Séance du
vendredi 13 février 2004 à
17h
55e
législature -
3e
année -
5e
session -
24e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Pascal Pétroz, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Luc Barthassat, Blaise Bourrit, Antoine Droin, Philippe Glatz, Nicole Lavanchy, Christian Luscher, Stéphanie Nussbaumer, Jean Rémy Roulet, Pierre Schifferli et Ivan Slatkine, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Mme Sylvia Leuenberger(Ve). Comme vous le savez certainement, Léman Bleu connaît une crise grave. En effet, tout le conseil d'administration a démissionné et a licencié le personnel pour le mois d'avril, alors que celui-ci a demandé de suspendre cette décision jusqu'à l'assemblée générale de Léman Bleu, qui a lieu le 8 mars. Nous avons préparé une résolution - multipartis - pour coopérer au sauvetage de Léman Bleu qui porte le numéro 480.
Je vous demande donc de bien vouloir la traiter en urgence, à 20h30, pour pouvoir la renvoyer rapidement au Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Madame la députée. Si je vous comprends bien, vous formulez deux demandes: d'abord d'inscrire cette résolution à l'ordre du jour - puisqu'elle n'est pas inscrite - puis de la traiter en urgence. Nous allons donc procéder à ces deux votes séparément, au moyen du vote électronique. Le premier vote concerne l'inscription à l'ordre du jour de la résolution 480. Le vote est lancé.
Mise aux voix, la proposition d'inscrire la résolution 480 à l'ordre du jour est adoptée par 32 oui contre 13 non et 2 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la demande de traiter en urgence cette même résolution. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la résolution 480 est adopté par 28 oui contre 18 non et 2 abstentions.
Le président. Cette résolution sera traitée ce soir, à 20h30.
M. André Reymond(UDC). Monsieur le président, je vous demande de traiter ce soir le point 90 de l'ordre du jour, soit la motion 1520.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la demande, formulée par M. le député Reymond, de traiter en urgence la motion 1520 concernant la place de Cornavin. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la motion 1520 est adopté par 32 oui contre 22 non.
(Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. Cette motion sera traitée ce soir, à 20h30.
M. Christian Grobet(AdG). Au nom de la commission législative, je vous demande - j'ai de la peine à le formuler aussi bien que vous l'avez fait hier soir à ma place - de mettre aux voix le traitement en urgence, à 20h30, du projet de loi modifiant la loi sur l'organisation judiciaire concernant le Tribunal des assurances sociales. Je ne sais plus à quelle heure vous aviez prévu de le placer, à vrai dire... Je vous laisse le soin de choisir l'heure, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. J'imagine que votre demande consiste d'abord à inscrire le projet de loi 9172 à l'ordre du jour - projet qui vient d'être voté par la commission législative, qui rapportera de façon orale - puis de demander l'urgence, afin qu'il soit traité ce soir, à 20h30. C'est bien cela, n'est-ce pas ? Bien ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc la première proposition, soit d'inscrire ce projet de loi à l'ordre du jour. Le vote électronique est lancé.
Mise aux voix, la proposition d'inscrire le projet de loi 9172 à l'ordre du jour est adoptée par 58 oui et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets, à main levée cette fois, la demande de traiter en urgence ce projet de loi.
Mis aux voix, le traitement en urgence du projet de loi 9172 est adopté.
Le président. Nous traiterons ce point à 20h30. Pour être sûr qu'il soit traité, je vous propose qu'il devienne notre première urgence, c'est-à-dire que nous le traiterons avant les autres urgences. Car il s'agit, en l'occurrence, d'une véritable urgence objective... (Rires et exclamations.)Ce qui ne veut pas forcément dire - je le précise - que d'autres demandes d'urgence seraient subjectives...
Correspondance
Le président. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.
Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale sur l'Unification de la procédure civile ( C 1750)
Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale sur la révision des ordonnances sur l'asile relative à la procédure, sur l'asile relative au financement et sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers ( C 1751)
Réponse du Conseil d'Etat à la procédure de consultation fédérale sur la modification de la loi sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce. Abaissement de l'âge de protection des jeunes travailleuses et travailleurs de 19, respectivement 20 ans à 18 ans ( C 1752)
Annonces et dépôts
La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante à la commission des transports:
Pétition concernant un parc des Chaumettes sans nuisances ni engorgement pour le quartier de l'hôpital ( P-1464)
Le président. Il en est pris acte. Monsieur le député Bernard Lescaze, vous avez la parole.
M. Bernard Lescaze(R). Vous savez que nous sommes aujourd'hui le vendredi 13 février... (Exclamations.)C'est, paraît-il, un jour de chance... Le groupe radical dépose donc une proposition de motion - je vous l'annonce: elle figurera à un prochain ordre du jour - exigeant le dépôt par le Conseil d'Etat d'un budget pour l'année 2004, et espère que son dépôt, ce jour, permettra précisément à ce budget de voir le jour... Merci.
Une voix. Copieur ! (Exclamations. Le président agite la cloche.)
Le président. S'il vous plaît, Monsieur Grobet, cessez de perturber la séance !
Liens d'intérêts
Le président. Le registre des liens d'intérêts, mis à jour conformément à l'art. 29, al.4 de la LRGC, figurera au Mémorial.
Nous passons maintenant au point 18 de notre ordre du jour, à l'attention toute spéciale de M. Kunz, pour la réponse à son interpellation urgente écrite.
Annonce: Session 04 (janvier 2004) - Séance 17 du 22.01.2004 à 20h30
Cette interpellation urgente écrite est close.
Le président. Par ailleurs, vous avez déclaré, Monsieur le député Kunz, que vous retiriez l'interpellation suivante, qui figure au point 79:
Interpellation de M. Pierre Kunz : Banque cantonale de Genève et réponse à la motion 1450 ( I-2031)
Nous vous en remercions. Il en est pris acte.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons notre ordre du jour vert là où nous l'avions laissé, soit au point 33.
Premier débat
M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. Il convient tout d'abord de rappeler qu'actuellement, pour deux appartements de surfaces différentes mais comportant un nombre de pièces identiques, les loyers après travaux sont similaires, ce qui - vous en conviendrez - n'est pas tout à fait équitable. C'est précisément par souci d'équité, tant pour le locataire que pour le propriétaire, que le projet de loi prévoit de modifier le principe du calcul du loyer LDTR actuellement défini à la pièce en un loyer à déterminer en fonction des mètres carrés. (Brouhaha.)
Je tiens également à rappeler qu'un groupe de travail du DAEL a été mis sur pied, afin de statuer sur la problématique, lors du calcul des loyers, du passage de la pièce au mètre carré, et il répondait en ce sens à la motion 1210, acceptée par notre parlement. (Brouhaha.)
Monsieur le président, vu le brouhaha persistant dans cette enceinte, je vous invite à distribuer des snoreflakes, afin d'atténuer les ronflements de certains de mes collègues... (Exclamations.).. parce que c'est tout à fait insupportable !
Je voudrais relater les travaux de la commission... Il est très rapidement apparu que le passage du calcul d'un loyer à la pièce à un loyer au mètre carré, sans garde-fou, pourrait avoir un effet néfaste, qui irait à l'encontre de la volonté d'équité recherchée, la crainte étant que les loyers deviennent si dérisoires pour les petits appartements que les travaux ne se feraient pas, et, à l'inverse, que les loyers des grands appartements augmentent de façon si importante qu'ils en deviendraient insupportables pour le locataire.
Le principe d'une pondération entre la surface et le nombre de pièces du logement dans la définition du loyer de référence a été unanimement accepté par la commission.
En fait, pour tous les logements dont la taille moyenne ne s'écarte pas de la norme cantonale - 10% en plus ou en moins - le système actuel déterminé à la pièce reste inchangé. Ainsi, le principe, tel que la loi le prévoit actuellement, est conservé pour 80% des appartements du parc de Genève. En revanche, pour les petits et les grands appartements, qui constituent 20% du parc immobilier, un loyer de référence au mètre carré considéré à 145 F le m2, ajouté ou soustrait au loyer de base selon la LDTR, a été retenu, et cela, si la surface moyenne des pièces s'écarte de plus ou moins 10% de la moyenne cantonale.
Le loyer de référence au mètre carré correspond à la valeur de référence issue de la jurisprudence du Tribunal administratif, à un taux d'effort de 18% d'un locataire disposant d'un appartement de 3,75 pièces et d'un revenu net moyen imposable de 56 000 F. Le calcul est très simple: il s'agit de multiplier 18 - pour cents - par 56 000 - francs - et de diviser par 3,75 - pièces. Cela fait 2688 F, divisés par 18,5 m2 - taille moyenne d'une pièce - nous retrouvons nos 145 F par m2 et par année.
Pour terminer, la majorité de la commission est arrivée à la conclusion que le passage d'un système de loyer déterminé à la pièce à un système de loyer déterminé par mètre carré était justifié pour autant qu'un certain nombre de pondérations et de cautèles soient prévues, ce qui est le résultat du rapport et du projet de loi sur lequel nous devons nous prononcer aujourd'hui.
En ce sens, je relève que ce projet de loi est en adéquation avec une des recommandations du rapport de la CEPP sur l'évaluation de la LDTR.
Par ailleurs, je relève également que la commission a travaillé dans un esprit serein et constructif, ce qui n'a pas toujours été le cas - je tiens à le préciser. Il s'est toutefois présenté le problème du double dépassement des loyers LDTR en fin d'examen, à savoir qu'un certain nombre de députés de l'Alternative n'étaient pas d'accord qu'un loyer puisse être diminué ou augmenté en fonction de sa surface et qu'il puisse être augmenté pour favoriser les économies d'énergies ou la sauvegarde du patrimoine. Je ne m'étendrai pas plus longtemps sur ce point. Le rapporteur, M. Velasco, le fera mieux que moi...
Je vous demande simplement, au nom de la majorité de la commission, de voter le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité ad interim. Au sujet des travaux de la commission, je n'ai pas grand chose à ajouter aux propos de mon préopinant. Les travaux se sont en effet déroulés dans une certaine sérénité, et nous sommes arrivés à un accord à propos de la question des mètres carrés. Cela allait, du reste, dans le sens des locataires, car certaines inégalités de traitement, qui avaient cours jusqu'à présent, étaient ainsi gommées. Les petits appartements étaient traités sur le même pied, qu'ils aient des grandes pièces ou pas. Nous étions d'accord sur le fait qu'il fallait modifier les choses, et nous avons considéré que ce projet pourrait être accepté par rapport aux chiffres qui nous ont été fournis.
Par contre, à la dérogation par rapport au quota du loyer correspondant à la valeur admissible, répondant aux besoins prépondérants de la population, s'est ajoutée une deuxième dérogation concernant les aspects environnementaux. Et, nous n'étions pas d'accord sur ce point, Monsieur le président, car cela risquait précisément de provoquer un dépassement du plafond, ce que nous ne voulons pas pour les locataires les moins favorisés de la population.
C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas pu nous rallier à la majorité de ce rapport, et c'est pourquoi, Monsieur le président, nous avons proposé un amendement, qui figure à la page 62 de notre rapport.
Il concerne la lettre a) de l'alinéa 7 des articles 6 et 9 et précise ceci: «sauf si les loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ont été majorés en application de l'alinéa 6, la fourchette des loyers peut être dépassée si des circonstances particulières le justifient, soit si: la protection du patrimoine génère des coûts supplémentaires; des mesures d'économie d'énergie ou en cas d'installation d'une unité de production d'énergie renouvelable...».
Mais nous serions d'accord d'accepter cette mesure si le plafond des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population n'est pas dépassé, une fois appliquée la référence au mètre carré, et même, à la limite, une fois les autres dérogations appliquées.
Par conséquent, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à accepter notre amendement, afin que nous puissions voter ce projet de loi à l'unanimité de la commission et de ce Grand Conseil.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Ce qui s'est passé autour de ce projet de loi, lors des séances de travail de la commission du logement, est significatif du fonctionnement de cette commission...
Alors que nous nous acheminions vers un texte consensuel acceptable pour tous, après un effort fourni aussi bien par les défenseurs des milieux des locataires que par ceux des milieux immobiliers, un député de l'Entente a proposé un amendement qui obligeait les socialistes et l'Alliance de gauche à refuser ce projet de loi et à présenter un rapport de minorité.
La double dérogation proposée - M. Velasco l'a dit - va permettre l'augmentation des loyers à la pièce... Et cela, le groupe socialiste ne peut l'accepter ! Tout ce qui compromet la protection des locataires est inadmissible dans une période qui fragilise encore un peu plus la population dont les revenus sont faibles, voire moyens. Un rapport de la commission externe d'évaluation des politiques publiques sur la LDTR - dont M. Hiltpold parlait tout à l'heure - montre que la loi est très souvent transgressée ou contournée par les propriétaires, ce qui est tout aussi inadmissible: des travaux de rénovation se font sans autorisation; une pratique discrète de rénovation s'instaure appartement par appartement; des travaux lourds, comme des rénovations de façade ou de toiture, se font sans autorisation; des loyers sont augmentés pendant la période de contrôle de l'Etat. Et la liste des transgressions s'allonge... Des propriétaires, en vue d'une rénovation, augmentent les loyers par anticipation, de manière à ne pas être limités par le prix plafond lors du dépôt de l'autorisation; d'autres établissent des baux contenant des loyers échelonnés, de manière à augmenter fortement les loyers après la période de contrôle de l'Etat.
Il semblerait, en plus, que peu de propriétaires soient sanctionnés après dénonciation par des locataires pour toutes les infractions citées dans cette liste. Il est intéressant que, parallèlement et simultanément, notre ancien collègue Carlo Sommaruga se fasse le porte-parole de l'Asloca - Association de défense des locataires - et exprime son inquiétude face à l'augmentation rampante et sournoise, mais combien réelle, des loyers.
Par conséquent, ce projet de loi, qui, dans sa teneur actuelle, propose des mesures favorisant l'augmentation des loyers, est inacceptable aux yeux du groupe socialiste !
M. Christian Grobet (AdG). Perseverare diabolicum est !Ce projet de loi des milieux immobiliers, relayé par quelques députés de l'Entente, s'inscrit dans cette volonté politique, qui a été très clairement exprimée au début de cette présente législature, de démanteler la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation. La tactique - on l'a déjà dénoncée ici - consiste à présenter des projets de lois successifs, en saucissonnant un projet global pour essayer de mener à bien une opération de démantèlement, en spéculant sur le fait que les milieux des locataires n'agiront pas face à des projets qualifiés de «modestes», dont les effets sont limités, mais dont chacun d'entre eux a un caractère pervers... Je dis bien «pervers», parce qu'on essaie de présenter chaque projet comme étant une réforme très modeste, mais, en fait, ces réformes ajoutées les unes aux autres sont bien plus importantes qu'il n'y paraît.
Nous avons clairement dit en commission - en ce qui concerne l'Alliance de gauche - que nous ne pouvions pas accepter que les loyers soient fixés au mètre carré de surface de plancher en lieu et place des loyers à la pièce... On imagine déjà les régisseurs commençant à mesurer les pièces pour pouvoir augmenter les loyers et appliquer les normes de la PPE à des logements locatifs. Nous sommes évidemment opposés au principe même de cette nouveauté qui est introduite dans la LDTR: c'est une comptabilité d'épicier, qui s'inscrit bien dans le cadre de certains propriétaires qui veulent gratter jusqu'au dernier franc d'augmentation de loyer qu'ils peuvent imposer. Et les amendements apportés en commission ont, bien sûr, encore péjoré cette loi.
A notre avis, ce projet de loi constitue aujourd'hui - je dis bien «aujourd'hui» - une provocation manifeste après que le peuple genevois eut rejeté massivement, la semaine dernière, la réforme qui avait été votée par la majorité de droite à l'Assemblée fédérale, dans le but de favoriser les augmentations de loyer... Et le peuple s'est à peine prononcé qu'on nous demande aujourd'hui d'introduire dans la loi des possibilités d'augmenter les loyers !
Le taux de chômage est de 7%, à Genève... Il n'y a pas d'augmentation des salaires dans de nombreux secteurs... Pire, beaucoup sont à la baisse. Il n'y a aucune raison d'augmenter les loyers, avec le taux actuel de l'intérêt hypothécaire qui est particulièrement bas... Je vous rappelle que les locataires ont été spoliés à Genève de dizaines de millions de francs par année par le simple fait que les milieux immobiliers ont refusé de diminuer les loyers, comme ils devaient le faire, suite à la baisse du taux de l'intérêt hypothécaire ! La pratique consistant à augmenter les loyers quand le taux de l'intérêt hypothécaire monte et de refuser de les diminuer quand il baisse est un véritable racket !
Face aux bénéfices totalement indus que les propriétaires encaissent aujourd'hui, sur la base des loyers qui ont été abusivement augmentés, nous refusons cette loi ! Car elle permet de relancer des augmentations de loyer sur des bases que nous estimons tout à fait injustifiées ! Par conséquent, nous voterons contre cette loi, quel que soit son texte !
M. David Hiler (Ve). Je vais commencer avec ce qui n'a rien à voir avec la loi... Tout d'abord la non-application de la LDTR dans les faits... Vous avez raison, Madame la députée, les contrôles en la matière sont effectivement très faibles ! On observe, en particulier, de nombreux changements d'affectation. En Allemagne, les systèmes de contrôle s'effectuent sur l'affectation des surfaces et pas seulement des immeubles. A Genève, non seulement le département effectue manifestement peu de contrôles mais - il faut bien le dire - il ne connaît pas bien l'historique.
Faites une motion, Madame, pour demander au département un certain nombre d'actions - notamment, d'effectuer un cadastre des surfaces - et nous la soutiendrons ! Nous n'avons aucun problème à cet égard. Nous sommes - nous, les Verts - effectivement de ceux qui pensent qu'un des grands problèmes que nous avons à Genève, de manière générale, c'est que nous avons beaucoup - j'insiste: beaucoup - de lois, mais qu'on ne se donne pas trop la peine de faire respecter. Je suis, en l'occurrence, d'accord avec vous.
Comme je suis d'accord avec vous, Monsieur Grobet, lorsque vous dites que les loyers augmentent quand le taux hypothécaire monte et qu'ils ne diminuent pas, voire qu'ils augmentent, quand il est au plancher ! Vous avez parfaitement raison ! Malheureusement, vous le savez, dès lors qu'on parle de ce projet de loi - qui est ce dont nous devrions parler, à vrai dire - nous ne sommes plus d'accord. Du reste, nous ne sommes pas d'accord depuis longtemps... Depuis 1995, notre groupe souhaite effectivement que les loyers déterminants soient calculés en fonction des mètres carrés et non plus à la pièce. Dans notre réflexion, l'approche de la CIA a été décisive. C'est d'ailleurs ce qui nous avait poussés à signer une motion, déposée il y a quelques années et acceptée. Le département n'a pas fait de rapport ni proposé des mesures, ce qui est l'origine du groupe de travail.
Nous sommes aujourd'hui arrivés à une solution intermédiaire. Ce n'est à vrai dire pas la solution que nous souhaitions, mais, au niveau de la faisabilité, elle est probablement la bonne solution pour le moment.
Ensuite s'est posée la question de savoir si des articles existants déjà dans la LDTR devaient être modifiés. Et notamment l'article qui nous intéresse au premier chef, soit - pour ceux qui l'ignoreraient - celui qui stipule qu'on peut effectivement avoir une certaine latitude pour augmenter le prix des loyers à la pièce, je cite: «...si des mesures d'économie d'énergie dépassant les exigences légales et réglementaires génèrent des coût supplémentaires et entraînent une baisse des charges du locataire;»... C'est seulement dans ce cas qu'il y a cumul !
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, il faut être cohérents ! Sommes-nous pour le principe du pollueur-payeur ou non ? Lorsque j'utilise - en tant que locataire que je suis - un certain nombre de litres de pétrole, il est normal que je sois taxé sur les frais engendrés par des travaux effectués pour diminuer la pollution induite. En fin de compte, si je paie moins pour mes charges parce que le propriétaire a effectué des travaux, je conçois de gagner d'un côté et de perdre de l'autre. C'est exactement ce que prévoyait la loi acceptée par la majorité de l'Alternative, il y a un certain nombre d'années!
Et aujourd'hui on nous dit que c'est le cumul de ces deux mesures qui n'est pas supportable... Mais cet article n'a rien de neuf ! Simplement, Monsieur Velasco - je m'adresse à vous, puisque vous avez repris ce rapport - il est dans la droite ligne des attaques que vos milieux mènent sans arrêt contre les économies d'énergie ! Il est dans la droite ligne de l'opposition et du blocage que vous avez fait à Minergie !
Il est faux de prétendre que cet article aura des conséquences sur le plan social, comme cela est dit dans le rapport !
Et à un moment donné, il faudra bien choisir: en effet, soit vous voulez diminuer la pollution, et vous êtes d'accord que des mesures soient prises dans le bâtiment, soit vous continuez ces discours absurdes et vous continuez à bloquer l'introduction des standards Minergie - comme vous le faites d'ailleurs avec une belle énergie ! Ne comptez pas sur nous: nous ne voulons pas de votre amendement ! Nous comprenons beaucoup mieux l'opposition de l'Alliance de gauche... Mais cette sorte de chantage à l'énergie, à chaque fois qu'il est question des locataires, n'est pas supportable ! Nous n'avons plus rien à nous dire à ce sujet, Monsieur Velasco ! (Applaudissements.)
Mme Caroline Bartl (UDC). Actuellement, des appartements de surfaces différentes, mais qui ont le même nombre de pièces, font l'objet d'un loyer plafonné similaire au sens de la LDTR, après des travaux de transformation et de rénovation. Or, cette pratique constitue une inégalité de traitement pour les propriétaires.
De plus, la notion de référence pour les grands propriétaires institutionnels fonciers est le mètre carré, et cela dans l'ensemble de la Suisse. Elle est tout autant appliquée au niveau de la vente que de la location commerciale.
Quant aux contrats de bail, ils sont libellés au mètre carré et, dans le cadre de procédures opposant bailleurs et locataires, en regard de l'article 269A du code des obligations basé sur les loyers comparatifs, c'est également la surface qui constitue l'élément déterminant.
Des disparités dans les critères n'ayant pas lieu d'être, l'UDC soutiendra par conséquent ce projet de loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation.
M. Florian Barro (L). Quelques mots au sujet de ce projet de loi... Il est issu - vous l'avez vu dans le rapport de M. Hiltpold - des travaux qui ont été menés sur la motion 1210, votée durant la précédente législature et qui avait été soutenue à une large majorité des députés, y compris sur les bancs de la gauche. Et c'est parce que le département mettait du temps à concrétiser les invites de cette motion que certains députés ont voulu déposer ce projet de loi.
Contrairement à ce que dit Mme Schenk-Gottret, les députés - en tout cas ceux qui soutiennent ce projet - ont pris grand soin de travailler sur la parité et la neutralité des coûts de ce projet. Ils se sont documentés auprès de différentes instances, des auditions ont été effectuées auprès de la CIA - M. Hiler a bien fait de le rappeler également - et, surtout, auprès du département qui nous a soumis toute une série de simulations, notamment par le travail de MM. Chobaz et Huber. C'est une contrevérité de dire que nous avons voulu trafiquer, modifier, ou profiter d'introduire de nouvelles dispositions dans cette loi, Madame ! Je le répète, nous avons travaillé en prenant particulièrement soin de faire en sorte de rester neutres.
Selon le rapport de la CEPP par rapport à l'application de la LDTR, le plafond a été fixé par jurisprudence à 3225 F la pièce, il a été confirmé dans la loi à 3225 F en 1999 et, en 2004, contrairement aux dispositions légales de la loi, il n'a toujours pas été révisé. C'est un problème sur lequel nous pouvons nous pencher. Il nous a évidemment été répondu que les mutations des calculs fiscaux n'avaient pas permis de le faire... Mais il n'empêche que, si vous attaquez tous les points de la LDTR qui ne vous satisfont pas, nous pouvons aussi dresser la liste de ceux qui ne nous satisfont pas non plus !
Je voudrais simplement dire que nous avons vraiment tout entrepris, dans ce projet de loi, pour tenir compte des changements et des pratiques - de l'OCL, en particulier, qui se base depuis longtemps sur les mètres carrés, en tout cas pour ce qui est de l'analyse technique des projets. Et, comme l'a dit M. Hiler avec une certaine véhémence, je vous enjoins de soutenir ce projet de loi et, surtout, de garder toutes les dispositions qui favorisent les investissements en matière d'économie d'énergie. (Applaudissements.)
M. Claude Blanc (PDC). Chaque fois que nous parlons logement dans ce parlement, les gens se dressent systématiquement les uns contre les autres, souvent à juste titre, d'ailleurs, mais souvent, aussi, avec une évidente mauvaise foi... Or la mauvaise foi vient d'être étalée ici ce soir... Le principal intéressé se sauve ! (Remarque.)
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, M. Grobet vient de dire que l'Alliance de gauche s'était, dès le départ, opposée à ce projet de loi qui est une manière de démanteler la LDTR... Excusez-moi, Mesdames et Messieurs, mais la commission a travaillé durant de nombreuses et longues séances, pour faire tout ce qui était possible afin de réparer une injustice, puisque deux appartements de surfaces différentes qui présentent le même nombre de pièces sont traités sur le même pied !
Et nous avons pu constater - une fois n'est pas coutume - que les quinze députés membres de la commission étaient présents, y compris ceux de l'Alliance de gauche - ce qui arrive rarement... (Exclamations.) ... et que le vote d'entrée en matière avait été accepté à l'unanimité.
Et aujourd'hui, pour les besoins de la cause, vous vous permettez de nous dire que ce projet est une atteinte aux droits des locataires, que vous vous y opposez par principe, et que vous vous y opposerez encore ! Il faudrait savoir ce que vous voulez ! Il faudrait que vous disiez la même chose, et il ne faut pas essayer de nous faire prendre des vessies pour des lanternes... (Exclamations.)
J'en viens aux mesures prises pour améliorer les conditions énergétiques... Nous aurons d'ailleurs prochainement ici - je ne sais pas s'il a déjà été déposé - un projet de loi qui va dans la même direction, disant que le droit à bâtir sera un peu plus important dans les cas où des mesures physiques auront été prises pour satisfaire, notamment, aux principes de Minergie, puisque la surface utile des pièces sera diminuée en raison des murs plus épais.
C'est donc une volonté constante de la commission du logement, d'une part, de respecter les normes en vigueur et, d'autre part, d'essayer de les améliorer, de les rendre plus justes. Dans le cas particulier, je remercie M. Hiler d'avoir eu le courage d'être aussi clair. Il faut savoir ce que l'on veut ! On ne peut pas se gargariser de paroles sur la lutte contre le gaspillage des énergies, sur le développement durable et, à la première occasion, faire comme si cela n'existait pas ! Il faut avoir le courage d'aller jusqu'au bout de ce qu'on pense, Mesdames et Messieurs les députés ! Je ne comprends pas que les socialistes se soient laissé entraîner à la dernière minute et qu'ils soutiennent cet amendement ! J'ai un peu peur de comprendre ce qui s'est passé... Comme cela s'est produit juste avant les élections fédérales, je suppose que M. le conseiller national Sommaruga a voulu s'attirer les bonnes grâces d'un certain électorat en négligeant ce pour quoi il s'est toujours battu, c'est-à-dire le développement durable.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, la commission ayant fait sérieusement son travail, ce projet d'amendement est superfétatoire. Et quoi qu'en pense M. Grobet, la commission ayant accepté l'entrée en matière à l'unanimité, j'espère que ce Grand Conseil fera de même.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
M. Gabriel Barrillier (R). Avec la révision qui est proposée, nous arrivons véritablement aux confins de ce qu'il est possible de faire en matière d'interventionnisme de l'Etat dans le domaine bâti et dans la politique du logement. Je crois - ou je croyais - que nous avions trouvé l'oeuf de Colomb ! C'est-à-dire que, tout en ayant une incidence neutre, globalement - la neutralité globale - sur la masse des loyers, nous avons essayé de mettre fin aux inégalités de traitement entre différents locataires et, surtout, aux rentes de situations de certains... (Brouhaha.)
Alors, Mme Schenk-Gottret n'a pas la même lecture du rapport de la CEPP que nous. La CEPP nous recommande de prendre un certain nombre de mesures pour coller mieux à la réalité de la situation des locataires. Par ailleurs, il est vrai que la CEPP - et nous ne sommes pas d'accord avec elle - nous dit de mieux effectuer les contrôles parce que la loi serait détournée... Mais, Madame Schenk-Gottret, plus la loi est précise et tatillonne, plus il y a de tentatives de la contourner: c'est évident ! Trop de loi tue la loi !
Pour ce qui est des économies d'énergie, M. Hiler, qui est un grand spécialiste, a tout dit, me semble-t-il. En tout cas, comme représentant et connaisseur des métiers de la construction, je puis dire que le fait de construire ou de rénover pour économiser réellement l'énergie exige effectivement des investissements. Et si ceux-ci permettent d'abaisser les charges locatives plus tard, je crois que n'importe quel locataire les accepterait.
C'est pour ces raisons que le groupe radical vous prie de voter cette loi et de refuser l'amendement.
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits MM. Grobet, Deneys, Pagani, Mme Blanchard-Queloz, M. Blanc, les rapporteurs de majorité et de minorité, puis le Conseil d'Etat.
M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais tout d'abord vous répondre Monsieur Blanc... Je comprends que vous soyez étonné que les deux députés de l'Alliance de gauche aient voté l'entrée en matière en commission... Parce qu'il fut un temps où vos groupements politiques rejetaient systématiquement les projets de lois présentés par la gauche, ou, même, demandaient des discussions immédiates pour les balayer, lors du débat d'entrée en matière. Nous avons toujours - je crois, Monsieur Blanc, que nous l'avons démontré - depuis que l'Alliance de gauche siège dans ce Grand Conseil, depuis 1993, accepté de discuter des projets de lois de tous les partis, parce que nous avons tellement été boycottés par la majorité de droite durant la période du gouvernement monocolore - nos projets étaient systématiquement balayés, ou si, par hasard, ils arrivaient à être renvoyés en commission, on les laissait en carafe et on ne les traitait pas - que nous avons adopté une attitude totalement différente de la vôtre. Je peux donc comprendre que cela vous étonne que nous ayons voté l'entrée en matière.
Par contre - et j'étais à la commission du logement à l'époque - j'avais d'emblée très clairement indiqué qu'en ce qui nous concernait nous étions opposés au principe d'un calcul des loyers au mètre carré. Je me souviens encore des discussions que j'avais eues avec M. Koechlin à ce sujet, qui, évidemment, faisait le parallèle avec la propriété par étage... Et nous avions dit que nous étions d'accord d'examiner les différentes propositions: il y avait une commission extraparlementaire ou d'experts qui faisait des études, et cela nous paraissait normal d'examiner la chose.
Maintenant, le problème principal est effectivement de savoir comment la loi va être appliquée. M. Barro a indiqué tout à l'heure que, dans le concept de l'application de cette loi, le principe de la neutralité était appliqué... Je pense qu'il s'agit de la neutralité financière, un peu comme la neutralité fiscale dans certains projets de lois: c'est-à-dire que les baisses d'impôts compensent les hausses et, en finale, la masse d'impôts reste identique.
On peut évidemment affirmer ce principe, et même de bonne foi, mais je me permets de vous dire, Monsieur Barro - vous m'en excuserez - que le principe de la neutralité que vous évoquez est un leurre total ! Si nous nous trouvions dans le cadre des lois applicables au logement en zone de développement ou au logement subventionné, c'est-à-dire dans le cadre d'un régime où les loyers sont contrôlés et fixés par l'Etat, il est évident que la neutralité pourrait être garantie. Par contre, avec la LDTR, je vous rappelle que le contrôle des loyers - M. Hiler l'a fort justement mis en évidence - est extrêmement léger, puisqu'il s'agit uniquement de fixer des loyers lorsqu'il y a eu des travaux dans un immeuble. Mais l'ensemble du parc immobilier, qui n'est pas soumis au contrôle cantonal des loyers - je l'ai évoqué tout à l'heure - n'est soumis à aucun contrôle du tout, et il est évident que les propriétaires peuvent à leur guise augmenter ou diminuer les loyers !
Alors, si nous avions vu les milieux immobiliers mener une politique de neutralité des loyers dans le cadre de l'application du taux de l'intérêt hypothécaire, nous pourrions évidemment souscrire à votre discours, Monsieur Barro. Mais les loyers sont systématiquement augmentés quand il y a une hausse du taux de l'intérêt hypothécaire et ils ne sont jamais baissés d'office - jamais ! Les quelques baisses de loyer en raison de la baisse du taux de l'intérêt hypothécaire résultent uniquement de démarches courageuses d'un certain nombre de locataires qui ont osé aller devant la commission de conciliation demander une diminution de loyer ! Je ne connais pas d'exemples d'immeubles où le propriétaire aurait de lui-même baissé les loyers - bien entendu, en dehors du système du contrôle cantonal des loyers - mais, puisque vous faites partie des milieux immobiliers - surtout M. Muller, qui est très bien placé - si vous pouvez m'en donner, je serais heureux de les connaître ! Et je suis persuadé, s'il y en a, qu'ils se comptent sur les doigts de la main !
Par voie de conséquence, la neutralité dans l'application de cette loi est un leurre total, parce que je vous le dis: dans tous les cas où la surface de plancher permettra une augmentation de loyer - j'en suis sûr - elle sera notifiée au locataire, et tout régisseur diligent le fera ! Par contre, pour tous les appartements petits, dont le loyer devrait baisser, pour réparer l'injustice que vous évoquez, vous savez aussi bien que moi qu'aucune régie ne notifiera une baisse !
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est tout simplement une tromperie ! Il s'agit, une fois encore, d'un mécanisme subtil, mis au point par les milieux immobiliers, qui sont les spécialistes, du reste, de la fabrication de moyens pour augmenter les loyers.
On l'a vu à Berne - j'en finirai par là - le projet de loi a été balayé par le peuple suisse - et pas seulement à Genève, dont on dit en effet qu'elle est le Sonderfalldes locataires - et je dois dire que cela m'a fait plaisir de voir que les Suisses allemands n'étaient finalement pas les moutons qui se font habituellement tondre dans ce genre d'exercice. Ils ont aussi compris de quoi il s'agissait ! Je rappelle...
Le président. Monsieur le député, vous devez conclure !
M. Christian Grobet. ...simplement que ce projet de loi était un contre-projet à une initiative qui visait à réparer les injustices des augmentations de loyer qui ont eu lieu en vertu de la hausse du taux d'intérêt hypothécaire. Et le parlement a fait le tour de force de dénaturer complètement l'objectif initial pour en faire un instrument d'augmentation des loyers !
Le président. Monsieur le député, je vous remercie de conclure !
M. Christian Grobet. Eh bien, c'est exactement ce que vous êtes en train de faire ce soir sur le plan cantonal !
Le président. Je donne la parole à M. Roger Deneys... qui renonce. Alors, c'est le tour de M. Rémy Pagani.
M. Rémy Pagani (AdG). Beaucoup de choses ont été dites ce soir à propos de ce projet de loi...
Au-delà de la spéculation possible que ce projet de loi introduira à nouveau dans le parc immobilier genevois, je crois qu'il y a un phénomène qui va de pair. C'est-à-dire qu'on fera en sorte d'augmenter les loyers des logements les plus grands, qui sont situés au centre de la ville. Je pense, par exemple, au quartier des Eaux-Vives, au quartier des Pâquis, où se trouvent les logements appelés «fazystes», dont les pièces sont plus grandes que les normes habituelles - 18 m2 la pièce. Cela veut dire que les personnes qui bénéficient encore de loyers à bon marché au centre-ville - c'est pour cela que nous avons encore des quartiers populaires, des quartiers où il y a une vie, contrairement aux quartiers des banques où il n'y a plus personne le soir, ce qui engendre de l'insécurité, dont on se plaint par ailleurs... Eh bien, ces personnes devront partir, car elles ne seront plus en mesure de payer les loyers qui auront augmenté - comme l'a dit mon collègue Christian Grobet. A terme, ces quartiers seront vidés de leur population et, bien sûr, les loyers de ceux qui ont des pièces de moins de 18 m2 ne seront pas abaissés pour autant !
De ce fait, la tendance qui avait commencé à poindre - et qui a déjà d'ailleurs pris le pas dans toutes les autres villes de Suisse, voire d'Europe - va s'accentuer, et les prix vont prendre l'ascenseur. C'est une manière d'«exécuter», si j'ose dire, les classes populaires et la classe moyenne qui vont se trouver expulsées de la ville et qui n'auront d'autre choix que d'aller vivre en banlieue. Et l'on fera probablement en sorte que seules les personnes qui en ont les moyens, c'est-à-dire les classes aisées de la population, seront autorisés à résider en ville. La banlieue sera réservée aux autres... Mesdames et Messieurs les députés, c'est inacceptable !
C'est la raison pour laquelle, quoi qu'il advienne ce soir, nous lancerons un référendum, comme nous en avons déjà lancé contre les projets de lois que la droite nous sert régulièrement, par petits bouts, en saucissonnant son projet d'ensemble qu'elle n'ose plus présenter de face, car elle craint la confrontation. Il faut nous le dire, Messieurs et Mesdames de la droite ! Vous avez peur aujourd'hui de nous annoncer clairement que vous voulez accaparer les grands logements qui sont encore au centre et qui sont bon marché, et que vous voulez faire en sorte que les personnes de la classe populaire aillent vivre à l'extérieur du centre ville ! Comme à Zurich, dont on se plaint des problèmes de banlieue ! Il faut le dire ! Il faut assumer ! Or vous ne le faites pas: vous présentez des projets de lois les uns après les autres, en saucissonnant la problématique générale ! Et, ce faisant, vous nous contraignez à lancer des référendums.
Mais, jusqu'à maintenant, la majorité de ce canton nous a suivis, et j'espère bien qu'elle nous suivra encore en signant le bulletin que nous avons rédigé et en nous le renvoyant par la poste.
Le président. Merci, Monsieur le député, pour cet appel à signatures afin de contrer un projet de loi qui n'est pas encore voté ! Madame la députée Marie-Paule Blanchard-Queloz, vous avez la parole.
Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG). Je ne voudrais pas répéter ce qui a été dit, mais... Si, je vais le répéter quand même !
C'est vrai que nous sommes d'accord d'entrer en matière, contrairement à ce qui se fait habituellement en commission. Et je suis bien placée pour le savoir, parce que j'ai présidé, douloureusement, d'ailleurs, cette commission pendant une année: à chaque projet de loi qui nous était présenté, il n'y avait pas moyen de faire voter des auditions... L'entrée en matière était votée immédiatement, sans discussion. Il n'y avait pas de premier débat ni de deuxième débat... Cela a été comme cela pendant un an, la droite a systématiquement refusé de discuter des choses en commission. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas ce genre de pratique ! Je vous rappelle que, lorsque la gauche a révisé la LDTR en 1997, nous avons eu des séances de commission pendant un an et demi et nous avons pu aller au fond des choses; nous avons auditionné plusieurs fois les milieux immobiliers - à chaque nouvel amendement, nous les auditionnions - et nous avons joué le jeu jusqu'au bout. Nous savons ce qu'il est advenu de cette loi... Le peuple vous a désavoués plusieurs fois !
Je ferai remarquer à M. Blanc que nous - les deux représentants de l'Alliance de gauche - nous sommes opposés au vote final de ce projet de loi ! J'avais espéré dimanche soir, suite aux dernières votations, que la droite avait enfin compris qu'il fallait laisser la LDTR tranquille et ne plus y toucher... Combien de désaveux de la population vous faudra-t-il pour le comprendre ? J'ai discuté avec des personnes des milieux immobiliers qui disaient qu'il fallait arrêter ! Qu'il fallait s'occuper de la pénurie de logements et construire ! Qu'avez-vous donc fait ces deux dernières années en commission du logement ? Vous nous avez occupés avec des projets de lois de ce type, qui sont ensuite désavoués par le peuple ! Et, aussi, avec des motions de bonnes intentions pour lutter contre la pénurie de logements. Ce n'est pas sérieux ! Par respect pour le peuple, vous auriez simplement dû retirer ce projet de loi et essayer de travailler à la construction de logements !
Le président. M. Blanc était inscrit, mais son nom n'apparaît plus sur mon écran... Vous n'avez pas renoncé à prendre la parole ? Bien, je vous la donne.
M. Claude Blanc (PDC). Non, je n'ai pas renoncé, Monsieur le président ! Il y a déjà vingt-cinq ans au moins que j'entends M. Grobet, mais je me dis parfois qu'il vaut mieux l'entendre que d'être sourd... En effet, M. Grobet vient de nous faire tout un exposé, qui n'a du reste rien à voir avec la loi dont nous discutons, pour justifier la position tardive de l'Alliance de gauche dans cette affaire, et il nous explique benoîtement que, si le groupe de l'Alliance de gauche a voté l'entrée en matière, c'est par courtoisie pour les déposants de ce projet de loi... Il vote l'entrée en matière par courtoisie et, ensuite, il discute sur les articles !
Moi, je vais un peu plus loin: après le vote d'entrée en matière, il y a eu le deuxième débat, et je lis, à la page 10 de l'excellent rapport de M. Hiltpold, que le président met aux voix l'article 6, alinéas 3, 4, 5 et 6.
Je vais vous lire l'alinéa 6 qui en vaut la peine, car il est le centre du projet de loi: «Le Conseil d'Etat détermine sur la base du recensement fédéral, la taille moyenne cantonale de la pièce du parc immobilier locatif. Pour les logements dont la taille moyenne des pièces s'écarte de plus de 10% de la taille moyenne cantonale, les loyers correspondant aux besoins prépondérants de la population sont majorés ou réduits de 145 F par m2 au-delà du maximum ou en deça du minimum de la taille moyenne cantonale.»... Je le répète, c'est le centre, le coeur, de ce projet de loi ! Et qu'est-ce que je vois dans le rapport ? Que cet alinéa a été voté à l'unanimité ! Y compris par les deux députés de l'Alliance de gauche ! Alors, d'abord, ils auraient voté l'entrée en matière pour nous faire plaisir et, ensuite, ils auraient voté le principal alinéa de ce projet de loi pour nous faire plaisir aussi... Tout cela pour s'y opposer aujourd'hui, en plénière ! Alors, il faudrait avoir un peu de suite dans les idées, à défaut d'avoir les idées claires ! Mais il ne faudrait surtout pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages ! (Rires et applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité ad interim. Je vais tout d'abord répondre aux attaques qui ont été lancées contre les socialistes...
Mon groupe a inscrit le développement durable et les économies d'énergie dans son action politique depuis longtemps... Nous n'avons donc pas de leçon à recevoir de qui que ce soit et encore moins de vous, Monsieur Blanc ! Vous qui n'avez pas voté, à plusieurs occasions, dans le sens du développement durable, notamment en matière d'aménagement du territoire !
Par ailleurs, je suis vraiment étonné de vos propos, Monsieur Barrillier ! Parce que, lors de nos travaux en commission, vous avez précisément décrié le projet Minergie ! Et vous avez même remis en question le SCANE ! Et c'est moi qui ai demandé l'audition du SCANE, pour parler du projet Minergie auquel je crois ! Je suis donc surpris de vous entendre dire que nous, les socialistes - et moi avec - nous n'y adhérons pas ! C'est le comble, car c'est moi qui vous ai fait comprendre que c'était un projet très intéressant !
J'en viens maintenant à vos propos, Monsieur Hiler... Je suis certes le rapporteur, mais vous connaissez ma sensibilité en matière énergétique, et je n'ai pas à m'expliquer à ce sujet ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Je voudrais simplement dire que, lorsque je loue une voiture, ce n'est pas à moi de payer les frais pour sa mise aux normes en matière de pollution. C'est au propriétaire de la voiture - ou à la collectivité, s'il s'agit d'intérêt public - d'en supporter le coût, Monsieur Hiler ! (Exclamations. Le président agite la cloche.)
Pour ce qui est du projet de loi, Monsieur Hiler, vous savez très bien que nous étions d'accord - M. Blanc le sait aussi, puisqu'il était en commission - de voter ce projet de loi s'il s'était agi simplement de tenir compte de la surface des appartements. Nous sommes - les quinze commissaires - arrivés à un accord sur ce point, mais, à la fin de nos travaux, M. Mark Muller a proposé une double dérogation, et c'est sur ce deuxième point que nous ne sommes pas d'accord !
Je vais vous donner un exemple... Est-ce aux locataires de supporter les frais liés à la protection du patrimoine ? Le patrimoine étant un bien public, il serait logique que l'ensemble de la communauté participe aux coûts qui lui sont liés. Eh bien, non, on demande aux locataires de le faire ! L'énergie et l'environnement sont des domaines d'intérêt général, qui concernent tous les citoyens de la République. Il est donc logique que l'ensemble de la collectivité participe à l'effort financier dans ce domaine, et pas seulement les locataires d'un immeuble faisant partie du patrimoine.
J'ajoute que si le loyer d'un tel immeuble ne dépasse pas de la fourchette des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population, nous sommes d'accord - et c'est pour cela que nous proposons cet amendement - d'intégrer ces mesures environnementales. Mais seulement dans ce cas ! Si ce n'est pas le cas, nous ne sommes pas d'accord, parce que nous ne trouvons pas normal que les locataires assument, à eux seuls, les coûts engendrés par ces mesures.
M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. Je ne peux pas ne pas réagir aux propos tenus par Mme Schenk-Gottret au début de son intervention...
Aucun amendement émanant de l'Entente, Madame la députée, n'a mis les socialistes en porte-à-faux - aucun ! Beaucoup de propositions faites pendant les travaux de cette commission émanaient tant des bancs de l'Entente que de l'Alternative, et M. Sommaruga nous a proposé un certain nombre de propositions que nous avons étudiées. Nous sommes arrivés à la fin de notre analyse sur une solution qui paraissait consensuelle - autant que l'on puisse l'être - et c'est une semaine après que s'est posé le problème du double dépassement. Vous ne m'enlèverez pas de l'idée que ce problème du double dépassement du loyer vous permettait d'avoir une porte de sortie pour refuser ce projet de loi...
Je voudrais également revenir sur ce qui a été dit à propos de la hausse des loyers... Il est vrai que la loi actuelle permet une hausse des loyers, dans un cadre qui est défini par la loi après travaux. Mais ce dont nous avons beaucoup moins parlé ce soir, c'est que, si le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission est voté, la hausse des loyers pour les petits appartements sera moins importante... J'invite donc M. Grobet à préciser dans son référendum que la hausse des loyers après travaux pour les petits appartements sera nettement moins importante que la loi actuelle ne le prévoit.
Je vous engage toutes et tous à voter ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il a été question à plusieurs reprises du rapport de la commission d'évaluation des politiques sociales sur la LDTR. Le Conseil d'Etat vous transmettra dans les prochaines semaines un rapport sur la manière dont il entend y donner suite. Il est vrai qu'un certain nombre de violations de la loi sont constatées pour une part à raison de fraude à la loi, et pour une part - c'est exact, M. Hiler - à raison de la faiblesse des contrôles du département. C'est une question d'organisation et de répartition des moyens et des ressources dont nous pourrons discuter.
Il est vrai que, parmi les recommandations de la CEPP, figure le changement de système pour passer d'un loyer référence à la pièce à un loyer référence au mètre carré. J'avais quant à moi les pires craintes par rapport à cette demande, car, s'il avait fallu tenir compte des mètres carrés dans chaque cas, cela aurait occasionné des complications administratives.
J'avais également les pires craintes que ce projet ne conduise à une remise en cause du principe d'un plafond fort dans la LDTR. Il se trouve heureusement que votre commission a adopté un système qui est administrativement praticable, puisque le système à la pièce est conservé pour l'essentiel des logements et que seuls sont pris en considération les appartements particulièrement petits ou les appartements particulièrement grands.
En ce qui concerne ma deuxième crainte, celle liée au prix du loyer, je dois constater que le prix au mètre carré, qui a été déterminé pour les exceptions, est calculé de manière parfaitement raisonnable et, dès lors, cette crainte s'évanouit.
Vous débattez aujourd'hui pour savoir s'il est raisonnable d'avoir ce que d'aucuns ont appelé une double dérogation... Je ne vois pas où il y a double dérogation, puisqu'il y a substitution d'un système par un autre ! On ne peut pas assimiler un grand appartement à un petit appartement, qui subissent une hausse, sans tenir compte des travaux exceptionnels réalisés dans le cadre des économies d'énergie.
Autant je suis d'accord avec M. Grobet et M. Pagani - la plupart du temps - quand ils dénoncent certaines situations que subissent des locataires, autant je suis d'accord de dire qu'un certain nombre de projets de lois - notamment à venir - sont dangereux pour les locataires, autant ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, ne me paraît pas déraisonnable !
J'ajoute, en ce qui concerne le loyer plafonné à 3225 F la pièce, qu'il s'agit d'un prix ancien qu'il conviendrait effectivement de réévaluer. Malheureusement, l'indice prévu par la loi n'existe pas et, fort heureusement, vous n'avez pas saisi les travaux sur cette disposition pour tenter de le modifier, parce que ce serait là un risque majeur de conflit. La réévaluation, cas échéant, de ce plafond doit impérativement se faire en concertation. J'ai eu des contacts aussi bien avec la Chambre genevoise immobilière qu'avec le Rassemblement sur cette question. Pour l'instant, les points de vue sont extrêmement divergents, mais il faudra que nous nous penchions à nouveau sur ce problème, dès que possible.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de vous prononcer sur la prise en considération de ce projet de loi, au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 56 oui contre 24 non et 3 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous précise que, dans le rapport, il n'y a rien après article 6, alinéa... Il faut donc lire article 6, alinéa 3 (nouvelle teneur) et alinéas 4, 5, 6 et 7 (nouveaux). Nous continuons le vote.
Mis aux voix, les alinéas 3 (nouvelle teneur) à 6 de l'article 6 sont adoptés.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement présenté par M. Velasco, rapporteur de minorité, à l'alinéa 7 de l'article 6, qui figure à la page 62 du rapport. Je vous le lis: «Sauf si les loyers répondant aux besoins prépondérants de la population ont été majorés en application de l'alinéa 6, la fourchette des loyers peut être dépassée si des circonstances particulières le justifient, soit si: a) la protection du patrimoine génère des coûts supplémentaires; b) des mesures d'économie d'énergie dépassant les exigences légales ou réglementaires génèrent des coûts supplémentaires et entraînent une baisse des charges du locataire; c) en cas d'installation d'une unité de production d'énergie renouvelable, il en découle un avantage financier pour le locataire.»
Je vous soumets cet amendement au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 30 oui.
Mis aux voix, l'alinéa 7 (nouveau) de l'article 6 est adopté.
Mis aux voix, les alinéas 3 à 6 de l'article 9 sont adoptés
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis du même amendement, à l'article 9, alinéa 7 - amendement qui figure à la page 62 du rapport.
Monsieur le rapporteur, pour la bonne règle, je devrais faire voter l'amendement que vous proposez à l'article 9, alinéa 7, identique à celui que vous avez proposé à l'article 6, alinéa 7. J'imagine que vous renoncez, compte tenu du vote précédent... Le maintenez-vous ? Bien !
Nous allons procéder au même vote que tout à l'heure. Je ne vous relis pas l'amendement, il s'agit du même. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 30 oui.
Mis aux voix, l'alinéa 7 de l'article 9 est adopté.
Le président. Monsieur Pagani, vous avez la parole.
M. Rémy Pagani (AdG). J'interviens par rapport à la conclusion du débat qui vient d'avoir lieu. Il a effectivement été fait état d'un certain nombre de lacunes en matière de contrôles des normes légales et des règles fixées dans la LDTR. Je vous présente donc un amendement qui serait un article 43A dont la teneur est la suivante: «Le département procède à des enquêtes pour vérifier le respect des règles fixées dans la loi et ordonne des mesures correctives lorsqu'il constate des infractions à la loi.»
Monsieur le président, je vous demande de faire voter cet amendement, dans la mesure où plusieurs députés qui se sont exprimés ont constaté que de nombreuses infractions n'étaient pas sanctionnées par le département. Je demande donc que l'obligation pour le département d'effectuer ces contrôles soit inscrite dans la loi.
Le président. Monsieur le député, je vous remercie de bien vouloir m'apporter cet amendement. Monsieur le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, je vous donne la parole.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Nous procédons aux contrôles en question par sondages. Les cas qui nous sont signalés donnent lieu à des mesures et, cas échéant, à des sanctions. La seule vraie question, Monsieur Pagani, c'est de savoir quelle est, dans l'enveloppe budgétaire du département et par rapport au personnel qui est à disposition du département, la part qui doit être affectée à ces travaux par rapport à d'autres nécessités: délivrer rapidement les autorisations de construire, procéder à des inspections de sécurité sur les chantiers, par exemple.
Je vous suggère, Monsieur le député, de revenir sur cette question au moment du vote budgétaire, si vous le souhaitez, ou après le dépôt du rapport divers du Conseil d'Etat sur la CEPP. Votre proposition d'amendement enfonce une porte ouverte ! Je peux l'accepter parce que ça ne va rien changer: cela ne va pas me donner un franc de plus ni un fonctionnaire de plus ! Je trouve qu'il serait préférable d'avoir un débat sur l'ampleur des contrôles que vous souhaitez et les moyens que vous me donnez pour procéder à cela, au lieu de présenter un article purement déclamatoire.
M. Rémy Pagani (AdG). Je viens d'entendre la déclaration du conseiller d'Etat qui confirme les inquiétudes de l'ensemble du parlement au sujet des changements d'affectation notamment. C'est extrêmement grave ! Un certain nombre de logements sont transformés - tout le monde le sait - en bureaux, au centre en particulier. C'est urgent, et nous n'allons pas attendre la fin de l'année pour mettre un terme à ce type de procédure, car la ville va être vidée de sa substance.
En conséquence, si le président est cohérent, il doit proposer et même s'engager devant ce parlement à ajouter au budget - budget que, du reste, nous attendons et que nous avons déposé à nouveau aujourd'hui - un poste de plus, au moins, à disposition des inspecteurs qui effectuent cette tâche. Le cas échéant, je compléterai mon amendement en ajoutant ceci: «Un poste supplémentaire est ouvert pour cette tâche.»
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la proposition d'amendement proposée par M. Pagani, soit: «Le département procède à des enquêtes pour vérifier le respect des règles fixées dans la loi et ordonne des mesures correctives lorsqu'il constate des infractions à la loi.» Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 25 oui et 5 abstentions.
Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.
Troisième débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'ensemble de ce projet de loi en troisième débat, toujours au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
La loi 8694 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 8694 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 23 non et 6 abstentions.
Premier débat
Le président. Je vous communique l'information suivante concernant le déroulement de nos travaux: le traitement de ce point... (Brouhaha.)S'il vous plaît ! Le traitement de ce point risque d'être long. Nous nous arrêterons à 19h, quel que soit le stade que nous aurons atteint dans le cadre du traitement de ce projet de loi, et nous le reprendrons après les urgences, prévues à 20h30.
M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. Vous pouvez vous étonner de me voir siéger à la table des rapporteurs en tant que rapporteur de majorité. Il est en effet surprenant de constater que ce projet de loi, pourtant déposé par des députés de l'Entente, n'ait pas été assez fortement défendu en commission. J'invite donc les députés de l'Entente à venir en nombre en commission afin de défendre leur position.
Cela dit, ce projet de loi vise une nouvelle fois la suppression d'une compétence accordée aux associations de protection du patrimoine, soit la demande de mise à l'inventaire, la demande de classement ou la demande d'adoption d'un plan de site. On peut se demander pourquoi revenir sur un texte de loi modifié il n'y a pas si longtemps; on peut également se demander si des abus ou des blocages ont véritablement été constatés suite à l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions législatives. Je ne le crois pas. Nous ne disposons d'ailleurs, à ce sujet, d'aucun chiffre, d'aucune statistique susceptible de confirmer un éventuel retour en arrière. Il est important de laisser aux associations ce droit, cela afin d'éviter ultérieurement une multiplication de recours qui ne feraient que retarder les procédures. Quant aux plans de site et aux plans localisés de quartier, ils permettent précisément de définir les emplacements sur lesquels de nouvelles constructions peuvent venir s'intégrer. Il n'est dès lors pas acceptable d'opposer la protection du patrimoine au problème de la pénurie de logements. Comme vous le savez, il est impossible de faire table rase de l'existant en zone à bâtir; il est donc normal de prendre certaines précautions.
Je tiens également à relever ici le travail considérable effectué par les associations, et tout particulièrement par celles qui défendent le patrimoine. Ces associations bénéficient d'une bonne connaissance du terrain et fournissent à l'Etat des informations précieuses, notamment en matière de patrimoine moderne. Il n'est pas correct de vous livrer, comme vous le faites, à un procès d'intention à l'encontre de telle ou telle association qui dérange dans le paysage du monde associatif. Il n'est pas juste non plus de contester le pied d'égalité qui existe entre les collectivités publiques et les associations. C'est reconnaître l'engagement des citoyennes et des citoyens dans ces associations que de maintenir ce droit que nous avons inscrit dans la loi !
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser ce projet de loi.
M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur de minorité. Lors de la dernière législature, la majorité de l'époque a, comme elle en avait la possibilité en fonction de rapports de force lui étant favorables, modifié cette loi en octroyant des compétences supplémentaires aux associations qui se vouent à la défense du patrimoine. Nous ne contestons évidemment pas ce point. Nous estimons cependant - et il s'agit là d'un point très important - que ces compétences supplémentaires, qui leur donnent des droits analogues à ceux d'autorités communales démocratiquement élues, sont excessives. Si une association communale de protection du patrimoine souhaite la mise à l'inventaire ou le classement d'un bâtiment, elle peut fort bien agir dans le cadre de sa commune. Je prendrai à titre d'illustration la Ville de Genève, qui est une commune très importante: une association pourrait fort bien agir par le truchement du Conseil Municipal afin que les autorités politiques de la Ville prennent l'initiative de demander ces mesures au Conseil d'Etat. Il existe, selon moi, une hiérarchie entre des autorités démocratiquement élues et des associations certes légitimes, mais dont le fonctionnement ne répond pas aux mêmes critères, aux mêmes règles que celles prévues par la constitution. Il nous apparaissait dès lors tout à fait superfétatoire d'avoir, si vous me permettez une telle expression, «rajouté cette couche» - étant bien entendu que ces associations disposent toujours du droit de recours en la matière. Cette prérogative n'a jamais été remise en question. Il est vrai que l'on nous a servi cet argument en commission - comme dans d'autres occasions. Mais, Monsieur le rapporteur de majorité, donnez-nous des cas pratiques: a-t-on utilisé de façon excessive cette nouvelle possibilité ? Non ! Puisqu'il n'y a pas de nouveau cas, la mesure que vous avez votée, il me semble, durant la législature 1997-2000 s'avère inutile ! Pourquoi avoir fourni des instruments supplémentaires aux associations de protection du patrimoine ?! Sans vouloir rouvrir une guéguerre que nous avons déjà eue, sauf erreur, au mois de janvier à propos de la protection du patrimoine, nous jugeons tout à fait légitime de donner la préséance et la priorité aux autorités démocratiquement élues - étant bien entendu, une fois encore, que les associations de protection du patrimoine ont toute latitude pour obtenir un certain nombre de demandes par le biais de ces autorités.
Le fait que, lors de cette séance de la commission de l'aménagement, la majorité et l'UDC n'étaient pas au complet tient par ailleurs à des circonstances tout à fait fortuites que l'on peut très bien comprendre. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un rapport de minorité en demandant à ce plénum de voter l'entrée en matière sur cette loi, puis de voter cette loi.
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Il n'est pas inutile, au vu des démarches de ceux qui veulent démanteler la LPMNS, de rappeler ses buts: conserver les monuments de l'Histoire, préserver l'aspect du paysage et des localités, assurer la sauvegarde de la nature, favoriser l'accès du public à un site, encourager toute mesure éducative en faveur de la protection des monuments, de la nature et des sites. S'attaquer aux droits des associations en matière d'inventaire, de classement, de plans de site et de recours montre à quel point les auteurs du projet de loi se trompent de cible. Ces associations sont à but idéal. Leurs membres font un travail extraordinaire - bénévolement ! Se cacher derrière la dénonciation de rares abus pour attaquer leur démarche ne se justifie en rien, alors que les blocages dont se plaignent les auteurs de cette loi sont dus, non à des raisons environnementales ou patrimoniales, mais à des densifications mal acceptées.
En outre, contester la légitimité des associations n'est pas un argument crédible. Une association fondée selon les articles 60 et suivants du Code civil présente en effet davantage de légitimité qu'un particulier. Lorsque les députés de l'Entente souhaitent l'initiation d'un PLQ, cela ne pose à leurs yeux aucun problème ! Ainsi, nous venons de voter, dans le cadre de l'étude du projet de loi 8389 à la séance de la commission de l'aménagement du 10 décembre dernier, un amendement dont la teneur est la suivante: «Tout propriétaire d'une parcelle en zone de développement ne faisant pas encore l'objet d'un plan localisé de quartier peut également, suivant la même procédure, demander au Conseil d'Etat l'adoption d'un tel plan». Il y a là un paradoxe qui montre l'absence de vergogne des députés de l'Entente: un privé se trouve sur le même pied qu'une commune lorsqu'il s'agit de bétonner. En revanche, lorsqu'il s'agit de protection du patrimoine, une association qui a davantage de légitimité qu'un particulier ne pourrait pas être sur le même pied qu'une commune... Ce projet de loi est inadmissible aux yeux du groupe socialiste !
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Christian Grobet.
M. Christian Grobet (AdG). Je me permets de trouver cette démarche déplorable. Je rappellerai en premier lieu que certaines associations ont joué un rôle extrêmement important dans le cadre de la protection du patrimoine. Je pense principalement à la plus ancienne d'entre elles, la Société d'art public, qui est une section du Heimatschutz, vieille de plus de cent ans, et sans l'action de laquelle un certain nombre de bâtiments n'auraient pu être préservés. Lorsqu'on apprécie la situation à quelques années de distance, il faut reconnaître que toutes les démarches entreprises pour la conservation d'un certain nombre de bâtiments ou de quartiers se sont révélées justifiées. Je vous rappelle, du reste, que la lutte pour la protection du patrimoine a repris de son intensité au début des années 70, au moment où la ville faisait toujours davantage l'objet de démolitions. On se souvient par exemple de la votation concernant l'hôtel Métropole. Tous les partisans de la démolition de ce bâtiment ont ensuite reconnu que sa préservation s'imposait, tout comme la sauvegarde d'autres bâtiments qui devaient être démolis - et la liste est longue, de l'ancienne prison de St-Antoine à la maison Golay, la Petite-Fusterie, ou des quartiers entiers comme les Grottes, Villereuse et j'en passe...
Je vous signale en deuxième lieu, Monsieur Barrillier, que la démarche que constitue le droit d'initiative - soit la possibilité pour une organisation d'importance cantonale de demander le classement d'un objet - existait de longue date en matière de protection du patrimoine. Le droit de demander le classement d'un bâtiment n'a nullement été introduit, comme vous l'avez prétendu tout à l'heure, lors de la dernière législature. M. Moutinot pourra certainement confirmer le fait que le droit d'initier une procédure de classement appartenait de longue date aux associations d'importance cantonale. Il est à noter qu'il n'existe, hélas, que deux associations d'importance cantonale en matière de protection du patrimoine: il n'y a donc pas une prolifération d'associations.
En troisième lieu, il est exact que l'on a, lors de la dernière législature, offert aux associations le droit de demander l'ouverture d'une procédure pour les demandes d'inventaire. Cette mesure a été prise afin d'éviter des demandes de classement portant sur des objets ne méritant pas de l'être. Comme les associations de protection du patrimoine n'étaient pas autorisées à demander l'ouverture d'une procédure de mise à l'inventaire, elles demandaient en effet des procédures de classement. La possibilité pour une association de protection du patrimoine de demander l'ouverture d'une procédure d'inventaire a donc, en réalité, constitué un progrès puisqu'elle a permis d'éviter des mesures de protection trop fortes concernant un certain nombre d'objets méritant néanmoins d'être conservés.
Je relève du reste que, lors du débat que l'on a eu il y a exactement un mois - et à l'issue duquel vous avez modifié la loi afin que l'on ne puisse pas remettre en cause des démolitions qui étaient acquises en vertu d'un plan localisé de quartier - il a été dit - et j'entends encore le discours pathétique de M. Koechlin - que les associations de protection du patrimoine s'endormaient, qu'elles intervenaient beaucoup trop tard et qu'elles devaient intervenir en temps voulu. Mais l'on sait que vous n'êtes pas à une contradiction près... M. Hiler s'est, à cette occasion, livré à un excellent plaidoyer en soulignant la nécessité d'établir l'inventaire complet des bâtiments dignes de protection, et ce précisément pour éviter des conflits.
Alors, que va-t-il se passer, Mesdames et Messieurs ? Si les associations de protection du patrimoine ne peuvent plus proposer l'ouverture d'une procédure de mise à l'inventaire, on interviendra fatalement plus tard dans la procédure de recours. C'est donc, en réalité, un magnifique autogoal que vous êtes en train de marquer ! On sait quelle est votre attitude à l'égard des associations de protection du patrimoine et, surtout, votre manque d'intérêt en matière de protection de cet élément culturel très important de notre canton. Vous allez toutefois, de fait, provoquer de multiples procédures contentieuses qui seraient évitées si, précisément, l'on appliquait la règle préconisée par M. Koechlin il y a quatre semaines de cela.
Je vois par ailleurs mal quel sont les risques d'abus en matière de procédure de demande de mise à l'inventaire ou de classement, dans la mesure où c'est le Conseil d'Etat qui décide de la légitimité ou non de la demande. Je pense que M. Moutinot pourra le confirmer. Le fait de pouvoir demander une mesure de classement ou de mise à l'inventaire ne signifie bien entendu pas que la demande sera forcément agréée ! Il existe une procédure bien connue et le propriétaire peut, du reste, s'opposer à cette demande. Au final, c'est le Conseil d'Etat qui décidera si l'objet mérite d'être classé ou mis à l'inventaire. Je ne vois dès lors pas en quoi...
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Christian Grobet. ... le simple fait de proposer une mesure de protection constituerait un abus ! Je constate que je suis au bout de mon temps de parole. Je me réinscris donc, Monsieur le président, afin de poursuivre mon intervention.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre-Louis Portier.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Contrairement à Mme Françoise Schenk-Gottret, qui qualifie ce projet de loi d'inadmissible, le groupe démocrate-chrétien le trouve, lui, absolument nécessaire. Comme l'a déclaré M. Barrillier - pour cette circonstance rapporteur de minorité - il est très important de redonner aux communes le rôle primordial qu'elles doivent jouer. On a d'ailleurs déjà évoqué ce sujet cet après-midi, à l'occasion du débat portant sur le type de logement. Comme cela a également été relevé, une association peut fort bien, si elle trouve pertinent de mettre un bâtiment à l'inventaire, s'adresser à une commune et agir en accord avec l'avis cette commune. En revanche, si cette mise à l'inventaire était faite sans l'avis de la commune, nous trouverions particulièrement anormal qu'une association puisse, par exemple, bloquer un projet cher à cette commune. C'est pourquoi il nous paraît important qu'une demande d'inventaire passe par ce filtre que sont les élus locaux. Ces derniers sont les élus les plus proches des citoyens et certainement les plus à même de déterminer s'il est adéquat de classer un bâtiment ou un édifice dans telle ou telle commune - qu'il s'agisse de la Ville de Genève ou d'autres communes.
Le groupe démocrate-chrétien vous propose donc, comme le suggère le rapporteur de minorité, de voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mme Michèle Künzler (Ve). Non ! Nous refuserons l'entrée en matière ! Ce projet est parfaitement injuste ! Il est injuste envers vos propres milieux, puisque vous valorisez habituellement l'initiative privée. Or, là, vous voulez bannir toutes les compétences des sociétés d'art public qui sont mises à la disposition des citoyens ! Vous vous fâchez avec vos propres troupes: libres à vous ! Il est toutefois piquant de constater que vous allez museler vos propres troupes par simple but idéologique. La finalité de ce projet de loi, c'est en effet la suppression du droit d'associations telles que la Société d'art public de déposer des demandes de classement ou de réclamer des mesures de protection. Mais n'est-ce pas précisément leur raison d'être ?! Comme l'a souligné M. Grobet, il me paraît important que ces associations puissent intervenir en amont plutôt qu'en aval, en déposant des recours que vous décriez également. N'est-ce pas plus judicieux qu'elles interviennent plus tôt, afin que l'on puisse déterminer les éléments qui doivent être protégés, et ces causes seront instruites par le Conseil d'Etat ? C'est à ce stade qu'il convient d'intervenir, et il ne faut pas reporter le débat au stade des recours ! Il est absolument ridicule de vouloir museler les sociétés protectrices du patrimoine. Seul cela vous intéresse et vous ne parvenez pas à trouver d'autre finalité à ce projet ! J'estime pour ma part qu'il convient de rejeter l'entrée en matière.
Le président. Merci, Madame la députée. Je dois avouer, Monsieur Grobet, que vous m'avez beaucoup impressionné tout à l'heure, puisque vous vous êtes réinscrit avant même de vous être assis après votre précédente intervention ! Je vous redonne la parole.
M. Christian Grobet (AdG). Je souhaite aborder un autre aspect du problème. L'effet suspensif n'est, notamment concernant la demande d'adoption d'un plan de site, pas accordé dans le cadre de l'ouverture d'une procédure: c'est au département - ou au Conseil d'Etat, je ne me souviens plus - qu'il appartient de décider si l'ouverture de cette procédure bénéficie d'un effet suspensif ou non. Je ferai donc remarquer, en guise de réponse à M. Blanc, que l'argument selon lequel un projet se trouverait bloqué à cause de cette procédure n'est pas valable, car l'effet suspensif n'est, dans certains cas, pas prononcé d'office. Il est par ailleurs évident que le département se doit de traiter les demandes avec diligence. Nous, les milieux de protection du patrimoine, n'avons aucune objection, bien au contraire, à ce que les demandes soient instruites rapidement, car il est dans l'intérêt de tous que la question soit tranchée. Les associations de protection du patrimoine ne cherchent pas à bloquer des projets en tant que tels. A la limite, elles déplorent également la lenteur d'une procédure, car cette dernière permet à certains de se plaindre du fait que la procédure d'examen de l'intérêt de l'objet peut retarder un autre projet.
On aurait pu imaginer discuter de certains points de ce projet en commission, mais retirer tout simplement le droit de demander l'ouverture d'une procédure constitue un retour en arrière total en matière de politique de protection du patrimoine ! Prétendre que les communes puissent être le relais des associations de protection du patrimoine n'est pas sérieux non plus ! La commune devrait, d'elle-même, se préoccuper de ce type de problématiques. Or, si un certain nombre d'associations de protection du patrimoine sont actives, c'est précisément parce que les autorités ne se soucient malheureusement pas, comme elles devraient le faire, de la protection du patrimoine !
Tout comme Mme Künzler, je souhaite insister sur le rôle extrêmement important joué par ces associations. Le débat sur la préservation des bâtiments qui sont dignes d'intérêt est fondamental. Il est en effet inutile de dire qu'une fois un bâtiment démoli - surtout par un coup de force, comme ce fut, par exemple, le cas de l'ex-villa Blanc de Sécheron, démolie de manière totalement illégale - on ne peut ensuite plus reconstruire et reconstituer ledit bâtiment... L'utilisation du droit de protection du patrimoine n'a pas entraîné d'abus à Genève. Quelques projets ont peut-être été légèrement retardés, mais la procédure a globalement bien fonctionné. Ce n'est pas parce qu'elle s'est avérée trop longue dans deux ou trois cas que cela se justifie de tout supprimer ! Une telle mesure est totalement excessive ! Dans l'intérêt de ce canton et dans l'intérêt que nos concitoyennes et concitoyens portent à l'égard de la protection du patrimoine, il conviendrait que vous renonciez à ce projet de loi ou, du moins, que vous le revoyiez sensiblement quant aux dispositions que vous proposez !
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. David Hiler.
M. David Hiler (Ve). Dans un précédent débat sur la protection du patrimoine, j'avais eu l'occasion d'insister sur le fait que la protection du patrimoine était l'affaire de chacun et de tous les courants. Les communes jouent bien entendu, Monsieur Portier, un rôle important dans la protection du patrimoine. Elles l'approchent - notamment les plus petites d'entre elles - d'un point de vue que j'estime très important, à savoir l'amour de leur site. La protection du patrimoine ne se limite toutefois pas à cela: elle consiste également en une définition plus «scientifique» - avec beaucoup de guillemets ! - d'un certain nombre d'objets architecturaux qui doivent être conservés. Il y a là, Monsieur Portier, une approche complémentaire - et non contradictoire. Il est extrêmement important que des associations comme la Société d'art public puissent poursuivre l'activité qu'elles ont commencée il y a un peu plus d'un siècle. Elles doivent pouvoir attirer l'attention des pouvoirs publics et initier des procédures lorsque, pour une raison ou pour une autre - et notamment lorsque de nombreux millions sont en jeu - un département n'entendrait pas immédiatement la voix de la raison.
J'aimerais cependant insister sur le point suivant: la Société d'art public est, comme ce Grand Conseil et comme toutes les associations, composée d'êtres humains. Elle peut donc, à ce titre, se tromper; elle peut faire fausse route. En dernière analyse, ce n'est donc pas aux associations de protection du patrimoine qu'il convient de décider: c'est bien au département de décide ! Et nous avons besoin de cette dynamique: des associations qui proposent et des élus qui décident.
Aussi, je crois que l'on ne peut pas rêver, Monsieur Barrillier, d'une approche plus contre-productive que celle proposée dans ce projet de loi. Elle est, on vous l'a expliqué, contre-productive pour des questions de procédure. Elle empêche en outre le dialogue nécessaire pour l'aménagement - et vous le savez, Monsieur Barrillier, puisque l'un des critères en matière d'aménagement réside dans la conservation du patrimoine.
Continuez ainsi, vous pourrez toujours dire que c'est la faute à Moutinot ! Mais chaque fois que vous crispez les procédures, vous jouez un rôle négatif quant à la vitesse de construction des logements dans notre canton, car la crispation du système juridique qui est le nôtre n'entraîne que des retards.
Je vous suggère donc - et il s'agira là de ma proposition, Madame la présidente - de renvoyer ce projet de loi en commission. Après avoir bien réfléchi et pris le temps de réexaminer cette affaire, vous en reviendrez avec une proposition, qui pourrait par ailleurs ne pas nous plaire - il s'agit là d'une autre affaire - mais qui ne soit pas nuisible à l'intérêt général.
La présidente. Si j'ai bien compris, Monsieur le député, vous demandez le renvoi de ce projet de loi en commission. Je donne donc la parole à Mme Blanchard-Queloz pour son groupe... (Remarque.)Puisque, Madame Künzler, la parole est limitée à un député par groupe.
Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG). Le renvoi en commission me paraît justifié. M. Portier a laissé entendre, au nom du groupe PDC, qu'il fallait redonner ces compétences aux communes - ce sont exactement les termes qu'il a employés. Or c'est absolument faux: aucune compétence communale n'a été supprimée dans la loi ! Ce projet de loi vise à retirer le droit des associations de déposer des demandes de mise à l'inventaire et de plans localisés de quartier. Comme cela figure dans tous les articles, ces prérogatives sont cependant maintenues pour les communes. Je soutiens donc, Madame la présidente, le renvoi en commission.
La présidente. Je donne la parole à Mme la députée Fehlmann Rielle, sur le renvoi en commission.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Nous avions déclaré que nous étions opposés à ce projet de loi. Je pense néanmoins qu'il pourrait y avoir matière à discussion. Il me semble donc plus sage d'accepter le renvoi en commission. C'est ce que le groupe socialiste vous propose.
La présidente. Merci, Madame la députée. Je mets donc aux voix cette proposition de renvoi en commission. Nous procédons par vote électronique.
Mis aux voix, le renvoi de ce projet de loi à la commission d'aménagement du canton est adopté par 35 oui contre 29 non et 2 abstentions.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je clos la séance, il est 18h50. Nous reprendrons nos travaux à 20h30. Je vous souhaite un bon appétit.
La séance est levée à 18h50.