Séance du
vendredi 5 décembre 2003 à
20h45
55e
législature -
3e
année -
2e
session -
9e
séance
M 1494
Débat
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je me demande si, ce soir, nous ne devrions pas traiter en même temps tous les points qui concernent le logement...
Des voix. Bravo !
M. Gabriel Barrillier. ...parce qu'on va saucissonner le débat, et vous verrez que, dans les interventions, on risque de s'étendre. Je pose donc cette question.
Le président. Monsieur le député, comme vous l'avez certainement noté tout à l'heure, le Bureau et les chefs de groupe se sont réunis, et nous n'avons pas réussi à parvenir à un accord en vue du traitement collectif de tous ces objets. C'est la raison pour laquelle nous traiterons tous les objets consacrés au logement les uns après les autres, et dans l'ordre pour lequel l'urgence a été demandée. La parole est à M. le député Hugues Hiltpold.
M. Hugues Hiltpold (R). Je voudrais rappeler, en guise de préambule, que cette motion n'est qu'un volet d'une série d'autres motions, qui ont été déposées en même temps par les partis de l'Entente, dont le but global est de trouver une solution à la crise actuelle du logement.
Le but propre à cette motion 1494 est de déterminer les opportunités qui sont offertes par les immeubles existants, qui présentent un potentiel, ce sans devoir recourir à de nouvelles infrastructures. Les moyens pour y parvenir consistent, d'une part, dans le fait d'évaluer le potentiel pour un certain nombre d'immeubles à disposition, en termes de logement dans les combles - qui, pour la plupart, comprennent des greniers - et de déterminer également quelles sont les possibilités réelles et concrètes de surélévation d'un certain nombre d'autres immeubles; d'autre part, de déterminer toutes les mesures qui visent à faciliter les travaux de transformation dans ces combles et les surélévations éventuelles, soit par des modifications législatives, soit par un assouplissement des exigences qui découlent de cette législation, soit, encore, par un certain nombre de directives à l'attention des commissions consultatives.
En guise de conclusion, je voudrais dire qu'il est impératif que les pouvoirs publics parviennent à offrir rapidement des logements à la population, parce qu'ils font actuellement cruellement défaut. En ce sens, cette motion donne une piste, certes minime, mais une piste néanmoins, car elle permet d'identifier les immeubles existants qui pourraient être transformés et offrir des habitations de qualité, et ce sans dénaturer le tissu urbain existant ni nécessiter des déclassements ou des infrastructures à construire.
Le groupe radical vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
Mme Anne Mahrer (Ve). Revenir sur le patrimoine bâti afin d'en analyser les potentialités est une bonne idée.
Il nous semble cependant que les combles sont déjà largement utilisées. Quant à la surélévation, elle doit tenir compte de la valeur patrimoniale des bâtiments; c'est une pratique possible mais qui ne peut pas être systématique.
Nous proposons tout d'abord de remplacer la deuxième invite par «à étudier les mesures qui faciliteraient ces transformations», puis de renvoyer le tout au Conseil d'Etat.
M. Alberto Velasco (S). Nous ne sommes pas contre une motion qui consiste à amener des mesures ou utiliser toutes les ressources possibles pour essayer d'améliorer la situation actuelle.
La deuxième invite nous pose toutefois un problème, parce que, de nouveau, l'on s'attaque à la LDTR, et nous ne pouvons pas accepter cela.
Par conséquent, nous demandons de renvoyer cette motion en commission afin d'y voir plus clair sur les intentions de la majorité.
Le président. Une demande de renvoi en commission du logement ayant été formulée, nous appliquons la procédure prévue à cet effet: un député par groupe peut s'exprimer, et ce uniquement sur le renvoi en commission.
M. Rémy Pagani (AdG). Le renvoi en commission se justifie, d'autant plus que, comme le reconnaissent d'ailleurs les motionnaires, c'est une petite mesure. Je trouve important que nous ayons accès aux plans et statistiques, parce que pendant les années 80, tout a été tenté: de la surélévation des bâtiments à des situations «abracadabrantesques» d'un point de vue urbanistique.
Nous estimons que cette volonté, une fois de plus, ne vise qu'à différer les décisions qui devront être prises. D'ailleurs, certains partis de l'Entente de la majorité actuelle se targuaient, dans leur programme politique, lors des élections cantonales qui ont vu cette nouvelle assemblée être élue, de construire en priorité dans la zone villa, qui n'était pas encore bâtie. Selon le plan directeur cantonal, pas les libéraux, bien évidemment, mais, le PDC, en tout cas, mettait ce type de revendications dans son programme électoral. Ces revendications étaient légitimes, parce que la zone villa est une des zones les plus importantes de notre canton et qu'elle regroupe la quantité la moins grande de population.
Nous estimons que le terrain de la Tulette et de la Gradelle aurait dû être déclassé en priorité, et que, comme cette mesure n'a pas été prise et que le courage politique a manqué à certains, on se retrouve dans des mesures bouts de chandelle, qui sont des leitmotivs revenant simplement à construire la ville en ville.
Mesdames et Messieurs les députés, de nombreux référendums l'ont démontré, les habitants de la ville de Genève sont à l'étroit. Il est habituellement convenu qu'une densité trop forte amène des inconvénients de nature urbanistique et sociologique. J'en veux pour preuve les problèmes qui ont surgi lorsque, dans des secteurs comme les Charmilles, on a imposé des densités qui ne sont pas convenables en ville de Genève. (L'orateur est interpellé.)Non, Monsieur Blanc, ce n'est pas M. Grobet, c'est la majorité du Conseil d'Etat qui a imposé ce type de densité. Toujours est-il que, Monsieur Blanc, vous êtes d'accord avec moi, cette densité n'est pas convenable pour le centre de la ville de Genève.
Nous estimons donc que cette proposition de motion, bien qu'elle soit minimaliste, doit être renvoyée en commission, pour que nous l'étudions de manière précise, pour voir là où il est encore possible de construire dans les combles, en remplissant certaines exigences architecturales, bien sûr.
Nous ne trouvons pas qu'il soit judicieux de voter cette motion sur le siège, comme certains veulent le faire.
Nous pensons, pour terminer, qu'une saine politique du logement doit être articulée dans l'ensemble de ses composants et ne peut pas faire l'objet, au coup par coup, de décisions qui paraîtraient stupides.
C'est pourquoi nous demandons le renvoi en commission où nous estimerons sur quels postulats il faudra travailler.
M. Olivier Vaucher (L). Je voudrais d'abord vous rappeler que Genève a le parc immobilier le plus vétuste de Suisse. Ensuite, c'est la raison pour laquelle... (L'orateur est interpellé.)Monsieur, en donnant quelques explications préliminaires, si vous le permettez, je conclurai par le renvoi en commission.
Je pense qu'il faut tout d'abord profiter, et cette motion est un des points qui le permettent, pour pouvoir relancer, d'une part, l'emploi et, d'autre part, la construction de logements. De très nombreux immeubles, à Genève, ont des gabarits très nettement inférieurs à ce à quoi ils pourraient atteindre, selon les lois et règlements.
On pourrait donc largement profiter de transformer les immeubles et de les rehausser, ce qui permettrait, dans de nombreux endroits, de créer des logements supplémentaires et de procurer, par conséquent, du travail à de nombreuses personnes qui n'en ont pas aujourd'hui. Je rappelle les propos de M. Pagani, tout à l'heure, qui disait qu'il fallait essayer de créer des emplois.
C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous recommanderai de renvoyer cette motion, comme les prochaines, d'ailleurs, au Conseil d'Etat, de manière que l'on puisse agir le plus rapidement possible, face à une crise majeure du logement et de l'emploi. Je vous remercie de nous rejoindre dans ce sens.
M. Jacques Baud (UDC). C'est l'Escalade ! J'aimerais rappeler qu'à cette époque la quasi-totalité de la vieille ville intra muros a été rehaussée, et ce n'est pas une nouveauté pour Genève. Il n'y a pas à s'en effrayer: c'est une nécessité. Nous n'avons plus de terrains à construire, à moins de les prendre sur la zone agricole. Par conséquent, il y a là une excellente idée, qui va dans le sens de la politique de l'UDC.
Je vous prie donc de renvoyer d'urgence cette motion au Conseil d'Etat.
M. Gabriel Barrillier (R). Le groupe radical est évidemment en faveur du renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
J'ai déjà essayé de m'expliquer tout à l'heure, mais les chefs de groupe avaient déjà pris leur décision. Il y a un problème d'organisation dans le débat de ce soir. Vous avez trois motions: la 1494, la 1499 et la 1502, heu... 1602. Non, 1502... (Rires.)Il y a donc trois motions qui forment un triptyque. (Rires. Applaudissements.)Ce n'est pas du coup par coup - pour répondre à M. Pagani - ce sont trois mesures qui concernent les combles, les blocages en zone de développement et le problème de la zone agricole. C'est donc une vision cohérente pour essayer de débloquer le problème du logement qui est proposée. J'aurais souhaité, en tant que motionnaire, qu'on traite ces trois motions en même temps et qu'on les renvoie ensemble au Conseil d'Etat. (Exclamations.)Elles sont cohérentes. Au lieu de passer toute la soirée à s'étriper sur ces trois motions.
Le président. Comme je l'ai dit tout à l'heure, Monsieur le député, ceci aurait pu être souhaité par d'autres membres de cette assemblée - dont votre président, puisque cela aurait permis de gagner passablement de temps. Le Bureau et les chefs de groupe ne sont pas parvenus à se mettre d'accord, nous ferons donc les choses ainsi. Asseyez-vous, Monsieur Barrillier, je vous vois vous lever avec beaucoup d'énergie... (Rires.)...nous avons voté les urgences dans un certain ordre. Moi, en tant que président du Grand Conseil, si le Bureau et les chefs de groupe ne se mettent pas d'accord pour un traitement commun, je suis obligé d'appliquer la loi et de faire traiter les projets les uns après les autres, dans l'ordre où l'urgence a été demandée et votée. J'en suis navré. Je suis d'accord avec votre opinion mais la loi est la loi. Dura lex sed lex.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, il n'y a pas, au contraire de ce que prétend M. Pagani, de solutions bouts de chandelle. Il n'y a qu'une multitude de solutions qui sont toutes susceptibles d'offrir un minimum à l'épineux problème devant lequel se trouve la République: le problème de la pénurie des logements.
Pour nous, une famille qui serait trop à l'étroit dans un logement de quatre pièces et qui trouverait un logement agréable de cinq ou six pièces dans des combles transformées, ou dans un attique construit sur une toiture plate, ne constitue pas une mesure de bouts de chandelle.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, tout comme il le fera pour les autres motions qui seront présentées ce soir, le parti démocrate-chrétien réservera un bon accueil à la motion 1494. Non seulement il lui fera bon accueil, mais il estime qu'il ne faut plus perdre de temps, que les invites de cette motion sont extrêmement simples, qu'elles suggèrent des mesures que le Conseil d'Etat doit prendre pour faciliter ces constructions. C'est pourquoi le passage en commission ne nous semble pas obligé et nous souhaitons renvoyer cette motion sans plus attendre au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je serai factuel quant à ces différentes motions, puisque nous les traitons les unes après les autres, et je les traiterai invite par invite.
La première invite demande au Conseil d'Etat de procéder à une étude pour déterminer le nombre de logements supplémentaires qui pourraient être mis sur le marché en cas de transformations ou de surélévations. Les études n'ont jamais apporté un seul logement de plus, en revanche, elles ont l'inconvénient majeur de mobiliser beaucoup de fonctionnaires et de coûter passablement cher. Je pense que cette invite ne sert à rien.
En revanche, la deuxième invite, qui consiste à dire qu'il faut faciliter ces opérations, ce qui, sans être une panacée - comme vous l'avez dit - représente néanmoins un apport à la solution du problème. Je vous ferai volontiers la description des normes applicables en la matière: vous constaterez qu'il y a peu d'obstacles à la surélévation ou la transformation. Si vous en trouvez qui vous paraissent regrettables, il faudra prendre les mesures pour les supprimer, parce que la principale difficulté de la surélévation, c'est évidemment le coût de l'opération, et subséquemment, le report du coût sur les loyers. Je vous ferai volontiers le descriptif des opérations et des dispositions légales, et s'il se trouve qu'elles doivent être améliorées, elles pourront l'être.
En troisième lieu, vous demandez au Conseil d'Etat d'utiliser toutes les ressources à disposition pour inciter les propriétaires à faire ces travaux. Je le répète: vous avez voté ces instruments, ils sont à disposition. J'invite les milieux de la construction et de l'immobilier à faire toute la publicité nécessaire pour ces aides étatiques que les commissions, au demeurant paritaires et consultatives, préavisent - et j'ai toujours suivi leurs préavis. Donc faites de la publicité pour l'aide de l'Etat, Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons aucun problème avec cela, mais nous demander de faire des études et d'envoyer compter les étages dans les rues de Genève, non, Mesdames et Messieurs les députés.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous avons été saisis d'une demande de renvoi en commission. Nous allons donc commencer par voter sur cette requête. Nous allons voter par vote électronique, celles et ceux qui acceptent le renvoi en commission voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi en commission est rejeté par 54 non contre 25 oui.
Le président. Nous poursuivons par conséquent nos débats, la parole est à M. Alain Etienne.
M. Alain Etienne (S). Nous pensons que la crise du logement est suffisamment importante pour que ce problème soit traité autant à gauche qu'à droite et que l'on puisse, ensemble, déposer des motions interpartis pour inviter le Conseil d'Etat à trouver des solutions. Je pense donc qu'il faut que nous nous réunissions face à cette problématique.
J'aimerais ensuite rappeler le plan directeur cantonal que nous avons voté. Que dit-il ? Il dit qu'il faut arrêter de densifier au niveau du centre-ville. Votre motion, lorsque vous parlez de combles, ne concerne que le centre-ville, c'est-à-dire là où il y a de la substance historique, du patrimoine qu'il faut préserver. On ne peut pas faire n'importe quoi au centre-ville. Le plan cantonal prévoit de densifier la zone villa en couronne suburbaine. J'attends donc vos propositions. Le plan directeur parle également des déclassements exceptionnels de la zone agricole.
Le parti socialiste et l'Alternative vous invitent à suivre scrupuleusement notre plan directeur et ainsi, ensemble, nous résoudrons la crise du logement.
Le président. Nous avons été saisis d'un amendement, présenté par Mme Anne Mahrer, consistant à remplacer la deuxième invite de cette motion par le texte suivant: «à étudier les mesures qui faciliteraient ces transformations». Nous allons voter au sujet de cet amendement par vote électronique. Celles et ceux qui acceptent cet amendement voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 73 oui contre 3 non et 1 abstention.
Le président. Je mets maintenant aux voix le texte de la motion ainsi amendée, en vue de son renvoi au Conseil d'Etat. Nous allons à nouveau voter par électronique. Celles et ceux qui acceptent cette motion et son renvoi au Conseil d'Etat voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mise aux voix, la motion 1494 ainsi amendée est adoptée par 54 oui contre 15 non et 8 abstentions.