Séance du
jeudi 23 octobre 2003 à
17h
55e
législature -
2e
année -
12e
session -
73e
séance
PL 8804-A
Premier débat
M. Florian Barro (L), rapporteur de majorité. Je ferai une brève intervention...
M. Pagani, s'il vient à la table des rapporteurs, expliquera mieux que moi pourquoi il a fait un rapport de minorité.
Je rappelle néanmoins que l'obligation fédérale de mettre en place des plans régionaux d'évacuation des eaux incombe maintenant au Grand Conseil. M. Pagani estimait en commission que ce rôle devait échoir aux fonctionnaires du département concerné et non pas à des mandataires externes, et il prévoyait l'engagement de fonctionnaires pour une mission de courte durée et pensait leur trouver une occupation ensuite...
En examinant ce projet de loi, nous avons considéré qu'il était bien plus judicieux de procéder comme d'habitude en matière de prestations pour les départements, c'est-à-dire de faire appel à des bureaux spécialisés extérieurs à l'Etat, et, une fois le mandat terminé, que la gestion de ces plans au quotidien incombe aux fonctionnaires du service concerné.
Je vous invite donc à soutenir ce projet de loi et à le voter rapidement, comme cela a été demandé par le département, en raison notamment des subventions fédérales qui y sont liées.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je vais donner la parole au rapporteur de minorité qui venait de nous dire que nous devions toujours être présents... Je suis donc heureux de voir qu'il a finalement réussi à l'être !
Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez la parole.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je vous remercie de me passer la parole, Monsieur le président. Un certain nombre de fonctionnaires de l'Etat demandaient une revalorisation de leur salaire, et je trouvais important de les soutenir. (Exclamations et sifflets.)
Cela étant, ce projet de loi tombe à pic, puisque nous sommes en plein débat budgétaire, et que des députés de la majorité... (Le président agite la cloche.)
Le président. Monsieur Kunz, s'il vous plaît !
M. Rémy Pagani. ...se demandent comment limiter certaines dépenses de l'Etat. Eh bien, nous avons l'occasion de montrer notre détermination en ce sens, et l'Alliance de gauche vous propose - pour une fois - de faire des économies importantes !
En effet, ce projet de loi prévoit de confier l'élaboration de ces six plans régionaux d'évacuation des eaux à une entreprise privée, alors que c'est l'Etat de Genève qui va récolter l'ensemble des informations pour les mettre à disposition du bureau d'étude mandaté et plus tard faire le suivi de l'application de ces plans. Nous ne voyons pas l'intérêt de cette démarche, si ce n'est de gaspiller 7 millions, sans parler des 17 millions qui seront dépensés ultérieurement, puisque les communes devront aussi réaliser des plans de ce type ! Nous avons calculé les économies substantielles que nous obtiendrions si l'Etat prenait en charge cette activité - bien évidemment, il faudrait former des personnes pour cela, et ce, dans la durée, pour qu'elles puissent ensuite opérer dans les communes - eh bien, l'investissement serait réduit de moitié !
A notre avis, c'est donc un moyen efficace et rationnel pour l'Etat de faire des économies non négligeables. Je le rappelle et tout le monde le dit: le contrôle de l'eau sera un des problèmes vitaux de notre siècle, et nous estimons que l'Etat ne doit pas se départir de cette charge. C'est une activité qui ne doit pas être effectuée par des entreprises privées, si tant est qu'il y ait des entreprises - c'est un autre problème - qui aient les qualifications nécessaires pour la mener à bien...
En effet, lorsque nous avons examiné ce projet de loi en commission, nous nous sommes bien vite rendu compte que l'Etat n'avait pas forcément les moyens immédiats de mettre sur pied une telle procédure et que les privés en avaient encore moins les moyens... Il faudrait aller bien loin en Europe pour trouver des spécialistes en la matière.
C'est pour cela que nous vous invitons à refuser ce projet de loi qui vise à confier l'élaboration de ces six plans régionaux d'évacuation des eaux à un bureau privé, alors que l'Etat peut parfaitement prendre cette tâche en charge. D'autant qu'il sera utile qu'un service de l'Etat ait cette expérience, puisqu'il faudra de toute façon un groupe de pilotage et un service de l'administration pour mettre ce projet en oeuvre dès que ces plans seront établis et pour en assumer le suivi, cette procédure étant ensuite imposée aux communes.
Présidence de M. Pascal Pétroz, premier vice-président
M. Jacques Baud (UDC). Il me semble que nous avions voté, il y a quelque temps, un projet de loi selon lequel les Services industriels seraient chargés de nos déchets, et, éventuellement, de nos eaux usées... Je ne sais pas ce qu'il en est par rapport à ce projet. Doivent-ils récupérer les eaux usées à la sortie des tuyaux ou sont-ils chargés de l'ensemble du problème des eaux usées, donc des conduites traversant notre territoire ?
Il est évident qu'une étude est absolument indispensable, mais il serait bon de savoir quelle est la part revenant aux Services industriels de Genève dans cette affaire. En effet, si jamais les Services industriels de Genève sont responsables de nos eaux usées, c'est à eux de procéder à cette étude et non pas à nous. J'aimerais avoir une réponse à cette question. Je le répète, je suis tout à fait favorable à cette étude: elle doit se faire; elle est indispensable, surtout qu'à certains endroits les eaux usées se mêlent encore aux eaux de pluie...
M. Hugues Hiltpold (R). Je souhaiterais revenir sur ce que nous a dit le rapporteur de majorité, à savoir que ces plans doivent être exécutés par des mandataires externes spécialisés, et cela, dans des délais extrêmement courts, de façon à être en conformité avec les dernières modifications de la loi sur les eaux.
Je voudrais relever la proposition utopiste, pour ne pas dire fantasque, du rapporteur de minorité qui propose de faire exécuter ces travaux par des fonctionnaires du département de l'intérieur, quand bien même ceux-ci ne sont pas en mesure de les réaliser et n'ont, par ailleurs, aucune velléité de le faire !
Je pourrais relever également que, selon la logique du rapporteur de minorité, il serait possible de pousser le raisonnement plus loin et imaginer que l'Etat devienne une grosse entreprise qui réaliserait toutes ses infrastructures de façon indépendante et ne mandaterait plus aucune entreprise extérieure. Et vous en conviendrez, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas le rôle d'un Etat !
En guise de conclusion - et j'en terminerai par là - je demande à toutes et à tous un peu de sérieux dans nos travaux et vous invite à voter ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission.
M. Robert Iselin (UDC). Je n'ai pas les connaissances de M. Pagani en matière de mobilisation de personnel pour des prestations en ce qui concerne les eaux. Je n'ai pas les connaissances d'un architecte, comme M. Hiltpold, mais je trouve, étant donné l'état du budget de la République, insensé que soit écartée de prime abord la possibilité d'utiliser des personnes qui travaillent dans un service de l'Etat et qui pourraient être formées pour effectuer cette tâche.
M. Jean-Claude Egger (PDC). Je ferai une simple remarque à mon collègue de l'UDC... En fait, le service dit DomEau - le service de l'eau - a probablement déjà de nombreux travaux en cours, et il ne peut donc pas assumer cette tâche.
M. le rapporteur de minorité propose de créer huit postes de travail... C'est assez utopique, car ces personnes devraient travailler sur ces plans un ou deux ans, mais elles n'auraient ensuite plus de travail. M. Pagani pense qu'elles pourraient aussi s'occuper des plans que les communes devront mettre en oeuvre par la suite... Il y a une chose que M. Pagani ne sait pas, c'est que les communes ont déjà commencé ces travaux et qu'elles sont déjà en train de faire leur cahier des charges. Il semble donc déjà trop tard pour imaginer que ces personnes pourront ensuite s'occuper des plans des communes. Ces personnes auront donc du travail pendant un ou deux ans seulement. Cela implique de créer des postes de travail et de se fournir en matériel informatique. Je pense que le calcul fait par M. Pagani sur d'éventuelles économies est un peu simple, voire simpliste. Il compte une journée de travail d'un fonctionnaire pour une journée de travail d'un bureau privé: cela me semble être un calcul optimiste !
Le groupe PDC pense qu'il faut adopter le rapport de la majorité.
M. Alberto Velasco (S). En réalité, le débat qui nous est proposé aujourd'hui est beaucoup plus important qu'on ne le croit. En effet, nous devons nous demander quelles sont les tâches que l'Etat peut externaliser et quelles sont celles qu'il doit externaliser.
Dans ce cas concret, l'Etat a une mission pour laquelle il doit externaliser certaines tâches en les confiant à des sociétés privées.
Ce travail doit être réalisé le plus rapidement possible, car c'est une question de salubrité publique. Nous, les socialistes, nous sommes tout à fait d'accord qu'il faut faire ces investissements, car l'assainissement est un domaine éminemment important pour l'Etat.
Deuxième observation. Aujourd'hui, l'Etat, concrètement le département en question - nous avons pu le voir en commission - ne dispose pas des effectifs suffisants pour pouvoir réaliser les travaux ni pour les conduire. Une telle réalisation exige en effet des spécialistes qui soient à même d'assumer et diriger des équipes. Il a été clairement répondu aux commissaires sur ce point que le service de l'Etat concerné n'était pas en mesure d'assumer une telle tâche, à moins d'engager du personnel et de le former. Ce qui impliquerait que les travaux ne pourraient pas être planifiés pour la date prévue, mais bien plus tard...
En conclusion, nous sommes presque obligés d'accepter ce qui nous est proposé au travers de ce projet de loi. Nous n'avons donc pas à nous demander si c'est un service de l'Etat qui doit assumer cette tâche ou pas... Ce projet doit être réalisé, et l'Etat n'en a pas les moyens.
Par contre, étant donné que c'est un service externe à l'Etat qui sera mandaté, nous pouvons nous demander, une fois les travaux réalisés, comment le service de l'Etat concerné pourra assumer l'ensemble des informations récoltées. Car il faudra qu'il soit à même de conserver ce patrimoine intellectuel pour pouvoir gérer, ensuite, ce réseau d'informations.
Monsieur le président du département, je pense que vous devrez nous donner une information à ce sujet.
Il est effectivement également important que l'on sache que la gestion de ce réseau sera une des missions de l'Etat et, même si ces travaux spécifiques sont confiés à une entreprise extérieure, que vous ne pensez pas externaliser cette gestion en la confiant au privé. Je souhaiterais que vous clarifiez ce point, Monsieur le président.
Nous, les socialistes, nous nous abstiendrons au moment du vote sur ce projet de loi, non pas parce que nous ne sommes pas d'accord avec les travaux - puisque nous sommes d'accord - mais pour donner un signal pour l'avenir.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Effectivement, la problématique de l'eau potable va être un des grands défis que nos sociétés devront relever ces prochaines années.
Mais le débat ne porte pas vraiment sur ce point. Comme l'a rappelé M. Velasco, tout le monde - M. Barro et M. Pagani aussi - était d'accord pour dire que ces travaux étaient indispensables. Et je dirai à ce sujet combien ces travaux et le fait d'avoir un bon réseau dans notre canton sont importants. De plus, la mise en place de tels plans régionaux découle d'obligations fédérales et cantonales.
Pour ce qui est de ce projet de loi et de la réorganisation du domaine de l'eau, le service du DIAE concerné nous a prouvé ses capacités en nous présentant toute une série de projets concrets pour la revitalisation des cours d'eau, que nous examinons actuellement en commission des travaux, et nous avons pu constater que ce service faisait un excellent travail. A mon avis, les compétences des personnes de ce service ne peuvent pas être remises en question. Il y a donc déjà beaucoup de compétences à l'interne, et nous devons simplement nous demander s'il faut en acquérir de nouvelles.
Je trouve pour ma part votre rapport assez intéressant, Monsieur Pagani. Mais je n'ose pas imaginer que l'Etat puisse engager des architectes - car on pourrait, en effet, pousser votre raisonnement plus loin en ne mandatant plus aucune entreprise à l'extérieur - pour les hôpitaux, les écoles, les cycles et le post-obligatoire... Ce système de coopération entre l'Etat et les mandataires - en tout cas, nous le vérifions chaque semaine à la commission des travaux - est très constructif, car ils nous apportent leurs compétences et nous proposent des projets intéressants. Il faut donc continuer dans cette voie. Quant à dire, Monsieur Pagani, que vous craignez la privatisation du domaine de l'eau, il ne s'agit pas du tout de ce dont nous parlons ! Si c'était le cas, nous serions évidemment fortement opposés à une privatisation dans ce domaine !
Il faut recentrer le débat sur la base suivante: nous devons avoir un réseau performant, nous devons avoir une bonne gestion de l'eau et éviter tout gaspillage. En préférant la solution préconisée par ce projet de loi, nous ne faisons pas de dépenses inutiles, contrairement à ce que vous prétendez. Je pense, Monsieur Pagani, que vos calculs sont faux, à tout le moins, je ne comprends pas vos bases de calcul... Mais peut-être pourriez-vous nous les expliquer à nouveau...
Les Verts vous engagent à voter ce projet de loi, comme ils s'engagent à le faire.
Présidence de M. Bernard Lescaze, président
M. Christian Grobet (AdG). Je ne fais pas partie de la commission des travaux qui a examiné ce projet de loi, mais je suis étonné, en lisant le rapport de majorité qui défend le projet de loi dont ce Grand Conseil a été saisi, de ne voir nulle part une quelconque référence à l'hypothèse que les travaux en question pourraient être confiés aux Services industriels de Genève... D'ailleurs, nous ne savons même pas si des représentants des Services industriels de Genève ont été auditionnés... Et je pense que ce qui est totalement suranné dans ce projet de loi, c'est précisément de continuer à confier cette charge à l'Etat !
A juste titre, le rapport de majorité rappelle que l'exploitation du réseau primaire des eaux usées a été confiée aux Services industriels de Genève dès le 1er janvier 2003. On sait par ailleurs - il y a eu de longs débats à ce sujet dans ce Grand Conseil et une votation populaire - que les Services industriels de Genève ont repris la gestion de la station d'épuration des eaux d'Aïre, qui est une installation extrêmement complexe.
Personnellement, j'ai été très favorable à l'idée que l'Etat se dessaisisse des installations d'épuration des eaux, car ce n'est pas, à mon avis, la tâche d'un département. Surtout que, du temps où il y avait un véritable département des travaux publics... (L'orateur est interpellé par M. Blanc.)Ça n'a rien à voir avec moi, parce que, voyez-vous, je ne suis pas ingénieur ! Vous ne me laissez pas terminer mes phrases ! ...qui avait la chance d'avoir toute une équipe de techniciens et d'ingénieurs - ce qui n'est pas, me semble-t-il, le cas du département que préside actuellement M. Cramer, alors que les problèmes sont devenus beaucoup plus complexes - la décision a été prise de confier la gestion des déchets et la gestion de l'épuration des eaux aux Services industriels de Genève, qui ont le know how et, surtout, des collaborateurs armés pour s'occuper de cette question. Et, de plus - je viens de le rappeler - le réseau primaire a été confié aux Services industriels de Genève.
Je considère donc - je suis désolé d'avoir à le dire aux représentants du Conseil d'Etat - que c'est, pour moi, une totale aberration que ce soient les services de l'Etat, par le biais du département de l'intérieur, qui pilotent toutes ces études confiées à des bureaux privés - je ne sais pas si c'est une bonne chose - alors que la gestion de l'épuration des eaux et de la collecte des eaux usées est confiée aux Services industriels de Genève ! Il aurait au moins fallu prévoir une collaboration ! Le projet de loi fait le tour de force de ne même pas le mentionner dans ses articles - et vous pouvez hocher la tête, Monsieur Cramer, je me suis donné la peine de le relire...
Ce qui m'amène à poser une question à Mme Brunschwig Graf, si elle a un instant d'attention à m'accorder: je me demande, au vu de la situation financière de l'Etat qui préoccupe certains députés, s'il est judicieux de voter un crédit qui va grever le budget d'investissement de l'Etat, alors que, par ailleurs, les frais de cette opération seront entièrement couverts par le Fonds cantonal d'assainissement des eaux. Sur le plan de la présentation du projet de loi, que le Grand Conseil donne son approbation - je ne suis d'ailleurs pas certain qu'elle soit nécessaire - quant à l'utilisation des fonds qui se trouvent sur le Fonds cantonal d'assainissement des eaux: pourquoi pas ? Mais pourquoi voter un crédit d'investissement, alors que c'est payé par le Fonds cantonal d'assainissement, qui, comme vous le savez, Monsieur Cramer, est alimenté par les taxes qui sont perçues auprès des propriétaires fonciers qui alimentent ce fonds ? Franchement, les choses étant ce qu'elles sont, je demande le renvoi de ce projet de loi en commission ! (L'orateur est interpellé par Mme Brunschwig Graf.)Mais j'en suis ravi, chère Madame, je n'en doute pas un instant ! Je vois que vous êtes un peu prise de court et qu'il vous faut aller chercher... (Le président agite la cloche.)
Le président. Monsieur Grobet, vous vous adressez au parlement !
M. Christian Grobet. ...soit une loi soit l'avis de quelqu'un... Vous voyez, Monsieur le président, vous avez eu le tort d'avoir mis cet objet à la séance de 17h, alors qu'il avait été prévu à 20h30 !
Le président. Vous vous adressez au parlement !
M. Christian Grobet. Si vous l'aviez mis à 20h30, nous aurions peut-être eu le temps d'aviser le Conseil d'Etat sur ces questions... Et, maintenant, je sens le Conseil d'Etat pris de court, ce qui justifie d'autant plus le renvoi en commission de ce projet de loi.
En tout cas, sur le plan financier, je souhaiterais que le budget d'investissement ne soit pas grevé inutilement d'un montant de 4,5 millions, ce qui va péjorer vos comptes, Madame la responsable du département des finances - qui êtes, je le sais, très soucieuse d'éviter une augmentation de l'endettement - et, par ailleurs, je demande que la commission, si elle ne l'a pas fait, prenne contact avec les Services industriels pour savoir comment ils vont pouvoir collaborer, ce qui est un minimum. Je le répète, je suis fermement convaincu que toutes ces études doivent être confiées à ceux qui sont chargés de gérer le réseau des eaux usées !
En ce qui me concerne, Monsieur Cramer, si j'étais gestionnaire à la place du conseil d'administration des Services industriels de Genève, je ne serais pas très content d'apprendre que c'est un service de l'Etat qui mène toutes les études concernant le domaine que je suis en train de gérer. Maintenant, peut-être que, par déférence à l'autorité du Conseil d'Etat, les Services industriels de Genève n'ont pas encore bougé, mais, à défaut d'une réaction du conseil d'administration des Services industriels, je suggère de renvoyer ce projet de loi en commission, qui pourra les auditionner pour savoir s'ils sont d'accord d'assumer leurs responsabilités dans ce domaine et de mener les études liées à ce projet.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, la liste des orateurs est close. La parole est au rapporteur de minorité, au rapporteur de majorité, puis, à M. Cramer. Monsieur le rapporteur de minorité, allez-y !
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Un certain nombre d'affirmations ont été faites... (Le président est interpellé par un député.)
Le président. Oui, et après nous voterons sur la proposition de renvoi en commission, avant l'entrée en matière. C'est entendu !
M. Rémy Pagani. Oui, puisque le renvoi en commission a été demandé !
J'aimerais juste expliquer les choses plus en détail. Comme l'a dit M. Grobet, on nous propose dans ce projet de loi qu'un groupe de pilotage de l'Etat - qui va coûter de l'argent à l'administration - fournisse des données à une entreprise privée pour lui permettre d'élaborer six plans - avec les 3,5 millions prévus - et que ce même groupe de pilotage prenne ensuite en charge le suivi de ces plans. Car, bien évidemment, il est nécessaire de prendre en charge ce suivi. Donc, non seulement le groupe de pilotage va devoir faire des procédures AIMP - et vous savez combien elles sont lourdes - mais, en plus, il va devoir assumer le travail de prise en charge de ces plans durant plusieurs années.
Je ne comprends vraiment pas la logique de cette démarche ! Si ce n'est - et c'est à ce niveau-là qu'il faut le dire - qu'il y a un service qui dysfonctionne et qui n'est pas capable de prendre en charge cette activité, alors que d'autres services de l'administration ont des spécialistes compétents qui prennent en charge des plans cantonaux élaborés - je pense au département de M. Moutinot...
Alors, on trouve le moyen d'éviter de se poser des questions sur les éventuels dysfonctionnements du service qui devrait prendre cette activité en charge en externalisant cette tâche. Pour moi, c'est du travail de singe: excusez-moi de vous le dire ! Soit il faut procéder à des modifications dans ce service, pour faire en sorte qu'il fonctionne bien et qu'il prenne cette activité en charge, soit il faut prendre les mesures adéquates si ce service ne correspond pas à la demande. Car cela n'a pas du tout été fait. On s'est contenté de créer un nouveau service, le service DomEau - du domaine de l'eau - pour pallier un certain nombre de dysfonctionnements, mais sans en tirer les conséquences...
Cela étant, au niveau des dépenses, je ferai un simple calcul, si Mme Gauthier le permet. Un fonctionnaire coûte entre 100 et 125 000 F - allons, soyons généreux: 150 000 F - par année... (L'orateur est interpellé.)Oui, en étant vraiment très généreux ! ...et pour des fonctionnaires très spécialisés ! Vous n'arriverez jamais à faire faire le travail qui est demandé, avec le nombre d'heures que cela suppose - cela a été calculé en commission - avec 3,5 millions ! Il faudra quasiment le double, et c'est bien normal, si cette tâche est confiée à une entreprise privée, car il faudra bien que celle-ci forme des spécialistes, et qu'elle dégage des bénéfices - et des bénéfices substantiels.
C'est le fond de ma critique: cette démarche est éminemment incohérente, d'autant plus que nous sommes - M. Grobet l'a relevé - dans une période de difficultés budgétaires et qu'il ne faut pas grever de manière abusive les charges de l'Etat.
Cela étant, il est vrai que la commission - je défends là la proposition de renvoyer ce projet en commission - n'a jamais demandé l'avis des Services industriels, alors qu'ils ont maintenant la gestion de la filière de l'eau. Ce serait bien normal qu'ils soient auditionnés, et cette raison suffit à justifier le renvoi en commission.
Ce projet de loi a de toute évidence été traité à la hussarde, comme si c'était normal de débourser une telle somme...
Je reviens sur le problème du coût: ce ne sont pas seulement 3,5 millions mais bien 17 millions en tout que les collectivités devront débourser, si on va dans le sens préconisé par la majorité.
Je plaide pour que cet objet soit renvoyé en commission, ce qui nous permettra d'auditionner les Services industriels de Genève. Le cas échéant, le département pourra examiner s'il ne serait pas judicieux de mettre ce dossier entre les mains des Services industriels qui décideront, eux, s'il est nécessaire de mandater une entreprise privée ou s'ils ont un personnel suffisamment compétent pour effectuer cette tâche.
M. Florian Barro (L), rapporteur de majorité. Je dirai rapidement que ce projet de loi n'a pas été traité à la hussarde comme le prétend M. Pagani... Il a été traité tout à fait normalement, mais, nous nous sommes effectivement achoppés - surtout avec M. Pagani - sur la méthode d'accomplissement de ce mandat.
Sur le fond - comme l'a dit Mme Gauthier - nous étions unanimes quant à la mission à remplir.
S'agissant maintenant des calculs qui figurent dans le rapport de minorité, il me semble que M. Pagani a confondu les heures à consacrer et les compétences à apporter... Les choses ne sont pas aussi simples et ne peuvent être réduites à une somme d'heures: il faut raisonner en terme de compétences.
Tout projet d'importance à l'Etat implique un comité de pilotage. Le département constructeur et le département utilisateur sont les pilotes d'une opération de ce type. Il n'y a rien d'extraordinaire... Il n'y a rien de nouveau... C'est toujours comme cela que les choses se passent.
Pour ce qui est du renvoi en commission, certes les Services industriels de Genève n'ont pas été auditionnés, mais, s'ils ne l'ont pas été, c'est parce qu'ils sont - à ma connaissance - les gestionnaires du secteur primaire et non pas les planificateurs de ce secteur.
S'agissant d'un projet de loi qui vise à mettre en place une AIMP, il aurait été peu convenable d'inviter un prestataire de services comme les Services industriels de Genève à fournir des informations et à se mettre en avant dans le cadre de cette AIMP. Il y aurait eu, en quelque sorte, une distorsion de concurrence en auditionnant un candidat potentiel.
C'est la raison pour laquelle, en tout cas en ce qui me concerne, je refuserai le renvoi en commission de ce projet de loi pour auditionner un attributaire potentiel de ce mandat.
Maintenant, en ce qui concerne le fait que ce crédit soit autofinancé, je pense qu'il faut faire la distinction entre l'investissement en tant que tel et la méthode de financement. Ce projet - il n'est pas le seul - a la particularité d'être autofinancé, comme d'autres font recours à l'emprunt.
Il s'agit donc bien, à mon avis, d'un crédit d'investissement, puisque c'est une opération qui a été prévue sur le long terme, et non une opération amortissable rapidement dans les comptes de l'Etat.
Pour toutes ces raisons, je vous invite à soutenir le rapport de majorité et à voter le projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Monsieur Dethurens, la liste était en principe close... Vous voulez vous exprimer sur le renvoi en commission ? Bien, allez-y !
M. Hubert Dethurens (PDC). Monsieur le président, je veux juste intervenir sur le renvoi en commission.
Moi, je veux bien suivre la proposition de M. Grobet, car j'épouse en partie ses thèses... Mais, à une seule condition, c'est de savoir qui encaisse les taxes d'épuration. En effet, si c'est l'Etat qui les encaisse, c'est à l'Etat de payer le coût de ce projet. Si ce sont les Services industriels de Genève qui les encaissent, c'est à eux d'assumer cette dépense.
Je pense que M. Cramer va répondre sur ce point, et mon vote sur le renvoi en commission de ce projet dépendra de sa réponse. Mais ce renvoi ne me semble pas pertinent.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je vous parlerai tout d'abord du renvoi en commission, comme c'est l'usage. (L'orateur est interpellé par le président.)Non, il est préférable de dire tout de suite ce que j'en pense ! Renvoyer ce projet de loi en commission serait une extrêmement mauvaise idée pour la raison suivante: si nous n'avons pas procédé à l'établissement de ces plans régionaux d'évacuation des eaux avant le 12 septembre 2004, nous allons perdre une subvention fédérale de 931 940 F. Si j'ai demandé que ce projet soit traité aujourd'hui en urgence, alors que votre Grand Conseil en est saisi depuis sa séance du 15 mai 2003, c'est précisément parce que c'est la dernière minute pour prendre une décision si nous voulons bénéficier de cette subvention fédérale, dont je rappelle que le montant est de 931 940 F. Le Conseil d'Etat s'oppose donc au renvoi en commission de ce projet de loi, pour éviter d'engager non pas la collectivité en l'occurrence mais les consommateurs d'eau dans cette dépense.
Pour le surplus, j'ai entendu un certain nombre de choses un peu surprenantes, qui m'amènent à faire trois distinctions.
Premièrement, il faut distinguer ce qui ressort des communes et ce qui ressort des cantons. Et, dans l'intervention liminaire de M. Pagani, je n'ai pas entendu que cette distinction soit faite. Il faut en effet comprendre que les plans régionaux d'évacuation des eaux sont la tâche des communes, et ce sont à elles de préparer ces plans, alors que les plans régionaux d'évacuation des eaux sont la tâche du canton. De cela, nous ne pouvons pas sortir, sauf à modifier les législations...
Deuxièmement, il faut distinguer - je réagis aux propos de M. Iselin - ce qui ressort de l'impôt et ce qui ressort de l'autofinancement. Lorsque nous parlons de ces plans régionaux d'évacuation des eaux, nous ne parlons pas d'une dépense qui va être assumée par le contribuable - comme l'a, du reste, justement rappelé M. Grobet - mais d'une dépense qui va être portée par le fonds cantonal d'assainissement. Ce sont donc les bénéficiaires de la prestation - ceux qui bénéficient du traitement de leur eau, notamment - qui alimentent ce fonds cantonal d'assainissement.
Troisièmement, il faut distinguer - et cette distinction est peut-être plus fondamentale, puisqu'elle a trait au rôle de l'Etat qui a été largement évoqué ici - ce qui ressort du rôle de l'autorité directrice et ce qui ressort de l'opérateur.
A mon sens - mais aussi au sens du Conseil d'Etat et, je crois, de la population qui a eu l'occasion de se prononcer à ce sujet à deux reprises lors de votations constitutionnelles - il faut bien comprendre que l'Etat a une tâche importante de contrôle, de surveillance, de prescription, dans les différents domaines environnementaux: il appartient à l'Etat de dire ce qu'il convient de faire et comment il faut le faire. En somme, l'Etat doit rendre des décisions, parce que c'est lui qui détient l'autorité, parce que c'est lui qui décide. Ensuite, c'est à lui de s'assurer que ses décisions sont bien exécutées et, cas échéant, d'user de la contrainte qui s'appelle «travaux d'office» ou qui s'appelle «amendes». Ça, c'est le rôle de l'Etat.
Et puis, il y a l'opérateur... C'est lui qui applique ces décisions, c'est lui qui se trouve sur le terrain. Et, en l'occurrence, en matière d'eau, le décideur - l'autorité directrice - c'est l'Etat, qui intervient à travers un service qui s'appelle DomEau, et l'opérateur, ce sont les Services industriels, qui gèrent concrètement les stations d'épuration des eaux et qui installent les canalisations.
Il en va exactement de même dans le domaine de la gestion des déchets. Un service de l'Etat décide de la manière dont les déchets doivent être gérés, donne des prescriptions - et ce, du reste, à la suite d'une loi votée par le Grand Conseil - et puis, ensuite, les Services industriels appliquent ces prescriptions.
Dans le cas présent, le Grand Conseil a adopté une loi qui donne les grandes lignes à la suite de celle adoptée par le Parlement fédéral. Un service de l'Etat - DomEau - cadre l'ensemble du processus. Puis les Services industriels appliquent ces prescriptions. Nous sommes, me semble-t-il, dans un schéma tout à fait normal, et il serait très étonnant - et je dirai même très choquant - que, de contrôlés, les Services industriels de Genève deviennent leur propre contrôleur. C'est ce que nous n'avons pas voulu. Et c'est précisément parce que nous ne le voulions pas que nous avons décidé que les Cheneviers et les STEP soient sortis de l'Etat, de sorte que le contrôleur et le contrôlé ne portent pas la même casquette.
Maintenant, pourquoi ces plans ne sont-ils pas établis par DomEau, mais par une entreprise extérieure? Non pas parce que DomEau n'a pas les compétences pour ce faire ! Vous le savez, en créant ce service de l'administration - qui, je crois, est unique en Suisse - nous avons regroupé en un seul lieu, à Genève, tous les gens qui ont des compétences en matière d'eau, de manière à avoir une cohérence dans les décisions et de manière à avoir des synergies efficaces, et DomEau est un service de l'Etat extrêmement efficace. Si nous confions la tâche d'établir des plans à un mandataire externe - comme le fait l'office des transports et de la circulation lorsqu'il est amené à rédiger des plans en matière de circulation - c'est que c'est plus logique que d'engager des collaborateurs complémentaires pour une tâche ponctuelle. Etant, bien sûr, précisé que le mandataire externe rend ensuite compte au service de l'administration, lequel avalise le travail qui a été fait par le mandataire externe et a la compétence pour le contrôler.
Nous sommes dans une logique de bonne gestion administrative classique: lorsque nous sommes confrontés à un travail exceptionnel, au lieu de le faire à l'intérieur, nous le faisons faire à l'extérieur, avec, bien sûr, la compétence d'exercer notre rôle d'autorité directrice.
Je tiens encore ici à préciser que les plans régionaux d'évacuation des eaux ne se résument pas uniquement au dessin d'un réseau d'égouts... Le mot «assainissement» vous l'a peut-être fait croire. Je vous invite à relire l'exposé des motifs, et, notamment, les annexes jointes à celui-ci. Vous verrez que les objectifs des systèmes d'assainissement sont divers: c'est protéger la population et le milieu naturel contre les risques sanitaires liés aux eaux polluées, c'est diminuer les rejets, c'est conserver et rétablir les régimes hydrologiques, c'est favoriser une gestion optimale des eaux. En d'autres termes, les plans régionaux d'évacuation des eaux ne consistent pas simplement à définir le réseau des canalisations, mais à avoir une vision globale de la gestion de l'eau, de manière qu'elle soit retenue à la parcelle, autant que faire se peut. Et c'est dans le cadre de ces plans notamment que l'on règle les questions d'infiltrations d'eau, de toitures vertes, etc. Nous sommes très très loin de la vision du dessin d'un réseau d'égouts.
Dernier point qui a été évoqué. Pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, êtes-vous saisis de ce projet de loi, dès l'instant où le contribuable ne payera rien et que cette affaire figurera dans le budget avec, d'un côté, la dépense et, de l'autre - comme c'est toujours le cas en matière d'autofinancement - la ressource qui s'équilibreront ? C'est tout simplement parce que la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat exige cette transparence. Et nous nous bornons à appliquer les lois qui ont été votées par ce Grand Conseil, en vous présentant ce projet de loi d'investissement, tout en vous disant dans le même temps qu'il va figurer, comme c'est toujours le cas - et comme c'était, par exemple, le cas du projet de loi d'investissement de la station d'épuration des eaux d'Aïre - dans le budget de l'Etat, mais avec la couverture financière des frais qui sont engagés. Puisque cette couverture financière sera assumée par le fonds d'assainissement, dont je rappelle encore une fois qu'il est alimenté par le pollueur. C'est l'application, de façon stricte, en droit cantonal, du système du pollueur-payeur que nous connaissons déjà depuis bien des années.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant passer au vote sur la proposition de renvoi en commission de ce projet de loi faite par M. Grobet, au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi en commission est rejeté par 45 non contre 20 oui et 16 abstentions.
Le président. Monsieur Grobet, vous avez la parole.
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, je voulais intervenir avant le vote, parce qu'une question a été posée...
Le président. Vous étiez déjà intervenu, et un seul député par parti peut s'exprimer sur le renvoi en commission !
M. Christian Grobet. ...par M. Dethurens.
Le président. M. Pagani... (Exclamations.)
M. Christian Grobet. Je voulais relever que le fonds d'assainissement est principalement alimenté par des taxes qui sont perçues auprès des propriétaires - c'est expressément indiqué dans la loi sur les eaux - par les Services industriels, par le biais de la facture d'eau. La taxe d'épuration, quant à elle, est fixée par l'exploitant. Elle figure à l'article 97: la taxe annuelle d'épuration des eaux est fixée par l'exploitant - c'est-à-dire les Services industriels de Genève - et doit être approuvée par le Conseil d'Etat. Bien entendu, cette taxe doit être approuvée... Nous sommes donc dans un système dans lequel des taxes d'épuration - dont le montant est fixé par les Services industriels - sont prélevées et versées au fonds d'assainissement, lequel est tenu de mettre à disposition des Services industriels des fonds pour tout ce qui concerne le réseau primaire.
En ce qui concerne les communes, elles n'ont en principe pas droit au produit de ces taxes d'épuration, mais elles ont droit à ce qu'on appelle la taxe d'écoulement et à une subvention éventuelle provenant du fonds d'assainissement. En effet, nous nous sommes trouvés, Monsieur Dethurens, dans une situation qui a paru inéquitable à l'Alliance de gauche. Lors de la modification de la loi sur les eaux, nous avions proposé d'amender la loi en prévoyant que le réseau secondaire devrait également être financé par le fonds d'assainissement et pas principalement par les communes. Malheureusement, cet amendement n'a pas été traité. Et il est vrai qu'aujourd'hui les communes doivent assumer une part importante du coût du réseau secondaire. Mais le réseau primaire est intégralement à la charge du fonds d'assainissement, par le biais de la taxe d'épuration, qui est fixée et prélevée par les Services industriels.
C'est pour cette raison que je persiste à dire que la logique voudrait que ce soient les Services industriels de Genève qui s'occupent de cette tâche et qu'on pourrait s'épargner ce crédit d'investissement. Du reste, c'est seulement à partir d'un emprunt de 5 millions que le Grand Conseil est appelé à donner son aval sur ces questions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons maintenant au vote sur l'entrée en matière de ce projet de loi, au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 63 oui contre 13 non et 7 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 7.
Le président. Monsieur Blanc, vous voulez parler ? Excusez-moi, je ne vous avais pas vu ! Monsieur Blanc, allez-y.
M. Claude Blanc (PDC). Je voulais simplement faire une remarque sur la rédaction de l'article 6 qui me paraît vraiment mauvaise sur le plan de la syntaxe. Il est dit: «L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante et est portée - e - au compte de fonctionnement...» Cela pose un problème ! Il faudrait dire: «L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante, portée au compte de fonctionnement...» ou «L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante qui est portée au compte de fonctionnement...». En tout cas, la phrase, telle qu'elle est rédigée est fausse. C'est la première chose que je voulais dire.
Puisque j'ai la parole, je vous dirai également que j'ai été impressionné par la démonstration de M. Grobet... Cela peut arriver occasionnellement: je rejoins de temps en temps M. Grobet dans ses raisonnements ! Et je continue à penser que, les Services industriels étant le maître de l'ouvrage, c'est à eux de réunir les fonds nécessaires pour financer ce projet ! Ce n'est pas notre problème: c'est le leur ! Je vois les choses comme M. Grobet.
Je pensais que M. Cramer allait démolir la proposition de M. Grobet... En fait, il est arrivé à une conclusion différente, mais tout ce qu'il a dit allait dans le sens des propos tenus par M. Grobet. Alors, je vous avoue franchement que je reste sur ma faim et, finalement, je m'abstiendrai sur ce vote, puisque je vois que, de toute manière, tout le monde est d'accord de voter un crédit, alors qu'en fait il ne nous appartient pas de le voter.
Le président. Merci, Monsieur le député. En tout cas, votre remarque sur l'article 6 est judicieuse et montre combien il est nécessaire d'avoir une commission de relecture des lois... Je donne la parole à M. le conseiller d'Etat Cramer.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Encore deux observations. Je ne sais pas si elles suffiront à convaincre M. Blanc de voter oui, indépendamment du fait, bien sûr, que son amendement est tout à fait bienvenu...
Tout d'abord, il est certain que ce sont les Services industriels de Genève qui prélèvent les taxes d'épuration qui sont ensuite versées dans le fonds d'assainissement, mais ils le font pour le compte de l'Etat. Et le fonds d'assainissement est géré par l'Etat.
Deuxième observation. Etablir ces plans régionaux d'évacuation des eaux est une tâche tout à fait spécifique qui relève de la compétence de l'Etat. C'est l'Etat qui doit dire comment sera régie toute la problématique de l'écoulement des eaux, dont je rappelle encore une fois que, tout à la fois, il s'agit des eaux qui courent dans les cours d'eau, des eaux qui vont être récoltées et de celles qui vont partir dans des réseaux de canalisation, des réseaux de séparatifs, de la problématique de la gestion des eaux à la parcelle... Toutes ces tâches relèvent à l'évidence de l'Etat, qui doit établir leur planification. Il est alors logique, puisque c'est une tâche de l'Etat, et plus précisément du service DomEau, que ce soit lui qui prenne cela en charge. Notre seul point de divergence - en tout cas, en commission avec M. Pagani - était de savoir si c'était à ce service de l'Etat d'établir ces plans régionaux d'évacuation des eaux ou s'il était possible qu'il les fasse faire par une entreprise extérieure. Nous nous sommes exprimés sur ce point, mais nous ne pouvons pas aller au-delà. Il ne serait pas concevable que les Services industriels, dont ce n'est pas le métier, puissent décider des principes qui doivent régir le canton dans ce domaine !
Le président. Nous tiendrons compte de la remarque de M. Blanc en troisième débat. En effet, il faudrait modifier cet article comme suit: «...sous la forme d'une annuité constante, portée au compte de fonctionnement...».
Troisième débat
M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC rejoint les réflexions de M. Grobet et de M. Blanc...
Mon collègue a également posé une question - à laquelle il n'a pas été répondu - à propos de la responsabilité partielle ou totale des Services industriels en la matière. J'ai l'impression que nous allons payer deux fois la même chose... J'aimerais donc savoir à quoi est affectée la taxe sur l'assainissement des eaux. Que fait-on de cette taxe ? Quel est son montant ? Ne pourrait-elle pas être partiellement affectée à ce type de projets ?
M. Robert Iselin (UDC). Je resterai dans les considérations financières, qui ont rempli mon existence...
Je trouve assez extraordinaire de parler de «crédit d'investissement autofinancé» - ce qui veut dire que le projet en question se finance lui-même - et de déclarer ensuite dans la loi, je cite, à l'article 4: «financement à charge de l'Etat: 3 568 060 F...». Cela me paraît incroyable ! D'autant plus qu'il est dit à l'article 5, je cite: «Le financement de ce crédit est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt.» J'aimerais bien savoir en quoi consiste l'autofinancement dans ce cas !
M. Christian Grobet (AdG). Je voulais aussi revenir sur la construction de ce projet de loi, au niveau du crédit d'investissement. J'ai du reste interpellé Mme Brunschwig Graf à ce sujet. J'ai remarqué qu'elle feuilletait des lois à ce sujet... Je n'ai pas eu de réponse de sa part...
Quoi qu'il en soit, je reste perplexe quant au fait - comme M. Iselin, du reste - qu'il soit nécessaire de voter un crédit d'investissement qui figurerait au budget d'investissement, alors que l'opération devrait normalement être autofinancée, comme c'est indiqué dans la loi, à l'article 5, par le fonds cantonal d'assainissement des eaux. En ce qui concerne l'alinéa 1 de ce même article, il est dit - c'est vrai - que: «Le financement de ce crédit est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt.» En fait, il est contradictoire de dire que c'est le fonds cantonal d'assainissement des eaux qui finance ce projet, tout en stipulant un éventuel recours à l'emprunt...
Cela m'amène à poser la question suivante au Conseil d'Etat: depuis la modification de la loi sur les eaux, qui remonte à plusieurs années, les dépenses à charge du fonds d'investissement de l'Etat ont-elles été portées dans le budget d'investissement de l'Etat ? Et, y a-t-il eu des lois particulières qui ont été soumises à l'approbation du Grand Conseil pour la construction, par exemple, d'un élément d'un collecteur du réseau primaire, etc. ? En effet, il faut être cohérents: si vous estimez aujourd'hui que ces dépenses doivent figurer au budget des investissements, je vous demande si les autres investissements découlant du fonds d'assainissement ont fait l'objet du même processus législatif... Car je ne crois pas me souvenir des projets de lois de ce type ces dernières années.
M. Robert Cramer. Je dirai deux mots - car on est en train de refaire toute la législation cantonale autour de ce débat - sur le fonds d'assainissement.
Monsieur Catelain, vous avez demandé très précisément quel est le montant de la taxe... 135 centimes, c'est-à-dire 1,35 F par m3 d'eau ! Que fait-on avec cet argent ? Eh bien, avec cet argent, on construit, par exemple, la station d'épuration des eaux d'Aïre qui coûte 242 millions et que nous venons d'inaugurer et que vous avez trouvée, année après année, au budget, au fur et à mesure qu'avançaient les travaux. Avec cet argent, on raccorde la STEP de Saint-Julien à la STEP d'Aïre... Toute une série de travaux relatifs à des stations d'épuration des eaux ont été effectués ces dernières années, que vous avez vu figurer au budget et qui ont fait l'objet de projets de lois. Et, avec cet argent, nous avons un projet d'agrandissement de la station d'épuration des eaux du Nant-d'Avril, qui va représenter une dépense de plusieurs millions et pour laquelle, bien sûr, vous serez saisis d'un projet de loi que je soumettrai très prochainement à ce Grand Conseil. En l'occurrence, il s'agit exactement de la même chose. Sauf que l'investissement porte sur une étude - et une étude importante - au lieu de porter sur une station d'épuration des eaux. Voilà ce que nous faisons avec cet argent.
Encore un mot, Monsieur Iselin... Dire que ce projet est «autofinancé» ne veut pas dire qu'il ne coûte rien... Cela veut dire que ce n'est pas le contribuable qui paie. Le financement vient d'ailleurs, et, dans ce cas précis, le financement se fait par le biais du consommateur d'eau, ce qui n'est pas la même chose qu'un financement par le biais de l'impôt - et de l'impôt progressif... Ce sont des règles différentes qui s'appliquent ! Je ne dis pas que c'est gratuit ! Un projet «autofinancé» est un projet financé selon le système que je viens d'indiquer. Je vous en explique le mécanisme. Si vous ne le trouvez pas bon, vous pouvez peut-être envisager de changer la législation pour en employer un autre !
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je vais répondre aux questions d'ordre financier qui ont été posées.
Je rappelle à ceux qui se soucient d'un éventuel recours à l'emprunt que ce crédit d'investissement, comme tous les autres, s'inscrit dans l'enveloppe globale qui a été fixée par les investissements de l'Etat. Dès qu'un crédit est inscrit, il est inscrit dans l'enveloppe globale.
Deuxième élément. Si tous les crédits d'investissement étaient financés sur le plan des amortissements et sur le plan des intérêts comme celui-ci, nous aurions un peu moins de problèmes dans le budget de fonctionnement de l'Etat ! En effet, celui-ci a cette vertu que l'argent qui est ainsi mis à disposition est rétribué et en amortissements et en intérêts par le fonds prévu à cet effet.
Troisième point - et ça sera ma petite provocation personnelle - dans d'autres débats - notamment lorsque nous avions déposé la loi sur les transferts d'actifs aux TPG - vous étiez soucieux, de façon légitime, des montants qui peuvent être immobilisés par le Conseil d'Etat ou par l'Etat en matière d'investissement... Nous avions argumenté à l'époque en disant qu'il fallait assainir la situation des institutions subventionnées, pour leur permettre, grâce à cet assainissement en termes de transferts d'actifs, d'être elles-mêmes actives par rapport aux investissements qu'elles devaient assumer. Je n'ai pas entendu les députés des mêmes bancs, qui interviennent aujourd'hui, exprimer leur soutien à ce crédit, qui, lui, est autofinancé.
Je note donc avec grand intérêt que vous souhaitez également diversifier les sources de financement et alléger l'Etat et son budget d'investissement pour des institutions autres que celles de l'Etat. Je constate que nous pourrons reprendre ce débat sous de meilleurs auspices, et je m'en réjouis.
M. Claude Blanc (PDC). Je suis très heureux d'entendre ce que vous venez de dire, Madame Brunschwig Graf... Au moins, vous avez clarifié le débat !
Vous avez eu raison, en vous adressant aux députés assis à votre gauche, de dire qu'au moment où on a voulu réaliser les transferts d'actifs des TPG - et d'autres, d'ailleurs - on n'avait pas trouvé un accueil favorable devant ce Grand Conseil ! Vous avez certes raison sur ce point...
Mais ce que vous venez de dire, chère Madame, ne me concerne pas, parce que moi j'étais d'accord pour réaliser ces transferts d'actifs. Et c'est dans le même ordre d'idée que je trouve que ce financement devrait être assuré par les Services industriels et ne pas figurer au rang des emprunts de l'Etat, ce qui allégerait d'autant la liste de ces emprunts. C'était la théorie que vous aviez défendue pour les TPG, je l'ai partagée, et je la défends aussi pour ce projet.
En ce qui concerne M. Grobet, c'était différent, mais moi, au moins, je suis cohérent !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets formellement aux voix la nouvelle rédaction de l'article 6, dont la teneur est la suivante:
«L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante, portée au compte de fonctionnement...»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix le projet dans son ensemble au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
La loi 8804 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 13 non et 8 abstentions.