Séance du
vendredi 11 juin 2004 à
15h
55e
législature -
3e
année -
9e
session -
47e
séance
PL 9187-A
Premier débat
M. Jacques Baud (UDC). Comme cela figure dans le rapport, la vente sur cet objet est de 50% inférieure à sa valeur vénale - soit à la valeur normale de vente d'un immeuble. Ces 50% ne sont pas acceptables. C'est pourquoi nous refuserons la vente de cet immeuble et nous renverrons cet objet en commission.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je suis chargée de vous transmettre, au nom du groupe socialiste, quelques réflexions concernant les rapports sur les projets de lois de la commission de contrôle de la Fondation, et ceci en plein accord avec nos collègues rapporteurs, Mme Gobet Winiger et M. Velasco.
Il est apparu, lors de notre dernier caucus, que les rapports de cette commission suscitaient un malaise certain dans notre groupe. Leur contenu succinct nous interroge. S'il y a débat dans cette commission, cela n'apparaît pas dans le rapport; or, nous avons appris par nos commissaires qu'il pouvait y avoir débat. Il n'y a jamais eu de rapport de minorité: c'est étrange ! Est-ce sain sur le plan démocratique ? Comment se satisfaire d'un rapport qui précise que la perte, s'agissant du projet de loi 9187-A, est de 5,558 millions de francs, alors que le prix de vente est de 2,8 millions ? Pourquoi ces chiffres ? Qu'est-ce qui explique une perte aussi énorme que celle de plus de 5 millions - et ce n'est pas la première fois ? Autre remarque sur le même projet de loi: l'immeuble est situé à la route de Saint-Julien, à Carouge. Voilà une indication bien vague...
Notre Grand Conseil et les citoyennes et citoyens de notre République ont droit à une meilleure information sur les travaux de la commission de contrôle de la Fondation ainsi que sur les immeubles et les déficits les concernant. Le groupe socialiste remercie les membres de la commission de tenir désormais compte de ces remarques - qui ne sont pas anodines.
Le président. Merci, Madame la députée. J'ai un petit souci, Madame et Monsieur les rapporteurs. Formellement, le rapporteur unique de ce projet de loi est M. le député Velasco et, sur mon écran, le rapporteur s'affiche simultanément aux places 117 et 118. Si l'on pouvait me préciser quels députés occupent ces places, cela me permettrait de donner la parole à la bonne personne. Vous êtes maintenant quatre à la table des rapporteurs, ce qui ne facilite pas ma tâche... Vous avez la parole, Madame Künzler !
Mme Michèle Künzler (Ve). Les rapports de cette commission sont effectivement succincts. Il y a eu un rapport beaucoup plus long sur un objet qui a suscité un réel débat: il s'agit du bâtiment sis au 79, rue de Lausanne - c'est le dernier objet que vous aurez à traiter ce jour. La perte occasionnée par cette vente est certes élevée, mais je rappelle que la perte prévisible s'élève à 2,7 millions de francs. Il est évident que certains immeubles ont été gagés de manière déraisonnable - et ce n'est malheureusement là pas l'un des pires cas que l'on ait constaté. Je rappelle par ailleurs que l'adresse exacte de l'immeuble concerné et diverses autres données sont toujours publiées dans la «Feuille d'avis officielle». Cependant, si les députés le désirent, on peut faire figurer l'ensemble de ces données dans les rapports de commission, cela ne nous dérange absolument pas.
Il y a déjà eu des rapports de minorité, un projet de loi avait été refusé - c'était d'ailleurs à mon instigation qu'il l'avait été - la vente de cet objet n'a toujours pas eu lieu et ce dernier reste entre les mains de la Fondation de valorisation. Alors, l'objectif de cette Fondation est de vendre. Et si ces rapports sont la plupart du temps acceptés à l'unanimité, c'est parce que nous nous sommes accordés sur l'utilité de la vente ainsi que sur le bien-fondé du prix.
M. Pierre Kunz (R). Je souhaite simplement soutenir les propos tenus par Mme Künzler en rappelant que les amis de Mme Schenk-Gottret peuvent en tout temps déposer des rapports de minorité. S'ils ne le font pas, c'est qu'ils jugent que ce n'est pas nécessaire. Vous pouvez néanmoins les rappeler à l'ordre, Madame !
Quant à la remarque de M. Baud, je suis surpris que ce dernier soit fâché, car son collègue a, en commission, voté en faveur du rapport qui nous est présenté. Mais il est des états d'âme qui, les élections approchant, peuvent s'expliquer...
Je rappelle que la commission élabore chaque année un rapport complet sur ses activités. Vous pourrez là aussi, Mesdames et Messieurs les députés, vous exprimer sur la manière dont vous considérez que la commission travaille.
M. Jacques Baud (UDC). Lorsque je prends une décision, ce n'est pas une décision politique, mais une décision de bon sens !
Mme Véronique Pürro (S). J'aimerais revenir sur les propos de Mme Schenk-Gottret. Lors de notre dernier caucus, nous avons effectivement discuté des rapports de cette commission. Et je crois, à entendre sa réponse, que M. Kunz n'a pas bien compris quel était notre souhait.
Il est vrai que nous disposons en commission - puisque j'en fais également partie - de toutes les informations utiles; nous y prenons toutes les décisions en notre âme et conscience avec, pour chacun d'entre nous, les compétences qui sont les nôtres. Or publiquement, il nous semblait toutefois intéressant que certains éléments soient portés à la connaissance de tous, ce qui n'est pas le cas avec les rapports actuels. Et je ferai plaisir au président de la commission, M. Mark Muller - je suis mal placée pour parler de cela, puisque je n'ai jamais rédigé de rapport et n'en rédige jamais - en estimant qu'il serait néanmoins intéressant que le public dispose d'un peu plus d'éléments que ceux figurant actuellement dans les rapports, cela compte tenu des sommes en jeu et, également, du fait que c'est au contribuable qu'incombe la prise en charge de ces montants. Par souci de transparence, il nous paraissait utile que les rapports votés par notre Grand Conseil et portés à la connaissance du public contiennent davantage d'éléments que ce n'est le cas actuellement. Je précise bien qu'il ne s'agit là que d'un souci de transparence, il n'est pas question de remettre en question la confiance que nos collègues nous témoignent en tant que membres de la commission, puisqu'il me semble que dans le cadre de nos débats nous disposons de tous les éléments souhaités.
Si cette discussion a vu le jour au sein de notre groupe, c'est que la commission a dernièrement eu à traiter un objet important mettant en jeu de très gros montants. Quelques commissaires - dont je fais partie - ont estimé, les sujets et les sommes en jeu étant parfois tels qu'il conviendrait de faire preuve d'un peu plus de transparence envers l'ensemble des députés et de la population.
M. Rémy Pagani (AdG). Nous avons discuté de la politique suivie par la Fondation de valorisation au sein de notre caucus, car une personne s'est récemment indignée - indignation par ailleurs légitime - du fait que, chaque fois que l'on vendait un objet, une somme quasiment analogue devait être épongée par le contribuable. C'est bien le résultat d'une politique scandaleuse - qui, je l'espère, a définitivement vécu durant les années 80 - qui a amené la Banque cantonale à s'engager sur des sommes astronomiques. On a cité l'exemple d'un immeuble qui valait 8 millions de francs et pour lequel la Banque cantonale avait prêté 55 millions... C'est le résultat de cette politique qu'il faut, une fois de plus, dénoncer !
Nous avons donc discuté de cette question au sein de notre caucus et nous ne remettons pas en cause, loin s'en faut, la politique actuelle qui est menée, et notamment le contrôle par notre commission. Après trois ans de fonctionnement, il convient néanmoins de se poser certaines questions. Je vous soumets donc ces dernières, auxquelles les uns et les autres devraient réfléchir.
Le premier point est le suivant: lorsque nous avons créé dans l'urgence cette Fondation, on pensait que l'on épongerait cette immense créance sur un laps de temps d'une trentaine d'années - je me souviens des débats de l'époque - c'est ce qui a prévalu dans les discussions qui ont eu lieu au moment de la création de cette Fondation. Or on s'aperçoit maintenant que l'on se trouve dans un laps de temps beaucoup plus court. De plus, la conjoncture faisant, la tendance est à la séparation très rapide de biens immobiliers. Une telle politique est justifiée, mais elle participe à l'augmentation du prix des loyers. Il est dès lors légitime de se demander comment adopter une attitude plus sociale face à l'impact de ces ventes sur l'ensemble du parc immobilier genevois. En sous-rubrique de cette question, on pourrait se demander s'il ne serait pas possible d'utiliser certains de ces biens immobiliers à d'autres fins, notamment pour du logement social - on a notamment assisté à l'affaire du Carlton...
Cela m'amène à une deuxième considération: si mes renseignements sont exacts, l'Etat n'a, jusqu'à présent, racheté aucun bien à cette Fondation. Je trouve cela extrêmement grave, car on assiste, s'agissant de la location de certains immeubles administratifs, je n'ose pas dire à des «aguillages financiers» mais, du moins, au paiement de loyers extrêmement élevés. Prenons l'exemple de l'office cantonal de la population: on paie un loyer, m'a-t-on dit, astronomique - j'ignore son montant exact - puis l'on rachètera cet immeuble ! On peut également citer l'exemple de l'immeuble Spengler. Le gouvernement fait preuve d'incohérence ! Plutôt que de payer des loyers trop élevés, il ferait mieux de faire un effort significatif pour acheter des immeubles qui serviraient, sur le long terme, à notre administration cantonale ! J'admets que le coût est prohibitif mais, prohibitif pour prohibitif, j'aime autant que ces bâtiments restent au sein de l'Etat plutôt qu'ils ne partent en des mains privées et que l'on paie des loyers exorbitants pour leur location de surfaces !
Ma dernière remarque concerne le logement social. Là aussi, je pourrais vous citer des exemples où, soit la Ville, soit l'Etat ont racheté pour des millions des immeubles - par exemple, pour régler le problème d'un plan de quartier à la rue de Lyon. Et, tout d'un coup, on s'interdit de le faire parce qu'un immeuble ne serait pas suffisamment rentable ?! Prenons le Carlton: j'ai visité cet immeuble, il est vrai que l'on pourrait discuter de la rentabilité stricto sensudes studios. Mais si l'on pense aux 140 places de parking et au lieu communautaire dans lequel pourraient se dérouler une série d'activités lucratives, on est en droit de se demander si l'Etat ne devrait pas acquérir cet immeuble, Monsieur Moutinot ! Il ne suffit pas d'y répondre négativement: il faudrait se dire que, quitte à perdre 1, 2, 3, 4 ou 5 millions de francs supplémentaires, la politique active de défense et d'acquisition des logements sociaux qui, je vous le rappelle, est inscrite dans notre constitution mériterait un effort particulier !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que nous sommes en procédure de renvoi en commission. Par conséquent, un seul député par groupe peut... (Protestations.)M. Baud a demandé le renvoi en commission ! Je suis navré, mais je dois appliquer la procédure usuelle ! L'AdG, le parti socialiste, le parti radical et les Verts se sont déjà exprimés; ne se sont pas encore exprimés sur le renvoi en commission le parti libéral et le parti démocrate-chrétien. Je passerai par conséquent la parole à M. le député Mark Muller, à Mme la députée Stéphanie Ruegsegger, puis à M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot ! Oui, Madame Schenk-Gottret ?
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Le parti socialiste a pris la parole avant la demande de renvoi en commission. Cela n'entre donc pas en ligne de compte dans le cadre de la discussion sur le renvoi en commission.
Le président. Je vous remercie de me faire la leçon, Madame la députée... Si vous aviez été attentive, vous auriez néanmoins constaté que Mme Pürro s'était exprimée après vous ! Le parti socialiste s'est par conséquent exprimé sur le renvoi en commission. La parole est à M. le député Mark Muller.
M. Mark Muller (L). Ce débat est important et nécessaire. D'ailleurs, nous n'avons pour occasion de nous exprimer sur le fonctionnement de la Fondation de valorisation guère que les projets de lois que nous traitons à chaque séance pour autoriser la vente d'un certain nombre d'immeubles. Je rappelle que c'est uniquement lorsque la Fondation est propriétaire de l'immeuble et que ce dernier est vendu à un tiers que le Grand Conseil doit adopter une loi et que nous avons l'occasion d'en débattre. En revanche, lorsque la Fondation est créancière gagiste d'un immeuble, soit que ce dernier est toujours en main d'un débiteur et que ledit débiteur le vend avec l'accord de la Fondation à un tiers, nous n'avons pas à nous prononcer. Le cas évoqué tout à l'heure par Mme Pürro est, précisément, un cas sur lequel notre Grand Conseil n'aura probablement pas à se prononcer, puisqu'il s'agit d'un immeuble en main d'un privé - en l'occurrence, du débiteur. Ce procédé peut effectivement poser un problème dans les cas où il y a de gros abandons de créances, mais la loi que nous avons votée - sauf erreur, tous partis confondus - lors de la précédente législature ne prévoit pas que ce type d'opérations fasse l'objet d'un contrôle autre que celui de la commission. Il est vrai que la commission dispose d'un certain nombre de prérogatives, même si ces dernières ne consistent qu'à donner un avis - il ne s'agit même pas d'un préavis, mais d'un avis ! - que le conseil de Fondation n'est pas tenu de suivre.
Je dois avouer mon étonnement devant les critiques formulées par l'Alliance de gauche. Cette dernière est, en effet, largement à l'origine de la loi qui institue la Fondation - et, partant, à l'origine de la création même de cette Fondation. Je rappelle en outre que l'un des membres du groupe de l'Alliance de gauche siège au sein du conseil de cette Fondation, qu'il y participe très activement - ce dont je me réjouis - et qu'à ma connaissance il cautionne très largement la façon dont les choses se passent. Cela soulève probablement le problème de la participation d'élus politiques à ce type de conseils de fondation, mais il s'agit là d'une problématique plus large que nous avons déjà évoquée, notamment s'agissant de la BCGe, et sur laquelle nous aurons probablement l'occasion de revenir.
Sur le fond, la loi que vous avez votée - encore une fois, tous partis confondus - a pour unique but d'assainir l'«affaire» de la BCGe et de faire en sorte que cet assainissement coûte le moins possible au contribuable. Je vous rappelle que le parti libéral s'était en son temps montré extrêmement réservé et qu'il s'était opposé à la clause d'urgence - laquelle, et je me réfère là à nos débats d'hier sur la démocratie, n'a pas permis à la population de se prononcer sur une loi qui a eu pour effet d'engager l'Etat à raison de 5 milliards. A l'époque, il existait probablement d'autres moyens que la création de cette Fondation pour assainir la Banque cantonale - par exemple, le canton de Vaud s'y est pris de façon tout à fait différente, puisqu'il a recapitalisé d'un coup sa banque cantonale. Nous avons choisi de procéder à la création d'une Fondation - comme le canton de Zurich, si je ne m'abuse - eh bien, nous devons aller au bout de l'exercice ! En respectant l'esprit de cette loi, qui veut que la Fondation valorise le mieux possible - il s'agit d'une fondation de valorisation ! - ses actifs et les gages qu'elle possède sur divers immeubles en vendant ces derniers au plus offrant. C'est la loi qui le veut ! Si l'on veut modifier ce système, il faut déposer un projet de loi. L'Entente a d'ailleurs déposé un projet de loi pour modifier un certain nombre d'éléments de cette loi, mais pas cet aspect-là. Nous pensons que la Fondation doit, pour l'instant, avoir pour unique objectif de vendre les objets qu'elle maîtrise au plus offrant.
M. Pagani et d'autres estiment que l'on devrait utiliser le patrimoine maîtrisé par la Fondation à des fins de politique sociale - notamment à des fins de politique sociale du logement... On peut en discuter, on n'est pas complètement fermé à cette solution: pourquoi ne pas envisager un certain nombre de pistes ? Il est cependant bien clair que, si l'on s'engage dans cette voie, on ouvre également la porte à d'autres discussions portant, plus largement, sur la politique du logement. Vous devez vous rendre compte que l'on ne va pas accepter tout d'un coup que, pour des motifs de politique sociale du logement, l'Etat reprenne un certain nombre d'immeubles de la Fondation sur le dos des contribuables ! Car il faut être conscient du coût d'une telle opération. Cela devra se faire dans le cadre d'une discussion plus générale sur la politique du logement, et nous mettrons dans la balance certains éléments de la politique du logement actuelle qui ne nous conviennent pas ! Peut-être parviendra-t-on à une solution consensuelle qui permettra à des immeubles locatifs actuellement en main de la Fondation d'être rachetés à des conditions inférieures au prix du marché. Aujourd'hui, la Fondation vend - à juste titre - un immeuble au plus offrant; si un privé offre davantage que l'Etat, la Fondation doit vendre à ce privé. Voilà la situation actuelle ! Il faut s'en tenir là pour l'instant. Cela ne signifie pas que l'on ne puisse pas s'orienter vers une autre solution, mais cela nécessitera une discussion plus globale sur la politique du logement dans le canton.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Pierre Kunz.
M. Pierre Kunz. Je renonce, Madame la présidente !
La présidente. Bien, Monsieur le député. La parole est donc à Mme Stéphanie Ruegsegger.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Je remercie M. Muller de son rappel historique sur la Fondation. Cette dernière a été créée dans des circonstances particulières qui n'étaient guère positives; son travail est délicat et difficile, elle a hérité de mauvais dossiers. Par conséquent, s'il peut arriver que nous réalisions un petit bénéfice lors de la vente d'immeubles, ce n'est malheureusement pas le cas de la majorité des dossiers. On sait d'ores et déjà que la situation dans laquelle s'est trouvée la Banque cantonale coûtera cher au canton - elle lui coûte déjà cher - et que la plupart des dossiers que nous aurons à traiter seront négatifs, car ce sont de mauvais dossiers. Alors, on ne va pas renvoyer en commission chaque projet de loi qui verrait apparaître un résultat négatif parce qu'on risquerait de tourner en rond ! Il faut en revenir à la mission de la Fondation de valorisation qui, comme l'a rappelé M. Muller, consiste à vendre au meilleur prix pour limiter les pertes, et cela dans l'intérêt tant de l'Etat que des citoyens de ce canton. Ces derniers devront de toute façon payer pour l'affaire de la Banque cantonale. Je vous propose de nous en tenir là.
Quant à la réflexion de M. Pagani, elle peut être intéressante, mais elle n'a, selon moi, pas lieu d'être ici, c'est une discussion qu'il conviendrait plutôt d'avoir en commission du logement. Pour mémoire, il n'a jamais été question d'étaler les ventes sur une trentaine d'années, le chiffre qui a toujours été articulé était celui d'une décennie. Il me semble que l'on tient plus ou moins le rythme - il y a des années plus ou moins fastes, mais on tient le rythme !
Le rôle de la Fondation est de vendre au meilleur prix. Si l'Etat, qui est consulté pour chaque dossier, souhaite acquérir un logement - et, à la limite, à un prix plus élevé que ce qu'il ne vaut en réalité ou que ce que l'Etat pourrait débourser - pour faire du logement social, c'est à l'Etat de le faire. Ce n'est pas à la Fondation de se lancer dans ce genre de considérations ! Cette dernière s'en tient au rôle qui lui est imparti par la loi, à savoir vendre au meilleur prix pour l'intérêt des contribuables !
M. Alberto Velasco (S), rapporteur ad interim. Contrairement aux dires du président, Mme Pürro n'a pas pu s'exprimer sur le renvoi en commission. Je le ferai donc au nom du groupe socialiste.
Ce rapport a été voté à l'unanimité en commission; il a notamment reçu l'assentiment du groupe socialiste et du groupe UDC. Par conséquent, nous ne pouvons que refuser ce renvoi en commission !
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Comme son nom l'indique, la Fondation de valorisation a pour but de valoriser un certain nombre d'objets gagés et de créances dont on sait, selon l'estimation initiale, qu'ils coûteront un montant de l'ordre de 2,5 milliards aux contribuables. Dès lors, la tâche de la Fondation consiste bien évidemment à faire en sorte que la facture du contribuable soit la plus légère possible. Le contrôle que vous exercez au travers de la commission et, maintenant, en plénière doit principalement permettre d'éviter que la Fondation n'en vienne, pour une raison quelconque, à brader un objet. Il est vrai que vous devriez également avoir le souci - et c'est le cas - d'éviter que la Fondation ne participe, par des prix trop élevés, à une reprise de la spéculation immobilière.
Dans le cas d'espèce, tous les travaux qui ont été menés montrent que la Fondation remplit tout à fait correctement son mandat, qu'elle a trouvé un acquéreur à un prix correct qui assure une bonne défense des intérêts de l'Etat et des contribuables. Votre commission unanime l'a d'ailleurs reconnu, de sorte qu'il est inutile de renvoyer ce dossier en commission. Cela serait non seulement inutile, mais même dangereux car, si les acquéreurs qui signent des contrats avec la Fondation de valorisation se rendent compte que la procédure parlementaire est floue et qu'elle risque de s'éterniser, vous compliquez la tâche de la Fondation de valorisation, vous prenez le risque que les offres soient plus basses et vous alourdissez ainsi la facture finale à la charge du contribuable !
Monsieur Pagani, je n'admets pas que vous utilisiez le terme d'«aguillage financier» lorsque vous évoquez la manière dont je gère les locations de l'Etat ! Si vous avez des questions précises à me poser à ce sujet, vous pourrez le faire, mais sachez qu'il n'y a aucun «aguillage financier» ! Il est vrai que l'Etat ou des entités publiques n'ont que rarement acquis des immeubles auprès de la Fondation de valorisation. Pourquoi ? D'une part parce que, comme M. Muller l'a rappelé, on est placé sur pied d'égalité par rapport à toute autre offre. D'autre part parce que, dans le cadre de la politique d'acquisition de biens immobiliers, je m'intéresse à deux éléments: en premier lieu, peut-on construire, est-ce qu'il y a une bonne valeur d'usage ? En deuxième lieu, bien entendu, est-ce que le rapport coût - qualité tient la route ? Je ne m'intéresse pas à l'identité du vendeur ! De ce point de vue, il n'y a, je peux vous l'assurer, aucun objet dans le portefeuille de la Fondation de valorisation qui aurait permis de placer par hypothèse l'office cantonal de la population. Si cela avait été le cas, on s'y serait vivement intéressé - mais ce n'est pas le cas !
Le travail de la Fondation de valorisation a été correctement fait; celui de votre commission également. Je vous invite par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser le renvoi en commission et à voter ce projet de loi tel que ressorti de vos travaux !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous votons par électronique sur la demande de renvoi en commission formulée par M. Baud. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi en commission est rejeté par 52 non contre 6 oui et 2 abstentions.
Le président. Nous sommes victime d'une petite panne informatique. Je vous lis le message qui s'inscrit à l'écran: «Could not find file GDA. Cannot open file GDA». Cela nous aide beaucoup pour la suite de nos débats... Si quelqu'un souhaite s'exprimer, je le prie de bien vouloir lever la main ! (L'orateur est interpellé.)Mais je ne vois rien sur mon écran ! (Remarque.)Cela ne m'indique pas dans quel ordre les orateurs se sont inscrits ! C'est qui, le 111 ?
M. Christian Grobet. C'est moi ! (Rires.)
Le président. Ah, c'est vous ! Vous avez la parole, Monsieur le député !
M. Christian Grobet (AdG). Je viens de me rendre compte que chaque député se voit attribuer un numéro. Je me demande comment l'on parvient à 111 députés alors que nous ne sommes que 100, mais cela ne fait rien...
M. Muller a fait allusion à un député de l'AdG qui siégeait au sein du conseil de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe. Je tiens à préciser que je n'ai pas été désigné dans ce conseil en ma qualité de député, et encore moins en ma qualité de membre de la formation politique pour laquelle je siège au Grand Conseil: j'ai été nommé dans ce conseil à titre personnel, en fonction de qualifications que le Conseil d'Etat a estimées souhaitables pour y siéger. J'ajoute que c'est sur proposition de la Ville de Genève que j'y ai été nommé.
Je souhaite apporter certains éléments factuels à ce débat. En premier lieu, M. Muller a rappelé que la création de cette Fondation correspondait à une option politique. Au vu de l'expérience acquise, je crois pouvoir dire que l'option technique prise il y a quatre ans en créant cette Fondation - option également retenue par le canton de Berne - a été excellente. En effet, il aurait probablement été impossible pour le canton de Genève de fournir le refinancement correspondant aux provisions qui auraient dû être constituées pour ces 5,3 milliards de crédits - puisque je vous rappelle que les pertes ont été estimées à 2,7 milliards. Si la banque avait conservé ces crédits, il aurait fallu qu'elle bénéficie d'une provision de 2,7 milliards pour respecter les exigences de la Commission fédérale des banques.
En deuxième lieu, la commission de contrôle a pu se rendre compte de l'extrême complexité de ces dossiers. La gestion de ces dossiers aurait plombé le travail de la banque. Cette dernière a été soulagée de transférer ces dossiers à une fondation indépendante afin de ne pas avoir à rechercher des solutions concernant ces créances. Je crois pouvoir dire que la Fondation est motivée et qu'elle a pris ces problèmes en main de manière professionnelle, compétente, et dans le respect des exigences légales posées par ce Grand Conseil.
En troisième lieu, je remercie tant M. Muller que Mme Ruegsegger d'avoir rappelé que la tâche de la Fondation consistait à minimiser les pertes et, si possible, à éviter que ces pertes n'atteignent le taux de risque que nous avons estimé à 2,7 milliards sur la base d'expertises - en nous accordant, il est vrai, une certaine marge de sécurité. On espère que le taux de pertes sera inférieur à 50%, mais on n'est pas certain que cela sera possible, cela dépend évidemment des conditions conjoncturelles.
Mme Ruegsegger a bien fait de rappeler que le canton s'était inspiré de l'exemple bernois pour réaliser ces actifs sur dix ans. Néanmoins, la Fondation dépend évidemment de la politique financière du Conseil d'Etat et de la possibilité pour ce dernier de financer les pertes à la charge du canton. C'est le Conseil d'Etat qui a fixé le rythme de liquidation des actifs sur une période de dix ans. Si, à un moment donné, le Conseil d'Etat pense que ce rythme est trop rapide, il pourra le faire savoir, mais c'est sur cette base-là que la Fondation a été chargée d'accomplir sa mission.
J'ajoute un autre point, dont nous avons débattu hier soir: la cession des 5,3 milliards a dû, bien entendu, être couverte par des prêts - prêts qui ont atteint 5 milliards de francs et pour lesquels l'Etat doit chaque année payer le découvert entre les intérêts débiteurs de ces prêts et les encaissements de loyers par la Fondation. Par voie de conséquence, je signale à M. Pagani qu'il est judicieux que la Fondation ne porte pas trop longtemps ces immeubles car, tant qu'on les porte, l'Etat assume la charge d'intérêts débiteurs non négligeables.
Quant aux moyens de réaliser ces actifs, ils sont très clairs. La Fondation a voulu agir dans la transparence la plus totale. C'est pourquoi aucun objet immobilier n'est vendu sans avoir été mis sur le site Internet de la Fondation ainsi que dans son catalogue, et sans avoir fait l'objet d'annonces dans la presse spécialisée, notamment dans le journal «Tout l'immobilier». En outre, et il s'agit d'une particularité par rapport au secteur privé, aucun objet n'est vendu avant qu'un délai de trois semaines au minimum ne soit échu, et ce précisément pour ne pas donner l'impression que la Fondation puisse favoriser un acquéreur au détriment d'un autre. Compte tenu de ce qui s'est passé à la Banque cantonale, la Fondation s'est fixé pour règle d'être extrêmement rigoureuse dans le processus de vente de ses biens pour qu'à aucun moment on ne puisse la suspecter d'avoir favorisé qui que ce soit. Je le dis d'autant plus volontiers que la Fondation n'a eu jusqu'à présent aucun problème - si ce n'est avec un débiteur qui lui cherche noise avec, il faut le dire, la complicité d'une personne qui se qualifie de journaliste. Dans le «GHI», on nous accuse - et c'est grave - d'avoir commis des faux dans les titres. Le Procureur général a classé la plainte totalement infondée de ce débiteur. La Fondation dispose de pièces permettant de démontrer que cette accusation a été portée de manière parfaitement incorrecte. Mais même dans un cas comme celui-là, voyez à quel point on peut être dénigré !
Je le répète: la procédure que suit la Fondation est extrêmement claire. Ce n'est qu'au terme de trois semaines qu'elle examine si le montant pour lequel l'objet est mis en vente a été atteint. S'il ne l'a pas été, la Fondation contine à le mettre en vente jusqu'à ce qu'un acquéreur soit trouvé au meilleur prix. C'est la raison pour laquelle la Fondation a toujours mis les pouvoirs publics sur pied d'égalité avec les acquéreurs potentiels privés: ces derniers pourraient en effet trouver incorrect que des privilèges soient accordés à certaines collectivités publiques. Je tiens par ailleurs à rappeler que les collectivités publiques disposent d'un avantage: il s'agit de l'exercice d'un droit de préemption. L'exercice de ce droit implique toutefois que la collectivité publique acquiert l'objet en question au montant auquel le particulier était prêt à l'acheter. Cela démontre bien que la Fondation fait en sorte d'obtenir le meilleur prix pour la vente de l'objet en cause.
Comme je vous l'ai dit en aparté, Madame Schenk-Gottret, la Fondation n'y peut rien s'il y a des pertes considérables sur ces objets. On le sait: puisqu'il y a 2,7 milliards de pertes présumées, c'est que l'on subit des pertes sur de nombreux objets. Il est évidemment difficile pour la Fondation de refaire l'histoire de ces objets. Il y a eu, au début de l'activité de la Fondation, des discussions avec la commission pour savoir si son rôle consistait à être une commission d'enquête qui mène des investigations pour savoir comment l'on en était arrivé aux montants des créances qui ont été cédées à la Fondation. Ce n'est visiblement pas la tâche de la Fondation: la loi ne l'a pas prévu. Son travail est déjà particulièrement lourd. De surcroît, la Fondation se heurterait au secret bancaire de la Banque cantonale. Tout ce qui pourrait être fait, c'est de subodorer quant à la manière dont les dettes ont pu atteindre des montants pareils...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Christian Grobet. Une bonne partie de ces dettes résultent évidemment des intérêts non payés sur un certain nombre d'années - ce qui fait que la dette initiale a souvent doublé rien que par ce que l'on appelle le «moulinage des intérêts».
Je confirme donc que, à moins d'une modification de la loi, la Fondation ne peut faire autrement que de vendre au meilleur prix, sans quoi elle faillirait à sa tâche - et votre Grand Conseil pourrait alors certainement la critiquer à juste titre.
Pour le surplus, rien n'empêche l'Etat d'acheter certains objets. Des pouvoirs publics l'ont fait, quoique peu d'objets aient été susceptibles de l'intéresser. Comme M. Moutinot l'a souligné tout à l'heure, l'Etat et les communes auraient surtout été intéressés par l'achat de terrains non bâtis pour y construire des logements. Or, il n'y avait qu'un terrain important: il s'agit de l'ex-parcelle Blanc de Sécheron, qui a été achetée par la Ville de Genève et qui permettra de construire du logement social. Mais là également, je tiens à souligner que la fondation fait le nécessaire pour que la vente se passe...
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député !
M. Christian Grobet. ...dans les conditions rappelées tout à l'heure. Je termine, Monsieur le président, pour dire...
Le président. Vous avez d'ores et déjà largement dépassé votre temps de parole !
M. Christian Grobet. Il s'agit là d'un débat important ! Je dirai très rapidement encore deux choses. Tout d'abord, la Fondation présidée par M. Barro et dont la mission consiste à acheter des immeubles locatifs a acquis un certain nombre d'immeubles dont les loyers correspondent aux loyers HBM. Démonstration est faite que l'information que la Fondation fournit à l'Etat sur certains immeubles pouvait l'intéresser. J'ajoute, puisque l'on a évoqué les logements étudiants, que la Fondation a également signalé l'intérêt que pouvait présenter l'immeuble sis 15, Glacis-de-Rive, dont les studios vides ont été remis en état et serviront à du logement étudiant. D'autres bâtiments ont été mis à disposition à cette fin pour des étudiants, mais toujours dans le respect des principes que j'ai rappelés tout à l'heure.
La loi 9187 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.