Séance du
vendredi 17 décembre 2004 à
8h
55e
législature -
4e
année -
3e
session -
12e
séance
PL 9369-A
Premier débat
M. Renaud Gautier (L), rapporteur. Comme le disent les «latinophiles», avant qu'ils ne soient interrompus par quelque «arlerie», je voudrais commencer mon intervention en disant que post coitum, animale tristeet que, après les rituels déclamatoires que nous avons entendus hier soir - qui ont permis à chacun, dans une bonne tradition anthropologique ou sociologique d'expliquer que: «J'avais raison raison et l'autre tort», ce dont nous aurions pu faire l'économie dans la mesure où chacun savait qu'il avait raison et que l'autre avait tort - nous voilà donc avec un projet de loi extrêmement pratique et tangible, puisqu'il s'agit des taux d'intérêts légaux - et non pas des taux d'intérêts qui pourraient être appliqués à des garanties d'Etat - qui ont trait aux créances et aux dettes fiscales.
Je pense que ce nouveau projet, quant à la manière de rétribuer ce qui est dû, d'une part, et ce qui est avancé, de l'autre, présente un intérêt certain, soit quant au mode de rétribution des sommes avancées par les contribuables à l'Etat, soit de la manière dont l'Etat entend ponctionner celui qui ne remplit pas ses obligations. Je préciserai que, dans ce rapport - bien évidemment protégé par rapport à ce que j'ai dit plus haut - et, pour continuer dans les citations latines, cum grano salis, l'intérêt de ce projet...
Une voix. On comprend rien !
M. Renaud Gautier. Le dictionnaire vous sera fourni tout à l'heure. L'intérêt de ce projet est que le jour où l'Etat n'aura plus de dettes, alors les créances que l'Etat aura à l'égard des contribuables tomberont à zéro intérêt. Voilà donc un intérêt supplémentaire à diminuer la dette de l'Etat.
M. Claude Marcet (UDC). Nous demandons seulement le renvoi en commission. En ce qui nous concerne, en effet, nous pensons que la manière dont ce projet de loi a été constitué n'est pas normale. Chaque année, l'Etat demande le versement d'acomptes, qu'il taxe ensuite, six ou huit mois après; sur cette base-là, il prendrait un intérêt sur des créances dont la constitution est antérieure à la connaissance de leur existence.
Il n'est donc pas acceptable, dans ce cadre, que nous prenions des intérêts de cette façon, sauf si l'échéance du départ des intérêts est le 1er janvier de l'année suivante, ou le moment même où la taxation est faite. Mais il n'est pas acceptable que l'on prenne des intérêts sur des montants dont nous n'avons pas connaissance.
M. David Hiler (Ve). Nous nous étions abstenus en commission sur cet objet parce que le différentiel entre les deux taux d'intérêts est considérable et que ces derniers ne sont pas fixés sur le même indice de base. On peut admettre une marge mais celle-ci est très, très grande. Par ailleurs, le fait de l'asseoir sur deux indices différents nous paraît problématique.
Nous nous rallierons donc à la proposition de M. Marcet.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur. M. Marcet pose une question qui sort du champ particulier de ce projet de loi, celle du calcul du moment du départ des intérêts, que ce soit pour une créance ou que ce soit pour un intérêt. Sa question est tout à fait pertinente mais, une fois de plus, elle ne concerne pas ce projet de loi.
Quant à la proposition de M. Hiler, je ne voulais pas m'étendre à ce sujet mais, l'intérêt de ce qui nous est proposé ici, c'est que, comme il l'a relevé, il s'agit effectivement de deux modes de calcul différents qui ne sont corrélés d'aucune manière mais qui correspondent toutefois à une réalité: il n'y a pas de sens à ce que l'intérêt, dû par un contribuable, soit somme toute différent de l'intérêt que paie l'Etat pour les montants pharaoniques et babyloniens qu'il emprunte. J'y vois donc une analogie, originale, puisque le mode de calcul est différentié, mais qui m'apparaît juste, quant au fond.
Quant aux taux d'intérêts créditeurs, le principe d'utiliser des taux LIBOR, moins 25 points de base, c'est-à-dire un quart de point, m'apparaît juste, parce qu'on se trouve dans les mécanismes du marché et que l'on fait la même chose que ce que font les institutions financières, à l'exception de quelques banques locales, à savoir que l'on prend un taux LIBOR moins une marge servant à la gestion de ces taux.
Par conséquent, oui, il y a deux modes de calcul différents, mais ils me semblent correspondre à une réalité qui est celle de la dette de l'Etat. Ce n'est pas pour rien que j'ai dit, préalablement, que le jour où il n'y aurait plus de dette de l'Etat, alors il n'y aurait plus de taux d'intérêts débiteurs.
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je comprends que la défense des contribuables donne beaucoup d'énergie à M. Marcet pour s'exprimer, je rappelle toutefois ici qu'il s'agit du taux lui-même et qu'il ne s'agit en aucun cas d'une invention particulière de rétribution de taux d'intérêts qui n'aurait pas été prévus par la loi. Si vous souhaitez changer la loi au niveau de la créance, vous pouvez le faire et proposer un projet de loi qui la modifie. Mais il s'agit ici du taux des intérêts débiteurs. Nous avons renoncé pour toutes ces dernières années à percevoir les intérêts financiers. Ce n'est donc pas ces taux-là qui sont en cause ici, Monsieur le député.
Deuxièmement, ce que le député Renaud Gautier a dit est important. Il s'agit de tenir compte, dans le cadre de ce qui est appliqué ici, de ce qui est pratiqué sur le marché tout en y appliquant une marge, en termes d'administration. Nous avons dit à la commission des finances que si nous devions nous apercevoir qu'une modification est nécessaire par la suite, nous le ferions et présenterions les amendements nécessaires, le moment venu.
Dans le cadre de ce budget, les montants liés à cette décision sont de l'ordre de 10 millions de francs. Si vous souhaitez voter différemment aujourd'hui, ce seront alors dix millions de francs de recettes diverses qui feront défaut et que vous devrez compenser.
La présidente. Merci, Madame la présidente. La parole n'est plus demandée. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi à la commission des finances. Je vais donc mettre ce renvoi en commission des finances aux voix.
Mis aux voix, le renvoi de ce projet à la commission des finances est rejeté par 42 non contre 33 oui et 3 abstentions.
La présidente. Nous entrons donc dans le vote de prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 66 oui et 12 abstentions.
La loi 9369 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9369 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui et 13 abstentions.