Séance du
vendredi 29 octobre 2004 à
17h
55e
législature -
3e
année -
12e
session -
77e
séance
PL 9271-A
Premier débat
Le président. Il semble, d'après ce qui m'a été dit, qu'un accord est intervenu, en tout cas avec Mme la rapporteure, pour que le Conseil d'Etat s'exprime d'entrée de cause. Je passe par conséquent la parole à M. le conseiller d'Etat, Pierre-François Unger.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Il est un peu inhabituel que le Conseil d'Etat demande de s'exprimer en début de débat. Et pourtant c'est le cas dans ce débat-ci. C'est le cas pour la raison bien simple qu'à la lecture de votre excellent rapport, Madame la députée, j'ai compris qu'il y avait à la fois un accord de fond et un désaccord de forme.
L'accord de fond concerne la restructuration et la reconstruction du village d'Aigues-Vertes. Cela tient, comme vous le savez tous, à des conditions de sécurité liées essentiellement à l'exploitation de cet ensemble consacré à la prise en charge de personnes handicapées.
Le désaccord de forme tient au fait de voter un crédit d'investissement lorsque les travaux sont terminés: cela a quelque chose d'assez fondamentalement irritant, et j'en conviens! C'est la raison pour laquelle j'aimerais vous donner les explications suivantes. Sans doute savez-vous que le village d'Aigues-Vertes va être reconstruit sur la base de trois piliers de financement: en gros, un tiers du financement est assumé par la Confédération, l'OFAS; un deuxième tiers par des fonds privés, récoltés par le Conseil de fondation extrêmement dynamique d'Aigues-Vertes; et un troisième tiers, par l'Etat de Genève. Ce montage est bien connu en matière de financements d'investissements de homes pour personnes handicapées, et je dois dire qu'Aigues-Vertes a mis un accent et une énergie toute particulière pour trouver les fonds privés. Cette ferme est donc le premier élément d'un certain nombre de reconstructions qui s'imposent. Mesdames et Messieurs les députés, vous n'êtes pas sans savoir que, mois après mois, l'OFAS rétrécit l'investissement qu'il consent dans les nouvelles places pour personnes handicapées. Raison pour laquelle, d'ailleurs, le canton de Genève a été le seul - mais il l'a fait - à faire recours contre ces sauvages retraits de financements de l'OFAS.
Néanmoins, pour les projets qui étaient prêts, et où deux des trois piliers étaient déjà réunis, Aigues-Vertes a décidé d'aller de l'avant, pour ne pas risquer de perdre une partie de la subvention de l'OFAS qui avait été consentie. «Et le Conseil d'Etat, dans cette affaire ?», me direz-vous. Le Conseil d'Etat avait préparé un projet de loi qui accompagnait le projet de budget 2004. Nous ne reviendrons pas sur les événements qui se sont passés en septembre 2003 et qui ont entraîné un aller-retour inhabituellement rapide de ce projet de budget entre le Conseil d'Etat, le Grand Conseil et à nouveau le Conseil d'Etat. Et pendant la durée du travail - revoir entièrement le processus budgétaire - que votre Conseil avait confié au Conseil d'Etat, ce dernier a décidé de bloquer les projets d'investissements prévus en accompagnement du projet de budget 2004.
C'est la raison pour laquelle, dès que le projet de budget 2004 «prime» vous a été remis entre les mains à fin mars, le projet d'Aigues-Vertes a été livré à votre Conseil, et cela en date du 4 avril. C'est donc une conjonction très inhabituelle, qui débouche sur quelque chose, je l'espère, de tout a fait exceptionnel, et dont le Conseil d'Etat prend sa part de responsabilité, mais dans un contexte qui est celui que je viens de vous rappeler. Merci de faire un bon accueil à ce projet.
M. Jacques Baud (UDC). Dieu sait si, à l'UDC, on est pour Aigues-Vertes ! On soutient cette institution. Mais là, en l'occurrence, des choses un peu étranges se sont passées. On a construit une ferme qui n'était pas adaptée aux normes fédérales: il a fallu refaire cela. Il y a des responsabilités... alors, que les responsables assument ! C'est pour cela que nous nous abstiendrons. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (AdG). Je crois que l'on doit tous faire un examen de conscience - et vous particulièrement Monsieur Baud, puisque M. Unger vient de nous dire que c'est parce que vous avez renvoyé - si j'ose dire manu militari -le budget de l'année passée que notre Grand Conseil n'a pas pu se saisir rapidement de ce projet de loi. Nous avons quasiment une année de retard, et cette ferme a effectivement été construite. Malheureusement nous sommes arrivés comme «la grêle après les vendanges». Cela étant, sur le fond de cette affaire, nous avons donc pris acte de la situation. Nous ne sommes pas maîtres d'oeuvre. Effectivement, comme le conseiller d'Etat M. Unger l'a relevé, il y a trois sources de financement, dont une se tarit très rapidement. Et, au sein de la commission des travaux, nous avons bien pris la mesure de ce phénomène qui fait qu'aujourd'hui, et je m'en excuse auprès de M. Unger, on doit prendre des garanties pour que l'ensemble des réformes très dynamiques et très importantes prises en faveur du village d'Aigues-Vertes soient réalisées avant que la source de l'OFAS ne se tarisse. Donc, même si le projet de loi concernant la suite n'a pas encore été déposé devant notre Grand Conseil, nous l'avons déjà agendé à la commission des travaux. Nous attendons du Conseil d'Etat qu'il s'engage dès maintenant à déposer très rapidement ce train de projets de lois, pour que nous puissions, à la fin de cette année, mettre un terme à cette rénovation qui est hyper nécessaire. En effet, comme nous l'avons remarqué lors d'un déplacement sur place, les conditions dans lesquelles ont vécu les villageois d'Aigues-Vertes ne sont peut-être pas déplorables, mais certains ont dit que ça faisait penser à nos colonies de vacances d'antan ! Il est vrai que, depuis lors, les normes de sécurité ont largement augmenté. Mais s'il arrivait aujourd'hui un accident, un incendie, on n'ose pas imaginer les dégâts que cette situation provoquerait. Je vous encourage donc - parce que nous avons fait notre boulot à la commission des travaux - d'une part, à voter ce projet de loi très rapidement et, d'autre part, à demander - j'imagine que M. Unger reprendra la parole - que le Conseil d'Etat s'engage à déposer, avant la fin de cette année, les projets de lois qui suivront. Ce projet doit se concrétiser pour que l'ensemble des villageois soit à l'abri des intempéries et de tout ce qui peut se passer dans ce genre d'institution.
Mme Loly Bolay (S). L'essentiel a été dit. Pour le groupe socialiste, nous nous sommes effectivement rendu compte sur place de la nécessité, de l'urgence, d'effectuer ces travaux. Cela d'autant plus, Monsieur le conseiller d'Etat, qu'il y avait eu par le passé des incidents mineurs et qu'il fallait donc mettre en place un dispositif d'urgence pour que ces travaux soient réalisés.
Cela dit, j'aimerais faire une remarque par rapport à ce que nous avons vu sur place. Bien qu'il y ait eu une subvention cantonale de quatre millions et demi, nous avons vu beaucoup d'entreprises non genevoises sur le chantier. Cela nous a un peu interpellés et nous en avons parlé en commission. Etant donné la subvention cantonale, il est clair pour nous qu'il faudrait donner la priorité aux entreprises genevoises, en raison de l'important taux de chômage à Genève - dont nous avons parlé à la dernière session - et du nombre d'entreprises genevoises qui, aujourd'hui, recherchent du travail. Voilà mes interrogations par rapport à cela, Monsieur le conseiller d'Etat.
M. Thomas Büchi (R). L'essentiel a été dit et M. Pagani a bien résumé l'état de nos travaux. Et c'est vrai, Monsieur le conseiller d'Etat en charge du département de l'action sociale et de la santé, que nous avions eu, à l'unanimité, à la commission des travaux, un geste de mauvaise humeur, pour avoir été mis devant le fait accompli.
Je crois que vos explications ont aujourd'hui été convaincantes au niveau des retards. En ce qui nous concerne, le groupe radical naturellement soutient Aigues-Vertes à 150% et remercie pour leur travail remarquable les gens qui s'occupent de cette fondation, dont beaucoup le font à titre bénévole, il n'est pas inutile de le rappeler. Et si des bénévoles ont pris l'initiative de bousculer un petit peu «la lenteur» qui a été celle de l'administration, elle a été bénéfique et salutaire pour le projet; elle a également permis de décrocher un certain nombre de subventions.
Néanmoins, il est important que les prochains projets de lois nous soient présentés dans l'ordre donné, pour que nous puissions faire correctement notre travail de parlementaires selon notre mission. Pour le reste, je ne peux que m'associer à ma préopinante, Mme Loly Bolay, pour faire en sorte que les appels d'offre puissent, non pas privilégier les entreprises genevoises, mais, en tout cas, qu'on ait pour elles un regard bienveillant puisqu'il s'agit de l'argent public de notre canton. Si le montant des offres n'est pas soumis à l'AIMP et que l'on peut rester un peu plus «local», cela me paraît bénéfique pour notre économie.
M. Roger Deneys (S). J'aimerais attirer l'attention de ce Conseil sur le soutien accordé aux entreprises genevoises. La Fondation Aigues-Vertes a un conseil de fondation dans lequel tous les partis sont représentés, et tant les socialistes que les radicaux ont pu exprimer leurs préférences en termes d'entreprises, si les marchés n'étaient pas soumis aux AIMP.
Donc, je pense qu'il ne faut pas faire un procès d'intention à Aigues-Vertes. Il est certes souhaitable de favoriser les entreprises genevoises, mais en même temps, il est relevé à la page 17 du rapport qu'une offre d'une entreprise genevoise était 50% plus chère que celle d'une entreprise d'un autre canton. Il faut le regretter, mais les entreprises genevoises doivent aussi être compétitives, et le but n'est pas de faire ici un procès d'intention à Aigues-Vertes.
La loi 9271 (nouvel intitulé) est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.