuis le 1er juin 2004 la sous-enchère salariale permet à l'ensemble du patronat genevois de baisser drastiquement les salaires... Ce n'est pas le cas ! En effet, sous la délégation de ce Conseil - je l'ai déjà indiqué tout à l'heure - le groupe de travail composé par la CGAS, l'UAPG et l'OCIRT a contrôlé systématiquement les demandes de permis dès le 1er juin de l'année passée, demandes qui sont avalisées à la signature du travailleur et de l'employeur. Or, les observations de ce groupe de travail sont similaires à celles recueillies avant le 1er janvier 2004. Sur la dernière période étudiée, soit du 1er au 31 mars, 904 demandes ont été examinées, et seules 34 demandes - ce qui représente 4,1% - posent des problèmes importants du point de vue du respect des salaires et/ou de la durée du travail en usage.

Deuxièmement, il est tout aussi faux d'affirmer que les nouvelles mesures d'accompagnement, fruit d'un travail tripartite, arrêtées le 17 décembre 2004 par l'Assemblée fédérale, apportent peu de changement quand on les compare à celles déjà en vigueur... C'est tout à fait autre chose ! En effet, ces nouvelles mesures comportent toute une série d'améliorations. On le voit: que l'on se place au niveau fédéral ou cantonal: on ne peut que constater que le tripartisme a d'ores et déjà fait son oeuvre. Ainsi, les moyens actuels mis à disposition des autorités et des organes du contrôle compétent en matière de libre circulation des personnes paraissent clairement suffisants. Mieux: je dirai même qu'ils garantissent une qualité accrue aux relations du travail local !

Alors, je vous demande Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir rejeter la présente résolution, et de ne pas l'adresser à l'Assemblée fédérale.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur le député Bavarel, vous avez demandé la parole: je vous la donne.

M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, dans ce canton, les gens expriment leurs craintes par rapport à une sous-enchère salariale, par rapport aux salariés des entreprises défendus par les syndicalistes. Ce que je vous demande, c'est de bien vouloir renvoyer cette résolution en commission pour étudier en profondeur les problèmes qu'elle soulève et examiner quel est le dispositif mis en place actuellement pour la surveillance du marché de l'emploi. C'est extrêmement important de le faire: cela permettra peut-être de lever certaines craintes. Alors que nous sommes en train d'avancer avec les accords bilatéraux, je pense qu'il est essentiel de faire ce travail en commission, et de le faire sérieusement ! Au retour des travaux de la commission, cette assemblée pourra décider. Mais, je vous en prie, faisons au moins ce travail au préalable !

Le président. Merci, Monsieur Bavarel. Je voudrais saisir cette occasion pour vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en principe nous essayons d'intervenir avant les représentants de l'exécutif, pour le bon ordre de nos débats et pour leur efficacité. Cela étant, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Monsieur Charbonnier, vous voulez vous exprimer à ce propos ?

M. Alain Charbonnier (S). Oui, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nos travaux ont pris un coup d'accélérateur, et nous avons probablement un peu de peine à suivre... (Exclamations.) Veuillez nous excuser, Monsieur le président Lamprecht, d'intervenir après vous !

Je vais m'exprimer sur le renvoi en commission demandé par M. Bavarel. Beaucoup d'entre vous nous reprochez souvent d'intervenir au niveau cantonal sur des lois fédérales... Cette fois, nous vous avons écouté, nous intervenons au niveau fédéral à peu près sur le même sujet que celui abordé précédemment; il concerne le marché de l'emploi, sa surveillance et les mesures d'accompagnement, suite à l'ouverture des bilatérales.

Par rapport à cette résolution, nous tenons vraiment à ce que les mesures soient prises au niveau fédéral et que les effets soient répercutés sur le canton de Genève.

M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président... (Le micro émet des sifflements.) Je n'ose plus parler... Je suis interdit de parole dans cette enceinte ! (Rires.)

Le président. C'est le micro qui résiste, Monsieur le chef de groupe !

M. Gabriel Barrillier. Voilà ! Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical s'oppose au renvoi en commission. Tout a été dit ce soir sur ces mesures d'accompagnement... (Nouveaux sifflements du micro.) Il est donc inutile de renvoyer cet objet en commission, et nous espérons que nous serons suivis.

Le président. Merci, Monsieur le chef de groupe. J'espère qu'à la prochaine séance de ce parlement votre micro sera moins sensible aux ondes que vous émettez... Je donne la parole à Mme la députée von Arx-Vernon.

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Merci, Monsieur le président. Je serai très brève. Le groupe PDC s'opposera au renvoi en commission. Le président Carlo Lamprecht a expliqué dans le détail tout le processus et toutes les procédures. Je crois que tout le monde a compris et qu'il ne sert à rien de répéter les choses. Il est donc inutile de renvoyer cette proposition de résolution en commission.

Le président. La parole n'est plus demandée... Monsieur Bavarel, c'est bien à la commission de l'économie que vous souhaitez renvoyer cette proposition de résolution ?

Très bien ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc ce renvoi.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 495 à la commission de l'économie est rejeté par 42 non contre 36 non et 3 abstentions.

Le président. Je mets maintenant aux voix la proposition de résolution elle-même.

Mise aux voix, la proposition de résolution 495 est rejetée par 45 non contre 36 oui.