Séance du
vendredi 29 août 2003 à
14h
55e
législature -
2e
année -
10e
session -
64e
séance
La séance est ouverte à 14 h, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Robert Cramer, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf et Carlo Lamprecht, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Thierry Apothéloz, Pierre Froidevaux, Philippe Glatz, Michel Halpérin, Claude Marcet, Blaise Matthey, Alain-Dominique Mauris, Pierre Schifferli, Louis Serex, Olivier Vaucher et Pierre Weiss, députés.
Correspondance
Le président. Je signale que nous avons retrouvé la lettre que nous demandait de lire M. Christian Grobet et qu'elle était adressée à la commission des pétitions. Cette dernière en prendra soin.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais intervenir sur l'incident qui a clos notre séance tout à l'heure. (Protestations.)Après notre prestation de serment... (Chahut. Le président agite la cloche.)
Le président. Laissez parler Mme Künzler, nous n'en sommes qu'à l'ordre du jour.
Mme Michèle Künzler. S'il est normal que nous soyons partisans - nous sommes élus pour cela - lorsque nous siégeons dans cette salle, il n'est pas normal que le président le soit. Interrompre une procédure de vote annoncée quelques minutes auparavant simplement parce que l'on sait que le résultat ne sera pas celui escompté, est scandaleux. Nous estimons qu'après les lettres sur les tenues vestimentaires, il vaut mieux avoir aussi une certaine tenue morale. (Applaudissements.)
Le président. La parole est à M. le député Charbonnier.
M. Alain Charbonnier (S). Merci, Monsieur le président, c'est sur le même sujet que je désirais intervenir. Le groupe socialiste soutient la position des Verts par rapport à ce qui s'est passé tout à l'heure. ( Protestations.) A l'heure où le Bureau du Grand Conseil, à majorité de droite, dépose un projet de loi pour faire accélérer les débats, je suis très étonné qu'après trois rappels - et ce n'est pas après une définition de la procédure de vote, mais bien après trois rappels que la décision a été prise - une telle situation soit intervenue. Nous la condamnons fermement.
Le président. Le fait est que le conseiller d'Etat responsable n'était pas là et n'avait pas annoncé son absence. (Huées et applaudissements.)Mesdames et Messieurs les députés, chacun soutient les urgences qu'il veut, mais tout ce qui est excessif est insignifiant.
Annonces et dépôts
Néant.
La loi 8881 est adoptée en trois débats par article et dans son ensemble.
Suite du premier débat
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je regrette vivement de ne pas avoir pu assister au début du débat sur ce projet de loi.
Une voix. Tu n'as rien manqué !
M. Robert Cramer. Je suis persuadé qu'il y a quand même eu quelques interventions pertinentes. Je représentais le gouvernement à une manifestation organisée par les Nations Unies, où l'on rendait hommage non seulement à M. de Mello, mais également à tous ses collaborateurs des Nations Unies qui ont perdu la vie en Irak.
Quant à ce projet de loi, je crois que le premier débat a permis d'en retracer la chronologie. Dans un premier temps, ce projet avait exprimé la volonté de certains députés de mettre de l'ordre dans la circulation routière, et cela à travers une carte. Celle-ci devait être établie par le Grand Conseil et prévoir une hiérarchie fonctionnelle du réseau routier, c'est-à-dire distinguer les voies principales, secondaires et de quartier.
L'idée de mettre de l'ordre dans le réseau routier et d'établir une hiérarchie fonctionnelle des routes est en soi, assurément, une bonne idée. J'ajoute qu'il est souhaitable de compléter cette idée-là par une seconde, qui devrait être un plan directeur du réseau routier. Nous avons des plans directeurs dans différents domaines: le plus important pour notre canton est bien sûr celui qui concerne l'aménagement du territoire, mais nous avons aussi un plan directeur dans le domaine de l'environnement, établi du reste selon des procédures comparables. Nous avons des plans directeurs plus modestes et plus techniques, par exemple ceux qui dictent notre comportement en matière de gestion des déchets, dans le domaine de la renaturation des cours d'eaux - un rapport vous a été récemment soumis à cet égard - ou dans le domaine de l'air, ou encore dans le domaine de la planification hospitalière et bien d'autres encore. Il est souhaitable d'avoir cette visibilité, cette transparence qui, à travers un plan directeur, nous indique où nous nous dirigeons.
C'est la raison pour laquelle, parmi les amendements qui ont été apportés au projet de loi initial, il y a cette idée de plan directeur. J'ajoute qu'au-delà d'un plan directeur cantonal, dès l'instant où le canton de Genève compte une centaine de kilomètres de frontière avec la France, un plan directeur régional est également nécessaire. Vous savez que nous en avons élaboré un dans le domaine des transports publics: au début de juillet, une manifestation a marqué cette collaboration transfrontalière et a permis à la population de découvrir ce plan directeur régional en matière de transports publics. Il s'agit de réaliser l'équivalent en matière de réseau routier, et nous commençons à nous y atteler dans le cadre du Comité régional franco-genevois.
Le plan directeur trouvera ensuite sa concrétisation à travers d'autres cartes, que l'on devra réaliser pour tous les domaines. Il nous faut effectivement - et cela nous manque - une carte qui nous montre comment est hiérarchisé le réseau routier, en d'autres termes où sont à Genève les rues principales, les rues secondaires et les rues de quartier. Et j'entends dire ici, aux uns et aux autres, qu'une fois la carte adoptée, elle le sera pour tout le monde. Je veux dire par-là que ceux qui emprunteront les routes principales devront s'attendre à pouvoir y circuler aisément, mais aussi à ce que - et je le dis clairement - sur les routes de quartier, sur le réseau de destination, ils n'y puissent pas facilement ! Précisément, il ne s'agit pas d'offrir du transit à ces endroits-là, mais, tout au contraire, de préserver la tranquillité des habitants, les caractéristiques de l'habitat. Ce sont donc des endroits qui ne servent pas au transit, ni à la grande circulation, mais qui doivent être aménagés de façon totalement différente. On trouvera donc sur cette carte à la fois les endroits où l'on peut circuler aisément et d'autres où, en revanche, on ne s'y rend que si l'on a une bonne raison.
En même temps, d'autres cartes seront nécessaires: celles qui devront nous montrer ce qu'il en est du réseau des pistes cyclables, comment il s'organise, comment les pistes se connectent sur l'ensemble du territoire du canton; des cartes qui devront nous signaler comment organiser un déplacement piéton; des cartes qui devront préciser, mais cela est déjà très largement réalisé, ce qu'il en est des transports publics. Enfin, des cartes devront aborder la question des transports professionnels, et c'est un domaine auquel j'attache une importance particulière, qu'il s'agisse de transports de marchandises ou de personnes.
Voilà où nous en sommes dans nos réflexions. Ces dernières sont actuellement non pas le fait du département exclusivement, mais menées également au sein du Conseil des déplacements, qui réunit de façon paritaire des représentants de milieux économiques et de milieux proches de clubs automobiles et, d'un autre côté, des représentants de milieux environnementaux et d'associations qui se préoccupent d'autres types de mobilité. Ensemble et de façon unanime, malgré des opinions très contrastées, nous sommes arrivés à ces quelques réflexions que je vous soumets, et qui, pour une grande partie d'entre elles, se sont concrétisées par des amendements déposés au projet de loi.
Maintenant que le monde associatif, en tout cas, a trouvé cet accord, et maintenant qu'on a bien voulu, en commission, tenir compte des amendements proposés et qui nous permettent d'aller de l'avant, je crois que les conditions sont réunies pour que l'on se mette au travail. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité que ce Grand Conseil ouvre ce débat et qu'il accepte cette loi s'il l'estime bonne, de façon que nous puissions rapidement - et sans doute d'ici la fin de l'année - présenter, à vous et à la population, ce plan directeur du réseau routier, rédigé avec les milieux associatifs.
Ainsi, nous pourrons également mettre la dernière main aux cartes que nous sommes en train de préparer et, enfin, élaborer le règlement d'application qui va suivre ce projet de loi et contenir, de façon un peu plus détaillée, ce que je suis en train de vous dire en substance.
J'ajouterai encore un mot: je crois que la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant ne profite à personne. Le manque de visibilité dans le domaine de notre politique routière et dans celui de notre politique de circulation, ainsi que le fait que nous soyons dépourvus de tout outil de gestion, ne profitent à personne. Ce n'est pas comme cela qu'on va empêcher les gens de rouler en voiture ! En revanche, j'ai le sentiment que c'est ainsi qu'on incite des gens à trop circuler dans des endroits où ils n'ont pas à se trouver, de sorte qu'ils représentent des dangers et des sources d'inconvénients majeurs pour la population des emplacements résidentiels. Je crois que c'est également ainsi que l'on provoque un certain nombre de dommages environnementaux, qu'il s'agisse de pollution de l'air ou de pollution par le bruit, toutes deux évitables. C'est dans cet esprit que je vous suggère d'approuver le projet de loi tel qu'il est issu des travaux de la commission, c'est-à-dire avec les amendements proposés par le département à la suite des discussions qui ont eu lieu au sein du Conseil des déplacements.
Le président. Merci. La parole n'étant plus demandée, nous votons l'entrée en matière de ce projet de loi par vote électronique, et nous saurons qui est présent dans la salle.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 35 oui contre 31 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Dans la section 2, à l'article 2, alinéa 1, M. Grobet, rapporteur de minorité, propose l'amendement suivant: «Le Conseil d'Etat établit, en collaboration avec les communes, un plan directeur... ».
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, ce matin, alors que M. Cramer n'était pas là, j'avais évoqué dans ma première intervention le fait que les communes n'ont quasiment aucun pouvoir en ce qui concerne l'aménagement de notre réseau routier; cela a été rappelé, du reste, par certains députés. Ce point concerne tout particulièrement la Ville de Genève, contrairement à ce que certains laissent entendre.
J'avais expliqué qu'il me paraissait impensable de procéder à cette hiérarchisation du réseau routier sans la collaboration des communes. Comme M. Cramer est, dans son dicastère, chargé tout particulièrement des relations avec les communes, je serai heureux de connaître sa position en ce qui concerne la collaboration avec ces dernières et, aussi, les différentes propositions d'amendements figurant dans le rapport de minorité.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je vous réponds volontiers. Vous savez que nous pratiquons la collaboration avec les communes de façon intensive. S'agissant de ces outils de planification, deux questions se posent: il y a, d'une part, la question liée à la hiérarchie du réseau routier - c'est ce qui figure dans les amendements proposés au projet de loi - et, d'autre part, la question du plan directeur du réseau routier.
Ce plan directeur a assurément quelque chose à voir avec la hiérarchie du réseau routier, mais il est tout de même sensiblement différent. Le plan directeur du réseau routier est un document d'intention, qui expose comment l'on envisage, dans les grandes lignes, la future circulation dans le canton, quelles sont les grandes options choisies en matière de construction de nouvelles routes, et comment tout cela se coordonne - je l'espère !- du point de vue régional.
Nous sommes là dans un document de larges intentions, qui va, à un moment donné, se concrétiser par des cartes. Le jour où l'on entrera un peu plus dans le détail, nous aurons d'autres débats, plus particuliers.
Je me demande si c'est vraiment à ce niveau-là, c'est-à-dire à celui d'une première planification, que les communes doivent être consultées. Je constate qu'assurément cela ne nous permettra pas d'établir plus rapidement un tel plan directeur. S'il n'y avait pas dans votre texte les mots «en collaboration» et qu'il y ait quelque chose du style «après consultation», je n'y verrais absolument aucune objection. La collaboration est un peu compliquée en matière de routes: il y a quarante-cinq communes sur le territoire de ce canton et si le rôle de l'autorité cantonale devient celui de juxtaposer quarante-cinq désirs, nous nous retrouverons dans une situation où, premièrement, l'élaboration de cette planification sera retirée de notre compétence et, deuxièmement, cette tâche sera à peu près impossible. Par contre, il n'y a pas de raison de ne pas dire qu'il faille consulter les communes, mais cela ne nous permettra pas de travailler plus vite.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur Cramer a commencé son intervention en se décernant un brevet d'autosatisfaction assez généreux, en disant qu'il collaborait beaucoup avec les communes. Personnellement, je pense que ce n'est pas le cas. Je ne veux pas ici entraîner une polémique, mais la liste est longue de projets sur lesquels vous n'avez pas collaboré avec les communes. Je pense que vous faites fausse route.
On a évoqué ce matin, dans le cadre notamment de ce projet-ci, le problème du parking d'échange de Sécheron, qui est un excellent exemple de la façon dont l'Etat a mal géré ce dossier. Ce parking qui devait être réalisé depuis longtemps est toujours bloqué, et l'on attend de voir ce qu'il va se passer. Je ne prendrai pas d'autres exemples, car ce dernier est particulièrement signifiant.
Deuxièmement, je constate que vous avez, dans votre intervention, longtemps «tourné autour du pot», et que vous n'avez pas voulu prendre position sur les propositions concrètes qui sont débattues ici. Je ferai un simple parallèle: en matière d'aménagement du territoire, la concertation avec les communes se fait dès le début des démarches. J'estime qu'il doit en être de même en matière de politique des transports. Vous avez du reste prétendu tout à l'heure qu'il y avait une magnifique concertation au sein d'une commission dont on entend, à vrai dire, pas beaucoup parler, et qui serait paritaire. En fait, je constate qu'avec les principaux protagonistes vous n'entendez pas procéder à une collaboration et à une concertation. Je trouve que cette position du Conseil d'Etat est grave, et vous verrez que les échecs dont le Conseil d'Etat - vous en particulier - et la Ville de Genève sont responsables vont s'accumuler si vous ne changez pas d'attitude.
Le président. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix l'amendement de M. Grobet, à la section 2, intitulée «Plan directeur du réseau routier» (nouvel intitulé), le premier paragraphe de l'article 2 est modifié comme suit:
«Le Conseil d'Etat établit, en collaboration avec les communes, un plan directeur du réseau routier (...)».
J'aimerais que les députés soient à leur place. Je vois des mains qui ne se lèvent pas du côté libéral.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
L'article 2 ainsi amendé est adopté, de même que la section 2.
(Remarque.)
Le président. Monsieur Odier, vous reviendrez en troisième débat ! Je donne suffisamment de temps pour voter. Nous procéderons désormais par vote électronique, mais j'aimerais que les gens soient à leur place. J'ai bien regardé, je ne vais pas nommer les députés qui n'ont pas levé la main, mais je les ai vus ! ( Chahut.) Je sais encore ce que je fais !
A l'article 3, alinéa 3 de la section 2bis intitulée «Hiérarchie du réseau routier» (nouvelle), M. Grobet propose un amendement, toujours dans le même sens, en ajoutant, après «Une carte est établie à cette fin, en collaboration avec les communes.», la phrase suivante: «Elle est soumise à l'approbation de leurs conseils municipaux».
Monsieur Odier, voulez-vous la parole sur cet amendement ? Tel n'a pas l'air d'être le cas. En conséquence, je mets aux voix, par vote électronique, cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 37 non contre 35 oui.
Mis aux voix l'article 3 est adopté de même que l'article 3A.
Le président. Nous passons à l'article 3B, alinéa 2, où M. Grobet propose l'amendement suivant: «Des études doivent toutefois être effectuées pour réaliser partout où cela est possible des pistes ou bandes cyclables.»
Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Il s'agit ici d'une autre question que celle des compétences communales qui, apparemment, n'ont pas l'air de beaucoup intéresser les partis de droite. Par contre, en commission, certains députés des partis de droite avaient expressément indiqué que, dans la mesure du possible, il fallait réaliser des pistes et bandes cyclables le long des voies principales. Cet amendement est relativement modeste, puisqu'il demande d'étudier la possibilité de réaliser des pistes ou bandes cyclables le long de ces artères. J'ose espérer que cet amendement recevra un large appui.
M. Robert Cramer. Je tiens à dire que, pour ma part, je soutiens cet amendement pour deux raisons: premièrement, la loi fédérale sur la circulation routière stipule qu'à part sur les autoroutes les cyclistes peuvent toujours emprunter une voie de circulation, que celle-ci soit désignée comme principale, secondaire ou autre. C'est une obligation légale. Dès l'instant où ils peuvent emprunter cette voie de circulation, on a tout intérêt à veiller à leur sécurité. C'est une première raison de soutenir cet amendement.
La seconde tient à l'organisation du trafic: sur ces voies qui sont des principales, donc des voies de transit, donc des voies de grande circulation, plus on arrive à isoler les cyclistes de la circulation, plus cette dernière se fera dans des conditions satisfaisantes.
Je crois qu'il y a là deux raisons évidentes qui postulent en faveur de cet amendement. Du reste, quel que soit le sort qui sera réservé à cet amendement, ces études seront faites de toute façon.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 40 oui contre 34 non et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 3B ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous continuons avec l'article 3C, où il y a également deux amendements proposés par M. Grobet. Je vous cède la parole, Monsieur Grobet.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je vous demanderai de bien vouloir soumettre séparément mes deux amendements.
Le président. Le premier est celui qui propose: «en collaboration avec les communes», et le deuxième: «aux conseils municipaux concernés», n'est-ce pas ?
M. Christian Grobet. J'ose espérer que le premier amendement aura également le soutien de M. Cramer, puisqu'il nous a dit tout à l'heure que la collaboration avec les communes n'était pas judicieuse au début des études, mais qu'elle allait de soi en fin de course. Comme il s'agit dans cet article de modifications du plan, j'espère que M. Cramer voudra bien cette fois-ci admettre qu'il y a lieu de collaborer avec les communes.
En ce qui concerne le deuxième amendement, il s'agit d'un simple devoir d'information élémentaire, et j'ose espérer que le Grand Conseil, à défaut de vouloir consulter les communes, les informera au moins de la modification qui pourrait être apportée à la hiérarchie routière.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous votons sur le premier amendement. La deuxième phrase de l'article 3C est modifiée comme suit:
«La carte est réexaminée tous les quatre ans en collaboration avec les communes et, au besoin, remaniée.»
Nous procédons par vote électronique car, comme vous le voyez, les votes sont très serrés.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 38 oui contre 35 non.
Le président. Je mets aux voix le second amendement que voici, toujours à l'article 3C, dernière phrase:
«La carte fait l'objet d'un rapport aux conseils municipaux concernés et au Grand Conseil, qui peuvent formuler leurs recommandations par voie de résolution dans un délai de six mois».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 39 non contre 37 oui.
Mis aux voix, l'article 3C ainsi amendé est adopté par 38 oui contre 34 non et 3 abstentions, ainsi que la section 2bis dans son ensemble.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Chacun vote comme il l'entend, et je proclame simplement les résultats.
Nous passons à la section 2ter: Classification administrative et désaffectation des voies publiques (nouvelle numérotation).
Mis aux voix, l'article 4, alinéas 1 à 4, est adopté.
Le président. Monsieur le rapporteur de minorité propose l'adjonction d'un cinquième alinéa à cet article 4. Je lui donne la parole.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, il y a des routes cantonales et des routes communales. Si l'on devait supprimer des routes communales, qui font partie du domaine public communal, il faudrait obligatoirement que le conseil municipal de la commune concernée soit d'accord. Cet article va de soi, mais je pense que le rappeler n'est pas inutile, même si la question est réglée de fait par la loi sur l'administration des communes. Je crois tout de même qu'il faudrait que notre loi soit claire à ce sujet.
Le président. Merci. La parole est à M. le conseiller d'Etat Cramer.
M. Robert Cramer. Concernant cet amendement à l'article 4, il faut encore préciser, à la suite de l'intervention de M. le rapporteur de minorité, que l'on change totalement de sujet. Jusqu'à présent, nous avons parlé de questions liées à la circulation, du type: quel genre de trafic sur quel genre de rue ? Ici, on passe à autre chose puisqu'on parle de la classification administrative des rues, en d'autres termes: quelles rues appartiennent à qui ?
Si l'on modifie le statut des rues, si l'on prend une rue à une commune ou, à l'inverse, si on entend lui en imposer une qu'elle devra entretenir, il semble effectivement évident qu'on devra le faire avec l'accord de la commune. Cela doit d'ailleurs certainement découler également d'autres législations. On ne peut pas commencer à faire du traficotage en cette matière sans que tous les partenaires soient d'accord. C'est la raison pour laquelle je ne vois aucune objection à ce que cet amendement, qui constitue une précision, soit adopté.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Madame la rapporteuse de majorité, je vous donne la parole.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse de majorité. Concernant cet amendement, ainsi que les précédents qui ont malheureusement été acceptés, j'aimerais rappeler qu'au moment de la discussion au Grand Conseil sur deux projets de lois qui visaient à transférer des compétences aux conseils municipaux des communes, les habitants des communes s'étaient prononcés à l'unanimité contre ces projets. Les conseils administratifs des communes s'étaient également opposés à ce transfert de compétences. Je pense qu'il serait bon que certains députés, notamment ceux qui siègent également dans les communes, s'en souviennent.
M. Grobet pourrait même aller plus loin dans ses amendements. Cependant, l'esprit de ce projet de loi est de donner une vision globale de la politique de circulation et des transports dans notre canton, et non pas de donner quarante-cinq visions différentes en cette matière.
Mais s'il faut que non seulement chaque commune, mais aussi chaque conseil municipal ait son propre ingénieur cantonal de la circulation, on pourrait carrément transférer cette compétence au peuple, pour que chacun dans la population puisse nous dire ce qu'il entend faire en matière de circulation ! C'est en effet vers cela que l'on va... (Brouhaha.)
Je le rappelle, Genève est un canton-ville. Il est très important que nous ayons une vision globale en matière de transports; nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir quarante-cinq visions différentes ou davantage en laissant croire à chacun qu'il est ingénieur de la circulation...
Je vous invite à refuser cette proposition d'amendement et vous annonce que je reviendrai en troisième débat sur les amendements acceptés.
Le président. La parole est à M. le rapporteur de minorité, puis nous voterons.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. J'aimerais répondre à Mme Ruegsegger qui fait une confusion entre des compétences relevant de dispositions fédérales sur la circulation routière qu'il s'agissait d'étendre aux communes - ce qui, effectivement, n'a pas été accepté par le peuple genevois - et le problème du statut des routes communales. Je rappelle que les routes communales relèvent du domaine public communal et qu'on ne peut pas, en quelque sorte, exproprier une commune de son domaine public, sans que celle-ci ne donne son accord. C'est tout ! Même si vous refusez cet article qui me paraît aller de soi, il faudra bien, si l'on veut «cantonaliser» une route communale, que la commune du lieu de situation donne son accord.
Le président. Je mets aux voix, par vote électronique, cet amendement qui propose un alinéa 5 à l'article 4:
«La modification du statut des routes communales, quais, ponts, places et tunnels, en routes cantonales est soumise à l'approbation du Conseil municipal des communes concernées».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 39 non contre 38 oui.
Mis aux voix, l'article 4A est adopté, ainsi que l'article 15 alinéa 2 et l'ensemble de la section 2ter.
Mis aux voix, l'articles 1 souligné est adopté, de même que l'article 2 souligné.
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? Il l'est. Mme la rapporteuse de majorité, vous avez la parole.
Troisième débat
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse de majorité. Je propose un amendement à l'alinéa premier de l'article 2, qui consiste à annuler l'amendement qui a été accepté tout à l'heure pour revenir à la version initiale adoptée par la commission.
Je proposerai également tout à l'heure un amendement à l'article 3C pour revenir à la version initiale. (Protestations.)
Le président. Nous procéderons article par article. Le groupe des Verts est prié de ne pas perturber le débat...
Monsieur le député Odier, je vous donne la parole sur ce point.
M. Jean-Marc Odier (R). Je soutiens totalement l'amendement présenté par la rapporteuse de majorité et dépose également cet amendement que j'avais préparé par écrit, ainsi que ceux pour les articles 3B et 3C.
Le président. Merci ! Il suffira qu'un député ou la rapporteuse de majorité propose les amendements sur lesquels vous voulez revenir.
Je mets donc aux voix ce premier amendement qui, à l'alinéa premier de l'article 2, propose la suppression des mots «avec les communes» pour revenir à la version initiale, soit:
«Le Conseil d'Etat établit un plan directeur du réseau routier (...).»
Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 40 oui contre 39 non.
Mis aux voix, l'article 2 ainsi amendé (retour au texte initial) est adopté, ainsi que les articles 3 et 3A.
Le président. Nous sommes toujours en troisième débat. Madame Ruegsegger, vous aviez un autre amendement ?
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse de majorité. Concernant l'article 3B, je crois que c'est M. Odier qui voulait présenter l'amendement.
Le président. Je n'avais pas M. Odier sur mon tableau. Monsieur Odier, allez-y, ne perdons pas de temps !
M. Jean-Marc Odier (R). Merci, Monsieur le président. L'amendement parvient à l'instant à votre bureau. Il s'agit de revenir, à l'article 3B, sur l'amendement proposé initialement par M. Grobet, qui demandait que des études soient faites pour les vélos chaque fois que cela est possible.
Ce projet de loi a essentiellement pour but de clarifier la situation et d'avoir une vue d'ensemble. Il faudra que ce soit fait dans ce cadre-là, et nous ne voulons pas inscrire dans la loi que des pistes cyclables seront impérativement et partout étudiées. C'est pourquoi je vous demande de soutenir ce nouvel amendement, qui supprime la proposition acceptée par notre Conseil à la demande de M. Grobet.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Je tiens simplement à constater que la vue d'ensemble de M. Odier s'arrête manifestement aux automobiles et n'atteint pas les autres usagers des voies de circulation !
M. Alain Meylan (L). J'aimerais soutenir l'amendement présenté par M. Odier. Je crois en effet que nous avons rappelé, au début des débats de cet après-midi, le caractère général de cette loi. Elle vise à fixer un cadre à la définition de tout ce qui est trafic et déplacements individuels en vélo, motocycle ou voiture, et je ne vois pas l'utilité d'ajouter un caractère spécifique - pratiquement une lex specialis - dans une loi générale.
Cela dit, il est vrai que des études doivent être faites pour les pistes cyclable là où cela est possible, mais je crois que les mentionner dans cette loi-là n'est pas judicieux. Je demande donc de soutenir l'amendement de M. Odier.
M. Sami Kanaan (S). M. Meylan vient de nous dire que l'on ne prévoit pas de dispositions spéciales dans une loi générale. Il utilise pour cela des mots latins, un classique du droit. Le problème, c'est que vous façonnez une loi spéciale ! C'est une loi spéciale pour le trafic motorisé. N'utilisez donc pas des arguments de forme, tout à fait déplacés. Si vous voulez rééquilibrer le trafic, vous êtes obligé de donner une chance, au nom de la constitution que vous avez vous-mêmes défendue, à des modes de transports forcément défavorisés de par leurs caractéristiques de base. C'est là un constat objectif !
Nous avons voté sur un amendement tout à fait pertinent, qu'une majorité a accepté en deuxième débat... C'était aussi une manière de confirmer ce que vous dites en principe, soit que vous ne voulez pas accorder la priorité absolue aux voitures et au trafic motorisé, et que vous voulez donner une chance aux autres modes de transport. En revenant sur l'amendement voté, vous confirmez ce que l'on craint, c'est-à-dire que vous voulez vraiment une loi qui consacre le tout-voiture sur le réseau routier. Ne dites pas le contraire, c'est exactement ce que vous affirmez en revenant sur cet amendement !
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. J'ignore si M. Odier, à la suite de ces interventions, aura envie ou non de retirer son amendement. Quoi qu'il en soit, j'ai bien compris l'intervention de M. Meylan; si ce texte devait ne pas figurer dans la loi, il figurerait dans le règlement d'application. C'est dans ce sens que j'interprète vos propos.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Odier, à savoir le retour au texte initial de l'article 3B, soit:
«Les réseaux primaire et secondaire sont affectés prioritairement au trafic motorisé public et privé. Leur aménagement est conçu en ce sens.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 43 oui contre 38 non.
Mis aux voix, l'article 3B ainsi amendé (retour au texte initial) est adopté.
Le président. Nous en arrivons à l 'article 3C et au dernier amendement de M. Odier, qui vise également, en supprimant «en collaboration avec les communes», à revenir au texte initial. Monsieur Odier, je vous cède la parole.
M. Jean-Marc Odier (R). Comme pour l'article 2, alinéa 1, nous demandons par cet amendement qu'à l'article 3C les termes «en collaboration avec les communes» soient supprimés.
Je fais confiance au Conseil d'Etat, car il vient à l'instant de nous démontrer qu'il saura prendre en considération l'avis des communes, d'une manière ou d'une autre. Il est vrai que, lorsqu'on veut une loi-cadre avec une vue d'ensemble, il paraît difficile de collaborer ave quarante-cinq communes. Je sais bien qu'il y a 400 000 ingénieurs de la circulation à Genève, mais je pense que ce ne serait pas possible d'agir ainsi.
Je fais également confiance au CODEP. D'ailleurs, dans ses travaux, la commission est allée elle aussi dans ce sens, puisqu'elle a voulu donner un cadre légal à ce Conseil des déplacements. Le CODEP n'était jusqu'à présent qu'un organe consultatif, il est maintenant entré dans une loi. Je pense qu'on peut lui faire confiance et compter sur des propositions consensuelles au Grand Conseil. J'ai toute confiance en cette manière de faire et en la sagesse de notre Conseil d'Etat.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC), rapporteuse de majorité. Je voulais simplement rappeler qu'il y a eu deux amendements proposés à cet article 3C. On peut voter de façon séparée, ou en une seule fois si M. Odier le désire, mais n'oublions pas qu'un alinéa concerne les conseils municipaux.
Le président. Madame la rapporteuse, excusez-moi, mais le deuxième amendement dont vous parlez n'avait pas été accepté. Par conséquent, il n'y a pas lieu d'y revenir.
Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez la parole.
M. Christian Grobet (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vois qu'une fois de plus, la droite a, selon ce dont on parle, des positions diamétralement opposées ! Quand il s'agit de bloquer la construction de logements locatifs et de logements sociaux dans les zones de développement, au profit de la propriété par étage, vous déposez des projets de lois en indiquant qu'on ne peut construire des HLM, ni même des logements locatifs, sans l'accord des communes ! Par contre, vous refusez ici une proposition extrêmement modeste qui ne demande même pas l'accord des communes, mais une simple collaboration qui devrait aller de soi... Cela démontre bien que vous êtes extrêmement sélectifs dans la manière dont vous voulez utiliser - je dis bien «utiliser» ! - les pouvoirs des communes.
M. Alain Meylan (L). Il faut rappeler à ce parlement qu'il existe actuellement une commission consultative de la circulation, qui va disparaître au profit du CODEP, comme le mentionnent à la section 2 les articles 15 et 16 de la loi que nous allons voter. Cette commission consultative de la circulation fonctionnait de manière satisfaisante; elle a été doublée du CODEP, qui était plus spécifique et représentait les intérêts des différents utilisateurs de la route. Il faut dire également qu'à la commission consultative siégeait un représentant des communes; celles-ci étaient donc largement consultées et informées. Cette commission va être remplacée par le CODEP, et je crois qu'il y a déjà eu un long débat en commission pour savoir combien de personnes y siégeraient. Il me semble que le nombre de douze permettra au Conseil d'Etat d'avoir une commission consultative, soit le CODEP, tout à fait en phase avec les différents intervenants, dont les communes.
Je soutiens donc l'amendement de M. Odier.
Le président. Merci Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, je fais mettre au voix l'amendement de M. Odier, qui propose de reprendre le texte initial de l'article 3C, soit:
«Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution et établit la carte de la hiérarchie du réseau routier. La carte est réexaminée tous le quatre ans et, au besoin, remaniée. La carte fait l'objet d'un rapport au Grand Conseil, qui peut formuler ses recommandations par voie de résolution dans un délai de six mois.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 42 oui contre 40 non et 1 abstention.
Mis au voix, l'article 3C ainsi amendé (retour au texte initial) est adopté.
Le président. Je mets maintenant aux voix le projet de loi dans son ensemble.
La loi 8748 est adoptée en trois débats article par article et dans son ensemble, par 44 oui contre 40 non.
Suite du débat
Le président. Nous passons au point 79 de notre ordre du jour, profitant de la présence de M. Cramer.
Afin d'éviter que les gens ne s'en aillent et ne se plaignent ensuite d'un changement de majorité, je vous rends attentifs au fait que le rapport de majorité est celui de Mme Leuenberger.
M. Pierre Vanek, qui avait un certain nombre d'amendements à proposer, est l'auteur d'un rapport de minorité qu'on lui a demandé de préparer. Nous avions commencé à examiner les amendements, mais nous n'en avons voté aucun, puisque nous n'avions pas le texte. En revanche, tout le débat a eu lieu. Ce que je vous propose, c'est de voter, en argumentant brièvement si besoin est, les amendements encadrés. Dans le rapport de M. Vanek, il y a sept amendements.
Il est donc inutile de reprendre tout le débat: c'est oui ou c'est non !
Présidence de M. Pascal Pétroz
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, vous dites que le débat a eu lieu et qu'il ne s'agit que de voter, mais je pense quand même que, si, sur le fond de la politique énergétique, nous avons eu toutes sortes de débats, les modifications proposées ici méritent que nous ayons un petit échange.
Je rappelle que si je suis à cette table, assis à côté de Mme Leuenberger, c'est parce que j'avais modestement reproposé, le 28 février, une série d'amendements qui n'allaient pas contre le cours général de la politique cantonale de l'énergie, mais qui, au contraire, proposaient d'affiner des questions et d'aller dans le sens de cette politique antinucléaire que réclame la Constitution genevoise. Cet après-midi-là, une majorité de ce Grand Conseil, craignant- comme cela s'est produit à quelques occasions aujourd'hui - de n'être pas majoritaire, avait décidé que le vote devait être reporté, que l'urgence de cette politique de l'énergie était tout à coup suspendue, et qu'il fallait prendre le risque d'attendre quelques mois pour pouvoir discuter de ces éléments. Alors que mes amendements n'avaient rien de bien révolutionnaire !
Vous m'avez proposé, Monsieur le président, de prendre les amendements encadrés dans mon rapport: j'obtempère. Ces objets ont parfois été le sujet de débats et de votes contradictoires en commission de l'énergie. Le premier amendement encadré porte sur la page 37 du document que chacun de nos collègues a sans doute sous les yeux... (L'orateur est interpellé.)Mme Berberat indique qu'elle n'a pas reçu le document... Excusez-moi, mais il s'agit évidemment du point inscrit à l'ordre du jour, le RD 449, et Mme Berberat l'a certes reçu, comme tout le monde...
J'avais insisté, à l'époque, quand on m'avait demandé le rapport de minorité, pour que ce document soit distribué avec les rapports, afin que l'on sache sur quoi on travaille et ce qu'on est train d'amender. On peut être d'accord ou non avec ce que je vous propose, mais il est quand même utile de savoir sur quoi j'interviens.
Enfin, si vous voulez suspendre la séance pour que les députés puissent se munir du texte sur lequel on vote, on peut le faire, sinon je me permettrai de continuer.
Le président. Je vous interromps ici, Monsieur le rapporteur. Le texte a été distribué lorsque nous avons traité de ce sujet, à l'époque, et nous avons demandé qu'une redistribution soit faite. Comme cela, les choses sont claires !
M. Pierre Vanek. On parle donc de la conception générale de l'énergie, actualisée de manière quadriennale à chaque législature, qui vise à faire appliquer l'article 160D de la constitution - issu de l'initiative «L'énergie, notre affaire» - afin qu'il ne soit pas une déclaration platonique, mais déploie ses effets.
A la page 37 de ce document, une indication stipule que l'objectif du canton est de maintenir la quote-part de l'énergie hydraulique dans la consommation finale... «malgré l'ouverture du marché de l'électricité».
En effet, Mesdames et Messieurs, on pouvait avoir des craintes quant à l'énergie hydraulique et son avenir dans le cadre de l'ouverture du marché de l'électricité qui est la privatisation, soit la soumission pure et simple aux lois du marché de l'électricité, pourtant un bien vital qui ne peut pas être traité de la même manière qu'on traite des savonnettes !
On en a vu un exemple tout récent - et le retard de ce débat permet de l'évoquer - survenu en Amérique du Nord, lors de la dérégulation du marché de l'énergie électrique qui a entraîné cette panne monstrueuse qui a privé de courant entre 50 et 60 millions d'habitants pendant des dizaines d'heures et qui a engendré des coûts énormes quant aux conséquences économiques ! En effet, ces habitants n'ont pas été privés que d'électricité, ils ont aussi manqué d'eau courante et de stations d'épuration qui fonctionnent... Et parmi ceux qui ont suivi cette actualité par intérêt pour les questions énergétiques et électriques - jusqu'aux éditorialistes du «New York Times» qui ne peut guère être considéré comme un organe de l'Alliance de gauche - on s'accorde à dire que c'est la dérégulation sauvage qui est la cause structurelle de ce type de pépin ! Cet accident aurait pu avoir des conséquences bien plus graves, puisqu'une série de centrales nucléaires, situées dans l'aire de cette panne électrique, ont dû être arrêtées en urgence. Et l'on sait que ce genre de choses peut poser des problèmes et que la situation aurait pu être plus grave encore...
Depuis le dépôt de ce rapport et de cette proposition de modification de la conception cantonale de l'énergie par le Conseil d'Etat, le peuple helvétique a donné un avis concernant le processus de privatisation ou de libéralisation du marché de l'électricité, processus impulsé par le département de M. Leuenberger... Le peuple a dit non à cette LME !
Je proposais - très modestement - dans ce premier amendement une note de bas de page destinée à actualiser ce point, sur l'ouverture du marché de l'électricité, qui indique simplement ceci: «La LME a été rejetée en votation populaire le 22 septembre 2002. L'obstacle évoqué quant au maintien de la quote-part d'électricité d'origine hydraulique tombe. Pour Genève, la politique énergétique doit viser à augmenter la production d'électricité hydraulique.»
Nous avons un potentiel d'augmentation - modeste, certes - à travers la rénovation, notamment de Chancy-Pougny, entre autres, et vous le savez tous... Cela pour réaffirmer que, concernant la loi sur le marché de l'électricité et le processus de dérégulation de ce secteur, le peuple avait dit son mot !
M. John Dupraz (R). Je crois qu'avant d'entrer dans le débat proprement dit, concernant cette conception générale en matière d'énergie, il faut faire un peu d'histoire.
Je rappelle que ce dossier a été étudié en commission cantonale de consultation en matière d'énergie. M. Vanek siège à cette commission, mais il y brille par son absence... (Protestations.)Et le concept présenté par le Conseil d'Etat résulte des travaux de cette commission.
En commission parlementaire, M. Vanek s'est offusqué du fait qu'il n'y ait pas de demandes d'auditions; j'ai fait savoir à cette commission-là que, la commission consultative ayant bien travaillé, tout le monde trouvait son compte dans ce concept cantonal.
M. Vanek a suscité des auditions; nous avons entendu des gens et M. Vanek a proposé une quinzaine d'amendements... Que je qualifierai d'«amendements de pacotille». Ils ne font que modifier des virgules ou des points-virgules du texte existant, ils ne changent strictement rien au concept présenté par le Conseil d'Etat après cette très large consultation. En fait, M. Vanek se conduit en véritable saboteur... (Protestations.)
Etant membre de la commission consultative, où il n'a jamais siégé, il se permet, en commission parlementaire, de venir avec des amendements qui n'amènent rien. Maintenant, bien que la moitié de ses amendements aient été acceptés, il vient encore avec un rapport de minorité, ce qui a retardé l'approbation de ce concept par ce Grand Conseil, empêchant également le Conseil d'Etat d'agir, conformément à la Constitution qui l'enjoint d'opérer en fonction d'un concept cantonal.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demanderai de voter le concept tel qu'il ressort de la présentation du Conseil d'Etat, sans les amendements qui figurent dans le rapport de majorité, afin de donner une bonne leçon à M. Vanek et pour lui apprendre à se conduire correctement ! Quand on fait partie d'une commission consultative, on y siège avant de semer la pagaille en commission parlementaire, comme il l'a fait !
M. Rémy Pagani (AdG). Je trouve que M. John Dupraz, une fois de plus - et il n'est pourtant pas 20h - use de propos tout à fait inadmissibles à l'encontre de mon collègue. Je relève d'ailleurs que vous feriez bien, Monsieur le président, afin de maintenir une certaine convivialité entre nous, de rappeler M. John Dupraz à l'ordre !
Il est inadmissible que M. Dupraz se permette de traiter mon collègue de cette manière, alors qu'il n'y a pas trois heures nous aurions aussi pu qualifier certains d'entre vous, Mesdames et Messieurs les députés, de «saboteurs» quand il s'est agi de renvoyer une motion en commission, alors qu'elle y avait été traitée longuement ! Nous ne l'avons pas fait. Cela fait partie du droit de chacun d'entre nous... (Remarques.)
Nous sommes dans un parlement de milice. En l'occurrence, cela comporte aussi des inconvénients. Si nous voulons continuer à être un parlement de milice, il faut que les uns et les autres faissent preuve d'un peu de tolérance par rapport au travail de chacun d'entre nous ! Aussi, je demande à M. Dupraz de présenter ses excuses quant aux propos inadmissibles qu'il a tenus à l'encontre de mon collègue Pierre Vanek.
Le président. Calmons-nous tous ! Voyez, il fait encore beau dehors, c'est la fin de l'été... Apprécions cela et que la sérénité revienne dans dans cette salle!
M. John Dupraz (R). Ce que je reproche à M. Vanek, contrairement à ce que dit M. Pagani, ce n'est pas une question d'heures ! Il vous faut changer d'horloge ! Le problème, c'est que M. Pagani est à la commission consultative sur les questions énergétiques, il n'y est jamais allé... (Protestations.)Il n'y est jamais allé et, en commission parlementaire, il conteste le travail qui a été fait par des amendements de pacotille. Cela n'est pas sérieux! Parce que, par son rapport de minorité, il a empêché ce concept cantonal d'entrer en vigueur beaucoup plus tôt et il a empêché le Conseil d'Etat d'agir.
Je trouve cela inacceptable, je trouve que c'est du sabotage ! Alors, que cela plaise ou non à M. Pagani, cela m'est complètement égal ! Monsieur Pagani, j'ai été élu démocratiquement; je m'exprime librement; que cela vous plaise ou pas, cela m'est complètement égal !
M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur le président, je tiens simplement à faire remarquer que, une fois de plus, M. John Dupraz «se mélange les pinceaux» ! Je n'ai jamais participé à aucune...
Une voix. Il s'est trompé !
M. Rémy Pagani. Oui, effectivement, il s'est trompé ! Il ferait mieux de tourner plusieurs fois sa langue dans sa bouche avant de dire des bêtises.
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Très rapidement, Monsieur le président, j'aimerais dire quatre choses. La première concerne ces amendements. Une audition a effectivement été sollicitée par la Coordination énergie, qui comprend bien d'autres personnes que moi et qui sont membres de la commission consultative cantonale.
Les amendements que j'ai repris - qui ne sont pas des «amendements de pacotille» inventés par Pierre Vanek, pour se faire voir ou se faire entendre - ressortent de la réflexion menée par la Coordination énergie sur cette conception.
Il est parfaitement normal, même après que la commission consultative cantonale a terminé ses travaux, qu'il y ait une réflexion qui débouche sur des amendements de la conception de l'énergie dans le cadre du débat parlementaire... C'était le cas lors de la dernière conception cantonale de l'énergie, où le parti libéral, pourtant représenté aussi dans la commission consultative, avait déposé un rapport de minorité et proposé... (L'orateur est interpellé.)
Elle a été votée à l'unanimité et on a effectivement fait une dérogation ! C'était M. Mauris qui était ici, je rapportais pour la majorité, et le parti libéral avait présenté un certain nombre d'amendements... On peut retrouver, Madame Berberat, le document en question! Il est même probable que je l'aie ici dans une chemise... Cela n'est pas l'essentiel du débat d'aujourd'hui, c'est de l'histoire.
Quant à M. Dupraz qui m'invective en me traitant de «saboteur»... Si proposer quelques amendements et un débat sur la politique cantonale de l'énergie est le sabotage du ronron parlementaire, eh bien, oui, je suis un saboteur ! M. Dupraz a l'habitude de m'invectiver... Il m'a traité, quand nous débattions en cette enceinte... (L'orateur est interpellé.)
Non, je n'emploie pas de termes aussi forts ! A l'époque où la loi sur le marché de l'électricité était en préconsultation, parce que je décrivais les conséquences négatives de ce processus de dérégulation que j'ai évoquées tout à l'heure, M. Dupraz s'est permis de me traiter... Enfin, c'était un mot grossier, je ne reprends pas cette injure. Donc, de me traiter de «terroriste».
Il y a apparemment une majorité de «terroristes» dans ce pays, puisqu'une majorité de citoyennes et citoyens ont refusé cette loi le 22 septembre dernier! Nous marquons incessamment l'anniversaire de ce vote, que je qualifierai d'«historique», parce que c'est la première fois que les citoyens ont pu se prononcer sur ce type de question: sur La Poste, ils n'ont pas pu le faire, le référendum n'avait pas abouti; sur la loi sur le marché de l'électricité, ils ont pu se prononcer, et ils ont dit non au cours néolibéral que, malheureusement, M. Dupraz défendait! Je comprends que M.Dupraz soit un peu «chatouilleux» sur ce point, puisqu'en effet il était non pas «terroriste», mais rapporteur aux chambres fédérales à propos de la loi sur le marché de l'électricité, qui a été refusée ! Il dit par ailleurs que ces amendements ne changent rien, qu'il veut gagner du temps... Qu'il vote ces amendements, dans ce cas !
Je déclare simplement être gêné de voter un texte qui évoque l'ouverture du marché de l'électricité comme s'il ne s'était rien passé le 22 septembre dernier. Sans «en faire tout un plat», je propose modestement d'ajouter une note de bas de page, qui prenne acte du rejet de la loi du marché de l'électricité et qui mentionne que, dans cette situation, on vise au maintien ou au développement de la quote-part d'électricité d'origine hydraulique à Genève. C'est de cela que nous débattons maintenant, et non pas des qualités ou des défauts de Pierre Vanek ou de John Dupraz !
Revenons au sujet qui nous concerne tous... On se prononce sur un texte clair: sommes-nous, oui ou non, pour la prise en compte de ce projet de la LME ? Cette dernière année, ce projet est quand même l'événement majeur sur la scène de l'énergie! Doit-on prendre en compte, ou pas, cet événement dans le document censé régir ou orienter notre politique de l'énergie pendant quatre ans? C'est de cela qu'il s'agit !
Par ailleurs, Monsieur Dupraz, je reconnais bien volontiers ne pas avoir été présent à la commission consultative cantonale ! Je vous annonce, et cela vous fera plaisir, que je me retire de cette commission et que l'Alliance de gauche a trouvé un remplaçant extrêmement compétent. Une seule personne ne peut pas tout faire dans le domaine de l'énergie, vous avez raison de le souligner ! J'ai effectivement privilégié mon rôle de député, et je crois qu'il est difficile dans cette enceinte de me le reprocher.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Pour une fois, je suis d'accord avec ce qu'a dit M. John Dupraz : je regrette aussi la manière de travailler de M. Vanek. En effet, nous avons longuement discuté de ce rapport en commission et, lorsque Mme Leuenberger a déposé son rapport, dans le délai, nous n'avions pas le rapport de minorité de M. Vanek. Or nous avions déjà discuté de cette conception de l'énergie.
On attend, depuis maintenant neuf mois, l'adoption de ce concept, et notre groupe va soutenir le rapport de majorité de Mme Leuenberger et adopter la résolution telle quelle pour toutes ces raisons-là.
M. René Desbaillets (L). Je crois qu'il est difficile, pour nos collègues députés qui ne sont pas membres de la commission de l'énergie, d'écouter notre débat sur ce rapport. En effet, si l'on n'a pas pris une soirée entière pour lire tout ça, il est tout à fait normal qu'on n'y comprenne rien du tout! J'ai moi-même participé à cette commission, et j'ai de la peine à y comprendre quelque chose... En revanche, je félicite notre collègue Sylvia Leuenberger de son rapport qui reflète fidèlement l'esprit de la commission.
Je me permettrai - je n'aime pas beaucoup me citer, mais je le ferai quand même - de relever un point qui a certainement échappé à passablement de personnes: il s'agit d'une nouvelle petite proposition concernant les tarifications de l'électricité. Cette proposition, que j'ai faite, demande que l'on étudie le prix de l'électricité en fonction de son utilisation: professionnelle, ménagère ou de loisirs. Ce procédé éviterait de nombreux problèmes et permettrait à toutes les petites PME et aux artisans de bénéficier d'un prix de l'électricité compétitif, et cela au niveau international. Par ailleurs, j'estime que, lorsque je joue au football ou au tennis à 22, h je peux payer la lumière un peu plus cher que celle utilisée pour mon travail !
M. Gabriel Barrillier (R). Je me rallie à la proposition ou au souhait de M. Desbaillet, qui consiste à baisser le prix de l'électricité. Le groupe radical et moi-même acceptons ce rapport.
Je m'adresse au président du département pour lui demander...c'est difficile à exprimer, mais je le dirai quand même. Ce rapport consacre des compétences importantes données au ScanE, le service cantonal de l'énergie, qui effectue un travail remarquable, nous ne le contestons pas. Cependant, Monsieur le président, l'expérience relativement récente nous montre que vos excellents collaboratrices et collaborateurs sont guettés par l'activisme. Ils ont tendance à ne pas écouter les utilisateurs, les milieux professionnels, tout guidés qu'ils sont par leur souci d'économiser de l'énergie. Cela est bien, mais j'exprime ceci au nom de l'expérience que je vis depuis quelques semaines: de grâce, que vos collaboratrices et collaborateurs restent à l'écoute de tous les utilisateurs et de tous les milieux !
En effet, le succès de cette conception repose entièrement sur l'éventail des milieux qui seront convaincus de faire un effort. C'est pourquoi j'aimerais vous dire: «Attention à l'activisme!», qui pourrait ficher parterre tous les efforts que vous entreprenez pour faire des progrès.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve), rapporteuse de majorité. Je voudrais que l'on parle d'énergie dans ce débat, et pas forcément des rapports entre les députés. Il me semble important de dire que nous avons reçu un gros rapport et qu'il a trait à la conception générale de l'énergie. Ce document est un très bon outil de travail, il permettra au département d'effectuer son travail. Nous devons prendre acte de cela et voter la résolution avec quatre amendements, lesquels ont été acceptés par la majorité de la commission.
Juste pour rassurer M. Vanek, je rappelle qu'un de ces amendements indiquait favoriser et augmenter la production locale d'énergie hydraulique. C'est un élément de toute façon pris en compte dans les amendements qui ont été acceptés ! Donc, ceux qui veulent accepter l'amendement de M. Vanek peuvent évidemment le faire, mais, si on ne le vote pas, cela ne changera pas l'esprit de cette conception de l'énergie.
Par ailleurs, je pense, Monsieur Dupraz, que les quatre amendements acceptés par la commission sont importants et seront votés d'un bloc... (Remarque.)Ils ont été acceptés ! Et je crois qu'il n'y a pas lieu de revenir sur ces quatre-là, qui sont intéressants.
Quant à la proposition de M. Desbaillet, je ne sais pas s'il a déposé un amendement écrit. Mais il me semble que c'est une idée intéressante et qu'il faudrait déposer un amendement, que l'on soutiendrait évidemment.
Mon objectif prioritaire est de savoir que cette conception est fondamentale pour que le canton puisse mener une politique qui encourage les économies d'énergie et incite à développer les énergies renouvelables. Et plus vite on la votera, le mieux ce sera ! Je fais une entière confiance au département et à son service. Je remercie ce dernier d'être justement aussi actif, parce que c'est ce qu'on lui demande ! Je ne me fais donc pas de souci quant à l'application de cette conception générale en matière d'énergie... Ce n'est pas un projet de loi, c'est une conception! Et l'on pourra changer tous les mots qu'on veut: s'il n'y a pas de volonté derrière, cela ne sert à rien ! En l'état, la volonté de faire quelque chose existe, donc je suis rassurée.
Pour maintenir la paix dans cette enceinte, je m'abstiendrai de me prononcer quant aux derniers amendements de M. Vanek, parce que je veux que cette conception soit approuvée ! En revanche, je recommande d'accepter les quatre amendements appuyés en commission.
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Mme Roth-Bernasconi parle d'un rapport que j'aurais rendu en retard, ainsi que d'autres choses qui retardent les travaux... Non, je ne voulais pas faire de rapport, je suis venu dans cette enceinte proposer modestement quelques amendements, le vendredi 28 février, et l'on m'a dit: «C'est un scandale de proposer des amendements sans un rapport !». On m'a dit cela, non pas parce que l'unanimité de cette assemblée est avide de lire ma prose, mais simplement pour reporter le vote, parce qu'il y avait cet après-midi-là une crainte parmi les bancs de droite d'être minoritaires.
On a donc exigé que je fasse un rapport... c'était juste un peu stupide, ces amendements auraient été votés ou pas à ce moment-là. Comme l'a dit Mme Leuenberger, il s'agit d'une conception générale, et l'essentiel, c'est le débat qu'on tient autour et ce qu'en font par la suite les organes chargés de l'exécuter. J'espère que ce débat est clos, même si je pense qu'il est légitime - parce qu'il y a un débat... Il y a une tension entre des sensibilités différentes sur cette question. Il est utile que ce débat ait lieu et que des propositions d'amendements soient faites, y compris dans cette enceinte et non pas seulement dans les commissions consultatives qui sont un peu en vase clos quand même ! Alors, allons de l'avant, que chacun prenne ses responsabilités et se détermine sur les points que je propose, et l'affaire sera faite !
Par contre, je ne comprends pas M. Dupraz qui dit: «Tout le travail a été fait à la commission consultative; c'est sacrilège, de la part de Pierre Vanek, de vouloir toucher une virgule de cette conception», pour ensuite remettre en cause, par un amendement général, tous les travaux de la commission de notre Grand Conseil... (L'orateur est interpellé.)
Oui, je lis votre amendement, Monsieur Dupraz ! Il m'a été distribué: «Approuver la conception générale en matière d'énergie telle que présentée par le Conseil d'Etat». Cela veut dire revenir, non pas à six mois, mais à quelques mois avant encore, et faire fi même des éléments qui ont pu être l'objet d'un consensus ou, du moins, d'une majorité au sein de la commission de l'énergie de ce Grand Conseil ! C'est une manière particulière de travailler, et je crois que vous n'avez pas très bien réfléchi quand vous avez déposé cet amendement.
Mme Janine Berberat (L). Je voudrais dire à M. Vanek - qui joue les victimes quant à son rapport de minorité - que, s'il fait aujourd'hui un rapport de minorité, c'est parce que, le 28 février, la conception générale de l'énergie figurait dans les extraits. Etre dans les extraits, cela veut dire que la commission est d'accord à l'unanimité et qu'il n'y a pas de problème. Or, sachant qu'il allait déposer des amendements, M. Vanek a laissé inscrire la conception de l'énergie dans les extraits en se disant: «Je vais la jouer en douceur, parce qu'il y aura moins de monde, et je pourrai faire passer mes amendements»... (Rires.)C'est tout aussi redoutable et tout aussi regrettable que ce que vous nous reprochez par rapport à nos problèmes de majorité !
De deux choses l'une, soit vous êtes d'accord avec le travail de la commission et le rapport de Mme Leuenberger... J'en profite d'ailleurs pour souligner que nous sommes tous d'accord avec la deuxième conception. Et je félicite le président du département de réussir à nous réunir autour d'une conception générale de l'énergie, ce qui n'était pas le cas, auparavant.
On doit donc reconnaître qu'il y a un effort de chacun par rapport à cette conception générale de l'énergie; nous avons simplement admis qu'aux extraits il n'y avait pas d'amendements, que c'était quelque chose qui allait de soi. Et en venant avec huit amendements, Monsieur Vanek, vous ne jouiez plus le jeu ! C'est pour cela que nous avons stoppé les travaux, avec l'accord non seulement de la droite mais aussi de certains des membres de l'Alternative, qui étaient d'accord sur le fait que vous ne respectiez pas ce qu'il était convenu.
Deuxième chose: si la commission a accepté d'auditionner Coordination énergie, ce qui est une très bonne chose, elle aurait tout aussi bien pu entendre les intervenants privés, les gens qui travaillent sur le terrain, c'est-à-dire les organisations professionnelles. Alors, si tout le monde est d'accord, il n'est, justement, pas nécessaire d'auditionner... Mais dès l'instant où l'on demande à entendre Coordination énergie, qui représente une catégorie de personnes, on peut tout aussi bien écouter les professionnels !
Je partage le souci de M. Barrillier par rapport à l'esprit qui est en train de se répandre au SCAN et qui devient un peu trop activiste, s'éloignant du terrain politique que M. Cramer a toujours défendu - et que je souhaite qu'il continuera à défendre.
M. John Dupraz (R). M. Vanek dit que je ne sais pas très bien ce que je fais en proposant cet amendement, en revenant au texte initial, proposé par le Conseil d'Etat... Je sais parfaitement bien ce que je fais ! Il est vrai que j'ai voté une partie des amendements, ceux qui n'ont pas été acceptés sur la douzaine de ceux que vous nous avez proposés. Cependant, bien que nous ayons fait l'effort, dans un esprit de conciliation, d'accepter une partie de vos amendements, non seulement vous maintenez les autres amendements mais vous déposez un rapport de minorité ! Alors, à partir du moment où vous ne jouez pas le jeu parlementaire - qui veut que, lorsque l'on a trouvé un certain compromis et que cela vous a donné satisfaction, du moins partiellement... Et que vous persistez de façon entêtée dans votre projet de présenter des amendements et un rapport de minorité, alors, à ce moment-là, je ne me sens plus lié par les décisions de la commission ! Vous vous entêtez, je m'entête aussi !
Je trouve que vous avez fait preuve de mauvaise foi : vous n'étiez pas à la commission consultative, dans laquelle tout le monde a été auditionné. On ne peut tout de même pas suspecter M. Cramer, qui a proposé le concept, d'être un pro-nucléaire et de prôner un libéralisme à tout crin pour l'énergie électrique ! Alors, je trouve vraiment votre attitude destructrice, inutile, et n'apportant rien au parlement !
Je vous en conjure, Mesdames et Messieurs les députés, revenez au texte initial, qui est un bon texte ! Et il faut donner une leçon à M. Vanek sur la façon de se comporter et de travailler dans ce parlement.
Une voix. Une leçon, une leçon !
M. Robert Cramer. Je m'autorise à intervenir à ce stade du débat après quelques hésitations, mais il y a deux choses que je dois vous communiquer.
La première est relative au statut de ce débat: de quoi sommes-nous en train de parler et quelle va-t-être la décision prise ? Je dois vous renvoyer à la loi qui stipule, en son article 10, qu'au moins une fois par législature le Conseil d'Etat propose une conception générale de l'énergie au Grand Conseil, dans laquelle il fait le bilan de la conception précédente.
Eh bien, le Conseil d'Etat a été élu au mois de décembre 2001 et ses services, dont certains regrettent le trop grand activisme, ont fait leur travail, de sorte que vous puissiez être saisis, dans la première année de législature, d'une conception générale de l'énergie ! Et ceci après avoir suivi toutes les procédures qui s'appliquent à cela, c'est-à-dire après avoir longuement travaillé - et je comprends les réactions de M. Dupraz - dans une commission consultative qui réunit tous les acteurs du domaine de l'énergie à Genève.
Donc, nous avons eu le temps entre décembre 2001, période d'entrée en fonction du Conseil d'Etat, et le 4 septembre 2002, date à laquelle le rapport a été déposé, de rédiger un texte, de le soumettre à la commission consultative, qu'elle le travaille le temps nécessaire, qu'il soit mis au net, qu'il soit soumis au Conseil d'Etat, que ce dernier l'approuve et qu'il vous soit renvoyé ! Et l'on a fait tout cela entre le mois de janvier et la fin août ! Sur quoi la loi prévoit que vous avez alors six mois pour adopter ce texte; ce délai a commencé à courir le 4 septembre. En commission du Grand Conseil, vous vous êtes efforcés de respecter ce délai, raison pour laquelle, au mois de janvier, rapport a été fait au Grand Conseil sur la conception générale de l'énergie. Cela a été agendé, comme Mme Berberat l'a très justement rappelé tout à l'heure, au mois de février. Vous étiez dans le cadre du délai des six mois ! Aujourd'hui, ce délai est dépassé !
En d'autres termes, votre avis est certainement très intéressant, mais le Conseil d'Etat n'est pas du tout tenu d'en tenir compte ! Si vous aviez des choses à dire, vous aviez six mois pour le faire, maintenant les six mois sont passés !
Ce que vous dites maintenant, comme le relève M. Vanek, alimente le débat - et, au fond, c'est le débat qui importe parce qu'en réalité nous sommes tous d'accord sur la teneur de cette conception générale de l'énergie. Mais, au-delà d'avoir alimenté le débat, quelle portée pourra avoir votre vote dès lors qu'il intervient en dehors des délais ? Pour ma part, et je vous le dis parce que ceux qui participent aux travaux de la commission consultative le savent, j'ai donné pour instruction à l'administration, dès le mois de février, de travailler sur la «mise en musique» de la conception générale; en d'autres termes, de préparer le plan directeur de l'énergie de ce canton parce que je ne voulais pas encore attendre six mois que le Grand Conseil ait ce texte à son ordre du jour ! Et encore, aujourd'hui, il est en urgence ! Sinon, c'est au mois de décembre qu'il pourrait passer si l'on suivait l'ordre du jour usuel ! Ce dernier change systématiquement, parce que le bureau a des théories très fluctuantes sur la façon dont les ordres du jour se confectionnent...
Quoi qu'il en soit, j'ai dit dès le mois de février à l'administration: «Maintenant, vous faites le plan directeur !». Ce plan directeur est maintenant préparé; il a été soumis à la consultation des milieux intéressés; il fait l'objet des travaux de la commission consultative de l'énergie, qui s'est réunie une première fois cette semaine, qui en a étudié la moitié et qui en étudiera la seconde moitié la semaine prochaine...
Tout cela pour vous dire la chose suivante: si le Grand Conseil vote d'ici au moment où nous mettrons les textes sous presse, eh bien, par courtoisie à l'égard du Grand Conseil, je ne m'attacherai pas à ce délai de six mois ! Et l'on mettra, bien sûr, dans nos textes, celui accepté par le Grand Conseil. Si le Grand Conseil n'a rien voté du tout d'ici à la date à laquelle nous passerons à l'impression des documents le Grand Conseil, je considérerai qu'il a renoncé à faire usage, dans les délais prévus par la loi, de son droit de s'exprimer ! Et ce que l'on trouvera «exprimé», c'est le texte que vous avez reçu en septembre 2002 - dans sa teneur du mois de septembre 2002. Voilà pour le statut de ce débat !
Encore un mot à M. Barrillier - qui est peut-être dans cette salle, mais qu'en tout cas, je ne vois plus - quant à l'activisme du ScanE, parce que je devais en dire un mot. Monsieur Barrillier, j'ai bien reçu le message que vous me communiquez! Le ScanE doit être activiste et il doit être militant. Mais pour être au service des entreprises, qui sont actives dans le domaine des économies d'énergie - elles ont toutes cet engagement, que vous relevez, pour la politique de l'énergie du canton - et, bien sûr, les interventions du ScanE ne doivent pas être perçues comme étant pénalisantes. Il y a peut-être, quelque part, une mauvaise communication, et je rapporterai vos propos à mes collaborateurs. Soyez assuré, en tout cas, de l'esprit dans lequel ils comprennent leur mission: c'est une mission au service de notre collectivité, une mission de coup de main donné aux entreprises et assurément pas une mission visant, de quelque façon que ce soit, à les ralentir dans leurs projets !
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Si j'ai bien compris le conseiller d'Etat, toute la discussion que nous menons actuellement ne sert à plus rien, nous sommes hors délais et les jeux sont déjà faits.
Néanmoins, j'aimerais tout de même dire à M. Dupraz que nous ne sommes pas au Grand Conseil pour nous donner des leçons ou pour nous dire: «Toi, tu as pris ma pelle, alors, moi, je prends ton râteau, parce qu'on joue au sable»... Je trouve désolant de voir que M. Dupraz veut que l'on fasse fi de tout ce qui a été réalisé en commission, soit de l'excellent rapport de Mme Leuenberger, tout cela parce que M. Vanek l'embête! M. Vanek m'embête aussi, mais je trouve qu'il ne faut pas tous nous punir pour autant, nous toutes et tous qui avons travaillé en commission !
Monsieur Dupraz, de grâce, soyez quand même respectueux du travail effectué dans les commissions ! Nous avons fait de notre mieux, et j'aimerais bien qu'on adopte le rapport de Mme Leuenberger.
Je souhaiterais encore dire à Mme Berberat... (L'oratrice est interpellée.)Non, Monsieur Dupraz...
Une voix. John, t'écoutes quand on cause ?
Mme Maria Roth-Bernasconi. Monsieur Dupraz, j'ai dit tout à l'heure être d'accord avec vos propos, mais vous ne m'avez pas écoutée parce que vous étiez au téléphone ! (Remarque.)Non, vous ne m'avez pas écoutée ! J'ai dit que j'étais d'accord avec vous, que la manière dont le travail avait été accompli ne me plaisait pas non plus, et que c'était la raison pour laquelle le groupe socialiste soutenait le rapport de Mme Leuenberger avec les amendements acceptés en commission.
Par ailleurs, quand Mme Berberat dit qu'elle trouve scandaleux ou injuste qu'on ait écouté les gens de la Coordination énergie et pas ceux sur le terrain, j'aimerais juste lui signaler que des représentants des personnes sur le terrain, qui siègent dans cette commission, n'ont pas demandé ces auditions... Parce que je n'ai pas le souvenir qu'on ait refusé des auditions.
S'il vous plaît, respectez le travail des commissaires, qui le font sérieusement, et acceptez le rapport de Mme Leuenberger ! (Applaudissements.)
M. Bernard Annen (L). J'aimerais revenir sur les propos de M. Barrillier en ce qui concerne l'activisme. Je ne suis pas sûr, Monsieur le président - et vous m'avez tranquillisé par vos propos - que l'on puisse parler d'activisme. Mais lorsqu'on a une politique aussi active... Si vous m'écoutez, Monsieur le président - de même que M. Dupraz qui, s'il souhaite qu'on l'écoute, ferait bien d'écouter aussi ses collègues... C'est pour vous dire que, à vouloir appliquer de manière rigoureuse l'ensemble de cette politique, on s'aperçoit qu'il y a un débordement administratif qui devient de plus en plus lourd. On s'aperçoit en effet que, pour appliquer un ensemble de dispositions par rapport à l'acte de construire, il y a une pléthore de formulaires administratifs à remplir qui nous paraît exagérée.
Je ne remets pas votre politique énergétique en question, mais il serait souhaitable qu'une consultation ait lieu, plus proche des milieux qui, eux, doivent pouvoir appliquer votre politique de manière plus simple.
Et il faut aussi une égalité de traitement, Monsieur le président ! Je ne sais pas ce qui a été dit lors de la précédente séance du Grand Conseil, je n'étais pas là, cependant je suis particulièrement choqué de voir que des climatiseurs tout à fait illégaux ont été installés... (Protestations dans la salle. Applaudissements.)
Je dois dire, Monsieur le président, que je me suis opposé à l'anticlimatisation; je pense que la climatisation est nécessaire, mais elle doit être bien faite. On n'appelle plus cela de la «climatisation», c'est plutôt de la «réfrigération», c'est de la diminution de température, de la réutilisation de l'énergie, puisqu'on sait qu'en matière de climatisation on peut réutiliser l'énergie. Par conséquent, quand on parle de la performance des engins installés dans cette salle, c'est tout simplement nullissime !
Que l'on fasse donc quelque chose ! Et que les députés, qui n'arrêtent pas de nous donner des leçons en matière d'énergie, ne disent pas: «Pour notre petit confort, ici au Grand Conseil, parce qu'on s'échauffe et qu'on a chaud, on accepte ce genre d'installations...». Il y a donc deux poids et deux mesures ! Aujourd'hui, lorsqu'on se rend dans les hôpitaux, on voit comment certaines salles sont agencées, alors que, pour notre confort de petits députés, nous avons droit à des climatiseurs qui sont totalement interdits ! Ils ne sont même pas soumis à autorisation, ils sont interdis ! Cette interdiction est absurde. Vous devriez traiter cela sous forme de dérogation, Monsieur le président, car il ne peut pas y avoir deux poids deux mesures !
J'aimerais également savoir si, près de Champ-Dollon, où l'on a placé une cabane en bois assez grande pour accueillir des gens - et je suis en faveur d'un accueil à Champ-Dollon - une autorisation a effectivement été délivrée et si l'on n'a pas installé un peu hâtivement un cabanon qui, d'ailleurs, du point de vue des conditions de travail, pourrait inciter un certain nombre d'entre nous à poser des questions au Conseil d'Etat... Donc, avoir fait cela sans autorisation de construire me laisse un peu pantois !
Pour terminer, notre procédure de vote exige que nous prenions l'amendement le plus éloigné - vous n'êtes pas sans le savoir, Monsieur le président - or je vous suggère de faire voter l'amendement de M. Dupraz, et, s'il était accepté, c'est le projet, présenté par le Conseil d'Etat, qui serait, lui, adopté ipso facto. Ainsi, on arrêterait des débats pour le moins stériles en ce qui concerne certaines propositions de nos collègues.
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Je suis tout à fait d'accord sur la climatisation, à tel point que Sylvia Leuenberger et moi sommes intervenus, ce matin - parce qu'on est des partisans de l'action sur le terrain et moins des discours - afin de faire tirer la prise. C'est en effet quelque chose d'inadmissible... Nous nous en sommes préoccupés dès 8 h ce matin ! Il est vrai que pour ajuster des climatiseurs dans cette salle il est inutile de faire des discours, il suffit de tirer la prise !
Tout le monde s'échauffe, moi y compris, mais je déplore les conditions de ce débat et j'aimerais en relever les contrastes... On dit: «Moi, j'ai accepté ceci en commission, mais maintenant il y a l'autre qui vient avec des propositions, donc je retire...», etc. Bref! On présente un amendement général visant à annuler l'ensemble des travaux parlementaires sur cet objet...
Réexaminons les conditions qui ont prévalu aux débats concernant la conception générale de l'énergie en 1999, alors qu'il y avait une majorité alternative dans cette salle: il y avait un rapport de majorité, que j'ai défendu ici, et un rapport de minorité du parti libéral. En effet, le parti libéral, en souscrivant à la conception de manière globale, avait tenu à relever un certain nombre de sensibilités différentes. L'excellent député libéral Alain-Dominique Mauris a présenté un rapport de minorité - que j'ai en main - le 11 novembre 1999. Il était assis en face de moi - je crois encore le voir - et disait - je cite son rapport - qu'il avait été convenu «que ce rapport se limiterait à mentionner les nuances que le groupe libéral souhaitait apporter à la conception générale de l'énergie». M. Mauris est alors venu proposer quatre ou cinq amendements, mis au vote dans cette salle, même s'il ne s'était pas fait faute de les proposer aussi en commission - d'ailleurs vous y étiez, Madame Berberat. C'est comme cela qu'on travaille normalement sur ce type de documents dans ce parlement.
Apparemment cependant, lorsqu'il s'agit d'une majorité différente, lorsqu'il s'agit de positions qui ne sont pas celles du parti libéral et de sa sensibilité, mais d'une sensibilité plus radicale - radicalement antinucléaire, radicalement écologique - cela devient alors un crime de lèse-majesté de revenir en plénière avec des choses qui ont déjà fait l'objet de votes en commission !
On exige de moi un rapport... J'étais venu benoîtement, j'avais fait moins que le parti libéral, plus modeste... (Brouhaha.)Plus modeste ! J'étais venu avec quelques amendements pour manifester, comme le disait M. Mauris, «une certaine sensibilité» - je suis un être sensible... (Exclamations.)Et particulièrement sensible à la nécessité d'appliquer la constitution en matière nucléaire ! Eh bien, on m'a dit: «Ouh là là !, mais quelle horreur ! On se réunit le vendredi après-midi, et l'on ne peut que s'exprimer ou proposer des amendements sur lesquels tout le monde est d'accord et faire preuve d'unanimité...». Si c'est l'unanimité que vous voulez, il faut suspendre les travaux du parlement !
A part cela, notre président honoré, M. Lescaze - qui n'est pas là pour l'instant - m'a confirmé que cette lecture du règlement, consistant à dire que, dans des extraits, on ne pouvait pas présenter d'amendements, était absurde ! On le fait régulièrement, vous le faites depuis vos bancs ! C'était une mesure ad hoc parce qu'il y a deux poids et deux mesures, et je le déplore ! Mes amendements sont peut-être malvenus - et l'on peut ne pas être d'accord avec - mais ce ne sont pas juste des lubies de Pierre Vanek ! Ces amendements ont un contenu, ils reprennent les positions adoptées par la Coordination énergie, qui méritent mieux que le type de débat qui a lieu dans cette salle.
Je vous propose, Monsieur le président, de mettre ces amendements aux voix pour passer à la suite des débats, comme M. Lescaze l'avait proposé tout à l'heure.
Le président. Nous procéderons en plusieurs étapes. Nous allons voter sur l'amendement le plus éloigné qui est celui - comme vous l'avez rappelé, Monsieur Annen - de M. le député Dupraz. Si cet amendement est accepté, cela rendra tous les autres sans objet. Je veux, bien sûr, parler des amendements de M. Vanek, ainsi que de l'amendement du groupe UDC qui vient de vous être distribué.
Nous votons donc sur l'amendement de M. le député Dupraz qui propose d'amender la résolution - cela figure en page 12 du rapport - et de dire qu'il y a lieu d'approuver la conception générale en matière d'énergie...
Vous avez sollicité la parole, Madame la rapporteuse de majorité? Je vous la donne.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve), rapporteuse de majorité. Monsieur Dupraz, je trouve que ce que vous faites est scandaleux: vous niez un travail de commission par une simple mesure de rétorsion à l'égard de M. Vanek. Je pense qu'il faut accepter le travail tel qu'il est ressorti de commission, c'est la simple adoption d'une résolution avec quatre amendements mineurs, dont l'un d'eux corrige une erreur de la conception générale en matière d'énergie... Il faut arrêter ! Il ne s'agit que d'une bagarre entre vous deux, elle ne m'intéresse pas, Monsieur Vanek et Monsieur Dupraz, elle m'ennuie... (Applaudissements.)Alors, respectons ce que l'on a fait !
Le président. Nous sommes en procédure de vote, nous allons... (Le président est interpellé.)Non, Monsieur Dupraz, vous avez déjà parlé trois fois... (Remarques.)S'il vous plaît, Monsieur Dupraz... Et cela n'est pas la «dictature du président», Monsieur le député ! (Remarque de M. Dupraz.)Bien... Mais je vous donne la parole concernant la procédure de vote uniquement!
M. John Dupraz (R). Il ne s'agit pas, pour moi, de mettre en cause le travail de la commission, absolument pas ! Mais il s'agit de dénoncer la façon scandaleuse dont M. Vanek a perturbé et saboté les travaux de la commission et de ce parlement. (Applaudissements.)
Le président. Nous allons voter sur le premier amendement que vous aviez proposé, Monsieur le rapporteur de minorité. Il figure en page 3 de votre rapport, qui a maintenant été distribué à tout le monde.
Il s'agit donc, à la page 37, au point 6.3.1, dans le tableau, au troisième point de l'énumération, d'inclure une note de mise à jour indiquant: «La LME a été rejetée en votation populaire le 22 septembre 2002. L'obstacle évoqué au maintien de la quote-part d'électricité d'origine hydraulique tombe. Pour Genève, la politique énergétique doit viser à augmenter la production d'électricité hydraulique.»
Je mets cet amendement aux voix par vote électronique. Celles et ceux qui l'acceptent voteront oui, les autres voteront non, le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 10 oui et 14 abstentions.
Le président. Nous passons maintenant à l'amendement proposé par M. Catelain qui va vous l'expliquer brièvement. Ensuite, nous le mettrons aux voix. Enfin, nous reviendrons sur les amendements du rapporteur de minorité.
M. Gilbert Catelain (UDC). Un amendement est adopté en commission, qui prévoit de donner une information sur les risques liés à la production d'énergie électrique par des énergies fossiles, notamment, et nucléaires.
Or comme vous le savez, et pour reprendre l'argument développé par la gauche, récemment le peuple s'est clairement exprimé contre le moratoire lié à l'énergie nucléaire; par conséquent, le peuple est clairement au courant des risques. Sans compter que Genève ne dispose d'aucune centrale nucléaire sur son territoire et que le risque majeur de la production d'énergie serait plutôt lié à l'augmentation de la température et de la pollution de l'air.
C'est pourquoi il nous apparaît peu opportun de l'indiquer dans ce rapport, cela d'autant moins que la production d'énergie nucléaire n'a aucune incidence sur le réchauffement de la planète. Je vous prie d'accepter cet amendement.
Présidence de M. Bernard Lescaze
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Catelain. Si vous avez bien compris, il s'agit d'un sous-amendement de celui de M. Vanek.
Soit au point 12, page 48, page 6.4.2.4, sous la rubrique «Information au public», il s'agit de remplacer l'amendement adopté en commission par: «... des énergies renouvelables, ainsi que sur les impacts négatifs des sources d'énergie non renouvelables, en particulier les énergies fossiles.»
Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non.
Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 20 oui et 5 abstentions.
Le président. Je mets maintenant aux voix le deuxième amendement de M. Vanek par vote électronique. Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 11 oui et 8 abstentions.
Le président. Nous passons au troisième amendement, que vous trouvez à la page 4 du rapport. Monsieur le rapporteur de minorité vous avez la parole.
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. J'aurais aimé, selon votre suggestion initiale, et pour m'y conformer, faire un bref commentaire sur chacun des amendements avant qu'ils ne soient soumis au vote.
Vous connaissez sans doute le postulat No 3 qui figure en tête de toutes les conceptions de l'énergie adoptées depuis un certain nombre d'années. La première date de l'époque où c'était Jean-Philippe Maître - c'est dire si c'est loin - qui pilotait les questions énergétiques dans ce canton. Ce postulat indique une piste concernant les financements des mesures politiques énergétiques.
Ce que nous demandons par cet amendement, c'est que la concrétisation de ce postulat, qui n'est pas matérialisée dans ce canton - mais qui fait l'objet de mesures, par exemple dans le canton de Bâle - soit, non pas mise en oeuvre - parce que ce serait peut-être trop demander dans un premier temps - mais soit, après une dizaine d'années de présence au fronton de la conception générale de l'énergie, l'objet d'une étude des variantes possibles de mise en oeuvre de ce type de mesures de financements de la politique cantonale d'énergie.
Le président. Je mets donc aux voix cet amendement No 3 de M. Vanek.
Il s'agit, à la page 44, au point 6.4.2.1, d'ajouter dans la liste en trois points figurant en tête de chapitre:
«Présenter une étude et des variantes législatives possibles pour contribuer à une intensification des mesures de politique énergétique en application du postulat No 3 de la présente CGE.»
Celles et ceux qui l'acceptent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 10 oui et 11 abstentions.
Le président. Nous passons à l'amendement No 4. Monsieur Vanek, voudriez-vous ajouter quelque chose ?
M. Pierre Vanek(AdG), rapporteur de minorité. Je crois que le libellé de cet amendement est suffisamment explicite pour que chacun se détermine sur le fond, sans avoir besoin d'explications de ma part.
Le président. Je mets donc aux voix cet amendement No 4 de M. Vanek.
Il s'agit, à la page 45, au point 6.4.2.3, dans la liste des actions «En faveur de l'utilisation rationnelle de l'énergie», d'ajouter ce point:
«A) Tarification électrique
Veiller à ce que la tarification électrique pratiquée par les SIG, soumise à l'approbation du Conseil d'Etat, ne comporte aucun aspect de dégressivité contraire à l'encouragement de l'utilisation rationnelle de l'énergie électrique et à la promotion des énergies renouvelables, ceci pour toutes les catégories de consommateurs.»
Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 11 oui et 14 abstentions.
Le président. Nous passons à l'amendement No 5 de M. Vanek. Monsieur le rapporteur, voulez-vous prendre la parole ?
M. Pierre Vanek(AdG), rapporteur de minorité. Nous avons une conception générale de l'énergie qui met en avant, de manière très significative, certaines mesures et techniques d'économies d'énergie - notamment à l'Etat, où il y a un programme d'économies d'énergie.
L'élément qui a été rajouté par cet amendement est celui souligné dans le cadre - le reste je ne l'invente pas - à savoir d'associer les acteurs incontournables que sont le personnel, les utilisateurs des appareils «énergivores». C'est-à-dire de ne pas considérer cette question sous l'angle purement technique mais aussi sous l'angle humain. Cette idée est très importante, parce qu'avec la même infrastructure technique, mais selon la manière dont se comportent les femmes et les hommes appelés à s'en servir, cela peut changer les choses de manière assez significative en matière de consommation d'énergie.
L'exemple de M. Annen concernant la climatisation dans cette salle en témoigne. Si les gens dans cette salle, indépendamment du fait que les climatiseurs soient ici, ont l'intelligence de tirer la prise, cela entraînera une différence significative de consommation électrique à la fin de l'année.
C'est donc cette idée d'associer le personnel - qui, par ses méthodes de travail, peut aussi avoir un impact sur la consommation énergétique - que je propose de faire entrer dans la conception de l'énergie de ce canton.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve), rapporteuse de majorité. Effectivement, cet amendement, accepté sur le fond par l'ensemble de la commission, a finalement été rejeté parce que les membres ne voulaient pas associer les mots «technique» et «personnel». Et puisque cet amendement était intéressant sur le fond, on avait demandé que le programme d'économie d'énergie associe le personnel concerné dans une demande qui est mentionnée dans le rapport. C'est vrai que si l'on ajoute cela, c'est une question de forme; les gens s'en sont pris à la forme... Mais sur le fond, tout le monde avait été d'accord... On peut donc tout à fait accepter cet amendement, qui ne porte pas à conséquence et, de plus, révèle un aspect humain important.
Le président. Je mets donc aux voix l'amendement No 5 de M. Vanek. A la page 45, au point 6.4.2.3, sous «Programme d'économie d'énergie à l'Etat», il est ajouté en fin de phrase: «...en matière d'énergie, tant par des mesures techniques qu'en y associant le personnel.»
Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 36 oui contre 35 non et 2 abstentions.
Le président. Nous passons à l'amendement No 6, Monsieur Vanek, vous avez la parole.
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. C'est à la page 46, il s'agit d'une une question de fond. La formulation actuelle de la conception générale en matière d'énergie stipule: «Favoriser la réduction de la mobilité inutile et le développement d'une mobilité qui prend en compte non seulement les perfomances énergétiques mais aussi les sources d'énergies utilisées, en partenariat...», etc. Tout cela est bel et bon, mais, dans le fond, nous avons parlé ce matin du large accord concernant le tunnel du Mont-Blanc, des tomates, des «couches-culottes» et autres marchandises incongrues qui transitaient du nord au sud de manière abusive. La mobilité en soi n'est pas une fin, elle est à la disposition d'un certain nombre de... (Remarque.)Eh bien, justement de services pour les gens! De transports de marchandises, de transports de personnes, de transports nécessaires ! La mobilité n'est pas en soi une fin positive, et il faut la réduire quand elle est inutile.
Dans cet amendement, je ne propose pas seulement de favoriser la mobilité, mais de «Favoriser la réduction de la mobilité inutile et le développement d'une mobilité qui prenne en compte...». Donc simplement, d'agir dans ce sens, d'un point de vue général, dans ce canton, à travers les mesures d'aménagement du territoire, d'urbanisme, et à travers toutes les moyens de fournir des services de manière localisée.
C'est aussi un débat que nous avons eu à l'occasion de la problématique de fermeture des bureaux de poste dans les quartiers, pour les concentrer dans les grands centres commerciaux. Et si quelqu'un doit prendre sa voiture pour aller à la poste envoyer une lettre, c'est une mobilité inutile ! Poster une lettre, c'est important, mais si cela peut être fait dans une poste de quartier, c'est bien mieux ! Cela l'est tant sur le plan du service à la population que sur le plan écologique: c'est une organisation intelligente d'un certain nombre de prestations proposées à la société dans le domaine des services publics.
D'ailleurs, dans d'autres domaines, c'est aussi le cas: dans celui du commerce, j'entendais tout à l'heure quelqu'un déplorer la fermeture des épiceries et boucheries de quartiers... On peut le regretter, pas seulement sur le plan de la convivialité, mais aussi du point de vue de la mobilité accrue à quatre roues, qui est responsable de la consommation d'énergie fossile que M. Catelain évoquait tout à l'heure et qui résulte, entre autres, de la concentration du commerce dans les grands centres commerciaux.
Alors, évidemment que c'est une conception cantonale, mais c'est juste cette idée-là que j'aimerais faire passer ! Ensuite, on «se crêpera le chignon» sur l'utilité ou non des mesures concrètes. Mais on ne peut pas simplement laisser passer quelque chose qui précise: «On favorise le développement d'une mobilité...» ! Il faut avoir le courage d'admettre qu'il n'y a pas de bien absolu en matière de mobilité et que nous devons - et c'est le libellé exact de l'amendement que je propose - «Favoriser la réduction de la mobilité inutile...» et, bien sûr, favoriser «le développement d'une mobilité qui prend en compte, non seulement les performances énergétiques mais aussi les sources d'énergies utilisées...» etc. D'ailleurs c'est la suite du texte de base, qui insiste «...sur le partenariat avec les responsables de l'aménagement du territoire, de l'organisation des transports et de la circulation.»
M. Claude Aubert (L). Je ne ferai pas un amendement, mais j'aurais voulu quand même, au lieu de parler de mobilité, de parler un peu de la cohérence.
Je félicite, bien évidemment, nos Winkelried de la climatisation d'avoir pensé, aujourd'hui, alors que la canicule est terminée, à supprimer la climatisation, ce qui est un acte de courage... (Rires.)Mais je signale en plus que la climatisation fonctionne et que, de surcroît, on ouvre les fenêtres...
Une voix. Bravo !
M. Claude Aubert. Par conséquent, dans la cohérence de nos débats, dans la cohérence de la pensée et dans la cohérence de l'action, on est nul ! (Applaudissements.)
Le président. Sur ces belles paroles - et en tous les cas, à la tribune de la présidence, nous n'avons ni climatisation ni aération... Nous allons mettre aux voix le sixième amendement de M. Vanek.
Page 46, point 6.4.2.3, au point «Mobilité», la phrase commencera comme suit: «Favoriser la réduction de la mobilité inutile et le développement d'une mobilité...».
Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront, le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 11 oui et 13 abstentions.
Le président. Nous passons à l'amendement No 7 qui est à la dernière page de votre rapport.
Monsieur le rapporteur de minorité, avez-vous un commentaire ? Non ? Vous oubliez votre amendement.. C'est qu'il n'est pas si important...
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je vous remercie infiniment de m'avoir rappelé à mes devoirs ! Effectivement, il ne s'agit là que de l'application d'un devoir constitutionnel. C'est un combat qui dure depuis un certain temps et qui a fait des progrès significatifs.
L'amendement demande explicitement, au point «Courant nucléaire», d'«éliminer le pourcentage résiduel d'électricité d'origine nucléaire distribuée dans le canton.» Cette idée ne revient pas à remplacer cette électricité par de l'électricité biologique «cousue-main», mais simplement à éliminer la part subsistante d'électricité nucléaire pour être cohérent avec l'article 160D de notre Constitution. Cet article est issu, comme chacun le sait, de l'initiative «L'énergie, notre affaire», qui est le document de base sur lequel se fonde cette conception générale de l'énergie.
Alors, beaucoup de progrès ont été faits! Les Services industriels se sont attachés à fournir, dans le cadre de leur programme «Les Vitales des SIG», une offre d'énergie renouvelable indigène provenant de nouvelles sources d'énergie renouvelable. A l'inverse de toutes sortes de programmes, dans lesquels on considère que les énergies renouvelables certifiées telles sont offertes à des clientèles de «niches», soit de petits secteurs, aujourd'hui l'énergie de base dans ce canton est l'énergie hydraulique, et cela représente un progrès majeur que je salue. Il reste cependant un petit pourcentage, qualifié de «résiduel», d'énergie nucléaire qui est distribuée. Le caractère limité de ce pourcentage d'énergie, d'un côté, et le fait, de l'autre, que la loi sur le marché de l'électricité - loi par laquelle nous avons commencé nos débats et qui autoriserait n'importe quel marchand d'électricité nucléaire de venir «fourguer» sa marchandise dans le canton - a été rejetée nous permettent de répondre à cette attente. Nous le pouvons relativement facilement, contrairement à d'autres objectifs de la conception générale de l'énergie qui sont plus ambitieux, qui vont exiger des efforts et de l'activisme. On en a discuté tout à l'heure, des efforts très sérieux de la part des services de M. Cramer devront être fournis.
Je signale qu'en mai les Services industriels de Genève ont indiqué, dans un communiqué qui avait trait aux débats autour de ces questions énergétiques, que: «SIG a le potentiel d'approvisionner la population genevoise dans sa totalité en énergie électrique 100% renouvelable et certifiée, si la clientèle le souhaite, à court et à moyen terme.»
Or je crois qu'au nom des citoyens, pour lesquels nous sommes ici et dont nous exécutons les volontés, et au nom de la constitution, qui prévoit cette distance par rapport au nucléaire, nous pouvons légitimement demander aux services industriels de Genève de faire ce qu'ils se vantent de pouvoir faire dans des communiqués de presse. C'est un très bon communiqué, mais ce sera encore mieux quand les choses se traduiront dans les faits.
Je vous propose, sur ce point, de faire abstraction des querelles qui nous divisent, de considérer le fond de la question et de vous prononcer sur celle-ci en votant oui à cet amendement.
Le président. Monsieur Catelain, vous aviez quelque chose à dire ? Mais rapidement...
M. Gilbert Catelain (UDC). Je rappelle deux choses par rapport à cet amendement: d'une part que le peuple suisse a refusé, dans sa majorité, le moratoire sur l'énergie nucléaire... (Remarques.)Il serait donc aberrant de contrecarrer un vote populaire au travers d'une loi cantonale ! D'autre part, et comme vous le dites, ce communiqué de presse ne mentionne que le court et le moyen terme, et non pas le long terme.
Nous sommes dans une période où les catastrophes écologiques sont de plus en plus nombreuses. Je n'en citerai qu'une: c'est la tempête de 1999; la ville de Berne a pu être fournie en électricité uniquement par la centrale nucléaire de Mühleberg, et pour cause: le réseau français d'électricité avait été fortement endommagé par la tempête.
Il serait donc, à mon avis, aberrant de se priver d'une source d'approvisionnement d'énergie dans des circonstances totalement exceptionnelles.
M. René Desbaillets (L). Excusez-moi de prolonger ces discours, mais, Monsieur Vanek, vous enfoncez des portes ouvertes ! En effet, comme moi, vous avez reçu ce rapport; vous l'avez lu; vous avez participé aux discussions. A la page 46, on peut lire: «En faveur du développement des énergies renouvelables...». Il y a toute une liste en faveur des énergies renouvelables ! Par conséquent, enfoncer des portes ouvertes pour éliminer une part du nucléaire sert plutôt à vous faire de la publicité à l'approche des élections de cet automne ! (Protestations.)
Et puisqu'on est dans la publicité, je m'aperçois qu'on va supprimer les climatiseurs dont on a parlé auparavant... Alors, je propose de les racheter d'occasion; je pourrai ainsi tempérer les chaudes ardeurs qu'il y a dans le carnotzet des Abeilles d'or...
Le président. Je mets aux voix l'amendement No 7 de M. Vanek, à la page 47, au point 6.4.2.3, sous «Courant nucélaire». En voici la teneur:
«Eliminer le pourcentage résiduel d'électricité d'origine nucléaire distribuée dans le canton.»
Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront, le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 36 oui contre 34 non.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote final sur le rapport divers 449-A.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le président. Nous procédons maintenant au vote concernant la résolution ainsi amendée au chiffre 7 par M. Vanek. Celles et ceux qui approuvent la résolution voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront. Le vote est lancé.
Mise aux voix, la résolution 462 est adoptée par 42 contre 28 non.
Suite du débat
M. Jacques Follonier (R), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'ose espérer que, ce soir, nous arriverons à terminer ce débat que nous avons entamé il y a fort longtemps et qui, à mon sens, nécessite quand même qu'on se penche un peu plus longuement dessus.
Depuis quelque temps, on parle beaucoup des notes, et c'est assez étrange de constater que les gens qui veulent les voir disparaître prétendent régulièrement que celles-ci ne sont pas importantes et que, finalement, elles ne sont pas le point essentiel de ces réformes. J'aimerais vous faire comprendre aujourd'hui à quel point les notes sont importantes. Pour cela, il faut se souvenir que la réforme a été mise sur pied dans le seul but d'enlever les notes. Vous me direz que cela paraît étrange; pourtant, c'est exactement ce qu'on a fait.
On nous a fait croire que la réforme et la suppression des notes avaient des vertus pédagogiques importantes, alors qu'en réalité elles ont une vertu socio-économique. Pourquoi ? On s'est aperçu, il y a quelques temps - pas mal d'années, je dois dire - que, tant que l'école ne posait aucun problème au niveau social et qu'il n'y avait pas de très grand clivage, on n'avait pas de réelle difficulté à attribuer une note. Au bout d'un certain temps, les clivages ont été si importants qu'il a bien fallu rééquilibrer les choses pour ne pas donner la sensation aux élèves qui n'atteignaient pas un certain niveau de ne pas être à la hauteur. Voilà la raison sociale de la suppression des notes !
La raison économique est la plus importante: au bout d'un certain temps, on s'est aperçu que la question du redoublement constituait un grand problème. Les redoublements ont fini par causer un tel encombrement dans nos classes que ce n'était plus supportable économiquement. Pour pouvoir éviter ce problème, ainsi que celui de la socialisation, il n'y avait qu'une seule solution: supprimer les notes.
Mais avant de prendre cette décision, nous avions choisi une solution intermédiaire, qui a duré quelques années, et nous avions simplement expliqué - le corps enseignant l'avait parfaitement compris - qu'il fallait rééquilibrer les notes à des valeurs inférieures, de manière que, artificiellement, les barèmes remontent et qu'on ait l'impression d'avoir une école toujours à la hauteur de ce qu'on souhaitait pour Genève. Ce système a des limites: tant qu'on peut aller de l'avant, on peut cacher une partie de ce défaut, mais il arrive un moment où ce n'est plus suffisant. Quand nous sommes arrivés à ce moment-là, nous avons suggéré à l'ensemble de la population que la meilleure réforme consistait à supprimer les notes, de sorte qu'on n'ait plus de contrôle et, surtout, plus de redoublements. Mais je pense qu'on est en train de faire une grave erreur !
Nous voyons dans les nouvelles réformes en marche, et notamment en celle du cycle de quatre ans dans le cadre du cycle moyen, à quel point on part vers des dangers énormes ! J'en veux pour preuve le fait que, concernant le redoublement, une troisième mesure a été prise, et cela devient de plus en plus grave: le redoublement n'existera plus, puisqu'on donnera des appuis dans l'année suivante, voire durant le cycle suivant. Mais il y aura bien un moment fatidique, un moment charnière ! Tout le monde le sait, ce sera l'année de 6P. Que fera-t-on à ce moment-là? On se retrouvera tout aussi démunis que nous l'avons été lorsqu'on a artificiellement changé la valeur des notes.
Je crois que ce n'est pas dans cette direction que nous devons aller. Aujourd'hui, une réforme doit être faite, mais une refonte complète, passant par une compréhension de l'école et par la mise en place d'un système éducatif qui soit non seulement cohérent, mais aussi efficace. Si nous ne sommes pas capables de le faire, c'est peut-être de notre faute, mais fermer les yeux en disant que les notes sont sans intérêt, je crois que ce n'est pas acceptable.
Tous ceux qui ont eu l'occasion d'avoir en main ce petit livret - je le tiens à disposition de ceux qui voudraient le voir, car beaucoup de gens en parlent sans l'avoir vu ! - savent que les évaluations faites aujourd'hui dans le cycle moyen se résument à «satisfaisant», «très satisfaisant» ou «peu satisfaisant». Est-on «peu» ou «très peu» satisfaisant ? Si l'on est «satisfaisant», l'est-on plus que celui qui a moins bien travaillé ? Tout cela est très compliqué... Je pense que si l'on veut instaurer des évaluations, on peut imaginer qu'elles temporisent un peu la notation. Mais je ne pense pas qu'un élève puisse être content de s'entendre dire qu'il est «très satisfaisant», «satisfaisant» ou «peu satisfaisant». Comme disent certains, on peut avoir de la peine à comprendre le système de notes, mais je pense qu'il est plus efficace.
En dehors de cela, j'aimerais bien que tout ne se cristallise pas autour des notes, même si c'est un point très important aujourd'hui.
Il est essentiel de se rendre compte que des réformes ont eu lieu, que certaines sont en cours, que d'autres arriveront, et qu'on a tous le droit d'être au courant. On a le droit d'y participer aussi et, surtout, je crois qu'on a au moins le devoir de demander une évaluation de ces réformes. Je crois en effet qu'on ne peut pas exiger d'un département d'avoir la science infuse et de faire ce travail à lui seul ! J'en veux pour preuve une des réformes, peut-être pas les plus importantes mais assez spectaculaires, et qui est en train de passer complètement inaperçue: vous savez tous - je n'en doute pas - que cette rentrée des cycles d'orientation verra arriver pour les classes de neuvième la fameuse note du regroupement B à 4,8. Cette note signifie simplement que tout élève qui, en fin de neuvième, n'aura pas 4,8 de moyenne dans le cadre du regroupement B, n'aura pratiquement plus aucune porte de sortie en-dehors des classes d'accueil ou des classes spécialisées. C'est un énorme problème, et je suis scandalisé qu'on ait commencé l'école alors qu'à ma connaissance les élèves de neuvième n'ont même pas été avertis de ce qui les attend en fin d'année !
Quand on voit cette manière de faire par rapport aux réformes, je pense qu'il est grand temps que notre parlement se mêle aussi de cela et demande quelques explications avant qu'on aille trop loin et qu'on dérive peut-être de manière trop spectaculaire. Je vous remercie.
Le président. Je rappelle aux rapporteurs qu'ils sont soumis à la règle des sept minutes. Oui, Monsieur Follonier, vous regardez votre montre... Je confirme que vous avez dépassé ce temps-là ! Monsieur Christian Brunier, vous avez la parole en qualité de rapporteur de minorité.
M. Christian Brunier (S), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'on est en plein paradoxe ! Et en écoutant M. Follonier, on replonge encore plus dans les paradoxes.
Premièrement, M. Follonier nous a répété une chose qui apparaît dans son rapport ainsi que dans la motion des radicaux, soit que l'école est «mauvaise» aujourd'hui et «insatisfaisante» - ce sont les termes utilisés. Or pour corriger le tir, il nous recommande de présenter un moratoire sur les réformes. Excusez-moi, mais lorsqu'on constate que quelque chose est mauvais, on ne donne en tout cas pas comme remède de ne rien changer ! Au contraire, M. Follonier devrait dire qu'il faut tout changer, si l'école est aussi mauvaise qu'il le prétend. C'est le premier paradoxe.
Le deuxième est le suivant: les radicaux s'élèvent aujourd'hui contre les réformes, mais, lorsqu'on leur demandait en commission de quelles réformes ils parlaient, ils étaient bien empruntés pour répondre. Alors, je me suis amusé à considérer les derniers votes sur l'école qui ont eu lieu dans ce parlement. Il n'y en a pas beaucoup, parce qu'il y a relativement peu de chose à ce sujet dans les lois et parce que ce parlement se prononce relativement rarement sur l'école.
Toutes les réformes que nous avons votées ont été approuvées par les radicaux. J'en cite quelques-unes: pour le moratoire sur l'introduction de la nouvelle maturité, la minorité de gauche demandait d'avoir une année supplémentaire afin de mettre en place cette nouvelle maturité imposée au niveau fédéral, tout simplement parce que les collèges n'étaient pas prêts pour implanter cette nouvelle matu... (Remarque.)Refus des radicaux ! Concernant la diminution des moyens de manière linéaire, sous le régime monocolore, je n'ai jamais entendu les radicaux s'élever une seule fois contre le démantèlement de l'école ! (Protestations.)Vous avez applaudi à chaque fois !
Ce n'est pas une réforme, Monsieur Kunz ? Excusez-moi, mais, si vous démantelez l'école, vous ne pouvez pas venir vous plaindre ensuite du fait que l'école soit mauvaise ! L'école est devenue mauvaise parce que vous avez voté des coupes linéaires aveugles dans un domaine essentiel pour le développement de la société. Aujourd'hui, nous sommes en train de le payer très cher, et vous en êtes responsables !
Sur la nouvelle grille horaire du cycle d'orientation que vous - vous ! -avez condamnée dernièrement en commission, il faut dire que vous l'aviez approuvée ! Il y avait des motions de la gauche prévoyant que cette nouvelle grille horaire apporterait des dommages importants aux cycles: vous avez, quant à vous, applaudi cette nouvelle grille !
Sur la réforme du primaire, la gauche a toujours dit qu'il s'agissait pédagogiquement d'une réforme intéressante, mais qu'il fallait y mettre des conditions. Nous voulions des objectifs clairs à cette réforme! Or aujourd'hui, les objectifs sur la réforme du primaire ne sont toujours pas clairs. Nous voulions une formation des enseignants pour qu'ils comprennent ce qu'était cette réforme, mais il y a encore de nombreux professeurs qui ne savent pas l'expliquer, parce qu'ils n'ont pas reçu de formation adéquate.
Nous avons requis des moyens supplémentaires, car - vous le savez très bien - toute réforme en nécessite, du moins à son lancement. Et nous avons demandé que les réformes soient régulièrement évaluées, parce que même une bonne réforme a peu de chances de réussir tout de suite. Pendant les années où nous avons commencé à développer cette réforme dans les écoles primaires, la gauche émettait constamment des préoccupations; les radicaux n'ont pas bougé une seule fois.
Alors, on vous entend aujourd'hui, vous êtes catastrophés ! Je trouve d'ailleurs que vous salissez l'école d'une manière un peu excessive. Et à force de «vomir» sur l'école, il ne faut pas vous étonner si les gens ne la considèrent plus comme une institution ! Or il est primordial qu'elle soit considérée comme une institution importante.
Et M. Follonier est extraordinaire aujourd'hui ! Il nous dit qu'il ne faut pas que le débat se cristallise autour des notes... Il a raison. Mais le problème, c'est que vous ne menez le débat qu'autour des notes, Monsieur Follonier ! Cela est lamentable !Les notes sont un moyen, et non un but de la réforme. Il n'y a aucune raison qu'on occulte aujourd'hui toute la problématique pédagogique pour ne s'occuper que des notes. Pour ce qui est des notes, venons-en ! Vous êtes aussi en plein paradoxe: vous dites qu'il faut réintroduire les notes, alors qu'elle n'ont même pas disparu de la plupart des écoles; vous dites que les manques de l'école genevoise mis en évidence par l'étude PISA sont liés aux réformes... (Protestations.)Vous ne l'avez pas dit, mais c'est écrit dans votre motion initiale ! (Remarque de M. Follonier.)Si vous le contestez, vous n'êtes pas solidaire de votre parti ! (M. Follonier tente de répliquer.)Laissez-moi parler !
Le président. Monsieur Follonier, vous vous taisez !
M. Christian Brunier. Monsieur Follonier, vous êtes membre du parti qui a déposé cette motion. Alors, désolidarisez-vous-en officiellement maintenant, je n'attends que ça ! Cette motion recommande de réagir à l'étude PISA...
Le président. Monsieur Brunier, adressez-vous au président ou à l'ensemble du Grand Conseil !
M. Christian Brunier. Je m'adresse à vous, Monsieur le président ! Votre parti, Monsieur le président - ça tombe bien ! - disait que l'étude PISA montrait que les réformes n'étaient pas à la hauteur des ambitions initiales, alors que l'étude PISA a évalué un grand nombre d'écoles qui n'ont jamais été soumises à cette réforme. Vous citez en exemple l'étude PISA, mais vous oubliez de dire que le pays en tête de l'évaluation, c'est la Finlande, que la Finlande travaille en classes hétérogènes, et qu'elle n'a pas de notes durant tout le primaire. Cela ne l'empêche pas d'être le pays qui, à première vue, réussit le mieux à l'évaluation PISA. (Remarque.)Ce sont les chiffres de l'étude ! Il faut la lire.
On ne peut pas prendre dans une étude ce qui nous arrange et rejeter ce qui ne nous convient pas ! C'est vrai qu'aujourd'hui une évaluation claire de la réforme est nécessaire, qu'il faut des moyens pour réussir cette réforme, mais ce n'est pas en arrêtant tout qu'on améliorera cette école prétendument si mauvaise ! Ce n'est pas un point de vue que nous partageons sur les bancs de gauche. Nous pensons qu'il y a des choses à améliorer, mais, lorsque on dit que le niveau baisse, on oublie que chaque génération a cette impression... Je crois néanmoins que le niveau culturel de notre jeunesse est plus élevé que celui que nous avions.
Votre motion n'est pas bonne, elle rejette, entre autres, tous les aspects de sociabilisation de l'école. On ne peut pas instituer une école où il n'y a que de l'acquisistion des connaissances. L'acquisition des connaissances est un point important - que nous avons d'ailleurs toujours soutenu en défendant la loi sur l'instruction publique - mais nous pensons aussi que l'apprentissage de vivre en société est tout aussi important, et on le voit ces derniers temps. Donc, nous croyons que les notes ne doivent pas être un dogme, car il y a moult systèmes d'évaluation tout aussi performants, et même plus ! Une député libérale a l'habitude de dire qu'un 4 de moyenne ne veut pas dire grand chose; puisqu'un enfant qui a eu «2» au premier trimestre, «4» au deuxième et «6» au dernier, aura 4 de moyenne ! Mais ce ne sera pas un «4» équivalent à celui qui a eu «6» au premier trimestre, «4» au deuxième et «2» au dernier... D'un côté, nous avons un enfant dont le niveau baisse sensiblement et, de l'autre, un enfant qui se développe et qui est en pleine progression. C'est dire si l'évaluation par les notes est très restrictive, tandis qu'une évaluation formative apporte certainement plus aux enfants, à leurs parents et aux enseignants.
Le président. Je demande instamment aux orateurs de contenir leurs flots d'éloquence. Vous aussi, Monsieur Brunier, vous avez largement dépassé votre temps de parole ! J'interromprai les prochains orateur. Le Bureau a décidé de clore la liste des intervenants, car nous ne voulons pas donner des suites et des suites à ces débats... Monsieur Barrillier, vous avez la parole.
M. Gabriel Barrillier (R). Je me suis déjà exprimé lors de la première partie de ce débat, mais j'aimerais quand même mettre l'accent sur certains points s'agissant de cette motion. La première chose que j'aimerais dire, c'est que, grâce aux radicaux, nous avons un débat démocratique sur l'école. Même le chef du département qui s'est beaucoup exprimé depuis quelques jours - rentrée oblige ! - a accepté ce débat démocratique autour de l'école, en reconnaissant sa nécessité. C'est le peuple qui, en dernier recours, décidera, et c'est au pouvoir politique de lui préparer le terrain. Ce débat doit avoir lieu puisqu'une initiative qui a récolté 28 000 signatures - presque 30 000 ! - a été déposée. Nous sommes dans une démocratie semi-directe, nous devons donc débattre de ce problème.
Deuxièmement, nous entendons revaloriser l'institution ! Vous n'avez pas lu notre motion, parce que, manifestement, vous êtes aveuglé, Monsieur Brunier ! Nous voulons revaloriser cette institution qui a perdu des plumes, qui n'est plus crédible. Nous voulons revaloriser la position des enseignants qui demandent cette revalorisation, puisqu'ils sont une multitude à avoir signé l'initiative ARLE.
Troisièmement - écoutez-moi, Monsieur Brunier ! - nous avons, pas plus tard que la semaine dernière, passé au crible les chiffres actuels de l'entrée en apprentissage dans ce canton. C'est une catastrophe ! Je ne m'en réjouis pas, et le président du département connaît ce problème, lui qui a bourlingué avec moi dans les organes tripartites qui suivent cette question, essaient de revaloriser l'institution, cherchent à améliorer le passage entre les formations de base et les formations professionnelles. Il m'a confirmé qu'on allait travailler pour améliorer cela.
Monsieur Brunier, la rentrée est catastrophique ! On a un problème, et ce n'est pas les notes ! C'est un problème de préparation de toute cette population de jeunes filles et de jeunes gens qui va être paumée, Monsieur Brunier ! (Protestations de M. Brunier.)
Quand vous dites que le niveau est meilleur, je vous réponds que non, et j'en suis désolé, le niveau n'est pas meilleur ! Ce n'est pas une critique contre ces jeunes gens et ces jeunes filles, puisque c'est nous qui devons leur apporter les armes et les outils pour pouvoir s'adapter et entrer en apprentissage correctement, la tête haute. Ce n'est pas de la théorie, ça ! (Remarques. Le président agite la cloche.)
Les invites qui ont été travaillées en commission indiquent très clairement qu'il faut procéder à l'évaluation régulière des réformes entreprises, ceci avant de les poursuivre ou de les étendre. C'est bien un moratoire qu'on demande, même si ce terme n'apparaît pas dans la motion ! Qu'est-ce qu'un moratoire ? On examine, on regarde et, ensuite, on décide si l'on arrête, si l'on corrige ou si l'on continue. Ce moratoire est nécessaire, parce que tout le monde le demande, les enseignants les premiers - j'en connais beaucoup - et surtout en primaire, veulent un moratoire. Vous l'avez dit: les enseignants ne savent pas quelle direction prendre, parce que le travail a été mal fait, que la réforme a été mal introduite.
En dernier lieu, je m'adresserai au chef du département, chez qui on a pu déceler ces derniers temps une certaine compréhension du problème posé. Le chef du département est un homme intelligent, il a vu qu'une volonté populaire ressortait de ce débat. Mais je vous le dis, Monsieur le président du département, il faut qu'il y ait une volonté réelle, et que vos déclarations d'examiner et d'évaluer se traduisent dans les faits ! Il ne faudrait pas que ce ne soit qu'une contorsion politique.
Mme Janine Hagmann (L). D'abord, Monsieur le président, j'aimerais juste faire une petite remarque: il me paraît un peu dommage que, pour une fois qu'on traite d'un sujet pédagogique, vous nous demandiez à tous d'être très brefs, sous prétexte que nous sommes très pressés. On a aussi repris, avant la pause et avant de parler de cette question, un sujet qui avait été traité il y a deux mois, et vous n'avez pourtant pas interrompu les gens. Il me semble donc que, pour une fois qu'on parle de pédagogie, il faut que les personnes puissent dire ce qu'elles ont sur le coeur, car c'est vraiment très important.
Quand on considère l'impact médiatique qu'a eu ce sujet avec la rentrée, les interviews et les émissions que le chef du département a accordées, on se rend bien compte que c'est un thème actuellement chaud et qu'il faut qu'on en parle dans cette enceinte.
On ne va effectivement pas refaire le débat déjà tenu il y a deux mois, mais je vous rappelle que le groupe libéral accepte les invites de cette motion telles qu'elles ont été écrites en commission, et rien d'autre. Les invites de cette motion demandent une école de qualité, une école valable qui permette de développer tous les savoirs. Nous soutenons ces invites et vous demandons de les accepter sans aucune modification. A partir de là, n'oubliez pas que le chef du département de l'instruction publique a un grand mandat: il doit préparer un contre-projet. Cela nous a été annoncé - cela nous a été promis ! Ce contre-projet se servira vraisemblablement de ces invites s'il y a une nette majorité pour leur mise en place.
Quand je dis que le groupe libéral soutient les invites de cette motion, j'aimerais bien qu'on ne me fasse pas dire ce que je ne dis pas, car il ne s'agit pas d'un soutien inconditionnel à l'initiative d'ARLE. L'initiative d'ARLE, bien qu'elle ait récolté 28 000 signatures - et je l'ai déjà dit dans cette enceinte - a tout de même un côté populiste. Elle traite de sujets que les gens ne connaissent pas bien, alors que la pédagogie est devenue une science. C'est une science enseignée à l'université et l'on ne peut pas, dès lors, la traiter comme n'importe quel sujet, mais on doit faire appel aux savoirs de professeurs qui ont mené des recherches depuis plusieurs années dans ce domaine.
Vous aviez dit qu'on ne focaliserait pas le débat sur les notes, mais c'est tout de même ce qui s'est passé ! J'ai vite repris mes notes de commission pour aujourd'hui... Que disait le professeur Bronckart - qui est quand même une sommité reconnue internationalement - sur les notes ? Il disait: «La note ne doit pas être un raccourci pratique qui n'exprime pas grand-chose sur les détails et les raisons de sa fixation. L'évaluation est quelque chose de très exigeant.»
De plus, quand ARLE fixe tout le débat sur la note, dites-moi de quelle note il s'agit ! D'une note moyenne ? M. Brunier m'a citée: vous savez parfaitement que je suis personnellement tout à fait opposée à une note moyenne ! Pourquoi le groupe libéral a-t-il accepté cette motion et l'invite qui demande qu'une note soit rajoutée ? Je l'ai dit il y a deux mois: on n'a jamais raison tout seul. Si 28 000 personnes demandent à être rassurées par une note, je pense qu'il faut qu'une note soit rajoutée aux commentaires. Pour moi, la note n'est cependant pas la traduction principale de l'évaluation, ce sont les commentaires qui comptent le plus.
Monsieur Follonier, ce n'est pas tout à fait correct de dire que, dans les carnets que vous aviez en main, les élèves n'étaient évalués que par «satisfaisant», «très satisfaisant» ou «peu satisfaisant»... Je vois régulièrement les carnets de mes petits-enfants lorsqu'ils les reçoivent, et je vous assure que, grâce au travail que les maîtres et maîtresses effectuent par leurs commentaires - qui ont beaucoup plus d'importance que le «satisfaisant» ou «insatisfaisant» - vous découvrez des données sur vos propres gosses, que vous n'aviez pas découvertes vous-mêmes. Ces évaluations sont donc très importantes et il faut les maintenir.
La formation et la sélection des élèves font évidemment partie des tâches principales de l'évaluation scolaire, mais les deux opérations poursuivent des buts différents. Les fonctions de l'évaluation des élèves doivent donc être adaptées à leurs buts, et les mêmes moyens ne peuvent convenir à des objectifs différents. Je pense que le département a actuellement une énorme mission, celle d'entendre et de convaincre. C'est vrai qu'une inquiétude s'est révélée, même très clairement. Cependant - et je crois que M. Beer l'a dit à l'émission «Mise au point» dimanche soir - le plus important maintenant est de rétablir la confiance. Imaginez ces parents qui se demandent où nous en sommes, où en sont leurs enfants, ce qui va et ce qui ne va pas !
C'est la raison pour laquelle nous attendons beaucoup, Monsieur le président, du contre-projet que vous allez présenter, et nous espérons que la commission de l'enseignement pourra s'exprimer à ce sujet.
Je vous rappelle quant à moi que le groupe libéral n'a jamais été en faveur du moratoire - ce n'est pas ce qui est indiqué dans les invites. 40 % des écoles primaires genevoises sont en rénovation, car les maîtres et maîtresses ont décidé eux-mêmes de mettre sur pied des projets d'école; on ne peut pas stopper un tel processus ! Rendez-vous compte de l'effort fourni par les enseignants ! Vous imaginez quelle attitude ils auraient maintenant ? Comment seraient reconnus leurs efforts ? Par-dessus le marché, ces projets d'école ont été décidés librement, c'est là une chose très importante.
Enfin - et je vais clore ici, car le temps passe - je crois qu'il est faux de faire croire à la population qu'il existe une solution simple. Ce n'est pas vrai ! Mais il y a une chose très importante, Monsieur le chef du département, une chose qui n'a peut-être pas été bien faite jusqu'à maintenant: c'est le langage employé. Dans l'émission de «Mise au point» de dimanche, le commentateur a commencé par une anecdote que j'ai trouvée très significative. Il a dit à M. Beer avoir rencontré quelqu'un qui avait vu une maîtresse d'école qui, le premier jour d'école en classe primaire, avait demandé aux enfants: «Sortez vos instruments scripteurs !»... Moi, cela ne me fait pas rire ! Pourquoi ne pas dire: «Sortez vos plumes !» ? C'est donc peut-être ici qu'il y a quelque chose à améliorer.
Il faut que nous soyons compréhensibles, que notre discours - à nous, les politiques - soit clair, comme doit l'être la position du département vis-à-vis de la population. Pour cela, nous pouvons ce soir accepter les invites telles quelles - puisque, dans une motion, il n'y a que les invites qui comptent - car chaque invite, si vous l'analysez, demande une école de qualité.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai trouvé l'intervention de Mme Hagmann très censée. On sent qu'elle a travaillé sur le terrain, qu'elle connaît le sujet dont elle parle, et je suis ravie d'entendre que le parti libéral estime aussi que de concentrer le débat autour du problème des notes est réducteur.
Vous savez comme moi qu'aujourd'hui les gens sont sans cesse évalués: ils le sont dans leur travail, des évaluations sont faites dans la fonction publique, et même en commission judiciaire nous demandons que soient évalués les policiers... Voulez-vous leur attribuer des notes ? Voulez-vous mettre des notes aux infirmières ? Je crois que c'est extrêmement réducteur, et j'aimerais qu'on dépasse cette question des notes.
Concernant les apprentissages, je peux dire, Monsieur Barrillier, que je connais bien ce problème, puisque je travaille pour promouvoir une bonne formation professionnelle. La question ne se résume pas à l'école: le fait est qu'aujourd'hui toutes les entreprises qui engagent des apprentis ne veulent que les meilleurs et demandent des compétences scolaires. Vous pouvez mettre n'importe quel système scolaire sur pied, chacun n'est pas un intellectuel ! Il y a des gens qui savent bien travailler avec leurs mains, et je trouverais beaucoup plus important de valoriser ou de revaloriser certains métiers, certains travaux, également par de meilleurs salaires. (Protestations.)Par exemple, pourquoi un licencié universitaire gagne-t-il le double d'une infirmière ? Il y a là des questions à se poser.
En dernier lieu, je répète ce que j'ai dit lors du dernier débat, puisqu'il était un peu noyé parmi d'autres: je trouve que la question scolaire rejoint celle de la politique sociale. J'ai un peu de peine aussi à comprendre le parti radical qui veut révolutionner... ou plutôt arrêter les réformes à l'école, alors que c'est ce même parti qui coupe dans les budgets de la formation, tant au niveau fédéral que cantonal.
Si des parents n'arrivent plus aujourd'hui à satisfaire aux nombreuses tâches qui leur incombent pour élever leurs enfants ou effectuer ce qu'on aimerait qu'ils fassent, c'est que ces parents n'arrivent plus à concilier une vie professionnelle de plus en plus stressante avec une vie de famille harmonieuse. Et il ne faut pas l'oublier: l'école reflète aussi notre société. C'est pourquoi j'aimerais que ce débat soit mené de manière beaucoup plus large, et qu'on inclue aussi les réflexions sur notre société et sur notre comportement.
Nous tous et toutes sommes passés par cette école, qu'elle ait été bonne ou mauvaise... Je n'ai pas suivi les écoles genevoises, mais je trouve que mes enfants ont été bien formés ici. Par contre, quand je vois parfois le comportement de certains députés dans cette enceinte, je me pose des questions sur l'école d'antan. J'espère que l'école d'aujourd'hui fera en sorte que nos enfants, lorsqu'ils seront dans cette salle comme députés, se comporteront autrement.
M. Guy Mettan (PDC). Dans le prolongement de ce qu'a dit Mme Hagmann, j'aimerais féliciter les trop rares députés qui suivent ce débat, car je suis à chaque fois choqué par le peu d'intérêt manifesté dans cette enceinte alors que nous devons traiter de questions scolaires qui sont, comme on l'a déjà relevé, très importantes.
On sait que l'école genevoise est sous pression; on sait que les parents des 67 000 élèves de nos écoles sont inquiets; on sait que les milliers d'enseignants qui ont la charge de ces élèves sont, eux aussi, perturbés - comme on a eu l'occasion de le constater lorsque nous avons, l'année dernière, étudié la motion 1192 qui traitait du malaise des enseignants.
Par ailleurs, le succès phénoménal de l'initiative d'ARLE, tout comme la conférence de presse de la rentrée du chef du département, M. Beer, ont tour à tour souligné l'ampleur des difficultés rencontrées par notre école. Dans ce contexte difficile, je crois - et je suis même sûr - que nous devons accepter cette motion telle quelle, sans changement. En effet, je tiens à saluer le gros effort fourni par les motionnaires radicaux qui ont accepté, durant les travaux de la commission, de modifier considérablement leur motion initiale pour formuler des invites qui me paraissent tout à fait raisonnables telles qu'elles nous sont proposées aujourd'hui. Cela vaut pour les trois invites que la gauche nous suggère d'amender, et que je préconise de garder telles quelles.
La première invite ne fait que rappeler la mission principale de l'école. Quelle est cette mission ? Elle consiste à donner aux élèves les moyens d'acquérir les connaissances qui leur serviront durant leur vie future. La loi sur l'instruction scolaire ne dit pas autre chose ! Dès lors, je n'arrive pas à comprendre pourquoi on voudrait supprimer cette invite qui ne fait que rappeler la nécessité, la mission, le rôle fondamental de notre école. Est-ce à dire que vous ne voulez plus que l'école serve à acquérir les connaissances indispensables à la vie de tout un chacun ?
La deuxième invite nous convient également telle quelle, car elle souligne l'un des gros problèmes de notre institution scolaire, qui est perturbée, déstabilisée par la «réformite» aiguë qui la frappe depuis des années.
Je crois qu'il est donc bon que notre Grand Conseil puisse connaître le résultat des réformes en cours avant qu'on en entame de nouvelles.
Enfin, la cinquième invite - on l'a déjà dit - concerne le problème des notes. Personnellement, je ne suis pas un fanatique de la note, mais je crois que la confusion et le désarroi des parents et des élèves à ce propos sont si extrêmes qu'il faut maintenir cette invite telle quelle. Elle va, selon moi, dans le bon sens, et est d'autant plus nécessaire qu'elle se dirige dans la voie souhaitée par M. Beer, du moins est-ce ce que j'ai cru comprendre dans sa réponse à la presse sur le succès phénoménal de l'initiative d'ARLE. M. Beer me corrigera, mais il a indiqué que le DIP allait très probablement déposer un contre-projet à l'initiative d'ARLE. Pour ma part, ce contre-projet ne peut aller que dans le sens d'un rétablissement des notes. Et je tiens à souligner ici l'ouverture constructive proposée par M. Beer. Je soutiens en effet tout projet qui consisterait à sauver la rénovation, tout en réintroduisant les notes. Je sais que c'est possible !
Durant les discussions que j'ai eues cet été avec certains pédagogues qui étaient à l'origine du projet de rénovation, j'ai appris qu'un certain nombre d'entre eux étaient également favorables au maintien des notes, tout en soutenant le projet de rénovation. Cela veut dire qu'il est possible de maintenir la rénovation tout en ayant des notes ! Malheureusement, les rénovateurs les plus extrémistes ont gagné et obtenu la suppression des notes.
Je crois donc que c'est dans ce sens que nous devons travailler. L'invite en question ouvre une piste et montre la voie à suivre. Je ne peux que vous recommander, au nom du PDC, de la maintenir telle quelle.
M. François Thion (S). J'étais déjà intervenu lors de notre premier débat et j'avais bien entendu rappeler l'importance des connaissances à l'école, mais aussi tout ce qu'il y avait dans l'article 4 de la loi sur l'instruction publique. Je ne vais pas revenir là-dessus maintenant, puisqu'on continue le débat. J'aimerais juste intervenir sur l'affaire des notes.
Je vous rappelle qu'en 1910 l'école primaire à Genève attribuait dix notes tous les mois dans douze disciplines, ce qui faisait un total de 120 notes à la fin de l'année. Depuis, les choses ont évolué et, à partir des années 90, à l'école primaire genevoise, on n'avait plus que cinq disciplines notées une fois par trimestre, ce qui donnait une quinzaine de notes à la fin de l'année.
La note est-elle fiable ? La note veut-elle dire quelque chose ? On a tous l'impression que oui. Mais je vous ai déjà dit aussi que si l'on met vingt premiers de classe dans la même classe, ils n'auront pas tous des «6». C'est assez incroyable, mais c'est la réalité - des expériences ont été faites - il y aura toutes sortes de notes, comme dans n'importe quelle autre classe. C'est comme si la classification des élèves entre eux était socialement importante.
Autre chose: j'ai là un article du «Temps», signé par Pierre-Philippe Bugnard qui est chargé d'enseignement sur la didactique de l'histoire à l'université de Fribourg, et qui donne lui aussi des exemples sur la fiabilité des notes. Son article s'intitule: «Evoquer la fiabilité de la note scolaire pour en justifier le retour est une imposture». Il cite un exemple concret: on a donné une même composition à corriger à dix-huit enseignants différents. Le résultat fut que l'un a mis un «3», deux ont mis «3,5», quatre ont mis un «4», un a mis un «4,5», cinq ont mis un «5», quatre un «5,5» et un a mis un «6». Il s'agissait d'un même travail, corrigé par des professionnels. Et on voit cela tous les jours ! Il n'est donc pas certain que la note soit fiable. D'autres exemples encore sont donnés dans cet article: la première épreuve corrigée est souvent mieux notée que la dernière; une épreuve qui en suit deux particulièrement mauvaises sera mieux notée que ce qu'elle vaut, à cause des mauvaises copies précédentes. Tout cela montre qu'il faut remettre en question l'aspect scientifique de la note, même si l'on continue à l'attribuer.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Mesdames et Messieurs les députés, à la lecture de cette motion et de ce rapport, j'avoue éprouver un petit malaise. En lisant les invites, je vois que je pourrais être parfaitement d'accord avec un certain nombre d'entre elles, particulièrement avec celle qui demande au Conseil d'Etat de faire appliquer les articles de la loi sur l'instruction publique, et notamment l'article 4. Je ne peux qu'approuver cette invite, même si, avec cette dernière, on enfonce une porte ouverte. De même, l'invite qui veut favoriser la collaboration entre enseignants, parents et autres me semble digne d'approbation. Néanmoins, comme cette motion fait suite à une initiative qui a récolté beaucoup de signatures, je pense qu'elle correspond avant tout à une tentative de récupération politicienne - je l'ai déjà dit la dernière fois.
En réalité, beaucoup d'invites ne sont qu'une sorte d'alibi pour en faire passer une en particulier, celle de la réintroduction des notes. Vous le savez - et M. Thion vient de vous en donner des exemples - les notes sont très subjectives. Je suis moi-même enseignant, je sais ce que c'est: quand un élève n'a rien écrit sur sa copie et qu'on lui attribue un «1», est-ce 1, 0 ou 2 ? Ce sont des directives que les enseignants reçoivent, et tout cela reste subjectif.
A mon avis, qu'il y ait des notes ou qu'il n'y en ait pas, les problèmes éducatifs de l'école publique comme privée ne vont pas disparaître. Les véritables problèmes de l'école publique dans le système éducatif d'aujourd'hui sont essentiellement engendrés par un système économique entièrement voué au culte du profit: le profit d'une minorité qui s'enrichit d'une manière scandaleuse au détriment de l'immense majorité de la population ! La violence, le chômage, la précarité, la pauvreté ont des conséquences: ils engendrent des problèmes au niveau de l'école publique. Ces problèmes-là, que vous mettiez des notes ou que vous les supprimiez, ne changeront pas ! Je tiens le pari que, même si l'initiative en question récoltait 99 % des voix, les problèmes de l'école publique ne disparaîtraient pas pour autant. Ce qui me choque, c'est que certains groupes politiques de droite parlent de la démotivation des enseignants, mais qu'ils oublient le rôle qu'ils ont joué lorsque, pendant des années, ils ont dénigré les enseignants et sapé le moral de tout le personnel de notre système éducatif. Aujourd'hui, ils viennent nous dire que les enseignants sont démotivés... Evidemment ! Cela est dû à un manque de moyens, mais aussi au fait qu'au niveau économique, on prône l'individualisme, on développe le culte du profit, on casse le social et on engendre des problèmes qui détruisent des pans entiers de notre société ! Des familles complètes sont dans la misère justement à cause de ce système économique. Puis, on vient nous dire que c'est la suppression des notes qui en est responsable, et qu'il suffit de réintroduire les notes pour que l'école reparte sur de très bonnes bases et devienne formidable. Mais tout cela est du vent ! Vous n'allez rien résoudre avec le problème des notes, car ce n'est pas là qu'est le véritable problème. Vous êtes les complices d'un système qui détruit notre système éducatif... (Protestations.)D'ailleurs, les modèles que certains d'entre vous prônent, tels que le système anglo-saxon, me font croire qu'on a beaucoup à craindre pour le futur.
Le président. Le dernier orateur va s'exprimer, puis nous mettrons aux voix les amendements. Je crois que tout le monde a présenté son point de vue. Nous n'allons pas poursuivre, car il ne s'agit en définitive que d'une simple motion.
Monsieur Pierre Kunz, vous avez la parole !
M. Pierre Kunz (R). Si, Mesdames et Messieurs les députés, comme moi, on vient du terrain... (Rires et protestations.)Ah, mais si ! J'ai été élève, j'ai été enseignant et je suis père d'élève. Je considère que je viens du terrain, Mesdames Roth-Bernasconi et Hagmann !
Si, comme moi, donc, on vient du terrain, on peut dire - je crois - que le refus par la gauche de la motion radicale est fondé d'une part sur l'affirmation que les réformes engagées sont bonnes et doivent être poursuivies comme si de rien n'était et, d'autre part, sur l'affirmation que ces réformes sont largement un échec en termes pédagogiques puisque l'école genevoise ne dispose pas de suffisamment de moyens humains et financiers. Dans ces arguments, il y a une double fiction qu'il faut dénoncer, Mesdames et Messieurs !
La première, c'est celle qui consiste à faire croire - comme le font MM. Brunier et Mouhanna - que l'amélioration de l'école passe nécessairement par l'accroissement des moyens, alors qu'en réalité l'amélioration de l'école passe par une pause, par un moratoire, autrement dit par une réflexion sur ce qui a été fait, parfois - il faut l'admettre - de manière inconsidérée depuis une trentaine d'années. Et c'est ce que demande la motion radicale.
La deuxième fiction, c'est de faire accroire - comme MM. Mouhanna et Brunier - que les mauvais résultats scolaires des élèves genevois, en tout cas sur un plan comparatif, sont dus à l'insuffisance des moyens financiers et humains - je l'ai déjà dit - mis à disposition de cette école. Mais cela est faux, Mesdames et Messieurs ! En témoignent, d'une part, le fait que l'école genevoise est celle la plus chère du pays, et, d'autre part, le fait qu'en vingt ans, alors que notre inflation n'a été que de 52 %, le budget de l'instruction publique a quasiment triplé ! (Protestations.)Et la population n'a augmenté que de 18 %, Monsieur Leuenberger !
Mesdames et Messieurs, les arguments invoqués par la gauche pour refuser la motion radicale sont donc sans fondement ! Ils ne font en fait que masquer un malaise grandissant, un doute qui s'approfondit dans les rangs de cette gauche quant à l'adéquation des théories pédagogiques qu'ils ont défendues pendant toutes ces décennies et ce que veut la population genevoise.
Le président. Comme nous avons annoncé que la liste était close depuis fort longtemps, nous passons maintenant aux votes sur les amendements.
J'ai un premier amendement de MM. et Mme Thion, Brunier, Roth-Bernasconi et Apothéloz. Ils demandent purement et simplement la suppression de la première invite. (M. Brunier demande la parole.)Non, Monsieur Brunier, nous n'y arriverons pas ! Cela n'est pas raisonnable, vous voulez empoisonner la vie de ce Grand Conseil !
L'amendement est parfaitement clair. Je suis conscient de ce qui se passe: vous voulez relancer le débat, or vous savez très bien qu'à 17 h nous avons autre chose... Dans ces conditions, je vais lever la séance, nous reprendrons à 17 h 15 et remettrons ceci à la Saint-Glinglin. Vous avez longuement parlé de l'amendement de suppression...
Soit vous acceptez que nous votions maintenant sur ces amendements, de façon que la motion soit adoptée ou non, soit nous reprenons le débat ultérieurement. Quoi qu'il arrive, je lève la séance à 17 h puisque nous reprenons à 17 h 15 pour les prestations de serment. Je l'ai dit, j'ai demandé à chacun d'être bref, et personne n'écoute !
M. Christian Brunier (S), rapporteur de minorité ad interim. Monsieur le président, je croyais que l'amendement était clair, mais, étant donné ce que nous avons entendu autour ici, il semble que ce n'est pas le cas. Je vous en explique les raisons.
Aussi bien l'Alliance de gauche que les démocrates-chrétiens ont dit que cet amendement ne leur posait pas de problème, puisqu'il rappelait l'article 4 de la loi sur l'instruction publique. Si ce n'était que cela, il est clair que nous soutiendrions cette proposition, puisque nous tenons nous aussi à cet article 4 qui rappelle le bien-fondé de l'école publique. Néanmoins, ce n'est pas ce que nous avons entendu en commission ! En commission, on a rappelé que l'article 4 avait deux axes: un axe sur la socialisation des élèves et un autre sur l'acquisition des connaissances. A gauche, nous considérons que ces deux axes sont impératifs pour le développement des élèves. Visiblement, les auteurs de la motion estiment qu'il ne faut mettre l'accent que sur l'acquisition des connaissances, et laisser un peu tomber la socialisation... (Protestations.)C'est en tout cas ce qui s'est dit en commission.
De plus, il est inutile que le Grand Conseil rédige des motions pour rappeler qu'il faut appliquer la loi, puisque la loi existe ! Nous pensons donc que cet alinéa n'est pas clair et qu'il faut soit l'abolir, soit le clarifier. Comme les auteurs de la motion ne l'ont pas clarifié, nous proposons de l'abolir.
Le président. Je mets aux voix la suppression de la première invite.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 27 oui et 7 abstentions.
Le président. La première invite reste donc telle qu'elle est. Nous avons maintenant une proposition de modification de la deuxième invite, de Mmes et M. Brunier, de Haller et Wisard. Voici le texte: «A procéder à l'évaluation régulière des réformes entreprises dans l'enseignement primaire, secondaire et postobligatoire et à en informer le Grand Conseil.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 38 oui.
Le président. Il n'y a pas de proposition de modification à la troisième et à la quatrième invites, contrairement à la cinquième invite, où l'amendement suivant est présenté par Mmes et MM. Brunier, Apotheloz, Roth-Bernasconi, Wisard, Thion, de Haller et Sylvia Leuenberger: «A mettre en place un système d'évaluation régulier, complémentaire aux évaluations semestrielles.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 39 non contre 38 oui.
Le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la motion, qui n'est pour l'instant pas modifiée, M. le conseiller d'Etat Charles Beer a la parole.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. La particularité de notre travail d'aujourd'hui est de traiter une motion, la motion 1442, qui, en tant que telle, a son histoire et a vu l'actualité récente lui donner une dimension particulière. Les événements s'étant croisés durant les travaux en cours, il y a eu les influences respectives de ces derniers entre la motion et l'initiative.
S'agissant de la motion elle-même, son titre est relativement clair. Elle parle de moratoire sur les expériences pédagogiques. On ne parle pas ici de réformes ou d'une «rénovation», mais bien d'expériences pédagogiques, ce qui dégage malgré tout, il faut le relever, un relent... disons «quelque peu négatif» pour éviter tout terme passionnel.
Les libéraux et les libérales en particulier ne se sont pas trompés dans ce débat, puisqu'il a très longtemps été question en commission, sauf erreur de ma part, de savoir dans quelle mesure il était possible de modifier le titre ou les considérants de la motion, puisqu'il pouvait y avoir ici et là des traces qui rendaient le vote de certaines invites, jugées raisonnables par certains et par certaines, insupportable.
Quoi qu'il en soit, le travail a démarré autour de la question des réformes. La commission s'est très rapidement attachée à savoir combien de réformes existaient, quelles étaient ces réformes, par qui elles avaient été initiées. En réalité, le département de l'instruction publique a rendu, à l'occasion des travaux de la commission, un tableau des réformes en cours. Je regrette un peu que le débat, qui a pris une certaine ampleur en commission, une certaine hauteur autour de la difficulté de la réforme de notre système d'enseignement, se soit finalement réduit par les effets de la collision avec l'actualité - sans doute pas hasardeuse, mais collision malgré tout - qui a donné une dimension toute particulière au travail sur la motion. Elle s'est finalement, on peut dire les choses assez clairement, figée sur la question de la note et de l'article 4, plus précisément sur la question de la transmission des connaissances.
Cela dit, on essaye aujourd'hui, en fonction de l'initiative déposée, de refaire un peu l'histoire, celle des réformes et de la rénovation du primaire. Que l'on ne se trompe pas, Monsieur Follonier ! La rénovation du primaire a pratiquement dix ans. Elle n'a pas été lancée dans la précipitation; elle n'a pas répondu à une volonté de diminution des dépenses budgétaires; elle n'a pas non plus été le fait d'un complot de pédagogistes, comme certains les nomment. Non ! Cette rénovation du primaire s'est intéressée à une problématique, qui perdure malgré la politique du département, celle de l'échec scolaire. Ce n'est donc pas aujourd'hui, en voulant préserver une histoire toute particulière, réductrice et erronée, que l'on pourra véritablement appréhender les défis auxquels est confrontée notre école.
La problématique de notre école, c'est qu'elle est confrontée, comme tout système scolaire, au débat démocratique qui veut lui assigner un certain nombre de missions, par exemple celle du changement, de l'adaptation à l'avenir et, en même temps, celle de la fidélité aux traditions. On attend de l'école un pari impossible que la société, dans aucune de ses institutions, n'est capable véritablement d'assurer. C'est normal, parce que cette école doit pouvoir à la fois donner des références au-delà d'une génération - l'école représente un pacte entre les générations - et elle doit, en même temps, être capable de se projeter dans l'avenir, de se remettre en question, de modifier ses moyens d'intervention. Aujourd'hui, notre population est manifestement - et c'est partout le cas en Europe ou dans le monde - désécurisée. Pourquoi ? Parce que l'économie, les institutions, les pays, les familles n'existent plus comme par le passé. Hier, lorsque j'étais enfant à l'école - c'est plutôt avant-hier ! - nos parents, mes parents, avaient l'assurance qu'il y aurait, quoi qu'il arrive, une insertion dans la société pour leurs enfants. Aujourd'hui, il y a une incertiude, parce que l'on doute de l'avenir, de l'économie, de la patrie; on doute de l'ensemble de nos institutions ! Il est normal que ce malaise pèse sur l'école, qui est justement sensée préparer la nouvelle génération à pouvoir se confronter à l'avenir.
Quels problèmes réels se posent aujourd'hui ? Il y a eu - et vous avez raison, quelque part, dans un certain nombre de travaux - une multitude de réformes qui n'ont pas toutes la même source, puisque certaines sont d'origine fédérale, d'autres sont intercantonales et d'autres encore spécifiquement cantonales. C'est dire qu'il y a une difficulté actuellement, pour notre système scolaire, à assurer une cohérence entre les différentes réformes, de manière à garantir que le parcours des élèves soit justement la première des choses prise en considération pour modifier le système. J'en appelle ainsi à plus de sens dans le lien entre les réformes, de façon à assurer une crédibilité de l'ensemble.
Or partout, la réforme en tant que telle ne repose pas sur un seul aspect: l'évaluation est, bien sûr, au centre des questions, mais il y a aussi la pédagogie, c'est-à-dire le moyen par lequel on apprend, et les plans d'études.
On nous demande pratiquement tous les jours de nouvelles disciplines dans les grilles-horaires et les objectifs d'apprentissage... Voici un exemple qui incarne parfaitement cette question de stabilité et d'avenir: on nous demande - et vous vous apprêtiez à nous le demander, ce qui est d'ailleurs fait en partie - d'introduire l'enseignement d'Internet à l'école, de manière à préparer les jeunes générations aux défis technologiques... Or on nous dit en même temps que les enfants ne savent plus rien de l'histoire religieuse et qu'il faut leur transmettre cette connaissance, ce qui est également juste - c'est d'ailleurs une motion écologiste, à laquelle j'ai promis de répondre d'ici la fin de l'année. Même si elle a été déposée voici dix ans, ce sera chose faite ! Eh bien, c'est dire que les attentes vis-à-vis d'une grille-horaire sont multiples! Parce que l'on demande aussi l'éducation citoyenne; on demande d'apprendre les langues, dont le français, et de posséder les mathématiques... C'est dire la complexité du débat!
Ce que je déplore aujourd'hui dans le débat démocratique naissant, c'est sa réduction à la question de la note. Je le déplore tout simplement parce que l'on en fait l'objet essentiel de l'attente, comme si la note avait une dimension universelle ! J'ai rappelé à certaines occasions, ce que je me permets de refaire ici, que la première loi sur l'instruction publique obligatoire de la France, voulait, en 1833, en donnant la responsabilité aux communes de construire des bâtiments pour les écoles primaires, évaluer les élèves, épreuve par épreuve, avec les dimensions «Très bien» , «Bien», «Moyen» et «Mauvais». C'était donc une appréciation, en langage politique, moins correcte que ce à quoi vous arrivez; on est passé de 4 à 3. Mais on voit finalement que la roue tourne ! Il faut donc souligner l'aspect relatif de cette question de l'évaluation. Et il faut aussi, toutefois, relever la volonté, lorsqu'on peut la mesurer, d'un certain attachement à la question de la note dont il ne s'agit pas de faire fi ou de la balayer tout simplement d'un revers de la main.
Ce que j'aimerais soulever enfin, c'est la question de la motion elle-même. Cette dernière a une tendance malheureusement réductrice. Je dis «réductrice» parce qu'on l'oppose principalement - à l'article 4, lorsqu'on évoque les connaissances - à l'autre dimension qui vise à intégrer et à préparer des citoyens à pouvoir non seulement évoluer économiquement, mais aussi socialement. La fonction de l'article 4, dans sa complexité, nous donne un cadre. C'est ce qui protège l'école aussi des volontés de l'économie de tel ou tel groupement politique; c'est ce qui lui donne un cadre lui permettant de durer d'une génération à l'autre.
J'en arrive à la conclusion, Monsieur le président, et je reviens à l'esprit de ce qu'est la motion elle-même. Vous vous êtes demandé à propos de notre école - et j'estime que c'est une bonne chose - si elle était ou non de qualité... Je rends hommage à cette discussion et au fait que l'on ait lancé le débat, toutefois j'aimerais préciser ceci: je me réjouis de recevoir cette motion. Pourquoi ? Parce qu'elle sera l'occasion pour le département, dans le délai imparti par la loi, c'est-à-dire six mois - et je prendrai le maximum d'engagements de façon que ce délai soit plus court - de vous fournir un panorama complet - que les différents rapports n'ont pas forcément donné - à savoir des différentes réformes, des enjeux, des niveaux, et leur donner une intelligibilité et un sens. C'est ce que j'appelle aussi le débat de la stabilisation, du renforcement et des ajustements de notre système de formation. C'est ce que je nomme, non pas «moratoire», Monsieur Follonier, mais «consolidation», parce qu'il serait absurde aujourd'hui de s'arrêter au milieu du gué !
En fin de compte, j'aimerais dire à Mme Hagmann, parce qu'elle a évoqué le contre-projet, que ce dernier est le fait du Grand Conseil. Ainsi, notre débat - que le rapport du département vous aidera à préparer - vous permettra tout simplement d'assurer la discussion en tant que telle sur le contre-projet, son orientation et ses dimensions. Mais j'aimerais insister sur cet élément. J'ai rappelé tout à l'heure que l'école avait un certain nombre de missions, elles tournent autour du pacte républicain, et ce n'est pas rien. Et le pacte républicain concernant l'école, c'est, bien entendu, transmettre des connaissances; c'est préparer l'avenir, c'est doter notre système d'une capacité de réussite ! Mais c'est aussi permettre l'intégration: l'intégration économique, l'intégration sociale, l'intégration de toutes celles et ceux qui vivent aujourd'hui dans notre canton. C'est encore permettre de donner une actualité au lien entre les générations, parce qu'il est indispensable qu'une personne âgée sache, malgré tout, de quoi l'on parle à l'école ! Il y a donc une nécessité de changement et, à la fois, de stabilité.
L'enjeu est le suivant aujourd'hui : cherchons-nous à réactualiser le pacte républicain autour de l'école ? Si c'est oui, nous aurons l'occasion de travailler sereinement autour d'un contre-projet. S'il s'agit simplement d'attiser les craintes et les peurs, je crains pour ma part que l'on soit à côté de l'enjeu. Et la société attend de nous que l'on redonne un minimum de confiance dans notre système, parce que c'est tout simplement le garant de la réussite et de l'intégration dans notre société ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur le renvoi de la motion, telle qu'elle est issue de commission, au Conseil d'Etat. Monsieur Kunz demande l'appel nominal, et il est soutenu. Le vote est lancé.
Mise aux voix à l'appel nominal, la motion 1442 est adoptée par 44 oui contre 39 non.
Le président. Avant que nous ne levions notre séance, je signale que la commission législative, présidée par M. Luscher, se réunit rapidement pour désigner un avocat dans une affaire de recours. Nous reprendrons nos travaux avec le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement à 17 h 30.
La séance est levée à 17 h 15.