Séance du vendredi 19 novembre 2004 à 17h15
55e législature - 4e année - 1re session - 4e séance

La séance est ouverte à 17h15, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mme et MM. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Esther Alder, Luc Barthassat, Jacques Baudit, Edouard Cuendet, Gilles Desplanches, Laurence Fehlmann Rielle, Sami Kanaan, Alain-Dominique Mauris, Patrice Plojoux, Véronique Pürro, Jacques-Eric Richard, Pierre Schifferli, Patrick Schmied et Louis Serex, députés.

Discussions et approbation de l'ordre du jour

La présidente. Monsieur Guy Mettan, vous avez demandé la parole ? Allez-y, Monsieur le député.

M. Guy Mettan(PDC), Merci, Madame la présidente. Je présente à nouveau, à votre attention, le projet de loi 9425 modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève sur les SI, la B 1 01, concernant une modification de répartition des bénéfices des SI. Je vous redemande d'examiner ce projet de loi avec toute l'attention qu'il mérite sachant qu'il pourra évidemment être amendé en commission au cours des débats, car je peux imaginer que ce projet de loi donnera matière à discussion - nous sommes donc ouverts à toutes les propositions qui seront faites. En attentant, je vous demande de l'inscrire à l'ordre du jour de notre session. Je vous remercie. (Un instant s'écoule.)

La présidente. Excusez-moi, je n'avais pas très bien compris le numéro du projet... Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc la proposition d'inscrire à l'ordre du jour le projet de loi 9423...

M. Alain Charbonnier. Il a dit 9425 !

La présidente. Oui, Monsieur Charbonnier ? Il n'y a pas de débat à ce stade, Monsieur le député, on vote juste sur l'inscription à l'ordre du jour ! (Remarques.)Il s'agit d'une autre demande ! Si j'ai bien compris, la demande de M. Mettan concerne le projet de loi 9423... (La présidente est interpellée.)Alors, vous vous êtes trompé... D'accord ! (Exclamations.)

M. Michel Halpérin. Il faudrait savoir si c'est le projet de loi 9423 ou le 9425.

La présidente. Monsieur Mettan, voulez-vous bien préciser s'il s'agit du projet de loi 9423 ou du 9425 ? Vous avez la parole.

M. Guy Mettan. Il s'agit du projet de loi 9423, modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève ! Je vous prie de m'excuser. Ce projet de loi n'est pas encore inscrit à l'ordre du jour, puisque je demande précisément sa réinscription à l'ordre du jour. Il n'a donc pas de numéro dans l'ordre du jour.

La présidente. Monsieur Mettan, je sais bien que c'est votre anniversaire, mais je vous demande d'être clair et vous remercie de donner le bon numéro... Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc l'inscription à l'ordre du jour du projet de loi 9423. Le vote électronique est lancé.

Mise aux voix, l'inscription à l'ordre du jour du projet de loi 9423 est rejetée par 40 non contre 30 oui et 1 abstention.

Mme Michèle Künzler(Ve). Quant à moi, je demande l'inscription à l'ordre du jour du projet de loi 9425, qui porte sur une modification du règlement du Grand Conseil concernant la commission de grâce. Je demande également son renvoi en commission.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons d'abord au vote sur la demande d'inscription à l'ordre du jour du projet de loi 9425.

Mise aux voix, l'inscription à l'ordre du jour du projet de loi 9425 est adoptée par 61 oui contre 5 non et 10 abstentions.

La présidente. Monsieur Velasco, je vous donne la parole. (Un instant s'écoule.)Est-ce une erreur, Monsieur le député ?

M. Alberto Velasco. Ce n'est pas une erreur, mais je voulais intervenir avant...

La présidente. Parfait ! Monsieur Marcet, je vous donne la parole... (Exclamations.)Il renonce. Merveilleux ! La parole a également été demandée par la députée Nelly Guichard... Qui renonce aussi. (Rires.)Nous passons donc à la suite de notre ordre du jour, c'est-à-dire aux prestations de serment.

E 1294-A
Prestation de serment de M. ZANNI Dario, élu Procureur (Entrée en fonction immédiate)

La présidente. M. Dario Zanni est assermenté. (Applaudissements.)

E 1290-A
Prestation de serment de M. BOLIVAR Manuel, élu Juge assesseur suppléant à la Commission de surveillance des Offices des poursuites et des faillites (Entrée en fonction immédiate)

La présidente. M. Manuel Bolivar est assermenté. (Applaudissements.)

Suite des points initiaux

Communications de la présidence

La présidente. Je vous informe que le Bureau et les chefs de groupe, conformément à la LRGC, notamment à l'article 203, ont décidé que la commission des visiteurs officiels se réunirait encore dans sa composition actuelle pour adopter le rapport annuel.

Correspondance

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places la correspondance reçue par le Grand Conseil:

Courrier de la présidence du Grand Conseil et du Procureur général au Conseil d'Etat intitulé "Réforme des juridictions, groupe de réflexion" ( C-1912)

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons procédé hier à l'élection d'un secrétaire du Grand Conseil. L'élection 1299 concernant les autres secrétaires, au point 15, est reportée faute de candidats.

Par ailleurs, je désigne le premier vice-président du Grand Conseil, M. Michel Halpérin (L), président de la commission de grâce.

En outre, je désigne la deuxième vice-présidente du Grand Conseil, Mme Caroline Bartl (UDC), présidente de la commission de réexamen en matière de naturalisation.

Suite à cette désignation, le membre titulaire désigné du groupe UDC, M. Georges Letellier, doit se désister.

Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons notre ordre du jour avec le point 30.

P 689-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition concernant la circulation dans le village de Chancy
Renvoi au Conseil d'Etat: Mémorial 1986, p. 1830
P 1319-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition concernant la diminution du trafic automobile dans le village de Chancy
Renvois en commission: Mémorial 2000, p. 7607, 8871

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

P 1211-A
Rapport de la commission des droits de l'Homme (droits de la personne) chargée d'étudier la pétition contre des lois anticléricales
Rapport de M. Michel Halpérin (L)

Débat

M. Michel Halpérin (L), rapporteur. Tout arrive ! Je pense que vous devez trimbaler ce lourd rapport dans vos serviettes depuis douze ou treize séances de ce Conseil: le moment est venu de vous en débarrasser...

Si je prends la parole aujourd'hui, c'est pour exprimer trois considérations particulières. La première c'est que la commission des Droits de l'Homme ayant attaché la plus grande importance aux débats qu'elle a entretenus autour de la pétition 1211 et malgré le consensus unanime de la commission sur la réponse à lui donner, nous n'avons pas souhaité que ce rapport soit traité dans les extraits. Nous avons en effet considéré qu'il était important que ce Conseil s'y intéresse de manière concrète, parce qu'il doit servir, selon les membres de la commission des Droits de l'Homme, de corpus de référence, notamment au Conseil d'Etat lorsqu'il devra appliquer un certain nombre de textes concernant les droits de l'Homme et, singulièrement, la liberté religieuse.

La deuxième considération qui m'amène à reprendre la parole à ce stade est que ce rapport - vous l'avez certainement tous lu et vous l'aurez probablement constaté - comporte dans les annexes - je ne sais pourquoi - la copie d'un procès-verbal de la commission judiciaire du mois de septembre 1999. C'est une erreur. Je ne sais pas qui l'a commise, mais quel qu'en soit l'auteur, je vous prie de l'en excuser.

Troisième et dernière considération: rappel très bref des circonstances autour de ce texte. La pétition que nous devions examiner visait trois textes légaux: l'article 176 de la constitution genevoise concernant les congrégations, la loi en découlant qui s'appelle «la loi sur les corporations religieuses» du 3 février 1872 et la loi sur le culte extérieur du 28 août 1875.

Dans le cadre des auditions auxquelles nous avons procédé, notamment celle du professeur Auer, nous avons constaté que de l'avis des juristes ces trois textes étaient inconstitutionnels, car ils violaient la liberté religieuse. Nous nous sommes donc demandé quelles suites il fallait leur donner, étant précisé que ces suites pouvaient prendre plusieurs formes.

La première était de prendre acte de cette inconstitutionnalité et d'en tirer les conséquences, soit en adoptant de nouveaux textes, soit en demandant tout simplement qu'ils ne soient plus appliqués du tout - pour autant qu'ils l'aient été - soit, encore, de contester cette inconstitutionnalité. Toutefois, des questions d'opportunité politique se sont très vite posées, notamment dans le cadre des auditions de personnalités éminentes du monde des confessions. Nous avons en effet été assez surpris de constater que les représentants des Eglises protestante et catholiques exprimaient le voeu que nous évitions un débat susceptible de raviver des cicatrises et des blessures anciennes. De sorte que leur position générale peut se résumer ainsi: «Il ne faut pas réveiller le chat qui dort, et, surtout, il faut préserver la paix confessionnelle. Les lois en question sont discriminatoires, mais, nous, Eglises susceptibles d'être victimes de ces discriminations, voire auteurs de ces discriminations, nous vous demandons de considérer que la paix confessionnelle vaut mieux que le rétablissement de l'Etat de droit.» C'est donc un message intéressant sur l'opportunité politique, d'une part, et, d'autre part, sur l'application stricte du droit.

J'ajoute que si deux de ces textes - les deux premiers concernant les corporations religieuses - sont clairement anticonstitutionnels - c'est l'avis de la commission dans son ensemble - notre conclusion, pour les raisons d'opportunité et de paix confessionnelle envisagée, a été qu'il n'était pas pour autant urgent de les revoir, d'autant qu'ils ne sont pas appliqués. Depuis qu'ils ont été adoptés aucune congrégation religieuse n'a en effet demandé l'autorisation de notre Grand Conseil pour s'installer à Genève...

En revanche, la dernière loi, celle qui concerne le culte dit «extérieur», c'est-à-dire, en réalité, les pratiques cultuelles sur la voie publique, a eu l'honneur d'être déjà traitée par le Tribunal fédéral à l'occasion d'un souhait d'une paroisse de faire une procession pour les Rameaux, il y a une vingtaine d'années. Le Conseil d'Etat avait refusé l'autorisation demandée par la paroisse concernée, mais le Tribunal fédéral, saisi d'un recours, avait trouvé ce refus inconstitutionnel. L'argument du Tribunal fédéral à l'époque était que la situation était très tendue au moment du vote de ces lois - nous étions en plein Kulturkampf- et qu'il n'en était plus de même aujourd'hui. De sorte que, la paix revenue, il n'était plus nécessaire d'appliquer ces textes comme on l'avait fait dans le passé.

Or, la commission n'a pas pu s'empêcher de remarquer que ce qui était vrai sur les apaisements en 1984 ne l'était, hélas, plus autant en 2003 ou en 2004... Aujourd'hui, une telle situation sur la voie publique peut poser des problèmes qui ne seraient venus à l'esprit de personne il y a vingt ans ou il y a encore dix ans. La commission est donc arrivée à la conclusion, à l'unanimité, qu'il était important de considérer que cette loi sur le culte extérieur reste valable et constitutionnelle aujourd'hui en dépit du fait qu'elle porte une indiscutable atteinte à la liberté religieuse, parce que celle-ci n'est pas plus absolue que n'importe quelle autre liberté. Et l'importance de préserver la paix confessionnelle et la qualité des rapports entre citoyens sur la voie publique doit primer sur toute autre considération, selon la commission des Droits de l'Homme.

Cette dernière, soucieuse avant tout d'éviter qu'à l'occasion de manifestations à caractère religieux la voie publique ne redevienne, à un moment particulièrement difficile, le lieu d'antagonismes au lieu d'être celui où la laïcité et la paix confessionnelle trouvent toute leur signification dans la République de Genève - c'est-à-dire un lieu où les citoyens se rencontrent sans acception religieuse, sans échanger de points de vue en fonction de leurs obédiences, mais en tant que citoyens laïcs et, en quelque sorte, «déconfessionnalisés» - a voulu que cet espace laïc public le demeure et qu'il ne soit pas progressivement confisqué par les affirmations religieuses dont nous craignons qu'à un moment ou à un autre elles ne deviennent expression de fanatisme, dont nous savons que la tendance contemporaine est hélas trop répandue.

C'est la raison pour laquelle j'ai pris la liberté de citer - et j'en terminerai par là - un passage de Voltaire qui me paraît important, parce qu'il dicte la conception de la commission des Droits de l'Homme sur ce débat sur la laïcité. Voltaire écrivait ceci: «Lorsqu'une foi de fanatisme a gangrené un cerveau, la maladie est presque incurable. Les lois et la religion ne suffisent pas contre la peste des âmes. La religion loin d'être pour elles un aliment salutaire se tourne en poison dans les cerveaux infestés.» (Rires.)Et Voltaire ajoutait avec la pertinence que nous lui connaissons: «Ce sont d'ordinaire les fripons qui conduisent les fanatiques et qui mettent le poignard entre leurs mains.»

Mesdames et Messieurs les députés, si ce débat est important aux yeux de la commission des Droits de l'Homme, c'est parce que nous voulons que la paix confessionnelle et la tolérance continuent à régner à Genève. La liberté religieuse a fait des progrès depuis la fin du XIXe siècle, et nous nous en réjouissons. Nous pensons qu'elle en fera encore et qu'il y a d'assez nombreuses occasions de le manifester. Mais nous pensons qu'il est important que le Conseil d'Etat sache qu'il a le soutien de notre parlement pour préserver la qualité des relations citoyennes dans la rue genevoise. (Applaudissements.)

M. Antonio Hodgers (Ve). Le débat au sein du groupe des Verts sur cette question a été assez long et approfondi. Il a conduit notre groupe à revoir sa position sur cette pétition.

Nous sommes, bien sûr, d'accord sur l'objectif - sur lequel, d'ailleurs, M. Halpérin vient de conclure: il faut garantir la paix confessionnelle dans notre République. Mais il peut y avoir des divergences sur les moyens qu'on se donne... Tout d'abord, il est pour le moins étrange de conclure, en tant qu'organe législatif, qu'une loi est anticonstitutionnelle et, même, contraire aux droits de l'homme, mais qu'il faut la maintenir dans nos textes. Une gymnastique a été faite par la commission sur ce dossier - M. Halpérin l'a très bien expliqué - que j'ai du reste suivi dans un premier temps, mais, aujourd'hui, si l'on prend un peu de recul sur cette question, la conclusion paraît pour le moins étrange.

Pour garantir cette paix confessionnelle faut-il ne pas réveiller le chat qui dort ? Ne sommes-nous pas en train de mettre un couvercle sur une marmite qui bout ? Nous devons nous demander s'il faut mener le débat sur le religieux... Nous pensons que oui. Et, dans ce cas, il faut débattre de ces lois historiques qui datent du Kulturkampfet qui n'ont plus lieu d'être dans notre appareil législatif aujourd'hui.

Or, la conclusion de la commission revient à dire qu'il ne doit pas y avoir de débat sur la religion. C'est l'avis de notre parlement. Eh bien, en ce qui me concerne, je pense que le message donné n'est pas sain ! En effet, les préoccupations sur les minorités religieuses sont aujourd'hui importantes. Je crois que le Conseil d'Etat, à travers sa démarche sur les cimetières confessionnels, marque le pas et, à mon avis, le parlement devra le suivre et se demander quelle est la place de la religion dans notre société aujourd'hui, au XXIe siècle. Ces lois qui datent du XIXe siècle ne sont plus adéquates; elles ne répondent plus à la problématique. Refuser d'en débattre, ce n'est pas ne pas réveiller le chat qui dort; ce n'est pas le laisser dormir... C'est mettre un couvercle sur une marmite qui commence à bouillir; c'est se voiler la face, et je pense que ce n'est pas la bonne attitude à adopter !

M. Pierre Kunz (R). Notre collègue, Michel Halpérin, nous disait que la paix confessionnelle et les relations harmonieuses entre les citoyens doivent primer sur une interprétation littérale de la loi... Et il disait aussi que les espaces publics ne doivent pas être confisqués par les activités privées du culte.

Les radicaux sont absolument convaincus par ces paroles sages. Ils regrettent simplement que certains les aient oubliées ou, plutôt, ne les aient pas imaginées suffisamment tôt s'agissant de la problématique des cimetières...

Monsieur Hodgers, mener le débat sur le religieux: oui ! Mais sans remettre en question les principes fondamentaux de la laïcité !

M. Christian Grobet (AdG). Je n'ai pas grand-chose à ajouter, puisque je souscris totalement aux propos tenus par notre collègue M. Kunz...

Nous avons la chance à Genève, d'une part, de ne pas être soumis, comme c'est le cas dans certains endroits, même dans notre pays, par des ukases religieux et, d'autre part, d'avoir connu la paix confessionnelle à Genève, d'une manière que je qualifierai de «remarquable» par rapport à d'autres endroits, précisément parce que le principe de la laïcité a été strictement respecté dans notre République.

Aujourd'hui, certaines personnes remettent en cause le principe de la laïcité, avec toutes les conséquences que cela implique... Non seulement j'estime qu'il faut maintenir les lois, mais, comme l'a fort bien dit notre rapporteur, M. Halpérin, il faut les appliquer avec intelligence ! Il me semble qu'ouvrir le débat aujourd'hui pour abroger ces lois ne pourrait que causer des disputes, des querelles, ou raviver celles du passé, ce qu'il faut éviter.

J'ajoute, s'agissant de la compatibilité de l'article 176 de la constitution et de la loi sur les congrégations religieuses, qu'il est vrai - et vous l'avez bien indiqué dans votre rapport, Monsieur Halpérin - qu'il s'agit d'une restriction à certaines libertés. Maintenant, pour ce qui est des restrictions qui peuvent être apportées à certaines libertés, je pense que ce sont des questions qui donnent lieu à interprétation. Je ne veux pas contredire l'interprétation que vous donnez, mais, personnellement, je pense que ces dispositions restent compatibles avec le droit supérieur, pour autant, bien entendu, qu'elles soient appliquées en respectant les règles de la proportionnalité.

Par voie de conséquence, j'estime qu'il n'y a pas de violation de la Convention européenne des Droits de l'Homme si l'on applique les principes de la proportionnalité et qu'il n'est donc pas nécessaire d'annuler ces dispositions constitutionnelles et légales. Cela évitera en outre d'avoir des débats qui risquent s'envenimer dans notre République, alors que, comme je l'ai dit tout à l'heure et comme l'ont dit certains préopinants, c'est précisément grâce à cette législation que les querelles religieuses que l'on connaît à certains autres endroits ont été évitées.

M. Antoine Droin (S). La commission des Droits de l'Homme s'est penchée sur cette question durant de nombreuses séances. Nous avons effectivement réfléchi très longuement, notamment sur ce que vient d'évoquer M. Hodgers par rapport à la position des Verts.

Nous avons auditionné de nombreuses personnes mais aussi les pétitionnaires - en dernier, je tiens à le rappeler, car ce n'est pas forcément l'usage; en général, ils sont auditionnés en premier. Et, si nous avons procédé ainsi, c'est justement pour ne pas nous faire influencer par les avis des uns ou des autres, qu'ils soient personnels ou représentatifs d'une communauté ou d'une autre. Nous sommes arrivés, après ces nombreuses auditions, à la conclusion - nous avons souvent utilisé cette expression - qu'il ne fallait pas réveiller le chat qui dort... C'est ce qui a prédominé dans le débat. Mes préopinants viennent de le relever très justement, et je pense effectivement que les forces de l'habitude permettent une autorégulation par rapport à certaines dérives qui pourraient survenir.

Et, même si les mots ne sont plus forcément adéquats, même si certaines lois mériteraient peut-être d'être modifiées, je pense qu'il faudra bien choisir le moment opportun pour le faire. Je ne suis donc, et de loin, pas du tout persuadé qu'il faille réveiller le chat qui dort pour le moment, en modifiant des lois ou en les supprimant. L'humanité traverse en effet une période difficile: les tensions interreligieuses sont très fortes et ne font qu'augmenter. Ce n'est donc pas du tout le moment de réactiver un débat sur ce sujet: cela ne ferait que mettre de l'huile sur le feu et engendrer des conflits. Cela ne me semble donc pas opportun dans notre République.

Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC). Je serai très brève. Le parti démocrate-chrétien vous invite à prendre acte de ce rapport.

Il faut tout de même relever la qualité des travaux, le sérieux, le respect qui ont prévalu durant l'étude de cette pétition. Il me semble en effet très important de souligner, aussi souvent que possible, lorsque nous savons garder raison, en prenant en compte l'aspect profondément respectueux de ce qui fonctionne bien et en ne nous laissant pas aller à des passions qui ne peuvent qu'engendrer des oppositions.

Je pense que nous pouvons en effet nous réjouir que ce travail ait été voté à l'unanimité, soit de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Olivier Vaucher (L). Je voudrais tout d'abord dire que nous nous rallions aux propos de certains de nos préopinants. Nous remercions M. le député Grobet de ses paroles, ainsi que M. Droin, et, bien sûr, le rapporteur, sur la nécessité absolue de maintenir aujourd'hui la paix religieuse acquise âprement il y a un siècle ou deux. C'est en effet une des forces de Genève.

M. Hodgers dit qu'il ne faut pas mettre de couvercle sur une marmite qui bout... Qu'il n'oublie pas quelles sont les personnes à l'origine de cette pétition - il le sait du reste aussi bien que moi ! Il serait justement navrant de suivre cette pétition, car son but est certainement - comme de nombreuses autres interventions des pétitionnaires - de faire bouillir la marmite à Genève ! Alors, soyons raisonnables: laissons dormir le chat qui dort, et suivons l'avis et la conclusion du rapporteur, M. Halpérin !

M. Michel Halpérin (L). Quelques mots, si vous me le permettez, pour répondre à certaines inquiétudes et apporter quelques précisions...

Je préciserai d'abord que le débat sur les religions, contrairement à ce que j'ai cru comprendre en écoutant M. Hodgers, a déjà eu lieu. En effet, si les milieux cléricaux genevois nous ont demandé de ne pas réveiller le chat qui dort - ils n'étaient pas les seuls: des historiens aussi - la commission a tout de même décidé d'entrer en matière, de réfléchir et de vous faire un rapport en vous disant ce qu'elle pensait de la liberté religieuse aujourd'hui et des trois normes dont il était question. Nous n'avons donc pas mis le couvercle sur la marmite...

En revanche, au terme de notre réflexion et avec le produit de cette réflexion, nous vous disons trois choses.

Nous vous disons que la loi constitutionnelle ancienne est inconstitutionnelle mais elle n'a jamais été appliquée, et nous ne trouvons pas utile d'ouvrir un débat populaire pour abroger une disposition constitutionnelle appliquée.

Nous vous disons que la loi qui en dépend - et l'avis de chacun est réservé, mais la commission des Droits de l'Homme est d'accord à l'unanimité - la loi sur les corporations religieuses est également inconstitutionnelle. Nous n'avons pas besoin d'un vote populaire pour la modifier, mais nous voulons, si cette modification devait intervenir - ce n'est pas indispensable, puisqu'elle n'est pas appliquée - que le Grand Conseil soit saisi simultanément d'un projet de loi qui marque les limites d'une intervention du Conseil d'Etat pour maintenir l'ordre dans ces matières religieuses.

Nous vous disons, au sujet de la troisième loi, que nous l'avons examinée et, contrairement à l'avis des juristes de la Couronne, et, avec tout le respect qui lui est dû, à l'avis même du Tribunal fédéral, que cette loi n'est pas anticonstitutionnelle, parce que les droits de l'homme prévoient la liberté religieuse, y compris dans le domaine public, mais pas au prix du désordre public.

Voilà la première partie de ce que je voulais clarifier.

La deuxième, c'est que le concept de laïcité, dont nous avons beaucoup parlé au cours de nos travaux, a considérablement évolué. Si à la fin du XIXe siècle le concept de laïcité était simplement la primauté du laïc sur le religieux et la neutralité de l'Etat, à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle chacun s'accorde à considérer que l'Etat a un devoir impérieux - et le Tribunal fédéral a eu l'occasion de le souligner sur différents sujets - de permettre que l'exercice du culte libre ait lieu pour chacun dans le respect de ses convictions. Nous sommes donc passés d'un principe d'abstention à un principe d'action, et, dans ce sens-là, il y a eu une évolution qui se traduit notamment par certaines obligations assumées dans certains cantons, qu'il s'agisse de lieux de culte, de lieux d'ensevelissement, etc.

Il y a une évolution, et il fallait en prendre acte. C'est fait !

La troisième remarque que je voulais faire est la suivante. Les travaux du Kulturkampf, comme les a appelés M. Hodgers tout à l'heure - et c'est leur nom officiel - sont très remarquables. Et c'est la raison pour laquelle, je le rappelle à l'attention de ceux qui ne l'auraient pas vu, je les ai mis en annexe de mon rapport. Je trouve que cela vaut la peine de relire le texte de ce que nos prédécesseurs ont fait dans cette enceinte il y a cent vingt-cinq et respectivement cent cinquante ans. Non seulement c'est d'une très bonne tenue intellectuelle, mais c'est d'une tenue littéraire qui, j'en suis sûr, nous inspirera tous à l'avenir...

Je voudrais tout de même faire une dernière remarque à propos de vos travaux: je pense Mesdames et Messieurs, que nous avons tous eu une conscience extrêmement aiguë de la gravité des temps. J'ai appris tout à l'heure qu'une jeune femme de dix-huit ans a été lapidée hier soir à Marseille. Et je pense que nous ne pouvons pas perdre de vue que les temps ne sont plus ce qu'ils étaient. C'est le message de la commission. C'est pourquoi le principe de la laïcité et du savoir-vivre entre citoyens doit primer sur les considérations communautaires. (Applaudissements.)

M. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat doit tout d'abord remercier la commission des Droits de l'Homme et son rapporteur, pour le travail approfondi qui a été fait autour de cet objet et qui a trouvé son prolongement dans vos réflexions au sein du Grand Conseil.

C'est bien sûr avec intérêt que nous avons pris connaissance de votre rapport, de ses conclusions, et, finalement, on peut se dire que l'esprit qui inspirait le législateur à la fin du XIXe siècle n'est pas tellement différent de celui qui inspire aujourd'hui les réflexions du Tribunal fédéral. Dans les deux cas, il s'agit de garantir l'exercice de la liberté d'expression. A la fin du XIXe siècle, il s'agissait de la garantir face à ce que les religions pouvaient avoir d'invasif, d'extrêmement présent, dans la vie des citoyens. Aujourd'hui, il s'agit de garantir la liberté des cultes et la liberté d'exprimer ses convictions religieuses dans une société qui est de plus en plus éloignée de ce type de préoccupations.

Il n'en demeure pas moins, comme l'a relevé à très juste titre votre commission, que le domaine public est un espace commun à tous, c'est-à-dire athées, agnostiques et croyants de toutes religions. Mais cet espace commun est un espace non confessionnel, et il doit le demeurer. Genève doit se féliciter d'avoir tout au long de son histoire voulu veiller à cela.

Si je le dis - j'ai eu tout à l'heure sur ce point un échange avec mon collègue Pierre-François Unger - c'est que, au fond, c'est la liberté qui est en cause avant tout. Et cette liberté, les autorités publiques se doivent de la garantir à chaque citoyen. La liberté est la condition de base: quand on est libre, on peut et on se doit d'être tolérant. Et c'est dans ce cadre-là que les réflexions, tout à fait fondées, qui ont été faites sur l'application du principe de la proportionnalité, sur le fait que l'Etat doit veiller à ce que chacun puisse exprimer ses convictions, doivent trouver leur place. Mais, avant tout, nous nous devons d'être les garants de la liberté de chacun et, donc, de faire en sorte que cet espace public, qui est le bien de tous, ne soit pas accaparé par certains.

Je vous remercie pour ce rapport, dont il convient effectivement de prendre acte.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

P 1346-A
Rapport de la commission de l'environnement et de l'agriculture chargée d'étudier la pétition concernant le règlement d'application de la loi sur les forêts
Rapport de M. Louis Serex (R)

Débat

La présidente. Qui remplace M. Louis Serex ? Merci, Monsieur Barrillier d'accepter de remplacer le rapporteur ! Monsieur le rapporteur avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?

M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur ad interim. Madame la présidente, il s'agit bien de cette histoire de chiens et de renards, n'est-ce pas ?

Une voix. Non ! (Exclamations.)

Une voix. Tu as perdu tes lunettes !

M. Gabriel Barrillier. Moi, j'ai la pétition 1346-A... (Exclamations.)C'est cela. Très bien ! Non, je n'ai rien à ajouter ! (Rires.)

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur, de votre intervention pertinente... Je donne la parole à Mme la députée Françoise Schenk-Gottret.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je vais rendre service à M. Barrillier en lui racontant ce qui s'est passé à la commission de l'environnement... Cela éclairera le débat et montrera qu'en fait tout le travail a été fait. Ce qui a été intéressant dans le travail sur cette pétition, c'était de voir s'engager toute une réflexion sur la problématique des chiens, en milieu naturel notamment. Or, l'on sait bien qu'approcher le sujet «chiens» est délicat et suscite des réactions affectives surprenantes, même chez les députés. On l'a vu quand on a étudié la loi sur les propriétaires de chiens...

La préoccupation de celui qui représentait les pétitionnaires - et ça n'est pas fortuit - dont l'argumentation était plutôt confuse, était moins de se préoccuper réellement des chiens et de leurs divagations en forêt que du montant des amendes infligées à leur propriétaire... Là résidait réellement le problème: selon lui, le Conseil d'Etat veut se remplir les poches en infligeant des amendes, via les gardes municipaux et les garde-faune. Aussi la commission, dans sa grande sagesse, avait décidé de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat non pas parce qu'elle lui paraissait pertinente, mais plutôt parce qu'un renvoi permettait au conseiller d'Etat en charge du DIAE d'amener devant le Grand Conseil une proposition de loi sur les propriétaires de chiens.

Le rapport sur cette pétition vient très tardivement. Le groupe PDC avait refusé qu'elle soit traitée en extrait pour des raisons incompréhensibles puisque la commission était unanime... (Rires.)La pétition peut désormais être déposée sur le bureau du Grand Conseil puisque aussi bien le Conseil d'Etat que le Grand Conseil ont fait leur devoir, respectivement en proposant et en votant la loi sur les propriétaires de chiens.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je ne me lève pas pour vous dire pourquoi le groupe PDC avait refusé que cette pétition soit traitée dans les extraits... Je n'en sais rien: je n'étais même pas de la commission !

Par contre, je constate tout de même que ce rapport vient très tardivement. En effet, l'arrêté du Conseil d'Etat date d'août 2000; la commission a traité cette affaire le 13 septembre 2001 et le rapport a été déposé le 25 février 2003...

Or, le problème qui a été traité par la commission de l'environnement est extrêmement important pour l'usage que toutes les personnes qui fréquentent la forêt doivent en faire, en particulier les propriétaires de chien.

En ce qui me concerne, je fréquente la forêt, bien souvent comme cavalier, et j'ai également un chien. Mais je pense qu'il est tout à fait important - et je félicite même le Conseil d'Etat de l'époque d'avoir proposé un arrêté à ce sujet - que les propriétaires de chien les tiennent en laisse pendant la période de nidification, de reproduction. Cette forêt genevoise que nos prédécesseurs ont su maintenir est un petit bijou fragile. Il doit certes être accessible à tous les citoyens de ce canton-ville, mais il est indispensable de fixer un certain nombre de règles pour l'agrément de chacun.

La commission, comme l'a expliqué Mme Françoise Schenk-Gottret, souhaitait la renvoyer à l'unanimité au Conseil d'Etat... Je constate que cet arrêté a été pris il y a quatre mois et demi... Il me semble que les choses se sont calmées, que nous n'avons pas été submergés par les pétitions de propriétaires de chien qui voudraient les lâcher au printemps... Je vous propose donc au contraire de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Si mon collègue Portier m'avait bien écoutée, il aurait entendu que c'est exactement ce que j'ai proposé !

La présidente. Devant cette belle unanimité, je vais vous soumettre, Mesdames et Messieurs les députés, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil...

Mises aux voix, les conclusions de la commission de l'environnement et de l'agriculture (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

P 1375-C
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition pour une régulation du trafic de transit entre Plan-les-Ouates et Onex, par le chemin du Pont du Centenaire, le chemin David Broillet et le chemin Gustave Rochette

Débat

M. Christian Brunier (S). Je vous rappelle que les habitants qui se trouvent dans la région du Pont-du-Centenaire avaient déjà lancé une pétition lors de la dernière législature. Il y avait eu unanimité de la commission des transports à l'époque et, ensuite, du Grand Conseil pour soutenir cette pétition qui demandait qu'un certain nombre de mesures soient prises pour limiter la circulation de transit dans ce secteur, et particulièrement aux abords de lieux fréquentés par les promeneurs et les enfants. Le Conseil d'Etat s'était engagé à prendre un certain nombre de mesures à terme et il avait rendu un rapport au Grand Conseil, indiquant que la réalisation était en cours. Nous avions pris contact avec les pétitionnaires qui nous avaient dit que les choses ne se passaient pas aussi bien que cela sur le terrain... Nous avions donc, à la majorité, renvoyé le premier rapport du Conseil d'Etat au Conseil d'Etat en lui expliquant que nous n'étions pas très contents du travail effectué sur le terrain. Depuis, les choses ont changé: grâce au travail de Robert Cramer, les pétitionnaires, la commune et l'Office des transports et de la circulation se sont réunis autour d'une table avec certains députés, d'ailleurs de tous partis, et les choses se sont mises en route. Aujourd'hui, la problématique ne se situe plus au niveau cantonal, mais au niveau municipal. Cette fois, nous pouvons donc aisément prendre acte de ce rapport.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

P 1395-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition pour l'application d'une politique globale et cohérente de la circulation, garantissant l'accessibilité au quartier des Eaux-Vives
Rapport de M. André Reymond (UDC)

Débat

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Pour compléter mon rapport, je me permets de rappeler ce dont nous avons parlé hier et dont nous parlerons encore tout à l'heure: le problème de la circulation aux Eaux-Vives, du transport public et du transport privé - on y revient... - et des habitants et des commerçants qui sont saturés...

En effet, depuis un certain temps déjà - au cours de la précédente législature - ils se plaignaient de la manière dont ils étaient traités en ce qui concerne le stationnement, et ils se sont encore plaints récemment à propos des terrasses de café: la difficulté de se parquer ne favorise certes pas la fréquentation des magasins ou des terrasses de café l'été.

C'est aussi l'occasion de rappeler que la question concernant le parking de Pré-l'Evêque doit être traitée de manière urgente si l'on ne veut pas la mort du quartier des Eaux-Vives.

M. Blaise Matthey (L). Le problème soulevé par cette pétition est bien réel...

Il ne peut pas y avoir dans le quartier des Eaux-Vives une seule politique des transports. Il faut qu'une véritable politique de concertation soit menée avec tous les intervenants sur ce sujet extrêmement sensible. Le quartier des Eaux-Vives est un quartier à densité d'habitation forte. Le nier à ce stade serait une erreur. Et le mérite de cette pétition est de bien faire comprendre l'ensemble des enjeux qu'il y a autour de ce quartier: un quartier populaire, animé, vivant et qui ne saurait en aucun cas, par une politique des transports beaucoup trop restrictive, se transformer dans le futur en une sorte de terrain vague.

J'invite donc moi aussi le Conseil d'Etat à prendre en compte cette réaction populaire dans la gestion future des problèmes de transport au quartier des Eaux-Vives.

M. Gabriel Barrillier (R). Il ne faut pas avoir peur des mots: la gestion de la mobilité dans le quartier des Eaux-Vives est certainement la plus mauvaise de tout Genève ! (Exclamations.)C'est le quartier le plus mal géré en matière de circulation ! (Commentaires.)

Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, la politique de la canonnière - on peut l'appeler comme ça - menée par le Conseil administratif de la Ville de Genève ou, plutôt, par un conseiller administratif - qui s'ingénie à prendre des décisions coup de poing pour embêter la population ! Il n'est qu'à penser aux «Yeux de la ville» de cet été ! J'ai même dû, avec un de mes collègues - il est absent pour le moment: je veux parler de Meylan - gravir un monticule pour montrer l'inanité de ces mesures !

Par ailleurs, à l'entrée sud de Genève, il y a deux magnifiques bâtiments: la Maison du paon et la Maison du pan. Or, devant cette magnifique entrée de Genève, on a dû supporter pendant vingt ou trente ans une poste en bois, un véritable baraquement: c'est une honte !

J'en viens au parking du Pré-l'Evêque. A l'époque, j'avais essayé de lancer une initiative pour faire bouger les choses. Il fallait réunir 4000 signatures de citoyennes et citoyens de la Ville de Genève, ce qui est très difficile. Que fait le Conseil administratif, que fait le Conseil municipal de la Ville de Genève pour réaliser enfin ce projet de parking, qui était prêt à la construction il y a à peu près vingt ou vingt-cinq ans ? Je prétends que ce quartier est sinistré et qu'il faut secouer la Ville de Genève pour que les choses bougent !

Je vous demande donc de bien vouloir renvoyer cette magnifique pétition au Conseil d'Etat.

M. Jean Spielmann (AdG). Je ferai deux remarques à l'intention de M. Barrillier. Tout d'abord, il faut se poser des questions quand on a de la peine à recueillir le nombre de signatures voulues, parce que cela signifie peut-être que les gens ne sont pas tout à fait d'accord avec les idées qu'on défend ! En ce qui nous concerne, s'agissant de la privatisation des TPG, nous avons recueilli quatorze mille signatures sans problème... Et nous aurions même pu en récolter davantage ! Pour obtenir des signatures des citoyens, il faut avancer des arguments. On ne peut pas, même avec les moyens financiers qui sont les vôtres, recueillir des signatures pour une politique qui va contre leurs intérêts !

J'en viens au fond. La pétition que vous défendez énonce plusieurs moyens pour arriver à améliorer la circulation dans ce quartier. Mais comment allez-vous assumer vos propositions ? Vous dites, par exemple: «la garantie de mobilité dans et à travers le quartier...»; vous vous imaginez qu'il est possible de revenir en arrière dans le quartier des Eaux-Vives et de créer des artères de transit ? C'est intelligent ! Comment voulez-vous obtenir des signatures en faisant une telle proposition ?

Deuxième point: le parking du Pré-l'Evêque. La politique des macarons est effectivement en train de se mettre en place... Il y a certes quelques incohérences qu'il ne faut pas sous-estimer, mais l'orientation générale est la bonne. Maintenir quelques axes de circulation, tout en réduisant les nuisances là où c'est possible, et ne pas laisser le trafic de transit pénétrer dans tous les quartiers d'habitation, me semble une politique qui va dans la bonne direction. Redonner à ces quartiers la vie et la mobilité nécessaires aux piétons, aux deux-roues et à la vie associative des quartiers est une bonne politique.

Et si vous deviez récolter des signatures pour une pétition allant dans ce sens, la population vous suivrait ! Vous ne diriez pas que vous êtes seul à défendre vos idées et que personne n'a voulu signer votre pétition ! Ce ne serait pas le cas, si vous proposiez une politique intelligente et cohérente de la circulation: c'est exactement le contraire de votre pétition ! Pour ma part, je refuse vos propositions.

M. Roger Deneys (S). Les socialistes se sont abstenus en commission, essentiellement parce qu'il y a plus de macarons que de places de parking dans le quartier des Eaux-Vives, ce qui pose un problème pour les habitants. En ce qui me concerne, cela ne me semble pas justifier le fait d'accepter cette pétition qui est effectivement assez surréaliste: je suis tout à fait d'accord avec M. Spielmann. Je ne vois pas comment on peut, avec ce genre de propositions, résoudre le problème de la mobilité et des transports dans le quartier des Pâquis...

Une voix. On a changé de quartier ?

M. Roger Deneys. Pardon, le quartier des Eaux-Vives ! Il faudrait peut-être nous rappeler qu'à Genève nous avons la plus petite zone piétonne de la planète - environ une vingtaine de mètres - et que le reste des voies sont dévolues au trafic automobile ! Dans n'importe quelle ville de n'importe quelle capitale européenne ou mondiale il y a des zones piétonnes considérables, et cela n'entrave pas du tout les activités commerciales ! Cela transforme peut-être certaines de ces activités, mais ce n'est certainement pas en laissant les voitures circuler partout que l'on va trouver des solutions à long terme !

On a parlé de développement durable... On a parlé des problèmes liés à la circulation de transit à Soral... Je suis désolé de vous le dire, mais les deux problématiques sont liées ! Il n'est pas possible de créer des places de parking aux Eaux-Vives sans transmettre le message subsidiaire suivant aux automobilistes, à savoir qu'ils peuvent venir depuis la France voisine, depuis Soral, jusqu'au centre-ville avec leur véhicule ! Or, ce n'est plus possible, si nous voulons que Genève puisse survivre au XXIe siècle !

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser cette pétition.

M. Jacques Baud (UDC). Ah ! la Ville de Genève: électron libre, qui semble ne tenir aucun compte de l'avis de l'Etat ! Qui fait quoi ? (Brouhaha.)On peut se poser la question ! On a vu ce qui s'est passé à la rue de Lausanne, à la place Cornavin...

Quant au «grand projet des Eaux-Vives» de ces messieurs - ou de ces dames, je ne sais pas... - c'est les TPG en lignes propres par la rue des Eaux-Vives, c'est une rue fermée à la circulation des automobiles et c'est cent places de parking supprimées... Bien joué, le clown ! Si c'est ça organiser des transports publics valables, si c'est ça organiser une vie de quartier valable: je me pose de sérieuses questions sur les capacités des auteurs de ce projet !

D'ici là, nous renverrons cette pétition au Conseil d'Etat en espérant qu'il arrivera à trouver des solutions valables !

M. Christian Bavarel (Ve). Je ne vais pas répéter ce qu'ont dit Jean Spielmann ou Roger Deneys, parce que je partage tout à fait leur avis. Ce matin nous avons en effet parlé de Soral dont les habitants ont visiblement des valeurs différentes, ce qui me surprend un peu...

Par ailleurs, j'aimerais tout de même vous rendre attentifs au fait suivant: vous ne pouvez pas passer votre temps à combattre le travail des agents de ville, qui cherchent simplement à faire en sorte que les places bleues réservées aux personnes qui ont payé un macaron restent accessibles à ces personnes ! C'est une forme d'escroquerie de dire aux gens que les agents de ville ne doivent pas faire leur travail ! Si vous refusez que les agents infligent des amendes, eh bien, lorsque les habitants de ce quartier rentreront le soir, ils trouveront ces places squattées par des automobilistes peu scrupuleux qui feront ventouse ! Il y a des règles: il faut simplement faire en sorte qu'elles soient respectées.

Pensez aussi que vous tenez souvent un double discours... S'il y a des possibilités de dégager des places de parking pour les habitants d'un quartier, faites-le ! Il est également justifié de favoriser le trafic de destination pour les personnes qui veulent se rendre dans les commerces, car elles doivent pouvoir stationner deux heures sur une place bleue. Quant aux pendulaires, nous leur demandons de prendre un autre moyen de transport pour se rendre à leur travail.

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Quelques remarques s'imposent... Je trouve très curieux de comparer une récolte de signatures concernant la Ville de Genève pour la réalisation du parking de Pré-l'Evêque à une récolte de signatures concernant le canton- nous n'étions pas là à l'époque, mais il n'est en effet pas toujours évident de récolter 4000 signatures dans le cadre de la Ville de Genève. Je ne comprends pas, Monsieur Spielmann, vous qui avez une expérience de la politique, que vous puissiez faire une telle comparaison, je veux parler de cette récolte de signatures dont vous être très fier s'agissant des TPG ! N'oubliez pas que la sous-traitance sera toujours de mise et que ce sera le seul moyen d'économiser de l'argent ! Je le rappelle, les sous-traitants ont des bus tout à fait neufs... Il ne s'agit plus de vieux bus, comme vous l'avez prétendu la dernière fois que vous êtes intervenu à ce sujet.

Pour ce qui est du quartier des Eaux-Vives, il n'y a pas que les commerçants qui se plaignent... Les habitants aussi ! Le scandale des macarons dans le quartier des Eaux-Vives n'est plus à démontrer. On l'a vu tout à l'heure, on veut revitaliser une ligne de chemin de fer qui vient de France et qui arrive aux Eaux-Vives - le CEVA sera opérationnel dans peu de temps - mais le quartier est engorgé. Je trouve pour le moins curieux que cette pétition soit repoussée par la majorité de ce parlement, d'autant que, je le rappelle, la commission a décidé de la renvoyer au Conseil d'Etat.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc, suivant ainsi l'avis de la commission, à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous en remercie.

M. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat. Vous pouvez, bien sûr, renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat... Non seulement cela fait partie de vos compétences, mais il s'avère que 2400 personnes - 2664, pour être précis - ont signé cette pétition, et on a pu penser que c'était une façon de leur marquer de la considération que de proposer de transmettre leur pétition au Conseil d'Etat...

Mais que peut vous répondre le Conseil d'Etat ? Comme le disait tout à l'heure M. Baud: ah là là ! Car, vraiment, on enfonce des portes ouvertes ! On veut tout et son contraire ! Et les réponses aux questions, vous les connaissez, non seulement parce que nous en débattons à journée faite dans ce Grand Conseil et dans les commissions des transports, mais, de surcroît, parce que vous les avez en partie données vous-mêmes.

Que demande cette pétition ? Que l'on se penche sur la question du parking et, notamment, de créer des parkings d'échange à proximité du quartier des Eaux-Vives. Cela a coûté suffisamment cher aux uns et aux autres - 60 millions à peu près - pour savoir qu'il y a en tout cas un parking d'environ 1000 places à la Nautique, lequel semblait, la dernière fois que je suis passé devant, avoir encore quelques places disponibles pour héberger les véhicules de celles et ceux qui le souhaiteraient.

Cette pétition demande également que l'on garantisse la fluidité du trafic - tout en maîtrisant, bien sûr, les nuisances - et la sécurité de tous les usagers. Ah là là ! (Rires.)Comment faire? Eh bien, le Conseil d'Etat vous fera un rapport pour vous indiquer que l'on ne peut pas dire blanc et noir en même temps, qu'entre les deux il faut choisir, que des choix ont été faits dans ce quartier, qui, ma foi, me semblent assez défendables.

Enfin, on peut rentrer dans le détail des trois grands axes de cette pétition si vous le souhaitez, mais puisque, apparemment, nous serons amenés à répondre, nous vous donnerons à cette occasion quelques détails supplémentaires.

Cette pétition demande également - et ça a l'air d'être un point fort de cette pétition que la mobilité soit garantie... Excellente idée!

Une voix. Ah là là !

M. Robert Cramer. Si l'on veut garantir la mobilité et que chacun puisse se déplacer très rapidement, on se heurte à un autre problème, ce que ce Grand Conseil a voulu à juste titre et avec force: je veux parler de la hiérarchie du réseau routier ! Que veut dire «hiérarchie» ? Qu'il y a des artères qui font partie du réseau primaire où l'on peut rouler aisément, car on a la priorité partout, à une vitesse de 50 km/h, où il n'y a pas trop de passages piétons qui freinent la circulation, et qu'il y a un réseau de quartier composé de rues où l'on circule très mal, que l'on n'emprunte que quand on a quelque chose à y faire, où la priorité est donnée aux piétons et où tout est fait pour dissuader les automobilistes de les emprunter. Lorsqu'il y a conflit entre le réseau primaire et le réseau secondaire, qui récolte tous les véhicules qui viennent du réseau de quartier, eh bien, forcément la priorité est donnée au réseau primaire, à ceux qui roulent, qui sont en transit, plutôt qu'à ceux qui essayent de rejoindre ces artères où l'on roule bien. Et si vous voulez que tout le monde soit prioritaire, cela veut dire que personne ne le sera ! Si vous pensez que chaque rue est une rue de transit, cela revient à dire qu'il n'y en a plus ! C'est le meilleur moyen «d'organiser» des embouteillages ! Et le Grand Conseil le sait bien, puisqu'il a voulu hiérarchiser le réseau routier, très précisément pour éviter les embouteillages !

Alors, vous pouvez bien renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Il vous rappellera ce que vous avez voté et tous les principes que vous connaissez bien. Les 2664 signataires de la pétition auront reçu une réponse, et vous trouverez bien une virgule qui vous déplaira pour nous la renvoyer une fois de plus... Cela fait partie des règles de l'exercice lorsque l'on parle de mobilité: ah là là ! (Rires et applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Mis aux voix, le renvoi de la pétition 1395-A au Conseil d'Etat est rejeté par 33 non contre 29 oui.

La présidente. Je vous propose une alternative. Selon l'article 172, il vous est possible soit de déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil soit de la classer. Je vous soumets tout d'abord la première proposition, soit le dépôt sur le bureau du Grand Conseil... Monsieur Bavarel, vous avez demandé la parole ? Allez-y, Monsieur le député !

M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Madame la présidente. Je voulais juste demander le classement... Vous voyant hésiter, je me suis dit que je pouvais vous suggérer de nous soumettre directement le classement de cette pétition. Je vous remercie.

La présidente. Puisque M. Bavarel souhaite le classement de cette pétition, je vous soumets cette proposition... (La présidente est interpellée.)Monsieur le député Bavarel, vous avez demandé le classement: j'ai bien compris votre requête. Nous nous prononçons au moyen du vote électronique... Oui, Madame Berberat, vous désirez la parole ? Je vous la donne.

Mme Janine Berberat (L). Il est vrai que ce Grand Conseil peut décider de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, mais il me semble que demander son classement est assez provocateur et méprisant... (Brouhaha.)Je vous signale tout de même que presque 2700 personnes ont signé cette pétition et demandé que le Grand Conseil se penche sur leur problème. Je vous propose donc, au moins, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Cela me semble la moindre des choses de respecter ces personnes.

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Il me paraît en effet peu sérieux de proposer le classement de cette pétition, même s'il ne s'agit que de 2664 signatures... Le problème est tout de même suffisamment aigu aux Eaux-Vives - nous le verrons dans les points suivants - pour qu'on se penche dessus ! On ne peut pas se moquer des électeurs et des habitants du centre-ville et des Eaux-Vives ! (Brouhaha.)

En ce qui nous concerne - nous, groupe UDC - nous nous abstiendrons, parce que la commission avait décidé de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat !

M. Christian Bavarel (Ve). Mes deux préopinants... (Brouhaha intense. La présidente agite la cloche avec énergie.)Merci, Madame la présidente, de demander le silence. Mes deux préopinants m'ont convaincu... Je pense qu'il faut demander le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Ce sera beaucoup plus efficace. (Rires.)

La présidente. Merci de votre sagesse, Monsieur le député ! Je vous donne la parole à M. Michel Ducret.

M. Michel Ducret (R). Tout en reconnaissant que le texte de la pétition présente quelques incohérences, je pense qu'il traduit une certaine incompréhension de la politique qui est menée en matière de circulation dans le quartier des Eaux-Vives. L'information ne passe pas auprès de la majorité de la population - c'est ce que traduit cette pétition - alors même que des mesures sont prises dans les quartiers, théoriquement avec des procédures de concertation, lesquelles, en réalité, rassemblent plus de fonctionnaires que d'habitants des quartiers. Voilà où réside le véritable problème et voilà comment on voit atterrir des pétitions de ce genre sur le bureau du Grand Conseil !

Mesdames et Messieurs les députés, le classement de cette pétition est effectivement un acte de mépris. Déposons-la sur le bureau du Grand Conseil et laissons le Conseil d'Etat lire attentivement, sans le lui renvoyer, ce texte en le priant finalement de traduire l'incompréhension des habitants des Eaux-Vives auprès des responsables de l'organisation de la circulation locale dans le quartier, soit le Conseil administratif de la Ville de Genève qui a apparemment beaucoup de peine à faire passer son message en la matière !

Mme Janine Hagmann (L). Tout le monde sait très bien dans cette enceinte qu'un dépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement est une mise à la poubelle polie... Je propose donc, au nom du groupe libéral, pour tenir compte des quelque 2600 personnes qui ont signé cette pétition, de la renvoyer en commission afin qu'elle en revienne avec des propositions concrètes. (Protestations.)

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports, proposition que je vous soumets au moyen du vote électronique... (Exclamations.)Mais je suis obligée, puisqu'une demande a été formulée ! (Brouhaha.)Oui, Monsieur Deneys, vous avez la parole.

M. Roger Deneys (S). Je sais, Madame la présidente, qu'il est très difficile d'assumer votre charge et que le parlement n'est pas toujours très discipliné... Je tiens néanmoins à vous faire remarquer que nous avons déjà procédé à un premier vote et qu'à ce moment-là aucune demande de renvoi en commission n'a été formulée ! (Exclamations.)Elle a été faite par la suite... (Exclamations.)

Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement attirer votre attention, si vous renvoyez cette pétition en commission - ce que vous pouvez faire, si ça vous fait plaisir - sur le fait que la commission des transports ne travaille manifestement pas très bien, car elle aurait déjà pu faire des propositions... (Exclamations. La présidente agite la cloche.)Pardon ! Je vous prie de m'excuser.

La présidente. Monsieur Deneys, un député peut en tout temps demander le renvoi en commission. Nous passons au vote.

Mis aux voix, le renvoi en commission recueille 35 oui, 35 non et 1 abstention.

La présidente. Je tranche en faveur du renvoi.

La pétition 1395-A est donc renvoyée à la commission des transports par 36 oui contre 35 non et 1 abstention.

P 1425-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition "Stop Bouchons"
Rapport de M. André Reymond (UDC)

Débat

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Dans le cas présent, il ne s'agit plus de 2664 signatures, mais seulement de 180 ... Mais cette pétition «Stop Bouchons» concerne toujours le quartier des Eaux-Vives, avec la même problématique de la circulation. Il faut maintenant absolument résoudre les problèmes de ce quartier qui font l'objet, vous le verrez, d'autres points de notre ordre du jour.

Il s'agit en l'occurrence des petits commerçants qui se plaignent car les commerces sont en péril dans le centre-ville et les habitants du manque de places de parking. Nous allons donc certainement parler à nouveau du parking de Pré-l'Evêque, mais le problème est un petit peu délicat.

Je vous propose donc de prendre acte de ce rapport.

Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). Avant d'intervenir pour donner la position des Verts, permettez-moi, Monsieur Reymond, de vous dire que, si vous trouvez qu'il n'est pas respectueux de classer une pétition signée par 2000 ou 3000 personnes, il n'est pas non plus très respectueux de faire un rapport aussi peu complet, qui tient en trois lignes, sur une pétition qui a recueilli 22 000 signatures ! (Applaudissements.)

J'en viens au fond de la pétition. C'est vrai, ça bouchonne à Genève, tout comme il est vrai que nous sommes chaque année de plus en plus nombreux à emprunter les routes de notre canton en deux ou quatre-roues, que nous soyons habitants de Genève ou frontaliers. Il est également vrai que de gros chantiers sont en cours de réalisation, afin d'améliorer l'offre de transports publics pour permettre à Genève, actuellement étouffée par la circulation pléthorique, de retrouver une certaine qualité de vie.

Par ailleurs, plus l'offre de transports publics sera augmentée et améliorée, plus les bus et les trams seront utilisés, plus les déplacements des gens obligés d'utiliser leur voiture seront facilités. Cette situation difficile d'encombrements n'a pas été programmée par quelques décideurs à l'esprit tortueux !

Par contre, il n'est pas inutile de rappeler les recours téméraires lancés par le TCS contre le projet du tram de la rue de Lausanne. Ces oppositions ont retardé le démarrage des travaux; ils ont alors dû se dérouler en même temps que ceux de la ligne des Acacias, occasionnant effectivement des bouchons. Et le TCS a ensuite l'outrecuidance de déposer une pétition contre la situation qu'il a lui-même provoquée ! Bel exemple de pompier pyromane ! Heureusement, le TCS a perdu depuis sa qualité pour agir en matière de recours !

Par contre, la droite a perdu la mémoire: elle a voté intelligemment les budgets pour développer les transports publics et construire de nouvelles lignes de tram. Imaginait-elle que ces travaux importants, aussi bien pour la qualité de vie à Genève que pour les entreprises de la construction et le secteur économique, n'allaient occasionner aucun désagrément ? C'est comme si on proposait à un malade du coeur... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... une transplantation cardiaque pour améliorer sensiblement sa qualité de vie et que celui-ci ,ensuite, refuse l'hospitalisation et les désagréments liés à cette intervention. C'est une réaction caractérielle d'enfant gâté et frustré !

Les Verts souhaitent classer cette pétition, mais, dans un esprit conciliateur, nous proposons à l'Entente de se ressaisir et de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Roger Deneys (S). Votre rapport sur cet objet, c'est vrai, Monsieur Reymond, est franchement lacunaire ! Vous évoquez le court débat qu'il y a eu en commission... Mais un rapport devrait précisément permettre au moins de connaître la nature du débat, quels ont été les arguments avancés et relater le pourquoi et le comment des positions des différents intervenants. C'est vraiment dommage de ne pas mieux comprendre la position des partis ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)C'est d'autant plus dommage que, comme vous allez peut-être le dire tout à l'heure, cette pétition a recueilli plus de 20 000 signatures... Et même si son contenu est relativement surréaliste - comme c'était le cas pour la pétition précédente - dans la mesure où l'on veut tout et son contraire, je me demande, là encore, sur quoi nous pourrions nous baser si elle était renvoyée en commission, car le texte de la pétition ne propose rien... Je suis désolé de vous le dire, mais ce n'est pas très sérieux !

Pour le groupe socialiste, cette pétition n'est ni réaliste ni réalisable, et elle exprime même un certain nombre de contre-vérités. Dans ce sens-là, on ne peut que la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Il est principalement fait mention de la nécessité de prendre des mesures pour améliorer la fluidité de la circulation... Peut-être faut-il le rappeler: le principal ennemi de la fluidité, c'est la voiture !

Une voix. C'est l'homme !

M. Roger Deneys. C'est la voiture ! Le principal ennemi de la voiture, c'est la voiture... Et vous pouvez bien créer toutes les routes ou autoroutes que vous voulez, ouvrir toutes les douanes que vous voulez, plus il y a de voitures plus il y a de bouchons ! On le constate tous les jours. Il n'est même pas nécessaire de limiter la circulation à 30 km/h, quand il y a des bouchons on ne roule même pas à 5 km/h... Avec mon petit vélo, je vais bien plus vite que les voitures ! (Exclamations.)

Si vous voulez, Mesdames et Messieurs de l'Entente, faire appliquer cette pétition, la seule mesure envisageable serait de limiter le nombre de voitures... Alors, je ne sais pas si c'est ce que vous souhaitez, mais je suis d'ores et déjà très heureux des potentielles propositions que vous allez nous faire dans ce sens: un péage urbain, un quota limitant le nombre de voitures dans la République et canton de Genève... Ce sont des mesures très intéressantes. En tout cas, à mon avis, ce sont les seules susceptibles d'améliorer la fluidité de la circulation en ville de Genève.

Je crois toutefois que ce n'est pas ce que vous souhaitez, et je ne pense pas que ce soit réaliste, car la voiture individuelle a aussi sa raison d'être. Tout est question de proportion, tout est question de modération. Or, cette pétition n'est ni modérée ni applicable.

Je vous invite donc, au nom des socialistes, à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. (Applaudissements.)

M. René Desbaillets (L). Je suis quelque peu offusqué des propos de notre collègue Christian Bavarel, qui propose de mettre carrément à la poubelle une pétition approuvée par 22 000 signataires. C'est quand même bien plus que les 14 000 mentionnés tout à l'heure par M. Spielmann... (Rires et exclamations.)

Je pense qu'à l'heure actuelle on est conscient de la nécessité d'augmenter l'offre des transports publics, de réaliser le CEVA... J'étais personnellement à Satigny l'un des moteurs pour la création du RER, pour qu'il soit une colonne vertébrale en direction de la Plaine, pour essayer d'abaisser le nombre de pendulaires... Mais il ne faut quand même pas exagérer ! Aujourd'hui, les professionnels qui doivent circuler dans la journée en ville de Genève pour leur travail, notamment ceux qui sont dans le commerce et doivent effectuer des livraisons - je ne parle pas de ceux qui se rendent à leur travail et en repartent - rencontrent beaucoup de difficultés de circulation. Et l'on ne peut que constater que les bouchons sont «organisés».

Au niveau des chantiers, la désorganisation prévaut et la signalisation est lacunaire. Quand vous arrivez à Vernier en direction de Genève, vous êtes déjà quasiment sur l'autoroute quand vous vous apercevez qu'elle est fermée... Il est scandaleux qu'un semi-remorque soit obligé de reculer parce qu'il s'est engagé sur une autoroute qui est fermée, alors qu'il aurait été facile, 100 mètres avant, de lui signaler d'obliquer à gauche et de prendre l'autoroute par une autre entrée ! Regardez ce qui se passe ces jours-ci au carrefour de la place des Vingt-Trois-Cantons... S'il n'y a eu aucun mort à cet endroit, c'est un miracle ! Je ne sais pas si un drone surveille depuis en haut ce qui se passe... (Rires.)Vous savez évidemment que les voitures polluent en ville de Genève, mais davantage encore dans les bouchons... Un commerçant qui effectue des livraisons toute l'année va utiliser 3000 litres de carburant en plus, en une année, pour livrer exactement au même nombre d'établissements, tout cela à cause des bouchons, sans parler du temps perdu...

Moi qui suis viticulteur, je pense qu'il faut dire oui à Stop Bouchons, car il y a un réel problème en matière de circulation. Il faut absolument améliorer la fluidité de la circulation sur certains axes à Genève.

En ce qui me concerne, je vous propose de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Ivan Slatkine (L). Je vais être très bref. Le mérite de cette pétition est de demander qu'une hiérarchisation du réseau routier soit faite... Le président Cramer nous a effectivement dit que nous avions voté ici, à la majorité, un projet de loi allant dans ce sens. Mais nous attendons toujours la concrétisation de ce projet par une carte mentionnant cette hiérarchisation. Pour le moment, nous n'avons rien vu venir...

En renvoyant cette pétition au Conseil d'Etat, nous montrerons que 22 000 personnes dans ce canton attendent avec impatience la mise en application de ce qui a été décidé dans ce parlement: la hiérarchisation du réseau routier. J'ose espérer que cette carte nous sera bientôt proposée.

M. Roger Deneys (S). Les propos de M. Desbaillets m'ont fait relativement plaisir dans la mesure où je partage ses préoccupations au sujet des déplacements professionnels, étant moi-même concerné par le sujet.

Il est vrai que si les professionnels pouvaient se déplacer de façon correcte à Genève, ce serait merveilleux. Et hiérarchiser le réseau routier ne consiste pas seulement à déterminer les grands et les petits axes, il faudrait que certaines personnes puissent bénéficier d'une sorte de priorité - ce qui n'est malheureusement pas le cas. Mais il faudrait pouvoir l'assumer au niveau politique. Si vous nous disiez que seuls les professionnels qui doivent faire des livraisons peuvent circuler en ville de Genève, je serais peut-être d'accord avec vous, mais je ne crois pas que ce soit l'objectif de cette pétition, et c'est dommage...

Je terminerai en disant qu'il est également possible d'effectuer des livraisons - peut-être pas pour des bouteilles, certes - en vélo.

M. Jean-Marc Odier (R). Je serai également très bref. Je pense que nous pourrions avoir mille fois l'occasion d'avoir la même discussion en ce qui concerne la circulation à Genève, qui se détériore de jour en jour.

J'approuve les propos de M. Slatkine: nous avons voté une loi pour hiérarchiser le réseau routier et nous attendons la carte correspondant à cette loi. Monsieur le chef du département, il faut que l'OTC travail ardemment à la création de cette carte - je crois que c'est en cours - mais, en attendant, la Ville ne devrait pas essayer de mettre en place toutes les mesures qu'elle propose pour bloquer la circulation en ville de Genève.

Je prends l'exemple de Cluse - Roseraie... Une motion a été déposée - d'ailleurs par des députés de la gauche de ce parlement - pour démontrer que les mesures mises en place dans ce secteur sont complètement inadéquates.

Alors, essayons d'organiser le transport, les déplacements, la circulation et évitons que les gens s'affrontent. Mais, s'il vous plaît, avancez dans la réalisation de cette carte et attendez pour prendre des mesures limitant la circulation en ville !

M. André Reymond (UDC), rapporteur. Il faut tout de même souligner que l'action des autorités contredit la volonté populaire... En effet, il a été décidé en votations du libre choix du mode de transport. Ce n'est évidemment pas à la commission de donner des directives au Conseil d'Etat, c'est au Conseil d'Etat, qui reçoit cette pétition, de faire des propositions et de prendre des décisions !

Tout à l'heure, j'ai oublié de citer un chiffre très important... Ce sont bien 22 000 personnes qui demandent que quelque chose se passe au niveau de la circulation, et la hiérarchisation du réseau routier a été soulignée: nous attendons cette carte dans l'espoir que ce quartier des Eaux-Vives se désengorge. Vous me direz que ce n'est pas le seul quartier, mais la pétition «Stop Bouchons» concerne particulièrement celui des Eaux-Vives.

Nous demandons donc que cette pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat.

M. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat. Plus de 20 000 signatures... Il va de soi que le Conseil d'Etat répondra à cette pétition, ce qui nous permettra de faire le point sur un certain nombre de travaux. En effet, si je lis les trois invites de la pétition, je vois que, depuis la date à laquelle les signatures ont été récoltées, les travaux ont bien avancé, et, même, certaines demandes des pétitionnaires sont déjà concrétisées. Je pense que nous sommes en mesure de faire les premiers bilans.

Qu'avons-nous fait ? S'agissant de la fluidité de la circulation - M. le député Odier l'a rappelé très opportunément - la loi a fixé le principe de la hiérarchie du réseau routier et, avec ardeur - comme cela a aussi été relevé - l'OTC est en train de réaliser... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... une carte mentionnant cette hiérarchie. Cette carte fait l'objet d'une vaste consultation auprès des communes genevoises. Cette consultation étant terminée, je pense que cette carte va être finalisée ces prochaines semaines, avec nos partenaires associatifs dans le cadre du Conseil des déplacements.

Pour ce qui est de la planification des chantiers, c'est terminé. Ceux qui ont la curiosité de consulter le site Internet de l'Etat ou ceux qui lisent la «Tribune de Genève» une fois par semaine, le jour où elle traite de mobilité, peuvent découvrir les cartes sur lesquelles sont reportés tous les quartiers de la ville avec toutes les indications utiles en ce qui concerne le début et la fin des chantiers, voire les itinéraires de contournement.

Quant à la planification de l'avenir du réseau routier, vous savez aussi que la loi en fixe dorénavant le principe et que les premiers textes sur la planification du réseau routier circulent au sein des milieux intéressés. C'est donc dire que sur tous ces points, la réponse à la pétition consistera à faire le bilan des travaux dont je vous parle, et ceci, de façon un peu plus développée.

Enfin, s'agissant du libre choix des transports, vous savez que nous y sommes attachés... Ce qui me préoccupe, à vrai dire, c'est de savoir quel choix on offre aux personnes qui se déplacent à pied, qui doivent souvent attendre de longues minutes pour traverser une route à grande circulation, minutes qui sont encore plus longues lorsque c'est l'hiver ou qu'il pleut. Et puis, en matière de libre choix des moyens de transport, je pense aussi aux cyclistes qui risquent leur vie dans la circulation. Cela fait aussi partie du libre choix des moyens de transport, Mesdames et Messieurs les députés.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets d'abord la proposition majoritaire de la commission, soit le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Selon le résultat du vote, nous nous prononcerons quant à son dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des transports (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées par 47 oui contre 33 non.

PL 9425
Projet de loi de Mme et M. Michèle Künzler, Christian Grobet modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01)

Ce projet est renvoyé sans débat à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de clore ici notre séance... (Exclamations.)Attendez une seconde ! Nous reprendrons nos travaux à 20h30. Je vous rappelle que nous traiterons les urgences à ce moment-là. Ensuite, à 22h30, nous examinerons à huis clos un rapport divers.

Nous reprenons donc à 20h30 précises ! Je vous souhaite un bon appétit.

La séance est levée à 18h55.