Séance du
samedi 26 juin 2004 à
10h
55e
législature -
3e
année -
10e
session -
58e
séance
PL 9264-A
Suite du deuxième débat (budgets de fonctionnement)
CHAPITRE 7: ECONOMIE, EMPLOI ET AFFAIRES EXTERIEURES(suite)
Incubateurs - Eclosion (Rub. 79.01.365.12)
Le président. Après l'examen de la rubrique «Aéroport de Genève», nous passons au chapitre de la promotion économique. Nous sommes saisis, à la rubrique 79.01.365.12, d'un amendement présenté par MM. les députés Alberto Velasco, Laurence Fehlmann Rielle et Alain Charbonnier. Cet amendement vise à augmenter cette rubrique d'un montant de 600 000 francs. Je donne la parole à M. le député Alain Charbonnier.
M. Alain Charbonnier (S). Il y a quelques mois, nous avons voté en séance plénière une loi soutenant la création de l'incubateur Eclosion - et ce, à l'unanimité de ce parlement. De multiples arguments avaient, à cette occasion, été développés en faveur de cet incubateur. Je pense principalement à la création d'entreprises et d'emplois ainsi qu'au développement d'un lien important entre l'Université et la création de start-up. Il est maintenant proposé de supprimer une grosse partie de cette subvention.
Dans la situation actuelle du marché de l'emploi et au vu des difficultés qu'il y a à trouver les sommes nécessaires à la création de jeunes entreprises, nous nous opposons à la diminution de cette subvention. Nous vous proposons donc de rétablir ces 600 000 francs. Cette somme ne représente, somme toute, pas un montant si important par rapport aux enjeux qui nous avaient été présentés par le département et sur lesquels nous nous étions longuement penchés en commission. Quelques mois après le vote de cette loi, nous saisissons mal l'utilité de supprimer - ou, du moins, de diminuer - la subvention à cet incubateur !
M. Antonio Hodgers (Ve). Mon propos ne vise pas à remettre en cause la coupe proposée pour cette ligne budgétaire, mais à obtenir certaines précisions de la part de M. Lamprecht. Les Verts sont, comme les socialistes, nettement en faveur de la logique des incubateurs - logique qui permet de développer des entreprises et de créer des emplois par le biais de l'innovation dans notre région. Il semble cependant que l'incubateur Eclosion tarde à se mettre en place et que les structures dont il bénéficie actuellement soient très réduites. Comme il s'agit d'une nouvelle structure qui n'aura vraisemblablement pas besoin du budget plein qui avait été prévu pour 2004, nous sommes, ainsi que nous l'avons indiqué en commission, d'accord pour réaliser ici une économie de 600 000 francs.
Cependant, comme vous le savez, Monsieur Lamprecht, cette ligne budgétaire porte sur deux autres institutions: Fongit et Genilem. En tant que jeune entrepreneur, je bénéficie du soutien de Genilem et je dois dire que ce soutien s'avère fort efficace. Sans vouloir trop entrer dans les détails, ma préoccupation est la suivante: je souhaite savoir si les 600 000 francs qui seront retranchés à cette ligne budgétaire le seront exclusivement sur Eclosion et si, dès lors, les subventions pour Genilem et pour Fongit ne seront pas touchées dans le cadre de ce nouveau budget 2004. Pleinement rassurés par cette précision, nous pourrons voter cette ligne budgétaire !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Lamprecht, souhaitez-vous intervenir à la fin du débat ? (Approbation de M. Lamprecht.)La parole est donc à M. le député Alain Meylan !
M. Alain Meylan (L). On ne pourra pas nous dire, comme on le fait depuis quelque temps dans le cadre de l'analyse du budget 2004, que le budget du DEEE n'a pas fait l'objet d'une attention particulière: nous avons en effet disposé d'une semaine ainsi que de l'avis de divers représentants du département pour imaginer des économies !
S'agissant de cette économie particulière - qui, en réalité, n'est évidemment pas une économie mais, comme vous le savez, une non-augmentation de la subvention - je tiens tout particulièrement à insister sur le fait que la somme de 1,5 million qui sera allouée au budget devra être affectée à des organismes qui ont fait leurs preuves et qui fonctionnent bien. Je veux ici nommer Genilem et Fongit, sans oublier l'OGCM, qui font vivre un nombre important de petites et moyennes entreprises. Il en va de nombreux emplois et de la survie de ces organismes. Je tenais à exprimer ici l'avis de l'Entente: nous souhaitons que les fonds qui seront votés soient affectés à ces organismes !
Une voix. Très bien ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Il est vrai, Monsieur Meylan, que c'est l'une des coupes au sujet de laquelle nous avons obtenu des réponses - et il s'agit peut-être de la seule coupe... Mais - mais ! - qui a posé la question en commission ?!
Des voix. Alberto ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco. Voilà ! On aurait pu croire que, prise d'un subit remords, l'Entente se soit dit: «Là, il faudrait tout de même demander des informations». Mais non ! Ce n'est pas vous qui avez posé la question: c'est nous ! (Rires.)
Une voix. Merci, Alberto !
M. Alberto Velasco. Je me suis étonné que les grands entrepreneurs, les grands gestionnaires et les grands financiers de cette République, qui devraient nous donner des leçons sur la meilleure manière de créer des emplois, coupent dans ce domaine. Je me suis dit la chose suivante: «Que la gauche coupe là, ce n'est pas étonnant, car quelquefois... Mais que la droite coupe précisément là, ce n'est pas possible !». (Rires.)Il n'aurait pas été étonnant que la gauche coupe dans ce secteur car, historiquement, on nous a toujours reproché de ne pas être suffisamment sensibles à la création d'entreprises - ce qui est par ailleurs inexact. En revanche, il est étonnant que la droite décide de couper dans cette subvention alors que ce projet a été soutenu par tous, alors qu'il promeut de nouvelles technologies - ce que je trouve fort intéressant - alors que l'on a constaté une augmentation du chômage à Genève et alors que notre République a précisément besoin de jeunes entrepreneurs qui mettent en place des entreprises pérennes ! Voilà un projet intéressant qui aurait mérité l'appui de ce Grand Conseil !
Il est exact, Messieurs de l'Entente, que j'ai posé certaines questions et que nous avons obtenu des réponses de la part du département. Or, vous n'avez pas été déçus par ces réponses ! J'ai été déçu. Mais vous, non ! (Brouhaha.)Car vous étiez bien davantage préoccupés par la coupe elle-même que par la création d'entreprises ! Pour ma part, j'aurais aimé que le département me donne la réponse suivante: «Nous avons non seulement besoin de ces 600 000 francs, mais nous avons besoin de 2 millions supplémentaires !» Or qu'a répondu votre département, Monsieur le président ? «Non, nous n'avons pas besoin de cette somme, on peut couper dare-dare !» Alors, excusez-moi, Monsieur le président, mais, sur un sujet aussi important pour l'avenir de notre République que sont les hautes technologies, je pensais que votre département répondrait: «Compte tenu de toutes les dispositions que l'on a instaurées, compte tenu de toutes les mesures que vous nous avez demandées, compte tenu de ce projet de loi, nous avons besoin d'encore plus d'argent.» Je vous rappelle que Genève dispose d'une université et que nous avons construit Uni III à force de millions. Mais non ! Les représentants du département ont répondu: «Non, non, vous pouvez y aller tranquillement, coupez !» Je ne comprends pas !
Et je m'attendais à ce que mes collègues des bancs d'en face disent: «Ah non, c'est inadmissible ! Nous ne comprenons pas que vous ne soyez pas plus dynamiques dans la création d'entreprises !» Mais non ! Vous étiez tout contents ! «On coupe, ça va très bien !» Cela ne fait rien, car l'important, ce n'est pas de créer des entreprises, mais c'est de couper... C'est là que l'on saisit votre objectif: votre objectif n'est nullement de résoudre les problèmes de cette République... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Mais il est de montrer au peuple que vous savez couper, couper, couper ! Voilà quel est votre objectif !
M. Christian Luscher. Les élections approchent !
Des voix. Coupez, coupez, coupez ! (Le président agite la cloche.)
M. Alberto Velasco. Je change de terme: votre objectif, c'est plutôt de licencier, licencier, licencier ! Vous le faites dans le privé, vous le faites dans le public !
Je souhaite vivement, Monsieur le président, que vous nous expliquiez pourquoi vos fonctionnaires, dont la tâche consiste à mettre en oeuvre les projets que nous votons, n'ont pas fait preuve de plus de dynamisme pour développer le projet fort intéressant qu'est Eclosion et pour permettre la création de nouvelles entreprises ! Genève doit se lancer dans les nouvelles technologies. Nous avons besoin, non d'un tissu industriel importé, mais d'un tissu genevois, conçu par des entrepreneurs du canton, et qui ne quitte pas le sol genevois une fois les aides reçues: ce tissu restera dans le canton, il créera des emplois et des cadres, il alimentera nos écoles ! C'est pour cela que je tiens énormément à ce projet de loi et que je souhaite obtenir des réponses précises. Et j'aimerais, Monsieur le président, que vous disiez à ces messieurs que vous avez besoin de ces 600 000 francs ! (Applaudissements.)
Mme Salika Wenger (AdG). Mon interpellation vous concerne, Monsieur le président du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures, mais elle concerne également M. le conseiller d'Etat Beer.
Je dois avouer que je ne vois pas d'un mauvais oeil le petit retard pris par ce projet. Pourquoi ? Je vous rappelle que, lorsque nous avions examiné ce projet de loi en commission, j'avais manifesté certaines craintes - craintes que je continue à éprouver aujourd'hui. A l'époque, j'avais trouvé que la base légale pour les transferts de technologie était floue ou, du moins, insuffisante. C'est pourquoi j'avais pris contact avec l'Université au mois de novembre ou de décembre de l'année dernière. On m'avait alors expliqué qu'une commission planchait sur de nouveaux articles et qu'un rapport de cette commission nous parviendrait en février 2004. Or nous sommes au mois de juin, nous n'avons toujours pas reçu ce rapport, et les bases légales pour les transferts de technologie sont toujours aussi floues ! Aussi, vous comprendrez que je trouve quelque peu difficile de créer ces incubateurs sans avoir la certitude que le bénéfice du travail effectué par les chercheurs de l'Université grâce aux deniers publics revienne à ceux qui les ont payés - c'est-à-dire les contribuables. Je souhaite donc savoir quand nous disposerons de la base légale indispensable pour que les incubateurs fonctionnent de manière légale.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. En préambule, je vous remercie de votre fantastique soutien à cet incubateur, car il s'agit d'un projet auquel je crois également.
M. Velasco m'a demandé pourquoi je n'avais pas réagi en déposant un contre-amendement à l'amendement proposé en commission. Je souhaite tout d'abord dire que je n'ai pas pu discuter de cet amendement: ce dernier est arrivé en commission des finances sans que je participe à son élaboration. On m'a simplement annoncé: «Voilà, il y a une coupe de 600 000 francs.»
Pourquoi n'ai-je pas déposé de contre-amendement ? Il y a deux raisons à cela. La première, c'est que le projet biotechnologique Eclosion, qui nécessite le plus d'argent, vient de débuter, et ce alors que nous sommes bientôt à mi-juin. J'admets donc que l'on peut réaliser des économies pour 2004 dès lors que le démarrage du projet a pris un peu de retard. Cependant, on ne pourra peut-être pas réaliser des économies aussi substantielles que vous le dites, car on risque de le faire au détriment de Genilem ou de la Fongit.
La seconde raison, c'est que la mise en oeuvre de ce projet n'est pas si simple car, si 7,5 millions de capitaux sont déjà promis, toute la levée de capitaux reste à faire: il faudra mener toute une recherche pour trouver des capitaux privés auprès d'entreprises. Voilà pourquoi je n'ai pas déposé de contre-amendement.
Il est clair qu'une coupe de 600 000 francs, c'est important, et une coupe de 300 000 francs m'arrangerait. C'est dans ce sens que je plaide, car une coupe de 300 000 francs me permettrait de faire face aux engagements pris par le département tout en réalisant une économie non négligeable. Il ne serait pas cohérent de dire aujourd'hui qu'il nous faut cet argent, puis de ne pas être dans la cible à la fin de l'année. Par prudence, j'accepte donc volontiers un amendement de 300 000 francs.
Je souhaite par ailleurs répondre à Mme la députée Wenger. Vous m'aviez déjà interpellé sur le même sujet lorsque nous avions débattu du projet de loi portant sur les incubateurs. Il me semble vous avoir répondu que nous disposons des garanties éthiques nécessaires, puisque le projet Eclosion comprend une commission d'éthique présidée par le Professeur Robin Offord, qui fait figure de référence à l'Université de Genève. Nous travaillons en outre dans le respect de la loi-cadre sur le développement économique qui a été votée par ce Grand Conseil et qui aborde toutes les problématiques relatives au développement durable ou encore aux questions éthiques. Je vous rassure donc, Madame la députée: rien ne sera fait au hasard ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter sur l'amendement visant à augmenter la rubrique 79.01.365.12 de 600 000 francs. Nous procéderons par appel nominal. Celles et ceux qui acceptent cet amendement répondront oui, celles et ceux qui le refusent répondront non.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 23 oui et 6 abstentions.
Affaires régionales, européennes et coopération au développement (Rub. 79.02.00)
M. Bernard Lescaze (R). Je n'ai pas d'amendement et mon intervention sera brève. Néanmoins, puisqu'on en est à la direction des affaires extérieures, relations régionales, transfrontalières et européennes, et que l'on arrive à l'heure des bilatérales, j'invite très sérieusement M. le président du département de l'économie à vérifier le bon fonctionnement de ce service, notamment vis-à-vis des municipalités françaises de Savoie. J'ai moi-même eu l'occasion de rencontrer plusieurs responsables de ces municipalités au cours de l'année dernière à propos du Traité de St-Julien. Et j'ai été frappé de constater que ces élus français étaient extrêmement critiques à l'encontre de votre service et de son activité - ou, plutôt, de son inactivité... J'ai également été frappé par la manière dont ils se plaignaient de ne pas obtenir de réponse à des problèmes qui ne me concernent pas mais que, semble-t-il, ils rencontrent avec vous.
Comme nous pourrons l'observer lorsque nous en débattrons, ce sont les mêmes personnes qui s'occupent des subventions destinées à la solidarité internationale - domaine où il y a également eu quelques problèmes. Alors, bien que cela ne me regarde pas, je vous invite à examiner attentivement ce problème l'année prochaine. Il est en effet désagréable d'être, alors qu'on n'y connaît rien, non pas pris à partie, mais interrogé par certains élus français - je le reconnais, de gauche généralement ! - au sujet du fonctionnement de ce service et de certains programmes. Je m'arrête ici, je tenais simplement à vous faire officiellement savoir cela.
M. Antoine Droin (S). S'agissant de l'amendement que nous avons présenté sur la solidarité internationale... (L'orateur est interpellé.)Que se passe-t-il ?
Le président. Nous ne traitons pas encore de cet amendement, Monsieur le député !
M. Antoine Droin. Dans ce cas, j'interviendrai tout à l'heure !
Le président. Tout à fait ! M. le conseiller d'Etat Lamprecht va vous répondre, Monsieur Lescaze.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Monsieur le député, vos propos sont tout simplement gratuits ! J'ai le sentiment que les relations avec nos amis français sont excellentes - et j'en ai des preuves quotidiennement ! Si, pour une quelconque raison, vous avez un problème avec la directrice de ce service, venez me voir et nous en discuterons !
Des voix. Ahhh !
M. Carlo Lamprecht. Je ne peux cependant pas accepter que l'on déclare gratuitement: «Les autorités de St-Julien m'ont dit que les relations avec ce service n'étaient pas bonnes» ! C'est trop facile ! Venez avec des faits, venez avec des preuves, et l'on en discutera ! Je suis prêt à vous recevoir et à en parler avec vous ! (Applaudissements. L'orateur est interpellé par M. Lescaze.)
Le président. S'il vous plaît, Monsieur le député Lescaze, veuillez attendre que je vous donne la parole ! (Protestations de M. Lescaze.)Vous aurez la parole ! Je vous appelle cependant au calme, car on ne peut pas à la fois plaider pour un vote rapide du budget et intervenir sur des questions, certes importantes, mais qui nous empêchent de traiter les nombreux amendements que nous devons encore voter ! Vous avez la parole, Monsieur le député !
M. Bernard Lescaze (R). Monsieur le président, la discussion budgétaire permet d'intervenir au moment où vous appelez les différentes rubriques. Vous avez appelé la direction des affaires extérieures, je parle !
C'est au sein des services du département que l'on aurait été les premiers ennuyés si un amendement avait été déposé... Je n'en dépose pas, car il ne s'agit que de la première étape.
En revanche, je n'accepte pas, Monsieur le conseiller d'Etat, que l'on dise de remarques qui se veulent constructives qu'elles sont gratuites ! Vous aurez l'occasion de regretter d'avoir déclaré que mes remarques étaient gratuites ! (Protestations.)
Le président. Bien. Je vous appelle au calme...
Une voix. Carton rouge !
Le président. J'hésite... (Ton amusé.)Je l'ai dans la main, j'hésite... (Le président brandit un carton jaune. Applaudissements.)
Le président. Soyons sérieux ! Nous passons à la rubrique «Solidarité internationale».
Subventions à des institutions privées (Rub. 79.04.00.365.02)
Aide technique aux pays en voie de développement (Rub. 79.04.00.367.01)
Le président. La situation est quelque peu compliquée, car nous sommes saisis d'une série d'amendements. Le premier a été déposé par M. le député Iselin à la rubrique 79.04.00.365.02; cet amendement vise à retrancher 1 million de francs à cette rubrique.
Un deuxième amendement a été déposé par le même député à la rubrique 79.04.00.367.01; il s'agit, cette fois, de retrancher 7 millions.
Je vous propose de traiter ces deux objets conjointement, car il s'agit de la même problématique.
Enfin, un troisième amendement a été déposé par l'Alternative à la rubrique 79.04.00.367.01; cet amendement consiste à ajouter 1 813 214 francs à cette rubrique.
Afin que l'on ordonnance quelque peu nos travaux, je donne la parole à M. le député Droin, qui présentera l'amendement de l'Alternative. Je passerai ensuite la parole à M. le député Iselin pour la présentation de ses amendements, après quoi nous débattrons.
M. Antoine Droin (S). Pour une fois, je suis d'accord avec le parti libéral ! Nous avons certes encore une petite divergence de 0,3 %, mais ce n'est pas beaucoup... Peut-être nous entendrons-nous un jour sur cette question.
J'aimerais citer la philosophie du parti libéral qui a d'ailleurs été défendue à Berne lors des votes de l'automne passé sur les restrictions budgétaires. Le parti libéral a, à cette occasion, adopté une position tout à fait intéressante que je tiens à vous livrer - du moins partiellement, pour éviter de faire trop long. Je vous cite ici les propos de M. Serge Beck: «Les libéraux ont toujours soutenu la position du Conseil fédéral selon laquelle nous devons atteindre 0,4 % du PIB en 2010. Ces visées doivent être maintenues malgré les difficultés financières. Ce but de 0,4 % n'est d'ailleurs pas exorbitant. Certes, lorsqu'on a des difficultés financières, il faut faire des économies, mais il ne faut pas les faire de manière linéaire, sans choix de priorités. L'aide au développement fait partie de priorités libérales que l'on ne doit pas sabrer, d'abord pour des raisons éthiques. Ensuite, nous sommes un des pays les plus prospères du monde. Dès lors, nous devons aussi faire bénéficier de cette prospérité des pays qui n'ont pas cette richesse. Nous ne connaissons pas la guerre. Nous n'accomplissons aucun effort de police internationale à quelques exceptions près. Nous ne sommes pas un Etat intervenant dans ces domaines-là. Nous avons donc aussi un devoir supplémentaire de solidarité à l'égard des pays pauvres et des autres pays riches qui font d'autres efforts dans ce secteur».
Je vous cite une dernière phrase sur cette question: «Il s'agit d'aider les pays du Tiers-Monde, car c'est dans l'intérêt de la Suisse. On sait que, sur un franc d'aide versé à l'étranger, c'est 1,4 ou 1,6 franc qui vient augmenter le PIB de notre pays. On sait aussi qu'à ce sujet sont en cause 13 000 à 18 000 emplois en Suisse». Il est certain que cela ne représente pas 13 000 ou 18 000 emplois à Genève, mais cela représente tout de même un certain nombre d'emplois dans notre canton !
J'aimerais maintenant m'adresser à l'UDC, puisque l'on discute de deux de ses amendements...
M. Pierre Weiss. C'est sur le plan suisse !
M. Antoine Droin. C'est effectivement sur le plan suisse. Il s'agit néanmoins d'une prise de position claire et ferme du parti libéral - que je vous encourage à soutenir et à promouvoir non seulement aujourd'hui, mais également dans les années à venir !
J'en viens maintenant à l'UDC, dont on peut aisément souligner le double jeu. Les membres de l'UDC ne cessent de répéter que notre pays connaît une trop forte immigration, car la plupart des immigrés viennent chez nous non pour demander l'asile, mais parce qu'ils ne trouvent pas de travail chez eux. Dès lors, il ne faudrait pas les recevoir, mais il faudrait les aider dans leur pays, où ils doivent rester. Or, si le discours de l'UDC est tel, l'engagement de ses représentants au parlement fédéral - et, je peux ajouter à mon profit, au parlement genevois - est tout autre, puisque ceux-ci demandent presque unanimement de couper les crédits... Alors, cherchez l'erreur !
Je vous recommande donc de rejeter les amendements de l'UDC et de voter l'amendement proposé par l'Alternative ! (Applaudissements.)
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
Mme Anne Mahrer (Ve). En 2001, Genève pionnière: le Grand Conseil genevois adopte une loi engageant le canton à consacrer au moins 0,7 % de son budget annuel de fonctionnement à l'aide internationale. L'ONU avait montré la voie en fixant ce même pourcentage de 0,7 % du PNB - la moyenne européenne étant aujourd'hui à un taux de 0,35 % que la Confédération atteint péniblement.
En 2003, Genève dernière de classe: les sommes allouées à la solidarité ne représentent que 0,17 % de son budget de fonctionnement. Plusieurs communes genevoises font beaucoup mieux, elles dépassent même le 0,7 % ! Je n'en veux pour preuve que ma commune de Puplinge, dont je suis très fière puisqu'elle consacre pratiquement le 1 % de son budget de fonctionnement à l'aide internationale ! (Applaudissements.)
Nous nous devons d'être un relais pour les populations des pays du Sud. Et si nous voulons que les associations engagées pour la solidarité remplissent leur mission, il s'agit de mettre en oeuvre la loi votée en 2001. Les Verts soutiendront bien entendu l'amendement de l'Alternative et ne peuvent qu'avoir honte de l'amendement déposé par l'UDC ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la députée. Le Bureau vous propose de clore la liste. Sont encore inscrits MM. Iselin, Brunier, Pagani, Meylan, Hodgers, Thion et, pour conclure, M. le conseiller d'Etat Lamprecht. Je donne la parole à M. le député Robert Iselin.
M. Robert Iselin (UDC). Le problème est extrêmement simple...
Une voix. Oui, Robert !
M. Robert Iselin. Contrairement à ce que prétend la personne qui est intervenue avant moi, l'UDC n'est pas insensible à l'étranger. Elle estime cependant que l'on doit mettre ses finances en ordre avant de penser aux autres. J'ignore quel est l'état des finances de Puplinge - car je ne peux pas m'occuper de surcroît de quarante-cinq communes genevoises... - mais j'imagine que cette commune a réalisé des bénéfices. Je ne vois dès lors absolument pas ce qui s'oppose à ce qu'elle vienne en aide à l'étranger. En revanche, compte tenu de la situation de l'Etat de Genève, je trouve insensé - insensé ! - que l'on envisage de distribuer 16 millions à l'étranger - somme qui ira notamment se perdre au Nigeria... (Protestations.)On me signale que, selon un article paru dans la «Tribune de Genève» d'aujourd'hui, on a attrapé toute une clique de Nigériens chez nous ! Alors, ça suffit ! Arrêtez cette comédie ! Faites d'abord de l'ordre dans les finances, puis on en reparlera !
M. Christian Brunier (S). Monsieur Iselin, vous nous avez parlé de priorités. Mais, alors que les trois quarts de la population mondiale vivent dans des conditions inacceptables, alors que 40 000 enfants meurent chaque jour dans le monde, quelles sont vos priorités ?! Quelles sont vos priorités ? Les pays que vous avez évoqués subissent, de surcroît, un réel pillage de la part des multinationales et des grandes puissances de ce monde - et vous le savez fort bien !
Que faut-il faire ? Tous les partis ici présents, y compris l'UDC, soulignent continuellement le rôle essentiel de la Genève internationale. Tout y passe: Genève est la «cité de la paix», la «capitale des droits de l'Homme», la «cité de l'humanitaire»... Mais que faisons-nous concrètement ?! Une mesure a été adoptée au cours de la dernière législature: il s'agissait de consacrer le 0,7 % du budget de fonctionnement à la solidarité internationale. Tous les partis qui siégeaient à l'époque dans cette enceinte ont partiellement ou totalement soutenu ce projet de loi. Nous en sommes bien loin aujourd'hui ! Nous demandions simplement à l'une des régions les plus riches du monde de consacrer une quarantaine de millions - sur un budget total de 7 milliards ! - à la solidarité internationale. Le Conseil d'Etat propose d'y consacrer 16 millions; la majorité de droite a déjà décidé de couper 1,8 million, et l'UDC vient de proposer une nouvelle coupe de 7 millions. Il ne reste donc quasiment rien pour la solidarité internationale, et cela alors que nous nous targuons toutes et tous d'être la capitale des droits de l'Homme ! On constate une nouvelle fois votre cohérence en la matière...
Il est dans l'intérêt de tous d'améliorer les conditions de vie des pays les plus pauvres. Une telle amélioration aura un impact positif sur les problèmes que chacun connaît, par exemple, en matière de migration ou de développement durable. En 2003, Mesdames et Messieurs de l'UDC, le nombre de réfugiés dans le monde a baissé de 18 %. Et si ce nombre a diminué, ce n'est pas parce que l'UDC a développé des thèses de haine, mais c'est parce que certains pays ont investi dans la solidarité internationale !
Ultime remarque: la dernière fois que nous avons abordé cette question, les représentants de l'UDC ont déclaré vouloir donner la priorité aux plus pauvres de Genève avant de donner aux pauvres des autres nations. Le taux et la notion de pauvreté sont certainement différents entre la Suisse et les autres nations, mais tel était leur programme. Or, à l'occasion de ce budget, vous avez tout coupé aux plus pauvres de ce canton ! Vous avez sauvagement coupé dans le social ! Vous coupez 20 millions aux HUG ! Vous coupez dans les EMS ! Votre programme est très clair... (L'orateur est interpellé.)Votre programme est très clair: il consiste à développer la pauvreté ! Tant à Genève que dans le monde ! Il consiste à tirer un trait sur la solidarité à Genève comme dans le monde ! Ceux qui défendent les plus défavorisés de la planète sont aussi ceux qui défendent les plus défavorisés à Genève, et vous ne faites pas partie de ce camp ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous signale l'arrivée à la tribune de Mme Christine Sayegh, ancienne présidente du Grand Conseil. (Applaudissements.)La parole est à M. le député Rémy Pagani.
M. Rémy Pagani (AdG). Je m'en voudrais d'interrompre le présent débat sur la proposition de l'UDC de sabrer dans l'aide internationale, mais je me pose une question concernant la proposition de coupe dans le fonds de lutte contre la drogue. Vous me contredirez si nécessaire, Madame la présidente, mais, si j'ai bien compris, l'UDC nous propose de couper une certaine somme dans ce fonds. J'aimerais savoir si cela est exact. Si tel était le cas, je trouverais cette proposition pour le moins spéciale dans la mesure où le fonds de lutte contre la drogue est autoalimenté par les saisies de la police. Je verrais donc mal l'objectif d'un tel amendement !
Je souhaite des précisions sur ce point, car il a été question, notamment lors de l'intervention de M. le président, d'un amendement concernant ce fonds. Si tel était le cas, je me réserverais la possibilité d'intervenir une nouvelle fois pour expliquer quelle est l'utilisation du fonds de lutte contre la drogue. Je trouverais inadmissible que l'on propose d'entamer cette subvention !
La présidente. A ma connaissance, l'amendement de M. Iselin porte sur la rubrique 79.04.00.365, soit sur la «Solidarité internationale, subvention aux institutions privées», et non sur le fonds de lutte contre la drogue. Il s'agit d'une autre rubrique ! (Protestations de M. Pagani.)Je suis navrée, mais je ne peux que vous répondre ceci: l'amendement de M. Iselin porte sur la rubrique 365 ! La parole est à M. le député Alain Meylan.
M. Alain Meylan (L). L'Entente ne voulant fâcher personne, nous refuserons tant l'amendement de l'Alternative que celui de l'UDC...
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, nous avons attentivement examiné les dossiers du DEEE dans le cadre des travaux de la commission des finances. Nous nous sommes montrés d'autant plus attentifs que, comme vous le savez - ainsi que cela a été relevé hier soir, certains chiffres sont sortis dans la presse - il a été question de réduire de un million la subvention versée à la Fédération genevoise de coopération. Cette dernière ayant, comme cela a fort bien été relayé par un membre de la commission des finances, prouvé qu'elle faisait l'objet d'un accord de prestations, nous avons renoncé à cet amendement. Nous avons alors proposé un autre amendement consistant à diminuer de 1,813 million la ligne consacrée à l'aide aux pays en voie de développement. Cet amendement a été accepté par la majorité de la commission des finances. Voilà pour l'explication des travaux de commission qui ont abouti à cette proposition d'amendement !
Quant aux objectifs fixés par le projet de loi voté par ce parlement en 2001, nous ne renions pas ce que nous avons voté. Cela doit rester un objectif. On a déjà atteint le 0,3 %; on ne se trouve qu'à 0,1 % de la situation décrite, notamment par le parti libéral, au niveau national à l'horizon 2010. Grâce aux efforts que l'on fournit actuellement pour retrouver un équilibre financier, on pourra augmenter cette aide aux pays en voie de développement à l'horizon 2010. Il nous faut faire preuve de rigueur budgétaire, et ce dès aujourd'hui, de façon à pouvoir répondre à ce louable objectif durant ces prochaines années ! C'est pour cette raison que nous avons proposé quelques modestes possibilités pour limiter cette aide en 2004. Par conséquent, nous ne voterons pas vos amendements ! (Applaudissements.)
M. Antonio Hodgers (Ve). Hier soir, certaines personnes ont débattu dans cette enceinte du lien hiérarchique qui doit exister entre le droit et la morale. Cet amendement nous permet précisément de lier le droit à la morale. Au niveau de la morale, en tant que canton appartenant à l'un des pays les plus riches du monde et bénéficiant largement du système économique mondial, il est de notre responsabilité de contribuer au développement des populations du Sud. Or, si personne ne remet directement en cause cet objectif, les amendements visant à réduire l'aide au développement que vous nous avez proposés en commission des finances le contredisent ! Au niveau du droit, comme cela a été relevé, notre Etat est doté d'une loi selon laquelle le 0,7 % de son budget de fonctionnement doit être consacré aux projets de coopération. Il s'agit du droit, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente ! Cet objectif légal doit être atteint, et non à des échéances imprécises, en fonction d'on ne sait quelle conjoncture ! Il doit être atteint !
Voilà pour la morale et pour le droit. Je me rends toutefois bien compte que ces arguments ne suffisent pas pour convaincre la droite de ce parlement et qu'il faut évoquer des arguments plus égoïstes pour tenter de la rallier à nos positions.
Le premier de ces arguments s'adresse à la droite ouverte et humaniste de ce parlement - si tant est qu'elle existe encore... Cet argument consiste à vous rappeler qu'il en va de l'image de Genève. Cette dernière se trouve en effet en concurrence permanente sur la scène internationale pour accueillir d'importantes organisations internationales et non-gouvernementales. Quelle image donnerait notre canton si, en raison d'une crise budgétaire, certes importante mais relativement réduite par rapport à ce que connaissent d'autres villes de la planète, nous en venions à diminuer l'aide au développement de près de 2 millions, comme le propose la majorité - sans parler des 8 millions proposés par l'UDC ?! Quelle image donnons-nous à ces pays où les gens sans emploi se retrouvent à la rue - puisque l'Etat ne leur offre aucune garantie sociale à ce niveau - où ils ne bénéficient d'aucune assurance sociale ni d'aucune retraite, où ils n'ont pas accès à la santé quand ils n'ont tout simplement pas accès à la nourriture ?! Nous, Genevois, allons leur dire: «Comprenez, nous sommes endettés» ?! Du coup, nous coupons l'aide à des gens dont les besoins sont autrement plus importants que les nôtres ?! La coopération internationale contribue à la bonne image de notre pays à l'étranger, et il s'agit là d'une tradition. Or, votre politique est en train de remettre en cause cette tradition !
Le deuxième argument s'adresse plutôt à l'aile conservatrice de ce parlement - l'UDC, bien entendu, mais, sur ce type de considérations anti-étrangères, elle n'est malheureusement plus toute seule. Il faut voir quelle utilisation concrète est faite de cette aide, Monsieur Iselin ! Je vous citerai quelques projets, puisque vous connaissez relativement mal ce domaine: avec 80 000 francs par année, un projet de développement communal de jardins de cocagne au Sénégal permet de nourrir 11 000 habitants; avec 50 000 francs par année, un projet de développement d'alternatives socio-économiques pour femmes au Brésil permet d'alimenter 500 habitants; en Haïti, 1 400 familles bénéficient d'un projet de 100 000 francs consacré à l'éducation de base des enfants haïtiens. Je citerai encore l'exemple de l'organisme de refinancement qu'est la RAFAD: avec un investissement de 1 000 francs, elle peut lever 4 000 francs sur les marchés privés et toucher ainsi près de 11 000 personnes.
Grâce à l'aide internationale, 10 francs, 50 francs permettent de changer des destins de vie et d'ouvrir des perspectives. Que l'Alternative m'excuse de recourir à ce genre d'arguments, mais j'y suis obligé pour convaincre - notamment - les bancs de l'UDC: chaque perspective de vie changée dans le Sud représente peut-être un immigrant de moins dans le Nord ! Le rabais de 1,8 million proposé par la droite signifie que Genève cessera de soutenir près de 200 000 personnes ! Quant à l'amendement de 8 millions proposé par l'UDC, il aurait pour conséquence le fait que l'Etat de Genève cesserait demain de soutenir un peu moins d'un million de personnes ! Cela est non seulement immoral, mais cela n'a aucun sens ! L'aide au développement est un investissement pour notre pays ! Il est malheureux que vous n'arriviez pas à le comprendre ! (Applaudissements.)
M. François Thion (S). J'ai toujours soutenu l'aide au développement - que ce soit avant d'être un élu politique, puis en tant que conseiller municipal à Bardonnex - et je veux continuer à la soutenir au sein de ce Grand Conseil. Je vous signale au passage que, grâce au ralliement du PDC, la commune de Bardonnex est parvenue à consacrer 1 % de son budget à l'aide au développement !
Messieurs de l'UDC, j'aimerais vous communiquer quelques chiffres. En effet, vous évoquez sans cesse le Nigeria, mais le tiers-monde, c'est tout de même un sujet qu'il faut connaître ! L'autre jour, j'ai relu le rapport du Programme des Nations Unies pour le Développement. Plus de 2 milliards d'êtres humains vivent dans ce que le PNUD appellent la misère absolue: sans revenu fixe, sans travail, sans logement adéquat, sans soins médicaux. 826 millions de personnes souffrent de sous-alimentation chronique et grave - et ces chiffres sont incontestés: toutes les publications indiquent qu'entre 800 et 825 millions de personnes sont sous-alimentées dans le monde. Et 95 % des 16 000 personnes infectées chaque jour par le virus du sida vivent dans des pays du Sud. En l'an 2000, 65 % des êtres humains n'avaient pas le téléphone, 40 % n'avaient pas l'électricité. Il faut le savoir !
Vous voulez couper dans les projets de la Fédération genevoise de coopération - ce que l'Entente n'a certes pas voulu faire, mais elle a coupé ailleurs... J'ai là une liste de projets financés par cet organisme. Où va-t-on couper, connaissant les chiffres que je viens de vous fournir ? Va-t-on couper dans un programme oeuvrant pour la prévention du sida en Bolivie ?! Va-t-on couper dans un projet consacré à l'amélioration du système de production agricole en Haïti - qui est l'un des pays les plus pauvres d'Amérique latine ?! Va-t-on supprimer un projet visant à mettre en place une bibliothèque accessible pour tous au Pérou ?! Va-t-on arrêter un projet de coopération soutenant les producteurs de laine en Argentine?!
Il faut se montrer responsable: on ne peut pas couper dans l'aide au développement sans connaître un tant soit peu la situation à l'étranger ! Genève est, on l'a dit, l'une des villes les plus riches au monde. Votre amendement est, dès lors, véritablement scandaleux, Messieurs de l'UDC ! (Applaudissements.)
La présidente. Je vous rappelle que la liste est close. La parole est à M. le rapporteur de majorité Guy Mettan.
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je souhaite simplement rappeler une chose: Mesdames et Messieurs de l'Alternative, vous ne détenez pas le monopole de l'humanisme... (Protestations.)Car, si notre parlement a pu voter cette loi, c'est aussi grâce au soutien de l'Entente ! J'aimerais bien que vous le mentionniez. Les partis de l'Entente ont voté cette loi et la soutiennent ! Vous ne détenez pas le monopole de l'humanisme dans cette enceinte ! J'en veux pour preuve la proposition que j'ai faite en commission des finances de ne pas toucher à la subvention accordée à la Fédération genevoise de coopération. L'intégralité de cette subvention a été rétablie. J'en ai fait la demande, M. Meylan l'a acceptée. Pourquoi ? Parce que nous estimons que le travail effectué par la FGC mérite d'être intégralement soutenu. Cependant, comme cela a été expliqué, lorsque les finances vont mal, nous demandons à l'ensemble des services de tous les départements de contribuer au rétablissement de ces finances. Il n'y a aucune raison pour que le service de la solidarité internationale n'apporte pas sa contribution à ce rétablissement - bien qu'il n'y ait aucune volonté de notre part de nous attaquer de quelque manière que ce soit à la solidarité internationale !
Je vous informe par ailleurs que la commission des finances - et elle n'a pas été la seule à le penser - a jugé nécessaire de rediscuter certains éléments du règlement d'application de la loi sur le financement de la solidarité internationale. Cet élément a été évoqué pendant la discussion sur le rapport qui a eu lieu lors de la dernière séance de la commission. Nous avons décidé d'en débattre dans le courant de l'automne; j'espère que nous en aurons le temps.
Nous souhaitons nous accorder sur un contrat garantissant que la solidarité internationale croisse, peut-être pas aussi rapidement que vous le souhaiteriez, mais de manière régulière. Il s'agira donc, lors de cette discussion, de nous accorder sur la manière d'assurer le fonctionnement de ce fonds en lui garantissant une croissance peut-être plus lente que celle que vous espérez, mais régulière. Je tiens à répéter que nous sommes attachés à ce que ce fonds poursuive son action !
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Il me semble que les arguments ont été évoqués avec clarté par les uns et les autres. Le Conseil d'Etat vous demande de rejeter fermement l'amendement de l'UDC. Je vous garantis que la Fédération genevoise de coopération pourra bénéficier de la même somme que l'année passée.
Il faut faire preuve de logique: il y a deux ou trois ans, le projet de loi sur le financement de la solidarité internationale a été accepté à l'unanimité dans cette enceinte. Il était alors question de consacrer le 0,7 % du budget de fonctionnement de l'Etat de Genève à l'aide internationale. A un moment donné, M. John Dupraz avait proposé de différer sur quatre ans la progression de ce fonds, mais ce même parlement s'y était refusé. Néanmoins, nous ne disposons actuellement peut-être pas des moyens de notre générosité. Si le Conseil d'Etat n'a pas déposé d'amendement, c'est parce que le département de l'instruction publique, le département de l'action sociale et de la santé, la sécurité et d'autres domaines nécessitent d'importantes coupes. Il faut absolument que l'on parvienne à déterminer quelle progression accorder à ce fonds pour faire face aux promesses que nous avons faites et au vote de ce parlement !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder à trois votes: un premier vote sur l'amendement de M. Iselin à la rubrique 79.04.00.365.02; un deuxième vote sur l'amendement de M. Iselin à la rubrique 79.04.00.367.01; enfin, un troisième vote sur l'amendement de l'Alternative à la même rubrique.
J'imagine que l'appel nominal est demandé sur tous ces votes ? (Approbation de l'ensemble des députés.)Il s'agit d'une question devenue traditionnelle, mais je la pose tout de même...
Nous nous prononçons sur l'amendement présenté par M. Iselin à la rubrique 79.04.00.365.02. Je vous rappelle que cet amendement vise à retrancher un million de francs à cette rubrique. Celles et ceux qui acceptent cet amendement répondront oui; celles et ceux qui le refusent répondront non ou s'abstiendront.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 60 non contre 8 oui et 16 abstentions.
Le président. Nous passons maintenant au vote sur... Oui, Monsieur Droin ?
M. Antoine Droin (S). Je tiens simplement à signifier que je n'ai pas participé au vote en vertu de l'article 24 de notre règlement.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci de cette utile précision ! Nous allons voter sur l'amendement présenté par M. le député Iselin à la rubrique 79.04.00.367.01: il est proposé de retrancher 7 millions. Nous procédons par appel nominal.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 66 non contre 7 oui et 11 abstentions.
Le président. Nous votons, toujours par appel nominal, sur l'amendement présenté par l'Alternative à la rubrique 79.04.00.367.01. Je vous rappelle que cet amendement consiste à ajouter 1 813 214 francs à ladite rubrique.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 46 non contre 39 oui et 1 abstention.
Le président. Nous prononçons maintenant sur l'ensemble du budget du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, le budget de fonctionnement du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures est adopté par 42 oui contre 40 non.
Le président. Il serait bon que l'attention portée sur les votes des amendements soit la même que sur les votes concernant les départements dans leur ensemble... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Nous passons au département suivant.
CHAPITRE 8: ACTION SOCIALE ET SANTE
Présidence et secrétariat général (Rub. 81.11.00.318)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie d'être attentifs: j'ai des annonces à vous faire ! L'amendement technique qui avait été présenté par le Conseil d'Etat à la rubrique 81.11.00.300 est retiré.
Nous en sommes à la rubrique 81.11.00.318. Nous sommes saisis d'un amendement présenté tant par le Conseil d'Etat que par l'Alternative, visant à augmenter cette rubrique d'un montant de 300 000 francs. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger pour le développement de cet amendement.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Permettez-moi, afin de ne le faire qu'une fois, de procéder à quelques observations introductives.
En premier lieu, je tiens à rappeler que, si le Conseil d'Etat a déposé un certain nombre d'amendements par rapport au projet de budget tel qu'issu des travaux de la commission des finances, ce n'est évidemment pas par souci d'opposition et encore moins, comme j'ai cru l'entendre tout à l'heure, par souci d'obstruction systématique ! C'est d'abord parce qu'il y a eu, selon le Conseil d'Etat, un problème de méthode.
Je résumerai ce problème de méthode comme suit. Comme chacun de mes collègues, mes collaborateurs et moi-même avons reçu les députés délégués par la commission des finances. Nous nous sommes entretenus avec eux durant dix heures pour leur fournir toutes les explications qu'ils jugeaient utiles et pour recueillir toutes leurs questions - questions auxquelles il a secondairement été répondu par écrit. Puis, comme tous mes collègues, je suis passé devant la commission des finances, où nous avons discuté pendant cinq heures des questions - fort légitimes - des commissaires. Or, au cours de ces quinze heures de travail, aucune proposition d'amendement n'a été faite ! Aucune velléité d'amendement n'a été manifestée, ni par les commissaires délégués, ni par la commission dans sa constitution plénière ! C'est pourquoi, lorsque nous avons appris par un média de la place que des amendements avaient été proposés puis, pour certains d'entre eux seulement, adoptés par la commission des finances, nous avons décidé de déposer de nouveaux amendements. Il s'agissait tout simplement de permettre que le débat qui n'avait pas eu lieu en commission puisse en partie avoir lieu ici ! Nous souhaitions, d'une part comprendre les objectifs des amendements proposés, d'autre part nous expliquer sur ce qui avait prévalu aux lignes budgétaires telles qu'elles avaient été définies.
En deuxième lieu, puisque cela a été dit pour la dernière fois il y a maintenant vingt-cinq heures, je vous rappelle que, suite au message adressé en septembre par votre Grand Conseil au Conseil d'Etat - soit le refus d'entrer en matière sur le budget - le Conseil d'Etat a retravaillé pour générer des économies de l'ordre de 200 millions. Nous avons tenu compte des pistes évoquées par le Grand Conseil, à savoir la préservation prioritaire de l'enseignement et de la sécurité. Il s'agissait là des deux seuls messages que nous avions reçus de votre part lors de la séance consacrée au budget. Le Conseil d'Etat a donc décidé de préserver les dépenses liées à la sécurité et à l'enseignement, et cela en partie au détriment du budget du DASS - dont la version 2004 est, vous n'avez pu l'ignorer, en baisse de 1,2 % par rapport à sa version 2003. Cette baisse est en particulier due à des économies de 38 % sur les dépenses générales et à des économies sur les subventions - puisque, quand bien même le débat définitif n'a pas eu lieu à ce sujet, nous savions que votre parlement était particulièrement inquiet au sujet de ces subventions.
J'aborde maintenant le premier amendement déposé conjointement par le Conseil d'Etat et l'Alternative. Cet amendement vise à restaurer le montant initialement prévu pour les mandats à des tiers dans la rubrique «Présidence et secrétariat général». Il convient de rappeler que ces dépenses sont principalement liées à trois types de mandats. Elles sont, tout d'abord, liées à un certain nombre d'études. Je vous informe à cet égard que l'une des études qui, cette année, grèvera notre budget est l'étude des simulations sur le revenu déterminant unique. Il est hors de question d'interrompre cette étude considérable, puisqu'elle est essentielle à la poursuite de l'élaboration du projet sur le revenu déterminant unique. Les mandats à des tiers sont également l'occasion de demander un certain nombre d'avis de droit ou de procéder à un certain nombre de recours. Je vous ferai observer que, depuis le début de la législature, le département n'a perdu aucun des recours qu'il a engagés ni aucun des procès auxquels il a été confronté. Cela nécessite, bien entendu, un peu d'argent pour mobiliser les ressources nécessaires. Enfin - et c'est là le poste le plus important - ces mandats à des tiers permettent de procéder à des évaluations de lois. Comme vous le savez, les lois sociales sont, pour la plupart d'entre elles, associées de clauses d'évaluation - ce dont je suis, à dire vrai, particulièrement heureux. Or ces clauses d'évaluation coûtent de l'argent ! Puisque votre parlement a en son temps voté les fonds nécessaires à la commission d'évaluation des politiques publiques, on pourrait confier ces évaluations à la CEPP. Cependant, cela nécessiterait évidemment que l'on augmente le budget de cette dernière - ce qui n'a pas été le cas. C'est la raison pour laquelle ces évaluations sont réalisées par des mandataires privés - souvent universitaires - sur la base des dépenses inscrites à la ligne 318 du budget. Sans ces dépenses, je serai obligé de vous demander, non pas d'abandonner les évaluations législatives qui nous paraissent trop utiles, mais de les espacer. Beaucoup d'entre elles doivent avoir lieu tous les deux ans; nous vous proposerons de les espacer tous les quatre ou cinq ans.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter sur l'amendement proposé tant par le Conseil d'Etat que par l'Alternative à la rubrique 81.11.00.318. Cet amendement vise à augmenter ladite rubrique d'un montant de 300 000 francs. J'imagine que l'appel nominal est demandé... Il l'est !
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 48 non contre 38 oui.
Fondation des services d'aide et de soins à domicile (Rub. 83.21.00.365.01)
Le président. En premier lieu, je dois vous annoncer qu'un amendement avait initialement été présenté par le Conseil d'Etat à la rubrique 83.21.00.300 relatif à la direction générale des CASS. Cet amendement d'ordre purement technique a été retiré par le Conseil d'Etat.
Nous passons donc à la rubrique 83.21.00.365.01. Un amendement est présenté tant par l'Alternative que par le Conseil d'Etat. Il s'agit d'augmenter la subvention de fonctionnement de la FSASD de 1 923 240 francs. La parole est à M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je vous rappellerai brièvement que l'aide à domicile est issue d'une initiative populaire. Cette initiative populaire, qui a été concrétisée au début des années 90, a fait l'objet de crédits quadriennaux qui ont tous été adoptés par votre Grand Conseil. Ces crédits quadriennaux prévoyaient des dépenses qui, pour 2004, auraient dû se monter à une somme d'environ 94 000 francs...
M. Pierre Froidevaux. Millions !
M. Pierre-François Unger. 94 millions de francs, pardonnez-moi ! Merci de cette précision, Monsieur Froidevaux ! Le Conseil d'Etat a compris depuis longtemps qu'un crédit quadriennal constituait une autorisation de dépense, mais non une obligation de dépense. C'est bien la raison pour laquelle nous avions nous-mêmes limité la dépense à la somme qui vous est proposée, et non à l'intégralité de l'autorisation de dépense que votre Grand Conseil avait adoptée il y a trois ans. Cela nous paraissait également logique dans la mesure où nous tentions de respecter la volonté exprimée par votre parlement en septembre 2003.
Pourquoi le maintien à domicile nécessite-t-il d'être maintenu - et sous cette forme ? C'est, et vous le savez bien, pour une raison relativement simple: si la capacité de l'aide à domicile à diminuer les hospitalisations n'a jamais été clairement démontrée, il a en revanche très clairement été démontré que le développement de l'aide à domicile a permis de surseoir à l'admission des personnes âgées en EMS. Il ne s'agit pas là d'une affirmation politique sans substrat: cette affirmation se base sur le fait que la moyenne d'âge des personnes entrant en EMS est, en 2004, de trois ans supérieure à ce qu'elle était en 1997. En moins de dix ans, on a donc retardé de trois ans l'entrée en EMS. Un autre indicateur renvoie au fait que les gens entrent en EMS - hélas - dans des conditions de dépendance de plus en plus grandes. Cela explique d'ailleurs la dépense légèrement plus importante que l'on retrouvera au niveau des EMS. Or, cette plus grande dépendance dans les EMS est précisément rendue possible par le développement de l'aide à domicile !
Je vous rappelle par ailleurs qu'il y a quinze jours, votre parlement a envoyé au Conseil d'Etat une motion dans laquelle il était fait état de la canicule. Lors de la discussion sur cette motion, je vous ai fait savoir que la coordination des efforts des médecins traitants, des pharmaciens, du réseau informel, des CASS, de la FSASD ainsi que le taux d'encadrement dans les EMS nous avait permis d'éviter la catastrophe vécue en Ile-de-France. Cette coordination des efforts a constitué un mécanisme cohérent en matière de canicule. On pourrait évoquer le même mécanisme en matière d'alimentation ou de prévention des chutes.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, oui, le Conseil d'Etat a compris votre message ! Et non, il n'a pas utilisé la latitude dont il disposait pour inscrire l'entier du montant prévu par le plan quadriennal que vous avez adopté ! Mais à trop vouloir raboter, il ne faudra pas s'étonner que le maintien à domicile - déjà extraordinairement difficile - de personnes en partie dépendantes soit rendu impossible et que les EMS - dont la construction nécessite du temps - ne puissent héberger toutes les personnes dépendantes ! Cela aura invariablement pour conséquence l'hospitalisation de ces personnes. Et cette hospitalisation se fera dans des hôpitaux auxquels vous envisagez d'enlever 20 millions ! (Applaudissements.)
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Je signale la présence à la tribune de Mme Elizabeth Böhler, conseillère administrative au Grand-Saconnex, et de M. Pascal Rubeli, conseiller municipal en Ville de Genève. Qu'ils soient salués ! (Applaudissements.)La parole est à Mme la députée Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller (AdG). Comme l'a rappelé M. le conseiller d'Etat Unger, le développement de l'aide à domicile se trouve régulièrement à l'ordre du jour. Il a été, durant un temps, avancé comme une manière de lutter contre la hausse des coûts d'hospitalisation. Rappelez-vous tous ces postulats, tous ces discours sur la nécessité de transférer une partie des charges de l'hospitalier sur les soins à domicile ! Rappelez-vous les espoirs formulés quant à la diminution des journées d'hospitalisation et au retardement de l'entrée en EMS !
Qu'en est-il aujourd'hui ? La majorité de la commission des finances réduit la subvention de la FSASD; elle réduit également la subvention aux HUG. Mais sur qui va-t-on reporter toutes ces charges ?! Que veut la majorité de la commission des finances ?! Quel système de santé s'apprête-t-elle à mettre en place à Genève ?! Nous vous invitons à exposer clairement, en toute honnêteté et devant la population, ce que vous voulez ! Cette dernière doit non seulement savoir que vous vous faites les champions des économies, mais elle doit savoir sur le dos de qui vous vous apprêtez à les faire !
Pour ces motifs, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à voter l'amendement de l'Alternative ! (Applaudissements.)
Mme Véronique Pürro (S). Deux phrases et trois lignes: non pas pour argumenter - car il n'y a pas un seul argument dans le rapport de majorité ! - mais pour nous annoncer que l'on coupe près de 2 millions à la Fondation des services d'aide et de soins à domicile. J'aurais souhaité - j'aurais espéré - que le rapporteur développe davantage qu'il ne l'a fait dans son rapport les raisons qui ont poussé la majorité de notre parlement à supprimer autant d'argent pour une prestation qui, comme l'a rappelé M. le président du département Unger, a été voulue par le peuple. Cela aurait été plus responsable que d'y consacrer en tout et pour tout deux phrases dans le rapport de majorité. Comme l'a rappelé M. Unger, l'initiative pour le développement des soins à domicile a été acceptée lors d'une votation populaire, Monsieur Mettan ! Je pensais que vous en étiez encore au foot...
M. Guy Mettan. Mais pas du tout !
Mme Véronique Pürro. Fort bien... Soit, les comptes de la Fondation laissent apparaître un non-dépensé. Mais faut-il rappeler à ceux qui veulent nous donner des leçons en matière de gestion et intégrer dans la gestion publique des éléments de gestion privée que, dans le privé, une entreprise saine garde une petite réserve pour pouvoir investir ? C'est bien le cas de la FSASD: le non-dépensé ne finit pas dans les poches des actionnaires, Monsieur Mettan ! Vous savez très bien qu'il n'y a pas d'actionnaires dans cette fondation !
Alors, à quoi servent ces petites réserves et ces non-dépensés ? Elles servent, en premier lieu, à engager du personnel. Depuis quelque temps, la Fondation peine à recruter car, comme vous le savez probablement puisque cela a été rappelé hier soir à l'occasion d'un autre débat, nous ne parvenons plus à trouver des professionnels sur le marché genevois et régional, car il s'agit de métiers difficiles. La FSASD devra donc engager des professionnels sur des postes qui n'existeront plus suite à la coupe budgétaire que vous proposez !
Ces réserves et ces non-dépensés devaient également permettre à la FSASD de proposer des prestations qu'elle ne pourra plus développer suite à votre coupe budgétaire. La majorité qui propose cette coupe sait pertinemment que les prestations en matière de soins ne peuvent être refusées. Ce sont donc les autres prestations qui en pâtiront - des prestations que, notamment sous notre impulsion, la Fondation souhaitait développer. Je pense, par exemple, à l'Unité mobile d'urgences sociales. L'Hospice général n'étant pas en mesure de développer cette Unité, c'est la FSASD qui a été mandatée pour la développer, et ce notamment sur demande du PDC. Rappelez-vous cette belle motion qui, à l'époque, avait fait la manchette des journaux ! Rappelez-vous votre photo en première page du cahier régional de la «Tribune de Genève» ! Vous souteniez qu'il fallait développer l'Unité mobile d'urgences sociales - et vous aviez raison, puisque des services comme la police n'étaient plus en mesure de faire face au développement des problèmes sociaux, en particulier lorsque les services sociaux étaient fermés ! C'est donc la FSASD qui a été mandatée pour développer cette unité, qui devrait voir le jour dès cet automne. Toutefois, ce projet que vous aviez vous-mêmes appelé de vos voeux ne pourra peut-être pas voir le jour suite à vos coupes irresponsables ! Pour l'instant, on l'ignore. Peut-être M. le conseiller d'Etat nous donnera-t-il quelques nouvelles à ce sujet.
Je pourrais développer d'autres arguments, mais cela a déjà été fait. Compte tenu de l'évolution démographique, le transfert de charges que représentent les soins à domicile en matière de politique hospitalière exige de la FSASD un minimum de flexibilité pour répondre aux besoins actuels. Or, par votre coupe irresponsable, vous lui ôtez cette flexibilité ! Tout comme Mme Haller, je vous demande de soutenir notre amendement et de revenir sur votre décision qui, je le répète, est irresponsable ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Madame la députée. Je signale la présence à la tribune de M. Jean-Pierre Oberholzer, conseiller municipal en Ville de Genève. (Applaudissements.)Je passe la parole à M. le député Christian Grobet.
M. Christian Grobet (AdG). Voilà un nouvel exemple de coupe dans des prestations sociales élémentaires ! Cette coupe dans l'aide à domicile - laquelle, comme cela a été rappelé, a été instituée à la suite d'une initiative adoptée en votation populaire - constitue une marque visible de la politique de démantèlement que la droite veut promouvoir en matière de prestations étatiques. Je m'associe à celles et ceux qui l'ont fait remarquer avant moi.
Au-delà de cette préoccupation bien connue - il n'y a là rien de nouveau, si ce n'est que le présent débat met clairement en évidence vos priorités en matière de prestations sociales - je tiens à souligner l'incroyable boomerang que constitue la diminution des prestations à l'aide à domicile. M. le conseiller d'Etat Unger, que je remercie au passage pour la clarté de sa déclaration, a bien mis ce phénomène en évidence: en réduisant ce poste, vous allez augmenter les dépenses ailleurs ! Voilà le paradoxe ! Cela montre jusqu'à quel point va votre obsession pour la diminution des dépenses !
Vous voulez être en mesure de dire à la population que vous avez réussi à diminuer de 60 millions supplémentaires le déficit du budget de l'Etat, mais ce que vous ne lui dites pas, c'est qu'en réduisant les dépenses de ce poste vous allez augmenter celles d'autres postes ! Comme l'a souligné M. le conseiller d'Etat Unger, il est évident que les soins à domicile coûtent bien moins cher qu'une hospitalisation ou que la mise en pension dans un établissement médico-social - outre le problème affectif qu'implique, évidemment, le fait de quitter son domicile à un tel âge pour s'installer dans un EMS, aussi bien tenu soit-il s'agissant des établissements genevois.
Le Conseil d'Etat nous a saisis d'un projet de loi portant sur la création de trois EMS: rien qu'au niveau de l'investissement l'Etat devrait, de mémoire, débourser 36 millions pour la construction de ces établissements ! Et je ne parle même pas des subventions qu'il s'agira ensuite de verser pour en assurer le fonctionnement - car, une fois ces EMS construits, je vois mal qu'on leur refuse des subventions pour en assurer le fonctionnement ! Après les exemples que vous nous avez donnés en matière de coupes de dépenses liées, on pourrait fort bien imaginer que, l'année prochaine, votre imagination fertile en vienne à proposer une diminution des subventions aux EMS... Mais, à un moment donné, il faudra bien verser les salaires au personnel de ces établissements !
Votre politique, qui consiste à diminuer les prestations en matière d'aide à domicile aux personnes âgées, aura pour conséquence une augmentation du nombre de places nécessaires dans les EMS ! La prétendue économie que vous voulez réaliser sera totalement dépassée par les frais supplémentaires qui résulteront de l'absurdité que vous nous présentez aujourd'hui ! (Applaudissements.)
M. Pierre Froidevaux (R). Nous devons nous livrer à un exercice particulièrement difficile entre ce qui est possible et ce qui est nécessaire - et il nous faut faire un choix. Dans le cadre de cet exercice, il convient de rappeler que nous avons tous soutenu les soins à domicile. J'appartiens moi-même à un parti qui les a largement défendus.
En 1992, nous avons promis au peuple des soins à domicile excessivement coûteux. Le débat a été difficile, et nous n'avions pas...
M. Christian Grobet. Ce n'est pas juste !
M. Pierre Froidevaux. Si, Monsieur Grobet, rappelez-vous: cela coûtait fort cher ! Nous avons promis au peuple que ces soins coûteraient 20 millions, et nous lui avons demandé à cet effet une dernière augmentation d'impôts - un centime additionnel - destinée à rapporter 15 millions. Nous avons expliqué au peuple que, pour instaurer le programme des soins à domicile tel que nous le souhaitions et pour lui assurer une saine gestion, nous étions prêts à dépenser 20 millions. Or, quel est le coût total de la FSASD en 2004, Monsieur Grobet ?! La subvention que nous devons voter est de l'ordre de 82 millions ! Je me trompe peut-être quant au chiffre exact, mais globalement, si l'on inclut le coût des communes et le coût lié à la LAMal, l'ensemble du budget consacré aux soins à domicile dépasse les 150 millions ! Dès lors, demander au Conseil d'Etat de raboter une toute petite somme pour améliorer la gestion de ces soins...
Nous sommes cohérents, Monsieur Grobet ! Nous avons promis des soins à domicile qui soient favorables à l'ensemble de la population. Aujourd'hui, ces soins sont devenus très luxueux, car nous ne nous sommes jamais donné la peine... (L'orateur est interpellé.)Oui, 150 millions, c'est très luxueux ! Nous ne nous sommes jamais donné la peine de débattre de cette question, car ce Grand Conseil n'a jamais pu régulièrement traiter du DASS - ce dernier étant traité en fin de journée. Or, aujourd'hui, nous avons la possibilité d'émettre des remarques. Nous demandons simplement que le Conseil d'Etat s'attache à gérer les soins à domicile de manière plus conforme à un esprit de partage. Il faut reconnaître que la tentative d'individualisation des coûts de prestation s'est avérée extrêmement élevée. Ce chiffre était si indécent que les rapports d'activité ont été modifiés au cours du temps afin que l'on ne puisse plus les individualiser.
Je vous recommande donc, chers collègues, de soutenir les soins à domicile, de soutenir les efforts du Conseil d'Etat dans sa gestion parcimonieuse et utile pour l'ensemble de la communauté et de ne pas voter l'amendement qui vous est présenté ! (Applaudissements.)
M. Alain Charbonnier (S). Les bénéficiaires des prestations de la FSASD apprécieront les propos de M. Froidevaux... Ce dernier proposera peut-être à son entreprise de concurrencer la FSASD, puisqu'il lance sans cesse de grandes idées pour rendre les prestations meilleur marché... En attendant, la FSASD va se retrouver face à un problème important: elle devra certainement augmenter les tarifs de ses prestations hors LAMal, et ce sont les bénéficiaires qui devront directement passer à la caisse ! Cela est inacceptable !
De manière plus générale, le président du DASS a bien exposé le traitement que vous étiez en train d'appliquer à son département. Ce dernier est un château de cartes. Or vous n'êtes pas seulement en train d'enlever une carte, mais vous êtes en train d'enlever toute la base de cet édifice ! Nous avons très peur que tout s'écroule. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter nos amendements et de rétablir les subventions initialement prévues par le Conseil d'Etat !
M. Rémy Pagani (AdG). Avant d'aborder le problème de fond dont il est question, j'aimerais reprendre quelques-unes des déclarations de M. Froidevaux. Selon ce dernier, la FSASD fournirait des prestations luxueuses. De tels propos me paraissent complètement abusifs ! Je suis certain que les retraités apprécieront... Je vous donnerai un exemple concret: pas plus tard que l'année dernière, je me suis démené pour que l'une de mes voisines, âgée de 92 ans, puisse encore accéder à l'une des prestations offertes par la FSASD - soit le nettoyage annuel de ses rideaux. Il ne me semble pas qu'il s'agisse là d'une prestation luxueuse ! Je trouve scandaleux que M. Froidevaux prétende que les personnes âgées bénéficient de prestations luxueuses, alors que lui nage dans le bonheur grâce à une entreprise florissante ! (Protestations.)
Hier, on a fait la démonstration politique que l'imagination n'était pas au pouvoir dans ce parlement, notamment dans les milieux de droite. On a, par exemple, démontré le peu d'imagination de la droite concernant les problèmes de logement. On démontrera aujourd'hui que l'imagination n'est pas non plus au pouvoir s'agissant des problèmes de santé. Pour cela, il nous faut nous livrer à une petite leçon d'histoire: contrairement à d'autres dans ce parlement, M. Segond, lui, a fait preuve d'un peu d'imagination. Lorsqu'il a mis en place la politique actuelle de soins à domicile, il a compris qu'il était nécessaire, non seulement de faire voter un impôt indispensable et d'instaurer une véritable politique de soins à domicile, mais également de voter un moratoire sur les EMS afin d'inscrire cette politique dans notre vie quotidienne. On doit lui rendre hommage pour les décisions courageuses qu'il a prises, pour les mesures qu'il a instaurées.
On nous propose aujourd'hui de couper dans le budget des soins à domicile, cela sans imagination et sans prendre en compte le problème de fond de notre société... Je pense à l'accroissement de l'espérance de vie, phénomène heureux - et dont certains parmi nous pourront bénéficier. Alors, au lieu de nous inviter à réfléchir à cette problématique et à chercher ensemble des solutions, comme cela se fait dans les pays scandinaves, on nous tient le discours suivant: «Il faut couper dans les soins à domicile ! Après, advienne que pourra !» Or, MM. Unger et Grobet nous ont démontré quelles seraient les implications budgétaires de telles coupes. Il s'agit d'un système de vases communicants: on paiera ces prestations que l'on refuse de financer soit par le biais des EMS, soit par le biais des hospitalisations ! La semaine prochaine, nous discuterons d'ailleurs des 36 millions nécessaires à la construction d'EMS - 36 millions auxquels s'ajouteront des frais d'exploitation considérables.
On aurait pu imaginer que cette droite qui se targue de faire des économies nous proposerait des solutions s'inspirant des mesures développées dans les pays scandinaves. Je pense notamment au développement des D2, moins coûteux que les EMS. On pourrait, par exemple, développer les immeubles à encadrement médical et social de la Ville de Genève afin de compresser les dépenses qui seront générées par l'accroissement de l'espérance de vie. Que nenni ! Rien de tout cela, au contraire: on coupe en sachant pertinemment que l'on générera des frais d'hospitalisation !
Je déplore cette attitude, qui augure mal de la discussion que nous aurons mardi en commission des travaux au sujet des EMS. Mardi, il nous faudra choisir entre accepter ou refuser la construction d'EMS. Ce n'est pas là une bonne politique ! On se retrouvera devant les électeurs dans une année, et j'espère que ces derniers feront le bon choix entre ceux qui proposent des solutions politiques réelles et ceux qui proposent des solutions à la hache telles que celles que vous nous avez soumises ces deux derniers jours !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits MM. les députés Mettan, Grobet, Froidevaux et Spielmann, ainsi que M. le conseiller d'Etat Unger. La parole est à M. le rapporteur de majorité Guy Mettan.
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Je tiens à rectifier certains propos qui tiennent de la propagande pure et simple. Je me bornerai à faire trois observations.
En premier lieu, on a entendu sur les bancs de l'Alternative que la FSASD avait connu un non-dépensé en 2003. Eh bien, Mesdames et Messieurs, puisqu'il y a eu un non-dépensé, dépensons-le ! Voici précisément ce que le rapport de majorité appelle à faire: il appelle à dépenser en 2004 le montant qui ne l'a pas été en 2003. Cela me paraît tout à fait logique ! Je ne vois pas quel est le problème: il me semble normal d'utiliser d'abord le non-dépensé de 2003 !
En deuxième lieu, vous avez déclaré que l'on voulait démanteler l'aide à domicile. C'est entièrement faux ! Si l'on se réfère aux chiffres qui figurent dans le livre bleu - il est vrai que je me rapporte toujours aux chiffres et que vous n'aimez pas cela, car il s'agit de données objectives difficilement contestables... - que constate-t-on ? Le budget de la FSASD, qui se montait à 80,4 millions en 2002, se monte, selon notre proposition, à 83,6 millions en 2004. Le budget pour 2004 est donc de 3,2 millions supplémentaire à celui de 2002 ! Il bénéficie d'une progression de 2 % par an - ce qui correspond précisément, cher Monsieur Pagani, à l'accroissement de la population âgée et de l'espérance de vie ! Nous répondons donc parfaitement aux conditions d'évolution de la population en consentant à augmenter cette subvention de 3,2 millions en deux ans !
En dernier lieu, je remercie Mme Pürro d'avoir eu la gentillesse de mentionner la motion que Mme von Arx-Vernon et moi-même avions déposée concernant l'Unité mobile d'urgences sociales. Je ne veux pas couper la parole à notre excellent conseiller d'Etat qui, je pense, pourra vous rassurer. Il nous a en effet annoncé le lancement de cette unité pour l'automne 2004, et l'on sait que M. Unger fait toujours ce qu'il dit ! (Applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). Je ne sais pas si M. Froidevaux mentionnait ou s'il se plaignait de l'augmentation des prestations de l'aide à domicile. Mais il ne suffit pas de relever que les montants consacrés à l'aide à domicile ont augmenté, Monsieur Froidevaux ! Il faut également examiner les économies que ces prestations à domicile ont permis de réaliser ! Or vous êtes particulièrement bien placé pour vous rendre compte de ces économies !
Je me permets par ailleurs de vous faire remarquer que vous n'étiez pas très bien placé - pour ne pas dire que vous étiez tout à fait mal placé - pour intervenir dans ce débat. Vous êtes, en effet, à la tête d'une entreprise dont les services sont appréciés, mais dont les coûts sont particulièrement élevés. Ces coûts, vous les connaissez. Pour ne donner qu'un seul exemple, on pourrait se livrer à une comparaison entre les tarifs appliqués par votre entreprise et ceux appliqués par la FSASD pour une prise de tension... Je n'en dirai pas plus, car vous avez une excellente représentante au Conseil des Etats qui a mis en évidence les coûts engendrés par un service comme celui de votre entreprise. Si l'on examine l'impact des coûts de la médecine privée sur les cotisations de l'assurance-maladie, vous avez perdu une occasion de vous taire, Monsieur Froidevaux !
M. Pierre Froidevaux (R). M. Grobet ouvre une boîte de Pandore... Il m'est évidemment difficile de répliquer sur tous les éléments mentionnés. C'est pourquoi je ne ferai qu'une remarque: lorsqu'un médecin privé intervient, même en urgence, au domicile d'un patient, il n'atteint pas le montant demandé par la FSASD lorsqu'une de ses infirmières se rend chez un patient pour une tension artérielle. L'intervention du médecin est même deux fois meilleur marché ! Ce n'est pas la facturation qui compte: c'est le coût du service assuré par l'ensemble de la collectivité. Or, si vous divisez le montant de 150 millions par le nombre de prestations fournies par la FSASD, vous constaterez que ces prestations sont deux fois plus cher que celles d'un médecin !
Je souhaite également répliquer à M. Charbonnier. Au nom de quoi ne pourrais-je pas m'exprimer dans cette enceinte ?! Le fait d'être un privé me met-il en concurrence avec l'Etat ?! Siégez-vous dans cette enceinte pour défendre exclusivement l'Etat ou pour défendre la société ?! (Remarques.)Alors, il n'y a visiblement qu'une seule chose qui compte à vos yeux: c'est l'Etat ! Vous prônez même un Etat qui soit concurrentiel au secteur privé ! Comprenez que l'on ne peut pas vous suivre dans le type de budget et d'Etat que vous voulez ! C'est du néo-communisme ! (Applaudissements et protestations.)
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Jean Spielmann.
Une voix. Allez, le néo-communiste ! (Rires.)
M. Jean Spielmann (AdG). Un certain nombre d'arguments ont été échangés tout à l'heure. Permettez-moi simplement de corriger certains éléments !
M. Mettan a repris des chiffres vieux de quelques années pour faire remarquer que la FSASD, dont le budget se montait autrefois à 80,4 millions, bénéficiait aujourd'hui d'un budget de 83,6 millions. Mais ce qu'il oublie de dire au passage, c'est que l'aide à domicile a dépassé les 91,5 millions de francs dans les comptes 2003 ! Tout à l'heure, on nous a expliqué que l'aide à domicile permettait de réaliser des économies; on a notamment évoqué un gain de trois ans s'agissant de l'âge d'entrée en EMS; on nous a également fait savoir que, sans cette aide à domicile, il faudrait augmenter le montant des coûts consacrés à la construction et au fonctionnement des EMS... Je vous rappelle qu'une série de dossiers est précisément en cours sur cette question. Du reste, on nous propose aujourd'hui de ralentir la construction des EMS en raison de l'absence de besoins immédiats.
Je vois mal comment les prestations offertes par les soins à domicile pourraient être assurées dans la situation actuelle. Alors que le budget présenté par le Conseil d'Etat comprend déjà une économie de 2,3 millions par rapport aux comptes 2003, la droite propose, sans aucun argument supplémentaire, une nouvelle coupe de 2 millions ! La conséquence de cette décision, c'est qu'entre la somme dépensée en 2003 et les besoins de la population dans ce secteur il manquera 4 millions ! Voilà la réalité !
Et que va-t-il se passer ? Si cette économie ne concernait que la gestion financière, ce serait parfait. Mais, dans le cas particulier, on sait que les gens risquent d'entrer plus tôt en EMS. La conséquence financière de ce retournement, c'est donc que l'on dépensera ailleurs ce que l'on n'investira en soins à domicile ! Sur le plan financier, ce n'est ni raisonnable, ni intelligent ! Et je ne parle même pas des conséquences humaines des décisions que vous prenez !
Je vous rappelle que les gens bénéficiant de soins à domicile peuvent vivre quelques années supplémentaires - trois ans, d'après ce que l'on nous a dit - chez eux avant d'entrer en EMS. L'aide à domicile leur permet donc de mener une vie indépendante durant trois ans supplémentaires. A mes yeux, cela compte également dans une société - d'autant plus si c'est pour le même prix !
Le problème de votre proposition - comme de l'ensemble des amendements que vous nous avez présentés - c'est qu'il ne s'agit pas d'une solution financière, mais d'une attaque contre la vie sociale ! Les gens doivent comprendre que, non seulement vos décisions n'amélioreront pas les finances publiques, mais qu'elles ne feront qu'aggraver leurs conditions de vie ! On fera entrer les personnes âgées en EMS trois ans plus tôt, on empêchera les soins à domicile, on réduira les prestations de l'Etat - et les coûts n'auront pas été réduits, mais simplement reportés ailleurs ! C'est non seulement une erreur sur le plan financier, mais c'est une attaque frontale contre les conditions de vie des gens !
Par les mesures néolibérales que vous introduisez... (Protestations. Le président agite la cloche.)Vous êtes en train d'instaurer une politique qui menace les conditions de vie de la population ! Persévérez dans vos décisions, suivez la proposition de Mme Thatcher de supprimer le remboursement des dialyses à partir de 60 ou de 62 ans sous prétexte que les gens ne sont plus rentables ! Voilà les arguments que l'on entend dans vos milieux politiques ! Et c'est sur cette voie que vous êtes en train de vous engager en proposant une économie supplémentaire de 2 millions ! Il manquait déjà 2 millions - puisque le Conseil d'Etat avait réduit sa subvention à la FSASD dans un souci de rationalisation - on a dépensé 91 millions pour les soins à domicile l'année passée; vous proposez de ramener ces dépenses à 83 millions... Avec un tel manquement, les personnes ne pourront plus bénéficier de soins à domicile et elles seront réduites à entrer en EMS trois ans plus tôt - alors que l'on ne réalisera aucune économie et que l'on dépensera même davantage, puisqu'il faudra construire plus rapidement des EMS et en assurer l'encadrement médical ! Il s'agit donc non seulement d'une absurdité financière, mais également d'une mesure extrêmement grave au niveau social ! J'espère que les gens en sont conscients !
Nous allons débattre tout à l'heure de la coupe de 20 millions que vous avez proposée en commission s'agissant des HUG. «Pourquoi 20 millions ?», on vous a posé cette question en pensant que vous auriez peut-être des arguments à faire valoir. Mais ces 20 millions, c'était simplement le coût des accords que l'hôpital avait passés avec son personnel ! Il s'agit d'une revanche contre le salaire des infirmières ! Il s'agit d'une revanche sociale ! C'est tout simplement inacceptable ! Et maintenant, vous vous en prenez aux personnes âgées: vous refusez de les laisser vivre encore trois ans tranquillement à la maison ! Vous ne réaliserez de surcroît aucune économie financière ! Vous ne ferez que continuer à creuser les gouffres financiers dont vous êtes les spécialistes ! C'est tout simplement inacceptable ! (Applaudissements.)
Une voix. 4 minutes 50, malheureusement...
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je ne tomberai dans aucun excès d'aucune nature. J'aimerais néanmoins vous rappeler que, suite à une votation populaire, votre Grand Conseil a - quelle qu'en soit sa composition - tenu à mettre à disposition des citoyennes et des citoyens de ce canton un certain nombre de structures. S'agissant de la ligne dont il est ici question, ces structures concernent en grande majorité des personnes âgées. Il faut tout faire pour que ces structures puissent s'articuler les unes avec les autres. Ce n'est pas en les dépouillant les unes et les autres que l'on augmentera la cohérence du système. Je crains, au contraire, que cela ne fasse que souligner un certain nombre d'incohérences que, tous, nous regrettons.
Les chiffres mentionnés par M. le député Froidevaux sont exacts: c'était une quinzaine de millions que le centime additionnel en 1992. Il se monte maintenant à 22 millions. Pour mémoire - puisque vous nous l'avez caché pour nous taquiner... - ce n'était pas un, mais deux centimes qui ont été votés par le peuple.
Une voix. Et alors ?
M. Pierre-François Unger. Eh bien, ça double le tout ! Vous me direz que ce n'est qu'un détail que de doubler les sommes que l'on attribue... Vous avez cependant omis de dire, Monsieur Froidevaux, que, grâce à la progression des techniques, mille lits d'hôpitaux ont été supprimés dans le même laps de temps... (L'orateur est interpellé.)Bien entendu ! Je n'ai établi aucune causalité directe ! Je ne tombe pas dans la caricature ! J'ai précisé tout à l'heure que le rapport de causalité entre l'un et l'autre n'était pas si simple ! La seule chose que je vous dis, c'est qu'en supprimant mille lits, l'Etat a réalisé une économie de 650 millions de francs ! Alors, lorsque vous mettez en rapport ce que coûte la FSASD - soit environ 80 millions - avec...
Une voix. Non, 150 millions !
M. Pierre-François Unger. Ou 150 millions, si l'on se réfère au coût total, assurance incluse... Si vous comparez ces deux montants, le rapport est relativement simple à comprendre: il est de 1 à 5, quand bien même le rapport de causalité n'existe pas !
Vous devriez par ailleurs savoir, Monsieur le député, que, à la suggestion de M. Couchepin et sans qu'il n'y ait vraisemblablement d'opposition parlementaire, le Conseil fédéral a décidé d'instaurer ce que l'on appelle un mécanisme de protection tarifaire afin de décharger l'assurance obligatoire en termes d'aide à domicile. Ainsi donc, le montant à charge de l'assurance obligatoire serait bloqué. En diminuant parallèlement la subvention, c'est à l'entier du budget que l'on s'attaque ! Il faut avoir le courage de le dire et, secondairement, de le gérer !
Encore une fois, je ne peindrai pas le diable sur la muraille au sujet de ce 1,9 million qui semble voué à une extraction de nature quasi chirurgicale. Je vous rends toutefois attentifs au fait que nous devrons non seulement rétablir en temps et en heure, mais également augmenter une partie de cette subvention si certaines mesures - mesures que, comme notre Conseil d'Etat, je soutiens - devaient être prises sur le plan fédéral pour éviter un accroissement trop considérable des primes d'assurance maladie. Nous vous attendrons à ce contour pour voir si votre soutien à l'aide à domicile persiste, signe et augmente ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat, Nous allons voter sur l'amendement présenté conjointement par l'Alternative et par le Conseil d'Etat à la rubrique 83.21.00.365.01. Cet amendement consiste à augmenter la subvention de fonctionnement de la FSASD de 1,923,240 million de francs. J'imagine que l'appel nominal est demandé ?
De nombreuses voix. Oui !
Le président. C'est en train de devenir une tradition !
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 47 non contre 37 oui.
Direction générale de l'action sociale - Honoraires, prestations de service de tiers (Rub. 84.11.00.318)
Le président. Je vous informe de ce que l'amendement technique qui était proposé par le Conseil d'Etat au Centre d'action sociale et de santé, rubrique 83.23.00.300 est retiré.
Nous sommes saisis d'un amendement relatif à la direction générale de l'action sociale, visant à augmenter la rubrique 84.11.00.318 de 200 000 francs. La parole n'étant pas demandée, nous allons voter sur cet amendement. Je suppose que l'appel nominal est demandé... (Approbation des députés.)
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 47 non contre 36 oui.
Hospice général (Rub. 84.29.00.363.01)
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement présenté tant par le Conseil d'Etat que par l'Alternative visant à augmenter la rubrique relative à la subvention de fonctionnement de l'Hospice général de 4,5 millions. La parole est à M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger, qui va développer cet amendement.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Nous n'allons pas refaire le débat sur les difficultés rencontrées par l'Hospice général et dont j'espère que, par un certain nombre de mesures à court terme mais, plus encore, à moyen et à long terme, cet établissement essentiel de la République pourra sortir. J'aimerais toutefois vous signaler que cet amendement a été voté par la commission des finances en fonction d'hypothèses relativement différentes formulées par les uns et les autres des députés. Je me réfère là à ce qui m'a été rapporté, puisque je n'ai pas eu la chance d'assister à la séance au cours de laquelle la commission des finances a discuté des amendements qu'elle envisageait concernant le DASS...
Voici ce que l'on peut dire en restant très factuel: l'étude du nombre de dossiers à fin mai montre une augmentation des dossiers financiers d'assistance de 16 % entre le début de l'année - soit le 1er janvier - et le 21 mai. Durant cette période, le nombre de dossiers est passé de 3 698 à 4 197. Je ne dispose pas du détail de la constitution de ces dossiers en montants d'assistance. Je ne suis, en particulier, pas encore en mesure de vous indiquer très exactement s'il s'agit majoritairement d'assistance complète, de complément de salaire, d'avances sur l'assurance-chômage ou sur l'AI. Cependant, si l'on applique une règle de trois, une hausse de 16 % légitime parfaitement les scénarios financiers qui nous avaient été présentés - après de longues discussions - par le conseil d'administration de l'Hospice lors de nos multiples réunions. J'imagine donc que la dépense prévue sera - hélas - atteinte et, au pire, légèrement dépassée.
J'ai entendu ici ou là, lors de discussions informelles, qu'un dépassement n'aurait aucune importance puisque notre constitution garantit la couverture par l'Etat d'un éventuel déficit. Mais si le signe que vous voulez envoyer à la nouvelle direction de l'Hospice et - peut-être - à un Grand Conseil qui se réveillerait sur ses responsabilités, c'est d'attendre la garantie constitutionnelle pour tenir son budget, je peux vous assurer ce signe-là sera interprété comme un laisser-faire qui constitue un véritable chèque en blanc de votre commission ! (Applaudissements.)
Mme Jocelyne Haller (AdG). Mesdames et Messieurs les députés, 4,5 millions de réduction de subvention à l'Hospice général: voilà ce que M. Hiler a clairement rangé dans la série des amendements «cosmétiques»... (L'oratrice est interpellée.)Je vous le rappelle pour la dernière fois, Messieurs: je n'ai aucun intérêt direct dans cette affaire ! Un parmi d'autres au rang des amendements cosmétiques... Vous admettrez néanmoins avec moi, Mesdames et Messieurs les députés, qu'à force d'amendements cosmétiques on finira par croire que ce budget fait preuve d'une singulière coquetterie... Et l'on se demande à qui il veut plaire !
Comme M. Unger vient de le rappeler, notre constitution prévoit la couverture du déficit de l'Hospice général. On pourrait en conclure qu'il ne s'agit finalement que d'un tour de passe-passe. Mais ce n'est pas uniquement de cela qu'il s'agit ! Il faut préciser ce que recouvre ce type de manoeuvre ! Ne pas donner à l'Hospice général les moyens suffisants pour assurer ses missions, c'est le placer dans l'obligation de présenter un déficit - déficit que l'on n'aura aucun état d'âme à lui reprocher par la suite... Contraint depuis des années à sous-estimer ses besoins, l'Hospice général est rompu à cette navrante expérience. Nous l'avons constaté récemment: il en a encore subi les avatars, et nous étions tous là pour le voir. Cette pression au déficit oblige cette institution à réduire ses frais de fonctionnement, à infléchir puis à réduire progressivement ses prestations. Elle accentuera encore les obstacles auxquels sont actuellement confrontés l'Hospice général et son personnel !
Par un pareil artifice, on oblige l'Hospice général à se faire le complice d'une pression à la baisse sur les prestations, à être acteur dans un mécanisme qui rend les pauvres encore plus pauvres. Ce n'est pas sa vocation ! C'est une orientation contre-nature qu'on le contraint à prendre ! Qui plus est, ce faisant, on passe sous silence la progression des phénomènes de paupérisation qui font basculer un nombre croissant de personnes vers l'aide sociale ! On nie les effets d'une politique économique qui met au rebut une partie des membres de notre communauté ! On occulte tous les dysfonctionnements et toutes les lacunes qui renvoient à l'Etat la responsabilité d'aider les exclus de la prospérité ! Et il faut relever qu'en général les tenants du «moins d'Etat» ne sont pas les derniers à aller dans ce sens... Mais n'est-ce pas là l'effet recherché - organiser l'exclusion plutôt que la combattre ?!
Alors, parce que nous ne sommes pas tenants de cette position, je vous recommande, au nom de l'AdG, d'accepter l'amendement de l'Alternative ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits Mmes et MM. les députés Laurence Fehlmann Rielle, Nicole Lavanchy, Pierre Froidevaux, Véronique Pürro, Georges Letellier, René Ecuyer, Gilbert Catelain, Michèle Künzler, Souhail Mouhanna et Jean Spielmann.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Je ne résiste pas, dans le cadre du débat sur l'Hospice général, à vous lire les quelques lignes du piteux rapport de M. Mettan qui y sont consacrées - ce dernier quitte la salle, cela vaut peut-être mieux, ainsi il n'entendra pas mes propos... Voici ce que l'on peut lire dans son rapport: «La majorité des commissaires ont pris note de l'augmentation du nombre de dossiers, et donc du nombre de personnes en détresse dont l'Hospice doit s'occuper, mais elle a estimé que, le budget de l'Hospice général ayant énormément augmenté durant les années précédentes, une stabilisation de sa subvention à quelque 147 millions en 2004 était possible sans entraîner de dommages sociaux». CQFD ! Voilà toute l'argumentation de ce rapport ! L'ensemble de ce rapport est d'une pauvreté totale, mais je trouve cela d'autant plus scandaleux lorsque l'on sait quelles sont les personnes concernées par les prestations de l'Hospice général ! Je pense notamment aux prestations sociales destinées aux plus démunis de notre canton !
Comme M. Hiler l'a expliqué dans son rapport de minorité, il ne s'agit effectivement que d'une coupe «cosmétique», puisque le déficit de l'Hospice général sera finalement couvert par l'Etat. Mais au-delà de la cosmétique, cette coupe recèle toutefois une dimension symbolique et psychologique sur laquelle je souhaite attirer votre attention. L'attitude de la majorité de la commission des finances par rapport à l'accroissement du fossé qui se creuse au sein de la société genevoise entre les plus démunis et ceux qui disposent de suffisamment de moyens pour ne pas devoir se préoccuper de ces problèmes est scandaleuse ! Son attitude est également inadmissible vis-à-vis d'une institution qui s'efforce de dépasser ses difficultés. Ainsi que M. Unger l'a fort bien rappelé, l'Hospice général s'est trouvé un nouveau directeur. On a abondamment parlé des problèmes qui agitaient cette institution mais, par cette coupe, on transmet une nouvelle fois un signal extrêmement négatif aux travailleurs sociaux qui, jour après jour, affrontent des dossiers toujours plus délicats ! Cette mesure va accroître l'inquiétude et le climat délétère qui prévaut malheureusement au sein de l'Hospice général - et nous y aurons contribué !
Pour une fois, je vous invite à faire preuve d'un peu de raison en acceptant l'amendement proposé conjointement par l'Alternative et le Conseil d'Etat ! (Applaudissements.)
Présidence de Mme Janine Hagmann, deuxième vice-présidente
Mme Nicole Lavanchy (AdG). Je commencerai par aborder un thème qui vous paraîtra hors sujet, puisqu'il s'agit du projet de loi sur la HES-S2 et la HES-SO. Il est important de souligner que ce projet de loi a été voté à l'unanimité lors de la dernière session.
J'évoquerai ici la HES-santé social. Cette HES forme des infirmières et des travailleurs sociaux selon le principe d'une formation en alternance - en alternance ! Pour ceux qui l'ignorent, cela signifie que les deux tiers de la formation se déroulent à l'école, le tiers restant sur le terrain, auprès de professionnels qui donnent de leur temps pour encadrer les étudiants.
Or, que se passe-t-il actuellement dans ces hautes écoles ? En ce qui concerne la HES-santé, on ne parvient pas à recruter des étudiantes infirmières. Pourquoi ? Parce que les gens connaissent les conditions de travail actuelles des infirmières aux HUG ou dans les autres institutions d'Etat qui emploient...
Une voix. Arrêtez !
Mme Nicole Lavanchy. Mais ces personnes souffrent d'une surcharge de travail ! Elles ne parviennent pas à faire face à leurs charges - et vous allez accentuer ce burnout ! C'est inacceptable !
La HES-social a connu le même problème: elle ne parvenait pas à recruter. J'ignore ce qui se passe - peut-être des vocations se sont-elles soudainement éveillées - mais trente étudiants à plein temps sont inscrits à la HES-social, filière service social. Trente étudiants à plein temps, c'est bien ! Parce qu'il y a deux ans de cela, il n'y en avait plus que quinze ! Bien que connaissant les conditions de travail inacceptables qui règnent dans l'ensemble des services sociaux, certains étudiants vont donc s'y coller... (L'oratrice est interpellée par M. Froidevaux.)Mais oui, Monsieur Froidevaux ! Bon, je me calme et je continue...
Dès lors, que va-t-il se passer ? L'Institut d'études sociales est en train de se demander s'il sera capable d'accueillir ces trente étudiants, car il dispose des salles de classe et des profs nécessaires, mais non des places de stage ! Les HUG offrent sept places de stage, mais aucun travailleur social ne veut prendre en charge la formation de ces stagiaires ! Pourquoi ? Parce que ces assistants sociaux sont en burnoutet qu'ils n'ont pas le temps de former des stagiaires !
Votre politique attaque les usagers et les travailleurs de ces services ! Elle met à mal le service public et elle attaque la formation qui mène à ces métiers ! Je tenais à ce que vous le compreniez, car il s'agit d'un problème épineux. Après, vous nous direz que l'on ne trouve pas de professionnels pour ces métiers... et pour cause: c'est la faute de votre politique ! Et il faut que vous en soyez conscients !
Puisque j'ai l'occasion de m'exprimer, je dirai encore la chose suivante: depuis trois jours, on assiste dans cette enceinte à la mise en oeuvre de votre politique... D'une politique que vous n'avouez pas ouvertement ! Là, vous allez hurler, mais je vais vous expliquer pourquoi je vous parle ainsi. Votre politique est une politique de droite ultralibérale... (Protestations.)Excusez-moi, mais je reprends ce terme: ultralibérale ! Dont le but est d'affaiblir les services publics !
Une voix. Mais oui...
Mme Nicole Lavanchy. On affaiblit l'école, on affaiblit les hôpitaux, on affaiblit les services sociaux, on affaiblit les assurances sociales, on met tout le monde au revenu minimum... Et que fait-on parallèlement à cela ? On développe le service privé ! Mais privé pour qui ? Vous croyez que les ouvriers pourront accéder à ces services ?! Non ! Ce sont les gens issus de vos bancs qui bénéficieront d'une santé et d'une formation de luxe ! Vous créez une société élitaire, une société à deux vitesses ! D'une part, il y aura ceux qui pourront se former, se soigner ou encore accéder au social - bien qu'ils n'en aient pas besoin... D'autre part, il y aura une population - et il ne s'agit plus uniquement des plus démunis, car c'est à la paupérisation de la classe moyenne que l'on assiste - qui accèdera à un service public que vous aurez mis à mal. L'école, vous la mettez à mal ! Les hôpitaux, vous les mettez à mal !
Une voix. Mais non !
Mme Nicole Lavanchy. Mais si ! C'est exactement ce que vous êtes en train de faire, mais vous ne le reconnaissez pas ouvertement ! Si je tiens là un discours idéologique, c'est parce que vous menez une politique idéologique ! (Protestations.)Mais si ! C'est vrai ! Cette société, les gens qui nous écoutent pensent qu'elle est naturelle; ils pensent que le fait de vivre dans un monde libéral est naturel. Eh bien, pas du tout ! C'est de la politique - et la politique est un construit humain régi par des rapports de force ! Il faut que les gens qui nous écoutent comprennent que l'on peut changer les choses ! Le libéralisme n'est pas naturel ! (L'oratrice est interpellée.)L'économie n'est pas naturelle ! On peut changer les choses en y mettant un peu de bonne volonté !
Une voix. Eh bien, faites un effort !
Mme Nicole Lavanchy. Mais vous n'y mettez aucune bonne volonté, puisque vous suivez une politique qui consiste à casser l'Etat pour offrir plus de richesses à certains et appauvrir davantage les autres ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci, Madame la députée. Je rappelle juste que le débat porte sur l'amendement concernant l'Hospice général. (Brouhaha.)La parole est à M. le député Pierre Froidevaux.
M. Pierre Froidevaux (R). En guise de préambule, j'adresserai quelques mots à l'attention de Mme Lavanchy. Vous savez que, par-dessus notre désir de voter des lois, nous sommes liés par un élément supérieur, à savoir l'amour - l'amour de l'un de l'autre... (Chahut.)Et l'on vous aime, Madame Lavanchy ! Même lorsque vous vous exprimez comme vous venez de le faire. On comprend bien votre discours, mais efforcez-vous de faire preuve d'un peu plus d'esprit d'ouverture et de tenir compte de tous les secteurs d'activités afin que nous nous aimions les uns les autres et que nous ne remettions pas les... ( L'orateur est interpellé.)Mais si ! C'est le but des lois !
Monsieur le président du DASS, lors de votre première intervention, vous vous êtes fâché. (Protestations de M. Unger.)Si, vous avez quelque peu monté les tours ! Or, la dernière fois que vous aviez monté les tours, j'étais assis là (M. Pierre Froidevaux désigne la table des rapporteurs.)et je présentais un projet de loi soutenu par les radicaux et par l'UDC consistant à demander le blocage du coût des soins à domicile, des EMS et des hôpitaux au niveau de l'assurance-maladie. A cette occasion, j'avais déclaré que j'étais certes minoritaire, mais que l'esprit radical serait majoritaire. Je suis content que, lors de votre précédente intervention, vous ayez rappelé la mesure que M. Couchepin est en train d'instaurer. Ce dernier est en train de remettre un mémorandum sur le coût des soins à domicile, des EMS - et, vous le verrez, des hôpitaux - à charge de l'assurance-maladie, ce qui va dans le sens que j'avais proposé en commission des affaires sociales.
M. Pierre-François Unger s'exprime sans micro. Si j'ai dit «radical», je n'ai pas monté les tours, mais j'ai pété les plombs ! (Rires et applaudissements.)
M. Pierre Froidevaux. Je n'ai pas réussi à comprendre vos propos... Nous vous proposons ici, Monsieur le président, un amendement qui consiste à réduire la subvention versée à l'Hospice général. Cet amendement a une couleur purement politique: il s'agit de signifier notre découragement vis-à-vis du budget 2003. Lorsque nous avons voté ce budget, on nous avait promis un résultat positif de près d'une centaine de millions. Or, ce budget s'est soldé par une dette d'un demi-milliard - dette à laquelle l'Hospice général a contribué à hauteur de 15 millions. Cela signifie que, lorsque l'on nous présente un budget, il y a une dérive dans les comptes - ou, du moins, quelque chose que l'on peut ressentir comme une dérive, comme un mensonge ou comme un manque de clarté. C'est ce type de présentation du budget que nous sanctionnons aujourd'hui. Nous vous envoyons donc un signal politique en vous demandant de trouver les moyens d'une gestion plus saine de l'Hospice général - car c'est de votre responsabilité.
Il n'est pas question de réduire les prestations. On sait bien quels sont les cris qui fuseraient sur le côté gauche du parlement... S'il n'est pas question de cela, il s'agit, en revanche, de respecter la volonté politique majoritaire en déterminant le plus rapidement possible, par le biais d'un projet de loi, un système garantissant le bon fonctionnement de l'Hospice général.
Je vous rappelle une règle fort simple, Monsieur le président: pour 100 francs distribués, nous devons verser 40 francs à l'instance qui distribue cette somme. Efforçons-nous de réduire ce coût de fonctionnement ! Voilà ce qui vous est demandé ! Voilà le sens de notre amendement ! Il ne s'agit nullement de demander une diminution du montant accordé à tous les Genevois qui se trouvent dans le besoin !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Mme Véronique Pürro (S). Je dois avouer que je suis quelque peu choquée par les propos de M. Froidevaux.
Des voix. Ohhhh ! (Le président agite la cloche.)
Une voix. C'était tout gentil, tout doux !
Mme Véronique Pürro. Même s'il a effectivement parlé d'amour au début de son intervention...
Une voix. On vous aime aussi !
Mme Véronique Pürro, en riant. De cela, à la limite, je m'en fiche !
Une voix. Laissez-la parler !
Mme Véronique Pürro. Je suis choquée que l'on puisse, comme M. Froidevaux vient de le faire, prendre en otage les personnes les plus fragilisées de notre République parce que l'on estime qu'une institution comme l'Hospice général n'est pas gérée comme elle le devrait. (Protestations de M. Froidevaux.)C'est ce que vous avez dit ! Je vous ai écouté, Monsieur Froidevaux !
Une voix. Et sans l'interrompre !
Mme Véronique Pürro. Après avoir touché aux prestations des personnes âgées, vous vous attaquez maintenant aux milliers de personnes - 14 000, selon le rapport d'activité 2003 - contraintes de se tourner vers l'Hospice général pour bénéficier de l'assistance publique; des milliers de working poorscontraints de se tourner vers l'Hospice général parce que leur salaire ne suffit plus à les faire vivre dignement - et ils sont malheureusement toujours plus nombreux; des centaines de chômeurs en fin de droit qui, grâce au RMCAS, peuvent vivre - je ne dirais pas décemment, car je ne suis pas certaine que les montants accordés permettent de vivre décemment, mais enfin, ils peuvent vivre. Après les personnes âgées, voilà quelles seront les personnes touchées par la coupe que vous nous proposez aujourd'hui !
Comment peut-on prendre en otage les personnes qui, dans notre République, connaissent les plus grandes difficultés ?! On est tous d'accord sur un point: l'Hospice général doit être réorganisé. On est tous d'accord sur ce point ! Cependant, comme l'a rappelé M. Unger lors de son intervention, il s'agit là d'un tout autre débat et, comme l'a relevé Mme Fehlmann Rielle, ce n'est pas un bon exemple de gestion que de faire l'amalgame entre les ressources de l'Hospice et ses difficultés de gestion ! Vous savez fort bien qu'en cas de difficulté il faut savoir investir ! J'imagine, Monsieur Froidevaux, que c'est ce que vous avez dû faire ces derniers temps avec votre propre entreprise. Lorsque l'on veut remettre une entreprise à flot, il faut savoir investir - notamment dans de nouvelles ressources. C'est ce qui se passe actuellement à l'Hospice général avec un nouveau directeur et, j'imagine, de nouvelles personnes pour épauler ce directeur et remettre cette institution à flot. Mais il s'agit d'un autre débat !
Votre proposition de diminuer la subvention à l'Hospice général de 4,5 millions touchera les personnes les plus fragilisées de notre République. Contrairement à M. Unger, j'ai eu la «chance» - je ne sais pas si l'on peut dire que ce soit une chance... - de participer au débat de la commission des finances sur l'Hospice général. Ce débat a été hallucinant. Il n'y a pas d'autre terme: hallucinant ! L'Entente avait, je crois, proposé une coupe initiale de 6,2 millions - comme ça, 6,2 millions... En trente secondes de discussion, grâce à deux ou trois interventions, nous avons réussi à ramener cette coupe à 4,5 millions... Le souk ! Comme l'a souligné Mme Fehlmann Rielle, aucun argument autre que celui de déterminer clairement quels devaient être les bénéficiaires de ces prestations n'a été avancé !
Allez jusqu'au bout de votre logique, Mesdames et Messieurs de l'Entente ! Montrez-vous responsables et changez les lois en conséquence, comme cela vous l'a été suggéré hier soir à propos du DAEL ! Vous voulez diminuer des prestations - ce que je peux comprendre, puisque c'est ce que vous vendez à vos électeurs et que c'est grâce à cela que la majorité d'entre vous siègent dans cette enceinte. Mais allez jusqu'au bout de cette logique ! Montrez-vous responsables ! Modifiez les barèmes d'assistance publique de manière que ce ne soit plus 14 00, mais 10 000 ou 5 000 personnes qui en bénéficient ! On verra bien ce qu'il adviendra de ceux qui restent au bord de la route ! Modifiez la loi sur le RMCAS ! On verra bien ce qu'il adviendra des chômeurs en fin de droit qui ne trouvent pas d'emploi dans vos entreprises ! On verra bien quelle société vous allez nous construire ! Et ce n'est plus de la société de demain qu'il s'agit, mais c'est déjà de celle d'aujourd'hui ! Mais soyez responsables ! Allez jusqu'au bout de votre logique !
En attendant, nous rejetterons votre proposition de diminuer de façon stupide et irresponsable les deniers de l'Hospice général ! Nous vous demandons, en conséquence, de soutenir notre amendement ! (Applaudissements.)
M. Georges Letellier (UDC). Au cours des derniers débats, nous avons à plusieurs reprises été accusés de vouloir démanteler les acquis sociaux - slogan fort connu dans les luttes idéologiques marxistes-léninistes. (Rires.)Personne, à droite, ne s'en est offusqué. Etant donné que l'on ne peut pas dire n'importe quoi impunément dans ce parlement - c'est M. Brunier qui l'a dit - je tenais à répondre à ces invectives en m'élevant avec détermination contre des accusations gratuites et, surtout, contre l'utilisation médiatique d'un leitmotiv idéologique claironné dans un but essentiellement démagogique et électoraliste.
Nous ne voulons pas nous en prendre aux acquis sociaux ! Nous n'en avons jamais eu l'intention ! Cela est très clair - les hommes de coeur existant, bien sûr, à droite comme à gauche. Nous voulons, en revanche, nous en prendre aux abus d'acquis sociaux - j'ai bien dit: «abus» - qui nous ont conduits à une situation financière comateuse dont vous êtes, par vos continuelles pressions syndicalistes, largement responsables, Mesdames et Messieurs de l'Alternative ! En coulisses - mais en coulisses seulement - vous reconnaissez qu'il y a urgence à traiter la problématique des abus sociaux. En revanche, en séance plénière, silence radio ! Vous restez muets, car ce problème vous responsabilise et risque de déranger votre fonds de commerce...
Je demande fermement à notre Conseil d'Etat de tout mettre en oeuvre pour éradiquer le fléau que sont les abus d'acquis sociaux - véritable injustice sociale entretenue par ceux qui prétendent la défendre ! Les honnêtes travailleurs en ont marre de cotiser pour subventionner les profiteurs de vos largesses sociales ! (Protestations et huées. Le président agite la cloche.)Merci, merci... Vous le savez ! Vous devriez au moins avoir le courage, Mesdames et Messieurs de la gauche, d'ôter vos oeillères idéologiques ! Nous ne sommes pas là pour combattre le prolétariat, camarades ! Je l'ai fait avant vous - car j'ai été syndicaliste, comme vous ! Nous sommes ici pour rétablir une certaine justice et une certaine vérité !
Une voix. Facho !
Une voix. Tu as bien évolué ! (Rires.)
M. René Ecuyer (AdG). Je viens d'entendre les propos de M. Letellier... Vous avez parlé des abus, mais vous avez oublié de mentionner un élément important: alors que l'on discute de sombres coupes dans le budget de l'Etat, vous oubliez de préciser que, vous et vos amis, vous vous êtes activés à vider les caisses de l'Etat ! Cela fait un moment que vous les avez vidées ! Vous avez baissé les impôts - baisse qui ne profite qu'à une partie de la population, soit les gros contribuables ! (L'orateur est interpellé. Le président agite la cloche.)Vous avez accordé à vos amis les plus fortunés des avantages relatifs aux droits de succession ! Et après, vous venez pleurer parce qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses ?! Je suis sidéré par l'importance des coupes proposées dans le budget de la prévoyance sociale - à croire que M. Unger et ses collaborateurs s'ingénient à balancer l'argent par les fenêtres... Or, pour avoir longtemps travaillé dans le domaine social, je doute que cela soit le cas ! Je puis vous assurer que ce n'est pas ainsi que cela se passe !
Ce débat m'amène à vous faire partager quelques réflexions. Il est vrai que je reçois des ordres: je reçois des ordres de personnes qui sont doublement victimes de votre politique. En premier lieu, elles sont victimes de la politique que vous adoptez en tant qu'employeurs, lorsque vous les mettez à la porte et que vous les précipitez dans les ennuis. En deuxième lieu, ces personnes sont victimes de votre politique parce que vous leur coupez les vivres dans tous les domaines. Je me sens désigné par tous ceux qui, par exemple, sont à la recherche d'un logement correspondant à leurs capacités financières. Ce n'est pas le chemin que l'on prend avec les coupes que vous venez d'imposer au DAEL !
Je me sens également désigné par toutes celles et ceux qui approchent de l'âge de la retraite et qui vont timbrer au chômage. Encore une fois, ce n'est pas avec les dispositions que vous avez prises par rapport au budget que l'on va les aider ! Je pense également à ces jeunes qui, au terme d'un apprentissage ou de leurs études, se mettent à la recherche d'un premier emploi. Ce n'est pas en coupant dans les vivres de l'Office de la jeunesse que l'on va les aider ! Je suis également aux ordres de celles et ceux qui ont droit à l'allocation de logement et qui en ont besoin...
Une voix. Pourquoi ?!
M. René Ecuyer. Pourquoi ? Parce que l'on ne construit pas ou que l'on construit trop cher ! Or, ce n'est pas avec les coupes que vous avez faites que l'on va résoudre ce problème !
Je pense enfin à ceux qui ont besoin d'aide à domicile. Ces personnes sont victimes de la hausse du prix de l'aide à domicile. Suite aux... je ne dirais pas «manipulations», mais suite à l'harmonisation fiscale, de nombreuses personnes touchant un subside moins important n'ont pas accès à l'aide à domicile. Alors, lorsque j'entends de telles âneries... Excusez-moi, mais c'est vraiment une ânerie que de dire que l'aide à domicile est luxueuse ! Je n'ai jamais entendu cela ! Allez le dire aux retraités ! (Protestations.)D'ailleurs, toutes les coupes que vous proposez s'attaquent aux plus pauvres des plus pauvres ! Elles s'attaquent à ceux qui ne pourront pas réagir ! C'est curieux que vous ne vous soyez pas encore attaqués à l'OCPA... Je vous comprends car, le jour où vous vous y attaquerez, je vous promets qu'il y aura une mobilisation ! A ce moment-là, vous discuterez avec vos parents, avec nos parents, qui descendront dans la rue ! Vous leur expliquerez comment vous vous comportez ! En coupant 4,5 millions à l'Hospice général, on supprime du personnel et on favorise plutôt l'aide financière au détriment de l'aide sociale, puisque les assistants sociaux n'ont plus le temps d'étudier les dossiers et de s'occuper des personnes sur le plan social ! Les assistants sociaux croulent sous les dossiers; cela, vous le savez. Alors, comme il est extrêmement difficile de s'occuper de 70 à 80 dossiers, on liquide ! On les paie au lieu de les aider ! (Rire de M. Froidevaux.)Vous rigolez, Monsieur Froidevaux, mais moi, je ne fais pas du fric avec les malades ! Ce n'est pas cela ! Vous êtes un peu malade dans votre tête...
On a vu de quoi vous étiez capables, Mesdames et Messieurs ! Vous êtes capables de voter n'importe quoi ! Hier, vous avez voté des coupes qui seront impossibles à respecter ! Vous coupez, par exemple, dans l'allocation de logement en sachant pertinemment que vous ne pourrez pas appliquer une telle coupe puisque cette allocation est régie par une loi. Que vous avez vous-mêmes votée !
Je vous reconnais au moins une qualité: c'est la fidélité. Vous faites preuve de fidélité envers ceux qui vous emploient, envers ceux qui vous envoient siéger dans cette enceinte, envers ceux qui se nourrissent de la crise, envers ceux qui entassent des millions en foutant des gens à la porte et en délocalisant... Cela, c'est une qualité que je vous reconnais... Mais vous manquez cependant d'imagination ! A un moment donné, il aurait fallu que la commission des finances reconnaisse que l'Etat traverse une crise de recettes plutôt qu'une crise de dépenses. Et pourquoi ne demanderait-on pas un petit centime de crise à ceux qui profitent de la crise en amassant de grosses sommes ?! On pourrait instaurer un modeste «impôt de crise» pendant quelque temps, cela permettrait d'éviter les coupes stupides que vous avez proposées jusqu'à présent ! (Brouhaha.)
Je ne nourris aucune illusion quant à l'issue du vote... J'encourage toutes les personnes présentes à voter cet amendement mais, comme le dit la formule: «C'est pisser dans un violon» ! (Applaudissements.)
Le président. Il reste trois députés inscrits ainsi que M. le conseiller d'Etat Unger. Je vous propose d'aller au terme du débat sur cet amendement, puis de reprendre la séance un peu plus tard. La parole est à M. le député Gilbert Catelain.
M. Gilbert Catelain (UDC). Dans ce débat particulièrement émotionnel, il faut en revenir aux faits. Ces faits ont récemment été décrits dans le rapport de la commission de contrôle de gestion - rapport qui a constitué un véritable brûlot pour certains et qui, à en croire le débat d'aujourd'hui, est resté en travers de la gorge d'aucuns.
Nous disposons, durant cette séance plénière, du rapport de l'Hospice général. Je relève au passage que ce document a été imprimé sur papier glacé. On a là une première possibilité d'économie. Je suis, en tant que contribuable, scandalisé que l'on consacre chaque année des frais aussi importants pour l'impression d'un rapport qui, la plupart du temps, finit à la poubelle ! (L'orateur est interpellé.)Si vous lisez ce rapport, vous constaterez que, si quelque 150 millions de subventions profitent, certes, aux bénéficiaires de l'Hospice général, les charges de personnel s'élèvent tout de même à 80 millions de francs en 2003. En d'autres termes, lorsque vous versez 2 francs à l'Hospice général, la moitié de cette somme est destinée aux charges salariales ! Je constate par ailleurs que les charges salariales de l'Hospice général ont augmenté de 8 % - soit, grosso modo, de 6 millions de francs - en l'espace de deux ans. Cette information se trouve en page 41 du rapport. Une telle hausse des frais salariaux n'est pas étonnante, puisque l'on a reclassifié l'ensemble des travailleurs sociaux en 2003. A cette occasion, le Conseil d'Etat a, dans sa grande générosité, estimé que l'on pouvait se permettre de telles dépenses malgré l'état des finances publiques...
Vous avez évoqué la question du recrutement. Il existe effectivement des personnes pour lesquelles le social est une vocation et qui suivent une formation dans ce domaine parce qu'elles y croient. Je vous citerai un exemple récent. La fille de l'une de mes collaboratrices, qui a suivi des études de droit social, a effectué un stage de trois mois à l'Hospice général. Elle a été dégoûtée: non pas du fonctionnement de l'Hospice général - car il peut effectivement y avoir des dysfonctionnements - mais de l'arrogance de nombreux bénéficiaires des aides de l'Hospice général ! Le DASS a pris la mesure de ces dysfonctionnements - un peu tardivement, puisqu'il aura fallu la démission du directeur de l'Hospice et le rapport de la commission de contrôle de gestion. Peut-être s'en était-il rendu compte auparavant, mais il n'a, à mon avis, pas pris les mesures nécessaires suffisamment tôt. Je pense notamment à un audit du Conseil d'Etat. Certains éléments commencent maintenant à émerger.
Mon collègue a évoqué le problème des abus. J'ai ici un dossier selon lequel certains assistants sociaux délivreraient des prestations à des bénéficiaires de l'Hospice général sans contrôler les fichiers Calvin et Ripol. Il suffit d'ailleurs de regarder sur le livret d'établissement de ces personnes quel est leur canton de domicile. Certaines personnes, qui contribuent à l'accroissement du nombre de dossiers traités par l'Hospice général, bénéficient donc d'aide alors qu'elles sont domiciliées dans d'autres cantons ! (Protestations.)L'Hospice général a été interpellé à ce sujet, et ce point figurera peut-être dans le rapport final de la commission de contrôle de gestion. Je rappelle par ailleurs qu'il n'y a pas de coupe claire ou de coupe sombre: cela dépend de quel bord l'on se place ! Alors que la subvention de l'Hospice général se montait à 121 millions en 2002, elle s'élèvera, avec l'amendement de la commission des finances, à 147 millions. Cette subvention bénéficie d'une augmentation de plus de 20 % en deux ans. Vous ne pouvez donc pas parler de coupe ! Il n'y a aucune coupe ! Si vous votez ce budget cet après-midi, la subvention accordée à l'Hospice général connaîtra une hausse de plus de 20 % !
Pour en rester aux faits, en lisant ce rapport, on constate que le tiers des subsides dispensés - la grande majorité, j'en conviens, à juste titre - concerne les requérants d'asile. Or, le nombre de requérants d'asile a diminué de 5 % entre le 1er janvier et le 31 décembre 2003. Cette importante baisse va se traduire en 2004 par une diminution globale de 1,5 % sur l'ensemble de l'Hospice général. Or, qu'est-ce que je constate dans le rapport annuel ? C'est que, en dépit de la diminution de 5 % du nombre de requérants d'asile pris en charge par l'Hospice général, le montant des prestations fournies dans ce secteur sont, à 5 000 francs près, les mêmes que l'année précédente ! Il y a donc bien des problèmes de gestion !
La coupe qui a été proposée par la commission des finances est, à mon avis, entièrement justifiée puisque vous pouvez réaliser des économies, d'une part dans le secteur de l'asile, d'autre part en mettant un frein à l'augmentation injustifiée des charges salariales de l'Hospice général. J'attends avec impatience le rapport final de la commission de contrôle de gestion. En attendant, ce parlement se doit d'envoyer un signal politique fort à la nouvelle direction de l'Hospice général. Cette direction doit être en mesure de dire à ses troupes: «Les abus, ça suffit ! Le pouvoir politique nous demande de remettre de l'ordre dans cette institution». Le chef du DASS a tout intérêt à ce que l'on vote cet amendement afin d'envoyer un signal fort pour remettre de l'ordre dans cette institution.
Une voix. Quel amendement ?!
M. Gilbert Catelain. Je parle bien évidemment de l'amendement proposé par la commission des finances, et non de celui proposé par l'Alliance de gauche !
Je vous remercie de m'avoir attentivement écouté. Je n'ai pas voulu polémiquer. Je n'ai fait que rester aux faits qui figurent dans le rapport annuel de l'Hospice général ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). M. Catelain veut envoyer un signal fort à la nouvelle direction de l'Hospice général. Mais quel signal ?! Je me le demande ! Le signal que vous envoyez est le suivant: «Vous êtes des pantins, vous gérez mal cette institution, mais cela nous est parfaitement égal, car l'Etat paiera de toute façon la différence» ! Voilà le signal que vous envoyez ! Vous ne changez pas la loi, vous ne modifiez aucune prestation de l'Hospice, car vous n'êtes pas capables de gérer des éléments précis ! On atteint là le paroxysme de l'absurdité - et c'est toute l'Entente qui est ici visée !
Vous aviez pris un engagement - absurde, nous le savions d'avance: «Nous voulons 140 millions d'économies». Arrivés au terme de ce budget, vous vous êtes dit: «Zut, on ne parvient pas à une économie de 140 millions. Comment faire ? Eh bien, coupons dans l'Hospice général ! Il ne s'agit que d'un amendement cosmétique, puisque l'on sait que notre constitution contraint l'Etat à payer la différence».
Vous qui vous targuez toujours de rigueur budgétaire, on pourrait se demander s'il ne s'agit pas là d'un maquillage des comptes... Vous maquillez le budget en diminuant cette ligne et en vous gargarisant de réaliser une économie tout en sachant pertinemment que l'on paiera 4 ou 5 millions de plus ! Ce n'est pas une économie: c'est un maquillage de budget - et vous le savez pertinemment ! Je vous invite à rétablir un budget et des comptes véritables ! (Applaudissements.)
M. Jean Spielmann (AdG). Les hasards de la numérotation budgétaire des documents qui nous sont remis nous amènent à aborder l'Hospice général quasiment à la fin du débat. Et la facture qui nous est présentée résulte maintenant de l'ensemble de la politique que vous avez développée. Elle résulte de toutes les coupes opérées hier et aujourd'hui dans divers domaines d'activités.
Bien que cela ait déjà été dit par certains, je tiens à rappeler que les dépenses de l'assistance - qu'il s'agisse d'une assistance complète, d'un complément de salaire ou d'un complément à l'assurance-chômage - résultent de la société dans laquelle nous vivons. Elles en sont une photographie. Ces éléments ne sont pas dus au hasard. Toute société dispose d'une capacité d'organisation permettant d'éviter, et le chômage, et la précarité salariale. Toute société est aujourd'hui en mesure de mettre en place une véritable sécurité sociale garantissant des conditions de vie décentes et une véritable prévoyance plutôt que de conduire les gens vers l'assistance. Or, les réductions, les coupes, la politique que vous menez à plusieurs échelons vont à l'encontre de cet objectif !
Je rappellerai simplement quelques éléments essentiels. Hier, pour faire réaliser des économies au DIP, M. Lescaze a proposé de supprimer la formation en matière de nouvelles technologies - informatique et designing. Il propose de fermer la nouvelle filière qui se met actuellement en place alors qu'il s'agit de l'un des éléments essentiels qui permettra aux jeunes de trouver un emploi demain ! Par cette mesure, nous préparons l'assistance et le chômage de demain, Monsieur Lescaze - et il ne faudra pas ensuite venir pleurer sur la facture ! En réduisant les capacités de notre société à répondre aux défis de demain, vous ne faites pas des prévisions sur le long terme, mais vous réfléchissez sur le court terme ! Vous tentez de justifier des coupes budgétaires qui n'apporteront rien d'autre à la société de demain qu'un accroissement de ses frais d'assistance !
Toute cette politique a un prix. Comme cela a été dit lors de presque tous nos débats, vous présentez des amendements en tenant le discours suivant à la population: «Nous défendons la rigueur budgétaire; nous voulons rééquilibrer les comptes de l'Etat». Mais que proposez-vous ?! Vous proposez de réduire de 4,5 millions les dépenses de l'Hospice général alors que vous savez pertinemment que ces dépenses vont s'accroître !
M. Christian Luscher. Cela a déjà été dit !
M. Jean Spielmann. Cela a effectivement déjà été dit. On vous l'a déjà expliqué, mais il n'est pas inutile de le répéter, Monsieur Luscher, car il semble que vous ne compreniez pas... Si vous aviez compris, vous ne présenteriez pas de tels amendements, puisque vous savez qu'ils ne réduiront pas le déficit, mais qu'ils continueront à l'accroître ! Vous savez que vos décisions ne réduiront pas les problèmes financiers de notre canton mais qu'elles vont les augmenter ! Vous savez que vous êtes en train de pousser cette société vers la précarité et l'assistance ! Et vous savez que la facture sera payée par l'Etat, puisque notre constitution le garantit ! Vous n'avez pas le courage de modifier les lois qui fixent les normes selon lesquelles les gens peuvent bénéficier de prestations ! Dès lors, à quoi cela sert-il de réduire le budget de 4 millions ?!
Tout à l'heure, M. Froidevaux a osé dire au Conseil d'Etat que, si les comptes ne correspondaient pas aux objectifs fixés dans le budget, il y avait mensonge, manque de réalité et manque de responsabilité. C'est un peu fort d'accuser le Conseil d'Etat des dépenses de l'Hospice général alors que c'est vous qui faites les lois et qui fixez les normes autorisant les gens à bénéficier de prestations ! Au moment de l'élaboration du budget, vous saviez que les sommes que vous proposiez seraient non seulement totalement dépensées, mais dépassées ! Vous n'avez même pas le courage de payer le prix de l'ensemble la politique que vous avez menée - à savoir, la précarité, le chômage et le recours croissant à l'assistance ! La facture qui nous est présentée est le prix à payer pour cette politique de baisse d'impôts, pour cette politique libéraliste de destruction de l'outil de production que vous avez instaurée ! Et vous ne voulez pas l'assumer en changeant les conditions qui permettent aux gens de bénéficier de prestations ! Vous baissez artificiellement le budget en sachant par avance que l'on ne pourra pas respecter le montant que vous proposez d'allouer à l'Hospice général et que l'addition viendra ! C'est vraiment la méthode Coué que vous adoptez ! Je ne comprends tout simplement pas la stupidité dont vous faites preuve, Mesdames et Messieurs les députés ! On voit aujourd'hui l'addition de la fracture sociale que vous avez mise en place, les conséquences des mensonges que vous avez répétés !
Parmi tous les gens qui sont en train de suivre ce débat, lesquels ont vu leurs impôts baisser ?! Les impôts ont considérablement augmenté pour les petits revenus et pour les retraités ! Ce sont vos amis politiques qui ont bénéficié de ces baisses d'impôts qui ont conduit à la précarisation de notre société et qui ont contraint des dizaines de milliers de personnes à recourir à l'assistance pour se loger et pour survivre ! Et vous ne voulez même pas régler la facture de cette assistance ! Vous préférez procéder à une coupe artificielle !
Coupez ces 4,5 millions ! Je vous donne rendez-vous au moment des comptes: la situation sera encore plus claire, car la facture et la fracture que votre politique a mises en place et qui conduisent au chômage et à la précarité coûtent beaucoup plus cher que la politique que nous mettrions en place si nous en avions la responsabilité - ce qui viendra probablement. La politique que nous voulons mettre en place est une politique de prévoyance et d'assistance sociale qui investit dans l'intelligence humaine et dans l'enseignement. Vous, vous voulez couper les vivres qui permettraient le développement d'une telle politique ! Notre politique est une politique d'avenir qui parie sur l'intelligence des gens. Pour l'instant, c'est à votre stupidité que l'on doit faire face. On tente de le faire le mieux possible, mais ce sera à la population d'apporter une véritable réponse en vous renvoyant à vos affaires et en laissant la gestion publique à ceux qui en sont capables ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Guy Mettan, rapporteur de majorité.
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je tiens en premier lieu à faire remarquer à l'Alternative que ce n'est pas avec des insultes que l'on élabore un budget. On a entendu toutes sortes d'insanités; on nous a traités de tous les noms d'oiseaux... (Protestations. Le président agite la cloche.)Si, on nous a traités de tous les noms d'oiseaux ! Mesdames et Messieurs les députés, si vous voulez être crédibles, utilisez un vocabulaire qui soit respectueux des autres ! Cela me paraît être la base de toute discussion, en particulier lorsqu'on traite du domaine social.
Je souhaite resituer les choses dans leur contexte. Je vous rappelle tout d'abord que la dotation de l'Hospice général a augmenté de 30 millions en deux ans - ce qui n'est pas négligeable. Je vous signale ensuite que la somme que nous avons, cette année, accepté d'attribuer à cette institution est de un million de francs supplémentaire à celle qui figure dans les comptes 2003. Une dépense de 146,8 millions figurait aux comptes 2003; nous sommes prêts à augmenter ce montant de un million supplémentaire, puisque la proposition que l'on vous a soumise pour cette année se monte à 147 millions et des poussières. Je tenais à ce que cela soit dit. (L'orateur est interpellé. Le président agite la cloche.)Par ailleurs, comme on l'a relevé tout à l'heure, il est vrai que l'Hospice a connu une crise de fonctionnement. Il a été constaté que plusieurs services du département de M. Unger avaient également connu des crises - je pense, par exemple, à l'OCAI. Or, grâce à l'action du département, ces crises ont pu être surmontées dans un délai record. Un nouveau directeur a été nommé à la tête de l'Hospice général, et je suis sûr qu'avec les mesures qui seront mises en oeuvre par le DASS avec l'efficacité que l'on sait, l'Hospice général sera assaini d'ici à l'année prochaine. Pourquoi acceptons-nous d'accorder un million supplémentaire à cette institution ? Parce que nous voulons voir cet assainissement à l'oeuvre sans lui porter préjudice. En lui accordant un million supplémentaire, on lui permet d'accomplir ce travail.
Je vous rappelle également qu'il est prévu d'augmenter de 48 le nombre de postes à l'Hospice. Mais attendons les résultats de cette réorganisation avant d'accorder ces postes ! Si, après avoir fait l'analyse qu'il convient et après avoir procédé à la réorganisation de cette institution, le directeur de cette dernière nous indique que ces postes sont nécessaires, nous serons tout à fait disposés à entrer en matière sur cette question. Mais ce n'est pas maintenant qu'il faut le faire ! Attendons que le directeur de l'Hospice ait fourni une analyse crédible - et je sais qu'elle le sera !
Il faut par ailleurs savoir que la moyenne genevoise du nombre de dossiers traités par assistant social est la plus basse de Suisse. Je suis certain que, grâce à la réorganisation en cours, nous pourrons améliorer cette moyenne - ce qui pourrait nous permettre de réaliser certaines économies.
Je vous propose donc simplement d'attendre de voir ce que donne la réorganisation de l'Hospice. Le million supplémentaire que nous avons accordé permettra, j'en suis sûr, à l'Hospice de terminer l'année dans de bonnes conditions et, l'année prochaine, avec les indications que nous fourniront le président du DASS et le nouveau directeur de l'Hospice, nous pourrons examiner ce dossier dans le calme et sans en arriver à des gros mots ! (Applaudissements.)
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je ne m'arrêterai pas aux excès que j'ai pu entendre de part et d'autre, car ils sont indignes des discussions que l'on devrait avoir dans cette enceinte. S'il est vrai qu'il existe des abus, on ne peut pas pour autant systématiser l'existence de ces abus sous prétexte que l'on en a découvert un. Comme vous le savez, c'est d'ailleurs l'un des soucis de l'ensemble du Conseil d'Etat que de combattre les abus, car il s'agit de la seule manière de conserver la dignité et l'ambition d'une politique sociale généreuse. Des termes tels que ceux qui ont été les vôtres ne sont pas de nature à accroître le consensus autour de cette politique. Vous avez beaucoup parlé de politique sociale et de politique de gestion. Il n'était ici question que d'un montant de 4,5 millions, mais l'on comprend, au vu du contexte, pourquoi ces éléments ont été évoqués.
S'agissant de la politique sociale, comme vous le savez, nous procédons actuellement à la révision de la loi sur l'assistance publique. Je me suis déjà engagé auprès des deux délégués de la commission de contrôle de gestion qui ont demandé des modifications structurelles de l'Hospice à orienter ce dernier sur la voie de l'autonomie, et ce avec l'appui du Conseil d'Etat. Vous aurez d'ailleurs à vous prononcer sur cette question. Il est vrai que la voie de l'autonomie est difficile lorsqu'une institution connaît des ennuis, car elle implique que l'on fasse confiance. Mais n'oubliez pas - ce qui n'est pas difficile, mais terrorisant - ce qu'est une structure à l'encontre de laquelle règne la méfiance. J'espère bien vous convaincre de la nécessité de faire confiance à l'Hospice afin que l'on puisse garder une institution publique autonome dans le cadre d'un mandat de prestation.
Nous reviendrons également devant vous avec une proposition de révision de la loi sur l'assistance publique concernant le volet des prestations. Vous travaillez actuellement sur le revenu déterminant unique. Là aussi, combien de fois n'a-t-on pas entendu: «Il y a des abus» ?! Il y a en effet des abus, et nous les avons vérifiés les uns après les autres - car c'est notre devoir. Mais lorsqu'un système législatif est ainsi fait que, lorsque l'on entre dans le système social par la porte A avec un montant X, on en sort avec un montant X + 100 et que, lorsque l'on entre avec un même revenu de départ par la porte B, on en sort avec un montant différent, l'abus n'est pas celui de l'utilisateur: c'est celui d'un système qui s'est historiquement construit sans grande cohérence ! Nous entendons donner davantage d'accessibilité, de justice et de visibilité à ce système. J'ai entendu, à travers les interventions des uns et des autres, que le Conseil d'Etat était soutenu dans cette affaire.
J'ai bien compris que les 4,5 millions dont nous débattons vont disparaître. Si je m'exprime néanmoins à ce sujet, c'est parce que, au moment où des solutions commencent à émerger pour sortir de cette crise d'une incroyable intensité dans laquelle était plongé l'Hospice - je pense à la nomination d'une nouvelle direction et à la prise de conscience du conseil d'administration de la nécessité de modifier les choses - c'est adresser un mauvais message, et à la direction, et au conseil d'administration de l'Hospice que de l'inviter à se réfugier dès le premier exercice derrière la garantie de déficit constitutionnelle alors même que l'on peut garantir que le montant voté sera dépassé ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter sur l'amendement proposé tant par l'Alternative que par le Conseil d'Etat à la rubrique 84.29.00.363.01. Je vous rappelle que cet amendement vise à augmenter la subvention de fonctionnement de l'Hospice général de 4,5 millions. L'appel nominal est demandé... Il l'est !
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 46 non contre 38 oui.